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Full text of "L'Année géographique"

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L'ANNÉE 

GÉOGRAPHIQUE 


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PUBLICATIONS  DU  MÊME  AUTEUR 

POUR    PARAITRE    EN     1873,     A     LA     LIBRAIRIE    HACHETTE 


Dlettoniialre  anlTersel  de  géographie  modeme,  contenant, 
sur  un  plan  entièrement  neuf;,  la  description  de  toutes  les  contrées  et 
de  tous  les  peuples^  et  la  nomenclature  de  toutes  les  localités  notables 
du  globe,  d'après  les  documents  officiels,  les  relations  anciennes  et 
récentes,  et  tous  les  travaux  modernes  de  topographie,  d'ethnogra- 
phie, d'archéologie,  etc.;  à  l'usage  du  commerce,  de  l'industrie,  des 
publicistes,  et  de  toutes  les  études  historiques,  économiques  et  na- 
turelles. Deux  volumes  à  2  colonnes,  format  gr.  in-octavo  Jésus,  de 
plus  de  2000  pages  chacun. 

L'ouvrage  sera  publié  en  fascicules  de  16  feuilles  (320  pages). 

Atlas  Universel  de   Géographie  moderne,  ancienne  et  du  moyen 
âge,  en  95  feuilles,  format  grand-jésus  (55  centim.  sur  66),  gravé  sur 
cuivre  par  les  meilleurs  artistes,  avec  un  texte  analytique  et  critique. 
Sera  publié  par  livraisons  de  3  à  4  cartes. 

Atlas  Manuel  de  géographie  classique,  ancienne  et  moderne,  à  Tu- 
sage  des  collèges,  des  écoles  secondaires  et  spéciales,  du  commerce 
et  des  gens  du  monde.  100  feuilles  grades  sur  cuivre,  forniat  raisin 
(45  centim.  sur  55).  \ 

Sera  publié  par  fascicules  à  l'asage  dés  classes,  conformément  aux 
programmes. 

Histoire  de  la  Géographie;  un  gros  volume  in-S**  accompagné  d'un 
atlas  historique  spécial  de  11  cartes. 
En  juillet  ou  août. 


Typographie  Lahure,  rue  de  Fleurus,  9,  à  Paris. 

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L'ANNÉE 

GÉOGRAPHIQUE 

REVUE   ANNUELLE 

ÛES  VOYAGES  DE  TERRE  ET  DE  MER 

DES  EXPLORATIONS,  MISSIONS,  RELATIONS  ET  PUBLICATIONS  DIVERSES 

RELATIVES  AUX  SCIENCES  GÉOGRAPHIQUES  ET  ETHNOGRAPHIQUES 


M.  :pVIEN  DE  SAINT-MARTIN 

Président  honoraire  de  la  Société  de  géographie 

Membre   correspondant    de    TÂcadémie    royale    de   Berlin 

des  Sociétés  géographiques  de  Saint-Pétersbourg,  de  Berlin,  de  Vienne,  de  Darnittadt 

(le  Dresde,  de  Genève,  de  Rio  de  Janeiro,  de  Leipzig,  de  New» York 

Membre  correspondant  de  la  Société  des  Antiquaires  de  l'Ouest 

de  la  Société  d'émulation  du  Uonbs,  etc.,  etc. 

Chevalier  de  la    é^ion  d'bonnvnr 


ONZIÈME  ANNÉE  (1872) 


PARIS 

LIBRAIRIE   HACHETTE  ET  C" 

BOULEVARD  SAINT-GERHAIN,  79 

1873 

Droits  d«  propriété  et  de  traduction  réservés 


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'iH'^0/ 


JUL  e  1883  ^ 

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Voici  le  dixième  volume  de  notre  Année  Géographique, 
volume  qui  serait  le  onzième  si  les  lugubres  événe- 
ments de  1870  n'y  avaient  apporté  une  interruption 
forcée*  Après  cette  période  déjà  longue,  j'éprouve  le 
besoin  de  remercier  ici  publiquement  tous  ceux  —  et 
le  nombre  en  est  très-grand,  je  puis  le  dire  —  dont  j'ai 
reçu  la  bienveillante  approbation.  Même  en  un  temps 
d'indifférence  trop  générale,  les  encouragements  n'ont 
pas  manqué  à  cette  œuvre  modeste,  poursuivie  à  tra- 
vers d'autres  travaux  considérables  dont  la  publication 
est  maintenant  prochaine.  Aujourd'hui  qu'une  heu- 
reuse réaction  se  manifeste  dans  les  dispositions  gé- 
nérales, et  que  le  Gouvernement  lui-même  se  montre 
disposé  à  seconder  un  mouvement  de  rénovation  si 
longtemps  attendu,  je  n'en  poursuivrai  ma  tâche  qu'a- 
vec plus  de  cœur,  A'ayant  d'autre  but  que  d'être  utile 
et  d'apporter  ma  part  à  l'œuvre  commune. 

10  mars  1873. 


l'an,  géogr.  XI.  a 

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TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES 

NOTE  «DPPUÉKENTAJBB  , XV-XXXII 

AFRIQUE. 

Pages. 

I.       Afrique  tropicale  da  Sud.  Livingstone 1 

Bibliographie Ibid, 

§  1.  Les  courses  et  les  itinéraires  de  Liringstone  dans 
la  région  du  Tanganîka,  depuis  le  commencement  de 
Texpédition  actuelle  en  1866.  Aperçu  rétrospectif....        2 

§  2.  Expédition  organisée  à  Londres  au  commencement 
de  1872,  pour  aller  à  la  recherche  de  Livingstone. .  • .        9 

§  3.  Un  coup  d'audace  du  journalisme  américain.  Lere- 
porter  H.  Stanley.  Sa  mission,  son  voyage,  son  re- 
tour, ses  récits 10 

g  4.  M.  Stanley  près  de  Livingstone.  Leur  excursion  jus- 
qu'à rextrémite  nord  du  Tauganîka.  Le  grand  lao  et 
son  écoulement  :  une  question  réglée 13 

$  5.  Informations  transmises  par  le  D*  Livingstone  lui- 
même.  Le  système  hydrographique  de  la  région  du 
Tanganîka 16 

S  6.  Informations  transmises  par  Livingstone.  Suite. 
Quelques  notes  ethnographiques 19 

II.  Afrique  tropicale  du  Nord.  Schweiofurth 2l 

Bibliographie Z^t<ï. 

III.  Les  autres  explorations  du  haut  Nil 28 

§  1.  Excursion  de  M.  Ern.  Marno  en  1871  dans  la  vallée 
du  Bahr-el-Azrek , .  Ibid. 

S  2.  Sir  Samuel  Baker , 29 

§  3.  M.  de  Bizemont.  La  longitude  de  Khartoum.  Re- 
marques        30 

§  4.  Nouvelles  lignes  d'exploration  à  ouvrir  dans  l'A- 
frique équatoriale 31 

S  5.  Expéditions  projetées 33 

IV.  Nubie  et  Abyssinie 35 

Bibliographie., Ihid, 


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VIII  TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES. 

§  1.  M.  MunziDger  et  ses  explorations 35 

§  2.  La  reconstitution  politique  de  rAbyssinie 37 

y.      Afrique  australe 38 

Bibliographie Ibid, 

§  1.  Le  capitaine  Miles  sur  le  pays  des  Somâl 40 

§  2.  Suite  des  explorations  de  M.  Garl  Mauch,  entre  le 
pays  Transvaal  et  la  Zambézi 42 

§  3.  Coup  d*œil  rétrospectif  sur  les  anciens  voyages  des 
Portugais  dans  l'Afrique  méridionale.  Les  ruines  de 
Zimbâoué 44 

§  4.  Notes  sur  le  Transvaal 47 

VI.  Madagascar / 48 

Bibliographie Ibid. 

VII.  Afrique  occidentale.  Le  Congo.  L'Ogovaï.  Le  Gabon 52 

L'Ogovaï 53 

VIII.  Afrique  occidentale.  Suite.  La  Guinée 59 

Bibliographie Ibid. 

IX.  Région  Nord-Ouest  de  l'Afrique.  Le  Maroc 60 

Bibliographie Ibid. 

L'expédition  du  Oued-Ghir 61 

X.  Algérie 64 

Bibliographie Ibid. 

§  1.  La  nouvelle  carte  topographique  de  l'Algérie 65 

§  2.  Les  études  scientifiques  en  Algérie 72 

S  3.  Hypsométrie  algérienne 75 

XI.  Tunisie 78 

Bibliographie Ibid. 

XIÏ.  Sahara Ibid, 

Bibliographie Ibid, 

XIII.  Egypte 79 

Bibliographie Ibid, 

Sur  les  changements  qu'éprouve  la  côte  du  Delta 80 

ASIE. 

I.       Syrie,  Palestine  et  Sinaï 83 

Bibliographie ' Ibid. 

§  1.  Les  travaux  de  la  Commission  anglaise  de  la  Pales- 
tine. Géodésie.  Archéologie ... . 85 


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TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIERES.  IX 

§  2.  Une  excursion  archéologique  à  l'est  de  la  Mer  Morte.      88 

§  3.  Les  travaux  des  ingénieurs  français  en  Palestine. .      90 

§  4.  Un  des  anciens  sites  de  ]a  Palestine  retrouve 92 

II.      Arabie 94 

Bibliographie Ihid, 

§  1.  État  phvsique,  géographique  et  politique  de  Tangle 
sud-ouest  de  l'Arabie,  d'après  les  informations  réunies 
par  M.  de  Maltzan 97 

§  2.  Expédition  archéologique  de  M.  Jos.  Halévy.  Im- 
mense récolte  épigraphique.  Reconnaissance  d'un  pays 
inexploré 101 

m.    Anatolie 113 

Bibliographie Ihid, 

§  1.  M.  G.  Perrot  et  son  ouvrage  monumental  sur  l'an- 
cienne Galatie Ibid, 

§  2.  Le  site  de  Troie.  M.  Schliemann  et  ses  fouilles 117 

IV.  Caucase.  Arménie.  —  Kurdistan 118 

Bibliographie , '.  - Ihid. 

V.  Perse 119 

Bibliographie Ihid, 

§  1.  Reconnaissance  de  la  frontière  E.  et  S.  E.  de  la  Perse 
par  des  officiers  anglais  du  corps  du  génie Ihid 

§  2.  Quelques  notes  de  géographie  ancienne 122 

Vï.     Inde 123 

Bibliographie Ihid. 

§  1.  Étude  adûiinistrative  des  territoires  de  l'Inde  an- 
glaise. Le  district  de  Ghazipoûr 128 

S  2.  Étude  historique  et  économique  du  Bengale.  Le  livre 
de  M.  Hunter 131 

§  3.  Le  livre  du  capitaine  Forsyth  sur  le  haut  pays  de 
l'Iode  Centrale 135 

§  4.  Les  castes  de  l'Inde,  leur  origine  et  leur  distribu- 
tion. Le  livre  de  M.  Esquer 137 

§  5.  Le  passé  et  l'avenir  de  la  domination  anglaise  dans 
l'Inde.  Le  livre  de  M.  Torrens 142 

YII.    Tibet..... 148 

Bibliographie Ihid. 

Les  lettres  de  M.  l'abbé  Desgodins Ihid. 

VIII.  Le  Turkestan.   Turkestan  indépendant.   Yarkand.   Kach- 

gar,  etc 149 

Bibliographie Ihid, 


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X  TABLE'  ANALYTIQOE  DES  MATIÈRES. 

Les  explorations  anglaises  de  lat  haute'  région  du  NDEd- 
OaestddFInde., *...,. ^ ..     152 

§  1.  Le  Hlna.,... f...« ^^.. *..*...  Ibid. 

g  2-  Le  Havildar * .     1 55 

IX.  Turkestan  (suite) .  —  Turkestan  russe • . .  ►,  .^ . .  /    1 57 

Bibliograp^hie. ^. .  ^ Ibid, 

§  1.  Les  parties  inexplorées  ou  peu  connues  du  Turkes- 
tan russe.  Notes  de  M.  Fedchenko. . . 159 

§  2.  La  passe  principale  du  Thian-Chan.  Première  re- 
connaissance russe 161 

§  3.  L'ancien  lit  de  l'Oxus 163 

X.  Asie  russe  (suite).  Sibérie.  Territoire  de  rAmoûr^ou  Mand- 

chourie  russe 164 

Bibliographie ,^^., . .  Ibid. 

XI.  Mongolie.  Corée.. • ^....^ 166 

Bibliographie • « . .  • ,... Ibid» 

§  1.  Excursions  dans  le  Nord  de  la  Chine  et  le  Sod-Ouest 
de  la  Mongolie.  M.  Tabbé  David 167 

S  2.  Le  pays  d'Ourato Ibid. 

§  3.  Une  traversée  de  la  Mongolie  orientale.  Le  relief  du 
Plateau.  M.  Przevalski 170 

XIL    Chine 175 

Bibliographie Ibid, 

Notes  diverses  sur  la  Chine.  M.  Tabbé  David • 1 76 

XIII.  lado-Ghine;  Gochiiiohiaft  fraoçaisâ.  ••....  .i^ 1 82 

Bibliographie. ,,,, Ibid. 

§  1.  Quelques  notes  sur  la  Coehinofaine'  française.  Le 
présent  et  Parvenir  de  la  oolonie .  ^ ........ .^ 185 

S  2.  Un  spécimen  de  la  race  bliBoho»  de  Textréme  Asie.    187 

XIV.  Le  Japon ^ 189 

Bibliographie , .«. ..... •*.■. Ibid, 

S  1.  Le  mouremeiiJb  social  au  Japon.  L'influence,  des 
races.  Japonais  et  Chinois. Ibid, 

g  2.  Détails  fournis  par  les  correspondances I9ût 

%  3.  Ëtit  actuel  du  Japon.  Aperçu  administntifi^.  moiad^ 
industriel  et  financier..... ..«. ....•    193 

§  4.  Yéio.etlesAInoB , 198. 

XV.  Grand  Archipel  Asiatique. 199 

Bibliographie Ibid. 


y  Google 


TABLB  ANALYTIQUE  DBS  MATIÈRES.  XI 

OCÉANIB. 

I.       Généralités 201 

Bibliographie Ibid. 

IL      Australie K 202 

Bil)Uogf aphie Ibid. 

§  1.  filiidé»  sur  la  race  a!)origène  de  rAustralle.  Neu- 
mayer.  Beckler.  Topinard 204 

§  2.  Vesliges  de  l'expédition  de  Leichhardt 205 

in.    Mélanésie.  —  Nouyelle*Guinée.    NoaTelIe-Calédonie,  etc. 

Nouvelle  Zélande ^ «. 207 

Bibliographie •.».«.••••»*.... Ibid, 

L'île  desPins.. *••     208 

Opérations  géodésiques  à  la  Nouvelle-Zélande ••«•••    2U 

lYé    Polynésie.  —  Région  Antarctique • 212 

Bibliographie « p Ibid, 


AMÉRIQUE  DU  SUD. 


I,  Pérou 213 

Bibliographie.  • . .».  ^. • Ibid 

Explorations  hydrographiques  dans  le  Pérou 214 

II.  Chili.  République  Argentine.  —  Patagonie.  Um^oay.  Para- 

guay     216 

Bibliographie ....•.«•.....  Ibid, 

iffv    Brésil 218 

BfiHîOifttipliie  : Ibid. 

§  1,  Les  publications  géographiques  sur  le  Brésil 220  . 

§  2.  Lacartogra^hie  duBrésil. 222 

IV.     VénézQéla  et  Colombie  —  Guyanes 225 

0flbfâogi«^hM^ «.«..r.... «... Ibid, 

§  1.  Une  exploration  dans  lâ  Gùysne  anglaise 226 

S' 2.  LesArayaks 227 

V*      Antilles ,. 230 

Bibliographie Ibid, 

AMÉRIQUE;  BC  NORD. 

Iw.      Amérique  Centrale ....•...••    233 

li*,     Mexique *-...     234 


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XII  TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES. 

m.     États-Unis 234 

Bibliographie , Ibid, 

Développements 240 

§  1.  Les  études  sur  la  géographie  physique  des  terri- 
toires de  l'Union  américaine Ibid, 

§  2.  Les  travaux  géodésiques  dans  la  région  de  l'Ouest.  246 

§  3.  La  région  du  Far  West.  Suite.  La  Californie.  Géo- 
désie. £tat  politique  et  social 253 

.§  4.  Le  dernier  recensement  des  États-Unis 258 

§  5.  Les  Indiens 260 

§  6.  Notes  archéologiques 264 

§7.  Sociétés  savantes  et  Associations  scientifiques 269 

.  S  8.  L'Alaska. 274 

IV.     Confédération  du  Canada  pominion) 276 

Bibliographie Ibid. 

La  grande  ligne  de  chemin  de  fer  du  Canada 278 

La  ligne  de  démarcation  anglo-américaine  dans  le  détroit 
de  Fuca.  Quelques  détails.  La  sentence  arbitrale  de  Pem- 

pereur  Guillaume 280 

RÉGION  ARCTIQUE. 

Bibliographie 285 

Les  études  et  les  expéditions  polaires.  Résultats  de  1872. 

Campagne  de  1 873 290 

§  1.  Vue  générale Ibid. 

$  2.  L'expédition  autrichienne  des  lieutenants  Weyprecht 

et  Payer. 291 

S  3.  L'expédition  de  M.  Octave  Pavy 295 

§  4.  Expédition  américaine.  Le  capitaine  Hall 297 

§  5.  L'expédition  suédoise  dans  les  mers  du  Spitzberg. 
M.  Nordenskjôld.  —  Courses  diverses  dans  les  mômes 

eaux.  M.  de  Heuglin.  M.  Smith.  Les  baleiniers. , 299 

§  6.  Résultats  géographiques 302 

§  7.  Projet  anglais  d'une  nouvelle  expédition  arctique..  303 

§  8.  Ëtude  sur  le  Gulf  Stream 306 

EUROPE. 

I.       Russie 311 

Bibliographie Ibid. 


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TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES.  XIII 

Un  mot  sur  la  géographie  militaire  de  la  Russie 313 

II.  Turquie  d'Europe.  Principautés 316 

Bibliographie Ihid. 

§  1.  Ouverture  des  chemins  de  fer  dans  la  Turquie  d'Eu- 
rope. Ëtudes  orographiques.  M.  de  Hochstetter.  M.  Ka- 
nitz 318 

§  2.  L'Albanie 323 

III.  Grèce 330 

Recensement  du  royaume  de  Grèce  en  1870 Ibid, 

IV.  Autriche '. 383 

Bibliographie i&td. 

y.      Allemagne.  Empire 335 

Bibliographie Ihid, 

L'île  Helgoland 336 

A  propos  de  l'Allemagne.  De  l'impassibilité  philosophique 

en  histoire 337 

VI.    Royaume  de  Prusse.  Empire  d'Allemagne 340 

Bibliographie Ibid, 

VIL    Pays-Bas.  —  Belgique.  —  Suisse 341 

Bibliographie Ibid» 

Vin.  Italie 343 

Bibliographie Ihid, 

IX.  Espagne.  —  Portugal 344 

Bibliographie Ibid. 

Quelques  données  sur  l'origine  des  Basques 345 

X.  Grande-Bretagne.  —  Angleterre.  Ecosse.  Irlande 347 

Bibliographie Ibid, 

XI.  France 348 

Bibliographie Ibid, 

§  1.  Généralités Ibid. 

§  2.  Géographie  physique.  Frontières. 349 

Sur  l'hydrographie  et  le  régime  de  la  Seine 349 

§  3.  Géographie  économique.  Statistique  territoriale. ...  352 

Mines . . 356 

Population 358 

§  4.  Becensement  de  1872 359 

§  5.  Bibliographie  départementale *  371 


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XIV  TÂBi.£  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES* 

Les  DictioDuaires  topograpbiqiaos  de  la  France^.  •  «. 382 

Sur  r Histoire  de  Paris  entreprise  sous  l'admiiiistration  d» 

M.  Haussmann 385 

S  6.  Géographie  historique.  Gaule.  Moyen  âge 387 

S  7»  Colonie* ,,.v.. ,..,.. 391 

GÉOGRAPHIE  GÉNÉRALE. 

ETHNOLOGIE. 

I.       Traités  généraux.  Géographie  mathématique  et  physique. .  393 

Bibliographie Ihid. 

§  1.  Traités  généraux Ibid, 

§  2.  Géographie  astronomique..' ....••...•..,  394 

§3.  Géographie  mathématique .....•.•.  396 

§  4.  Géographie  physique 403 

§  5 .  Hydrographie.  Géographie  sous-marine •«•....-...  404 

n.     Géographie  historiqwa,  ..•.,.... ., 415 

§  1.  Géographie  classique .,.,., ..«...*,•,  Ibid, 

§2- Moyen  âge -..* .....^.   418 

§  3.  Sociétés  géographiques ^.,.... .*.  419 

S  4.  Journaux  géographiques..,, 421 

ni.    Etude.  Enseignement  géographique .«.«.... « • .  423 

Bibliographie .-v* «  423 

§  1 .  Sur  renseignement  géographique « . . . .  424 

S  2.  Le  Collège;  de  France  et  U  cham  é&  géegrapiiâe.,  •  430 

§  3.  Graade  eaf te  de  P£ttt-*Mit^  et  ses  s^ioatioas*. . .  433 

m    Ethnographie....' .,.*  436 

Bibliographie. IhidL 

Ni<aoLOGiE.  —  Appum.  —  Babinet.  —  Black.. —  B^tning^  — ■ 
Ghapman.  —  Ghesney.  —  Daumas.  —  EUis.  —  Geistaecker.  — 
Ivachïnsoff.  -^  King.  —  Krolczyk.  —  Kutzner.  —  MalleviUe.  — 
Maklay-Miklûwka.  —  Mirrkham'.  —  Mànrer.  -^  MoTlien.  — 
Oersted.  —  Paravef.  —  Partlïeyt  —  Pat  Sokian.  -««Poiain.  — 


t.  — >  Rougô^  —  Scoaier.  —  Smith.  --  SomerviUe. 

Voiliez.  —  Waddington.  — •  Welwitsch.  —  Wood 443 

Table  alphabétique  des  noms  de  voyageurs  et  d'auteurs .  • 457 

Table  alphabétique  des  noms  de  paya  et  localités 463 


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NOTE  SUPPLÉMENTAIRE 

Plusieurs  oavrages  importante,  parns  dans  le  cours  de 
rimpression  du  prése&t  volume,  me  sont  parvenus  trop 
tard  pour  que  j'aie  pu  les  menliomier  à  la  place  qui  leur 
appartient.  Je  regrette  de  n'avoir  pu  parler  en  son  lieu  de 
la  reprise  des  Monuments  de  V Egypte  de  Ghampollion, 
œuvre  glorieuse,  dont  le  fondateur  de  la  science  égyptolo** 
gique  avait  réuni  les  àiatériauz,  qu'il  ne  lui  fut  pas  donné 
de  mettre  en  œuvre*  J'aurais  voulu  mentionner  la  Revue 
annuelle  que  M«  Garcin  de  Tassy,  le  savant  professeur, 
consacra  k  la  littérature  hîndoustanie^,  travail  particulière* 
ment  important  en  ce  qu'il  nous  fait  assâater  au  double 
mouvement  qui  se  manifeste  aujourd'hui  dans  l'Inde  :  d'un 
c6té»  les  tentatives  anglaise»  de  r^éneration  de  la  société 
brahmanique  par  l'éducatic»!  européenne  ;  d'un  autre  côté, 
la  réaetion  ransulmsne  contre  la  prépondérance  morale  et 
matérielle  des  maîtresi  actuels  de  la  Péninsule.  J'aurais, 
eu  à  parler  aussi  do  second  volume  que  M.  Âmédée  Tar- 
dieu  vient,  d*  donner  de  sa  tjadoctian  de  Strabou  (le  pre** 
môer  volame  a.  para,  en  l&d7),  travail  diffidle  auquel  le 
savant  traducteur  apporte  une  application  consciencieuse, 
et  qui  prendra  rang  parmi  les  plus  considérables  que  notre 
époque  ait  entrepris  sur  la  géographie  des  temps  classi- 
ques, surtout  si  JV£«  Tardieu,  âpre»  la  troisième  volume  • 
qui  terminera  l'intefTprétation  du  texiev  y  ajoute  le  complet* 
ment  dont  il  nourrit  le  dessein,,  je  veux  dire  jsh  commen- 
taire critique  aor  l'ienvre.  du  géographe  d'Amasée.  Nul. 


I.  la  IsBgve  eila  Utiéaratur«^ifldttiutadie»efi.l8T3>,nvuAaB2iuelle;; 
Paris,  1873, 109  pages. 


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XVI  NOTE    SUPPLÉMENTAIRE. 

auteur  ancien  plus  que  Strabon  n'appelle  iin  pareil  commen- 
laire,  qui  devra  remuer  l'antiquité  tout  entière,  dans  son 
histoire,  sa  philosophie,  sa  science,  ses  rapports  politiques 
et  commerciaux,  non  moins  que  dans  le  développement 
des  notions  et  des  doctrines  géographiques.  C'est  l'œuvre 
d'une  vie,  d'une  vie  laborieuse  et  soutenue.  Je  ne  me  per- 
mettrai pas  d'apprécier  le  livre  en  tant  que  traduction, 
sachant  d'ailleurs  que  les  juges  spécialement  compétents 
en  portent  le  jugement  lé  plus  favorable  ;  je  puis  dire  seu- 
lement que  par  l'allure  libre  et  franche  d'un  style  toujours 
pur,  le  travail  de  M.  Tardieu  prend  tout  à  fait  le  caractère 
d'une  œuvre  originale. 

II  est  surtout  un  ouvrage  qui  parait  en  ce  moment,  et 
qui  ne  saurait  être  ajourné  à  notre  prochain  volume  :  c'est 
le  grand  ouvrage  de  la  commission  du  Mékong  ^  Cette 
œuvre  monumentale  est  la  grande  publication  de  Tannée, 
et  une  des  plus  importantes  de  notre  temps.  Elle  jette  un 
jour  tout  nouveau  sur  la  géographie,  l'histoire,  les  anti- 
quités et  l'ethnographie  de  Tlndo-Chine  orientale,  c'est-à- 
dire  sur  de  vastes  contrées  qui  étaient  jusqu'alors  au 
nombre  des  moins  connues  de  l'Asie. 

Pour  la  science  comme  pour  les  intérêts  du  commerce 
et  de  la  politique,  notre  présence  en  Cochinchine  devait 
avoir  de  prompts  résultats.  C'est  en  1859,  comme  on  sait, 


1.  Voyage  d'exploration  en  Indo-Chine,  effectué  pendant  les  années 
1866;  67  et  68,  par  une  Commission  française  présidée  par  M.  le  capi- 
taine de  frégate  Doudart  de  Lagrée,  et  publié  par  les  ordres  du  minis- 
tre de  4a  Marine,  sous  la  direction  de  M.  le  lieutenant  de  vaisseau 
Francis  Gamier,  avec  le  concours  de  M.  Delaporte^  lieutenant  de 
vaisseau,  et  de  MM.  Joubert  et  Thorelj  médecins  de  la  Marine,  mem- 
bres de  la  Commission.  Ouvrage  illustré  de  250  gravures  sur  bois,  d'a- 
près les  croquis  de  M.  Delaporte,  et  accompagné  d'un  atlas.  Paris, 
1873,  2  vol.  grand  in-4*'  avec  un  atlas  grand  in-folio  de  22  cartes  et 
plans,  et  un  album  (même  format)  de  48  planches,  vues,  types  ethno- 
graphiques, etc.  200  fr.  (Hachette). 


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NOTE    SUPPLEMENTAIRE.  XVII 

que  le  drapeau  français  flotta  sur  les  remparts  de  Saïgou, 
et  qu'à  la  suite  d'une  campagne  vigoureuse  provoquée  par 
les  persécutions  barbares  dont  nos  missionnaires  étaient . 
victimes,  un  traité  dicté  par  le  chef  de  nos  escadres  fit  pas- 
ser sous  notre  domination  trois  des  six  provinces  de  la 
Basse-Gochinchine  ^  Les  trois  autres  provinces  ont  été 
ajoutées  plus  tard  à  notre  colonie.  Â  peine  établis  dans 
notre  nouvelle  possession,  le  premier  soin  de  nos  officiers 
fut  d'en  lever  la  carte.  Le  Mé-kong,  qui  y  débouche,  y 
forme  un  vaste  delta  coupé  d'un  nombre  infini  de  branches 
et  de  canaux  :  on  en  fit  une  reconnaissance  complète.  Dès 
1862,  on  avait  remonté  le  fleuve  jusqu'au  cœur  duEam- 
bodj,  royaume  autrefois  important,  aujourd'hui  très-réduit, 
qui  s'interpose  entre  Siam  et  la  zone  Annamite  et  qui 
couvre  au  nord  notre  propre  territoire  ;  là  nos  premiers 
explorateurs  virent  les  ruines  du  sanctuaire  d'Ângkor 
situées  vers  l'extrémité  septentrionale  d'un  grand  lac  lui- 
^  même  fort  remarquable  par  la  singularité  de  son  régime 
périodique.  Ângkor,  déjà  visité  quelque  temps  auparavant 
parMouhot,  est  un  desplusbeauxetdespluscurieuxmonu- 
ments,  sinon  le  plus  curieux,  le  plus  grandiose  et  le  plus 
beau,  dont  la  propagation  du  bouddhisme  a  autrefois  cou- 
vert rindo-Ghine.  Dès  cette  époque,  la  pensée  de  plus 
vastes  explorations  assiégea  l'esprit  de  nos  officiers  ;  l'un 
d'eux,  M.  Francis  âarnier,  celui-là  même  à  qui  devait 
être  confiée  plus  tapd  la  tâche  honorable  de  diriger  la 
belle  publication  que  nous  avons  sous  les  yeux,  appelait 
dès  lors,  sur  ce  sujet  la  sérieuse  attention  du  gouverne- 
ment. Le  ministère  de  la  marine  était  alors  occupé  par 
M.  le  marquis  de  Ghasseloup-Laubat.  Le  ministre  accepta 
d'autant  plus  volontiers  les  vues  qui  lui  étaient  soumises, 
que  dans  sa  propre  pensée  la  France  avait  un  grand  rôle 


1.  Voir  le  tome  III  de  V Année  Géographique,  1864,  191  et  suiv. 

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XVIII  MOTO  «ÔFPL'éMENTiiaB. 

à  prencbe  daaf  ees  parties  «exUiëfiaetda  Tiàm*  Une  omiii- 
mission  fut  {Bu&édMÛtement  4»i]gaBisée«  Les  msvic&B  jmtnr- 
relies  et  k  gMogie^  ies  obsarmtioiis  pbympies  «tastno* 
nomiqaes,  Tethnologie,  le  levé  rc^pde  du  terrain^  Tftrokjéo- 
lo^e,  le  dessin  des  sHes  et  des  types  indigènes  y  fuimoit 
représentés,  et  la  co&diiite  de  rexpédiâon  fut  donnée  k  isn 
offieier  supérieur  af^aartenast  à  la  marine ,  M.  Dondeft 
de  Lagrée,  dent  la  prudence  et  les  eapaûtés  étaient  éprou- 
vées. 

Le  passage  suivant  des  instructioas  transnûses  i  M.  de 
Lagrée  résume  bien  Tobjet  et  la  pensée  de  l'entreprise. 
En  même  temps  on  y  indique  d'une  manière  précise  quelle 
était,  au  moment  de  Texpédition,  la  limite  des  notions  afC*- 
quises'sur  rindo^Ghioe  orientale  : 

«  Nous  connaissons  le  cours  du  Mékong  depuis  son  em- 
bouchure jusqu'aux  rapides  de  Samboc-sombor  (immédia- 
tement au-dessus  de  Gratièh.  Au  delà ,  nous  n'avons  que 
les  renseignements  vs^es  et  contradictoires  fournis  par 
les  indigènes,  et  quelques  fragments  de  relations  incom- 
plètes ou  fort  anciennes. 

«  Au-dessus  de  Luang-Prabang,  dernier  terme  du 
voyage  de  Mouhot,  nous  savons  moins  encore,  et  les  notions 
recueillies  ne  semblent  avoir  aucune  valeur  sérieuse.  En- 
fin, nous  ignorons  en  quels  lieux  le  fleuve  prend  naissance» 

«  On  peut  donc  dire  que  le  Mékong  nous  est  inconnu. 
Et  cependant  ce  fleuve,  le  plus  grand  de  Tlndo^Ghine,  l'un 
des  plus  considérables  du  monde,  offre  un  champ  fécond 
de  découvertes.  On  y  parle  vingt  idiomes  différents; 
toutes  les  races  de  l'Asie  orientale  se  sont  rencontrées  sur 
ses  bords,  et  la  tradition  y  conserve  le  souvenir  de 
royaumes  riches  et  puissants.  Ne  serait*il  pas  possible  de 
ramener  la  vie  dans  ces  contrées,  de  renouer  les  anciennes 
relations  commerciales,  et  peut-être  d'attirer  vers  nous  la 
majeure  partie  des  productions  de  la  Chine  centrale  ? 

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KOTE  SCPPLéMENTAmS.  XIX 

«  Les  Intérêfts  généraux  4e  k  eÎTilisatieny  et  plus  ptrtî- 
eiilièremecit  eeux  île  notre  colonie  Betesante,  nous  frât  «n 
devoir  de  faire  eesser  eee  ineeitHades,  et  t'est  dans  oeCle' 
pensée  que  k  voyage  que  vous  allez  entreprendre  «  été 
décidé. 

«  Déterminer  géographiquement  le  eonrs  du  fleuve  par 
une  reconnaissance  rapide  poussée  le  plus  loin  possiMe  ; 
chemin  faisant,  étudier  les  ressources  des  pays  traversés, 
et  rechercher  par  quels  moyens  efficaces  en  pourrait  unir 
commercialement  la  vallée  supérieure  du  Mékong  au  Cam- 
bodge et  à  la  Goehinchine:  tels  sont,  en  résumé,  les 
objets  essentiels  que  vous  ne  devez  jamais  perdre  de 
vue.  » 

L'expédition  partit  de  Saigon  le  5  juin  1866;  sa  première 
étape  fut  aux  ruines  d'Angkor,  que  M.  de  Lagrée  voulait 
étudier  en  détail,  et  dont  on  devait  lever  les  plans.  Ces 
ruines  vraiment  splendides  furent  dessinées  dans  leur  en- 
semble et  leurs  principaux  détails,  et  les  inscriptions 
furent  estampées  ou  relevées  avec  un  soin  extrême.  Ces 
inscriptions  sont  de  différentes  époques.  Les  plus  anciennes 
sont  sûrement  en  pâli,  c'est-à-dire  dans  la  langue  sacrée 
du  bouddhisme  primitif  de  Geylan  et  de  l'Indo-Chine  ;  les 
prêtres  kambodgiens,  qui  en  déchiffrent  plus  ou  moins  les 
caractères,  n'en  comprennent  pas  le  sens.  D'autres,  plus 
récentes,  sont  en  kambodgien  moderne,  et  se  traduisent 
aisément.  En  somme,  ce  que  Ton  en  connaît  jusqu'à  pré- 
sent, pas  plus  que  les  chroniques  locales  qui  existent  en- 
core, ou  les  témoignages  chinois  que  Ton  a  recueillis,  ne 
fournit  aucune  notion  tant  soit  peu  précise  sur  les  auteurs 
et  l'époque  de  ces  merveilleuses  constructions.  Mais  les 
monuments  parlent  pour  eux-mêmes;  et  sans  prétendre 
fixer  une  date  proprement  dite,  on  ne  peut  guère,  à  ce  qu'il 
semble,  se  refuser  à  reporter  l'érection  du  sanctuaire 
d'Ângkor  au  temps  où  la  propagation  bouddhique,  partie  de 
Geylan,  était  dans  sa  ferveur  première,  et  où  les  souvenirs 

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XX  NOTE   SUPPLEMENTAIRE. 

encore  récents  de  l'Inde  inspiraient  la  représentation  des 
scènes  qui  se  rattachent  aux  cultes  populaires  de  la  Pénin- 
sule gangétique.  En  d'autres  termes,  les  probabilités  qui 
se  tirent  de  la  vue  des  sculptures  nous  reportent  à  des 
temps  qui  oscillent  autour  de  l'ère  chrétienne,  soit  au  delà 
soit  en  deçà,  et  conséquemment  nous  placent  à  des  époqties 
qui  sont  aussi  celles  de  tant  de  monuments  bouddhiques 
de  l'Inde  elle-même,  dont  la  date,  pas  plus  que  celle  des 
constructions  du  Kambodj,  ne  se  détermine  avec  la  préci- 
sion chronologique  que  nous  cherchons  dans  l'histoire. 

Après  avoir  étudié  avec  un  vif  intérêt,  et  fixé  dans  une 
suite  de  plans  et  d'admirables  dessins  ces  restes  curieux 
de  l'art  reh'gieux  du  bouddhisme  oriental,  M.  de  Lagrée, 
et  les  autres  membres  de  la  Commission,  regagnèrent,  par 
le  grand  lac,  la  branche  principale  du  Mékong,  dont  ils 
allaient  maintenant  remonter  le  cours.  Le  9  juillet  on 
était  à  Gratièh,  dernier  village  kambodgien  dans  la  vallée 
du  fleuven  par  12^  28'  environ  de  latitude  N.  (Saigon  est 
un  peu  en  deçà  du  IP  degré).  Bientôt  après  on  sort  de 
Kambodj,  et  après  avoir  franchi  une  zone  de  pays  à  peu 
près  désert  et  couvert  de  grands  bois,  on  entre  dans  le 
Laos. 

Le  Laos  est  une  contrée  d'une  étendue  très-considérable, 
dont  les  chefs,  qui  portent  encore  le  titre  de  rois,  recon- 
naissent depuis  longtemps  la  suzeraineté  du  gouverne- 
ment siamois.  Il  est  renfermé  de  l'est  à  l'ouest,  entre  la 
Gochinchine  et  le  royaume  de  Siam  proprement  dit;  du 
sud  au  nord  il  mesure  en  ligne  directe  de  six  à  sept  degrés 
de  latitude,  c'est-à-dire  au  moins  700  kilomètres.  Le  Mé- 
kong, qui  en  traverse  la  partie  moyenne,  y  décrit  un  vaste 
circuit  et  de  nombreuses  sinuosités.  C'est  un  pays  monta- 
gneux, surtout  dans  sa  partie  nord,  déjà  notablement  élevé 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  et  beaucoup  plus  tempéré 
qu'on  ne  le  croirait  d'après  sa  situation  dans  la  zone  tor- 
ride.  En  latitude,  il  s'étend  à  peu  près  du  13"  au  20''  paral- 

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NOTE   SUPPLÉMENTAIRE.  XXI 

lèle.  Les  missionnaires  du  Tonkin  (la  Bissachère  notam- 
ment), et  plus  récemment  notre  compatriote  Mouhot  qui  y 
est  mort  en  1861,  avaient  déjà  donné  d'assez  bonnes 
notions  sur  ce  pays  intérieur;  mais  les  informations  re- 
cueillies par  la  Commission  sont  infiniment  plus  étendues, 
plus  précises  et  plus  sûres.  Le  sol  est  représenté  comme 
très-fertile,  la  contrée  comme  éminemment  pittoresque  et 
très-variée,  le  climat  comme  agréable  et  salubre.  On  y 
rencontre  à  profusion,  dit  M.  Gamier,  tous  les  produits 
naturels  des  régions  les  plus  favorisées  de  l'Asie  tropicale. 
Si  l'activité  européenne  peut  s'y  transplanter  un  jour  et  y 
stimuler  l'indolence  indigène,  il  y  aura  là  un  admirable 
foyer  de  mouvement  commercial. 

La  population  laocienne  offre  un  sujet  d'étude  scienti- 
fique d'un  très-grand  intérêt.  Je  ne  parle  ni  des  mœurs,  ni 
du  costume,  ni  des  habitudes  domestiques,  sur  lesquels  la 
relation,  aidée  des  belles  gravures  qui  y  sont  répandues  à 
profusion,  nous  donne  les  informations  les  plus  circonstan- 
ciées: pour  des  pareils  détails  il  faut  renvoyer  à  l'ouvrage 
même.  Je  m'arrête  au  côté  purement  ethnologique,  c'est- 
à-dire  aux  détails  physiques  et  à  la  langue. 

Les  observations  de  la  Commission  ont  été  forcément 
restreintes,  tout  à  la  fois  par  la  ligne  de  route  dont  elle  ne 
pouvait  pas  beaucoup  s'écarter  et  par  le  temps  qu'elle  y 
pouvait  donner;  néanmoins  elle  a  pu  reconnaître,  en  thèse 
générale,  que  la  population,  prise  dans  son  ensemble,  se 
partage  en  deux  grands  éléments  :  l'élément  laocien  propre, 
et  un  élément  très-distinct  relégué  dans  les  hautes  vallées, 
au  sein  des  forêts,  en  un  mot  dans  les  parties  les  moins 
fréquentées  du  pays  et  les  moins  accessibles.  Les  Laociens 
propretnent  dits  occupent  principalement  la  grande  vallée 
du  Mékong;  c'est  la  partie  relativement  industrieuse  et 
policée  de  la  population.  L'autre  élément,  l'élément  monta- 
gnard, en  est  la  partie  sauvage,  ou  tout  au  moins  inculte. 

Entre  ces  deux  éléments  de  la  population  du  Laos,  les 

rl'AN.  GÊOGR.  XI.  h 

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XXÂl  Noms.  SUPBLEMENTAiBE. 

différences  scmt  profondes^,  ety  Von  peut  dice^  absoluasi. 
Quoique  le  docteur  Tfaor el,  le  médeoiiL  Batoraliste  chaxgi 
particolièrement  de»  oba^rvatioiis':  ftuthropologiquefi»,  exH* 
piime  le  regret  de  n'avoir  pu,  à  beaucoup  près,  pouBser. 
aussi  loin  qu'il  l'eût  voulu,  ses  investigations  et  son^  étuda^ 
et  bien  que  M.  Francis  Garnier,,  le  principal  rédajcteurdft^ 
larelatiouy  se.  tienne  à  cet  égard  dans  des'généraUtés  u& 
peu  vagues,  l^urs  indications  n'en  ont  pas  moins,  surplus 
d'un  point  essentiel,  une  granite  knportiuioe  ;  et  d'aiUeur» 
ce  que  Ton  peut  regretter  de  ce  côté  est  amplement  com;- 
pensé  par  une  auliie  partie  de  la  pubUcation..  Dans  leiriche 
et  bel  Album  dû  au  crayon  habile  du  lieutenant  de  marina 
L.  Delaporte,  un  des  membres  de  la  mission,  une  planche 
spéciale  est  consacrée  à.  la  reproduction  dea<  principaux 
types  rencontrés  dans  le  cours  du  voy^e^.  Les  portraits 
sent  vivants  et  forment  une  admirable  galerie.  Or,  sur  les 
quinze  figures  que  Ton  y  voit  représentées,  treize  appar- 
tiennent au  Laos,  et  de  ces  treize  portraits  sept  ont  été 
pris  dans  divei*ses  tribus  de  la  population  sauvage^.  Chaque 
portrait  constitue  une  individualité  bien  accusée.  Les  traits, 
l'expression,  la  physionomie,  sont  différents  ,  mais  au-des- 
sus de  ces  diversités  individuelles  plane  une  frappante  uni- 
formité de  type.  Ce  type  n'a  rien  de  commun  avec  la  confia 
guration  mongolo-tibétaine  ,  qui  caractérise  Timmense 
majorité  de- la  population  de  l'ïndo-Ghine;  la  tète  tout  à 
fait  chinoise  d'un  Annamite  qui  se  trouve  sur  la  même 
planche  (6gure  V)  semble  placée  là  pour  accuser  le  con* 
traste.  Toutes  ces  figures  des  montagnards  sauvages  du 
Laos  sont  absolument  européennes;  elles  ont  toutes  ce  que, 
faute  d'une  meilleure  expression,  nous  appellerons  le  type 
Gaucasîque.  Ces  traits,  sauf  la  nuance  jaunâtre  ou  basanée 


1.  Album,  PI.  l"'. 

2.  D'autres  portraits  sont  répandus  dans  TAIbuni,  et  dans  le  cours 
de  la  narratioQ.' 


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NOTE  SUPPLEtfENTAIRfi*  XXm 

de  la  peaus.  pauvent.  nous  rappeler  mie  connaissance,  un 
ami>f  à  chaque  pas  noua  Ies>  veneonirona  autour  de  nous» 
La  face  est  Gommonément  d'ua  beL  ovide;  le  nez  est  droit 
et  saillani,  l'oeil^.lionzontal  ei  bien  fendu,  est  noir  comme 
les  cheveux. 

Cette  particularité  sîngiiliàre  d'une  race  à  type  européen 
^u  milieu  même  du  domaine  de  la  raoe  mongolique  aurait 
de  quoi  nous  surprendre  profondément,  si  déjà  des  obser- 
vations analogues*  ne  nous  y  avaient  préparés.  Des  cas 
isolés  de  Gonformatiou4MLU6aeique  aidaient  été  signalés  par  de 
récents  voyageurs^  dans^  les  mdntagnes  du  Tsiampa  et  vers 
les  confins  orientaux  de  notre  oolonie;  et  nous*même,  il  y 
a  moins  d'un  an^  dans  une  Note*  lue  au  sein  de  la  Société 
do  Géographie,  nous  avons  fait  ressortir  le.  fait  considé- 
rable, et  jusqu'alors   trop  peu  remarqué,  d'une   race 
blanche  à  type  caucasique  qui  semble  avoir  eu  pour  foyer 
primordial  les  grandes  iles  de  l'Archipel  Asiatique,  d'où 
ses  embranchements  ont  rayonné   dans  deux   directions 
principales  :  au  nord,  vers  le  Japon^  Yéso  et  les  Kouri- 
les; à  l'est,  à  travers  les  nombreux  archipels  du  Grand 
Océau»^  U  n'y  a  pas  de  témérité,  croyons-nous,  sans  d'ail- 
leurs nous  aventurer  sur  le  terrain  périlleux  des  origines, 
a  rattacher  à  la  même  famille  les  tribus  de  même  confor- 
mation qui  occupent  une  partie  de  l'Indo-Ghine  ;  d'au- 
Xdjït  plus  que  nos  informerions,    à  mesure  qu'elles  s'é- 
tendent, ajoutent  de  nouveaux  faits  aux  faits  déjà  connus. 
C'est  ainsi  qu'on  est  fondé  à  croire,  d'après  des  rensei- 
gnements récents,  que  la  plus  ancienne  population  du  Sud 
de  la  Chine,  représentée  par  les  Miao-tsé  (  «  les  Fils  du 
Sol  »  )  et  par  d'autres  peuplades  incivilisées,  appartient, 
elle  aussi,  à  la  race  non-mongolique  du  Sud-Est  de  l'Asie. 
Toutes  ces  données  se  rattachent  entre  elles  et  se  forti- 
fient. Bien  des  observations,  bien  des  études  à  peine  tou- 
chées par  les  précédents  voyageurs  et  que  la  mission  du 
Mékong  elle-même  n'a  pu  qu'effleurer  dans  sa  marche, 

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XXIV  NOTE   SUPPLEMENTAIRE. 

sont  encore  nécessaires  avant  qu'il  soit  permis  de  rien  for- 
muler de  précis  et  de  définitif;  mais  déjà  on  peut  entre- 
voir quel  chapitre  considérable  va  s'ajouter  ici  à  Tethnolo- 
gie  du  globe.  C'est  à  ce  point  de  vue  que  j'ai  dû  insister 
sur  cette  partie  aussi  neuve  qu'importante  de  la  relation. 

Il  faut  ajouter  que  les  montagnards  sauvages  du  Laos  se 
distinguent  des  Laociens  proprement  dits,  autant  par  la 
langue  que  par  les  traits.  Leurs  idiomes,  dont  M.  de  La- 
grée  et  M.  Francis  Garnier  ont  recueilli  quelques  spéci- 
mens, ont  tous  une  affinité  commune,  en  même  temps 
qu'ils  diffèrent  absolument  du  Laocien  ;  ils  se  rapprochent 
de  la  langue  du  Kambodj.  On  sait  que  la  langue  du  Laos 
est  une  branche  de  la  famille  Thaï,  dont  le  siamois  est  le 
spécimen  le  plus  cultivé  et  le  plus  connu,  grâce  aux  tra- 
vaux de  M.  l'évèque  Pallegoix;  le  kambodgien,  selon 
M.  Garnier  qui  s'appuie  des  études  de  M.  Janneau,  diffère 
radicalement  du  laocien  et  du  siamois. 

Quant  à  la  configuration  physique  et  à  la  physionomie, 
les  Laociens  proprement  dits,  ceux  qui  habitent  les  villes  et 
les  villages  échelonnés  dans  la  vallée  du  Mékong,  et  qui 
nous  sont  indiqués  comme  la  partie  policée  de  la  nation, 
ne  présentent  plus  du  tout,  comme  les  tribus  sauvages  des 
montagnes,  la  pureté  originale  d'un  type  nettement  accusé. 
Leurs  traits  rappellent  ceux  des  Chinois  et  des  Tibétains, 
mais  à  demi  effacés  par  un  contact  étranger.  Tandis  que  Içs 
Siamois,  leurs  frères  par  la  langue,  ont  le  type  pur  de  la 
race  jaune,  les  Laociens  ont  les  traits  indécis  et  mêlés  des 
populations  mixtes.  L'histoire,  ou  pour  mieux  dire  les  tra- 
ditions qui  se  sont  transmises  depuis  des  siècles,  expli- 
quent cette  différence  des  deux  rameaux  de  la  même  race. 
Il  est  dit  que  la  branche  laocienne  de  la  nation  Thaï,  lors- 
qu'elle vint  s'établir  sur  le  Mékong,  y  trouva  une  popula- 
tion antérieure  qu'elle  soumit  ou  qu'elle  expulsa.  Cette  po- 
pulation antérieure,  ce  ne  peut  être  que  les  ancêtres  des 
tribus  sauvages  refoulées  dans  les  montagnes  ;  et  l'on  se 

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NOTE  SUPPLÉMENTAIRE.  XXV 

rend  bien  compte  ainsi  du  caractère  métis  que  la  race  con-* 
quérante  a  contracté* 

Je  me  suis  arrêté  longtemps,  comme  la  Commission  elle- 
même,  sur  un  sujet  dont  je  n'ai  pas  à  faire  ressortir  l'in- 
térêt ;  nous  allons  maintenant,  avec  l'expédition,  reprendre 
la  suite  du  voyage. 

A  moins  de  200  kilomètres  au-dessus  de  Gratièb,  c'est- 
à-dire  vers  le  \k^  degré  de  latitude,  le  lit  du  Mékong,  jus- 
que-là d'une  navigation  facile  sur  des  eaux  larges  et  pro- 
fondes, est  coupé  de  rochers  qui  y  forment  de  dangereux 
et  violents  rapides.  Ces  barrages,  qui  se  renouvellent  sur 
plusieurs  points,  y  arrêtent  forcément  la  navigation  par  la 
vapeur.  U  fallut  transborder  sur  des  barques  indigènes  le 
chargement  du  steamer,  et  continuer  au  moyen  du  halage 
la  marche  ralentie.  Cette  condition  du  Mékong  est  très- 
£lcheuse  ;  elle  crée  une  grande  gêne  pour  les  futures  rela- 
tions .  Elle  est,  du  reste,  commune  à  tous  les  fleuves  de  l'Indo- 
Chine  ;  aucun  d'eux  ne  fournit  une  navigation  continue  sur 
une  étendue  considérable  à  partir  de  la  mer.  Cette  succes- 
sion de  chutes  et  de  rapides  sur  tous  les  grands  courants 
accuse  assez  le  relief  général  de  la  Péninsule,  où  le  sol 
adossé  à  l'énorme  massif  qui  porte  le  plateau  tibétain,  s'a- 
baisse vers  la  mer  en  une  suite  étagée  de  paliers  et  de 
ressauts. 

Près  de  dix  mois  s'étaient  écoulés  dans  cette  première 
phase  de  l'expédition,  consacrée  à  l'excursion  du  Kambodj, 
à  l'examen  du  temple  et  des  ruines  d'Augkor,  et  enfin  à  la 
navigation  de  la  moitié  inférieure  du  Mékong.  Le  28  avril 
1867,  la  Commission  faisait  son  entrée  dans  la  ville  de 
Luang-Prabang. 

Luang-Prabang  est  la  ville  la  plus  importante  du  Laos  et 
la  résidence  du  principal  dignitaire  national,  auquel  la  cour 
de  Bangkok  a  laissé  le  titre  de  roi.  Yièn-Ghang,  autrefois 
la  capitale  du  royaume,  à  2  degrés  plus  au  sud,  est  aujour- 

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XXYI  NOTE  «^JPPLÉMnENTAIKE. 

d'hui  en  mines.  LuiM^-Prabang,  la  capitale  actuelle,  est 
une  place  de  15  à  16  000  habitants,  selonfeertime  (assez  in- 
certaine) de  la  Ciommission;  le  lieu,  d'après  les  observa- 
tions astronomiques  de  M.  Francis  '&amier,  est  au  19"*  de- 
gré 54'  W  de  Itflitude  W.,  par  99*  46'  de  longitude  à  1"!!. 
de  Paris*.  Luang-Praibang  est  'le  principal  centre  com- 
mercial du  Laos  ;  M.  Gamier  y  verrait  volontiers  l'appui 
futur  et  le  pivot  de  nos  ^dations  avec  Tintérieur.  C'est  dans 
cette  ville  que  notre  compatriote  Moùfaot  succomba  le 
10  novembre  1861,  au  milieu  de  ses  explorations  ;  les  indii* 
gènes  conservent  de  lui  un  bon  souvenir.  M.  de  Lagrëe 
fit  élever  un  modeste  monunuent  à  la  mémoire  du  voyageur^ 
sur  le  lieu  où  ses  restes  Teposent  i  soin  pieux  que  ses  com- 
pagnons devaient  bientil^t  lui  rendreii  Itd-niëme,  au  fond  de 
ces  contrées  lointaines . 

La  mission  quitta  Luang-Prabang  le  25  mai,  continuant 
de  remonter  le  Mékongqui  fait  ici  un  grand  détour  à  l'ouest 
avant  de  reprendre  sa  direction  au  nord.  A  un  degré  1/3 
environ  au  nord  de  la  ville,  vers  le  21*  parallèle,  le  terri- 
toire soumis  à  l'autorité  siamoise  se  termine,  et  i'on  entre 
dans  une  large  zone  de  pays  qui  sépare  le  Laos  siamois 
du  Yunnan,  la  plus  méridionale  des  provinces  delà  Chine. 
Cette  zone  est  très-monti^euse,  et  peuplée  dans  sa  plus 
grande  partie  de  tribus  incivîlisées,  de  même  sang,  et  au 
fond  de  même  langue  que  les  Laociens.  La  partie  occiden- 
tale appartient  au  Barmâ  ;  la  partie  orientale,  qui  confine 
au  Tong-king,  était  administrée  par  des  agents  du  gouver- 
nement chinois  avant  Finsurredion  des  musulmans  du  Yun- 
naô.  La  plupart  des  tribus  natives  portent  le  nom  deKhaSy 
auquel  se  joint  communément  une  dénomination  spéciale  : 

1.  Longitude  obtenue  par  six  séries  de  distances  lunaires,  mais  seu- 
lement occidentales.  Le  prompt  départ  de  la  Commission  n'a  pas  per- 
mis d'observer  les  distances  orientales.  M.  Gamier  croit  son  cbiffre  de 
longitude  un  peu  trop  faible,  et  il  le  porterait  volontiers  à  100®  en 
nombre  rond. 

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NOTE  SCFPPLÊMENTArRfi.  JEXTII 

MhiSj  «n  Ihiâ,  signifie  iiomme.  On  sait  que  la  lâfime  «ppol- 
Isliion  se  retrouve  dans  tout  f  Himalaya,  'partioulièreiaenl; 
tlams  la  région  orientale^  et  qu'il  7  |yrend  la  forme  de 
Khania^  qui  e'écrit  hkasyas 'ÔABBlt  géograpbie  «ansorile. 
Diverses  tribus  des  pa<rties  phis  méridionales  dé  Flndo- 
Cibne,  les  Karfins  notaimDaQf,  ont  auRsi  'leurs  analogues, 
et  jBÛronent  leur  point  de  dëpart,  dans  cette  zone  intermé- 
diaife  qui  oenstitue  le  Laos  birman,  —  ou,  plus  correcte- 
ment, bftrmft.  On  y  retrouve,  du  reste,  le  mélange  de  sang 
et  do'types  signalé  dans  le  Laos  siamois  :  une  paortio  des 
Irîlms  est  «marquée  au  type  chinois  ;  d^autres,  au  oentraire, 
ont  la  tête  longue,  le  profil  «aillent,  ie  nez  arqué,  et  dans 
r<enBentble  <c  un  faux  air  arabe.  »  Toujours  l'iâdice  évident 
des  doux  raoes  absolument  dissemblables. 

Bans  œtle  paitie  du  voyage  où  la  rcrate  de  la  mission 
continue, 'pendant  plusieurs  journées  encore,  dei^monter 
la  vallée  du  Mékong  (M.  Francis  Garnier  donne  constam- 
ment à  cette  grande  artère  fluviale  le  nom  purement  local  de 
Ka/mbodjj  en  quoi  je  ne  saurais  le  suivi*e),dans  cette  partie 
au  voyage,  dis-je,  le  fleuve  prend  un  anpect  nouveau,  mais 
toujours  imposant.  Je  transcris  la  description  de  M.  Gar- 
nier  :  «  Quelques  milles  au-dessus  de  Yièn-Ghang,  t'an- 
manne  métvopde  du  Laos,  le  fleuve  s'enoaisse  définitive- 
ment entre  deux  rangées  de  collines  qui  reeserrent  et  do- 
minent son  lit  de  toutes  parts.  Ses  eaux  qui,  jusque-lft  ma- 
jestueuses et  'tranquilles^  s'étaient  paisiblement  déroulées 
dans  la  vaste  {Plaine  du  Laos  central,  accélèrent  leur  course 
et  bouillonnent  au  milieu  des  ro<ihes.  Le  noble  fleiuve,  qui 
comptait  parfois  sa  largeur  par  kilomëtres,  endigué  main- 
tenant entre  deux  barrières  dont  l'élévation  \ra  sans  cesse 
en  augmentant,  se  trouve  contenu  tout  entier  dans  un  fossé 
large  de  cinq  à  six  oents  mètres,  qu'il  ne  réussit  jamais  à 
franchir.  Aux  eaux  basses^  il  n'occupe  même  plus  qu'une 
minime  partie  de  cet  espace,  et  son  lit  ne  présente  au  re- 
gard qu'une  sur&ee  rocheuse  inégale,  mosaïque  grandiose 

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XXVIII  NOTE  SUPPLÉMENTAIRE. 

OÙ  l'on  rencontre  de  curieux  échantillons  de  toutes  les  for- 
mations métamorphiques,  marbres,  schistes,  serpentines, 
jades  même,  vivement  colorés  et  quelquefois  admirable- 
ment polis.  Au  centre,  une  étroite  fissure,  sorte  de  canal  îr- 
régulier,  dont  la  largeur  n'est  parfois  que  de  40  mètres, 
mais  dont  la  profondeur  est  pour  ainsi  dire  inconmiensu- 
rable,  renferme  toutes  les  eaux  du  fleuve^  qui  coule  inipé- 
tueux  entre  deux  murailles  complètement  à  pic.  Â  de  rares 
interruptions  près,  tel  est  l'aspect  du  Gambodj  jusqu'à  sa 
sortie  du  Thibet,  et  très-probaJ)lement  jusqu'à  ses  sources. 
Aucun  ûeuve  n'offre,  sans  doute,  sur  un  aussi  long  espace, 
une  physionomie  aussi  singulière  et  aussi  remarquable.  » 
Ajoutons  que  des  marques  faites  en  quelques  points  sur  le 
rocher  accusaient  une  différence  de  50  pieds  environ  entre 
l'étiage  ou  hauteur  normale  des  eaux  (qui  est  elle-même 
très-considérable)  et  le  point  où  atteint  l'inondation. 

Un  des  objets  essentiels  de  la  mission  avait  été,  on  le 
sait,  de  reconnattre  aussi  loin  que  possible  le  cours  du  Mé- 
kong, d'en  constater  la  direction  supérieure,  et  de  rapporter 
des  informations  précises  sur  son  origine.  Ce  dernier  point 
aurait  été  d'autant  plus  intéressant,  que  la  région  élevée 
d'où  le  fleuve  descend  est  aussi  le  point  de  départ  de  beau- 
coup d'autres  rivières,  les  plus  grandes  et  les  plus  impor- 
tantes du  sud-est  de  l'Asie  ;  mais  il  faudmt  pour  cela  pé- 
nétrer dans  la  région  inexplorée  où  la  Chine  occidentale 
confine  au  Thibet,  et  le  temps  n'est  pas  venu  encore  où  une 
telle  exploration,  qui  aura  tant  d'importance  à  tous  les 
points  de  vue,  sera  praticable.  Il  n'était  pas  possible  à  la 
Commission  de  poursuivre  au  delà  du  Laos  la  reconnais^ 
sance  du  fleuve  (dont  le  cours  supérieur  continue  de  nous 
être  connu  seulement  par  les  cartes  chinoises)  ;  on  dut  s'en 
éloigner  définitivement  un  peu  avaiit  d'avoir  atteint,  le 
16  octobre,  la  frontière  méridionale  du  Yun-nan,  qui  se 
trouve  ici  à  peu  près  sous  le  22''  degré  1;2  de  latitude. 


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NOTE   SUPPLEMENTAIRE.  XXIX 

En  touchant  à  la  limite  de  la  Chine,  on  entrait  dans  un 
monde  nouveau  et  relativement  connu.  Ici  je  n'ai  plus  i 
suivre  pas  à  pas  les  traces  de  rexpédition.  Depuis  son  entrée 
dans  leYun-nan  jusqu'à  son  arrivée  à  Chang-hai  en  descen- 
dant le  Yang-tsé-kiang  sur  une  immense  longueur,  l'itiné- 
raire fournit  cependant  encore  plus  d'une  note  utile  pour  la 
géographie,  pour  les  renseignements  ethnographiq«es  et 
l'économie  politique  ou  commerciale.  Le  chef  de  la  mission, 
M.  de  Lagrée ,  ne  devait  pas  recueillir  l'honneur  d'une 
entreprise  qu'il  avait  conduite  avec  autant  d'hahileté  que 
de  dévouement.  Atteint  d'une  affection  de  foie  développée 
parles  fatigues  matérielles  du  voyage,  il  succomba  àTong- 
tchouèn-fou,  dans  le  Yun-nan,  le  12  mars  1868,  sans  avoir 
eu,  à  ses  derniers  moments,  la  triste  consolation  de  serrer 
la  main  de  ses  compagnons,  qui  l'avaient  devancé  dans  une 
excursion  à  l'ouest  de  la  province.  Ses  restes  ont  pu  être 
rapportés  en  France. 

Quelques  mots  encore  sur  la  distribution  matérielle  de 
la  relation.  Elle  se  compose  de  deux  magnifiques  volumes 
grand  in-quarto,  accompagnés  d'un  atlas  géographique  et 
d'uD  album  ethnographique  et  pittoresque.  Le  premier 
volume  renferme  la  narration  historique  du  voyage,  à  la- 
quelle se  rattachent,  outre  une  notice  sur  les  découvertes 
géographiques  en  Indo-Chine  antérieures  à  l'expédition, 
on  mémoire  de  M.  Francis  Gamier  sur  les  monuments 
kambodgiens  et  le  temple  d'Ângkor,im  essai  historique  sur 
le  Kambodj,  un  aperçu  sur  le  Laos,  son  culte  et  ses  popu- 
lations, etc.  Le  deuxième  volume  est  consacré  à  l'exposé 
spécial  des  résultats  scientifiques  de  l'expédition.  Il  con- 
tient un  résumé  des  observations  astronomiques,  avec  une 
Note  de  M.  Gamier  sur  la  rédaction  des  cartes  ;  l'exposé 
des  observations  météorologiques  ;  la  géologie  et  la  miné- 
ralogie, parM.E.  Joubert  ;  les  remarques  anthropologiques, 
par  le  docteur  Thorel  ;  les  observations  sur  l'agriculture  de 

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XXX  NOTE.  SUPPLEMENTAIRE* 

L'iAdo^Ghiiiay  pas  le.  mëxae  ;  et  enfiai  uni  ireeueiL  de:  ^^oca- 
hulairesi^  précédé  d'une  in^odacdon,  par  M.  Fraacia 

Le  nombre  daâ  positions  astJroBomiqxienieint  déterminée» 
dans  le  Goar&du  voyage  est  de  soixaate^atre,  non  com/^ 
pnis.  vân^su  poeitioBa  modifiées  sur  la  carte  dee>  jésuitea. 
dans  rintérieur  dh  Yunnum,  d'après  ks  nelëvés*  de  riti— 
nécaire.  La.  constmction  de  la.  caste  générale ,  rédigée 
par  M.  Garnier,.  &'appuieauff  osa  données.  Yoici.qtielques 
points^  principau]^^ 

BaAS  lis:  Kambodi;  :{ 

•      Sombor^     latit.-  N.  1^2*»  28^'  —  tongit;.  E.  I03<»  41'  30" 
Dans  lé  Laos  : 


Bassac,              latil 

t".  14«  54'  2fO', 

lbngit:I03«2r'30"* 

Oubôn, 

15«»  W 

Angkor  (Temple), 

13«  19'  45% 

lOP  33'  35" 

Sanyabouri, 

170  i^Qf 

100<>    1' 

Sièng-Gang,. 

ir  54' 

Luang-Prabang, 

19«  54/  20*' 

990  45' 

Muong-Long, 

21»  35'  20^ 

98«  22' 

Sièng-HongV 

22»    »  18f 

98»  28' 

Dans  le  Yuû-naô  : 

Se-mao. 

22*  47^  18" 

980  43' 

Yuen-kiang-tcheou, 

23P  36'  10" 

99»  47'  30» 

Lin-ngafir-fou, 

230  37'  50" 

1000  48' 

Yun-nan-fou, 

250    4'  19" 

100«  16' 

Tong-tchouèn-fou*, 

260  25'  34" 

100*  42' 

Ta-li-fou, 

250  43/ 

98»    8' 

Souï-tobeou-lbu, 

28*  47'  30" 

lOa»  22'  30" 

U  II  faut  voir  dims.  le  texte  \e^  remarques  de  IL  Gamîer  sur  quel* 
ques-unes  de  ces  déterminations. 

2.  Où  Texpédition  a  quitté  le  Hékong  pour  se  portendlirectcment  sur 
le  Yufi'-nan. 

3.  Où  est  la  tonba  de  M.  de  Lagrée. 


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Il  seraii  supâxfln  df insisier  do  nouveaa  sur  la  gnandaxur 
de  rexpédUion  du  Mékoiig  et  sur  Timportance  de  ses  ré^ 
saltatsw  C'est  8aD&  eontiredît  la.  pins  grande,  entreprise 
sdeDiifiqiae  qui  ait  eu  lieu  jusqu'à  présent  dans  rintérieur 
de  rindo-Ghine»  et  une  des  plus  marquantes  dans  This* 
toire  géograpluu|ae  de  F  Asie.  Un  fleuve  immense,,  qua  ron 
ne  connaissait  guère:  que  de  nom,,  exploré,  sondé,  levé  snr 
une  étendue  de  près  de  5(9iÛ  lieues  ;.  de  vastes  contrées  dont 
les  voyageurs  eurapéens.  avaient  k  peine  entrevu  quelques 
pointS'  isuliés,  reconnues  pour  la  première  fois  d'une  maf- 
nière  exacte  et  suivie  ;  des  populations  mal  connues  on 
tout  à  fait  ignorées^  dont  on  nous  a  décrit  les  mœurs,  le» 
habitudes,  le  culte  et  les  traits  physiques;  des  données 
toutes  nouvelles^,  aussi  précises  que  significatives,  appor- 
tées k  Tun  des  plus,  grands  et  des  plus  curieux  problèmes 
que  puissent  aujourd'hui  se  poser  les  études  ethnologiques; 
un  des  plus  beaux  monuments  religieux  de  TAsie,  et  au- 
jourd'hui un  des  plus  célèbres,  pour  la  première  fois  étu- 
dié, décrit,  représenté  dans  ses  moindres  détails  ;  par-dessus 
tout,  une  voie  nouvelle  d'investigations  scientifiques  et  de 
communications  politiques  ou  commerciales  ouverte  à  l'ac- 
tivité de  notre  jeune  colonie:  ce  sont  là,  pour  ne  citer  que 
les  points  principaux,  des  faits  acquis  dont  nul  ne  saurait 
méconnaître  l'immense  portée.  Ge  que  la  géographie  seule, 
l'objet  principal  sur  lequel  se  porte  ici  notre  attention,  a 
gagné  à  ce  fructueux  voyage,  nous  pouvons  l'apprécier  en 
présence  de  l'atlas  rédigé  par  M.  Francis  Garnier  :  la 
carte  de  l'Indo-Ghine  orientale  a  changé  de  face.  Il  reste 
sans  doute  encore  énormément  à  faire;  mais  grâce  au 
gouvernement  qui  a  compris  l'honneur  et  l'utilité  de  l'expé- 
dition, grâce  au  ministre  qui  l'a  organisée  et  patronée, 
grâce  aux  savants  officiers  qui  y  ont  déployé  une  habileté  et 
une  énergie  que  l'on  ne  saurait  trop  reconnaître,  la  route 
est  tracée  et  les  jalons  posés. 

La  vaste  péninsule  qui  se  développe  entre  le  delta  du 

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XXXII  NOTE  SUPPLÉMENTAIRE.  / 

Grange  et  le  golfe  du  Tonkin  est  actuellement  dévolue  à 
^active  émulation,  je  ne  veux  pas  dire  à  la  rivalité,  des 
deux  grandes  nations  maritimes  de  l'Europe,  la  France  et 
l'Angleterre  :  à  TÂngleterre,  maîtresse  de  l'Ârrakan  et  du 
Pégu,les  explorations  de  la  région  occidentale  ;  à  la  France, 
dont  le  drapeau  fiotte  sur  la  Basse-Gochinchine,  la  région 
orientale, —  et  nous  pourrions  dire  aussi  la  région  centrale  : 
car  les  meilleures  notions,  et  les  plus  complètes,  que  l'Eu- 
rope possède  sur  le  royaume  de  Siam,  c'est  à  un  prélat 
français  qu'elle  les  doit,  à  monseigneur  l'évêque  Pallegoix. 
L'Angleterre  a  beaucoup  fait  déjà  dans  l'écendue  de  son 
domaine,  par  ses  agents  politiques,  par  ses  ingénieurs,  par 
ses  voyageurs  et  ses  missionnaires  *  :  du  premier  coup,  par 
son  expédition  du  Mékong,  la  France  s'est  mise  au  môme 
niveau,  que  des  entreprises  nouvelles  vont  élever  encore 
dans  un  avem'r  prochain. 

1.  Crawfurd,  Francis  HamiltoD,  Mac  Leod,  Masson,  Phayre,  Yule, 
Sladen,  etc. 


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L'ANNÉE 

GÉOGRAPHIQUE 


1872 


AFRIQUE 


AFRIQUE   TROPICALE  DU   NORD 

LIVIN6ST0NE 


1.  Letters  aDd  despatches  of  D' Livingstonb  ,  November  1871  to 
Jaly   1872)    published    in   London    Times  and  others   jour- 

'    nais,  etc. 

2.  Liyingstone's  Despatches.  Parlementary  Papers.  Lond,  1872. 
3d.  1/2. 

3.  Livingstone  Search  and  relief  expédition.  Varions  commuDica- 
tions.  Proceedings  of  the  Rcy.  Geogr.  soc*  toI.  XVI,  n"  3,  july 
1872,  p.  145,  158,  184,  203,  225,  241. 

4.  M.  Stanley's  communications  to  the  British  Association. 
Brighton,  Aug.  1872  ;  Athenseuniy  n*  2339,  p.  246. 

5.  Discussions,  Notes  and  Memoirs  of  D*"  Cb.  T.  Bekr  on  Li- 
vingstone's  Letters  and  Stanley's  communications,  Times,  Athe" 
nœum,  and  priyate  letters. 

l'année  GÉOGR.  XI.  1 

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2  AFRIQUE.  (n°»1-10.) 

6  e  finding  of  Livingstone  by  H.  M.  Stanley.  Lond.  1872,  in-S» 
139  p.  1  sh.  (Hotten). 

Réimpression  des  Jettres  adressées  par  M.  Stanley  au  New  York 
Herald. 

7,  H.  M.  Stanley.  How  I  found  Livingstone;  including  travels  and 
adventures  in  Central  Africa,  and  four  Month's  résidence  with 
D'  livingstone.  Lond.  1872,  in-8^ 

S  I^EiTH  J'OHNSTON.  À  Sketch  map  of  the  Lake  région  of  Eastem 
Africa,  sdowing  D'  Livingstone*»  discoverfes  and  routes  from 
1866  to  1872.  Edimh.  (and  Lond.),  1872,  1  f>«  1  sh.  6  d. 

9.  E.  Behm.  D'  Livingstone's  Erforschung  der  oberen  Congo. 
MittheiL  de  Petermann,  1872,  nMl,  p.  405-412. 

M.  Belim,  dans  ce  mémoire  de  géographie  physique,  a  parfaitement 
établi  que  le  système  d'eaux  du  Loualaba,  reconnu  par  le  D**  Livings- 
tone à  ro.  et  au  S.  0.  du  Tanganika,  ne  peut  appartenir  au  bassin  du 
Nil  ;  mais  je  ne  sais  s'il  est  permis  encore  d'affirmer  qu'il  appartient  au 
bassin  du  Zaïre,  bien  qu'il  y  ait  de  grandes  probabilités.  Je  doute  que 
les  notions  acquises  autorisent  à  mettre  dès  à  présent  hors  de  cause 
rogovaï  et  surtout  le  Zambézi.  Il  me  parait  sage  de  suspendre  son  ju- 
gement. 

10.  H.  G.  Adams.  Livingstone's  Life  and  Adventures;  Lond,  1872, 
in-12.  3  sh.  6  d.| 


S  !•'.  Les  courses  et  les  itinéraires  de  Livingstone  dans  la  région  de  Tanganika^ 
depuis  le  commencement  de  l'expédition  actuelle  en  1866.  Aperçu  rétro- 
spectif. 

Les  vives  appréhensions  qne  le  manque  absolu  de  nou- 
velles directes  de  Livingstone  durant  près  de  quatre  années 
avait  fait  naître,  sont  enfin  dissipées.  On  a  depuis  quelques 
mois  des  lettres  écrites  de  la  main  du  voyageur.  Il  ne  semble 
pas,  jusqu'à  présent  du  moins,  que  les  investigations  du 
grand  explorateur  aient  embrassé,  à  beaucoup  près,  le 
cercle  qu'il  voulait  parcourir,  ni  que  ces  investigations  aient 
beaucoup  avancé  la  solution  des  grands  problèmes  qui  se 
rattachent  à  la  région  centrale  de  TÀfrique  :  les  communi- 
lions  que  l'on  vient  de  recevoir,  dispensées  d'une  main  un 
peu  avare,  contiennent  trop  peu  de  notions  positives  nettes 
et  précises.  Leur  tracé  sur  la  carie  n'y  remplirait  pas  jus- 
qu'à présent  de  bien  grands  vides.  On  ne  saurait  dissimu- 


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LIVINGSTONE.  3 

1er  qu'il  y  a  de  ce  côté  de  sérieuses  déceptions.  Mais  enfin 
les  amis  du  voyageur  sont  rassurés,  si  les  amis  de  la  science 
éprouvent  plus  d'un  regret;  et  peut-être,  d'ailleurs,  les 
documents  que  l'on  tient  en  réserve  nous  ménagent-ils 
quelque  surprise.  On  se  fait  difficilement  à  l'idée  que  sept 
années  de  courses  dans  une  région  inexplorée  n'aient  pas 
donné  à  un  voyageur  tel  que  Livingstone  de  résultats 
plus  décisifs  et   d'une  plus   haute   importance. 

Mais  procédons  par  ordre. 

'  lit  d'abord  rappelons  sommairement  les  antécédents  da 
VQyage. 

La  plupart  de  nos  lecteurs  n'ignorent  pas  sans  doute  que 
l'expédilipu  actuelle  est  la  troisième  à  laauelle  Livingstone 
s'est  dévoué  dans  les  régions  australes  de  l'Afrique, — sans 
compter  ses  travaux  antérieurs,  comme  missionnaire  de- 
puis 1840,  dans  les  contrées  situées  entre  la  colonie  du 
Cap  elle  Zambézi.  Ces  premières  courses  apostoliques  furent 
pour  lui  une  excellente  préparation  ;  elles  l'habituèrent  au 
climat  tropical,  et  elles  lui  rendirent  familières  les  mœurs 
et  les  habitudes  des  populations  natives.  Les  études  médi- 
cales de  sa  jeunesse  (il  est  né  en  Ecosse  en  1815)  étaient 
d'ailleurs  pour  lui  le  meilleur  des  passe-ports  au  milieu  des 
Noirs;  et  de  plus  il  avait  acquis  la  pratique  des  observa- 
tions scientifiques,  et  en  particulier  des  relevés  astronomi- 
ques. Jeune,  instruit,  énergique,  vigoureux  et  plein  d'ar- 
deur, Livingstone  était  dans  les  meilleures  conditions  qui 
•se  puissent  imaginer,  lorsqu'on  1852  il  entreprit  son  pre- 
mier voyage  d'exploration,  qui  est  encore  son  grand  titre 
d'honneur.  Cette  première  expédition,  qui  ne  dura  pas 
moins  de  quatre  années,  de  1853  à  1856,  le  conduisit  du 
centre  du  continent,  où  il  était  arrivé  par  le  sud,  à  Loanda 
sur  la  côte  du  Congo,  et  le  ramena  du  Congo  à  Quilimané, 
sur  la  côte  de  Mozambique,  lui  faisant  accomplir  ainsi,  le 
premier  et  jusqu'à  présent  le  seul  des  voyageurs  européens, 
la  traversée  entière  du  continent  d'une  côte  à  Tautre,  et 

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4  AFRIQUE.  (n°»  1-10.) 

enrichissant  la  carte  presque  vide  de  cette  région  de  TAfrique 
du  tracé  du  Zambézi  snr  une  partie  très-considérable  du 
cours  de  ce  grand  fleuve. 

La  deuxième  expédition,  de  1858  à  1861,  a  eu  pour  ré- 
sultat une  reconnaissance  plus  précise  du  Zambézi  infé- 
rieur, l'exploration  complète  du  Ghiré,  affluent  extrêmement 
remarquable  du  grand  fleuve  un  peu  au-dessus  du  Delta, 
et  la  découverte — car  on  peut  la  qualifier  ainsi  —  du  vaste 
lac  auquel  le  Ghiré  sert  de  déversoir.  Les  Portugais  du 
seizième  siècle  avaient  eu  quelque  notion  de  ce  lac^ 
que  d'Anville ,  d'après  leurs  mémoires,  inscrivit  sur  sa 
grande  carte  de  1749,  sous  le  nom  de  Maravi  ;  mais  ces 
anciennes  notions  portugaises  étaient  tellement  vagues  et 
flottantes,  que  les  géographes  de  la  première  moitié  du 
siècle  actuel  l'avaient  effacé  de  leurs  cartes.  Il  figure  ac- 
tuellement sur  les  nôtres  sous  le  nom  de  Nyassa,  —  nom 
qui  n'est  qu'une  appellation  générique  désignant  une 
«  grande  eau,  »  et  qui  se  retrouve  à  l'équateur  sous  la  forme 
Nyanza.  Il  est  tout  à  fait  convenable  de  lui  conserver  le 
nom  consacré  de  Maravi,  qui  est  celui  de  la  plus  puissante 
des  tribus  riveraines. 

G'est  en  1865  que  Livingstone  a  entrepris  son  expédition 
actuelle,  qui  est  la  troisième.  Indépendamment  des  vues 
philanthropiques  qui  l'inspirèrent  en  partie,  —  Livingstone 
n'ayant  jamais  cessé  de  travailler  de  tout  son  pouvoir  à  la 
complète  extinction  du  trafic  des  esclaves  dans  le  Sud  de 
l'Afrique,  —  les  investigations  purement  scientifiques  y 
devaient  avoir  une  grande  part.  L'explorateur  s'y  propo- 
sait quatre  objets  principaux  :  remplir  le  vide  qui  existait 
encore  sur  nos  cartes  entre  leNyassa  du  sud  (le  Maravi)  et 
le  Tanganîka;  achever  la  reconnaissance  de  ce  dernier  lac^ 
dont  Burton  et  Speke,  qui  le  virent  les  premiers  en  1858, 
n'ont  pu  donner  qu'un  aperçu  très-incomplet;  étendre  les 
reconnaissances  aussi  loin  que  possible  dans  la  contrée  ab- 
solument vierge  qui  est  à  l'ouest  du  Tanganîka,  dans  la  di- 

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LIVINGSTONE.*  5 

rection  de  l'Atlantique  ;  enfin,  porteries  explorations  anssi 
avant  que  possible  au  nord  du  Tanganîka,  dans  la  di- 
rection de  réquateur,  où  se  pressent,  non  résolues,  tant  de 
questions  complexes  qui  tiennent  à  l'origine  du  Nil.  Ce 
plan,  avec  ses  ramifications  nombreuses,  est  bien  en  effet 
celui  qui  s'impose  à  tout  explorateur  scientifique  de  cette 
région  centrale;  c'est  à  la  nature  et  à  l'étendue  des  réponses 
positives  que  ces  questions  auront  reçues,  que  se  mesurera, 
en  définitive,  la  valeur  du  voyage. 

En  quittant  l'Angleterre  dans  les  derniers  mois  de  1865, 
Livingstone  s'était  rendu  directement  à  Bombay  ;  c'est  de  là, 
après  avoir  terminé  les  derniers  préparatifs  de  son  voyage, 
qu'il  gagna  la  côte  orientale  d'Afrique  au  mois  de 
mars  1866.  (Voir  Y  Année  géographique^  t.  VI,  1867,  p.  40 
et  suiv.) 

Après  avoir  touché  à  Zanzibar  et  tenté  sans  succès  de 
pénétrer  dans  l'intérieur  par  la  Rovouma  (rivière  qui  dé- 
bouche à  la  mer  des  Indes  vers  10^  et  demi  de  latitude  sud, 
et  dont  les  sources  sont  dans  les  montagnes  qui  couvrent  à 
l'jest  lelacMaravi),  Livingstone  rétrograda  de  25  milles  dans 
la  direction  de  Zanzibar,  jusqu'à  la  baie  de  Makindani. 
C'est  de  ce  point  qu'il  s'enfonça  décidément  dans  l'intérieur 
et  gagna  la  Rovouma.  On  reçutà  Zanzibar  des  lettres  datées 
de  cette  rivière  le  18  mai  1866  :  bien  des  mois  devaient 
s'écouler  avant  qu'on  n'eût  d'autres  nouvelles. 

Livingstone  avait  franchi  les  montagnes  et  gagné  le  lac, 
dont  il  contourna,  lui  et  son  escorte,  l'extrémité  méridio- 
nale. Mais  de  l'autre  côté  du  lac ,  une  partie  de  ses 
hommes,  refusant  d'aller  plus  loin,  l'abandonna;  et  revenus 
à  Zanzibar  (au  commencement  de  décembre  1866)  où  les 
rappelait  l'appât  d'une  rémunération  promise,  ils  imagi- 
nèrent, pour  justifier  leur  retour,  une  histoire  sinistre  qui 
fit  croire  pendant  longtemps  à  la  mort  violente  de  l'explo- 
rateur. 
Livingstone,  cependant,  poursuivant  sa  route  successive- 

> 

uiyiiizeu  uy  >.^«  v^ v^'pc  iv^ 


6  AFRIQUE.  (n°»  1-10.) 

ment  à  l'ouest,  au  nord  et  au  uôrd-ouest,  arriva  lé  28  jan- 
vier 1867,  neuf  mois  après  son  départ  de  là  côte,  à  uti  lieu 
appelé  Bemba,  dont  il  détermina  la  position  à  lOMÔ'  de 
latitude  australe  ;  ce  lieu  est  au  nord-ouest  du  lac  Ma- 
ravi,  dans  la  direction  du  Tanganîka.  Une  caravane  qui  se 
rendait  à  la  côte  lui  donna  Tôccasion  dé  faire  parvenir 
de  ses  nouvelles  à  Zanzibar,  et  par  Zanzibar  â  ses  amis 
de  Londres.  Ses  lettres  de  Bemba,  oii  il  séjourna  deux 
mois,  tracent  un  bon  itinéraire  de  la  route  qu'il  avait 
parcourue,  et  font  bien  connaître  la  nature  des  pays  tra- 
versés. Ces  lettres  ont  été  rapportées  au  t.  VU  (1868),  de 
Y  Année  gèograghique^  p.  259  et  suiv.;  et  M.  Habenicht, 
dans  les  MîUheilungen  de  Petermann  (année  1870,  carte 
n°  9),  a  construit  fort  habilement  sur  ces  données  la  route 
du  voyageur. 

Après  les  dépêches  du  3  février  1867,  un  long  silence  se 
fait  de  nouveau;  la  difficulté  des  communications  isole  eu*» 
coreune  fois  le  voyageur.  Cependant  un  an  plus  fard, 
presque  jour  pour  jour  (le  5  février  1868),  on  avait  â  Zan- 
zibar de  nouvelles  informations  apportées  par  un  marchand 
arabe  qui  arrivait  du  Grand  Lac,  c'est-à-dire  du  Tadgânîka  ; 
ces  nouvelles  lettres  étaient  datées  de  la  ville  de  Cazembé, 
et  elles  allaient  jusqu*aù  14  décembre  1867.  La  ville  de 
Cazembé,  dont  Ift  vrai  nom  est  Lunda,  ou  plutôt  Lucenda, 
(Cazembé  est  le  titre  du  chef  nègre  qui  y  a  sa  résidence,  et 
le  nom  du  royaume),  la  ville  de  Cazembé,  disons-nou«,  est 
une  place  considérable  et  un  centre  important;  elle  avait 
déjà  été  vue,  depuis  la  fin  du  dernier  siècle,  par  plusieurs 
Portugais,  par  Lacerda,  notamment,  en  i  798,  et  par  le 
major  Monteiro  en  1831.Livingstone  y  aura  sûrement  fait 
des  observations,  mais  il  n'en  est  pas  question  dfns  ses  let- 
tres; les  données  approximatives  déduites  des  itinéraires  la 
mettent  par  8**  \  environ  de  latit.  S.,  vers  le  26*  degré 
de  longitude  à  TE.  du  méridien  de  Paris.  Les  aperças 
transmis  par  Livingstone  sur  la  configuration  générale  et 

uiymzeu  uy  ■v_jv^v>'^i^ 


LIVINGSTONE.  7 

Thydrographia  de  la  région  qui  enveloppe  au  sud  et  à  Touest 
le  Tanganîka,  sont  très-ûnportants  et  entièrement  nouveaux. 
Le  caractère  général  de  toute  cette  contrée  est  celui  d'une 
grande  région  lacustre.  Le  voyageur  y  a  vu  trois  lacs  d'une 
étendue  considérable  (beaucoup  moins,  cependant,  que  le 
Tanganîka),  et  on  lui  en  a  mentionné  d'autres.  L'un  de  ces 
Jacs,  appelé  Liemba^  que  le  voyageur  a  contourné  en  par- 
tie, paraît  avoir  son  écoulement  dans  le  sud  du  Tanganîka. 
Trois  autres  grands  lacs,  le  Bangouéolo^  leMoéro  elVOulen- 
ghèy  se  suivent  dans  cet  ordre  du  sud  au  nord  ou  au  nord- 
ouest,  le  troisième  de  ces  lacs  étant  situé,  par  approxima- 
tion, à  deux  degrés  à  l'O.  du  méridien  central  du  Tanganîka, 
c'est-à-dire  à  200  kilomètres,  un  peu  plus  ou  moins.  Le 
lac  le  plus  méridional,  le  Bangouéolo,  doit  être  à  peu  près 
sous  le  12*  degré  de  latit.  S.  Il  paraît  que  ces  trois  der- 
niers lacs  sont  reliés  entre  eux  par  une  suite  continue 
d'eaux  courantes.  Le  Bangouéolo  s'écoule  dans  le'Moéro 
par  une  rivière  appelée  Louapoula;  le  Moéro  va  se  déver- 
ser dans  rOulenghé  par  le  Loualaba;  et  TÔulenghé,  d'a- 
près les  rapports,  porte  ses  eaux  au  Loufira^  grande  rivière 
qui  coule  à  Fouest  des  lacs  et  se  dirige  au  nord.  Une  autre 
rivière  considérable,  le  Tchambézê^  —  qu'il  faut  se  garder 
de  confondre  avec  le  Zambézi,  quoique  les  noms  soient  au 
fond  les  mêmes,  —  le  Tchambézé,  disons-nous,  coule  de 
l'E.  à  rO.  au  sud  du  Tanganîka,.  et  vient  aboutir  au  Ban- 
gouéolo. Je  tâche  d'exposer  clairement  l'ensemble  de  ce 
système  d*eaux  ;  mais  Tesquisse  ci-contre  que  j'en  ai  tracée 
.en  donnera  mieux  encore  une  idée  nette.  Une  grande  ques- 
tion est  de  savoir  où  va  le  Loufira,  qui  reçoit,  d'après  les 
informations  qui  précèdent,  les  eaux  de  la  chaîne  de  lacs 
commençant  au  Bangouéolo.  Le  D"^  Livingstone  est  très- 
disposé  à  y  voir  la  tête  la  plus  méridionale  du  bassin  du 
Nil,  et  cette  hypothèse  s'est  même  emparée  de  son  esprit 
d'une  manière  un  peu  exclusive.  Elle  a  néanmoins  contre 
elle  de  fortes  raisons  physiques.  Il  y  aurait  plus  de  proba- 

uigiuzeuoy  Google 


fi  AFRIQUE.  (n«'    1-10.) 

bilité  à  en  faire  la  tête  du  bassin  du  Zaïre,  ainsi  que 
M.  Behm  de  Gotha  l'a  montré,  dans  un  récent  mémoire, 
par  de  fortes  raisons  (ci-dessus,  n®  9)  ;  il  n'y  en  aurait  pas 
moins,  sinon  plus,  à  le  regarder  comme  appartenant  au 
bassin  supérieur  du  Zambézi.  C'est  aux  futurs  explorateurs 
à  vider  d'une  manière  définitive  ces  questions  capitales, 
sur  lesquelles  il  pourrait  être  dangereux  d'asseoir  des  spé- 
culations anticipées. 

Tous  les  noms  qui  viennent  d'être  mentionnés  se  repré«- 
sentent  si  souvent  dans  les  dépèches  récentes  de  Livingstone, 
auxquelles  nous  arriverons  tout  à  l'heure,  qu'il  était  indis- 
pensable de  les  remettre  sous  les  yeux  du  lecteur. 

Nous  reprenons  la  suite  des  marches  de  Livingstone. 

Après  les  lettres  écrites  de  Gazembé  le  14  décembre  (867, 
on  en  reçoit  d'autres  encore,  datées  de  la  même  ville,  le 
8  juillet  1868  :  c'est  dans  celles-ci  que  se  trouvent  les  dé- 
tails physiques  que  nous  venons  de  résumer  (Voir  le  t.  IX 
de  VAnnée  géographique,  p.  239;.  Puis  quatre  années 
s'écoulent  sans  nouvelles  directes.  On  n'a  plus,  durant 
ces  quatre  années,  que  çk  et  là  des  percées  accidentelles 
sur  les  mouvements  du  voyageur.  U  était  arrivé  à  Oud- 
jidji,  sur  le  bord  oriental  du  Tanganika,  et  il  avait  fait  de 
là  diverses  excursions  sur  lesquelles  nous  n'avons  pas  de 
détails. 

Le  10  mars  1871,  le  docteur  Kirk  reçut  des  lettres  de 
deux  voyageurs  arabes,  lui  apprenant  que  «  le  voyageur 
chrétien  »  se  trouvait,  en  octobre  ou  novembre  1870,  dans 
une  localité  nomméeMonakoso,à  Ménama  (Manyéma,  pro- 
bablement, canton  à  l'ouest  du  Tanganika),  avec  Moham- 
men  ebn  Gharib,  «  sans  secours,  sans  ressources,  et  accom- 
pagné d'un  petit  nombre  de  serviteurs  »  [helpless^  without 
means^  wilh  few  followers). 

De  trente-quatre  lettres  qu'il  avait  adressées  en  Angle- 
terre jusqu'en  juin  1869,  aucune  n'était  parvenueà  destina- 
tion.  A  cette  époque  il  était  sur  le  point  d'explorer  le  lac 

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LIVINGSTONE.  9 

à  roaest  du  TaDganika,  «  dans  Tespoir  de  rejoindre  le 
Nil.» 


S  2.  Expédition  organisée  à  Londres  an  commencement  de  1872, 
pour  aller  à  la  recherche  de  Livingstone. 

Ces  informations,  parvenues  à  Londres,  excitèrent  dans 
le  public  et  au  sein  de  la  Société  de  géographie  une  légi- 
time émotion.  Sur  la  proposition  de  son  président,  sir 
Henri  Rawlinson,  la  Société  décida,  à  la  fin  de  187 1 ,  qu'une 
expédition  serait  envoyée  à  la  recherche  de  Livingstone, 
pour  lui  porter  l'assistance  morale  et  au  besoin  le  secours 
matériel  qu'il  attendait  depuis  longtemps.  Un  appel  fut 
fait  au  sein  de  la  Société,  et  une  somme  importante  promp- 
tement  réunie.  La  commission  fut  immédiatement  désignée; 
elle  se  composait  du  fils  même  de  Teiiplorateur,  M.  Oswald 
Livingstone,  et  de  deux  officiers  de  la  marine  royale,  le  lieu- 
tenant Henn  et  le  lieutenant  Dawson.  C'est  ce  dernier  qui 
eut  la  direction  de  l'entreprise.  L'expédition  quitta  l'An- 
gleterre le  9  février;  elle  gagna  promptement  le  Caire  et  de 
là  Suez,  où  devait  se  trouver  un  paquebot  en  partance 
pour  la  côte  orientale  d'Afrique  (Voir  ci-dessus  le  n*  3  de 
la  bibliographie). 

Une  caravane  dbvait  être  organisée  à  Zanzibar,  o&  la 
commission  était  arrivée  vers  le  milieu  de  mars.  Mais  là  se 
rencontrèrent,  à  ce  qu'il  paraît,  des  difficultés  de  plus  d'une 
sorte.  La  saison  des  pluies,  Tinsuffisance  des  moyens, 
peut-être  le  manque  d'énergie  ou  le  défaut  d'accord  :  on  ne 
sait  trop.  Toujours  est-il  que  l'expédition  a  complètement 
échoué,  ou,  pour  mieux  dire,  qu'elle  n'a  même  pas  franchi 
le  seuil  africain.  Les  Anglais,  qui  n'appuient  pas  volontiers 
sur  les  petits  mécomptes  de  l'orgueil  national,  ont  entouré 
celui-ci  d'un  silence  prudent.  Il  fautdire  aussi  que  l'inac- 
tion du  lieutenant  Dawson  et  du  fils  de  Livingstone  a  pu, 
jusqu'à  un  certain  point,  trouver  son  excuse  dans  ce  que  la 


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10  AFRIQUE.  (n^  1-10.) 

commission  apprit  à  Zanzibar  de  l'expédition  individuelle 
d'un  Américain,  qui  depuis  un  an  avait  fait,  seul,  ce  qu'elle- 
même  projetait  de  faire»  c'est-à-dire  s'était  lancé  résolu- 
ment à  la  recherche  du  grand  explorateur.  Cet  Américain 
est  M.  Stanley,  dont  nous  avons  maintenant  à  raconter 
1  intrépide  odyssée. 


S  3.  Un  conp  d'audace  da  journalisoM  atnéricain.  té  reporter  H.  Stanley. 
Sa  mission,  son  voyage,  son  retour,  ses  récits. 

Si  la  république  Nord- Américaine  n'a  pa^  le  monopole 
des  choses  extraordinaires,  des  entreprises  marquées  au 
coin  d'une  audacieuse  écergie,  elle  en  offre  du  moins  des 
exemples  qu'aucun  peuple  n'a  surpassés.  Le  voyage  de 
M.  Stanley  n'en  est  pas  un  des  'moins  singuliers. 
M.  Henry  Stanley  est  un  simple  reporter  attaché  au  prin- 
cipal journal  de  New  Yoï'k,  ce  que  dans  le  journalisme 
français  nous  appelons  un  correspondant;  sa  mission  est  de 
parcourir  le  continent  européen,  d'être  présent  partout  où 
se  produit  quelquQ  événement  à  sensation,  et  de  faire  en 
sorte  que  son  journal  devance,  coûte  que  coûte,  les  infor- 
mations des  entreprises  rivales.  Dans  le  courant  de  1870, 
on  commençait  à  se  préoccuper  d'une  manière  sérieuse  du 
long  silence  de  Livingstone;  en  Amérique,  en  Angle- 
terre, et  même  en  France  où  la  guerre  n'avait  pas  encore 
éclaté,  de  fréquents  articles  dans  les  journaux  et  les  revues 
surexcitaient  déjà  le  sentiment  public.  Le  directeur  du  iVeto 
York  Heraldy  M.  James  Gordon  Bennett ,  qui  se  trouvait 
alors  à  Paris,  pensa  qu'il  y  avait  là  un  élément  d'intérêt  et 
de  curiosité  de  premier  ordre,  «  La  recherche  de  Living- 
stone, »  dût-elle  même  ne  pas  aboutir,  devait  éveiller  vive- 
ment la  curiosité  générale.  De  la  pensée  k  l'exécution,  il  n'y 
eut  que  l'intervalle  d'un  télégramme.  Appeler  M.  Stanley, 
qui  était  en  Espagne,  et  lui  -confier  la  périlleuse  mission 
comme  la  chose  du  monde  la  plus  naturelle,  ce  fut  l'affaire 


yGoogk 


STANLEY.  1 1 

de  deux  jours  :  Télectricité  et  la  vapeur  ont  supprimé  les 
distances.  Parti  de  Paris  sans  avoir  pris  le  temps  de  dé- 
boucler sa  malle,  M.  Stanley  arrivait  à  Zanzibar  vers  la  fin 
de  décembre,  et  dès  les  premiers  jours  de'  1871  il  s'occu- 
pait activement  de  recruter  ses  porteurs,  d'organiser  son 
escorte,  de  disposer  sa  caravane,  de  tout  préparer  pour  sa 
mise  en  route.  Il  s'informait  près  des  ihdigènes  et  des 
Européens,  notant  avec  soin  les  renseignements  utiles,  ac« 
cueillant  assez  mal  les  observations  dictées  par  la  prudence. 
«  Son  plan  paraissait  arrêté,  nous  disait  dernièrement  un 
témoin  oculaire  ;  M.  Stanley  recevait  avec  mauvaise  humeur 
tout  avis  de  nature  à  y  apporter  le  moindre  empêchement, 
le  plus  léger  retard.  »  Son  directeur  lui  avait  dit  ;  Allez  !— 
comme  le  serviteur  oriental,  il  aurait  volontiers  répondu  : 
«  Entendre,  c'est  obéir.  »  Il  apportait  dans  la  mission  qu'il 
avait  reçue  sa  ponctualité  professionnelle,  et  c'est  ainsi  qu'il 
l'a  remplie.  Il  est  certain  que  sous  celte  impulsion  vigou- 
reuse, M.  Stanley  a  fait  ce  que  tous  jugeaient  impossible, 
ce  que  même  après  lui  la  piété  filiale  n'a  pas  cru  pouvoir 
entreprendre. 

Malgré  tout,  M.  Stanley  ne  put  se  mettre  en  route  avant 
les  premiers  jours  d'avril,  se  proposant  de  gagner  Oudjidjî,  -" 
sur  le  Tanganîka;  deux  mois  après,  au  commencement  de 
juin,  il  arrivait  àOunyâ-Nyembé,  centre  de  la  colonie  arabe 
de  rintérieur.  Là  un  incident  imprévu  l'arrêta.  Le  roi  de 
Mirambo,  entre  Ounyâ-N;yembé  et  Oudjidji,  avait  déclaré 
qu'à  l'avenir  il  ne  laisserait  passer  aucune  caravane  sur  son 
territoire.  On  en  vint  aux  coups,  il  y  eut  des  morts  et  des 
blessés.  Échappé  à  la  bagarre,  mais  affaibli  par  la  fièvre, 
—  dangereux  tribut  que  l'Européen  paye  inévitablement  à 
ces  climats,  — M.  Stanley  dut  s'arrêter  deux  mois  à  Ounyâ- 
Nyembé.  Obligé  de  contourner  le  territoire  de  Mirambo, 
ayant  à  lutter  contre  toutes  sortes  de  difficultés,  Tintrépide 
reporter  n'en  arriva  pas  moins  le  3  novembre  en  vue  d'Oud- 
jidji.  Il  faut  ici  lui  laisser  la  parole  : 

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12  AFRIQUE.  (n***  1-10.) 

«  Voulant  faire  mon  entrée  avec  tout  l'éclat  possible,  je 
disposai  ma  petite  troupe  de  manière  à  lui  donner  une  ap- 
parence respectable.  En  tête  flottait  le  drapeau  américain; 
ensuite  venait  l'escorte  armée,  qui  reçut  l'ordre  de  faire 
une  décharge  de  mpusqueterie.  Venaient  ensuite  les  ba- 
gages, lés  chevaux  et  les  ânes;  enfin  je  marchais  moi-même 
à  la  tête  de  Tarrière-garde.  Le  bruit  des  armes  à  feu  amena 
au-devant  de  la  caravane  tous  les  habitants,  qui  firent  re- 
tentir l'air  de  leurs  acclamations  et  de  leurs  instruments  de 
musique. 

«  Quand  le  cortège  entra  dans  la  ville,  je  remarquai,  à 
ma  droite,  un  groupe  d'Arabes  au  centre  duquel  se  tenait 
un  homme  de  race  blanche,  pâle,  à  barbe  grise,  et  dont 
l'aspect  contrastait  avec  les  visages  brûlés  par  le  soleil  des 
personnes  qui  Tentouraient,  Il  portait  une  jaquette  de  laine 
rouge  et  une  casquette  galonnée  d'or  de  marin  ;  je  reconnus  à 
l'instant  le  D' Livingstone. 

«  Mon  premier  mouvement  fut  de  me  précipiter  vers  lui 
et  de  l'embrasser  ;  mais  j'étais  en  présence  des  Arabes,  qui, 
habitués  à  cacher  leurs  sentiments,  devaient  être  disposés 
à  m'eslimer  moi-même  suivant  que  je  saurais  maîtriser  les 
miens.  De. plus,  un  chef  arabe  d'un  ordre  élevé  se  tenait  à 
côté  de  moi,  et  me  confirma  dans  la  résolution  de  ne  mani- 
fester aucun  signe  de  joie  ou  d'émotion.  Je  m'avançai  donc 
lentement  vers  le  grand  voyageurjelesaluaietlui  dis:  «Le 
docteur  Livingstone,  je  suppose?  »  A  quoi  celui-ci  se  borna 
à  répondre  :  «  Oui.  »  Ce  ne  fut  que  quelques  heures  plus 
tard  que  seuls  ensemble,  assis  sur  une  peau  de  chèvre, 
nous  pûmes  échanger  nos  félicitations  et  nous  raconter  nos 
aventures.  » 

.M.  Stanley  put  constater  que  le  D'  Livingstone  était 
très- bien  portant,  plein  de  force,  inébranlé  par  les  épreu- 
ves qu'il  avait  traversées,  et  bien  résolu  à  terminer  la 
tâche  qu'il  s'est  imposée. 


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STANLEY  ET  LIVINGSTONE.  13 

S  4.  M.  Stanley  près  de  Livingstone  :  suite.  Leur  excursion  jusqu'à  l'ez- 
trémité  nord  du  Tanganika.  La  question  du  grand  lac  et  de  son  écoulement 
est  réglée. 

M.  Stanley  est  resté  quatre  mois  et  quatre  jours  près  du 
D' Livingstone,  du  10  novembre  1871  au  14  mars  1872. 
Ces  quatre  mois,  selon  les  récits  de  l'heureux  reporter,  ont 
été  des  mieux  employés.  Des  courses  fructueuses  ont  été 
faites  de  compagnie,  et  même  le  monde  savant  n'apprendra 
peut-être  pas  sans  quelque  surprise  que  c'est  à  l'instiga- 
tion du  journaliste  américain  que  Livingstone  doit  d'avoir 
enfin  compris  l'importance  d'une  complète  reconnaissance 
du  Tanganîka  dans  sa  partie  du  nord,  et  d'avoir  résolu 
cette  grande  question  depuis  si  longtemps  en  suspens.  Il 
faut  entendre  là-dessus  M.  Stanley  :  c'est  à  Brighton  que 
cette  révélation  assez  inattendue  a  été  faite.  «  Lorsque  je 
proposai  à  M.  Livingstone  une  course  en  commun  à  la  tète 
du  lac,  le  docteur  ne  doutait  pas  que  le  Tanganîka  commu- 
niquait avec  l'Albert  Nyanza.  D  avait  aperçu,  pensait-il, 
un  courant  constant  des  eaux  du  Tanganîka  vers  le  nord, 
et  tous  les  Arabes,  ainsi  que  les  nègres,  persistaient  à  dé- 
clarer que  la  rivière  Rousizi  sortait  de  l'extrémité  nord  du 
lac.  Dès  que  je  lui  eus  montré  de  quel  intérêt  et  de  quelle 
importance  était  la  solution  définitive  de  cette  question,  il 
se  prépara  au  voyage  sans  perdre  un  instant.  Jusque-là,  me 
disait-il,  il  n'avait  attaché  aucune  importance  à  cet  objet 
{he  hadnot  regarded  the  subject  asof  any  importance)  ^  la 
ligne  centrale  de  drainage  (c'est-k-dire  le  Loualaba)  ayant 
absorbé  tout  son  temps  et  toute  son  attention....  »  Il  est  à 
croire  que  la  relation  du  D'  Livingstone  ne  présentera 
pas  les  choses  absolument  sous  le  même  jour;  mais  au  fond 
le  sujet  est  d'un  sérieux  intérêt.  Continuons  le  récit. 

«  Partis  d'Oudjidji  sur  un  bateau  (c'était  le  20  novem- 
vembre),  et  nous  dirigeant  au  nord,  nous  continuâmes  de 
serrer  la  côte  d'Oudjidji  et  d'Urandi,  explorant  soîgneu- 

uiyiuzeuDy  Google 


14  AFRIQUE.  (n°'  1-10.) 

sèment  du  regard  chaque  crique,  chaque  enfoncement,  afin 
que  rissue  que  Ton  disait  être  par  là  quelque  part  ne  pût 
nous  échapper.  Nous  faisions  de  15  à  20  milles  par  jour. 
Nous  passâmes  en  vue  de  montagnes  ayant  jusqu'à  2  et 
3000  pieds  au-dessus  du  niveau  du  lac,  et  chaque  soir  nous 
fûmes  en  danger  d'être  attaqués  par  les  naturels;  mes 
hommes  faisaient  bonne  garde  toute  la  nuit  pour  éviter  les 
surprises.  Il  nous  fallut  dix  jours  pour  atteindre  Textrémité 
du  lac.  Sur  la  côte  opposée,  des  montagnes  très-hautes  et 
très-escarpées  limitaient  la  vue  et  semblaient  impénétra- 
bles. Le  lac  est  d'une  très-grande  profondeur;  je  jetai  la 
sonde  à  2  milles  de  la  côte,  et  je  ne  trouvai  pas  le  fond  avee 
190  mètres  de  ligne.  Plus  au  sud,  le  docteur  Livingstone, 
dans  une  traversée,  n'avait  pas  trouvé  fond  avec  une  sonde 
de  550  mètres.  Les  montagnes  qui  enveloppent  l'extrémité 
nord  du  Tanganîka  le  serrent  de  si  près,  sans  aucune  ou- 
verture pour  laisser  échapper  les  eaux,  sauf  les  ravins  et 
les  gorges  étroites  par  lesquelles  descendent  les  courant» 
tributaires,  que  l'eau  vînt-elle  à  s'élever  de  150  mè- 
tres au-dessus  de  son  niveau  actuel,  le  contour  du  lac 
n'en  éprouverait  pas  de  changement  notable.  La  veille 
encore  de  notre  arrivée  au  Rousizi,  un  Noir  affranchi  de 
Zanzibar  nous  affirmait,  en  réponse  à  nos  questions,  qu'il 
avait  été  sur  la  rivière  la  veille  même,  et  qu'elle  sortait  du 
lac.  Sur  cette  affirmation  si  positive  nous  délibérâmes,  le 
D'  Livingstone  et  moi,  sur  ee  que  nous  aurions  à  faire 
dans  le  cas  oii  nous  trouverions  là  un  canal  naturel  condui- 
sant à  r  Albert  Nyanza';  et  nousdécidâmes  que  le  cas  échéant 
nous  descendrions  jusqu'à  ce  dernier  lac  et  que  aous  en 


1.  P'après  le  tracé  plus  ou  moins  hypothétique  de  nos  cartes,  VAU 
bert  Nyanza,  ou  lac  de  Baker,  qui  se  trouve  à  peu  près  sous  le  même 
méridien  que  le  Tanganîka^  n'en  serait  séparé  que  par  una  assez  faiblo 
distance;  mais  il  est  bien  probable  que  l'Albert  I^yan^a,  quelle  que 
soit  sa  forme  encore  ignorée  dans  cette  direction,  descend  beaucoup 
moins  au  sud  qu'on  ne  Ta  supposé* 


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STANLEY  ET  LIVINGSTONE.  15 

côtoierions  le  pourtour/ où  peul-être  nous  pourrions  ren- 
contrer sir  Samuel  Baker. 

«r  Nous  trouvâmes  enfin  la  bouche  de  la  rivière.  Elle  est 
au  {ond  d'une  petite  baie  d'un  mille  de  large  environ, 
et  elle  est  masquée  par  une  épaisse  forêt  de  roseaux. 
L'entrée  n'en  était  pas  visible;  nous  nous  mîmes  à  la 
suite  de  quelques  canots  qui  disparaissaient  mystérieuse- 
ment à  travers  d'étroites  ouvertures  au  milieu  des  ro- 
seaux. C'est  ainsi  que  nous  trouvâmes  l'entrée  cen- 
trale. 

«  Ici  tous  les  doutes  sur  cette  question  si  la  rivière  sor- 
tait du  lac  ou  si  elle  y  entrait,  s'évanouirent  bientôt,  car  un 
fort  courant  d'eau  brunâtre  vint  nous  assaillir,  et  ce  cou- 
rant avait  une  telle  violence  qu'il  nous  fallut  de  grands  ef- 
forts pour  le  surmonter.  Plus  haut,  la  rivière  s'élargit  en 
lagunes  à  droite  et  à  gauche.  La  plaine  alluviale  à  travers 
laquelle  le  Rousizi  s'écoule  dans  le  lac  a  au  commence- 
ment une  larg^ar  d'environ  12  milles  (une  vingtaine  de  ki- 
lomètres), sur  15  milles  de  longueur;  elle  se  rétrécit  gra- 
dvellement  et  9e  termina  en  pointe»  Les  chaînes  de  montJi- 
gnes  des  deux  cptés  SQ  rapprochent  »lors  de  manière  à  ne 
laisser  entre  ^IIbs  qu'un  i,ntervalle  de  2  milles,  la  chaîne  de 
r#st  dépassant  le  point  où  celle  de  l'ouest  se  termine.  Plu9 
loin  dans  le  N.  0*,  on  n'aperçoit  plus  qu'un  véritable  chaos 
de  montagnes. 

c  Le  chef  Raubinga,  dont  la  résidence  est  voisine  da 
apu9iû,  et  qui  est  un  grand  voyegeur,  discutait  volontiers 
av»c  nous  les  quesiions  de  géographie;  il  nous  dit  que  le 
Rousizi  sortait  du  lai3  Kivp,  nappe  d'eau  d'une  journée  de 
longueur  sur  une  demi-joumée  de  large,  d'où  la  rivière 
s'échappait  par  une  ouverture  dans  la  montagne.  A  une 
vingtaine  de  milles  au-dessus  de  son  embouchure  (3Q  kilo- 
mètres environ),  le  Rousizi  reçoit  le  Louanda,  ou  Rouanda, 
rivière  qui  vient  du  N.  0.  ;  on  compte  en  outre  dix-sept 
autres  tributaires.  Roubinga  avait  été  jusqu'à  six  journées 

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16  AFRIQUE.  (n°*  I-IO.) 

vers  lé  nord*,  et  il  n'avait  pas  entendu  parler  d'aine  grande 
nappe  d'eau  telle  que  l'Albert  Nyanza.  Ce  lac  ne  peut 
donc  avoir  du  côté  du  sud  l'extension  considérable  que  Ba- 
ker lui  attribue. 

A  notre  retour  vers  Oudjidji,.nous  suivîmes  la  côte  oc- 
cidentale du  Tanganîka.  Nous  relâchâmes  à  Ouvira,  où 
Ton  nous  montra  la  plage  où  les  canots  de  Burton  et  Speke 
s'étaient  ensablés.  Non  loin  vers  le  sud  se  dresse  le  pic  de 
Sumbourizi^  à  une  hauteur  de  près  de  1400  mètres  au- 
dessus  du  niveau  du  lac.  » 


S  5 .  Informations  transmises  par  le  D'  Livingstone  lui-même. 
Le  système  hydrographique  de  la  région  du  Tanganîka. 

M.  Stanley  a  rapporté  un  journal  de  la  main  du  D'  Li- 
vingstone, et  en  même  temps  toute  une  série  de  dépêches  et 
de  lettres  adressées  au  ministre  des  affaires  étrangères  à 
Londres,  au  Président  de  la  Société  de  Géographie,  h  ses  pa- 
rents, à  ses  amis,  et  enfin  au  directeur  du  journal  améri- 
cain qui  lui  a  dépéché  l'inappréciable  secours  de  M.  Stanley. 
Du  journal  de  l'explorateur,  rien  encore  n'a  transpiré  au 
dehors,  pas  même  une  indication  des  documents  qui  peu- 
vent y  être  contenus;  mais  plusieurs  lettres  livrées  aux 
journaux  renferment  des  aperçus  d'un  grand  intérêt,  aper- 
çus d'une  nature  tout  à  fait  générale,  à  la  vérité,  mais  ce- 
pendant suffisants  pour  calmer  la  première  impatience. 
En  attendant  que  des  points  astronomiques  permettent  de 
fixer  sur  la  carte  les  données  assez  vagues  fournies  par 
les  communications  actuelles,  il  faut  les  recueillir  cepen- 
dant, et  les  grouper  de  manière  à  en  faire  ressortir  la 
liaison. 

L'attention  s'y  concentre  sur  deux  points  dominants  :  la 

1.  Ce  qui  nous  porte  bien  près  du  l"  [degré  au  sud  de  l'équateur,  et 
confirme  ce  que  j'ai  dît  plus  haut  au  sujet  du  tracé  hypothétique  de 
TAlbert  Nyanza  sur  nos  cartes. 


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LIVINGSTONE.  17 

ligne  de  partage  qui  sépare  les  eaux  appartenant  au  bas- 
sin du  Zambézi  de  celles  qui  s'écoulent  (là  du  moins  où 
elles  sont  connues)  dans  la  direction  du  nord  et  de  l'ouest, 
à  l'occident  du  Tanganîka;  et,  en  second  lieu,  ce  que  l'ex- 
plorateur a  pu  observer  ou  apprendre  de  ce  dernier  sys- 
tème d'eaux. 

On  a  vu  que  le  D'  Livingstone  serait  très-disposé  à  af- 
firmer, —  si  même  il  n'affirme  positivement,  —  que  ces 
eaux,  qui  forment  une  suite  de  lacs,  ou  qui  s'écoulent  en 
rivières  considérables  au  sud  et  à  l'ouest  du  Tanganîka,  re- 
présentent la  tète  du  bassin  du  Nil  ;  mais  c'est  là,  nous  le 
répétons,  une  pure  hypothèse  que  rien  de  positif  ne  justi- 
fie, que  de  fortes  raisons  repoussent,  au  contraire.  Il  faut 
donc  écarter  ce  qui  n'est  que  conjecture  et  spéculation,  et 
s'en  tenir  aux  faits  observés  par  l'explorateur. 

Après  une  vue  générale  des  hautes  terres,  pleines  d'une 
quantité  innombrable  de  sources  et  d'eaux  courantes,  qui- 
forment  la  ligne  de  partage  entre  le  bassin  fermé  du  grand 
lac  central  et  les  eaux  allant  au  Zambézi,  Livingstone  ajoute 
que  sur  les  700  miUes  de  longueur  de  cette  ligne  de  par- 
tager il  en  a  reconnu  600;  mais  il  n'abandonnera  pas  la 
tâche,  dit-il,  qu'il  n'ait  vu  les  derniers  100  milles  de  cette 
région,  qui  doivent  en  être  la  portion  la  plus  intéres- 
sante. Et  l'explorateur  développe  son  opinion  dans  un  long 
paragraphe  consacré  aux  Montagnes  de  la  Lune  de  Ptolé- 
mée,  marquées  par  le  Géographe  alexandrin  «  précisé- 
ment au  douzième  parallèle  de  latitude  sud  »,  paragra- 
phe où  nous  ne  suivrons  pas  le  courageux  explorateur, 
car  au  point  de  vue  de  la  géographie  critique  il  renferme 
plus  d'erreurs  que  de  mots.  Ces  erreurs  purement  théori- 
ques ne  touchent  en  rien,  heureusement,  à  l'excellence  des 
investigations  de  l'observateur.  Que  Livingstone  s'égare 
dans  de  fausses  notions  sur  la  géographie  classique,  ou 
dans  des  théories  pour  le  moins  très-hasardées  sur  les 
sources  du  Nil,  peu  importe  :  il  en  sera  de  ses  recherches 

l'année  CÉOGR.  XI.  2 

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18  AFRIQUE.  (n«^  1-10.) 

comme  de  celles  des  astrologues  et  ded  alchimistes,  qui, 
tout  en  poursuivant  leurs  théories  chimériques,  n'en  ont 
pas  moins  travaillé  à  Tayancement  de  la  Chimie  et  de  la 
science  des  astres. 

Voici  maintenant  ce  que  Liviugstone  rapporte  dti  Cotirfe 
de  la  grande  rivière  qui  se  forme  de  celte  multitude  dô 
courants  descendus  de  la  ligne  de  partage,  —  le  Loualaba 
central,  comme  il  l'appelle.  Entré  dans  le  lac  Bangouéolo 
sous  le  nom  de  îchamhèzé  (entre  le  11»  et  le  12*  degrë  de 
latitude  australe),  le  grand  courant  central  eii  ressort  sous 
le  nom  de  Lôuapoula,  pour  aller  directement  att  nord,  &  la 
distance  de  plus  de  2  degrés,  se  jeter  dans  le  lac  Mdéfd 
après  avoir  passé  non  loin  de  la  ville  de  Gazembé.  «  Bled-* 
tôt  après  avoir  quitté  le  lac  Moéro,  continue  Lîvingstôûô 
(dépêche  au  comte  de  Clareûdon,  écrite  le  1"  novembre 
,1871),  la  grande  rivière,  appelée  ici  Loualaba,  décrit  vers 
l'ouest  un  large  circuit  d'au  moins  180  milles;  ptiig,  aprèi 
avoir  couru  au  nord  pendant  un  certain  espace,  elle  décrit  de 
nouveau  une  large  courbe  à  l'ouest  d'environ  120  mille«, 
en  inclinant  quelque  peu  au  sud,  après  quoi  elle  tourne 
au  N.  E.,  et  reçoit  le  Lomamé,  ou  Loéki,  grande  rivière 
qui  traverse  le  lac  Lincoln.  Après  le  confluent,  la  rivière 
rencontre  un  grand  lac  qui  renferme  des  lies  nombreuses. 
C'est  le  quatrième  lac  du  drainage  central,  et  ce  ne  peut 
être  le  lac  Albert;  car  en  admettant  comme  passablement 
exacte  la  lougitude  que  Speke  assigne  à  Oudjidji  *,  et  sup- 
posant que  mon  estime  n'est  pas  énormément  fautive,  la 
grande  rivière  lacustre  centrale  est  â  cinq  degrés  environ 
à  l'ouest  du  Tanganîka  *. 

ce  La  moyenne  des  nombreuses  observations  comparées 
faites  sur  le  haut  Tanganîka  d'après  le  baromètre  et  le 

1 .  A  peu  pr&s  30«  E.  (te  Greenwich,  27»40'  E.  de  Paris. 

2.  Ceci  modifie  considérablement  l'esquisse  de  M.  Aug.  Petermann 
au  vol.  de  1870  des  MiUheilungen  (carie  u«  9,  déjà  citée).  Mais  il  con- 
vient d'atleudre  la  publication  des  journaux  mômes  du  voyageur. 

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LIVINGSTONE.  19 

point  d'ébullition  de  l'eau,  est  de  2880  pieds  anglais  (878 
mètres)  ;  mais  j'ai  plus  de  confiance  dans  les  baromètres 
que  dans  Tautre  procédé,  et  ils  indiquent  un  peu  plus  de 
3000  pieds  (à  peu  près  915  mètres).  Il  y  a  un  pouce  de 
moins  sur  la  partie  inférieure  du  Loualaba  central,  ce  qui 
revient  à  peu  près  à  l'altitude  attribuée  à  Gondokoro  (près 
de  2000  pieds,  eûyiron  600  mètres).  » 

En  tout  ceci,  on  ne  voit  pas  bien  clairement  ce  qui  ap^ 
partient  à  Texplorateur,  et  ce  qui  provient  seulement  d'in- 
formations. Le  journal  seul  pourra  donner  à  chaque  chose 
sa  valeur  réelle. 


S  6.  Informations  transmises  par  Livingstone.  Suite.  Quelques  notes 
ethnographiques. 

Voici  maintenant  une  note  d'une  autre  nature,  dont  l'in- 
térêt est  purement  ethnographique. Le  pays  de  Manyéma, 
auquel  la  note  se  rapporte,  est  à  l'ouest  du  Tanganîka,  aux 
environs  du  lac  Oulenghé.  Non-seulement  aucun  Européen 
n'avait  jamais  visité  le  peuple  du  Manyéma  avant  Livings-* 
tone,  mais  les  traitants  arabes  eux-mêmes  ne  se  sont  jamais 
avancés  jusque-là.  Aussi  la  valeur  de  Fivoire  y  est-elle  tout 
à  fait  inconnue.  Les  défenses  des  éléphants  sont  abandon- 
néçs  dans  les  forêts  avec  les  animaux  tués. 

<c  Beaucoup  de  femmes  du  Manyéma  sont  très-joUes, 
dit  Livingstone;  leur  teint  n'est  pas  très-foncé,  et  leur  phy- 
sionomie est  d'un  aspect  agréable.  Les  hommes  et  les  fem*^ 
mes  sont  d*une  condition  très-supérieure  à  celle  de  leurs 
esclaves,  qui  paraissent  avoir  conscience  de  leur  infériorité. 
La  plupart  des  hommes  sont  d'une  taille  élevée,  et  n'ont 
rien  des  caractères  que  nous  croyons  appartenir  à  la  race 
nègre.  » 

On  voit  que  si  les  communications  du  D'  Livingstone 
laissent  à  désirer  jusqu'à  présent  bien  des  indications  pré** 

•■■> 

uigiiizeu  uy  >.^«  v^  v^'pt  iv^ 


20  AFRIQUE.  (N^'  1-10.) 

cises,  indispensables  à  la  géographie  positive  aussi  bien 
qu'à  la  cartographie,  elles  ouvrent  déjà  de  vastes  horizons 
sur  les  parties  inconnues  du  plateau  de  l'Afrique  australe. 
M.  Stanley  quitta  Lîvingstone  le  14  mars  1872^  et  rega- 
gna heureusement  la  côte,  ^oyi  il  est  revenu  en  Europe.  Le 
24  juillet^  il  débarquait  à  Marseille. 

La  première  impression,  li  faut  le  dire,  ne  lui  a  pas  été 
favorable.  L'étonnant  succès  d'une  mission  où  tant  d'autres 
avaient  échoué,  et  que  l'on  s'était  h:ibituéà  regarder  comme 
entourée  de  difficultés  insurmontables;  quelques   détails 
singuliers,  qui  semblaient  contraires  au  caractère,  à  la  phy- 
sionomie, en  quelque  sorte,  du  I>  Livingstone  ;   certaines 
particularités  de  mise  en  scène,  la  qualité  môme  et  la  pro- 
fession de  M.  Stanley,  le  souvenir  de  supercheries  restées 
fameuses  dans  l'histoire  des  voyages   africains,  et  aussi 
quelques  réticences  dans  les  communications  qui  effaçaient 
en  quelque  sorte  la  hgure  austère  du  grand  explorateur 
derrière  le  personnage  nouveau  qui  venait  s'imposer  ino- 
pinément à  l'attention  publique  :  tout,  dans  le  premier  mo- 
ment, souleva  une  défiance  universelle.  La  Société  de  Géo- 
graphie de  Londres  elle-même  partagea  cette  défiance,   et 
Texprima  sans  beaucoup  de  ménagement  dans  une  lettre 
de  son  président  au  plus  important  des  journaux  de  Lon- 
dres. Elle  était  pourtant  injuste, il  faut  maintenant  le  recon- 
naître ;  la  masse  de  documents  que  Ton  a  auj  ourd'hui  sôus 
les  yeux  ne  laisse  plus  place  au  moindre  doute.  Il  faut  re- 
connaître aussi  que  dans  l'accomplissement  de  sa  hasar- 
deuse entreprise,  M.  Stanley  a  déployé  une  énergie,  une  ré- 
solution, un  sang-froid  et  une  intelligence   que  peut-être 
bien  peu  d'hommes,  à  sa  place,  auraient  eus  au  même  de^ 
£?ré. 

Parmi  les  lettres  de  réhabilitation  publique  —  l'expres- 
sion n'est  pas  trop  forte  —  qui  ont  été  adressées  de  très- 
haut  lieu  à  M.  Stanley,  je  citerai  seulement  celle  du  fils 
du  D' Livingstone,  revenu  de  Zanzibar  en  Europe  avec  1ère- 

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SCHWEINFURTH.  '      21 

porter  américaiD,  à  cause  des  particularités  qu'ellerenferme 
sur  le  journal  du  grand  explorateur  : 

«  M.  Henry  Stanley ,  dit  cette  lettre,  m'a  remis  aujour- 
d'hui le  journal  du  D'  Livingptone,  mon  père,  écrit  jour 
par  jour,  signé  et  cacheté  par  lui,  avec  des  instructions  écri- 
tes de  sa  main  extérieurement.  Nous  devons  à  M.  Stanley, 
pour  le  soin  qu'il  a  apporté  à  ces  dépêches  et  en  même  temps 
pour  tout  ce  qu'il  a  fait  pour  mon  père,  nos  meilleurs  re- 
mercîments.  Nous  n'avons  pas  la  plus  petite  raison  de  dou- 
ter que  ce  journal  ne  soit  pas  celui  de  mon  père,  et  je  cer- 
tifie que  les  lettres  que  M.  Stanley  nous  a  apportées  sont 
des  lettres  de  mon  père  et  non  d'autres  personnes.  ^ 


II 

AFRIQUE  TROPICALE  DU  NORD 

SCHWEINFURTH 


11.  Briefenund  Notizen  in  die  Berl.  Zeitschrift  der  Geogr.,und  Pe- 
termann's  MiUheilungen,  1872,  avec  cartes. 

12.  D'  Schweinfurth*s  Bericht  ûber  den  Verlauf  seiner  Reise; 
Zeitschr,  der  Gesellsch.  fur  hrdkunde  au  Berlin,  VI,  1872 
(n-  39),  p.  284-288. 

13.  D'  G.  Schweinfurth's  Hôhenmessungen  in  Chartum,  dem 
Djur-Land  un  Dar  Fertit,  berechnet  von  D*"  J.  Hann.  MiUhei- 
lungende  Petermann,  1872  (n"  11),  p.  432-33. 


La  pensée  finale  des  explorations  de  Livingstone  est  la 
recherche  de  l'origine  du  Nil.  Cette  recherche  séculaire,  at- 
taquée aujourd'hui  avec  la  vigueur  et  la  persévérance  que 
notre  temps  apporte  aux  investigations  scientifiques,  doit 
inévitablement,  dans  un  temps  prochain,  aboutir  à  un  ré- 
sultat décisif.  En  même  temps  que  le  grand  explora- 
teur anglais  y  consacre  dans  le  sud  son  indomptable  éner* 


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%i  AFRIQUE,  (n*»'  11-13.) 

gîe,  d'autres  poursuivent  le  problème  par  le  nord  en 
remontant  le  fleuve  Blanc  et  ses  branches  supérieures.  Parmi 
ceux-là,  le  D'  Schwemfurthestmaintenantaupremierrang. 
M.  Schweinfiirth,  s'écartant  de  Ta  ligne  ouverte  par  Speke 
et  qu'a  si  heureusement  suivie  M.Baker,  s'est  jeté  résolu- 
ment à  Tonest  du  fleuve  Blanc  et  de  Gondokoro,  dans 
une  région  que  Ton  regarde  comme  le  domaine  des  fièvres 
et  des  cannibales.  C'est  là  que  coule  le  Diour,  fréquenté  par 
les  traitants  d'ivoire  ;  c'est  de  là  que  vient  le  Bahr  el-Gha- 
»1,  qui  se  réunit  au  fleuve  Blanc  sous  le  9^egré  de  latitude, 
et  qui  prend  aujourd'hui  dans  l'hydrographie  du  haut  Nil 
une  importance  qu'on  n'avait  pas  soupçoonée.  Les  courses 
du  D'  Schweinfarth  se  sont  étendues  très-loin  dans  cette 
direction  de  l'Ouest  (à  100  lieues  au  moins  de  Gondokoro)  ; 
«t  il  a  remonte  jusqu'à  près  de  trois  degrés  N.  de  l'équateur 
(voirie  vol.  précédent  de  VAnnée^  p.  250).  Ses  récoltes  en 
ethnographie  et  en  histoire  naturelle  paraissent  avoir  été 
d'une  grande  richesse,  en  même  temps  que  ses  relevés  et 
-ses  itinéraires  apportent  à  la  carte  de  ces  contrées  en- 
core si  peu  connues  une  quantité  d'informations  nou- 
velles. 

Dans  une  communication  verbale  à  la  Société  de  Géogra- 
phie de  Berlin  (V.  ci-dessus,  n*  12),  M.  Schweinf urth  a  ré- 
sumé l'ensemble  de  son  voyage  depuis  l'origine;  nous  tirons 
de  cette  intéressante  communication  l'aperçu  suivant,  qui 
donne  une  haute  idée  de  la  somme  d'acquisitions  scientifi- 
ques qu'aura  fournies  cette  laborieuse  expédition. 

Parti  d'Europe  au  milieu  d'août  1868,  le  D' Schwein- 
farth était  à  Khartoum  à  la  fin  du  mois  de  novembre.  Le  gou- 
yerneur  général  du  Soudan  égyptien, Djafèr Pacha,  se  mon- 
tra très-favorable  à  l'entreprise,  et  usa  de  son  influence  pour 
mettre  le  voyageur  en  rapport  avec  Ghattas,  un  des  princi- 
pau35  traitants  d'ivoire  dans  la  région  du  Diour,  à  l'ouest  du 
haut  fleuve  Blanc,  Sans  l'appui  et  le  concours  d'un  homme 
tel  que  ce  Ghattas,  qui  jouit  d'une  grande  prépondérance 

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SCHWEINFURTH.  -  3 

près  des  chefs  et  des  populations,  il  n'y  aurait  pas  eu,  dit 
le  docteur,  de  réussite  possible. 

•c  Le  commerce  des  esclaves  et  celui  dç  l'ivoire  sont  les 
deux  principaux  aliments  du  trafic  entre  Khartoum  et  la  ré- 
gion des  sources  du  Nil.  Le  troque  de  Tivoire  aboutit  à  une 
exportation  annuelle  de  la  valeur  de  500  000  thalers  ;  elle 
est  dans  les  mains  de  six  grandes  maisons  et  dune  douzaine 
de  petites  qui  leur  sont  associées.  Pour  tenir  leur  approvi- 
sionnement complet,  les  traitants  sont  obligés  de  pénétrer 
toujours  plus  avant  dans  l'intérieur;  ils  y  sont  suivis  par  les 
explorateurs  européens,  et  aussi  par  le  marchand  d'escla- 
ves arabe,  le  fléau  de  ces  contrées.  Chaque  marchand  d'i- 
voire exploite  un  district  particulier  où  d'habitude  il  installe 
son  séribaj  c'est-à-dire  un  dépôt  central  que  la  population 
indigène  est  obligée  de  pourvoir  de  vivres,  et  d'oîi  les  agents 
européens  rayonnent  dans  un  cercle  plus  ou  moins  étendu. 
Une  population  musulmane  d'environ  12  000  âmes  s'est 
^insi  installée  *dans  le  pays,  tenant  en  servage  200000  in- 
digèoes  sur  un  territoire  d'au  moins  70000  kilomètres 
carrés  ^  » 

te  5  japvier  1869,  le  D'  Schweinfurth  quittait  Khar- 
toum pour  remonter  le  Nil.  Le  principal  sériba  de  Ghat- 
tas,  le  grand  traitant  de  Khartoum,  est  un  village  ap- 
pelé Mesçhéra-el-Rek,  composé  de  huttes  en  paille 
comme  tous  les  centres  d'habitation  de  cette  région.  Mes- 
çhér&  est  près  du  Bahr  el-Ghazal ,  fleuve  considérable 
formé  par  la  réunion  du  Bahr  el-Arab  et  du  Diour,  le 
premier  venant  de  l'ouest,  le  second  du  sud,  tous  deux 
jtlimeutés  par  de  nombreux  affluents.  De  ces  deux  bran- 
ches supérieures,  le  Bahr  el-Arab  est  de  beaucoup  la  plus 
considérable  par  sa  profondeur  et  le  volume  de  ses  eaux; 
aussi  le  D""  Schweinfurth  ne  serait  pas  éloigné  de  lui  at- 


1.  L'équi raient  de  douze  départements  fraiiçais. 

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24  '  '  AFRIQUE.  (N^»  11-13,) 

tribuer  la  primauté  sur  le  Kir*,  patmi  les  grandes  riviè- 
res dont  se   forme  le  Nil  supérieur. 

Meschéra-el-Rek,  qui  devint  alors  le  quartier-général  dn 
voyagenr,  est  situé  dans  le  pays  des  Dinka.  Ceux-ci,  de 
même  que  les  Nouèrs  et  les  Chillouks,  deux  peuples  qui 
habitent  les  terres  basses,  forment  un  remarquable  con- 
traste avec  leurs  voisins  du  sud  et  de  l'ouest,  les  Bongo, 
les  Mitou,  les  Nyam-Nyam  et  les  Kredj ,  peuples  qui  vi- 
vent dans  les  terres  hautes,  sur  un  plateau  de  grès  rouge 
abondant  en  fer.  Ces  derniers  ont  une  certaine  nuance 
rouge  sur  leur  peau  noire  ;  ils  sont  plus  trapus  et  moins 
grands  que  les  Nègres  du  plat  pays.  Les  Bongo,  que  les 
Dinka  nomment  Dor|  furent  la  peuplade  que  le  voyageur 
apprit  d'abord  à  connaître  ;  ils  sont  agriculteurs,  et  la 
traite  des  esclaves  en  a  fort  diminué  le  nombre  ^. 

M.  Schweinfurth  fit  ensuite  connaissance  avec  une  autre 
peuplade  agricole,  les  Mitou,  qu'il  rencontra  dans  une 
excursion  à  l'est,  sur  la  rivière  Roi,  et  à  Mvolo,  lieu  déjà 
visité  par  Petherick.  Sur  ces  entrefaites,  il  fut  invité  par 
Aboû-Sammat,  l'un  des  traitants  du  bassin  du  Bahr  el- 
Ghazal,  à  accompagner  une  expédition  dans  le  pays  des 
Nyam-Nyam,  Il  accepta  avec  empressement,  et  Ton  par- 
tit à  la  fin  du  mois  de  janvier  1870.  L'explorateur  a  dû 
à  cette  excursion  de  très-intéressantes  découvertes. 

«  A  peine  eut-on  traversé  le  Tondj ,  un  des  affluents  du 
Diour,  que  l'on  rencontra  les  premiers  Sandé,  —  c'est  le 
nom  que  se  donnent  les  Nyam-Nyam.  Bans  son  extérieur, 
et  ses  habitudes,  ce  peuple  a  une  physionomie  très-carac- 
térisée.  Il  porte  des  tresses  de  cheveux  descendant  jusqu'à 
mt-corps  ;  ses  grands  yeux  en  amande  sont  très-écartés  l'un 


1.  Nom  indigène  du  fleuve  Blanc  au-dessus  du  confluent  du  Bahr 
el- Ghazal. 

2.  M.  Schweinfurth,  dans  sa  communication,  a  donné  des  détails 
étendus  sur  la  physionomie  et  les  mœurs  de  ces  peuples. 


y  Google 


SCHWEINFURTH.  25 

de  Tautre,  le  nez  est  large  mais  long,  la  taille  est  moyenne, 
.  le  bnste  est  assez  long,  bien  que  la  plus  grande  stature 
ne  dépasse  pas  1  mètre  80  centimètres.  Ils  s'aiguisent  les 
canines  en  pointe,  afin  de  s'en  servir  comme  d'une  arme 
dans  les  combats  ;  ils  s'habillent  de  peaux  et  gardent  la 
tête  nue,  à  l'exception  des  chefs  qui  ont  seuls  le  droit  de 
s'orner  le  front  d'une  coiffure  en  peau  de  béte.  Ils  se  ser- 
vent peu  de  l'arc  et  de  la' flèche;  leurs  armes  habituelles 
sont  la  lance,  et  une  espèce  de  couteau  en  forme  de  fau- 
cille. Ils  chassent  et  ils  pèchent,  mais  à  peine  s'ils  grat- 
tent le  sol,  qui  leur  fournit  sans  travail  une  foule  de  plan- 
tes nourricières.  Ils  n'ont  pas  de  bestiaux  ;  ils  entretien- 
nent des  chiens  et  des  poules,  et  sont  grands  amateurs 
de  chair  humaine.  J'ai  rapporté  à  Berlin  plusieurs  crânes 
d'hommes  servis  dans  leurs  repas  d'anthropophages.  Les 
Nyam-Nyam  obéissent  à  des  chefs  nombreux  ;  rien  que 
dans  la  portion  orientale  du  territoire,  j'en  ai  compté  une 
vingtaine,  tous  investis  d'une  grande  autorité  sur  le  menu 
peuple.  Le  premier-né  hérite  du  pouvoir,  et  ses  frères 
sont  établis  comme  vassaux  sur  les  divers  districts.  Il  y  a  là, 
naturellement,  une  cause  de  fréquentes  guerres  civiles.  Le 
territoire  des  Nyam-Nyam ,  qui  s'étend  très-loin  dans 
l'ouest,  représente  certainement  plus  de  160  000  kilomè- 
tres carrés. 

a  Au  sud  des  Nyam-Nyam,  à  partir  du  quatrième  degré 
de  latitude  N.,  habite  la  tribu  des  Mombouttou,  qu'un 
peuple  mixte  cantonné  au  nord  4©  rOuëllé  sépare  des 
Nyam-Nyam.  L'Ouêllé  est  un  puissant  fleuve  de  huit 
cents  pieds  de  largeur,  et  de  20  pieds  de  profondeur  là 
où  je  l'ai  traversé  ;  il  coule  dans  la  direction  de  l'ouest, 
et  ce  ne  peut  guère  être  que  le  Châri  qui  va  déboucher 
dans  le  lac  Tchad.  Au  sud  du  Ouêllé,  on  est  chez  les 
Mombouttou. 

c  Ge  peuple  et  son  pays  firent  sur  moi  une  impression 
de  nouveauté  plus  grande  encore  que  les  Nyam-Nyam. 

u,y,uzc*uoy  Google 


26  '  AFRIQUE.  (n"  11-13.) 

Une  végétation  splendide,  des  palmiers  oléifères,  des 
cannes  à  sucre,  des  bananiers,  d'autres  plantes  tropicales  ; 
des  hommes  d'un  teint  encore  plus  clair  que  les  habitants* 
du  plateau  de  grès  rouge,  qui  d'ailleurs  se  prolonge  ici  ; 
des  gens  couleur  de  café  moulu,  des  hommes  vêtus  d*é- 
çprces  de  figuier,  des  femmes  presque  nues,  des  chignons 
cylindriques  sur  toutes  Jes^  têtes  :  voilà  ce  qui  me  frappa 
towt  d'abord  chez  les  Mombouttou.  L'anthropophagie  est 
ici  plqs  enracinée  encore  que  chez  les  Nyam-Nyam  ;  et 
cependant  les  Mombouttou  sont  loin  de  manquer  d'intel- 
ligence. Ils  ont  un  état  social  réglé,  ils  connaissent  plu- 
sieurs arts,  et  s'entendent  mieux  que  les  Nyam-Nyam  et  les 
BoDgo  à  la  iabrication  du  fer  et  du  cuivre.  Leur  roi 
Mounsa,  plus  puissant  que  ses  voisins,  nous  accueillit 
amicalement  ;  il  donpa  même  des  fêtes  en  notre  hon- 
neur, où  figurèrent  des  Akka, 

«  La  nation  naine  des  Akka  réside  au  sud  des  Mom- 
bouttou, et  leur  est  en  partie  soumise.  Les  Akka  n'attei- 
gnent jamais  plus  d'un  mètre  et  demi-  Leur  prognathisme 
est  très -prononcé  ;  ils  ont  de  petites  mains,  de  petits 
pieds.  Très-agiles  de  leur  nature,  ils  se  servent  fort  ha- 
bilement de  la  lance  et  de  l'arc  pour  chasser  l'éléphant. 
Je  voulais  çmmener  uu  de  ces  nains  en  Europe  ;  mais 
l'Akka  que  j'avais  choisi  est  mort  en  Nubie,  dans  le  cours 
du  voyage  de  retour. 

fi  En  revenant,  dans  le  pays  des  Nyam-Nyam,  la  cara- 
vane eut  à  repousser  une  attaque,  et  son  chef,  Aboû-Sam- 
pat,  fut  grièvement  blessé.  Pendant  l'arrêt  nécessité  par 
la  guérison  de  cette  blessure,  je  fis  un  petit  voyage  aux 
sources  du  Dipur.  Au  mois  de  juillet,  je  rentrais  enfin  dans 
le  ^ériba  de  Ghattas. 

«  De  courtes  excursions  remplirent  les  mois  suivants. 
J'entrepris  ensuite  une  seconde  exploration  dans  le  pays 
des  Nyam-Nyam,  à  la  suite  d'une  expédition  pour  laquelle  • 
tous  Içs  possesseurs  de  sériba  avaient  réuni  leurs  forces. 

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SCHWEINFURTH.    ^  27 

Mais  là  je  vis  pâlir  ma  bonne  étoile  :  le  !•' décembre  1871, 
un  incendie  détruisit  le  sériba  de  Gbattas  et  anéantit  une 
grande  partie  de  mes  coUectioas  et  de  mes  provisions  ;  en 
même  temps  nous  recevions  la  nouvelle  d'une  défaite  com- 
plète de  Tavant-garde  de  Tarmée  des  traitants. 

ce  II  fallut  songer  an  retour  ;  mais,  avant  de  reprendre 
le  chemin  de  l'Europe,  j'utilisai  les  six  mois  pendant  les- 
quels je  dujfepcore  rester  dans  le  bassin  du  Bahr  el-6hazal. 
Je  poussai  une  pointe  à  l'ouest,  «dana  h  pays  des  Kredj; 
J9  dépassai  de  quatre  fortes  journées  de  marche  l'endroit 
le  plus  occidental  atteint  précédemment  par  M.  de  Heû- 
gHn*.  Les  Kredj,  les  Golo  et  les  Séré  ont  été  réduits  par 
la  traite  d'une  manière  terrible;  l'année  dernière  il  y  avait 
encore  5700  marchands  d'esclaves  chez  ces  misérables 
peuplades.  La  plupart  de  ces  marchands  sont  de  petits 
trafiquants  qui  arrivent  dans  ces  pays  avec  des  ânes  char- 
gés de  coton  ;  ils  échangent  leur  coton  contre  quatre  ou  cinq 
têtes  noires,  puis  repartent  pour  le  Nord.  Le  commerce  de 
l'ivoire  sauve  jusqu'à  un  certain  point  de  ce  fléau  les  ter^ 
ritoires  situés  plus  à  l'Est.  » 

Le  8  juin  1871,  M.  Schweinfurth  s'embarquait  en  canot 
pour  descendre  le  Nil;  le  27  juillet,  il  était  à  Khartoum  ; 
le  26  septembre,  il  partait  de  Souakim.  Le  2  novembre,  il 
touchait  le  sol  européen,  à  Messine,  après  trois  ans  et 
quatre  mois  d'absence. 


1.  M.  de  Heuglin  accompagnait  en  1861  les  dames  de  Tinné  dans 
leur  pénible  voyage. 


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APRIQDË.  (n»'  14-16.) 

III 


LES   AUTRES  EXPLORATIONS  DU  HAUT-NIL. 


14.  Alfr.  Penet.  Lettres  du  Nil  Blanc;  Gorrespondanoe  inédite  clas- 
sée et  publiée  par  M.  Cl.  Perroud.  Annales  de  VAin,  p.  97-176, 
Bourg-en-Bresse,  1871,  tn-8*. 

Notes  d'un  grand  intérêt  ponr  Thistoire  géographique  du  haut  bassin 
du  Nil,  depuis  1840  jusqu^en  1860. 

15.  Ernst  Marno's  Nacbrichten.  Mittheil.  de  Petermann,  1872,  n'S, 
p.  319;  n»  12,  p.  450-456,  avec  une  carte. 

16.  Nouvelles  de  sir  Sam.  Baker,  oct.  1871,  dans  les  Proceedings 
de  la  Soc.  de  Géogr.  de  Londres,  vol.  XVI,  n»  3,  p.  1S7. 


S  1.  Excursion  de  M.  £m.  Marno  en  1871  dans  la  yallée  du  Bahr  el-Airek. 

Nous  avons  fait  connaître,  dans  notre  précédent  volume 
(p.  253),  le  trèsyintéressant  voyage  de  M.  Ernest  Marno 
dans  les  parties  du  bassin  du  Bahr  el-Azrek  qui  relèvent 
de  Tautorité  égyptienne,  et  sa  tentative  de  traversée  du  pays 
des  Gallas.  En  1871,  M.  Marno  a  renouvelé  ses  courses 
dans  les  mêmes  parages,  mais  il  ne  paraît  pas  qu'il  ait 
songé  quant  à  présent  à  une  seconde  tentative  d'explora- 
tion des  contrées  inconnues  qui  touchent  fiu  sud-ouest  de 
l'Âbyssinie.  M.  Marno  a  fait  parvenir  au  D'  Petermann 
une  relation  de  son  pren^ier  voyage,  avec  les  matériaux 
d'une  carte  qui  s'élabore  actuellement  à  Gotha,  et  dont 
l'actif  directeur  des  Mittheilungen  annonce  la  publication 
prochaine.  M.  Marno  a  atteint  le  10"  degré  45'  de  lalit.  N., 
par  31^  49'  environ  de  longitude  à  l'Est  du  méridien  de 
Paris. 


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SAMUEL  BAKER.  29 

S  2.  Sir  Samuel  Baker. 

Depuis  les  dernières  lettres  de  M.  Baker,  que  nous 
avons  publiées  dans  notre  dernier  volume  (p.  255),  on  a 
reçu  à  Londres  des  nouvelles  du  voyageur.  On  n'aura  pas 
oublié  que  le  double  objet  de  la  mission  armée  confiée  à 
M.  Baker  par  le  vice-roi  d'Egypte  est  de  fonder  près  du 
fleuve  Blane,  au-dessus  de  Gondokoro,  un  établissement 
assez  fort  pour  mettre  fin  à  la  chasse  ^aux  esclaves,  et  en 
même  temps  de  pousser  les  investigations  géographiques 
dans  la  direction  des  grands  lacs.  Sur  ce  dernier  point, 
aucun  fait  nouveau  n'est  encore  annoncé  ;  mais  rétablisse- 
ment égyptien  est  en  bonne  voie  de  formation.  Voici  ce 
qu'on  lit  dans  les  dépêches  parvenues  du  Caire  au  Fordgn 
Office f  à  Londres,  à  la  date  du  21  janvier  1872  : 

«c  Les  dernières  lettres  de  sir  S.  Baker  sont  du  22  octo- 
bre 1871;  à  cette  date,  il  était«à  20  milles  au  nord  de  Gon« 
dokoro,  sur  le  fleuve  Blanc. 

<  Sir  Samuel  était  parti  de  Taoufikiya,  par  9^  26'  de 
latît.  N.y  le  11  décembre  1870%  avec  son  escadrille  de 
cinquante-neuf  barques  armées,  et  son  propre  steamer, 
suivi  de  sa  dahabièh  ;  il  avait  atteint  Gondokoro  (latit.  4^55') 
le  15  avril.  La  flottille  entière  ne  rejoignit  que  le  22  mai. 

c  Sir  Samuel  prit  officiellement  possession  du  pays  au 
nom  du  khédive,  et  s'efforça  de  persuader  aux  indigènes 
(les  Bari)  de  se  soumettre  volontairement  au  gouvêrneinent 
égyptien.  Les  Bari  ne  s'y  montrèrent  pas  du  tout  disposés, 
et  ils  commencèrent  les  hostilités  contre  l'expédition  ;  sir 
Samuel,  alors,  dut  prendre  à  sq^  tour  l'initiative,  afin  de 
les  soumettre  par  la  force. 

<  Quoique  l'expédition  fût  à  court  de  provisions,  et  que 
l'on  eût  dû  rationner  la  troupe,  sir  Samuel  n'en  a  pas  ntoins 

1,  Voirie  précédent  volume  de  VÀnnée  géogr.y  p.  255. 

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30  .  AFRIQUE.  (n^»   14-16.) 

pris  possession  d'une  des  parties  les  plus  fertiles  du  pays 
des  Bari;  il  y  a  trouvé  du  blé  eu  abondance,  et  de  ce  côté 
il  se  montre  assez  tranquille  ^  » 

S  té  M.  de  BiÂeAoïit.  ta  longlttidtf  de  &hlirt<ram.  RemttiitiM. 

Nous  savonA  quelles  circonstances  ont  inopinément  rap* 
pelé  en  France  notre  compatriote  M.  de  Bisemont^  qui 
accompagnait  rex{>édition  égyptienne;  M.  Baker  a  perdu 
là  un  aosiliaire  scientiiique  d'une  grande  valeur  '•  Dans 
une  lettre  adressée  au  secrétaire  général  de  la  Société  de 
Géographie  de  Paris,  M.  de  Bisemont  fait  connaître  le  ré- 
sultat de  ses  observations  astrcmomiques  à  Kbartoum  : 

ft  J'ai  trouvé  par  vingt  et  une  séries  de  distances  lu- 
naires la  fongitude  de  Kbartoum  30^  16'  45''  E*  de  Paris, 
ou  32*  4a'  kr  E.  de  Londres,  au  lieu  de  3P  dO'  58''  don- 
nés par  Linant  Bey;  j'aurais^cru  la  différence  plus  grande. 
Telle  qu'elle  est,  elle  peut  tenir  seulement  à  la  différence 
des  latitudes,  qui  était  de  3'.  11  n'en  faut  pas  davantage 
pour  faire  là'  sur  la  longitude  *.  » 


1.  D'après  une  lettre  écrite  de  Khartoum  par  M.  Marno  le  6  dé- 
cembre 1S71,  écho  des  rumeurs  qui  ciiculaient  alors  dans  la  capitale 
du  Soudan  égyptien^  les  choses  n'auraient  pas  été  si  complètement  sa- 
tisfaisantes dans  rexpédition  de  sir  Sam.  Baker  {MittheiL  1872^  n*  8, 
p.  319). 

2.  V.  notre  précédent  volume,  p.  255  et  261. 

3.  Nous  ne  pensons  pas  que  Linant  Bey  ait  rapporté  ses  observatiom 
au  méridien  de  Saint^Paul  à  Londres  (ce  qui  donnerait  en  effet  la  dif- 
férence de  12'  notée  par  M.  de  Bizemont)i  mais  bien^  selon  l'usage 
universel  consacré  par  le  Nautical  Almanach^  au  méridien  de  l'Obser- 
vatoire dOxGreenwich  près  de  Londres,  ce  qui  réduit  à  environ  6'  l'écart 
entre  le  chiffre  de  Liuant  Bey,  résultat  d'une  observation  d'aUleors 
peu  sûre,  et  celui  de  M.  de  Bizemont.  Dans  tous  les  cas,  nous  avions 
une  détermination  faite  dans  de  meilleures  conditions  pour  la  longi- 
tude de  Khartoum ,  et  que  jusqu'à  présent  les  cartographes  ont  en  gé- 
néral adoptée  avec  raison  :  c'est  celle  du  lieutenant  Letorzec,  compa- 
gnon de  Cailliaud.  Celle-ci  donne  le  chiffre  de  30»  17'30"àl'E.de  Paris, 
et  Gonséquemment  elle  ne  diffère  de  celle  de  M»  de  Bizemont  que  de 


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NOUVELLES  LIGNES   D  EXPLORATION.  31 

S  4.  Nouvelles  lignes  d'exploration  à  ouvrir  dans  l'Afrique  ^quatoriale. 

Qu'il  ûonê  soit  permis  d'eiprimer  le  regret  que  dans 
ces  grandes  entreprises  qui  se  poursuivent  au  cœur  de 
rAfriqtiê  il  n'y  itit  maintenant  à  citer  que  des  noms  étran- 
gère* M.  de  Bizemont  y  nous  venons  de  le  yolr,  qui  avait 
pu  s'âSsôéier,  il  y  a  trois  ans^  à  l'expéçiition  actuelle  de 
sif  Samuel  Baker^  a  été  rappelé  en  France  par  les  désas^ 
ttêuîk  événements  de  187D;  trois  ans  auparavant,  LesainI 
avait  succombé  aux  atteintes  du  climat ,  au  moment  où  il 
abordait,  sous  les  auspices  et  avec  les  instructions  de  notre 
Société  de  Géographie  »  le  seuil  des  grandes  explorations 
équatoriale*d.  Ce  vide  est  d'autant  plus  regrettable,  qu'en 
regard  des  explorations  actuelles  ou  projetées  dans  la  ré- 
gion des  sources  du  Nil,  il  est  une  autre  ligne  que  nul  n'a 
suivie  ni  tentée  encore^  et  que  nous  appellerions  volontiere 
là  ligne  française.  Toutes  les  tentatives  ont  été  faites  jus- 
qu'à présent  du^Nord  au  Sud,  ou  à  l'inverse,  du  Sud  au 
Nord$  soit  en  remontant  le  Nil  et  le  fleuve  Blanc,  soit  en 
partant  de  l'Afrique  Australe  pour  gagner  Gondokoro  et. 
Khartoum  :  la  ligne  que  nous  voudrions  voir  aborder  (et 
que  nous  signalions,  il  y  a  déjà  dix  ans,  à  l'attention  dés 
explorateurs^),  couperait  le  continent  dans  l'autre  seps,  dd 
rOuest  à  l'Est  dans  le  sens  de  l'équateur.  C'est  la  direction 
que  devait  prendre  Lesaint,  si  ce  n'est  qu'il  se  portait  de 
l'Est  à  l'Ouest.  L'exploralion  nouvelle  pourrait  partir  du 
Grabon,  et  sans  s'attarder  dans  les  basses  terres,  s'avancer 
hardiment  vers  la  contrée  des  Fân,  au  Nord  où  au  Nord- 
la  quantité  absolument  insignifiante  de  4ô".  La  détermination  de 
M.  de^izemont  n'en  est  pas  moins  précieuse^  en  ce  qu'elle  contrôle  et 
confirme  à  la  fois  celle  du  Lieutenant  Letorzec. 

1.  On  peut  voir  le  tom.  I"  de  VÀnnée  géographique,  1862,  p.  52. 
Un  peu  plus  tard  nous  avoos  développé  la  môme  vue  dans  une  ieitre 
au  secrétaire  général  de  notre  Société  de  Géographie,  à  l'occasion  du 
voyage  projeté  de  Lesaint». 

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32  AFRIQUE.  (n^^  14-16.) 

Est,  pour  atteindre  le  plus  vite  possible  les  hauts  pays, 
c'est-à-dire  la  région  des  soiirces.  C'est  dans  cette  haute 
région,  dont  nul  encore  ne  s'est  approché,  qu'est  le  grand 
intérêt  de  l'entreprise,  l'intérêt  tout  à  la  fois  physique, 
ethnographique  et  géographique  ;  c'est  là  que  sont  réelle- 
ment les  recherches  et  les  observations  qui  immortalise- 
raient le  voyage  et  le  voyageur,  en  conduisant  directement 
et  à.  coup  sûr  à  la  solution  du  grand  problème,  la  décou- 
verte de  la  tête,  de  la  vraie  tête  du  Nil.  Ce  qu'il  s'agit  de 
trouvep  et  de  reconnaître,  ce  n'est  pas  seulement  tel  ou  tel 
lac,  qui  ne  saurait  jamais  être  qu'un  point  de  départ  se- 
condaire, puisqu'il  n'est  qu'un  récipient  d'eaux  supérieures: 
c'est  le  point  de  départ,  la  source  de  ces  eaux  supérieures. 
Il  faut  d,onc  se  porter  au  cœur  de  [la  région  d*AIpes  qui 
doit  indubitablement  exister  dans  la  zone  équatoriale  de 
l'Afrique,  et  d'où  rayonnent  les  grandes  artères  qui  sillon- 
nent le  continent,  —  le  Nil,  le  Ghâri,  le  Tchadda,  bran- 
che orientale  du  Dhiolibâ,  le  Zaïre,  et  peut-être  l'Ogovaï, 
tributaires  de  l'Atlantique,  et  enfin  le  Zambézi,  affluent 
de  la  mer  des  Indes,'  —  comme  du  massif  de  nos  Alpes 
d'Europe  rayonnent  le  Rhône  et  le  Rhin,  et  Tlnn  vraie  tête 
du  Danobe,  et  le  Tessin  vraie  tête  du  Pô.  C'est  donc  la  ré- 
gion alpine  qu'il  faut  atteindre  :  là  est  la  branche  mère  du 
Nil  et  le  nœud  du  problème.  Qu'il  y  ait  là  de  grandes 
difficultés  et  de  grands  périls,  cela  est  certain  ;  pas  plus 
grands,  après  tout,  que  ceux  que  Barth,  il  y  a  vingt  ans,  a 
si  résolument  bravés,  et  dont  il  ir  si  adminiblement  triom- 
phé; pas  plus  grands  non  plus^  moins  grands  peut-être, 
que  ceux  que  l'explorateur  rencontre  dans  les  parties  déjà 
suivies  des  grands  lacs  et  du  fleuve  Blanc.  Deux  voyageurs 
instruits,  vigoureux,  résolus,  bien  préparés,  mèneraient  à 
bien  l'entreprise,  j'en  suis  convaincu.  Et  quelle  gloire  dans 
le  succès  i 

Entre  les  grandes  explorations  qu'appellent  encore  les 
vides  dç  U  carte  d'Afrique,  —  toute  la  zone  équatoriale, 

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EXPÉDITIONS   PROJETÉES.  33 

r«space  immense  compris  entre  le  Tanganika  et  leGabon, 
le  revers  occidental  du  mont  Kénia,  toute  la  région  des 
montagnes  de  Kong  au-dessus  de  la  Guinée,  la  région 
inconnue  entre  le  Tchad  et  la  Nubie,  etc.,  etc.,  —  entre 
ces  grandes  et  difficiles  expéditions  qui  sollicitent  encore 
le  dévouement  des  explorateurs,  aucune  ne  conduira  aussi 
promptement  que  celle  que  nous  venons  de  suivre  par  la 
pensée  k  de  grands  résultats,  à  des  résultats  d  une  nature 
aussi  générale.  Nous  l'avons  qualifiée  de  ligne  française  : 
puisse  notre  prévision  se  réaliser,  et  se  réaliser  dans  un 
temps  prochain  I 

S  5.  Expéditions  projetées. 

Au  surplus,  Tattention  se  porte  maintenant  de  ce  côté.  Le 
docteurKirk,  consul  d'Âugleterre  à  Zanzibar,  dans  une  lettre 
du  15  janvier  1872  adressée  au  Président  de  la  Société  de 
Géographie  de  Londres  {Proceedings  of  the  soc,  vol.  xvi, 
n*»  3,  p.  226),  s'exprime  ainsi  :  «J'aimerais  voir  quelques  ex- 
plorateurs suivre  les  caravanes  marchandes  qui  chaque  an- 
née partent  de  Pacgani  et  de  Mombaz,  longent  le  pied  du 
Kilimandjaro,  et  traversant  les  plaines  salines  couvertes 
d'épais  dépôts  de  carbonate  de  soude,  coupent  le  territoire 
sauvage  iies  Masaï  et  des  Ouakouasi  pour  gagner  les 
lacs  du  haut  bassin  du  Nil,  où  elles  se  rencontrent  avec 
les  gens  d'Ouganda  et  de  Karagoué.  Un  pareil  voyage  se- 
rait plein  d'intérêt  et  de  nouveauté...  » 

D'un  autre  côt,é,  nous  lisons  la  note  suivante  dans  YAthe- 
nœumàn  9  novembre  1872  :  «Deux  expéditions,  munies 
des  instructions  delà  Société  de  Géographie,  vont  très- 
prochainement  quitter  l'Angleterre  pour  TAfrique  cen- 
trale. L'une ,  dont  la  conduite  est  confiée  au  lieutenant 
Grandy,  de  la  marine  royale,  est  désignée  sous  le  nom 
d'expédition  Congo-Livingstone  ;  elle  prendra  terre  à  Saint- 
Paul  de  Luanda  et  remontera  le  cours  du  Zaïre  ou  fleuve 

l'awnéb  GÉOGR.  XI.  V         3 

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34  AFRIQUE,  (n^'  14-16.) 

du  Congo,  afin  de  rechercher  les  rapports  que  ce  fleuve 
peut  avoir  avec  le  Loualaba*.  M.  Young,  le  vieil  ami  de  Li- 
vingstone,  a  mis  généreusement  à  la  disposition  de  la  So- 
ciété une  somme  de  2000  livres  pour  l'expédition  Graudy. 

«  L'autre  expédition,  sous  les  ordres  du  lieutenant  Ga- 
•méron,  de  la  marine  royale,  accompagnera  sir  Bartle  Frère, 
yn  des  vice-présidents  de  la  société  (que  le  gouvernement 
vient  de  charger  d'une  mission  spéciale),  et  partira  de  Zan- 
zibar pour  pénétrer  dans  l'intérieur,  sous  les  auspices  et 
avec  les  instructions  de  sir  Bartle.  » 

L'Angleterre,  on  le  voit,  veut  se  relever  de  l'échec  de 
la  mission  Dawson.  G'est  une  noble  et  généreuse  ambi- 
tion. 

Le  lieutenant  Grandy  a  dû  s'embarquer  à  Liverpool  le 
30  novembre;  sir  Bartle  Frère  avait  quitté  les  côtes  d'An- 
gleterre dès  le  21. 

Enfin,  on  lit  dans  les  journaux  allemands  :  «  A  l'une  des 
dernières  réunions  de  la  Société  de  géographie  de  Berlin,  il  a 
été  décidé  qu'il  serait  formé  une  commission  permanente 
allemande  pour  l'exploration  de  l'Afrique  centrale,  en  pre- 
nant pour  base  la  côte  ouest,  du  cinquième  degré  nord  au 
sixième  degré  sud  de  latitude,  à  l'embouchure  du  Gongo. 
Les  autres  sociétés  de  géographie  de  l'Allemagne  seront  in- 
vitées à  se  joindre  aux  dépenses  qu'il  y  aura  lieu  de  faire  et 
pour  lesquelles  on  aura  recours  aux  souscriptions.  Une 
somme  considérable  a  été  immédiatement  souscrite  dans  la 
salle  de  réunion  de  la  Société  de  géographie.  On  espère  ob- 
tenir le  concours  du  gouvernement.  Le  duc  de  Weimar  a , 
déjà  promis  son  assistance;  il  a  exprimé  cette  opinion  qu'il 
serait  désirable  que  plusieurs  expéditions  partissent  simul- 
tanément de  différents  points.  » 

C'est  un  mouvement  très-remarquable  qui  se  produit  en 
Ilarope.  Il  est  profondément  regrettable  que  par  l'effet  des 

1.  Voy«  ci-dessus,  p.  7  et  suiv< 

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HAUTE   NUBIE.  35 

circonstances  qu'elle  traverse^  la  France  se  trouve  en  dehors 
de  cette  grande  impulsion,  dont  elle  a  en  la  première  ini 
tiative. 


IV 

NU3IE  ET  AipYSSINIE 


n.  W.  MuNZ(NGBR.  Die  nôrdlicbe  Fortsetzung  der  abessinischen 
Hochlande;  neue  Forschungen  in  den  Gebieten  der  Beni-Amer 
und  Habab,  1871.  Mittheilungen  de  Pelermann,  1872 ,  n»  6 
p.  201-206. 

Avec  une  grande  carte  de  l'extrémité  méridionale  de  la  Nubie,  entre 

la  frontière  N.  E.  de  l'Abyssinie  (vers  le  parallèle  de  Massâoua),  à  peu 
près  par  15*  A  de  latit.  N.   et  17'  i  de  latitude. 

18,  Prof.  A.  IssEL.  Viaggio  nel  Mar  Rosso  e  tra  i  Bogos(1870); 
MilunOy  1872;  in-S"  132  pages,  avec  2  cartes  et  18  figures  dans 
le  texte.  2  1.  f 

En  1870,  la  lociété  Italienne  de  Géographie  envoya  à  la  mer  Rouge 
une  expédition  scientifique,  composée  du  marquis  Antinori,  naturaliste 
déjà  connu  par  ses  voyages  dans  le  haut  bassin  du  fleuve  Blanc,  du 
botaniste  Beccari,  et  du  géologue  Arihur  Issel,  professeur  à  Tuniversité 
de  Gènes.  La  mission  a  visité  labaied'Assab,  Tarchipel  Dahlak,  le  pays 
des  Bogo,  et  d'autres  territoires  des  confins  N.  E.  de  l'Abyssinie,  à 
Touest  de  Mass&oua.  Le  volume  ci-dessus  est  la  relation  personnelle 
du  professeur  Issel  ;  les  relations  de  MM.  Antinori  et  Beccari  doivent 
paraître  dans  le  9*  volume  du  Bollettino  de  la  société  Géographique 
d'Italie,  accompagnées  de  cartes. 


Avant  de  nous  éloigner  des  contrées  du  haut  Nil,  quel- 
ques mots  encore  sur  la  Haute-Nubie  et  sur  TAbyssinie, 
où  nous  retiennent  d'intéressantes  publications,  et  où  vient 
de  s'accomplir  un  événement  important. 

%  i".  M.  Munxioger  et  les  ezplorationi. 

La  communication  de  M.  Werner  Munzinger,  à  qui  la 
science  doit  déjà  de  si  précieuses  études  sur  les  territoires 
et  les  populations  du  sud-est  de  la  Nubie^  ajoute  de  nom-^ 


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36  AFRIQUE.  (n«'  17-18.) 

breux  renseignements  aux  notions  antérieures  et  enrichit 
notablement  la  carte  encore  si  incomplète  de  ce  coin  de 
l'Afrique.  M.  Munzinger,  qui  a  été  investi  par  le  khédive 
des  fonctions  de  moudir  de   Souâkïn,   ou  gouverneur  du 
Soudan  maritime  (et  qui  exerce  en  outre  à  Massâoua  celles 
de  consul  de  France),  met  à  profit  sa  position  nouvelle  pour 
étendre  ses  investigations  sur  une  contrée  qui  est  devenue 
pour  lui  comme  une  seconde  patrie*.  11  y   a  trois  ans, 
c'était  une  excursion  dans  le  pays  des  Afar  (voir  le  dernier 
volume  de  VAnnée^  p.  264);  aujourd'hui  c'est  une   course 
chez  les  Habab  et  les  Beni-Amer,  deux  tribus  importantes 
qui   se  rattachent  très-probablement  à  la  famille  abori- 
gène des  Bedjah.  M.  Munzinger  promet  un  travail  spécial 
sur  ces  deux  tribus;  sa  communication  actuelle  se  rapporte 
aux  principaux  traits  physiques  du  pays,  plateau  monta- 
gneux dont  le  versant  oriental  s'abaisse  par  étages  vers  la 
mer  Rouge  où  vont  se  perdre  de  nombreux  torrents  tempo- 
raireSy  et  que  surmontent  des  pics  nombreux  d'une  assez 
grande  élévation.  Un  massif  qui  paraît  être  le  point  culmi- 
nant de  toute  la  contrée  et  d'où  se  détachent  trois  sommités, 
est  situé  vers  le  16''  degré  40'  de  latitude;  il  a  par  estime 
une  altitude  de  8000  à  9000  pieds  (2500  à  2800' mètres).. 
Des  autres  sommets  où  M.  Munzinger  a  pu  porter  son  ané- 
roïde, le  plus  élevé  est  l'Enyélat  (latit.  16"  32'),  2579  mètres. 
Ce  sommet  ne  domine  cependant  que  de  1 76  mètres  le  pla- 
teau sur  lequel  il  repose.  Un  peu  plus  au  nord  (entre  1 6^40' 
— 16*50  de  latitude), et  à  60  ou  70  kilomètres  de  la  côte,  le 
plateau  forme  un  magnifique  cirque  appelé  Nakfa,  entouré 

1.  M.  Munzinger  est  Suisse  de  naissance.  Depuis  1871,  le  Soudan 
égyptien ,  dont  Khartoum  est  la  capitale,  a  reçu  une  nouvelle  organi- 
sation. 11  forme  actuellement  trois  divisions  administratives.  La  pre- 
mière, composée  des  moudirièh  ou  districts  de  Dongolah  et  de  Berber, 
relève  directement  du  Ministère  de  l'Intérieur  au  Caire;  la  seconde, 
composée  des  quatre  moudirièh  de  Bahr  el-Abyad,  Kordofan,  Sennâr  et 
Taka,  a  Khartoum  pour  capitale  ;  la  troisième  est  le  moudirièh  de 
Souâkïn,  avec  Massâoua  et  tout  e  littoral  du  pays  Bedj.ih 

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ABYSSINIE.  37 

d'une  ceinture  de  hauteurs.  M.  Munzinger  signale  cette  ' 
localité,  à  laquelle  son  élévation  donne  la  plus  heureuse 
température,  comme  appelée  à  devenir  le  site  d'une  \ille 
importante.  La  notice  toute  topographique  de  M.  Mun- 
zinger est  d'ailleurs  peu  susceptible  d'analyse  ;  son  meilleur 
résumé  est  la  grande  et  belle  carte  qui  raccompagne,  et 
dont  l'intelligent  observateur  a  fourni  les  éléments.  La 
table  des  altitudes  observées  comprend  62  points;  les 
observations  ont  été  calculées  par  M.  Hahn,  de  l'observa- 
toire de  Gotha. 

S  2.  La  reconstitution  politique  de  l'Abyssinie. 

En  Abyssînie,  le  gouverneur  de  la  province  du  Tigré, 
après  une  lutte  heureuse  soutenue  contre  un  compétiteur, 
s'est  fait  couronner  à  Axoum,  la  capitale  religieuse  du 
royaume;  le  nouveau  souverain,  après  sa  consécration  par 
l'Abonna  ou  Patriarche  d'Ethiopie,  a  pris  comme  chef  de 
dynastie  le  nom  de  Joannos*  Une  correspondance  de  Mas- 
sâoua  donne  les  détails  suivants  sur  la  solennité,  qui  a  eu 
lieu  le  14  janvier  1872  :  «Kassaï  (c'était  le  nom  du  nouveau 
Négous  avant  son  couronnement*) ,  parti  le  4  janvier 
d'Adoua,  capitale  du  Tigré,  arriva  le  12  à  Axoum  avec  sa 
suite,  ne  faisant  que  de  courtes  étapes  et  s'arrêtant  sou- 
vent. Le  13,  eurent  lieu  de  grandes  manœuvres  auxquelles 
assistèrent,  comme  spectateurs,  environ  trois  mille  prê- 
tres abyssins,  venus  pour  honorer  la  fête.  Kassaï  s'était, 
placé  au  sommet  d'une  petite  colline;  le  clergé  était  à  sa 
droite,  l'armée  occupait  la  gauche. 

«  Le  14  janvier  au  matin,  Kassaï  entra  dans  la  cathédrale 
d' Axoum,  et  s'y  fit  solennellement  couronner.  La  cérémonie 
terminée,  il  s'avança,  suivi  de  la  foule,  vers  le  nouveau  pa- 


1.  Le  Négous  Théodoros,  tombé  à  Magdala  dans  sa  lutte  trop  inégale 
contre  TAngleterre,  s'appelait  aussi  Kassa!  de  son  nom  de  prince. 


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38  AFRIQUE.  (n"  19-30.) 

lais  qu'il  avait  fait  construire  pour  cette  fête  ;  il  y  fit  son 
entrée  la  couronne  sur  la  tête,  et  prit  plac3  sur  un  trône 
élevé  de  douze  marches.  La  joie  des  assistants  était  extrême* 
Les  coups  de  fusil  éclataient  continuellement  et  remplirent 
d'une  fumée  épaisse  la  salle-oùse  trouvait  le  roi.  Les  festins 
durèrent  trois  jours  de  suite;  quatre  cents  hommes  entraient 
àla  fois  dans  la  salle ^  et  faisaient  place  à  d'autres  aprèsavoir 
mangé.  Pendant  ces  trois  jours,  le  roi  ne  quitta  pas  sa 
place.  Environ  quatre  mille  vaches  furent  tuées,  et  plus  de 
cinq  cents  ocques  de  miel  furent  employés  à  faire  Thy- 
dromel. 

c  Le  prince  Kassaï,  maintenant  Negous  Johannos  d'E- 
thiopie, a  dû  partir  le  23  février  pour  Gondar.  » 

On  ne  pourrait  qu'applaudir  à  cette  promesse  de  reconsti- 
tution politique,  si  malheureusement  le  nouveau  règne  ne 
s'annonçait  par  des  dispositions  de  persécTution  contre  les 
missionnaires  catholiques. 

V 

AFRIQUE    AUSTRALE 


19.  Capt.  S.  B.  Miles.  On  the  Somali  counlry.  Proceedings  of  the 
Roy.  Geogr.  soc,  vol.  XVI.  n°  3,  p.  149-157. 
Rapport  adressé  d'Aden,  le  17  avril  l»7l. 


20.  RIch.  K.  BuRTON.  Zanzibar^  city,  island,  and  coast.  Lond,  1872, 
2  vol.  petit  in-8". 

Souvenirs  rétrospectifs  de  l'expâdition  de  1858  en  compagnie  du 
capitaine  Speke,  expédition  qui  a  eu  pour  résultats  la  première  recon- 
naissance du  grand  lac  central  (le  Tanganlka)  et  la  décoaverte  du  Vic- 
toria Nyauza,  points  de  départ  des  voyages  ultérieurs  de  Baker,  de 
LiVingstoue  et  de  Stanley,  qui  ont  si  puissamment  occupé  et  occupent 
encore  l'attention  dn  monde  géographique. 

21.  Le  R.  P.  HoRNER.  Voyage  à  la  côte  orientale  d'Afrique  pendant 
l'année  1866.  Paris,  1872,  in-12,  267  pages,  3  fr. 

Zanzibar  et  contrées  avoisinantes. 


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AFRIQUE   AUSTRALE.  39 

i2.  Keitb  Johnston.  Notes  on  the  Bev.  Thomas  Wakefleld*s  Map  of 
Eastem  Africa;  Proceed.  of  ihe  Roy.  Géogr.  soc,  vol.  XVI.  n«  2, 
febr.  1872,  p.  125-129. 

Comparez  ci-dessus,  le  w  8. 

Sur  la  carte  du  Rev.  Wakefield,  missionnaire  à  Mombazi  et  les  Noies 
de  AI.  keith  Johnston,  voir  notre  précédent  vol.,  p.  233,  n«*  414  «t  413. 
Cette  carte,  insérée  an  vol.  XL  du  journal  de  la  société  de  Géographie 
de  Londres,  est  une  carte  d'informations  natives.  Elle  est  basée  prin- 
cipalement sur  les  itinéraires  et  les  notes  obtenues  d'un  indigène,  Sadi 
bïn  Ahédi,  informations  qui  par  leur  précision  et  leur  abondance  <  ont 
presque  la  valeur  d'une  relation  européenne.  » 

Je  transcris  deux  ou  trois  remarques  importantes  do  M.  Keith- 
Johnston  : 

c  Les  particularités  les  plus  frappantes  de  là  nouvelle  géographie  qui 
nous  est  ainsi  ouverte,  particularités  que  Vdn  pourrait  presque  quali- 
fier de  découvertes,  sont  l'existence  de  nombreux  sommets,  outre  le 
Kénia  et  le  Kilima-Njaro,  au  long  du  bord  extrême  du  plateau,  entra 
autres  le  Dôenyo  Ngaï,  déjà  mentionné  pal*  Erbardt,  et  que  l'on  dit  être 
plus  élevé  que  le  Kilima-Njaro,  quoique  n'offrant  pas  un  massif  aussi 
considérable....  La  montagne  volcanique  de  Njémsi  présente  cet  intérêt 
particulier,  que  sauf  le  volcan  d'Artali  décrit  par  M.  Munzinger  dand  le 
pays  des  Afar,  c'est  le  seul  cratère  connu  qui  paraisse  encore  en  acti- 
vité sur  le  continent  africain.  Ce  que  Badi  hïù  Ahédi  rapporte  de  ce 
volcan  est  confirmé  par  d'autres  informations  recueillies  par  M.  Erhardt 
et  par  le  D'  Krapf. 

I  On  a  ici  des  indications  spéciales  sur  la  direction  générale  du  lac 
d'eau  douce  de  Baringo  (ou  Bahari'Ngo),  dont  la  situation  par  rapport 
à  roukara,  ou  Victoria  Nyanza,  est  à  peu  près  celle  que  lui  assigne 
Speke,  si  ce  n'est  qu'au  lieu  d'être  en  communication  avec  le  lac  Vic- 
toria, il  en  est  séparé  par  un  canton  montueux  et  bien  peuplé.  • 


23.  Nachrichten  von  Cari  Maucfî  im  Inneren  von  Sttd-Afrika,  bis 
zum  27  Juli  1871.  Antritt  seiner  neuen  Reise  nach  Manica.  Die 
Gold-  und  Diamantenfelder  in  der  Transvaal-Republik.  MUthei- 
lungende  Petermann,  1872,  n*  3,  févr.,  p.  81-82, 

—  Cari  Mauch's  Entdeckung  der  Ruinen  von  Zimbaoe,  5  sept. 
1871.  Ibid.  n«  4,  mars,  p.  121-126. 

Voir  le  précédent  volume  de  V Année,  et  ci-après  nos  développe- 
ments. 

24.  (H.  Habenicht).  Die  neuesten  Forschungen  in  der  Transvaal- 
'Republik  und  dejn  Matebele-Reich.  Ihid  n°  11 ,  p.  421-422. 

Note  explicative  sur  les  bases  et  la  construction  de  la  grande  et  belle 
carte  qui  accompagne  ce  cahier,  et  qui  a  pour  titre  :  Ori^inalkarte  der 
neuesten  Entdecknngsreisen  in  Sûd-Afrika,  von  Mauch,  Mohr,  Hûbner, 
Baines  u.  A.,  nebst  Utbersicht  sàmmtlicher  Forschungen  in  der 
Transvaal-Republik  und  Mosihkatse  s  Reich  (au  2  000  ooo«)- 

25.  Account  of  M.  Baines's  exploration  of  the  gold-bearing  région, 
belween  the    Limpopo   and    Z?mbesi  rivers.    Prepared  from 

uiyiiizeu  uy  >^jv^v^^i>^ 


40  AFRIQUE.  "  (n°*  19-30.) 

M.  Baiiies's  journals,  by  Rob.  J.  Mann.  Journal  of  the  Roy. 
Geogr.  soc,  vol..  XLI,  1871,  p.  100-131;  with  Map. 

Bon  itinéraire  à  rapporter  à  la  carte  de  M.  Mauch.  Les  données 
scientifiques  du  journal  de  M.  Baines,  et  en  particulier  les  observa- 
tions d'altitude,  sont  utilement  groupées  en  forme  de  tableau,  de  la 
p.  112  à  131. 

26.  République  de  l'Afrique Tnéridionale,  ou  de  Trans-Vaal -Boers, 
Hevue  Marit.  et  Colon.,  sept.  1872,  p.  427-435. 

Renseignements  extraits  des  Annaes  do  Conselho  UltramarinOj  par 
M.  G.  Neveu,  aide-commissaire  de  la  Marine.  Ces  notes  portent  sur  les 
forces  militaires,  les  ressources  financières,  Torgauisation  intérieu- 
re, etc.  Quoique  le  sujet  soit  pour  nous  d'un  intérêt  médiocre,  comme 
il  est- peu  connu,  nous  en  extrayons  ci-après  quelques  passages. 

27.  Cap.  Fred.  Elt©n.  Journal  of  exploration  of  the  Limpopo  river 
(extract).  Proceedings  of  the  Boy  al  Geogr.  soc,  vol.  XVI,  n*  2, 
p.  89-101. 

—  Extracts  from  the  journalof  an  exploration  of  the  Limpopo 
river,  undertaken  of  the  purpose  of  opening  up  water  communi- 
cation, and  a  more  convenient  route  from  the  seulement  on  the 
Tati  river  to  the  sea  coast.  Natal,  1871,  in-4*  35  pages. 

Voir  les  Nitfheilungen  de  Petermann,  1872,  n»  10,  p.  402. 

28.  J.  Mackenzie.  Ten  years  north  of  the  Orange  river.  A  story  of 
every-day  life  and  work  among  the  South  African  tribes,  from 
1859  to  1869.  Edinhurgh,  1871,  in-8«  7  sh.  ^  (Edmonstone). 

Œuvre  estimable  d'an  Missionnaire.  Peu  de  matière  géographique. 

29.  Th.  Hahn.  Beitrâge  zur  Kunde  der  Hottentotten.  Jahreshe- 
richt  VI-VII  -des  Vereins  fur  Erdkunde  zu  Dresden,  1871, 
p.  1-73. 

Travail  particulièrement  recommandable  au  point  de  vue  linguis- 
tique. ' 

30.  Côte  méridionale  d'Afrique.  Du  cap  des  Aiguil'es  à  la  baie 
Mossel.  Paris,  1872,  Dépôt  de  la  Marine  (n»  2935). 

—  De  la  baie  Mossel  au  cap  S.  Francis  (n»  2936). 


S  1.  Le  capitaine  Miles,  sur  le  pays  des  Somàl. 

Le  capitaine  Miles,  qui  a  fait  récemment,  de  compagnie 
avec  M.  Munzinger,  une  très-intérelsante  excursion  dans 
une  partie  jusqu'à  présent  inexplorée  du  Sud^-Ouest  de 
TArabie')  a  visité  Tannée  suivante  (au  commencement  do 

1.  Nous  en  rendronii  compta  ci-après  dans  la  section  consacrée  à 
TArabie. 


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SOMÂL.  41 

1871)  un  canton  non  moins  i^onnu  du  pays  des  So- 
mal,  sur  la  côte  opposée  du  golfe  d'Âden,  où  il  a  pénétré 
dans  rintérieur  jusqu'à  une  grande  vallée  appelée  Ouâdi 
Djaïl.  Le  capitaine  Miles  a  rendu  compte  de  cette  course 
dans  une  note  adressée  à  la  Société  de  Géographie  de  Lon- 
dres (ci-dessus,  n^  19)  ;  nous  allons  en  extraire  quelques 


Bander  Marayàh  (Mouraïo  des  cartes),  situé  sur  le  golfe 
d'Aden  par  11*  43'  de  latitude  nord  *,  est  le  pricipalfort 
de  la  grande  tribu  somâli  des  Medjertaïn.  La  place  est  as- 
sise au  pied  d'une  rangée  de  hauteurs  portant  le  même 
nom  ;  cette  chaîne  s'élève,  à  un  mille  environ  en  arrière  de 
la  ville,  à  la  hauteur  de  1200  mètres.  La  ville  longe  la  baie 
sur  une  longueur  de  près  d'un  demi-mille  (7  à  800  met.); 
elle  compte  au  delà  de  200  maisons.  La  population  perma- 
nente n'est  que  de  6  à'  700  âmes;  mais  à  l'époque  de  la 
grande  foire,  quand  les  caravanes  arrivent  de  l'intérieur 
avec  des  gommes  et  d'autres  produits,  et  que  les  mar- 
chands arabes  traversent  le  golfe,  ce  chiffre  peut  bien  être 
doublé. 

Quant  à  l'origine  des  Somâl,  le  capitaine  Miles  regarde 
comme  probable  que  ce  peuple  est  issu  d'une  immigration 
arabe  venue  dans  le  pays  il  y  a  plusieurs  siècles,  et  qui 
forma,  par  son  mélange  avec  les  Gallas,  une  population 
mixte  représentée  par  les  tribus  actuelles.  Leur  idiome, 
composé  de  mots  en  partie  gallas,  en  partie  arabes,  appuie 
suffisamment  cette  hypothèse,  à  ce  que  pense  M.  Miles, 
ainsi  que  leur  culte  qui  est  celui  de  Mahomet,  et  leurs  tra« 
ditions  qui  tiennent  en  grande  vénération  des  ancêtres  de 
nation  arabe.  Ils  font  remonter  cette  immigration  à  quatre 
on  cinq  siècles. 

G^tte  vue  du  zélé  voyageur  appelle  quelques  réser- 
ves. Qu'une  part  considérable  doive  être  faite  à  rélément 

1.  A  56  milles  aDglaii  vers  TO.  du  cap  Guardafuy. 

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42  AFRIQUE.  (n'»'  19-30.) 

arabe  dans  la' nationalité ^mâli,  cela  est  tout  à  fait  indu- 
bitable ;  mais  ce  que  Ton  connaît  de  Tidiome  des  Somftl 
paraît  le  rattacher  directement  à  la  souche  galla,  et  dès 
lors  l'immixtion  arabe,  quelle  qu'en  puisse  être  l'impor- 
tance historique,  n'a  plus,  au  point  de  vue  ethnologique, 
qu'une  valeur  secondaire.  En  d'autres,  termes,  les  Somâl 
sont  un  peuple  galla  mêlé  d'Arabes,  et  non  pas  seulement, 
comme  le  voudrait  M.  Miles,  un  peuple  arabe  enté  sur  un 
fond  galla. 

Le  nom  de  Somâl,  quelle  qu'en  soit  l'origine ,  n'a  pas 
été  connu  des  anciens  ;  mais  leur  établissement  dans  la 
contrée  comprise  entre  le  fond  du  golfe  d'Aden  et  le  cap 
Gruardafuy  n'en  remonte  pas  moins  à  une  époque  de  beau* 
coup  antérieure  à  Tère  musulmane,  ainsi  que  le  prouvent 
les  noms  mentionnés  par  les  auteurs  du  temps  des  Ptolé'- 
mées  et. les  périples  de  l'époque  romaine,  noms  qui,  pour  la 
plupart,  se  reconnalgsent  encore  dans  la  nomenclature  ac-^ 
tuelle.  Le  capitaine  Miles  tente  quelques  rapprochements 
de  géographie  comparée  ;  nous  ne  le  suivrons  pas  sur  ce 
terrain  classique,  pour  n'avoir  pas  à  relever  de  grosses  « 
erreurs.  Ces  erreurs,  trop  communes  chez  les  voyageurs 
rarement  préparés  par  des  études  spéciales,  n'enlèvent 
rien,  heureusement,  à  la  valeur  des  observations  locales. 
Celles  du  capitaine  Miles,  nous  l'avons  dit,  nous  portent 
au  milieu  d'un  territoire  inexploré.  Le  voyageur  a  remonté 
d'une  cinquantaine  de  milles  le  Ouâdi  Djaïl.  Un  croquis 
topographique  aurait  été  ici  bien  utile,  pour  suppléer  à 
l'insuffisance  forcée  de  la  description  écrite. 

S  2.  Suite  des  explorations  de  M.  Cari  Maach,  entre  Id  pays  Transva&I 
et  le  Zambézl. 

Cari  Mauch,  l'explorateur  allemand,  poursuit  active- 
ment ses  recherches  dans  la  région  à  peu  près  vierge  qui 
s'étend  entre  le  Zambézi  et  le  Transvaal.  Les  Mittheilun'' 
gen  du  D'  Petermann,  ce  précieux  répertoire  de  toutes  les 

uigmzeuuyGOOgk 


EXPLORATIONS   DE   CARLMAUCU.  43 

informations  récentes,  ont  re^  du  voyageur,  en  même 
temps  que  des  lettres  et  de  nouveaux  mémoires  (ci-des- 
sus, n°  18),  les  éléments  d'une  carte  complète  de  TÉtat  de 
Transva^l,  dans  laquelle  M.  Maach  a  résumé  les  itinérai- 
res dont  il  a  sillonné  le  pays  depuis  plusieurs  années,  les 
nombreuses  déterminations  astronomiques  auxquelles  il  a 
rattaché  ses  lignes  d'exploration,  et  les  informations  locales 
de  nature  à  compléter  ses  reconnaissances  personnelles.  Ce 
sont  là  de  ces  travaux  solides  dont  j'aime  à  saluer  l'appa- 
rition, de  ces  travaux  qui  tout  à  la  fois  enrichissent  et 
transforment  la  cartographie  d'une  grande  région.  (Ci- 
dessus,  n*»  23  de  la  bibliographie.)  Il  y  a  vingt-cinq  ans  à 
peine,  les  vastes  contrées  de  l'Afrique  australe,  sauf  une 
étroite  zone  littorale,  ne  présentaient  qu'un  vide  immense 
sur  la  carte  du  globe  ;  que  de  conquêtes  dans  ce  court  es- 
pace d'une  génération!  Trois  noms  s'y  inscrivent  avant 
tous  les  autres,  Livingstone,  Burton  et  Speke ,  noms  glp- 
riéux  autour  desquels  se  groupent  bien  d'autres  noms 
dignes  d'honneur  et  de  sympathie  :  —  le  missionnaire 
Krapf,  précurseur  de  Burton  ;  Baker,  heureux  émule  de 
Speke  ;  du  Chaillu,  l'explorateur  zélé  de  la  terre  des  Go- 
rilles ;  Ladîslaûs-Magyar,  le  révélateur  du  Congo,  et  tant 
d'autres  dont  je  ne  puis  dresser  la  liste.  Parmi  ces  intré- 
pides champions  de  la  science,  Cari  Mauch  travaille  à  sa 
placer  aux  premiers  rangs,  entre  les  plus  méritoires  et  les 
plus  glorieux. 

On  doit  aussi  à  M.  Baines,  connu  depuis  longtemps 
comme  explorateur  zélé  et  chasseur  intrépide  dans  ces 
contrées  australes,  un  itinéraire  que  les  cartographes  con- 
sulteront utilement  (n<*  25).  Une  expédition  encore  plus  im- 
portante est  celle  du  capit.  Fred.  Elton  au  Limpopo,  en 
1870,  pour  l'étude  de  la  partie  moyenne  de  cette  grande 
rivière  (ci-desisus,  n°  27),  dont  la  partie  inférieure  avait 
été  déjà  explorée  en  1868  par  M.  W.  Erskine*. 

1 .  Voir  le  précédent  vol.  de  V Année,  p.  226. 

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44  AFRIQUE.  (S^  19-30.) 

s  3.  Coup  d'œîl  rétrospectif  snr  les  anciens  voyages  des  Portugais 
dans  l'Afrique  méridionale.  Les  mines  de  Zimbâoué. 

Un  des  résultats  des  récentes  explorations  de  TAfrique- 
Australe,  est  d'avoir  fait  sortir  les  vieux  documents  portu- 
gais de  la  poussière  où  ils  dormaient  depuis  de  longues 
années.  On  sait  que  dès  le  commencement  du  seizième 
siècle  le  Portugal  a  fondé  des  établissements  sur  les  deux 
côtes  du  continent  africain,  au  sud  de  Téquateur,  et  que 
depuis  trois   cents  ans  les  colonisateurs  du  Monomotapa 
et  du  Congo   se  regardaient  comme  les  maîtres  d'une 
grande  partie  de  la  Péninsule.  D'anciennes  notions  recueil- 
lies par  leurs  missionnaires,  ou  consignées  dans  des  rap- 
ports officiels,  ont  été  ainsi  remises  en  lumière^;  mais  en 
même  temps  que  Ton  faisait  levivre  de  vieilles  informa- 
tions à  peu  près  oubliées,  on  a  pu  en  constater  la  nullité 
scientifique,  même  en  descendant  jusqu'à  des  époques  plus 
rapprochées  de  noijs.  C'est  à  peine  si  dans  les  nombreu- 
ses indications  de  nations  ou  de  peuplades  intérieures,  de 
villes,  de  lacs  et  de  rivières,  consignées  dans  les  vieilles 
relations  ou  dans  les  documents  inédits,  on  en  trouve  un  ou 
deux  où  Ton  ait  apporté  quelque  précision.   Pas  d'études 
de  linpfuistique  comparée,  pas  d'observations  d'ethnogra- 
phie sérieuse,  pas  d'itinéraires  véritablement  étudiés,  ni  de 
déterminations  astronomiques.  Les   documents  portugais 
ne  laissent  pourtant  pas  de  fournir  des  indications  bonnes 
•  à  recueillir.  C'est  ainsi  que  le  moine  dominicain  dos  San- 
tos  (1587),  et  avant  lui  Thistorien  Barros,  parlent  de  restes 
curieux  d'anciennes  constructions  que  Ton  avait  découver- 

1.  D'Anville,  notre  grand  géographe  du  dernier  siècle,  avait  utilisé, 
avec  critique  et  discernement,  les  vieux  documents  portugais  sur 
l'Afrique  du  Sud;  et  j'ai  déjà  fait  remarquer  que  beaucoup  d'indica- 
tions qu'il  avait  ainsi  portées  avec  discrétion  sur  sa  grande  carte  d'Afri- 
que (1749}  avaient  été  effacées  par  les  cartographes  postérieurs  »  le 
lac  Maravj,  notamment.  Les  explorations  de  Livingstone  les  ont  resti- 
tuées, en  les  précisant. 

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RUINES   DE   ZIMbAouÉ.  45 

tes  dans  la  contrée  aurifère  de  Sofala,  à  quelques  journées 
de  la  côte.  Ces  ruines  ont  été  revues  dans  ces  derniers 
temps,  et  M.  Mauch  les'  a  visitées  au  commencement  de 
septembre  1871  (ci-dessus,  n*»  23).  Elles  sont  à  300  kilo- 
mètres de  la  mer,  et  à  500  au  sud  du  Zambézi,  dans  une 
position  dont  Mauch  estime  la  latitude  à  20^  14'  S,,  et  la 
longitude  à  31H8',  à  TE.  de  Paris.  Elles  se  composent  de 
deux  groupes  de  constructions  massives ,  en  pierre  dure 
taillée  à  peu  près  en  forme  de  briques,  et  assemblées  sans 
ciment.  Des  parties  de  murs  encore  bien  conservées  ont 
trois  mètres  d'épaisseur  à  la  base,  et  deux  mètres  et  demi 
au  sommet.  Une  tour  de  dix  mètres  de  hauteur,  ronde  à 
la  base,  se  termine  en  forme  de  cône.  Le  tout  présente 
l'aspect  d'une  sorte  de  forteresse,  destinée  sûrement  à 
protéger  les  mines,  dont  il  existe  aux  environs  des  traces 
manifestes.  Le  lieu  est  désigné  par  les  Noirs  sous  le 
nom  de  Zimbabî  (Zîmbaoé  dans  les  anciennes  relation^ 
portugaises),  mot  que  les  indigènes  emploient  pour  dési- 
gner, en  général,  une  résidence  royale. 

Qui  a  élevé  ces  constructions,  et  à  quelle  époque  remon- 
tent-elles ?  deux  questions  qui  se  présentent  tout  d'abord  à 
la  pensée,  et  auxquelles,  jusqu'à  présent,  on  n'a  pu  répon- 
dre. Ce  qui  est  hors  de  doute,  c'est  qu'elles  n'appartien- 
nent ni  aux  Noirs,  qui  jamais  n'ont  construit  d'édifices  de 
cette  nature,  ni  aux'  Portugais  qui  les  ont  découvertes  à 
leur  arrivée  dans  le  pays.  Les  ornements  assez  grossiers, 
tracés  sur  quelques-unes  des  parties  saillantes,  ne  sau- 
raient fournir  d'indications  à  cet  égard.  La  première  idée, — 
elle  appartient  aux  anciens  Missionnaires,  et  d'autres  l'ont 
reprise  tout  récemment^  —  est  que  la  contrée  aurifère  de 
Sofala  répond  à  l'Ophir  des  flottes  de  Salomon,  et  que  les 
constructions  de  Zimbâoé  furent  élevées  par  les  Phéni- 
ciens. On  sait  à  quelles  controverses  a  donné  lieu  la  situa- 
tion d'Ophir,  «  d'où  les  flottes  ne  revenaient  que  la  troi- 
sième année.  »   Outre  l'Ophir  du  sud  de  l'Arabie,  dont 

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46  AFRIQUE.  (n""  19-30.) 

Texistence  est  indubitable,  les  commentateurs  ont  cru  de- 
voir chercher  une  aulte  localité,  ou  un  pays  de  ce  nom,  sur 
un  point  plus  éloigné  de  la  mer  des  Indes,  à  cause  des 
trois  années  de  voyage.  Les  uns,  &  l'exemple  des  Mission- 
naires que  je  viens  de  citer,  sont  descendus  par  la  côte 
d'Afrique  jusqu'à  Sofala,  et  ceux-là  n'ont  pas  manqué  de 
rappeler  la  navigation  phénicienne  du  temps  de  Nékhao 
(vers  610  avant  J.  G.)  ;  d'autres,  se  fondant  sur  Tétymolo- 
gie  sanscrite  d'une  partie  des  objets  précieux  rapportés  par 
les  flottes  de  Salompn,  se  sont  tournés  vers  l'Inde.  Un  sa- 
vant illustre,  M.  Lassen,  a  même  cru  pouvoir  alléguer, 
à  l'appui  de  cette  dernière  thèse,  le  nom  des  Abhîra  du 
bas  Indus,  —  ce  qui  est  parfaitement  insoutenable,  soit  dit 
avec  tout  le  respect  que  je  dois  à  la  science  du  grand  in- 
dianiste :  d^abord  parce  que  la  tribu  infime  et  méprisée 
des  Âbhîra  ne  saurait  rien  avoir  de  commun  avep  un  grand 
marché  commercial  ;  en  second  lieu,  parce  qu'on  ne  voit 
nulle  part,  ni  dans  les  textes  nationaux,  ni  dans  les  sour- 
ces orientales,  ni  dans  nos^écrivains  classiques,  qu'un  em- 
porium  de  cette  nature  ait  jamais  existé  dans  le  delta  du 
Sindh.  D'un  autre  côté,  il  est  bien  difficile,  pour  ne  pas 
dire  plus,  de  faire  remonter  à  3000  ans  au  moins,  dans 
leur  état  de  conservation  relative,  les  constructions  de  Zim- 
baoé.  Tout  bien  considéré,  laissant  de  côté  la  question 
d*Ophir  pour  laquelle  je  m'en  tiendrais  volontiers  à  la  mé- 
tropole arabe  (pour  des  raisons  qu'il  serait  trop  long  de 
déduire  ici),  je  suis  tout  à  fait  d'avis,  pour  mon  compte, 
que  les  constructions  du  pays  de  Sofala  sont  tout  simple- 
ment l'ouvrage  des  Arabes,  qui <  pratiquaient  ces  côtes 
avant  la  venue  des  Portugais,  et  qui  en  exploitèrent  les 
mines. 


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TRANSVAAl-  47 

$  4.  Notes  snr  le  TransvaaI. 

Lq  budget  étaity  en  1860,  de  437,000  francs  de  recette 
environ,  recette  qui  ne  couvrait  pas  la  dépense  prévue. 

L'armée  comprend  tous  les  hommes  en  état  de  porter 
les  armeS;de  16  ans  à  60  ans,  et,  en  cas  de  nécessité,  tous 
les  hommes  de  couleur  de  l'intérieur  du  pays,  dont  les 
chefs  sont  soumis  à  la  République  ^ 

Les  individus  élus  à  des  grades  militaires,  qui,  sans  mo- 
tif valable,  refusent  d'accepter,  payent  une  amende  :  le  lieu- 
tenant, 25  rixdalers;  le  commandant,  100;  le  commandant 
général,  200. 

Tout  jeune  homme  qui  possède  un  chariot,  un  troupeau 
de  bœufs  (ordinairement  8  ou  10)  et  un  fusil  pour  la 
chasse  à  l'éléphant,  est  apte  à  se  marier;  il  choisit  immé- 
diatement une  jeune  fille,  et  le  mariage  se  fait  devant  le 
juge.  S'il  perd  s^.  femme,  il  ne  reste  pas  longtemps  veuf, 
et  réciproquement. 

Us  sont  plutôt  artisans  que  travailleurs  ;  c'est  à  peine 
s'ils  cultivent  ce  qui  est  nécessaire  à  Fentretien  de  leurs 
familles.  Il  arrive  souvent  qu'au  milieu  de  Tannée  il  leur 
faut  acheter  du  blé  et  du  maïs,  parce  que  le  produit  de 
leur  récolte  est  épuisé.  On  y  rencontre  d'excellents  serru- 
riers, charpentiers,  charrons,  fabricants  de  briques  et  ma- 
çons. Il  y  a  aussi  de  très-bons  armuriers. 

Les  marchandises  principales  du  commerce  sont  la  pou- 
dre, le  plomb,  l'étain,  le  café,  le  sucre,  les  indiennes  im- 
primées, le  coton  écru,  des  bretelles,  différents  remèdes 
portant  sur  l'étiquette  l'indication  des  maladies  auxquelles 
ces  remèdes  sont  applicables;  les  armes  de  précision  pour 

1.  La  population,  en  1864,  était  évaluée  à  20  ou  25,000  colons,  à  côté 
desquels  Tit  encore  un  groupe  considérable  de  population  aborigène, 
de  race  betchouana,  peut-être  250,000  âmes«  Ces  indications  sont  né" 
eessairement  assez  vagues^ 

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48  AFRIQUE.  (n*»*  31-32.) 

la  chasse  des  éléphants,  des  vêtements  et  des  chapeaux 
pour  hommes  et  pour  femmes,  outre  les  menus  objets  de 
ménage.  On  exporte  de  l'ivoire,  des  défenses  de  rhinocéros, 
des  dents  d'hippopotame,  des  planches,  des  peaux  de  divers 
animaux,  du  coton,  des  bœufs,  des  nattes,  des  corbeil- 
les, etc.  Ces  exportations  sont  toutes  destinées  à  la  colonie 
anglaise. 

L'agriculture  se  borne  à  la  culture  du  blé  et  du  maïs. 
Les  fruits  et  les  légumes  sont  assez  abondants  ;  le  raisin, 
les  pêches,  les  figues,  les  oranges,  les  pastèques,  etc.,  y 
viennent  en  grande  quantité^  ainsi  que  les  pommes  de 
terre,  les  haricots,  les  piments,  les  oigndns. 

Le  principal  produit  de  l'industrie  est  le  bois  en  planches 
de  8  mètres  de  longueur,  dont  le  prix  est  d'une  demi-livre 
sterling. 


VI 


MADAGASCAR. 

31 .  Alfred  Gbandidier.  Madagascar.  Bulletin  de  la  soc,  de  Géogra^ 
phie,  avril  1872,  p.  369-411. 

Dans  une  précédente  commanication  faite  à  la  société  de  Géographie 
(V.  le  vol.  précédent  de  VAnnée  Géographique,  p.  285-86),  M.  Grandi- 
dier  avait  donné  le  tracé  de  ses  itinéraires  en  diverses  parties  de  Tile, 
et  en  même  temps  esqaissé  la  physionomie  générale  de  cette  terre  en- 
core si  imparfaitement  connue;  la  communication  actuellâ  est  principa- 
lement consacrée  aux  productions  et  aux  habitants.  Elle  est  accompa- 
gnée de  trois  petites  cartes  de  l'île  mises  en  regard  sur  la  même 
planche,  Tune  tirée  de  l'ouvrage  d'Ellis,  1858,  l'autre  de  la  carte  de 
Robiquet,  1863,  la  troisième  de  la  grande  carte  de  M.  Grandidier  lai- 
mém^.  Ce  rapprochement  fait  ressortir  l'énorme  changement  que  les 
observations  de  M.  Grandidier  apportent  dans  le  tracé  orographique 
de  rue. 

—  Excursion  chez  les  Antanosse.j  émigrés.  Ibid.^  février  1872, 
p.  129-146. 

Épisode  de  voyage.  Aventures.  Traits  de  mœurs.  Tableaux  d'in"* 
térieur.  ^ 

32.  Etn.  Blanciiaud.  L'Ile  de  Madagascîfi'.  Les  tentatives  de  colonî- 

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MADAGASCAR.  49 

satioD.  La  nature  du  pays.  Un  récent  voyage  scientifique.  Bévue 
des  Deux  Mondes^  juillet,  août,  sept.,  oct.,  déc.  1872. 


Le  voyage  de  M.  Alfred  Grandidier  marque  une  épo- 
que capitale  dans  l'histoire  géographique  de  Madagascar  ; 
il-en  renouvellera  complètement  l'étude.  Toute  proportion 
gardée  entre  le  caractère  scientifique  des  deux  époques, 
M.  Grandidier  sera  le  Flacourt  du  dix-neuvième  siècle. 
Dans  sa  communication  actuelle,  qui  est  de  nature,  comme 
les  communications  précédentes,  à  faire  attendre  avec  im- 
patience sa  relation  complète,  Ip  savant  voyageur  touche  à 
^  rtistoire  naturelle  et  à  l'ethnographie,  deux  branches  d'é- 
tudes auxquelles  la  grande  île  africaine  ouvre  un  champ 
immense.  Il  présente  aussi  un  aperçu  de  l'état  politique  du 
pays.  Voici  ce  qu'il  dit  à  ce  sujet: 


L'Ile  de  Madagascar  se  divise  aujourd'hui,  au  point  de  vue 
politique,  en  deux  parties  bien  distinctes  qui  sont  à  peu  près 
d'égale  étendue  :  la  partie  dépendante  des  Ovas,  et  la  partie 
indépendante.  Toute  la  région  située  |i  l'Est  du  44«  degré  de 
longitude  et  au  Nord  du  22^  degré  de  latitude  appartient  aux 
Ovas,  qui,  sous  Andrianamponinimérine,  Radama  P»*  et  sa  femme 
Ranavaloune, .  se  sont  successivement  rendus  maîtres  des  di- 
verses provinces  comprises  dans  ces  limites.  Je  dois  toutefois 
ajouter  que  les  habitants  de  la  portion  de  la  côte  comprise  en- 
tre Manafiafe  et  la  rivière  Menanare  se  sont  révoltés  contre 
leurs  oppresseurs  et  ont  secoué  le  joug  ;  ils  sont  aujourd'hui 
indépendants.  Sont  aussi  indépendantes  les  peuplades  Saka- 
laves  qui  habitent  les  baies  çle  Narrinda  et  de  Madsamba,  ainsi 
que  la  côte  voisine.  —  Quand  à  toute  la  partie  Ouest  et  Sud  de 
Tîle,  elle  n'a  pu  encore  être  soumise  par  les  Ovas,  et  elle  est 
gouvernée  par  une  foule  de  chefs  indigènes,  à  l'exception  du 
Sud  du  Ménabé  qui  s'est  mis,  il  y  a  déjà  longtemps,  sous  la 
protection  de  la  reine  Ranavaloune. 

Au  commencement  de  ce  siècle,  la  division  politique  du  pays 
était  tout  autre. 

Mais  si  la  moitié   de  l'Ile  seulement  appartient  aux  Ovas, 
c'est  de  beaucoup  la  plus  belle,  la  plus  riche,  la  plus  cultiva- 
{.'annéb  géogr.  XI  4 


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50  .  AïJ'RIQUE.  (n°"  31-32.) 

ble.  Les  habitants  de  cette  moitié  forment  en  outre  près  des 
sept  huitièmes  de  la  population  totale. 

Sur  la  population,  au  point  de  vue  ethnologique  : 

Les  habitants  de  Madagascar  n'appartiennent  pas  plus  à  vtne 
seule  et  même  race  que  l'Ile  entière  n'appartient  à  un  seul  roi. 
Les  races  caucasique,  cafre,  mongole,  se  sont  mélangées  et  croi- 
sées dans  ce  coin  de  terre  avec  les  indigènes.  Les  autochtones 
sont  facilement  reconnaissables  sur  la  côte  Est  çù  le  type  s'est 
conservé  plus  pur;  leur  face  est  ronde  et  aplatie,  leur  nez  est 
écrasé  à  la  racine,  et  leur  chevelure  touffue  et  globuleuse  est 
en  tête  de  vadrouille.  Les  peuples  de  la  région  occidentale,  qui, 
de  temps  immémorial,  sont  en  contact  avec  des  nations  étran.-* 
gères,  n*ont  pas  la  laide  physionomie  des  autres  Malgaches; 
les  navires  de,  la  Judée  venaient  jadis  à  Sofala,  les  jonques 
chinoises  se  rendaient  à  la  côte  Sud-Est  d'Afrique,  et  plus 
tard  les  boutres  arabes  abordaient  souvent  sur  la  côte  Ouest 
de  Madagascar  :  aussi  y  trouve-t~on  parmi  les  hommes  libres 
beaucoup  d  individus  à  type  caucasique,  à  cheveux  lisses  ou 
ondulés,  au  teint  assez  clair.  Chez  les  ^esclaves,  on  constate 
les  traces  évidentes  de  croisements  fréquents  avec  les  Ga- 
fres.  Une  troisième  raço  bien  distincte  des  deux  autres,  qui 
appartient  évidemment  au  graad  tronc  mongolique,  a  aussi 
fait  irruptioa  à  Madagascar,  et  s'est  longtemps  conservée 
au  centre  de  l'Ile  assez  pure  de  tout  mélange  .\C3  sont  Les 
Ovas.  Des  yeux  allongés  et  bridés,  des  pommettes  saillantes, 
des  cheveux  lisses  et  raides,  un  teint  jaune  ou  cuivré,  ne  per- 
mettent pas  d*élever  le  moindre  doute  sur  leur  origine  asia- 
tique. 


M.  Grandidier  ne  croit  pas  qu'on  puisse  évaluer  la  papa 
lation  de  Tîle  à  plus  de  4  millions  d'âmes.  «  La  pro- 
vince d'Imérine  contient,  dit-il,  près  d'un  million  d'Ovas, 
et  dans  le  pays  de  leurs  voisins  et  alliés,  les  "Betsileos,  il 
peut  y  avoir  600  000  habitants.  Près  de  2  millions  habi- 
tent Test  de  l'île.  Quant  aux  Sakalaves,  aux  Mahafales,  aux 
Antandrouïs  et  aux  Bares,  ils  n'atteignent  certainement 
pas,  à  eux  tous,  le  chiffre  de  500  000  âmes.  » 


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M.  GHANDIDIEH  Â  MADAGASCAR.  5t 

L'article  que  la  Revue  des  Deux-Mondes  a  reçu  du  pro- 
fesseur Emile  Blanchard  (n*  32),  est  un  travail  considéra- 
ble, d'un  caractère  sérieusement  scientifique  et  profon- 
dément étudié.  Écrite  a  l'occasion  des  publications  frag- 
mentaires de  M.  Grrandidier,  cette  étude  k  fort  élargi 
le  cadre  d'un  simple  examen  critique  :  c'est  en  réalité 
un  tableau  de  l'île,  un  tableau  complet,  historique,  phy- 
sique, ethnologique  et  économique.  Quoique  un  travail 
de  cette  nature,  dans  les  conditions  ordinaires,  ne  puisse 
avoir  l'autorité  qui  s'attache  à  une  relation  savante 
écrite  par  Tobservateur  lui-même,  l'élude  de  M.  Blan- 
chard doit  au  nom  de  son  auteur,  non  moins  qu'à  son 
élaboration  approfondie,  une  valeur  tout  à  fait  exception- 
nelle. 

Citons  le  jugement  que  le   célèbre  critique  porte  sur 
l'exploration  de  M.  Grandidier  : 

ce  Jusqu'à  nos  jours,  les  indigènes  avaient  interdit  aux 
Européens  l'accès  de  l'intérieur  du  pays.  En  présence  des 
obstacles,  les  plus  entreprenants  avaient  été  découragés.  Le 
moment  est  arrivé,  néanmoins,  ou  les  difficultés  ont  été 
vaincues  ;  un  de  nos  compatriotes,  ferme  dans  son  des- 
sein, apportant  à  l'exécution  d'un  projet  bien  arrêté  une 
persévérance  inébranlable,  mettant  à  profit  des  relations 
nouées  avec  adresse,  est  enfin  parvenu  à  obtenir  l'appui  des 
uns  et  àdéjouer  la  surveillance  des  autres.  De  1868  à  1870, 
M.  Alfred  Grandidier  a.  traversé  l'île  dans  use  partie  de  sa 
longueur,  et  sur  plusieurs  points  dans  toute  sa  largeur 
Dominé  par  l'unique  ambition  d'acquérir  des  connaissan- 
ces nouvelles  sur  une  région  qui  offre  tous  les  genres 
d'intérêt,  le  voyageur  n'a  pas  visité  une  localité  sans  faire 
les  opérations  astronomiques  et  géodésiques  propres  à 
fixer  avec  certitude  la  position  géographique;, il  a  tracé  la 
direction  des  cours  d'eau,  déterminé  la  hauteur  des  mon- 
tagnes, étudié  les  reliefs  du  sol,  décrit  les  aspects  et  Ja 
condition  du   pays.   Pendant  plus  de  deux  années,  trois 

uiyiuzeuuy^OOgle 


52  AFRIOUE.  (n*"'  33-35.) 

fois  chaque  jour,  il  a  noté  la  pression  barométrique,  et  ob- 
servé le  thermomètre  de  façon  à  s'assurer  des  teippéra- 
tures  extrêmes.  Partout,  dans  ses  excursions,  il  a  recueilli 
les  plantes  et  les  animaux,  et  ses  découvertes  ont  permis 
d'élacider  plusieurs  questions  relatives  à  Thistoire  des 
êtres.  Ne  négligeant  aucun  moyen  d'information  ou  de  con- 
trôle, il  a  porté  dans  l'étude  des  races  qui  occupent  Mada- 
gascar un  soin  scrupuleux,  et  de  nouvelles  clartés  se  répan- 
dent maintenant  sur  tout  ce  que  nous  avions  appris  à 
l'égard  des  habitants  de  la  Grande  Terre.  En  un  mot,  un 
voyage  scientifique  a  été  accompli,  —  voyage  remarquable 
par  l'habileté  de  l'exécution,  comme  par  Timpcftance  des 
résultats  obtenus.  » 


VII 


AFRIQUE  OCCIDKNTALE.  LE  CONGO.  l'oGOVAÏ.  LE  GABON. 

33.  C.  Neveu,  aide-commissaire  delà  Marine.  Notes  sur  les  colonies 
du  Portugal,  et  principalement  sur  la  capitainerie  générale  de 
Mozambique.  Revue  Maritime  et  Coloniale  j  nov.  1872.  p.  247- 
273. 

«  Il  ne  s'agit  point  ici  d'une  étude  approfondie  des  colonies  portu- 
gaises; nous  ne  livrons  au  lecteur  que  de  simples  notes  recueillies 
presque  toutes  dans  la  publication  périodique  intitulée  Annaes  de  Con- 
selho  UUramarino,  et  destinées  à  donner  une  idée  delà  population,  des 
produits  et  de  l'état  politique  ou  militaire  de  ces  pays  généralement 
peu  connus.  >• 

Les  Notes  de  M.  Neveu  ne  touchent  pas  seulement  aux  établisse- 
ments d'Angola  et  de  Mozambique,  mais  à  toutes  les  autres  colonies 
portugaises,  en  Afrique  et  hors  d'iAfrique. 

34.  P.  Du  Chaillu.  The  country  of  the  Dwarfs.  Lond.  1872,  in- 8% 
320  p.  3  sh.  i  (Low): 

35.  Vice-amiral  Fleuriot  de  Langle.  Croisières  à  la  côte  d'Afrique. 
Tour  du  Monde,  T.  MUl,  1872,  n"  593,  594,  595,  p.  305-352. 


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l'ogovaï.  route  d'exploration.  53 

L*Ogovaï. 

Une  notice  excellente  sur  rOgovaï,  publiée  récemment 
dans  le  journal  l'Officiel,  mérite  d'être  reproduite  comme 
document  à  conserver.  Cette  notice  est  signée  seulement 
des  initiales  E.  E.;  mais  elle  sort  évidemment  d'une 
plume  autoris^ée,  et  je  regrette  de  n'en  pouvoir  faire  re- 
monter nominalement^  le  mérite  jusqu'à  son  auteur.  Elle 
expose  des  faits  et  renferme  des  vues  d'une  importance 
capitale  pour  les  grands  problèmes  géographiques  qui 
s'agitent  en  ce  moment,  et  les  explorations  qui  ont  pour 
objet  de  les  résoudre.  L'Ogovaï  est  un  fleuve  de  l'avenir.  Les 
Anglais  ont  choisi  la  ligne  du  Zaïre,  qui  leur  appartient, 
en  quelque  sorte,  par  droit  de  première  reconnaissance;  le 
remarquable  article  que  nous  allons  reproduire  montre  avec 
évidence  que  les  chances  sont  pour  le  moins  égales  du 
côté  de  i'Ogovaï. 

Aux  environs  de  Téquateur  on  rencontre,  en  longeant  la 
côte  ouest  de  l'Afrique,  trois  grands  estuaires  qui  par 
leurs  dimensions  doivent  évidemment  servir  d'embouchure 
à  des  rivières  ou  à  des  fleuves  d'un  volume  considérable. 
Ce  sont,  du  nord  au  sud,  le  Gabon,  I'Ogovaï  et  le  Zaïre  ou 
Congo. 

Au  delà  de  ces  embouchures,  sur  une  étendue  de  plus 
de  cinq  cents  lieues  de  profondeur,  s'étend  précisément  la 
zone  la  plus  inconnue  de  l'Afrique.  Il  y  a  trente  ans,  nous 
n'avions  pas  la  moindre  notion  sur  cette  immense  contrée. 
C'est  à  la  marine  française  que  revient  l'honneur  d'avoir 
fourni  celles,  bien  restreintes  encore,  que  nous  possédons 
aujourd'hui.  De  la  station  que  nous  avons  occupée  au  Ga- 
bon pendant  un  certain  nombre  d'années,  sont  parties 
presque  toutes  les  expéditions  de  reconnaissance,  et  les 
renseignements  que  nous  leur  devons  viennent  d'acquérir. 


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54  AFRIQUE.  (n°»  33-35.) 

grâce  aux  dernières  découvertes  de  livingstone,  une  im- 
portance toute  nouvelle. 

N'ayant  pu  suivre  jusqu'à  leur  terminaison  les  énormes 
cours  d'eau  qu'il  a  rencontrés  dans  Fintérieur  du  continent  ; 
les  ayant  vu  couler  tantôt  à  l'ouest,  tantôt  vers  le  nord,  le 
célèbre  voyageur  s'est  demandé  successivement  s'il  avait 
afi'aire  aux  sources  du  Congo  ou  à  celles  du  Nil.  La  ques- 
tion demeure  encore  indécise,  et  au  cas  où  elle  se  résou- 
drait dans  le  sens  de  la  première  alternative' ,  on  comprend 
de  quel  intérêt  il  deviendrait  de  reconnaître  le  cours  des 
grands  fleuves  équatoriaux  de  la  côte  occidentale,  de  bien 
préciser  la  position,  à  peine  soupçonnée,  de  leurs  sources. 
De  toute  façon,  il  est  évident  qu'au  cœur  de  l'Afrique  il 
existe,  sous  cette  latitude,  des  bassins  hydrographiques  de 
premier  ordre,  dont  les  relations  sont  encore  à  déterminer. 
Aussi,  dès  à  présent,  peut-on  être  assuré  que  des  décou- 
vertes considérables  attendent  les  voyageurs  qui  pénéire- 
ront  dans  ces  contrées. 

L'estuaire  du  Gabon,  aujourd'hui  connu,  n'a  géographi- 
quement  qu'une  valeur  secondaire.  Il  sert  de  déversoir 
commun  à  un  grand  nombre  de  rivières  qui  sortent  toutes 
des  Montagnes  de  Cristal,  situées  à  une  distance  relative- 
ment médîbcre  de  la  côte.  Le  Zaïre  ou  Congo,  le  plus  mé- 
ridional des  trois,  et  dont  la  partie  inférieure  seule  est 
bien  connue,  a  beaucoup  plus  d'importance.  Mais  le  plus 
considérable  est  très-probablement  l'Ogovaï. 

Placé  sous  l'équateur,  il  se  partage  à  son  embouchure 
en  un  immense  delta  qui  conduit  à  l'Atlantique,  à  travers 
un  pays  marécageux  formé  par  ses  alluvions,  un  énorme 
volume  d'eau.  Au-dessus  de  ce  delta,  à  une  soixantaine  de 
lieues  de  la  mer,  il  est  formé  par  la  réunion  de  deux 
grandes  rivières,  TOkanda  et  le  N'Gounyai.  L'Okanda 
vient  du  nord-est,  peut-être  du  nord.  Il  forme  avec  la  par^- 

1.  Voir  cl-desfltts,  p.  ?• 

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l'ogovaï.  55 

tie  inférieure  de  l'Ogovaï  une  vaste  courbe  dont  la  con- 
cavité, tournée  vers  le  nord-ouest,  embrasse  le  bassin  se- 
condaire du  Gabon. 

Quant  au  N'Gounyai,  il  descend  du  sud,  et  son  bassin 
est  évidemment  limitrophe  de  celui  du  Zaïre.  Les  deux 
fleuves,  vers  leurs  sources,  doivent  être  très-voisins  l'un 
de  l'autre.  M.  Tamiral  Fleuriot  de  Langle  pense  même 
que  certaines  rivières  considérées  par  Liviogstone  comme 
des  affluents  du  Zaïre  se  déversent  au  contraire  dans  le 
N'Gounyai.  L'Ogovaï  doit  a  ces  affluents  la  particularité 
qu'il  présente  :  il  a  deux  crues,  qui  concordent  parfaite- 
ment avec  Thivemage  tropical  du  Nord  et  du  Sud.  La  pre- 
mière, de  mari^  h  juin>  et  produite  par  l'Okanda,  est  la 
plus  forte.  La  seconde,  de  septembre  à  octobre,  provient 
du  N'Gounyai. 

Tous  ces  détails,  inconnus  il  y  a  vingt  ans,  nous  les  de- 
vons à  la  marine  française.  Un  voyageur,  dont  les  rèla- . 
tions  ont  été  trës-discutées,  du  Ghaillu,  s'était  bien  engagé 
déjà  dans  cette  contrée.  Mais  ses  descriptions,  dont  on  a 
depuis  lors  reconnu  l'exactitude,  manquaient  de  précision. 
Certaines  parties,  par  leur  évidente  exagération;  avaient 
d'ailleurs  soulevé  des  doutes,  et  c'est  de  juillet  1862  que 
date  la  première  expédition  sérieuse.  ^ 

Entreprise  par  MM.  Serval  et  GrifTon  du  Bellay  sur  l'aviso 
le  Pionnier,  elle  pénétra  dans  l'Ogovaï  après  avoir.reconnu 
une  partie  du  delta  du  fleuve.  Mais  arrêtée  d'abord  parles 
eaux  basses,  puis  par  l'hostilité  des  naturels,  elle  fut  obli- 
gée de  revenir  sur  ses  pas  avant  d'avoir  atteint  TOkanda. 
Dès  le  mois  de  décembre  de  la  même  année,  les  deux 
voyageurs  renouvelaient  la  tentative,  mais  par  une  autre 
voie.  Il  existait  une  route  de  terre  suivie,  par  les  naturels 
et  conduisant  du  Rhamboé,  affluent  méridional  du  Gabon, 
k  la  grande  rivière  inconnue.  Ils  s'y  engagèrent,  et  M.  du 
Bellay  ayant  été  arrêté  par  la  maladie,  M.  Serval  arriva 
seul  sur  les  bords  de  l'Okanda.  Deux  ans  après,  M.  le  lieu- 

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56  AFRIQUE.  (n°'  33-35.) 

tenant  de  vaisseau  Génoyer,  puis  un  Anglais,  M.  Walker, 
y  parvenaient  à  leur  tour  par  des  routes  analogues.  Mais 
dans  ces  tentatives,  on  avait  pu  seulement  constater  l'exis- 
tence de  la  rivière;  encore  n'était-on  pas  sûr  que  les  deux 
voyageurs  Teussent  rencontrée  au-dessus  du  confluent. 
Plus  heureux  que  ses  devanciers,  M.  le  lieutenant  de  vais- 
seau Aymès  réussit,  en  remontant  l'Ogovaï,  à  pénétrer  dans 
rOkanda ,  à  reconnaître  son  cours  sur  une  étendue  assez 
considérable.  Nous  lui  devons  les  seuls  renseignements 
que  nous  possédions  encore,  et  ils  confirment  de  tous 
points  ceux  donnés  par  les  naturels. 

Les  proportions  de  TOkanda  sont  à  peine  inférieures  à 
celles  de  TOgovai.  Au-dessus  du  confluent,  il  coule  au  mi- 
lieu d'une  vallée  de  10  à  12  000  mètres  de  large,  qu'il  cou- 
vre au  moment  des  crues  ;  et  la  rapidité  de  son  courant, 
l'énorme  volume  des  eaux  qu'il  roule  en  toute  saison,  an- 
noncent évidemment  que  la  source  qui  l'alimente  est  des 
plus  puissantes. 

•  D'après  les  naturels,  la  rivière  sortirait  du  lac  Tem,  si- 
tué à  une  grande  distance  dans  Tintérieur  des  terres,  à  dix 
mois  de  marche  de  la  côte.  Elle  franchirait  peu  de  temps 
après  des  montagnes  qui  la  rendraient  impraticable,  et  re- 
prendrait ensuite  jusqu'à  son  embouchure,  à  travers  un 
pays  de  plaines,  un  cours  tranquille  et  une  grande  profon- 
deur. Un  second  lac  se  trouverait  m4me  sur  la  rive  gauche, 
à  une  certaine  distance  du  confluent.  Ce  serait  lui  qui  re- 
cevrait les  rivières  que  Livingstone  aurait  à  tort  considé- 
rées comme  des  affluents  du  Zaïre. 

On  s'est  demandé  dans  quelle  région  de  l'Afrique  pou- 
vait se  trouver  ce  lac  Tem,  source  de  TOgovai;  et  comme 
l'embouchure  du  fleuve  est  située  sous  le  même  parallèle 
que  les  grands  lacs  reconnus  par  Speke  et  Baker  à  l'autre 
extrémité  du  continent,  on  avait  supposé  déjà  qu'il  pouvait 
descendre  des  massifs  montagneux  d'où  sortent  ces  énormes 
réservoirs.  La  découverte  par  Livingstone  de  grands  cours 

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LOGOVAÏ  ET  SON    ORIGINE.  57 

d^eau  qui  coulent  dans  cette  région  même,  et  qui,  slis  ne 
continuent  pas  leur  course  vers  le  Nord,  doivent  nécessai- 
rement incliner  vers  TOuest,  cette  découverte  est  venue 
compliquer  encore  le  problème,  lui  donner  surtout  un  in- 
rêt  des  plus  vifs. 

Existe-t-il  une  relation  entre  le  Tchambèze  et  la  Lou- 
fira  de  Livingstone,  et  les  sources  soit  de  TOgovai,  soit 
du  Zaïre?  Si  ces  cours  d'eau  sont  indépendants  les 
uns  des  autres,  quels  sont  les  rapports  de  leurs  bassins 
respectifs  ?  Telles  sont  les  questions  qu'on  se  pose  aujour- 
d'hui. Seule,  l'exploration  pourra  les  résoudre  et  permet- 
tre de  choisir  entre  les  nombreuses  hypothèses  auxquelles 
elles  ont  donné  naissance.  Mais  on  voit  par  leur  im- 
portance et  par  ce  qu'on  sait  déjà  de  l'étendue  des  fleuves 
qui  coulent  en  ces  régions,  que  là  se  trouve  certainement  le 
nœud  du  système  hydrographique  de  l'intérieur  de  l'Afri- 
que. Qu'on  suive  la  route  adoptée  par  Livingstone  ou  qu'on 
remonte  les  grands  fleuves  de  l'ouest,  on  n'ajoutera  rien 
d'essentiel,  rien  de  décisif  au  moins,  à  nos  connaissances,* 
tant  qu'on  ne  parviendra  pas  à  résoudre  ce  grand  problème 
de  la  ligne  du  partage  des  eaux. 

Ce  n'est  pas  seulement  au  point  de  vue  scientifique  qu'il 
offre  de  l'intérêt.  Sa  solution  influerait  certainement  de  la 
manière  la  plus  heureuse  sur  le  développement  des  relations 
de  l'Europe  avec  le  continent  africain.  Ces  régions  équato- 
riales,  notamment  celles  de  la  côte  occidentale,  sont  d'une 
incomparable  fertilité.  Sans  culture,  elles  donnent  à  profusion 
des  produits  qui  déjà  font  Tobjet  d'un  trafic  considérable  : 
l'huile  de  palme,  la  cire,  la  gomme,  le  caoutchouc,  l'ébène, 
rivoire,  etc.  Cultivées,  elles  sont  susceptibles  de  fournir 
tous  ceux  de  la  zone  torride  ;  les  arachides,  le  coton,  etc.,  etc. 
Les  légumes  y  pousseraient  à  merveille.  Les  métaux,  le 
fer  surtout,  paraissent  s'y  trouver  en  grande  abondance.  Les 
peuplades  noires  qui  les  habitent,  partout  où  elles  n'ont 
pas  été  corrompues  par  le  contact  des  Maures  ou  des  négriers, 

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68  AFRIQUE.  (n"  33-35.) 

loîa  d'être  hostiles  aux  Européens,  les  accueillent  avec  fa- 
veur, les  appellent  môme  avec  empressement.  Si  rimpul- 
Sîon  leur  était  une  fois  donnée,  elles  se  décideraient  facile- 
ment à  cultiver  le  sol,  pour  obtenir  les  produits  de  nos 
fabriques  en  échange  des  productions  naturelles-  du  pays. 
Ce  qui  jusqu'à  ce  jour  a  empêché  des  rapports  de  quel- 
que importance  de  s'établir,  c'était  l'odieux  trafic  de  la 
traite,  dont  heureusement  les  débouchés  sont  maintenant 
en  gràïide  partie  fermés;  c'est  encore  et  surtout  Tinsalu- 
brité  de  la  zone  niaritime.  Cette  insalubrité  est  telle,  que 
non-seulement  nulle  colonie  ne  peut  se  fonder  sur  le  litto- 
ral, mais  qu'on  n'y  peut  maintenir  les  stations  purement 
militaires  qu'on  essaie  d'y  fonder  pour  la  protection  du 
commerce.  Dans  l'intérieur  du  continent,  il  existe,  au  con- 
traire, d'immenses  régions  aussi  saines  que  fertiles.  La 
difficulté  d'y  pénétrer,  l'ignorance  de  leurs  conditions  cli- 
matériques  et  des  populations  qui  les  habitent,  en  ont 
constamment  éloigné  le  courant  de  la  colonisation .  Mais 
il  ne  peut  manquer  de  s'y  porter  lorsqu'elles  auront  été 
reconnues  et  qu'on  aura  convenablement  exploré  les  routes 
qui  peuvent  y  conduire,  et  surtout  les  fleuves,  ces  grands 
chemins  naturels.  Aussi  le  commerce  et  l'industrie  ne 
sont-ils  pas  moins  intéressés  que  la  science  à  ce  que  le 
voile  qui  couvre  ces  mystérieuses  contrées  soit  enfin  dé- 
chiré. 


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GUINÉE.  59 


VIII 

AFRIQUE  OCCIDENTALE 

Suite 
LA   GUINÉE. 

36  Capt.  J.  B.  Walker.  Note  on  the  Old  Calabar  and  cross  rivers. 
Proceed.  of  the  London  Geogr.  soc. y  vol.  XVI,  n"  2,  p.  135-136. 

L'estuaire  du  Vieux  Calabar,  an  fond  du  golfe  de  Bénin,  et  la  région 
qui  Tavoisine,  autrefois  centre  très-actif  du  commerce  des  esclaves,  au- 
jourd'hui marché  considérable  pour  l'huile  de  palme,  ont  été  particu- 
lièrement pratiqués  par  le  capitaine  Walker.  Ses  relevés  ont  été  utili- 
sés dans  la  feuille  19  de  la  Côte  Occidentale  d'Afrique  de  l'Amirauté 
anglaise. 

Cette  région  est  assez  mal  famée  pour  son  insalubrité;  le  mont  Ca- 
meroun, qni  la  domine,  est  au  contraire  dans  une  admirable  situation, 
et  dans  des  conditions  telles  que  M.  Rich.  Burton,  le  célèbre  voyageur, 
alors  consul  britannique  à  Fernando  Po,  le  signalait,  il  y  a  dix  ans, 
comme  un  point  parfaitement,  convenable  pour  l'établissement  d'un 
êanariurti  (voirie  l"  VQ\.àGV Année  Géogr.,  p.  Ô8). 

On  annonçait  dernièrement,  dans  les  journaux  allemands,  qu'une  ex- 
pédition de  botanistes,  composée  du  professeur  Buchhoitz  de  Berlin,  du 
docteur  Luhder  de  Greifswald,  et  du  docteur  Reichenow  de  Charlotten- 
burg,  allait  partir  pour  l'Afrique  occidentale,  se  proposant  de  pénétrer 
dans  la  Guinée  supérieure,  et  en  particulier  dans  la  chaîne  des  monts 
Camerouns. 

37.  Seventeen  years  in  the  Yoruba  country.  Memorials  of  Anna  HiN- 
T)ERER,  wife  of  thè  Rev.  D.  Hinderer;  gathered  from  herjournals 
and  letters,  with  an  Introduction,  by  the  Vener.  archdeacon 
Hone.  Lofid.  1872,  petit  in-8«  with  fig.  5  sh.  (Seeley). 

38.  E.  T.  Hamy.  Sar  l'existence  des  Nègres  brachycéphales  sur  la 
côte  occidentale  d'Afrique.  Bulletins  de  la  soc.  d'AnthropoL  de 
Paris,  févr.  1872,  p.  208-210. 

39.  Carte  de  la  côte  occidentale  d'Afrique,  des  îîes  Canaries  à  Sierra 
Leone  (n*  2835). 

Publications  du  Dépôt  de  la  Marine. 


40.  The  Canarian;  or,  Book  of  the  conquestand  conversion  of  the 
Canarians  in  the  year  1402,  by  Messire  Jean  de  Bethencourt. 
Knight.  Composed  by  Pierre  Bontier,  Monk,  and  Jean  Le  Ver- 
rier, Priest.  Translated  and  edited,  with  notes  and  an  Intro- 
duction, by  Rich.  H.  Major,  lond,  1872,  in-8-  (Printed  for  the 
Hakluyt  society} . 


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60  AFRIQUE.  (n~  36-49.) 

41.  Karl  VON  PRITSCH.  Reise  des  Frankfurter  Naturforscher  K.  ▼. 
Fritsch  und  D*"  J.  J.  Rein  nach  den  Ganarischen  Insein  und  dem 
marokkanischen  Atlas,  1873.  Vorlâufiger  Bericht.  MiUheil,  de 
Petermann,  1872,  n"  10,  p.  365-367. 


IX 

RÉGION  NORD-OUEST   DE  L'AFRIQUE 

LE  MAROC. 

42.  E.  DE  LA  Primaudaie.  Les  villes  maritimes  du  Maroc.  Revue 
Africaine,  journal  de  la  Société  Historique  algérienne,  1872, 
n-92,  93,  94,  95,96,  97. 

Portulan  descriptif.  Recherches  historiques  et  géographiques.  Com- 
merce, industrie,  population,  etc. 

43.  J.  D.  HooKER.  Lettres  sur  le  Maroc.  Le  Globe^  journal  géogra- 
phique de  Genève,  1872,  n«  1,  Bulletin,  p.  20-38. 

traduction  de  lettres  adressées  au  Gnrdner's  Chronicle.  Voir  notre 
précédent  volume,  p.  207. 

44.  J.  Ball.  On  ihe  orography  of  the  chain  of  the  Great  Atlas  (Lu 
à  la  réunion  de  l'Association  Britannique  à  Brighton,  août  1872). 

Je  ne  connais  de  ce  mémoire  que  la  courte  note  analytique  qu'en  a 
publiée  VAthenaeum;  voici  cette  note: 

«  Les  meilleures  cartes  récentes  diffèrent  singulièrement  i  l'égard  de 
la  partie  de  l'Atlas  située  à  l'est  et  au  nord-est  de  la  ville  de  Maroc. 
Durant  son  voyage  récent  en  compagnie  du  D**  Hooker  et  de  M.  Maw , 
l'auteur  s'est  trouvé  à  même  d'ajouter  quelque  chose  à  notre  connais- 
sance de  la  chaîne,  malgré  les  empêchements  que  les  chefs  locaux,  au 
mépris  des  ordres  du  sultan,  s'ingéniaient  à  mettre  à  tous  les  mouve- 
ments de  la  petite  expédition.  Dans  une  ascension  où  il  eut  à  lutter 
contre  une  tempête  de  neige  et  de  grêle,  M.  Maw  parvint  cependant,  à 
lapasse  de  Tagherot,  à  atteindre  le  sommet  dont  l'altitude  fut  trouvée 
de  12  000  pieds  anglais  environ  (à  peu  près  3660  mètres)  au  dessus  du 
niveau  de  la  mer.  Une  deuxième  ascension  eut  lieu  au  sommet  du 
Djebel  Tezah,  dont  Taltitude  est  de  1 1  500  pieds  (environ  3500  mètres). 
La  partie  de  la  chaîne  qu'on  aperçoit  de  la  ville  de  Maroc  est  beaucoup 
plus  élevée  qu'on  ne  Ta  généralement  supposé  ;  un  grand  nombre  de 
sommets,  le  plus  grand  nombre,  atteignent  un  niveau  de  4200  à 
4300  mètres.  » 

45.  Gerhard  Rohlfs.  Mein  erster  Aufenthalt  in  Marocco,  und  Reise 
sûdlich  vom  Atlas  durch  die  Oasen  von  Draa  und  Tafilet.  Bre- 
men  1872,  10-8"  2  thlr.  20  ngr. 

Voir  le  t.  V  de  V Année,  1866,  p.  372. 


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LE   OUED-GHIR.  61 

46.  Du  même.  DieBevœlkerungvon  Marokko.  Zeitschrift  der  GeselU 
schaft  fur  Erdkunde  %u  Berlin,  B"*.  VII  (n«  37),  1872,  p.  56-75. 

Les  chiffres  que  donnent  les  voyageurs  pour  la  population  du  Maroc 
diffèrent  beaucoup  entre  eux,  ainsi  qu'on  peut  s'y  attendre  alors  qu'il 
s'agit  d'un  pays  où  il  n'existe  pas  de  dénombrement  régulier,  et  où  un 
étranger  n'a  aucun  moyen  d'établir  un  calcul  basé  sur  d^s  données 
directes  tant  soit  peu  précises.  Pour  arriver  à  quelque  chose  de  moins 
arbitraire,  M.  Rohlfs  fait  un  rapprochement  qui  nous  paraît  très-judi-» 
cieux.  «  Si  nous  comparons,  dit-il,  le  Maroc  à  l'Algérie,  nous  voyons 
dans  les  deux  pays  une  similitude  de  conditions  de  sol  et  de  climat 
qui  comporte  une  très  grande  probabilité  de  densité  analogue  dans'la 
population  des'denx  contrées.  Or,  l'Algérie  a  une  population  d'un  peu 
moins  de  3  millions  d'àmes  (2  921  246,  recensement  de  1866);  et  comme 
la  superficie  du  Maroc  dépasse  au  moins  de  gioitié  celle  de  l'Algérie, 
qu'il  possède  de  plus  de  grandes  oasis  (Dra'a,  Tafilèt,  Touat),  et  qu'en- 
fin il  a  au  sud  de  l'Atlas  de  grandes  et  fertiles  provinces  (Sous  et  Ouèd- 
Noun)  sur  le  bord  de  l'Atlantique,  ce  n'est  sûrement  pas  aller  trop 
loin  que  d'évaluer  la  population  au  chiffre  de  6  500  ooo  âmes.  > 

Le  point  de  départ  est  bon  ;  mais  la  résultante  n'en  reste  pas  moins 
encore  assez  incertaine,  par  la  difficulté,  dans  l'état  des  notions  actuel-, 
les,  d'établir  une  écl^elle  de  comparaison  qui  soit  à  peu  près  sûre  entre 
l'étendue  relative  des  deux  territoires. 

47.  Général  de  Wimpfen.  L'expédition  de  TOued-Guir;  Lettre  à 
M.  le  marquis  de  Ghasseloup-Laubat^  président  de  la  Société  de 
Géographie.  Bulletin  de  la  Société,  janvier  1872,  p.  34-52. 

Avec  une  carte  de  M.  E.  Picard,  et  une  note  analytique  sur  cette 
carte,  p.  53-60.  Mais  sur  les  données  qui  ont  servi  à  l'établissement  de 
cette  carte  fragmentaire,  il  faut  voir  les  remarques  du  capit.  Kessler 
(n»  48,  ci- dessous),  p.  44k. 

48.  Kessler,  capit.  d'état-major.  Lettre  à  M.  le  Président  de  la  So- 
ciété (sur  la  même  expédition).  Ibid.,  avril,  p.  444-446. 

49.  H.  DuvEYBiER.  Historique  des  explorations  au  sud  et  au  sud- 
ouest  de  Geryville.  Ibid.  sept.  p.  225-261,  cart. 

Le  terrain  est  personnellement  connu  de  l'éminent  voyageur. 


Vexpédilion  du  Oued-Ghîr. 

L'expédition  française  qui,  aux  mois  de  mars  et  d'avril 
1870,  a  pénétré  dans  le  Fighig  et  dans  plusieurs  autres 
oasis  du  Sahara  marocain,  à  la  poursuite  de  tribus  insur- 
gées de  la  province  d'Oran,  a  procuré  d'utiles  informations 
sur*  des  territoires  qu'aucun  voyageur  européen  n'a  visités 
jusqu'à  présent;  il  faut  dire,  toutefois,  que  le  meilleur  des 
potions  recueillies,  particulièrement  pour  la  carte  des  pays 


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62  AFRIQUE .  (n°'  36-49 .) 

traver&éSy  reste  confiné  dans  les  cartons  du  ministère  de  la 
guerre  (voir  la  lettre  du  capitaine  Kessler,  p.  445).  Le  gé- 
néral de  Wimpfen  fait  d'ailleurs  ressortir  en  ces  termes 
les  avantages  que  Ton  a  retirés  de  rexpéditîon  pour  la 
connaissance  générale  du  pays  :  «  L'expédition  qui  vient  de 
s'accomplir  a  eu  Timmense  avantage,  en  dehors  de  ses 
résultats  politiques,  de  fixer  complètement  les  esprits  sur 
le  vaste  territoire  qui  s'étend  au  sud-ouest  de  notre  fron- 
tière, et  dont  on  çxagérait  beaucoup  les  difficultés  comme 
ressources  en  eau,  productions  végétales  et  conditions  cli- 
matériques.  Les  eaux  sont  abondantes  et  de  bonne  qualité, 
au  point  qu'une  colonne  ayant  un  effectif  de  cavalerie  éle- 
vé, a  pu  sans  inconvénient  parvenir  à  l'extrême  limite. 
.  Le  terrain,  d'un  parcours  facile,  offre  sur  la  plupart  des 
points,  à  TétaF  sauvage,  des  productioi;is  très-utiles  k  la 
nourriture  des  animaux  ;  un  convoi  de  près  i»  ô,000  cha- 
meaux a  traversé  tous  les  passages  sans  accident,  trouvant 
sur  la  route  les  pâturages  nécessaires,  ressources  précieuses 
qui  ont  aussi  alimenté  le  gros  troupeau  de  boeufs  nous 
fournissant  la  viande,  et  ont  donné  un  appoint  indispensa- 
ble à  l'orge  de  nos  chevaux  et  mulets. 

«  Nos  deux  mois  d'excursion  ont  en  outre  été  favorisés 
par  une  température  agréable  :  pas  de  fortes  chaleurs, 
souvent  un  temps  frais,  quelques  orages,  des  pluies  dans 
les  derniers  jours,  et,  en  résumé,  plutôt  froid  que  chaud. 
Ces  circonstances  ,  dues  peut-être  à  une  année  pluvieuse, 
permettent  cependant  de  désigner  les  mois  de  mars,  d'a- 
vril et  moitié  de  celui  de  mai,  comme  les  plus  convena- 
bles pour  voyager  dans  ce  pays. 

«  Enfin,  le  territoire  qui  s'étend  de  l'Oued-Grhir  à  notre 
frontière  n'a  aucun  des  caractères  du  désert  ;  il  est  habité 
par'  une  population  de  130,000  âmes  environ,  soit  séden- 
taire, soit  nomade,  ayant,  fixés  au  sol,  des  intérêts  matériels 
considérables  qui  la  rendent  très-vulnérable.  Les  trois  prin- 
cipaux points  d'appui  de  ces  populations  sont  les  oasis  de 

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LE    OUED-GHIR.  63 

Fighig  et  d'Aïn-Ghaïr,  et  la  tribu  des  Douï-Menia*.  Celte 
zone  s'est  longtemps  rattachée,  sous  le  rapport  politique 
et  commercial,  à  Tlemcen.  L'état  d'hostilité  créé  par  notre 
conquête,  l'établissement  d'une  ligne  de  douanes  et  l'in- 
terdiction de  la  vente  des  nègres  sur  nos  marchés,  ont 
profondément  modifié  cette  situation,  au  grand  avantage 
du  commerce  anglais  qui  inonde  le  Maroc  de  ses  produits 
et  les  expédié  même  jusqu'au  Soudan^  Les  relations  n'ont 
cependant  pas  complètement  cessé  avec  Tlemcen,  où  les 
Marabouts  de  Qenadsa,  forcément  appelés  dai^  notre 
Tell  par  leurs  quêtes,  s'approvisionnent  en  grande  par- 
tie ainsi  que  le  prouvent  les  nombreux  objets  de  cette 
provenance  que  nous  avons  trouvés  dans  leur  ksar.  » 

L'Oued-Ghir,  par  son  importance  historique  et  géogra- 
phique au  temps  des  Romains,  présente  un  intérêt  qui 
relève  les  rares  détails  fournis  par  les  documents  moder- 
nes sur  cette  rivière  de  l'Atlas  marocain.  Voici  ceux  que 
donne  le  général  Wimpfen  : 

«  L'Oued-Ghir  prend  sa  source  an  massif  élevé  qui  donne 
également  naissance,  au  nord,  à  la  Moulouïa.  Il  coule 
d'abord  dans  un  terrain  accidenté  et  rocheux  qui  rétrécit 
son  lit  et  le  rend  impropre  à  la  grande  culture.  Cette  pre- 
mière partie  de  son  cours  doit  à  la  configuration  du  sol  et 
à  l'absence  de  toute  eau  stagnante,  une  salubrité  très-fa- 
vorable aux  habitations  sédentaires  ;  aussi  est-elle  peuplée 
de  nombreux  ksours,  qui,  aa  moyen  de  petits  barrages, 
prennent  à  la  rivière  l'eau  nécessaire  à  leurs  jardins.  A 
Djorf-èt-Torba,  la  vallée  s'ouvre,  permet  les  irrigations, 
et  présente  les  premières  cultures  étendues.  Le  lit  y  est 
large,  obstrué  de  banes  de  sable  et  bordé  de  broussailles 
de  tamarix.  Il  roulait  à  notre  arrivée  un  gros  volume  d'eau 
rapide  et  limoneuse  ;  pour  des  imaginations  françaises^ 
cherchant  partout  l'image  de  la  patrie,  il  avait  l'aspect  de 
certaines  parties  de  la  Loire. 

«  Do  Djorf-èt-Torba,  la  vallée  est  cultivable  jusqu'à  Igil; 

uigiiizeu  uy  >^«  v^  Vv' pc  i n^ 


64  AFRIQUE.  (n*»*  50-56.) 

mais  les  cultures  se  développent  plus  ou  moins  suivant  ]a 
nature  des  rives  et  les  facilités  d'irrigations.  Ainsi,  elles 
présentent  encore  une*  zone  étroite  jusqu'à  quelques  kilo- 
mètres en  amont  de  Goleïb-Chiheb  ;  elles  s'élargissent  sur 
ce  point,  où  deux  fractions  des  Douï-Ménia,  les  Oulab-bel- 
Ghiz  et  les  Oulab-bou-Anân,  possèdent  des  orges  et  des 
blés  très-bien  arrosés,  et  elles  atteignent  toute  leur  éten- 
due dans  la  région  des  Toumiât,  pour  aller  en  se  rétrécis- 
sant finir  en  amont  d'Igli.  » 

On  donne  le  nom  de  Bahariat^  c  petites  mers  »,  à  un 
endroit  de  la  vallée  du  Gbir  où  les  eaux  de  la  rivière 
embrassent  une  large  étendue  du  pays  riverain.  Sur  une 
largeur  qui  atteint  10  kilomètres  et  une  longueur'  d'au 
moins  25  kilomètres,  un  faiscsau  considérable  de  canaux 
et  de  bras  de  rivière  arrose  de  grands  espaces  couverts  de 
céréales.  Les  Tamarix,  à  l'exclusion  de  tout  autre  arbre, 
croissent  sur  ce  terrain  en  quantité  telle,  qu'ils  forment 
sur  certains  points  de  véritables  forêts. 


'       ALGÉRIE. 

50.  Faye.  Sur  la  triangulation  géodésique  du  premier  ordre,  qui  sert 
de  fondement  à'ia  nouvelle  carte  de  l'Algérie  du  Dépôt  de  la 
Guerre.  Comptes-rendus  des  séances  de  l'Acad,  des  sciences^  1 1 
nov.  1872,  p.  142-46. 

51.  G.  Bourdon.  Étude  géographique  sur  la  Dahra.  2"  partie.  Bul- 
letin de  la  Soc.  de  Géographiey  juin  1872,  p.  593-612,  avec  la 
carte  du  Dahra,  au  400,000»;  juillet,  p.  59-91. 

Voir  le  volume  précédent  de  V Année  Géographique,  p.  195.  —  Dans 
cette  deuxième  partie  de  son  travail,  Tauteur  traite  de  l'ethnologie,  de 
l'histoire,  de  la  statistique  et  des  cultures  du  Dahra. 

52.  D'  G.  Naphegyi.  Ghardaïa,  or  Ninety  days  among  the  Be'ni  Mo- 
zab.  New  York,  187Ï,  in-12,  348  pages.  10  sh. 

53.  0.  Mac-Caathx>  Altitudes  des  principales  localités  de  l'Algérie, 

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ALGÉRIE.  65 

et  des  points  culminants  de  ses  différents  systèmes  montagneux. 
Bulletin  delà  Société  algérienne  de  Climatologie ^  1872, n"*  1-3, 
p.  17-19. 

Voir  ci-après. 

54.  TopiNABT).  Rapport  sur  la  population  indigène  de  Toasis  deBis- 
kra.  Bulletins  de  la  Société  d'Anthropologie  de  Paris,  t.  V,  1870, 
p.  548-555. 

Résumé  sommaire  de  notes  transmises  par  le  B^  Seriziat. 

55.  E.  Mercier.  Ethnograpliie  de  l'Afrique  septentrionale.  Notes 
sur  l'origine  du  peuple  berber.  Bévue  africaine ,  n"  90,  nov. 
1871,  p.  420-433. 

M.  Mercier  résume  ainsi  ses  vues  sur  l'ethnologie  de  la  région  de 
l'Atlas;  nous  ne  discutons  pas,  noua  rapportons  : 

!•  L'Afrique  septentrionale  a  dû  être  peuplée  par  une  série  d'immi- 
grations très-anciennes  de  peuples  sémitiques  venus  de  la  Syrie,  du  nord 
de  l'Arabie  ou  des  bords  de  l'Euphrate. 

2"  Ces  groupes  araméens  se  sont  assimilé  des  populations  d'origines 
diverses  —  basanées  dans  le  sud,  blondes  dans  le  nord  —  trouvées  par 
eux  dans  le  pays  ou  venues  postérieurement  à  leur  établissement. 

3«'  La  réunion  de  ces  éléments  et  leur  assimilation  ont  formé  la  race 
africaine  ou  berbère. 

4»  Cette  unification  a  dû  être  complète  dès  uns  époque  si  reculée, 
qu'il  est  permis  d'appliquer  le  titre  d'autochthones  aux  Berbères  de 
l'Afrique . 

56.  Revue  Africaine,  journal  des  travaux  de  la  Société  Historique 
algérienne,  XVI"  année.  Alger,  1872,  in-8'*.  (L'année,  14  fr.  — 
Paris,  Challamel.) 

La  Revue  Africaiiie,  organe  de  la  Société  Historique  algérienne,  est 
dirigée  par  M .  le  professeur  Cherbonneau,  qui  a  succédé  i  la  présidence 
de  la  Société  depuis  la  mort  de  M.  Berbrugger.  La  Revue  est  consacrée 
à  la  linguistique,  à  l'ethnologie,  à  l'histoire  et  à  l'archéologie  de  nos 
provinces  algériennes. 

57.  Recueil  des  Notices  et  Mémoires  de  la  Société  archéologique  de 
la  province  de  Constantine.  T.  XV,  1871-72.  Constantine,  1872 
in-8'»,  xxii-428  pages,  et  1  pi. 

La  plus  grande  partie  du  volume  est  occupée  par  1  Histoire  des  villes 
de  la  prov.  de  Constantine.  par  M.  Ch.  Feraud,  p.  1-380  (Sétif.  Bordj- 
bou-Arreridj.  Msila.  Bon-Sàda).  —  Il  faut  mentionner  aussi  les  in- 
scriptions de  la  province,  par  M.  Poulie,  p.  415-426. 


S  !•'.  La  nouvelle  carte  topographique  de  l'Algérie. 

Le  11    novembre   1872,  M,  le  Ministre  de  la  guerre 
l'année  géog».  XI.  r^      ^  1 

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C8  AFRIQUE.  (n*»' 50-57.] 

guerre,  ont  forcé  le  Dépôt  à  s'attacher  à  un  plan  moins 
grandiose,  la  scieDce  géodésique  n'en  aura  pas  moins  à  se 
féliciter  d'être  mise  en  possession  de  la  mesure  d'un  ma- 
guifiqne  arc  de  parallèle  à  cheval  sur  le  méridien  de  Paris, 
et  s*êtendant,  du  Maroc  à  la  Tunisie,  sur  une  étendue  de 
950  kilomètres. 

f  Yoilà  pour  la  science  pure.  Quant  à  la  question  pra- 
tique, si  essentielle  à  notre  colonie,  la  conséquence  de  ces 
travaux  a  été  là  construction  d'une  grande  carte  de  TAl- 
gérie  sur  le  même  plan  que  la  carte  de  France,  à  l'échelle 
de  irrîoïïô*  J®  ^^^  ^^^  ^®  même  plan,  mais  il  ne  s'agit  pas 
là  d'imitation  servile.  La  carte  de  TAlgérie  présentera,  en 
effet,  dans  son  ensemble,  une  supériorité  notable  sur  celle 
de  la  Frauce,  grâce  aux  progrès  de  l'impression  en  cou- 
leur. L'Académie  en  jugera  par  quelques  échantillons  que 
voici,  où  Ton  s'est  attaché  à  mettre  en  relief  le  jeu  des 
cinq  tirages  successifs  que  la  même  feuille  doit  subir,  pour 
êire  complète,,  avec  cinq  pierres  gravées  différentes.  Enfin 
ia  substitution  des  lignes  de  niveau  aux  hachures  présente 
des  avantages  sensibles  pour  les  services  publics. 

•  Je  reviens  à  la  Géodésie  proprement  dite.  Divisons 
d  abord  la  chaîne  des  triangles  de  premier  ordre  en  deux 
parties  :  Tune  de  Blidah  à  la  Tunisie,  l'autre  de  Blidah 
au  M  aroc  ;  la  première  mesurée  par  le  capitaine  Versi- 
gny,  la  seconde,  plus  récente,  par  le  capitaine  Perrier,  à 
qui  l'on  doit,  en  outre,  les  deux  grandes  bases  terminales 
de  Bone  et  d'Oran. 

*  Ce  qui  frappe  tout  d'abord  dans  cette  chaîne,  c'est 
la  bonne  forme  des  triangles  et  le  choix  des  stations  et  des 
siguaux.  Il  n'y  avait  pas  à  faire  usage,  en  Algérie,  des 
cbchers  auxquels  on  attribue  tant  de  petites  erreurs;  les 
signaux  ont  partout  été  construits  soigneusement  avec  une 
maçonnerie  en  pierres  sèches  (M.  Versigny),  ou  en  pier- 
res de  taille  et  ciment  (M.  Perrier).  On  aurait  voulu  se 
flprrir  de  l'héliotrope,   sj  généralement  employé  aujour* 

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NOUVELLE   CARTE    DE   l' ALGÉRIE.  69 

d*hui  à  l'étranger,  et  dont  M.  Perrier  vient  de  faire  une 
heureuse  applicalion  en  France  ;  mais  il  n'était  pas  pos- 
sible de  détacher  au  loin  des  opérateurs  isolés.  Les  sup- 
ports des  instruments  de  mesure  n'ont  pas  été  construits 
avec  moins  de  soin  :  rien  n'a  été  négligé  pour  leur 
donner  la  stabilité  requise  et  les  garantir  des  rayons  du 
soleil. 

<  On  ne  sera  donc  pas  surpris,  en  examinant  le  détail 
de  ces  opérations,  du  degré  de  précision  obtenu  dans  ces 
mesures  délicates.  Je  trouve  pour  Terreur  probable  de 
la  somme  des  trois  angles  d'un  triangle'  quelconque  de 
M.  Versigny,  3'',  12,  et  pour  celle  de  M.  Perrier,  3'',07 
(ne  pas  oublier  qu'il  s'ajf^it  ici,  comme  dans  tout  ce  qui 
émane  du  Dépôt  de  la  guerre,  de  secondes  centésimales). 
C'est  une  précision  rarement  atteinte,  qui  place  ces  tra- 
vaux au  rang  des  meilleures  mesures  effectuées  à  l'étran- 
ger depuis  les  perfectionnements  tout  modernes  de  la  Géo- 
désie, Cependant  M.  Versigny  a  dû  employer  les  anciens 
cercles  répétiteurs  de  Gambey,  tandis  que  M.  le  capitaine 
Perrier  a  eu  à  sa  disposition  le^  excellents  cercles  azimu- 
laux  qu'il  s'est  fait  construire  par  la  maison  Brunner, 
mais  le  premier  a  su  sans  doute  compenser,  à  force  de 
soins  et  de  travail,  l'infériorité  de  son  outillage.  L'Aca- 
démie n'en  tiendra  pas  moins  compte  au  capitaine  Per- 
rier d*avoir  introduit  dans  ses  opérations  les  nouveaux 
instruments  et  les  méthodes  nouvelles  qui  simphfient  le 
travail,  tout  en  donnant,  généralement,  des  garanties  su- 
périeures d'exactitude. 

ff  Pour  la  mesure  des  bases,  nos  officiers  algériens  ont 
renoncé  aux  appareils  anciens  de  Borda,  usités  pour  la 
carte  de  France,  sans  vouloir  recourir  à  la  méthode  des 
leviers  à  touche  employée  en  Russie,  ou  aux  coins  de 
verre  dont  les  Allemands  ont  fait  un  si  fréquent  usage  de- 
puis Bessel.  L'Académie,  par  l'organe  d'une  Commission 
dont  M.  Largeteau  était  le  rapporteur,  avait  approuvé  le 


70  AFRIQUE.  (n"*  50-57.) 

système  qu'un  habile  ingénieur  piémontaû,  M.  Porro, 
Itti  avait  soumis.  Sur  la  foi  de  celte  haute  recommanda- 
tion ^  le  Dépôt  de  la  guerre  voulut  l'essayer,  et  il  s'en  est 
bien  fromé. 

«  Depuis  iûT&y  les  officiers  espagnols  Font  appliqué,  à 
kur  tour,  h.  leur  célèbre  base  de  Madridejos,  et  ont  eoû- 
Brmé  par  un  brillant  succès  la  préférence  accordée  en 
Algérie  à  ce  système.  Il  est  juste  pourtant  d'ajouter  que 
l'appareil  dt^  Porro  a  été  amélioré  et  construit  par  Biun- 
ner.  M.  terrier  a  voulu  s>asur«r  de  l'exactitude  de  ees 
ojesures  fondaïueotales  en  recommençant  celle  d'un  tfOB- 
çon  de  k  base  d'Oran.  La  différence  des  deux  mesures  a 
été  de  3  millimètres  (3'"™,6)  sur  une  longueur  de  1180 
mètres.  Il  en  a  déduit  que  l'erreur  probable  de  ses  trois 
base^,  en  laat  qu'elle  résulte  des  accidents  inévitables  de 
ropéraiiun,  ne  dépasse  pas  1  centimètre.  Notez  qu'il  s'agit 
ici  de  friandes  bases  de  10  000  mètres. 

Œ  L'unt;  d'elles,  celle  de  Blidah,  a  servi  au  calcul  des 
eutéB  des  trîan^des;  les  deux  autres  ont  servi  de  vérifica- 
tion. \iyk\  les  résultats  :  * 

mètp.      c. 
La  base  de  Bone,  calculée  par  42  triangles,  donne.     10  325  29 

La  mesure  ilirecte  a  donné , 10  325  17 

Celle  d'Orau,  calculée  par  22  triangles,  donne..       9363  Sk 
La  mesure  directe  a  donné 9364  18 

s  Tel  est  le  degré  de  précision  qui  a  été  atteint  dans 
TA  Trique  française  :  il  dépasse  ce  qu'on  pouvait  légitime- 
ment désirer  pour  la  meilleure  carte,  et,  lorsque  les  règles 
algériennes  auront  été  définitivement  étalonnées  par  la 
grande  Commission  internationale  du  système  métrique, 
il  répondra  complètement  à  toutes  les  exigences  de  h 
sciencfl  artuelle,  qui  sera  appelée  bientôt  à  tirer  parti  de 
ces  beaux  travaux. 

«  J'aurais  à  rendre  compte  ici  des  opérations  astrono- 
miques de  longitude,  de  latitude  et  d'azimut,  si  elles  ne 

uiyiiizeu  uy  >^jv^v^^i>^ 


NOUVELLE   CARTE  DE   L  ALGÉRIE.  71 

devaient  être  publiée»  dans  la  troisième  partie  du  Haute  X 
du  Mémorial,  D^iUeuve,  le  MiaUtre  de  la  guerre  désire, 
avant  taut,  ka  faire  eoimpléter  par  la  déterwinatien  télé- 
graphique de  la  longitude  d'Alger,  ainsi  que  p^r  celle  de 
l'amplitude  totale  de  la  chaîne.  Très-certaineiuent  il  ré- 
e)agsD«ra  dans  ce  but  le  eoneours  du  Bureau  de&  longitudes 
et  de  l'Observatoire  de  Paris.  Il  ne  reste  d(UM  plua  qu'à 
dire  quelques  mot»  du  nivellement  g&edéaique  dont  le  ré-^ 
eeau  algérien  devait  être  nécessairementi  accompagné.  Qe. 
nivellraaent  s'étend  sur  la  chaîne  entière,  et  le  calcul  dea 
altitude»  fournit,  poar  chaque  point,  deu^  valeurs  distinctes 
dont  l'accord  ou  le  désaccord  constitue  une  première 
épreuve.  Les  discordances  iont  généraleoient  trèa-faibles, 
l^ee  au  soin  avec  lequel  les  distances  zénithales  des  si. 
gnaox  ont  été  observées  et  à  un  emploi  constant  de  la 
méthode  des  distances  réciproques  (nçji  simultanées). 
Deux  fois  seulement  ces  écarts  ont  atteint  3  mètres;  trois 
atteignent  2  mètres;  les  autres  sont  de  moins  de  1  mètre. 
La  cbaîpe  ayai^t  été  rattachée  en  trois  points  au  niveau  de 
la  mer,  Tensemble  des  opérations  fournit  les  deux  vérifr- 
cations  suivantes  :  l'erreur  des  cotes  d'altitude  a  été  trou* 
vée,  à  Bone,  de  0"*,41,  et,  à  Oran,  de  0"»,195. 

«  Le  coefficient  de  la  réfraction,  en  AIg:érie,  est  er 
ipoyenne  de  0,072,  valeur  çpncordant  avec  celle  que  four- 
}^\  Iç  ^ivel^eçlent  des  régions  plus  septentrionales,  partout 
,où  le  rayon  visuel  ne  passe  pas  par-dessus  la  mer. 

«  Qitons  §nfin  les  poii^ts  de  la  côte  d'Algérie,  d'où  Ton 
^^t  voÂr  la  çô^te  d'î;;ip«^ne  ;  ce  sont  : 

mètr.    c. 

Tessala,  altitude. 3061  25 

Seba  Chioukh 663  26 

Nador  de  Tlemcen 1579  30 

Le  Filhoussen 1135^  67 

Le  Zendal....^....,.t 6112  ^4 


L'Académie  oomprend  dans  quel  but  M<  le  cj^pitajne 

Google 


« 

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72  AFRIQUE.  (n^«  50-57.) 

Perrier  a  relevé  si  soigneusement  ces  points-là;  mais  ^e 
ne  devancerai  pas  la  communication  qu'il  compte  bientôt 
vous  faire  sur  un  sujet  qui  a  excité  autrefois  tant  d'es- 
pérances parmi  d'anciens  et  illustres  membres  de  cette 
Académie. 

«  En  résumé,  messieurs,  j'exprime  ma  conviction  que 
le  monde  savant  accueillera  avec  le  plus  vif  intérêt  l'ap- 
parition du  dixième  tome  du  Mémorial  du  Dépôt  de  la 
guei  re  dont  M*  le  Ministre  a  désiré  signaler  à  votre  atten- 
tion la  partie  principale,  comme  pour  vous  montrer  que 
nos  jeunes  officiers  sont  dignes  en  tout  point  de  leurs  sa- 
vants prédécesseurs.  , 

«  N'oublions  pas  que  les  Français,  qu'il  est  de  mode 
aujourd'hui  d'accuser  d'ignorance  en  fait  de  géographie» 
sont  les  véritables  créateurs  de  la  Géodésie  continentale 
ou  maritime,  et  qu'ils  n'ont  cessé,  depuis  les  Gassini  jus- 
qu'à nos  jours,  de  publier  d'admirables  travaux  qui  ont 
servi  de  modèles  à  nos  émules;  les  véritables  hommes 
de  science,  à  l'éirauger,  ont  su  de  tout  temps  en  apprécier 
la  valeur.  » 

S  2.  Les  études  scientiûques  en  Algérie. 

L'Académie  des  sciences,  dans  sa  séance  du  2  décembre, 
a  entendu  avec  intérêt  une  lecture  de  M.  Paul  Mares  sur  la 
nécessité  de  créer  en  Algérie  un  centre  supérieur  de 
travaux  et  d'études  scientifiques. 

Nous  ne  nous  portons  pas  juge  du  plan  développé  par 
l'éminent  physicien  auquel  l'Algérie  doit  des  études  d'une 
haute  valeur  (voir  le  t.  IV  de  Y  Année  géographique,  p.  68)  ; 
mais  son  mémoire  renferme  un  aperçu  plein  d'intérêt  sur 
l'ensemble  des  travaux  scientifiques  dont  notre  grande  colo- 
nie a  jusqu'à  présent  été  l'objet.  Voici  le  résumé  que  M.  de 
Parville  en  a  donné  dans  le  journal  officiel. 

Au  moment  où  la  France  vient  d'éprouver  de  si  terribles  re- 

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LES   ÉTUDES   SCIENTIFIQUES   EN   ALGÉRIE.  73 

vers,  et  de  perdre  1  500000  habitants,  il  serait  temps  enfin  de 
penser  à  mettre  en  œuvre  tous  les  moyens  propres  à  aider  à  la 
colonisation  de  l'Algérie.  Les  idées  les  plus  erronées,  dit  l'au- 
teur, ont  encore  cours  en  France  sur  cette  magnifique  contrée, 
où  plusieurs  millions  de  Français  vivraient  à  Taise  et  offriraient 
à  la  mère  patrie,  à  quelques  pas  d'elle,  une  source  inépuisable 
de  richesse  et  de  puissance.  Les  hommes  intelligents  et  ins- 
truits y  sont  nombreux;  ils  pourraient  former  rapidement  un 
corps  savant  capable  de  rendre  les  plus  grands  services  pour 
une  investigation  active  de  la  colonie. 

Dès  1838,  le  gouvernement,  pénétré  des  avantages  qu'on 
pourrait  retirer  d'une  création  de  ce  genre,  avait  formé  une 
comnaission  scientifique  ;  le  zèle  et  le  courage  de  nos  savants 
durent  échouer,  en  partie  du  moins,  devant  les  difficultés  de  la 
conquête.  Depuis,  il  s'est  constitué  un  certain  nombre  de  socié- 
tés pour  l'agriculture,  les  sciences  physiques  et  naturelles,  la 
médecine,  l'histoire,  l'archéologie,  etc.;  leurs  travaux  sont  im- 
portants et,  pour  en  tirer  tout  le  fruit  possible,  il  ne  manque 
qu'un  lien  qui  les  unisse  entre  eux.  Il  est  facile  de  s'assurer, 
par  une  analyse  générale,  des  progrès  scientifiques  accomplis 
en  Algérie  depuis  quelques  années. 

Ainsi,  dans  les  sciences  mathématiques,  la  géodésie  a  été 
l'objet  de  travaux  suivis,  grâce  à  l'initiative  du  ministère  de  la 
guerre.  La  côte  et  tout  le  Tell  sont  couverts  de  triangulations: 
la  topographie  est  presque  entièrement  terminée.  La  marine  a 
repris  les  travaux  du  conunandant  Bérard  et  a  terminé  un  re- 
levé topographique  des  côtes  à  1/25000^.  Le  génie  militaire  a 
rapidement  établi  un  premier  réseau  de  routes  stratégiques  ; 
aujourd'hui,  avec  l'aide  du  génie  civil,  les  plus  grandes  routes 
sont  achevées.  Deux  voies  ferrées  relient  Oran  à  Alger,  et  Phi- 
lippeville  à  Gonstantine. 

Toutes  les  études  qui  se  rapportent  à  l'observation  des  phé- 
nomènes naturels  trouvent  en  Algérie  un  des  plus  beaux  champs 
de  recherches  que  puisse  rêver  l'homme  de  science.  Le  grand 
massif  de  l'Atlas  présente,  entre  la  Méditerranée  et  le  Sahara,  un 
développement  de  300  kilomètres.  Sa  large  croupe  est  occupée 
tantôt  par  des  plaines  immenses  dont  le  niveau  se  maintient 
entre  650  et  1200  mètres  d'altitude,  tantôt  par  des  massifs 
montagneux  dont  les  pics  élevés  dépassent  2000  mètres.  Son 
flanc  sud  se  termine  presque  toujours  par  des  rides  linéaires, 
dont  les  assises  rocheuses,  aussi  régulières  que  de  grandes  di- 
gues, plongent  à  pic  dans  les  plaines  sans  limites  du  désert. 

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Î4  '  AFRIQUE.  (n*»9  50-57.) 

Oetie  dkpositicHa  orograpbique,  &b  âcMftaant  une  grande  Tar 
Ftété  àe  elimats,  mMltipUe  ks  sujets  <i'étu4e.  La  météorolo^e, 
ea  partieulieF,  paurrait  en  Algérie  faire  de  rapides  progrès. 
C'est,  en  effet,  Yers  le  Sahara  algérien  que  vont  se  perdre 
l^aocoup  d'ouragans  partis  du  Nord  ;  on  pourrait  étudier  sur 
plaee,  i^vee  grand  profit^  ces  piiéfLOixiènesk  Le  régime  général 
des  teHi]^érature&,  des  ventsi,  des  pluies^  des  pressions  baromé? 
t»qaes,  n'est  pas  le  même  sur  l'un  et  l'autre  versant  de  l'Atlas. 

La  ^mîe  n'a  pas  fait  eneore  d'investig&tions  sérieuses,  en 
Afrique  ;  combien,  cependant,  présenteraient  d^ntérèt  àes  rer 
eber^hes  ehimiques  sur  les  v^étaux,  les  telles,  le&  eaux,  les 
roches  diverses  des  montagnes  dont  les  sédiments  arrivent  tons 
le»  ans  en  si  grande  quantité  dan»  les  plaines  et  les  vallées 
»ous  l'action  des  pluies,  parfois  diluviennes,  de  la  saison  d'hi- 
,  ver.  Les  études  géologiques  ont  été  poussées  assez-  loin,  grâce 
ans  recherehes  de  MM.  Rozet,  de  Yernettil,  Fourael,  Benoiu  et 
Ville  ;  on  peut  espérer  plus  encore,  et  surtout  diriger  les  fer. 
eheFches  du  côté  des  gisements  miniers.  Déjik  on  a  trouvé  des 
minée  très-productives;  mais  il  existe  encore  beauoe^up  d'autres 
points  qui  n'ont  pas  été  examinés  sérieusement. 

La  botanique  est  une  des  sciences  qui  ont  été  le  plus  complè- 
tement étudiées.  II  n'en  est  pas  de  pème  de  la  zoc4ogie.  De- 
puis les  travaux  de  la  Commission  scientifique  de  1B39,  M.  Ma- 
res ne  cite  que  la  publication,  dans  ces  dernières  années,  de 
deux  volumes  sur  la  faune  marine  et  malacologiquede  PAlgéfie, 
par  M.  Wincauw,  et  les  études  de  malacologie  terrestre  et  flu- 
viale de  M.  Bourguigoat. 

L^agrieulture  algérienne  réclame  impérieusement  le  concours 
de  la  science;  elle  ne  se  trouve  plus  dans  le&  mêmes  conditions 
que  l'agriculture  française.  L'agronome  le  plus  habile  d^Supope 
se  sent  immédiatement  dépaysé  en  Afrique.  Les  pluies  sont 
aboïidantes  près  du  littoral  ;  elles  tombent  par  intervalles  pen- 
dant huit  et  même  neuf  mois  de  l'année,  et  donnent  90  centi- 
mètres aviron.  La  température  est  très-douce  dans  les 
parties  basses  du  Tell,  et  cette  chaleur  relative  permet  à  la  vé- 
gétation de  pousser  dès  les  premières  pluies  de  l'automne  et 
pendant  tous  les  nK>is  d'hiver.  A  la  période  humide  sucoède  un 
soleil  ardent  qui  amène  une  sécheresse  excessive  ;  il  résulte  de 
oes  phénomènes  une  sorte  de  transposition  des  saisons,  que  l'a- 
griculteur européen  ne  saurait  trop  observer. 

La  beauté  générale  du  climat,  la  bonté  des  terres,  l'action 
puissante  du  soleil  sur  leur  fertilité,  tout  concourt  à  faire  de 

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HYPSOMÉTmE   ALGÉRIENNE.  75 

rAlgéFie  une  ded  plus  ncbes  contrées  agricoles.  Depuis  l'oceu- 
pation  française,  le  commerce,  qui  était  presque  nul,  s'est  élevé 
à  86  millions  en  1851,  et  arrive  aujourd'hui  à  297  millions.  Sur 
ce  dernier  chiJGfre,  les  exportations  de  produits  figurent  pour 
72  455 122  fr.,  dont  il  faut  attribuer  70  275  000  fr.  aux  produits 
seuls  de  l'agriculture  algérienne.  Et  j)0ur  arriver  k  ces  résul- 
tats, la  population  européenne,  à  laquelle  ils  sont  presque  ex- 
clusivement dus,  ne  compte  encore  que  218000  âmes,  dont 
122  000  Français.  Ces  218000  Européens  n'occupent  actuelle- 
ment que  70  000  hectares  sur  14  millions  d'hectares  que  compte 
le  Tell  seul,  c'est-à-dire  la  zone  montagneuse  que  nous  pou- 
vons coloniser. 

La  médecine  a  été  très-bien  représentée  en  Algérie:  lestra-r 
vaux  du  personnel  médical  ont  été  nombreux.  On  s'est  facile- 
ment convaincu,  par  Pinspection  dQs  statistiques,  que  les  en* 
fants  croissent  et  furospèrent  en  Algérie  avec  une  telle  facilita, 
que  le  nom.bre  des  Européens  a  pu  augmenter  progressivement. 
En  dix-huit  mois,  de  1861  à  1862,  l'excédant  des  naissances  sur 
les  décès  a  été  de  3927^  et  dans  ces  dernières  années  il  donne 
un  chiffre  de  146  p.  100  de  décès. 

La  géographie  ^.Igérienne  a  réuni  de  nombreux  documents  : 
cours  d'eau  souterrains  de  plusieurs  centaines  de  kilomètres  de 
longueur,  climat,  productions,  races  autochthones  ou  conqué- 
rantes, ruines  de  tout  âge  de  nombreux  villages  fortifiés  que 
l'on  trouve  à  chaque  instant  dans  l'Atlas  et  qui  dévoilent  des 
massacres  fréquents  de  tribus  à  tribus,  tout  a  été  soigneuse- 
ment noté.  Il  serait  facile,  en  tirant  partie  de  ces  documents, 
de  généraliser  dans  le  peuple  des  notions  claires  et  véridiques 
sur  le  climat  de  l'Algérie,  sur  son  histoire,  et  de  faire  tomber 
ces  idées,  encore  trop  répandues,  d'aridité,  de  sables  saoa 
limites,  etc. 

En  résumé,  en  montrant  ce  qu'a  déjà  fait  la  science  en  Algé- 
rie, l'auteur  insiste  sur  l'utilité  de  la  création  d'un  corps  savant 
permanent  dans  le  pays.  Le  développement  des  arts  industriels 
et  agricoles  ne  peut  être  rapide  et  sûr  qu'à  la  condition  d'être 
guidé  par  les  théories  scientifiques  qui  dissipent  les  préjugés  et 
fécondent  les  recherches  pratiques  des  masses  laborieuses. 

S  3.  Hypsométrie  algérienne. 

M.  Mac-Carthy,  4ont  les  études  sur  rAlgérie,  histori- 
ques  ou  physiques^  sont  toujours  dignes  d'attention,  a 

uiyiiizeu  uy  >^«  v^  Vv' pc  i n^ 


76  AFRIQUE.  (n°*  50-57.) 

donné  à  un  recueil  algérien  un  résumé  des  principaux  ré- 
sultats acquis  sur  le  relief  de  cette'  partie  de  la  région 
de  TAtlas.  Gomme  ce  document  est  court,  nous  le  repro- 
duiaons. 


Localités. 

Aïn-Bi/ïda  (prov.  de  Constantine) 
Aïn-Té mouchent  (prov.  d'Oran) 
AJprcr.  La  porte  du  Sa'hel. 

—  Point  culmin.  des  Tagarins. 

—  Observai""**  prov.,  à  El-Biar. 
Am  mi- Moussa  (province  d'Oran) 
A*niûiniji. 

Aumalti* 

hM'd  (place  d'Armes). 

Biikra., 

Ilor'ar  (Boghar). 

Bardj-Hùiiîra. 

Bordj-Bou-A'riridj. 

Kuii-Friiik, 

Bûtjkh;tAri  (par  erreur  Bogban) . 

Buu-Sii^ïa  (Fort  Neuf). 

GoTistLiUtiue  (la  K'asba). 

Dftr-Bc^ii-A'hd-Allah. 

BjcllH. 

Dia'-i^l'Mîzân. 
Géryviile* 
El-GùlÈït. 

La  Mar'nîa. 

LarÏJuâL 

Ma'î^k'ara. 

j^Jâzouija. 

MedU  (la  place). 

MeUîlî. 

Millana. 

MoatagliaDfim  (la  place,  chevet  de 

régJisf-J. 
NeilroEiLu  (pied  du  Minaret). 
Orac. 

Orlea.nsviJ[e. 
Kl-ûuàd  [chef-lieu  du  Souf). 


Altitude  Observateurs. 

en 
mètres. 
800  Mac-Carthy,  1849. 
258  Mac-Carthy,  1849. 
143  Génie. 

165  Mac-Carthy,  1862. 
217  Ch.  Bulard. 
171  Génie. 

396  Mac-Carthy,  1853. 
850  État-Major. 
1021  E.  Renou. 
260  Ponts-et-Chaussées. 
125  P.  Mares. 

970  M.-Carthy,  1852-53  ;  Mares. 
431  Ét.-M.;  Mac-Carthy,  1854.  , 
915  Mac-Carthy,  1854. 
58  Ponts-et-Chaussées. 
633  P.  Mares. 
578  E.  Renou. 
644  État-Major. 
1275  Mac-Carthy,  1849. 
418  Génie. 
1167  Mares. 
447  État-Major. 
1360  Mac-Carthy,  1855. 
402  Henry  Duveyrier. 
279  État-Major. 
365  Génie;  M.  Carthy,  1850. 
780  M.-Carthy,  1852;  Mares. 
585  Mac-Carthy,  1855. 
355  Génie. 

920  M.-Carthy,  1852;  Mares. 
560-505  État-Major;  Mares. 
740  État-Major. 

105  Ponts-et-Chaussées. 

395  Mac-Carthy,  1850-55. 
là 98  Génie. 
136-140  Génie;  M.-Carthy,  1853. 
68-77  État-Major;  Mares. 


y  Google 


HYPSOMETRIE   ALGERIENNE'. 


77 


Localités. 

Altitude          Observateurs. 

en 

mètres. 

Ouargîa. 

105-141  État-Major;  Mares. 

R'ardâïa. 

530  Marèa  ;  Duveyrier. 

Saȕda. 

890  Mac-Carthy,  1855. 

Saint-Denis  du  Sig. 

70  Mac-Carthy,  1855. 

Sebdou. 

958  Mac-Carthy,  1849. 

Setif. 

1085  État-Major. 

Sidi-Bel-Abbès. 

490  Mac-Carthy,  1849;  Et.- \ 

Sïdi-Bel-A'sel. 

44  Génie. 

Souk-Harras. 

680  Génie. 

Tebessa. 

1088  Mac-Carthy,  1849. 

Tenès  (partie  N.  E.  du  plateau). 

47  Mac-Carthy,  1855. 

Teniet-el-fl'âd, 

1161  État-Major. 

Tîharet. 

1083  Génie. 

Tiemcên  (place  du  Mechouar). 

816  Mac-Carthy,  1849-51. 

Tougourt. 

52  État-Major;  Mares. 

Zamora  (prov.  d'Oran). 

244  Génie. 

POINTS  CULMINANTS 

Le  Chellîia.          Massif  de  l'Aou- 

rès. 

2320  Élat-Major. 

Le  Lalla-Chre-  Massif  de  Djeur- 

dîdja.                   djeura. 

2308  État-Major. 

Le  Tamgout.       Massif  du  Djeur- 

djeura. 
Le  Djebel-K'sel.  Massif  s'ah'arien. 
LeDjebel-Touîlet. 
Mâk*na.  Djebel- A'-mour. 

L'Ouancherîch.    Massif  de  TOuan- 

cherîcb. 
Les  deux  Babor's. Massif  set'ifien. 
Le  l'oumzaït.       Massif    Tlemcê  - 

nien. 
Le  Dîra,  Massif  d*Aumale. 

Le  Guergour.      Masàif  set'ifien. 
Le  Djebel- Mou- 

zaïa.  Massif  algérien. 

Le   Zak'k'ar    de 

rOuest.  Massif  algérien. 

Le  Guern-el-Bou- 

K'ahîl.  Massif  s'ah'arien. 

Le    Seurdj  -  el  - 

A'ouda.  Massif  africain. 

Le  Djebel-Filaou- 

sen^  Massif  des  Trara, 


2066  État-Major. 
2010  Mac-Carthy,  1855. 

2000  Mac-Carthy,  1855. 

1991  État-Major. 
1965-70  État-Major. 

1834  Ét.-M.,  Mac-Carthy,  1850. 
1810  Êtat-Major. 
1800  État-Major. 

1608  État-Major. 

1580  État-Major. 

1370  P.  Mares. 

1370  État-Major. 

114.5  Mac-Carthy,  1850 


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78  '  '      AFRIQUE.  (n°^  58-70.) 

Localités.  Altitude  Observateurs, 

en 
mètres. 
LeTessèla,  Massif  du  Tesbêla.        1022  Génie;  Mac-Carthy,  1849. 

Le  Djebel-Éiliour'.  Massif  nuffiidien.        1004  Ét.-M.;  Mac-Carthy,  1S40. 
Le  T'âdjra  (Mon- 
tagne-Carrée). Passif  des  T*râra.  864  Génie. 
Le  Djebel -boû- 
ZarrlJa.             Massif  à'Àîger.             402  État-Major. 


XI 


ttJNISlE. 

à8.  Daux.  Voyages  et  recherches  en  Tunisie,  le  ïour  âii  Éondey 
n-  590,  avril  1872,  p.  257-272. 

T\i.  Daux,  que  l'Empereur  avait  chargé,  en  1868,  d'étudier  à  fond  les 
sites  d'Utiqueet  de  Carthage,  a  publié  il  y  a  trois  ans/danns  un  volume 
epéiïlal,  le  résultat  de  ses  recherches  et  de  ses  fouilles  (voir  Je  vo- 
lume précédent  de  V Année,  p.  282,  n«  46*0).  Nous  signalerons  partibù- 
lièremeiit,  dans  le  pTé^ent  article,  la  vue  du  site  d'Utique  dans  son  état 
actuel,  la  belle  planche  où  l'habile  arehitecte^rchéologue  adesshléàvol 
d'oiseau  une  restitution  hypothétique  de  la  ville  ancienne,  et  la  repro- 
duction photographique  de  plusieurs  pierres  tumulaires  puniques  et  li- 
byques.  » 

59»  Carte  dés  côtes  de  Sicile  et  de  la  régence  àe  Ternis.  Parfo,  1872. 
(Public,  du  Dépôt  de  la  marine,  n"  2946.) 


XII 


60,  D""  !^ACHTiGAL.  Beschreibung  von  Wara,  der  Hîiuptsia<H  von 
Wadaiï.  Zeitschr.  det  Gesellsch.  (ûr  Erdkunde  su  Berlin  y  B.  Vil, 
Gtes  Heft  (n«  36),  1871,  p.  526-540  (avecle  plan  du  Varâ). 

Notice  historique  et  descriptive.  Sur  rorigiûe  de  ces  informations, 
voir  uotre  précédent  volume,  p.  211  et  212. 

61 .  W»  Zenker.  Ueber  das  Depressionsgebiet  der  libyschen  Wûs*te, 
und  den  Flussohne  Wasser(Bahr-Belà-Mâ).i6td.,  n"  39  (t.  Vil, 
3*  cah.),  p.  209-223. 

V&lr  notre  -précédent  voiume,  p,  282,  n«  455. 


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ÉGYPTEk  79 


xin 


EGYPTE. 

i*iSTHME  ET  Lfi  CANAL  tJfe  SUEZ. 

62.  W.  G.  Stanley.  A  new  Sea  and  an  old  Land.  Being  papers  sug- 
gfested  hy  a  visit  lo  Egypt  at  ihe  end  of  1869.  Lond.,  WÏ,  in-8% 
820  ç.  10sft.  1/^  (Mackie^. 

63.  A.  Mariette  Bey.  Monuments  divers  recueillis  ènïTgypte  et  en 
Nubie  'j  publié  sous  les  auspices  de  S.  A,.  Ismaïl  Pacha,  khédive 
d'Êgyï)tè.  Paris j  1871  et  suiv.,  în-îolio  (Fraocfc). 

Ouvrage  publié  par  livraisons  de  4  à  5  pi.,  avec  texte.  Cîrïique  li- 
vraison, 6  fr.  On  annonce  environ  èO  ïivraiâofts. 

64.  Mahmoud  Bey.  Mémoire  sur  l'ancienne  Alexandrie  et  son  terri- 
toire. Le  Cairty  187Ô,  in-S". 

Extrait  du  Bulletin  de  VInstitut  d^Égypte  (voir  le  pi*écédeot  volume 
âe  VAnnée  Géogra^Mque,  p.  268,  n»  447).  L'auteur  est  un  astronome 
distingué.  «  Mahmoud  Bey,  à  dit  M.  de  Sl^ne  en  présentant  l'ouvrage 
à  TAcadémie  des  inscripiions,  â'èist  livré  à  des  recherches  longues  et 
persévérantes;  tl  a  opéré  des  fouilles  en  nombre  de  points  sur  rempla- 
cement de  la  cité  disparue;  il  a  relevé  avec  un  grand  soin  les  diffé- 
rents niveaux  du  sol  ancien.  Grâce  à  ces  études  sur  le  terrain  et  à  sa 
connaissance  approfondie  des  témoignages  de  l'antiquité  relatifs  à  l'obéi 
Jet  qnl-l  fee  pro-possît,  Mahmoud  Bey  es^  parvenu  à  fixerr  avec  la  der- 
nière précision  les  limites  de  l'enceinte,  la  direction  des  rues,  l'empla- 
cement dés  ports,  canaux,  ponts,  temples  et  palais. 

«  En  tnesurftnt  les  pyramides  par  des  procédés  scientifiques,  ajoute 
M.  de  Slafte,  et  comparant  ces  résultats  à  ceux  énoncés  par  Pline, 
MfthfibO'ud  Bey  a  pu  donner  &a,  pied  romain  sa  valeur  exacte,  qui  est  de 
«  m,  3959-;  cinq  pieds  font  un  pas  (1  m.  479&)  ;  cent  pas  font  on  stade. 
Le  9tadÀ  Tonrain  équivaut  «n  conséquence  à  -147  m.  &5,  et  le  mille  à 
14T9  m.  59.  C/est  -là,  comme  on  voit,  tin  système  déctmirt.  Le  stade 
greo,  suivant  l'auteur  (celui  du  moins  anqu«l  Philon  et  Josèsphe  font 
îfllusion),  est  de  t65  mètres.  Deux  certes -^«nS  résument  et  rendent 
plus  sensibles  les  découvertes  intéressantes  de  Mahmoud  Bey. 

65.  E.  de  Régny.  Statistique  de  l'Egypte,  d'après  des  documents  of- 
ficiels. Alexandrie,  1872,  in-S-  (3«  année), 

66.  Iabrodsse,  ingénîeôr  hydrographe.  Étude  sur  les  embouchures 
du  Nil  et  suî  tes  changemeàits  qtii  s'y  sont  «produits  dans  les 
derniers  siècles;  d'après  une  reconnaissance  hydrographique 
exécutée  en  1860.  Jnnales  hydrographiques ,  1871,  2'  se- 
mestre, p.  282-309. 

Cette  ëtode  «e  coffi|>lète  «par  bu  adrcëau  'inr  Tort'Saîd,  tiatë   du 


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80  AFRIQUE.  (n°'  58-70.) 

1"  mai  I87f,p.  309-313,  et  d'un  rapport  au  Comité  hydrographique 
sur  le  Mémoire  de  M.  Labrousse,  p.  314-321 .  Elle  est  accompagnée  de 
9  cartes  ou  plans  :  1.  Carte  de  la  Basse-Egypte  ;  2.  3.  4.  Plans  de  la 
Bouche  de  Rosette  en  1860,  1799-1800,  en  1687;  5.  6.  Bouche  de  Da- 
miette  en  1860,  en  1799-1800;  7.  Bouche  de  Dibeh  en  1798-1800,  et  en 
1862;  8.  Plan  des  ruines  de  Péluse;  9.  Port-Saïd. 

Pj7.  Bulletin  de  l'institut  égyptien.  Années  1869-1871,  n»  XI. 
Alexandrie^  imprimerie  française  Mourès  et  Cie,  1872,  in-8% 
144  pages. 

Il  n'y  a  guère  de  notable  dans  ce  fascicule  que  la  communication  de 
M.  Mariette  sur  ses  fouilles  déjà  anciennes  sur  le  site  de  San,  l'ancienne 
Tanis^  dans  la  Basse-Egypte,  et  la  découverte  qu'il  y  a  faite  de  statues 
de  l'époque  des  rois  Pasteurs,  dont  ce  lieu,  identifié  avec  Avaris,  était 
la  capitale. 

(iS.  Guido  CORA.  Da  Brindisi  a  Sefer;  sguardo  fisico,  politico,  ethno- 
grafico,  storico,  economico,  sulla  linea  di  navigazione  da  Brin- 
disi a  Suez,  attraverso  il  Canala  di  Suez.  Casale.  1870,  in-8', 
x-169  pages. 

De  Brindisi  à  Suez,  à  travers  la  Méditerranée  et  le  Canal,  l'auteur  a 
recueilli  d'instructives  et  substantielles  notices  sur  tous  les  lieux  vus 
ou  touchés. 

fi^ï.  G.  Revilliod.  De  Genève  à  Suez.  Lettres  écrites  d'Orient. 
Genève,  1870,  in-8%  342  p.  (Fick).  7  fr.  50. 

70.  G.  Rayet.  Recherches  sur  le  climat  de  l'isthme  de  Suez.  An- 
nuaire de  la  Soc.  Météorologique  de  France  j  1869  (Paris,  juio 
1872),  p.   118-144. 

M.  Rayet  résume  ainsi  le  résultat  des  recherches  exposées  dans  son 
mémoire  ; 

«  Deux  faits  sont  particulièrement  remarquables.  D'abord  la  prédo- 
minance bien  marquée  des  vents  de  la  région  N.  Ces  vents  sont  pres- 
que les  seuls  qui  soufflent  pendant  la  période  estivale;  ils  sont  accom- 
pagnés d'une  sérénité  constanie.du  ciel, dont  le  bleu  implacable  n'est 
bien  souvent  troublé  par  aucun  nuage.  Les  rayons  perpendiculaires  da 
soleil  ont  alors  toute  leur  action,  et  la  terapératiure  s'élève  à  l'ombre 
jusqu'à  41°.  Mais  —  c'est  ici  le  second  fait  qui  nous  parait  important- 
la  faible  humidité  de  l'air  rend  cette  extrême  chaleur  facilement  sup- 
portable pour  l'organisme,  que  retrempe  la  fraîcheur  des  nuits.  » 


Sur  les  changements  qu'éprouve  la  côte  du  Delta. 

M,  le  vîce-amiral  Jurien  de  la  Gravière,  en  présentant 
h  rAcadémie  des  sciences  le  mémoire  de  M.  Labrousse 
pur  les  embouchures  du  Nil  (ci-dessus,  n°  66),  en  a  donné 
Taperçu  suivant  : 

Le  mémoire  de  M.  Labrousse  sur  Les  embouchures  du  Nil 


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CÔTE   DU    DELTA.  81 

a  pour  objet  de  préciser  les  changements  qui  s'y  sont  produits, 
en  remontant  aussi  loin  que  le  permettent  les  docum  mts  au- 
thentiques que  Ton  possède  sur  cette  partie  de  la  côte,  et  en 
comparant  les  plans  conservés  dans  les  archives  du  Dépôt  de 
la  marine  aux  reconnaissances  récemment  opérées  sur  la  de- 
mande du  gouvernement  égyptien  et  de  la  Compagnie  du  canal 
de  Suez. 

En  ce  qui  concerne  la  bouche  de  Damiette,  M.  Labrousse  a 
pu  constater  que  pendant  les  deux  cents  dernières  années, 
après  des  alternatives  d'atterrissement  et  d'érosion,  la  pointe 
principale  de  l'embouchure  s'était  avancée  en  moyenne  de 
3  mètres  environ  par  an.  A  l'embouchure  de  Rosette,  l'avance- 
ment, pendant  la  même  période,  parait  avoir  été  beaucoup  plus 
considérable.  De  1687  à  1800,  il  aurait  été  en  moyenne  de 
10  mètres  par  an,  et  se  serait  élevé  à  plus  de  35  mètres  dans 
les  soixante  années  qui  ont  suivi.  Cette  progression  rapide 
est  attribuée  par  M.  Labrousse  à  la  position  de  l'embouchure 
sur  la  côte,  et  au  remous  du  courant  du  littoral  formé  par  la 
pointe  d'Aboukir. 

Parmi  les  modifications  que  subit  actuellement  la  côte,  il 
faut  encore  citer  les  érosions  des  parties  saillantes  du  littoral, 
telles  que  le  cap  Burlos  et  le  Lido,  à  l'est  de  Port-Saïd,  tandis 
que  le  fond  des  baies  de  Pelouse  et  de  Dibeh  s'est  un  peu  en- 
sablé. Sur  cette  côte,  l'action  incessante  de  la  vague  prédomi- 
nante de  l'Ouest  tend  à  faire  disparaître  les  inégalités  du  ri- 
vage plus  encore  qu'à  combler  les  golfes. 

La  création  du  canal  de  Suez  et  du  port  par  lequel  il  débou- 
che dans  la  Méditerranée,  l'importance  du  mouvement  mari- 
time qui  s'effectue  déjà  par  cette  voie,  sont  venues  donner  un 
caractère  d'actualité  et  d'intérêt  pratique  à  une  question  qui 
était  restée  jusqu'ici  dans  le  domaine  purement  historique  et 
géographique  :  la  question  des  atterrissements  le  long  de  la 
côte  de  la  Basse-Egypte.  Il  est  devenu  urgent  de  rechercher 
l'origine  et  la  marche  de  ces  atterrissements,  afin  de  se  rendre 
compte  des  effets  qu'ils  pourront  produire  sur  le  nouvel  établis- 
sement de  Port-Saïd. 


Avant  de  nous  éloigner  de  TAfrique,  enregistrons  quel- 
ques travaux  qui  touchent  à  la  linguistique  générale  et  à 
Thistoire  géographique  du  continent  africain* 

l'aknéb  géogr.  xi«  6 

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r 


2  AFRIQUE.  (n""  71-72.] 

71 .  w.  F'EfiniFA.  Délia  lingue  africane.  Brève  saggio  d'idiomografia, 
a  cul  fanao  seguito  copiose  iUustrazioDÎ,  ed  un  Glossario  com- 
parata  în  circa  trenla  lingue.  Jfilano,  1871,  in-16,  80  pages 
(Clveïli). 

!l.  B.  Baf^te.  Sur  les  expéditions  scientifiques  en  Afrique.  Bulletin 
de  la  Sqc.  de  Géographie  de  Paris,  juillet  1872,  p.  133- U9. 

Artl<?.le  posthume,  annoté  par  M.  Henri  Duveyrier,  sur  la  meilleure 
ci/uiuUe  à  tenir  par  les  Européens  dans  les  expéditions  en  Afriquç. 


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SYaiE*  83 


ASIE 


VAm  a  été  l'objet,  dans  Taimé^  qui  yient  de  s'écoulpr, 
de  travaux  et  de  publications  aussi  uombrouz  qu'importants. 
Ba  risihme  de  Suez,  où  notre  voyage  au  pourtour  de  TAfri- 
<|ue  nous  a  conduits,  nous  nous  trouvons  naturellement 
portés  au  seiûi  de  la  presqu'île  Sinaï|;ique  et  de  la  Pales- 
tû^et  V^i  A'Qilt  p9S  été  les  moins  largement  partagées  dans 
cel  «Bseaibli  d'eiplorationa  et  de  reGheiehee  d'érudition. 


I 

SYRIE.  '^ 

PALESTINE  BT  SINAl. 

73.  Voyag«  d*ex]»ldTCitioB  à  la  mer  Morte,  à  Peira  et  sur  la  rive 
gauche  du  Jourdain^  par  M.  le  duc  db  Lutnes^  membre  de 
l'Institut.  Ouvrage  posthume,  publié  par  ses  petits-fils,  sous  la 
direction  de  M.  le  comte  de  VogUé,  membre  de  l'Institut.  Paris, 
1871-72,  in.4«,  pi.  (1«  et  2»  livr.). 

Chaque  livraison  composée  de  5  plaBcfaes,  6  Ir.  On  aonoaca  20  oa 
30  livraisoQS.  Le  texte  formera  k  volumes  in-fto. 

74.  V.  GuÉBiN.  Rapports  sur  une  mission  en  Palestine.  Archives  des 
Missions  scientifiques,  t.  VII,  1872,  p.  381430. 

Trois  rapports  adressés  an  Ministre  de  l'instraction  publique  ;  ils 
sont  datés  da  19  mai  et  du  l*' juillet  1870,  et  du  15  juin  1871.  Simples 
résumés  dltinéraires,  sans  discussions  ni  développements. 

7b,  p.  Lknoib.  Le  Fayoum,  le  Sina!  et  Petra;  expédition  dans  la 
lloyenne  Egypte  et  i'A.rabie  Pétrée,  sous  la  direction  de  J.  L. 
Oétém9,  FariSj  t8T2|  ia49i  fig*  4  fr« 


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tk  ASIE.  (N*^'  73-84.) 

76.  Rich.  F.  BuBTONand  Ch.F.  TyrwhittvDrake.  UnexploredSyria: 
Visit  to  the  Libanus,  the  Tuial  es-Safâ,  ihe  Anti-Libanus,  the 
iiorthern  Libanus  and  the  *Alâh.  Lond.,  1872,  2  vol.  iii-8*,  Map. 
(Tinsley). 

Sans  être  précisément  inexplorées,  les  parties  de  la  région  syrienne 
parcourues  par  MM.  Burton  et  Drake  sont  au  nombre  des  moins  fré- 
quemment visitées,  et  les  investigations  des  deux  voyageurs,  qu^  se 
partagent  entre  la  géographie  et  l'archéologie,  sont  souvent  d'un  réel 
intérêt.  Même  dans  ses  courses  sans  trêve  où  le  pousse  son  incessant 
besoin  de  locomotion  à  travers  les  deux  mondes,  le  coup  d*œil  rapide 
fit  le  vaste  savoir  de  M.  Burton  donnent  presque  toujours  à  ses  récits 
une  portée  sérieuse,  avec  un  caractère  bien  supérieur  au  commun  des 
touristes. 

77*  Rich.  F.  Burton.  TheMoabite  Stone.  Àthenaeum,  n"»  2320,  2321, 
avril  1872,  p.  464,  498. 

Sur  la  découverte  à  laquelle  se  rapporte  ce  mémoire,  voir  le  précé- 
dci&t  volume  de  V Année,  p.  8  et  13. 

7ti.  Palestine  exploration  fund.  Quarterly  statement.  New  séries  (2' 
iiiinée),  1872,  in-8*  avec  cartes  et  planches.  London. 

Cette  publication  trimestrielle,  consacrée  aux  travaux  de  la  Commis- 
sion anglaise  d'étude  de  la  Palestine,  bien  que  principalement  occupée 
ptir  des  documents  plutôt  narratifs  que  scientifiques,  contient  fréquem- 
ment aussi  des  morceaux  d'un  plus  sérieux  intérêt.  Il  suffit  d'en  rele- 
vtr  les  titres  principaux. 

Letters  on  the  survey,  from  MM.  G.  Grove,  capt.  Rich.  Burton, 
Tyrwhilt- Drake,  capt.  Stewart,  lieut.  Conder  (dans  chacun  des 
cahiers). 

Kemarks  on  the  climate  of  Jérusalem,  from  observations  mada  by 
D'  Th.  C/iflp/m  (janvier). 

Capt.  Wiison,  Récent  discoveries  at  Jérusalem  (avril). 

Expédition  lo  the  east  of  Jordan,  by  the  Rev.  E.  Northey  Çibid.). 

Liste  of  names  east  of  Jordan  (avec  la  transcription  arabe);  juillet. 

1  he  country  round  Samaria  (octobre). 

Notices  of  Palestine  in  the  cuneiform  inscriptions  (t^id.). 

The  Hamath  inscriptions  {ioid.), 

"y»  ùur  Work  in  Palestine;  being  a  complète  account  of  the  ope- 
HLtions  of  the  Palestina  Exploration  fund,  issued  by  the  Com- 
Liiittee  of  the  Society.  Lond.,  1872,  in-8%  320  pages,  with  maps 
iiiid  numerous  illustrations;  3  sh.  6  d.  (Bentley). 

W-  ^V.  Besant;  and  E.  H.  Palmer.  Jérusalem  :  the  city  of  Herod 
;iad  Saladin.  Lond.,  1872,  in-8",  7  sh.  6  d.  (Bentley). 

tll.  Ch.  Clermont-Ganneau.  La  stèle  de  Dhibân,  ou  stèle  de  Mesa, 
rtÀ  de  Moab,  890  ans  av.  J.  C.  Lettres  à  M.  le  comte  de  Vogué. 
l'aris,  1870,  in-4°,  GO  pages,  pi.  et  carte. 

Nous  avons  déjà  entretenu  les  lecteurs  de  VAnnée  de  cet  important 
monument.  (V.  notre  précédent  volume,  p.  13.)  Il  ne  nous  paraît  ce- 
pendant pas  inutile  de  reproduire  quelques  passages  d'une  note  analy- 
tique insérée  au  Journal  des  Savants  (juillet  1872)i  où  certaiiis  faits 


i 


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PALESTINE.  85 

et  certaines  questions  sont  nettement  précisés.  Il  résulte  du  travail  de 
M.  Ganneau  que  le  Mesa  de  l'inscription,  qui  y  célèbre  ses  victoires 
sur  les  Israélites,  est  identique  avec  le  Mesa  de  la  Bible  contemporain 
d'Achab,  de  Joram  et  de  Josaphat,  et  que  les  événements  qui  y  sont  re- 
latés s'accordent  parfaitement  avec  ceux  du  texte  sacré.  Ils  ont  trait 
aux  luttes  dont  fut  le  théâtre  le  territoire  anciennement  possédé  par 
les  Moabites  au  nord  du  fleuve  Arnon,  où  s'étaient  établies  les  tribus 
de  Ruben  et  de  Gad.  L'importance  de  la  stèle  de  Dhîbàn,  au  point  de 
vue  paléographique  et  linguistique,  ne  le  cède  pas  à  sa  valeur  histori-- 
que.  En  effet,  grâce  à  elle,  nous  possédons  maintenant  un  spécimen 
de  l'alphabet  phénicien,  ou  plutôt  chananéen,  d'un  âge  exactement  dé- 
terminé, et  qui  peut  servir  de  point  de  repère  dans  l'échelle  chronolo- 
gique de  la  paléographie  sémitique  alphabétique.  La  langue  de  ce 
curieux  monument  peut-être  considérée  comme  de  l'hébreu  véritable 
inclinant  légèrement  vers  les  dialectes  arabes  et  araméens.  Il  apporte 
en  outre  un  nouveau  témoignage  de  la  diffusion  générale  de  l'alphabet 
phénicien  chez  les  peuples  du  bassin  de  la  Méditerranée,  et  même  de 
sa  pénétration  a  une  assez  grande  profondeur  à  l'intérieur.  Un  autre 
fait  extrêmement  intéressant  qui  nous  est  révélé  par  cette  inscription, 
c'est  que  la  division  des  mots  et  la  séparation  des  phrases  par  des 
signes  de  ponctuation  étaient  pratiquées  dès  la  plus  haute  anti- 
quité.... • 

Nous  avons  noté  ci-dessus,  n*»  77,  le  mémoire  de  M.  Richard  Burton 
sur  ce  sujet. 

82.  Du  même  :  Résultats  topographiques  et  archéologiques  des 
fouilles  entreprises  à  Jérusalem  par  le  Palestine  Exploration 
fund.  Journ.  Asiat.j  août-sept.  1872,  p.  145-156. 

83.  Ordnance  survey  of  the  Peninsula  of  Sinai,  made  by  capts.  C. 
W.  WiLSON  and  H.  S.  Palmer,  Roy.  Engineers,  under  the  di- 
rection of  col.  sir  Henri  James,  R.  E.,  director-general  of  the 
Ordnance  Survey.  Lond.,  1869-72,5  vol.  gr.  in-S^CSouthampton), 

Les  trois  premiers  volumes  de  ce  grand  et  bel  ouvrage,  comprenant 
les  vues  photographiées  de  tous  les  sites  notables  de  la  Péninsule,  ont 
paru  il  y  a  près  de  trois  ans.  Les  tomes  IV  et  V,  qui  paraissent  actuel- 
lement, comprennent  les  cartes,  les  planches  et  le  texte. 

Cette  belle  publication  se  complète  par  la  relation  de  M.  E.  H.  Pal- 
mer,  frère  de  l'ingénieur,  publiée  l'an  dernier,  et  que  notre  précédent 
volume  deV  Année  Géographique  a  mentionnée  (p.  7,  n»  15).       , 

84.  Th.  NOELDEKE.  Die  Namen  derAraraàischen  Nation  und  Sprache. 
Zeitschr.  der  Deutschen  Morgenlând,  Gesellschaftj  t.  XXV,  cah. 
1-2,  letpjï.,  1871,  p.  113-131. 


S  !«'•  Les  travaux  de  la  Commission  anglaise  de  la  Palestine. 
Géodésie.  Archéologie. 

L*extraît  suivant  des  instructions  données  à  la  Commis- 
sion organisée  à  Londres  pour  Texploration  de  la  Palestine, 
en  fera  bien  connaître  Tesprit  et  le  hut  : 

lo  Lever  une  carte  du  pays,  sur  laquelle  seront  exactement 

uiyiiizeu  uy  >^jv^v^^iC 


66  ASIE.  (N"  73-84.) 

indiqués,  outre  la  coflfiguratioti  topogràphîqtté,  1%  site  de 
toutes  les  villes  et  villages,  les  tliiûes,  les  foutes,  etc.; 

3"  Recueillir,  autant  que  possible,  les  noms  en  usage  parmi 
les  indigènes-,  aidsi  que  les  traditions  qui  se  f atta(ihent  à  cha- 
qufl  placé; 

3"^  Essayer  de  faire  des  fouilles  partout  où  il  sera  néces- 
saire; 

4^  lastituer  utie  série  d'ôbsôrVâtiônà  météorologiques; 

5*^  Recueillir  autant  de  notes  qu'il  sera  possible  sur  la  géolo- 
gie du  paysj  sur  la  botanique,  la  Hoologie^  eto.; 

6°  Ne  laisser  éôhâppelr  âuisuhe  occasion  de  fîtîrô  à  Jérusalem 
des  exCaValiôns  propres  à  conduire  à  des  résultais  déci- 
sifs; 

7"  ExamiflBf  tbus  ieU  sites  archéologiques  que  le  pays  ren- 
ferme, en  levët"  dès  t)làtis  et  en  faire  dies  deSsinë. 


Oii  ne  peut  pas  dite  qu'il  y  ait  en  tout  ceci  rièû  d'absolu- 
ment neuf;  tous  les  explorateurs  savants  qui  ont  parcouru 
la  Palestine  depuis  la  fin  du  dernier  siècle  se  sont  attachés 
aux  objets  signalés  iti  k  ^attention  deâ  commissaifeis,  et  il 
esdste  déjà  sui»  la  Tferrô  Sainte  une  masse  de  tîâvâujc  d'une 
haute  valeur.  Outre  Texpéditioa  française  de  1798)  qui  fut 
roccasiGtl  d'iiti  levé  militaire  de  la  Palestine  snoB  la  direc- 
tion du  bôlônél  J^âcbtiti ,  et  ^ui  ddnha  là  pt*emièfe  carte  à 
peu  près  •xacte  qu'on  en  ait  eue,  les  ingénieurB  français, 
profitant  plus  récemment,  fen  l8éD,  d'utiô  ôôCui^rencô  politi- 
que, ont  aussi  rapporté,  comme  nous  h  diroûs  tout  à 
l'heure,  des  levés  géodésiques  qui  ont  été  complétés  en 
1869,  et  dont  on  attend  la  publication.  On  sonnait  les  ad- 
mirables résultats  déposés,  il  y  i  tretiti5-deux  aôs,  par 
Edward  Robin  son  dans  ses  Biblical  Researches ,  à  la  suite 
d'une  longue  exploration  topogra^hique  et  arohéblogique 
dans  laquelle  le  savant  américain  s'était  attaché,  conmie 
le  recommandent  les  instk'uôtiohâ  du  Comité  de  Ldtidre^  à 
recQo&altre  tous  les  anciens  sites  et  à  relever  les  noms  lo<^ 
eaux  usités  par  les  habitants.  Beaucoup  d'autrea  èprte  lui 
eat  Êuivi  la  même  voie  ^  et  ont  enrichi  de  beaucoup  de  dé- 


LA  COMMISSION  ANGLAISE    DE  PALESTINE.  87 

tails  nouveaux  la  carte  ancienne  et  actuelle.  II  suffît  de  rap- 
peler les  nomô  de  M.  de  Saulcy,  de  Victor  Guérin  et  du 
duc  de  Luynes,  sans  oublier  les  travaux  antérieurs  de  Gal- 
lier  et  du  comte  de  Bertou.  Un  ingénieur  néerlandais, 
M.  Van  de  Velde,  a  consacré  plusieurs  années  à  sillonner 
le  même  champ  en  archéologue  et  en  topographe,  et  la  belle 
carte  qu'il  a  publiée  de  toute  la  Palestine,  appuyée  d'un  am- 
ple mémoire  analytique,  sans  avoir  la  précision  rigoureuse 
que  peut  donner  un  véritable  levé  géodésique,  n'en  est  pas 
moins,  à  tous  les  points  de  vue,  un  travail  des  plus  remar- 
quables. La  nouvelle  Commission  anglaise  n'a  donc  pas, 
tant  s^en  fayt,  à  construire  de  toutes  pièces  un  édifice  dont 
les  matériaux  sont  déjà  pour  la  plupart  élaborés  :  sa  lâche 
—  et  je  me  hâte  d'ajouter  qu'elle  est  encore  assez  grande 
et  assez  belle  —  est  de  contrôler ,  de  coordonner,  de  com- 
pléter Ce  qui  a  été  fait  avant  elle;  elle  est  surtout  de  lever, 
par  des  procédés  rigoureusement  scientifiques,  une  carte 
complète  de  la  Terre  Sainte  qui  ne  le  cède  pas  aux  plus 
belles  œuvres  géodésiques  de  l'Europe.  La  Commission,  je 
m'empresse  de  le  dire,  a  compris  ainsi  sa  tâche,  et  elle  pro- 
clame bien  haut  qu'une  telle  carte  est  en  première  ligne 
parmi  lés  travaux  qui  lui  sont  prescrits. 

Elle  s'est  mise  à  l'œuvre  dans  les  derniers  mois  de  1870, 
et  le  travail  a  marché  depuis  lors  sans  interruption,  La 
Commisfiûon  a  commencé  ses  opérations  par  le  sud-ouest, 
pour  les  porter  à  lest  et  au  nord.  Si  rien  n'en  vient  entra- 
ver la  suite,  on  peut  compter  que  le  levé  proprement  dit 
sera  terminé  en  1873,  et  que  les  minutes,  transmise^  en 
Angleterre,  pourront  être  immédiatement  réduites  à  une 
échelle  convenable  pour  la  gravure.  La  Commission  an- 
glaise ne  doit  pousser  ses  opérations  que  jusqu'à  la  mer 
Morte  et  au  Jourdain,  la  Syrie  Transjordanienne ,  déjà 
étudiée  par  de  savants  explorateurs  et  par  un  ingénieur  al- 
lemandy  M.  Dôrgen,  ayant  été  laissée  à  une  commission 
américaine  qui  a  revendiqué  l'honneur  de  participer  au  tra- 

uigiiizeu  uy  "*^_«  v^  v^' pc  i n^ 


88  ^  ASIE.  (n»»  73-84.) 

vail  des  ingénieurs  anglais.  Les  mémorables  publications 
d'Edward  Bobinson  et  du  lieutenant  Lynch  donnent  aux 
Américains  du  Nord  un  titre  légitime  pour  avoir  part  k 
cette  grande  œuvre., 

S  2.  Une  excursion  archéologique  à  Test  de  la  mer  Morte. 

En  attendant  l'arrivée  de  la  Commission  américaine,  deux 
explorateurs  anglais,  le  R.  D'  Ginsburg  et  le  R.  G.  Tris- 
tram,  ont  fait  au  mois  de  février  1872  une  course  explora- 
trice à  l'est  de  la  mer  Morte,  dans  ce  qui  fut  autrefois  le 
pays  de  Moab.  Le  double  rapport  que  les  deux  explorateurs 
ont  fait  à  l'Association  britannique  réunie  à  Brighton  au 
mois  d'août  dernier,  est  plein  de  faits  du  plus  haut  intérêt. 
La  petite  caravane,  partie  de  Jérusalem  le  30  janvier  1672, 
contourna  le  sud  de  la  mer  Morte  par  le  Ghor  es-Safièh,  et 
gagna  Kérak,  l'ancienne  Kir  Moab ,  place  que  Seetzen  vi- 
sita le  premier  en  180Ç,  et  qui  depuis  a  été  bien  décrite 
par  Biirckhardt ,  Irby  et  Manglee,  et  de  Saulcy.  Les  mu- 
railles sont  d'une  grande  étendue  et  d'une  énorme  hauteur. 
Les  voyageurs  furent  retenus  ici  prisonniers  par  la  rapacité 
d'un  chef,  qui  ne  les  relâcha  qu'après  le  payement  d'une 
lourde  rançon.  Diverses  excursions  dans  le  pays  environ- 
nant ont  permis,  néanmoins,  de  reconnaître  un  assez  grand 
nombre  de  sites  ruinés.  A  Araïr  (Pancienne  Âroër)^  un 
message  apportant  de  Jérusalem  des  nouvelles  de  famille  de 
nature  affligeante,  obligea  M.  Ginsburg  de  revenir  sur  ses 
pas,  laissant  M.  Tristram  seul  pour  le  reste  du  voyage. 

Après  avoir  dépassé  Dhibân,  village  près  duquel  a  été 
trouvée  la  stèle  devenue  si  célèbre  sous  le  nom  de  pierre  de 
Mésâ*,  on  atteignit  une  localité  nommée  Oum  Rasas.  Le  lieu 
est  sur  la  route  militaire  de  l'Empire  romain,  et  doit  avoir 
été  une  des  cités  importantes  de  ces  plateaux  dans  les  pre- 
miers siècles  de  l'ère  chrétienne  ;  on  y  voit  les  restes  d'une 

1.  V.  ci-dessus,  p.  84,  n«81. 

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LE   PAYS   DE  MOAB.  89 

église  byzantine.  M.  Tristram  examina,  à  Test  d'Oum  Ra- 
sas, plusieurs  sites  qui  n'avaient  pas  encore  été  visités. 

L'un  de  ces  sites,  Khân  Zébib,  occnpe  évidemment  la 
place  d'une  grande  cité,  dont  les  débris  ont  servi  à  con- 
struire le  village  moderne  ;  un  temple  dorique  existe  en- 
core près  de  là,  du  côté  de  Test.  Le  chemin ,  à  partir 
d'Oum  Rasas,  se  porte  au  nord -on  est;  après  avoir  traversé 
le  Oaàdi  Thëmed,  M.  Tristram,  à  quelque  distance  vers  le 
nord,  visita  Zarafân,  où  il  existe  un  fort  en  grandes  pierres 
équarries  au  sommet  d'un  tell,  et  les  restes  de  la  ville  au 
pied  de  la  hauteur,  probablement  le  Naar  Safari  de  la  No- 
tice de  l'Empire.  Plus  loin  au  nord-est,  est  Oum-el-Ouéled, 
une  des  ruines  les  plus  importantes  delà  contrée.  On  y  dis- 
tingue trois  types  de  constructions,  le  pré-romain,  le  ro- 
main et  le  sarrasin.  Le  forum,  autrefois  entouré  de  colon- 
nes dont  les  dés  subsistent  encore  dans  le  sol,  est  entier;  il 
mesure  quarante  et  un  pas  sur  vingt-huit. 

De  là,  se  portant  à  Test,  le  voyageur  vit  Ziza^  lieu  men- 
tionné dans  la  Notice  comme  le  quartier  général  de  la  ca- 
valerie dalmatico-illyrienne.  L'ancien  site  est  parfaitement 
conservé;  plusieurs  hectares  sont  couverts  de  débris  sculp- 
tés. Des  travaux  hydraulicpies  fort  remarquables  avaient 
été  exécutés  dans  la  partie  supérieure  de  la  vallée  pour  te- 
nir approvisionné  le  grand  réservoir. 

Une  des  découvertes  les  plus  intéressantes  du  voyage  a 
été  faite  dans  ce  canton,  à  quelques  milles  vers  Test  de  Ziza, 
sur  les  confins  du  désert.  Là  se  voient  les  restes  d'un  palais 
magnifique ,  beaucoup  plus  parfait  qu'aucun  autre  monu- 
ment jusqu'ici  découvert  dans  le  pays  de  Moab.  Une  en- 
ceinte carrée  en  pierre?  de  taille  environne  un  palais  en 
briques;  ce  carré,  de  155  mètres  de  côté,  est  pourvu  de 
bastions  semi-circulaires,  —  De  chaque  côté  de  Tunique 
entrée  qui  existe  est  une  façade  sculptée,  longue  de  55  mè- 
tres et  haute  de  5  mètres.  Les  animaux,  les  oiseaux,  les 
fleurs,  les  fruits  et  les  hommes  sculptés  sont  l'œuvre  d'un 

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90  ASIE.  (n*»' 73-84.) 

ciseaa  habile  et  d'une  grande  délicatesse  de  touche  ;  le  tout 
est  dans  un  ïnerveilleux  état  de  consenration.  Lee  Toutes  de 
hi^ît  des  chambres  du  palais  existent  encore  ^  et  leur  plan 
aiïisi  que  les  détails  ont  conduit  M.  Ferguson  à  penser  que 
c'était  le  conquérant  perse  Ghosroês  qui  avait  fait  bâtir  oe 
palais.  —  Quoi  qu'il  en  soit ,  on  peut  fixer  la  date  de  œlte 
construction  à  environ  six  cents  ans  avant  Jésus*  Christ.  Le 
nom  que  lui  donnent  les  Arabes,  Oum  ChiUah^  ne  jette  au- 
cune clarté  sur  son  origine. 

M,  Tristram  a  fait  une  exploration  complète  de  la  vallée 
de  Uallirhoe ,  emplacement  des  bains  thermaux  où  Hérode 
le  Grand  chercha  la  guérisoii ,  et  qui  est  située  à  l'ouest  de 
la  route  des  pèlerins.  Cette  vallée  était  déjà  connue,  mais 
M.  Tristram  le  premier  est  parvenu  jusqu'à  Mtkaur,  que 
Bon  nom  moderne,  et  la  similitude  que  le  lieu  présente 
avec  la  description  donnée  par  Josèphe ,  font  certainémeot 
reconnaître  pour  l'ancien  Machaerus. 

M,  Tristram  ne  croit  pas  que  l'oû  ait  jusqu'à  présent 
suffisamment  signalé  la  grande  dissemblance  que  présen«> 
tent  les  deux  rives  de  la  mer  Morte ,  là  rive  occidentale  et 
la  rive  moabite.  On  sait  très-bien  que  la  première  n'est 
qu'un  désert  de  terrains  calcaires,  presque  entièrement  dé* 
nue  de  végétation.  La  rive  orientale,  au  contraire,  est  non- 
seulement  couverte  de  végétaux,  ce  qu'elle  doit  à  une  for* 
mation  géologique  différente  et  à  une  quantité  d'eau  rela- 
tive ment  abondante;  mais  encore,  à  son  extrémité  nord,Iel 
palmiers  acquièrent  une  magnifique  croissance  dans  les 
fentes  des  rochers,  surplombant  la  mer  et  poussant  au  loin 
dans  la  montagne. 

S  3.  Les  travaux  des  ingénieurs  français  en  Palestine. 

Nous  avons  déjà  rappelé  quelques-uns  des  travaux  topo* 
graphiques  de  nos  officiers  et  de  nos  voyageurs  dans  le  Li- 
ban at  la  Palestine.  Au  mois  de  mars  de  Cette  année  (16T2), 

uigmzeu  uy  -vj  v^  v>'^  i>^ 


LES  TRAVAUX  FRANÇAIS  EN  PALESTINE,  91 

M.  de  Saulcy  rappelait  à  rAcadémie  qu'en  1869  elle  de- 
manda au  mim«tre  de  la  guerre  TeaToi  en  Palestine  de 
deux  officiers  d'état-major  pour  dresser  la  carte  du  pays 
commencée  lors  de  respédidon  de  Syrie,  eh  1860. 
MM*  Derrien  et  MieUlet  furent  chargés  de  cette  mission, 
et  s'en  acquittèrent  avec  lèle.Ils  sont  revenus  avec  tous  les 
documents  nécessaires  pour  construire  la  carte.  Or,  il  serait 
grandement  désirable  que  ces  matériaux  fussent  mis  prompt 
tement  entre  les  mains  des  géographes.  Si  le  résultat  des 
études  de  MM.  Derrien  et  Mieulet  n'est  pas  publié  à  bref 
délai,  la  carte  de  la  Commission  anglaise  précédera  la  nd-^ 
tre^  et  nous  aurons  perdu  l'honneur  d'une  initiative  atquel 
nous  avons  droit.  M.  de  Saulcy  a  demandé  à  l'Académie 
d'exprimer  au  ministre  de  la  guerre  le  vœu  que  MM,  Der- 
rien et  Mieulet  soient  mis  en  mesure  de  drelser  sans  r«^ 
tard  la  carte  de  la  Palestine.  D'autres  menibres  s'associent 
à  la  proposition  de  M.  de  Saulcy,  qui  a  été  adoptée  par 
la  Compagnie  i 

Ce  vœu  6erâ-t«il  entendu?  C'est  une  autre  question. 
Ponir  des  publications  de  cette  nature,  l'inertie  du  dépat^ 
tement  de  la  guerre  est  traditionnelle.  Il  y  a  sept  ans, 
d'abondants  matériaux  envoyés  du  Mexique  pour  l'état 
blissement  d'une  carte  de  cette  grande  contrée,  passèrent 
par  les  mains  de  la  Commission  du  Mexique,  qui  devait 
îeâ  mettre  en  œuvre  :  c'était  un  des  principaux  objets  de 
sa  création,  et  sans  contredit  le  plus  important.  L'admi- 
nistration de  la  guêtre  réclama  l'emploi  de  ces  documents, 
6n  promettant  dé  construire  elle-même  cette  carte,  qui  se» 
rait  d'tm  grand  prix  pour  la  science»  La  Commission  fut 
ainfei  dépouillée,  et  les  matériaux  ont  été  s'enfouir  dans  lea 
cartons  d'où  ils  ne  sortiront  peut-être  pas  d'ici  à  un  demi«^ 
siècle*  Les  administrations  ont  Cela  de  Cômniun  avec  la 
dipldâiatie,  qu'elles  c^t  bort^ur  de  la  publicitéu 


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92  ASIE.  (n*»"  73-84.) 


S  4 .  Un  des  plus  anciens  sites  de  la  Palestine  retrouvé. 

M.  Clermont-Ganneau,  agent  consulaire  français  à  Jé- 
rusalem, dont  le  nom  a  récemment  conquis  une  grande 
notoriété  au  sein  du  monde  savant  par  sa  découverte  de 
l'inscription  de  Dhibân  et  par  ses  doctes  commentaires  sur 
cet  antique  monument,  a  aussi  enrichi  la  géographie  bi- 
blique d'une  découverte  dont  la  note  suivante,  qu'il  a  lue 
au  sein  de  l'Académie  des  inscriptions  (16  août  1872),  fait 
ressortir  l'importance. 

ce  La  ville  chananéenne  de  Gezer  est  une  des  plus  an- 
ciennes delà  Terre  Sainte,  puisqu'elle  est  antérieure  à  l'ar- 
rivée et  à  rétablissement  des  Israélites  dans  cette  contrée. 
Le  livre  de  Josué  la  range  parmi  les  villes  royales  du  Gha- 
naan.  Son  roi,  Horam,  fut  battu  par  Josué  au  moment  où 
il  se  portait  au  secours  de  Lakisch,  attaqué  par  les  enva- 
hisseurs hébreux.  Plus  tard,  après  la  conquête,  elle  fut 
comprise  dans  le  territoire  de  la  tribu  d'Éphraïm,  dont 
elle  marquait  l'extrême  limite  occidentale.  Les  Éphraïmi- 
tes  y  tolérèrent  la  population  chananéenne  qa'ils  y  avaient 
trouvée.  La  ville  fut  attribuée  aux  Lévites  de  la  famille  de 
Kehat.  fille  fut  prise  plusieurs  fois  dans  les  guerres  de 
David  contre  les  Philistins,  au  territoire  desquels  elle 
confinait.  Sous  le  règne  de  Salomon,  un  Pharaon  d'Egypte, 
pour  des  motifs  que  nous  ignorons,  entreprit  une  expédi- 
tion qui  se  termina  par  la  prise  et  l'incendie  de  Gezer. 
Elle  avait  une  tôUe  importance  stratégique,  que  même 
ruinée  on  lui  jugeait  encore  assez  de  valeur  pour  figurer 
dans  la  dot  de  la  fille  de  Pharaon,  devenue  femme  de  Sa- 
lomon. Le  roi  hébreu  fit  aussitôt  reconstruire  Gezer,  et 
Bethoren-la-Basse  dont  elle  était  voisine. 

ce  Gezer  reparaît  sous  le  nom  de  Gazara  au  temps  des 
guerres  entre  les  Macchabées  et  les  Séleucides;  prise  d'as- 
saut une  première  fois  par  les  Juifs,  elle  passa  successive- 

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GÉOGRAPHIE    BIBLIQUE.  93 

ment  aux  mains  des  deux  partis  qui  attachaient  à  sa  pos- 
session  une  égale  importance.  Jean  Hyrcan  en  fît  son  quar- 
tier général. 

«Malgré  les  indications  très -précises  contenues  dans  di- 
vers textes  sacrés  et  profanes,  malgré  les  renseignements 
fournis  par  YOnomasticon  d'Eusèbe,  qui  place  Gezer  à 
quatre  milles  romains  d'Emmaùs-Nicopolis,  localité  au- 
jourd'hui parfaitement  connue,  la  ville  de  Gezer,  en  vain 
cherchée,  n'avait  pu  jusqu'à  ce  jour  être  retrouvée.  C'est 
en  compulsant  une  vieille  chronique  arabe  d'un  cerlain 
Nudjir-ed-diuj  que  M.  Giermont-Ganneau  a  rencontré 
accidentellement  un  passage  qui  Ta  mis  sur  la.  voie  de  sa 
découTerte. 

«  L'historien  arabe  raconte  que  vers  Tan  900  de  l'Hé- 
gire, un  engagement  sanglant  eut  lieu  entre  Djanboulat, 
émir  de  Jérusalem,  et  un  parti  de  Bédouins  pillards,  entre 
le  village  de  Khulda  et  le  village  de  Tell-el-Gezer.  Ce 
dernier  nom  signifie  à  la  lettre  Colline  de  Gezer ^  et  le 
nom  arabe  est  la  reproduction  aussi  exacte  que  possible 
du  nom  hébreu. 

a  Gomme  le  village  de  Khulda  existe  encore,  et  que  d'a- 
près les  détails  contenus  dans  la  narration  très  précise  de 
Tauteur  arabe  Tell-el-Gezer  en  était  assez  rapprochée 
pour  que  les  cris  des  combattants  fussent  entendus  d'un 
point  à  un  autre,  cette  dernière  localité  paraissait  d'avance 
facile  à  déterminer.  Cependant,  aucun  village  de  ce  nom 
ne  figurait  sur  les  meilleures  cartes  de  la  Palestine. 

«  Après  avoir  déterminé  théoriquement  et  a  priori  l'en- 
droit exact  où  devait  se  trouver  le  Gezer  arabe  et  hébreu, 
M.  Ganneau  fit  une  excursion  sur  le  terrain,  afin  de  véri- 
fier l'exactitude  de  son  hypothèse.  Au  point  marqué  d'a- 
vance, il  retrouva  le  Tell-el-Gezer  de  Nudjir-ed-din  et  les 
ruines  d'une  grande  et  antique  cité  occupant  un  vaste  pla- 
teau. L'explorateur  reconnut  aussi  des  carrières  immenses 
qui  ont  fourni  les  matériaux  de  construction  pour  la  ville  ; 

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94  ASIE.  (n'»- 85-97.) 

d&g  puitEf  dsfl  restes  d^aquedues,  anfiii  une  quantité  eonfii- 
dérable  de  tombeaux  creusés  dans  le  roc.  U  est  vFaisem- 
hhhle  que  des  fouilles  exécutées  en  ce  lieu  donneraient 
d'importants  résultats.  L'identification  de  Gezer  intéresse 
la  topographie  générale  de  la  Palestine  ;  la  découverte  de 
sa  situation  doit  modifier  le  tracé  des  limites  des  tarritoires 
d'Éphraïm,  de  Dan  et  de  Juda. 

Je  06  puis  que  mentionner  la  communication  faite  par 
M.  Wetzstein  ï  la  Société  de  géographie  de  Berlin,  com^ 
municatian  dont  u^e  courte  analyse  est  insérée  au  journal 
de  la  Société  {ZeUsehrift,  n«  38,  1872,  p.  2051200). 


II 


ARAHIC. 

85.  13'  O.Blau.  Arabische  Sprachstudien.  Zeitschriftder  Dèutschen 
Morgerdmdischen  Gesellschafi,  t.  XXV,  4«  cah.,  p.  525-592. 

Travail  très-savant  et  d'une  application  presque  entièrement  géo* 
graphiqiïe,  mais  d'une  lecttire  singulièrepient  laboriemie.  Apràt  toat, 
c@ui  que  la  géographie  comparée  de  TAsie  sémitique  intéresse  n'ont 
pa»  à  regretter  leur  peine. 

a5.  D'  Àloys  Sprenûer.  On  the  campaign  of  ^lius  Gallus  in  Arabia. 

Mémoire  lu  au  mois  de  juin  au  sein  de  la  Société  royale  de  Littéra- 
ture dç  Londres  (la  Société  de  Littérature  répond  à  notre  Académie  des 
Inâcriptions). 

Nous  ne  connaissons  encore  de  ce  mémoire  qu*une  courte  analyse 
inaérée  dans  VAthenaeum  et  dont  voici  la  traduction  : 

Le  P'  Sprenger  montre  que  la  description  de  l'Arabie  dans  Strabon 
«gt  beaucoup  plus  obscure  et  plus  maigre  que  celle  qu'avait  donnée 
luha.  avant  la  campagne;  l'auteur  en  conclut  que  Strabon  eut  en  vue 
éc  j  a^tifier  Gallus,  qui  était  son  ami  personnel,  du  reproche  de  ne  pas 
avoir  fait  la  conquête  d'un  pays  si  peu  connu.  Le  D'  Sprenger  s'attache 
eTiiîuite  à  identifier  les  diverses  places  mentionnées  dans  la  description 
d€  Jnba  telle  que  Pline  la  rapporte,  et  dans  Strabon.  Parmi  ces  identi- 
Ëcationi,  la  plus  importante  est  celle  des  if moM  des  écrivains  grecs 
avec  les  Kindites  de  l'Arabie  et  des  historiens  byzantins.  Le  résultat 
dës  recherches  du  D'  Sprenger  est  que  l'armée  romaine  pénétra  es 
Arabie  jusqu'^  Badm^ni  et  que  }4  il  f«t  ramené  eu  arrière  p^r  \Sê 
tribus  que  les  Arabes  comprennent  sous  le  nom  de  Madgbij,  secoudées 
pttut-êire  par  iM  ifibus  hiflayftrMqofs  4'An^ 


V 


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ARABiP-  9$ 

lion»  |i,urQA8  k  revenir  (qqt  &  Theore  sur  <;(a«lquet-uQM  4e  ces  qi^es- 
tions  par  Timportante  relation  de  M.  Ualèvy. 

87.  F.  WtlSTENFELD,  Die  Strasse  von  Baçra  nach  Mekka,  mit  der 
Landschaft  Dharija^  nach  arabischen  Quelleil  bearbeitet.  Gœt- 
Wigefiy  1872j  in-4°,  43  pa^es  et  une  carte.  8  fr.  (Dieterlch). 

Extrait  des  Mémoires  de  la  Société  des  Sciences  de  Goettingue).  — 
Le  D*  Ferd.  Wûstenfeld,  à  qui  l'on  doit  déjà  de  nombreux  et  savants 
travaux  sur  TArabie  et  ses  populations*,  poursuit  dans  cê  nouveau  mé- 
moire  le  dépouillement  des  sources  arabes  sur  les  routes  de  caravanes 
qui  sillonnent  la  grande  péninsule.  Des  travaux  de  cette  nature  ont  une 
double  utilité,  bien  que  la  4ate  à  laquelle  ces  matériaux  remontent  ne 
laisse  à  beaucoup  d'indications  qu'une  valeur  historique  :  ils  appor- 
tent un  utile  complément  à  nos  informations  actuelles  sur  Tintérieur 
de  TArabie,  et  en  oatre  ils  servent  souvent  à  rectifier  la  nomenclature 
des  relations  européennes.  Après  tout,  les  choses  et  les  noms  ont  dans 
ces  contrées  de  l'Orient  une  fixité  et  une  durée  dont  la  mobilité 
de  l*Oeoident  permet  difficilement  de  se  former  une  juste  idée. 

88.  Heinr.  Freih.  v.  Maltzan.  Resultate  einer  im  Winter  1870-71 
unternommenen  Reise  în  dea  sftdwestlichsten  Theil  der  Ara- 
bischen Halbinsel.  Zeitschrift  4er  Ges^U$chafi  fur  Erdkunde 
zu  Berlin ,  VU  (n-  37),  1872,  p.  1-19. 

Voir  le  précédent  vpluine  de  YÂnnés  Oéographiqttfit  p«  19. 

*ri<-  Du  même  :  Die  Vôlker  SMarabiens  uod  die  Bewobner  von 
Adeii.  Ibid,,  YI  (n*  35),  1871,  p.  479-491. 

{19.  i)v  lodoiQ  :  GeographischQ  Forsohungen  in  Çiad^Arabiep.  Mit- 
Àeilungen  de  PertermanQ,  1872,  n^  5,  p.  168-174,  jivec  une 
carte  rédigée  sur  les  matériaux  rapportés  par  M.  de  Maltzan, 
et  une  Bote  analytique  de  M.  Haneœann  sur  cette  carte 
(p.  173-74). 

—  Du  même  :  Ueber  das  Klima  des  westlichen  und  sûdlichen 
Arabien.  ïbid.,  n*  9,  p.  330-835. 

90.  Du  même  ;  Notes  de  voyage  sur  les  régions  du  sud  de  l'Arabie. 
le  Glohey  organe  de  la  Société  de  Géographie  de  Genève, 
i,  X,  1871,  p.  125-156  j  avec  l'esquisse  d'une  carte  du  pays 
visité. 

Dans  cette  communication  an  Journal  géographique  de  Genève,  aussi 
bien  que  dans  la  suivante  à  la  Société  de  Londres,  M.  de  Maltzan  repro- 
duit au  fond  ses  communications  aux  journaux  çéo^^phiqaes  de  Berlin 
et  de  Gotha. 

1.  Muhammed  Ben-Habîb,  ûber  die  Gleichheit  und  Verschiedenheit 
der  arabischen  Stàmmenamen,  texte  arabe  et  introduction,  1 850,  in-8»; 
—  Register  zu  den  genealogischen  Tahellen  der  arabischen  Stàmme, 
in-8«  et  atlas  in-4*,  1853;  -^  die  von  Médina  oMlaufenden  Hauptstras- 
sen,  in-4%  1862;  —  die  WohntiUe  midi  Wanderungen  der  arabischen 
StàmmCf  in-4%  1868, 


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96  ASIE.  (n°' 85-97.) 

91.  Du  môme  :  Geography  of  Southern  Arabia.  Proceedings  of  the 
Royal  Geogr.  soc,  ofLondon,  vol.  XVI,  n»  2,  1872,  p.  115-123. 

92.  Du  môme  :  Beitràge  zur  Kenntoiss  der  geographischen  und 
sprachlichen  Verhàltnisse  von  Sttdarabien.  ZeiYsc/ir.  der  Deutec^. 
Morgenlând,  Gesellsch.  B*».  XXV,  3*«  heft,  p.  491-498.  Leipii., 
1871. 

Notes  qui  ont  surtout  pour  objet  de  constater  l'exactitude  des  rensei- 
gnements donnés  par  M.  de  Wrede  sur  le  Hadramaut.  V.  notre  précé- 
dent vol.,  p.  17. 

93.  Du  même  :  Ueber  den  Dialect  von  Mahra,  genannt  Méhri,  in 
Sùdarabien.  Zeitschr.  der  Deutschen  Morgenlând,  Gesellschafïj 
t.  XXV,  cah.  1-2,  p.  196-214.  Leipx.,  1871. 

94.  Geognostische  Verhàltnisse  Hadhramaut's.  Ein  Bruchstack  aus 
den  nachgelassenen  Papieren  Ad.  v.  Wrbde's.  Zeitschr.  der 
Gesellsch,  fur  Erdk.  au  Berlin,  VII  (n*  39),  1872,  p.  224-234. 

Voir  le  précédent  vol.  de  VAnnée^  p.  15,  n»  31,  et  p.  16. 

95.  Capt.  S.  B.  Miles  and  Werner-Munzinger.  Account  of  an 
Excursion  into  the  interior  of  Southern  Arabia  (1870).  Joum,  of 
the  Roy.  Geogr. soc,  vol.  XLI,  1871,  p.  210-245.  Map. 

A  côté  de  la  relation  complète  du  capit.  Miles,  qui  s'est  étendue  à 
TEst  depuis  Aden  jusqu'à  Blr'Ali  (un  peu  en  deçà,  de  Râs  el-Kelb),  en 
partie  en  longeant  la  côte,  en  partie  dans  l'intérieur,  il  faut  mention- 
ner le  résumé  qui  s'en  trouve  dans  les  Proceedings  (vol.  XV,  1871, 
p.  319-334),  à  cause  des  remarques  du  Rev.  G.  P.  Badger.  La  carte  de 
MM.  Miles  et  Munzinger  complète  sur  plusieurs  points  celle  que  le 
docteur  Petermann  a  construite  sur  les  matériaux  du  baron  de 
Maltzan. 

96.  Jos.  Halévy.  Rapport  sur  une  mission  archéologique  dans  le 
yémen  (adressé  au  Ministre  de  l'instruction  publique  le  21  juil- 
let 1871).  Journal  Asiatique,  jauv.  1870,  p.  5-98. 

Les  inscriptions  <  sabéennes  >,  rapportées  par  M.  Halévy  au  nombre 
de  686,  ont  été  publiées  dans  leur  caractère  original  au  cahier  de 
février-mars  1872  du  Journal  Asiatique^  p.  129-266,  sans  transcription, 
annotations  ou  commentaire  d'aucune  sorte. 

La  traduction  partielle  et  provisoire  des  inscriptions  a  été  donnée  au 
cahier  de  juin,  p.  489-547. 

—  Du  même  :  Rapport  sur  une  mission  archéologique  dans  le 
Yémen.  Archives  des  Missions  scientif.  et  littér.,  publiées  sous 
les  auspices  du  Ministère  de  Vinstr.  puhL,  t.  VIT,  1872,  p.  233- 
285. 

Ce  rapport  ne  diffère  pas  de  celui  qui  est  noté  ci-dessus,  au 
n»g6. 

Je  reviendrai  tout  à  l'heure  sur  le  très-important  voyage  de  M.  Jos. 
Halévy  envisagé  spécialement  au  point  de  vue  géographique  ;  mais  je 
veux  citer  dès  à  présent  le  jugement  que  M*  Renan  a  porté  sur  l'en- 


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LE   SUD-OUEST  DE   l'aRABIE.  97 

semble  de  la  mission,  au  nom  d*ane  commission  spéciale  nommée  par 
TAcadémie  des  inscriptions  : 

«  La  Commission  est  tombée  d'accord,  à  runanimité,  sur  la  haute 
valeur  des  recherches  exécutées  par  le. courageux  voyageur.  Avec  des 
ressources  très-limitées,  M.  Halévy  a  réussi  à  pénétrer  dans  des  pays 
que  jamais  Européen  n'avait  visités  depuis  le  consul  £lius  Gallus,  au 
tenrps  d'Auguste,  lors  de  son  expédition  aussi  funeste  pour  lui  que 
stérile  pour  la  science.  La  force  d'àme  avec  laquelle  notre  modeste 
missionnaire  a  supporté  les  fatigues  et  les  périls  de  son  entreprise, 
ainsi  que  les  privations  inévitables  au  milieu  de  populations  pauvres, 
rapaces  et  soupçonneuses,  est  au-dessus  de  tout  éloge.  Avec  une 
patience  des  plus  rares,  il  est  parvenu  à  réunir  environ  680  textes 
épigraphiques,  tous  inconnus  jusqu'ici.  Plusieurs  de  ces  textes  sont  de 
^peu  d'étendue  ou* à  peine  lisibles;  mais  la  plupart  ont  un  développe- 
ment plus  ou  moins  considérable.  Les  plus  modernes  ne  peuvent 
guère  descendre  au-dessous  du  premier  siècle  de  notre  ère,  et  tous, 
par  un  côté  ou  par  un  autre,  sont  d'un  curieux  intérêt  pour  la  philo- 
logie sémitique  et  pour  l'histoire  ancienne  de  l'Arabie.  Les  circonstan- 
ces ont  rendu  impossible  à  M.  Halévy  de  rapporter  les  empreintes  des 
monuments  qu'il  a  découverts  ;  du  moins  s'est-il  appliqué  à  en  prendre 
des  copies  exactement  figurées.  Ici,  du  reste,  la  nature  presque  monu- 
mentale du  caractère  himyarite  rendait  le  manque  d'estampage  moins 
regrettable  que  s'il  se  fût  agi  d'un  système  d'écriture  tant  soit  peu 
cursive.  En  examinant  les  résultats  du  travail  si  considérable  et  si 
minutieux  à  la  fois  que  nous  avons  eu  sous  les  yeux,  eu  tenant 
compte  des  énormes  difficultés  qu'a  dû  surmonter  le  voyageur  pour 
mener  à  fin  son  entreprise,  nous  nous  sommes  dit  plus  d'une  fois  qu'un 
Israélite  oriental,  réunissant  toutes  les  qualités  propres  à  sa  race,  la 
persévérance,  la  sobriété,  et  d'autres  encore,  indépendamment  de 
l'étendue  et  de  la  solidité  de  son  instruction,  y  pouvait  seul 
réussir. 

97.  A.  Le  Gras.  Instructions  pour  naviguer  dans  la  mer  Rouge; 
d'après  R.  Moresby  et  T.  Elwon ,  et  les  documents  les  plus  ré- 
cents. Parts,  1871,  in-S»,  362  pages.  (  Public,  du  Dépôt  de  la 
marine.  Bossange.  6  fr.) 


S  1*'.  État  physique,  géographique  et  politique  de  Tangle  sud-ouest  de 
l'Arabie,  d'après  les  informations  réunies  par  M.  de  Maltzan. 

A  rextrémité  sud-est  de  la  péninsule  arabe,  sur  la  limite 
sud  du  Yémên,  entre  l'entrée  de  la  mer  Rouge  et  Aden,  et 
plus  à  Test  encore,  entre  Aden  et  la  limite  du  Hadramaut, 
il  existe  une  contrée  d'une  étendue  considérable  où  nul 
Européen  n'a  jamais  pénétré,  sauf  Seetzen,  en  1811,  qui 
y  est  mort  assassiné.  Aussi  cet  angle  extrême  de  la  grande 
péninsule  en  est-il  une  des  parties  absolument  inconnues. 
M.  le  baron  de  Maltzan,  à  qui  Ton  doit  déjà  tant  de  sa- 

L*ANNr.E  GÉ06R.  XI.  7 

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98  ASIE.  (n«^  85-97.) 

vantes  études  et  d'infatigables  investigations  sur  quelques^ 
unes  des  régions  les  moins  fréquentées  des  pays  musul- 
mans^, conçut  la  pensée,  il  y  a  deux  ans,  de  remplir  au 
moins  une  partie  de  cette  lacune.  Quoiqu'il  n'ait  pu  faire 
tout  ce  qu'il  aurait  voulu, — ^»  chose  fort  ordinaire  en  de 
telles  entreprises,  —  il  a  cependant  rapporté  de  sa  course 
une  quantité  considérable  de  notions  absolument  nouvelles 
et  d'un  grand  intérêt.  Joint  aux  informations  recueillies 
par  le  capitaine  Miles  et  son  compagujQn  M.  Munzinger, 
ce  voyage  ajoute  une  page  importante  au  livre  chaque 
jour  moins  incomplet  de  notre  connaissance  de  l'Arabie, 
et  remplit,  d'une  manière  au  moins  provisoire,  une  partie 
blanche  de  la  carte.  Pour  donner  une  idée  générale  de  la 
notice  de  M.  de  Maltzan,  je  vais  en  détacher  quelques 
passages. 

«  Au  point  de  vue  clîmatologique,  l'Arabie  du  Sud  a  deux 
régions  bien  différentes,  Tune  qui  reçoit  les  pluies  tropica- 
les, l'autre  qui  ne  connaît  que  les  pluies  d'hiver,  sur  les- 
quelles on  ne  peut  jamais  compter  avec  certitude,  car 
elles  font  défaut  quelquefois  pendant  trois  ans.  A  cette 
dernière  région  appartient  tout  le  littoral.  Malgré  sa  po- 
sition sous  les  tropiques  et  sa  grande  proximité  des  terres 
qui  reçoivent  les  pluies  tropicales,  ces  dernières  lui  font 
complètement  défaut.  Lk  où  ces  plaines  portent  une  végé- 
tation luxuriante,  comme  à  Lahedj  et  à  Abiân,  ce  phéno- 
mène est  dû  uniquement  à  im  ouâdi,  qui,  plus  au  nord, 
reçoit  les  pluies  tropicales  et  leur  ramène  de  l'eau.  Les 
terres  qui  manquent  de  pareils  ouâdis  sont  pauvres  et  ne 
peuvent  jamais  compter  sur  une  récolte  assurée.  Il  est 
vrai  que  quelquefois  les  hivers  sont  pluvieux.  A  Aden 
même,  on  a  vu  les  citernes  se  remplir  jusqu'à  déborder. 
Mais  ces  faits  sont  rares  et  ne  changent  rien  à  la  triste 
condition  générale  du  littoral.  —  C'est  tout  différent  dans 

1.  Voir  le  précédent  volume  de  V Année  géographique,  p.  283. 

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tE  SUD-OUEST  i)E  l'aRABIE.  99 

Tintérieur.  Là  Tété  et  la  saison  des  pluies  sont  régulières. 
Elles  tombent  même  avec  une  telle  abondance ,  que  pres- 
que tous  les  ans  on  parle  d'inondations.  L'intérieur  pour- 
rait être  un  vaste  jardin,  si  les  indigènes  y  étaient  aussi 
industrieux  que  ceux  de  Lâhedj,  qui  ne  perdent  pas  une 
goutte  d'eau  inutilement,  et  qui  retiennent  toujours  une 
provision  du  liquide  précieux  pour  les  mois  de  sécheresse, 
par  le  moyen  des  écluses. 

ce  Les  habitants  de  ces  vastes  régions,  presque  tous  Bé- 
douins, appartiennent  pour  la  plupart  à  la  race  himyarite* 
Ils  ont  la  peau  noire,  presque  aussi  noire  que  les  nègres, 
mais  les  traits  et  le  corps  d'une  grande  noblesse  et  d'une 
grande  régularité.  C'est  indubitablement  le  sang  sémi- 
tique qui  coule  dans  leurs  veines.  Ils  sont  tous  maigres, 
mais  forts  et  nerveux.  Leur  barbé  est  fort  rare,  quelques- 
uns  restent  même  toujours  imberbes.  La  grande  souplesse 
de  leurs  articulations  les  rend  les  meilleurs  monteurs  de 
chameaux  de  toute  T Arabie.... 

«  Dans  la  plupart  des  États  règne  la  démocratie,  ou  plu- 
tôt une  anarchie  presque  complète.  Toutes  les  tribus  sont 
libres.  Le  mot  même  de  «  tribu,  »  usité  au  pluriel,  qui  est 
qobâyel  en  arabe,  est  synonyme  aussi  de  liberté.  Il  est 
vrai  que  chaque  tribu  a  son  chef,  appelé  ici  aqel,  et  chaque 
réunion  de  tribus  son  chef  suprême  ;  mais  leur  autorité  se 
borne  au  commandement  en  cas  de  guerre.  En  temps  or- 
dinaire, elle  est  presque  nulle.  Ils  ne  peuvent  ni  prélever 
des  impôts,  ni  rendre  la  justice.  Gelle-ci  s'exerce  par  les 
membres  des  tribus,  d'après  les  traditions  de  la  vendetta. 
Toute  tribu  est  solidaire  pour  chacun  de  ses  membres.... 

c  Presque  tout  sultan  possède  un  certain  nombre  de 
châteaux  qui  sont  de  vraies  forteresses  contre  les  indigènes 
et  leurs  armes  imparfaites.  Dans  les  montagnes,  ces  châ- 
teaux sont  en  pierre;  dans  les  plaines,  en  briques  cuites  au 
soleil.  Ils  ont  tous  au  moins  quatre  étages,  et  sont  flanqpiés 
de  tours  couronnées  de  terrasses  avec  mâchicoulis.  Les 

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100  ASIE.  (N~  85-97.) 

murs  sont  percés  de  nombreuses  meurtrières.  Les  fenêtres, 
toujours  très-petites,  ne  commencent  qu'à  une  hauteur  de 
cinq  à  six  mètres.  Outre  le  sultan,  presque  chaque  membre 
de  m  famille  possède  au  moins  un  château.  Les  villes  ren- 
ferment ainsi  souvent  quinze  ou  vingt  châteaux,  habités  par 
les  chefs  et  leurs  soldats,  une  mosquée,  un  marché  et  une 
inËûité  de  huttes  en  paille  de  palmier.  Aucune  ville  n'est 
murée  :  les  châteaux  suffisent  à  la  défense.  Dans  tout  centre 
d'une  tribu  ou  d'unesubdivision  de  tribu,  il  se  trouve  aussi  un 
pareil  château,  autour  duquel  sont  distribuées  les  huttes  de 
paille  ou  de  branches  des  indigènes.  Les  Bédouins  mêmes 
babltent  de  pareilles  huttes.  La  vie  sous  la  tente,  si  carac- 
téristique pour  les  Arabes  du  Nord,  est  inconnue  ici.  Je  n'ai 
entendu  parler  que  de  trois  tribus,  dont  les  territoires  soct 
placés  lout  k  fait  au  Nord,  vers  le  Djôf,  qui,  à  ce  qu'on  m'a 
dit,  possédaient  des  tentes.  Parmi  les  châteaux,  il  y  en  a 
quelques-uns  d'une  très-grande  antiquité  et  d'origine  himya- 
rite.  Ils  sont  bâtis  avec  de  grandes  pierres  bien  taillées 
et  d'une  maçonnerie  très-solide.  Généralement,  cependant, 
les  anciens  châteaux  himyarites   sont  délaissés.  La  sa- 
per stitiou  les  croit  le  séjour  de  mauvais  génies,  de  sorte 
que  les  Arabes  ont  peur  d'en  approcher.... 

ic  La  seule  industrie,  pour  ainsi  dire,  connue  dans  les 
villes  de  rintérieur,  telles  que  Qâ'teba,  Niçâb,  Habbân, 
e^t  celle  de  la  teinture.  Ces  teinturiers  ne  se  servent  que 
d'une  seule  couleur,  celle  de  l'indigo,  plante  cultivée  beau- 
coup dans  le  pays.  Presque  tous  les  vêtements  des  Arabes 
sont  teints  de  cette  couleur  et  très-rarement  blancs.  Les 
juifs  de  quelques  villes  fabriquent  des  étoffes  avec  du  co- 
ton qu'ils  font  venir  d'Aden,  car  le  pays  cotonnier  d'Abiân 
masque  d'industrie  et  exporte  ses  cotons  à  Aden.  » 

M*  de  Maltzan  donne  la  liste  d'une  douzaine  de  petites 
principautés  ou  territoires  qu'il  a  visités*  dans  un  certain 
rayon  autour  d'Aden.  Il  a  recueilli  de  la  bouche  des  Arabes 
des  notions  sur  beaucoup  d'autres  cantons  et  sur  un  grand 

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M.   JOS.    HALÉVY.  101 

nombre  de  localités,  qu'il  a  marqués  sur  sa  carte.  Dans 
ses  enquêtes  apprès  des  Arabes  de  rintérieur  avec  lesquels 
il  s'est  trouvé  en  rapport  à  Âden,  le  voyageur  s'est  inspiré 
de  la  méthode  qui  a  donné  de  si  bons  résultats  au  général 
Daumaô  et  à  d'autres  officiers  de  notre  armée  d'Afrique; 
aussi  est-on  en  droit  d'espérer  que  l'exploration  propre- 
ment dite  de  ces  territoires,  lorsque  des  circonstances  favo- 
rables permettront  à  un  voyageur  européen  de  s'enfoncer 
dans  le  pays  et  d'y  porter  l'observation  scientifique,  confir- 
mera, tout  en  les  précisant,  les  indications  consignées  sur 
la  carte  de  notre  courageux  investigateur. 


S  2.  Expédition  archéologique  de  M.  Joseph  Halévy.  Immense  récolte 
épigraphique.  Reconnaissance  d'an  pays  inexploré. 

Nous  avons  cité  la  très-haute  appréciation  de  l'Académie 
des  inscriptions  au  sujet  de  l'immense  récolte  de  textes 
himyarites  rapportés  du  sud  de  l'Arabie  par  M.  Halévy  ; 
nous  allons  de  notre  côté  suivre  l'explorateur  dans  sa 
course  périlleuse,  en  nous  attachant  aux  résultats  géogra- 
phiques. 

Dans  son  rapport  au  ministère  de  l'instruction  publique 
(ci-dessus,  n"  96),  M.  Jos.  Halévy  rend  compte  des  résul- 
tats généraux  de  la  mission  dont  il  fut  chargé  en  1869. 

Après  une  tentative  infructueuse  pour  pénétrer  dans  l'in- 
térieur en  partant  d'Aden,  M.  Halévy  dut  gagner  le  port  de 
Hodeyda  dans  la  mer  Houge,  au  nord  de  Mokha,  et  il  ar- 
riva à  Sanâ  par  cette  voie.  Cette  place,  la  plus  belle  et  la 
plus  propre  de  l'Arabie,  est  à  moitié  ruinée.  De  là  il  se 
rendit  à  Schirây  petite  ville  du  territoire  des  Ashab,  à  une 
demi-journée  vers  le  nord-est  de  Sanâ.  Schirâ  consiste  en 
plusieurs  hameaux  séparés,  bordant  un  ouâdi.  La  localité 
parait  très-ancienne  ;  les  monuments  de  l'époque  sabéenne 
y  abondent,  bien  qu'un  grand  nombre  de  pierres  à  inscrip- 
tions aient  été  détruites  par  les  habitants  pour  en  faire  de 


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102  ASIE.  (n«»  85-97.) 

la  chaux.  Une  montagne  contiguê  contient  des  restes  de 
constructions  que  le  voyageur  qualifie  d'hymîarites,  et  de 
nombreuses  traces  d'inscriptions  sa  voient  encore  sur  les 
rochers. 

A  partir  de  ce  point,  la  route  du  voyageur  se  tourne  entre 
le  nord  et  le  levant,  d'après  une  esquisse  que  M.  Halévy  a 
fait  distribuer  à  la  Société  de  géographie.  Cette  esquisse 
est  malheureusement  bien  incomplète  et  bien  peu  précise 
(voy .  ci-contre)  ;  néanmoins,  comme  on  y  a  inscrit  une  flèche 
marquant  le  Nord,  et  que  l'itinéraire  y  paraît  tracé  avec  un 
certain  soin,  il  semble  qu'on  doive  avoir  confiance  dans  les 
directions  indiquées.  Le  pays,  quoique  toujours  montueux, 
devient  d'une  extrême  aridité.  On  est  ici  sur  un  plateau 
dont  l'escarpement^  désigné  sous  le  nom  de  djebel  Yâin, 
domine  la  plaine  de  sable  mouvant,  le  redoutable  Ahqàf, 
qui  s'étend  à  l'est  vers  un  horizon  sans  limite.  Au  pied  du 
djebel  Yâm,  une  longue  vallée,  le  ouâdi  Saba^  marque  la 
lisière  de  l'Ahqâf .  «  Cette  lisière,  qui  consiste  en  terre  cul- 
tivable, sinon  cultivée,  a  tout  au  plus  la  largeur  d'une 
journée  de  marche.  Après  elle  [c'est-à-dire  à  l'est]  com- 
mence un  terrain  pareil  au  Téhama,  avec  des  dunes  de  sa- 
ble en  plus,  qui  se  déplacent,  s'accumulent,  s'aplanissent 
au  gré  du  vent.  Le  Téhaina  oriental  [c'est-â-dire  le  plateau 
intérieur,  la  haute  plaine  de  sable]  est,  selon  toute  appa- 
rence, de  2000  pieds  environ  plus  haut  que  le  Téhama 
littoral.  Cette  position  relativement  élevée  du  désert  el- 
Ahqâf  explique  aussi  le  fait  singulier,  généralement  connu 
des  habitants,  que  le  vent  du  désert  apporte  la  fraîcheur. 
Les  Arabes  que  j'ai  questionnés  sur  ce  phénomène  m'ont 
donné  pour  réponse  que  le  vent  se  rafraîchit  en  passant  au- 
dessus  de  Bahr  es-Sâfi,  mer  fabuleuse  dont  on  parle  aussi 
dans  le  Hadramaut.  Y  aurait-il  quelque  fond  vrai  dans 
la  fable  qui  paraît  indiquer  l'existence  d'un  lac  intérieur? 
c'est  ce  que  personne  ne  saurait  dire.  D'après  mes-  infor- 
mations, il  n'y  a  aucune  communication  entre  le  Djaouf  et 

uigiiizeu  uy  -v^JV^v^-i  1%^ 


DÉCOUVERTES  DANS  l'INTÉRIEUR  DE  l' ARABIE.    103 

la  côte  d'Oman,  et  les  Arabes  les  pins  intrépides  tremblent 
au  nom  du  terrible  Ahqâf.  5> 

Le  Djaoufy  que  M.  Halévy  vient  de  nommer,  est  une 
plaine  basse  formée  de  terres  cultivables,  une  oasis  au  sein 
du  désert.  Le  nom,  qui  s'écrit  aussi  Djâf  et  qui  signifie 
«  pays  enfoncé  »,  «  dépression  entre  des  hauteurs  »,  est 
une  appellation  générique  que  l'on  retrouve  en  diverses 
parties  de  la  péninsule,  notamment  dans  la  région  centrale, 
entre  le  Nedjed  et  le  Hedjaz,  où  un  Djôf  célèbre  dans  toute 
TArabie  a  été  visité  et  décrit  par  plusieurs  explorateurs  ré- 
cents. Celui  du  sud,  oii  M.  Halévy  le  premier  vient  de  pé* 
nétrer,  présente,  d'après  les  notes  du  savant  voyageur,  un 
très-grand  intérêt  historique  ;  M.  Halévy  retrouva  là,  en 
même  temps  qu'un  centre  d'habitation  antique  riche  en  in- 
scriptions sabéennes,  un  des  principaux  noms  que  l'expé- 
dition d'iElius  Gallus,  en  l'année  24  av.  J.  G.,  fit  parvenir 
à  la  connaissance  des  Romains,  le  nom  des  iftnê^m,  voisins 
de  Saba,  de  Mariaba  (Mareb)  et  des  Khatramotites  (le  Ha- 
dramaut).  On  distingue  ici  deux  ou  même  trois  Djaoufs 
contigus,  un  supérieur,  un  moyen  et  un  inférieur,  arrosés 
par  u^e  rivière  permanente  (  chose  rare  en  Arabie)  qui  a 
son  origine  près  de  Schira,  non  loin  de  Sanâ,  et  qui  de  là 
coule  au  nord-est  vers  les  deux  Djaoufs  sous  le  nom  d'el- 
Kharid,  disparaissant  parfois  dans  le  sol,  et  reparaissant 
plus  loin  k  la  surface.  Mais  il  faut  laisser  la  parole  au 
voyageur. 

«  Le  Djaouf  inférieur  et  le  Djaouf  moyen  contiennent, 
à  ma  connaissance,  plus  de  vestiges  de  l'antiquité  que  tout 
autre  pays  arabe.  Entre  ces  différentes  ruines,  la  plus  im* 
portante  au  point  de  vue  de  l'histoire  ancienne  est,  sans 
contredit,  celle  qui  porte  encore  aujourd'hui  le  nom  de 
àfe'ïn,  représentant  indubitablement  la  capitale  des  Mi- 
néens,  gens  magna  de  l'Arabie  d'après  les  auteurs  classi- 
ques. 

c  La  partie  fortifiée  de  la  ville  de  Me'în  occupe  un  mou- 

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104  ASIE.  (n°*  85-97.) 

ticule  qui  mesure  environ  280  mètres  de  longueur  sur  240 
de  largeur.  Des  murs  d'enceinte  qui  étaient  placés  aux 
abords  de  la  descente,  il  ne  reste  que  certaines  portions 
du  côté  nord;  mais  en  revanche,  les  portes  opposées  de 
l'est  et  de  l'ouest  sont  assez  bien  conservées,  ainsi  que  les 
tours  voisines  qui  sont  d'une  hauteur  considérable,  et  qui 
présentent  un  aspect  grandiose.  Ces  diverses  constructions 
consistent  en  d'énormes  pierres  taillées,  juxtaposées  sans 
ciment,  mais  si  bien  unies  qu'on  croit  voir  un  seul  bloc. 
La  plupart  d'entre  elles  portent  des  inscriptions  qui  ont 
souvent  une  dimension  prodigieuse.  Dan^l'intérieur,  pres- 
que tous  les  monuments  anciens  ont  péri  par  le  vandalisme 
des  Arabes,  qui  ont  essayé,  à  plusieurs  reprises,  de  s'éta- 
blir au  milieu  des  ruines.  Quelques  années  ont  suffi  pour 
que  les  huttes  en  briques  crues  redevinssent  de  la  pous- 
sière; et  même  la  mosquée,  bâtie  avec  des  pierres  prises 
des  constructions  antiques,  est  entièrement  délabrée,  tandis 
que  non  loin  d'elle  un  petit  temple  de  l'époque  himyarite, 
renfermant  plusieurs  stèles,  est  presque  intact,  et  con- 
traste, par  la  symétrie  de  ses  proportions,  avec  le  chétif 
édifice  religieux  de  l'islamisme. 

c  A  vingt  minutes  à  l'est  de  la  ruine  principale,  dans  un 
terrain  très-déprimé  nommé  el-Mihyar^  se  voient  deux 
longues  rangées  de  stèles  semblables  à  celles  de  Medinet- 
Haram,  qui  paraissent  avoir  appartenu  à  deux  temples 
presque  contigus,  dont  il  ne  reste  que  les  deux  portes  ad- 
jacentes* Le  frontispice  de  la  grande  porte  contient  une 
très-belle  inscription  en  trois  lignes,  indiquant  le  nom  du 
roi  qui  a  élevé  le  temple  et  celui  de  la  divinité  à  laquelle 
il  l'a  consacré,  apparemment  l'Astarté  phénicienne.  Trois 
architraves,  parmi  celles  qui  se  trouvent  au-dessus  de  l'in- 
scription, ont  chacune  au  bout  une  courte  inscription,  qui 
semble  désigner  un  roi  allié  des  Minéens,  aux  frais  duquel 
une  portion  du  temple  a  été  construite.  » 

Il  n'est  pas  besoin  d'insister  sur  l'importance  de  cette 

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ARABIE   INTÉRIEURE.    SITES  ANCIENS.  105 

découverte  du  site  où  s'éleva  la  ville  capitale  des  Minéens. 
Cette  découverte  pose  un  jalon  de  plus,  et  un  jalon  de  pre- 
mier ordre,  pour  le  tracé  de  l'itinéraire  d'^Elius  GaÛus. 
On  sait  que  jusqu'à  présent  la  correspondance  des  Minaei 
avait  été  laborieusement  et  inutilement  cherchée,  notam- 
ment par  Fresnel  (Journal  Asiatiqy£^  4*  série,  VI,  1845, 
p.  390). 

M.  Halévy  ajoute  :  «  Un  coup  d'œil  jeté  sur  les  inscrip- 
tions que  j'y  ai  recueillies  m'a  bientôt  prouvé  que  le  peu- 
ple minéen  possédait  deux  autres  villes  importantes,  ce  qui 
m'a  déterminé  à  faire  tous  mes  efforts  pour  les  découvrir. 
J'ai  eu  le  bonheur  de  retrouver  la  deuxième  ville  minéenne 
mentionnée  dans  les  inscriptions,  et  dont  l'ancien  nom 
est  déjà  tombé  dans  l'oubÛ.  Mais  ce  n'est  qu'après  une 
longue  recherche,  et  par  un  hasard  singulier,  que  j'ai  ren- 
contré les  traces  de  la  troisième  ville  minéenne,  qui  m'a 
livré  le  plus  riche  butin  épigraphique. 

«  La  population  minéenne  occupait  une  place  à  part  par- 
mi les  tribus  sabéennes.  Les  inscriptions  de  ces  trois  villes 
sont  toutes  conçues  dans  un  dialecte  particulier,  peut-élre 
identique  à  celui  qui  figure  sur  les  monuments  provenant 
du  Uadramaut.  La  science  aura  à  se  prononcer  un  jour 
sur  la  question  de  savoir  si  ce  sont  les  Minéens  qui  ont 
peuplé  le  Hadramaut,  ou  si,  au  contraire,  ce  sont  les  Ha- 
dramotites  qui  ont  colonisé  en  partie  le]  ouâdi  Saba.  Quelle 
que  soit  du  reste  l'opinion  à  laquelle  on  devra  s'arrêter,  il 
est  déjà  hors  de  doute  que  le  noyau  de  l'empire  sabéen  se 
composait  au  moins  de  deux  peuples,  parlantdeux dialectes.  » 

D'autres  ruines  avaient  aussi  attiré  l'attention  du  voya- 
geur. Il  en  visita  une  dizaine  ;  mais  trois  seulement  lui  ont 
donné  un  résultat  épigraphique.  Le  reste  était  dans  un  tel 
état  de  destruction,  qu'il  n'y  put  découvrir  une  seule  pierre 
intacte.  «  Ces  ruines  sont  généralement  situées  ^ntre  le 
Khârid  et  le  djebel  Laoud.  Celles  dont  l'emplacement  est 
éloigné  de  la  rivière  étaient  anciennement  irriguées  par  un 

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106  ASIE.  (N«  85-97.) 

réseau  de  canaux  régulièrement  creusés,  lesquels,  entrete- 
nus avec  soin  par  les  Sabéens,  ont  procuré  la  nourriture  et 
le  bien-être  à  d'immenses  populations.  Même  à  présent  que 
tous  ces  canaux  sont  obstrués  et  comblés,  il  suffît  qu'une 
pluie  abondante  vienne  à  temps  pour  fournir  trois  mois- 
sons par  an.  * 

Quand  le  voyageur  crut  n'avoir  plus  rien  à  découvrir  dans 
le  Djaouf  moyen,  il  se  décida  à  aller  au  Nedjrân,  contrée 
située  plus  haut  dans  le  nord.  L'orientation  du  voyage, 
telle  que  l'indique  l'esquisse  de  la  carte,  met  le  Nedjrân 
à  peu  près  sous  le  même  méridien  que  le  Djaouf  oriental 
ou  supérieur  et  le  site  de  Mareb,  conséquemment  beaucoup 
plus  à  Test  que  la  position  approximative  qa'on  lui  a  don- 
née jusqu'à  présent  sur  les  meilleures  cartes.  La  distance 
depuis  le  Djaouf  est  de  cinq  à  six  journées.  «  Je  pris  la 
route  orientale,  dit  M.  Halévy,  avec  l'intention  de  retour- 
ner au  Beled  Hamdân  par  le  Djaouf  supérieur.  J'ai  voulu 
ainsi  reconnaître  les  deux  routes  différentes  que  le  général 
romain  aurait  prises,  d'après  le  récit  de  Strabon,  en  allant 
de  Nagara  à  Saba,  et  en  revenant  du  pays  des  Sabéens, 
Comme,  d'après  l'écrivain  grec,  la  première  route  était  la 
plus  longue,  et  conduisait  par  des  déserts  arides  où  l'eau 
manquait  souvent,  je  conclus  que  cela  devait  être  la  route 
orientale  ;  tandis  que  la  route  occidentale,  qui  passe  par  le 
pays  du  Djaouf  supérieur,  assez  bien  peuplé  aujourd'hui 
même,  devait  présenter  moins  de  difficultés  pour  l'armée 
romaine.  Cette  considération  me  parut  logique  ;  je  pouvais 
me  tromper,  mais  j'étais  décidé  à  faire  des  recherches  sé- 
rieuses. » 

Le  second  jour,  on  traverse  l'oasis  de  Ehâb,  belle  vallée 
remplie  de  villages,  mais  où  rien  n'annonce  une  ancienne 
habitation.  De  là,  le  voyageur  gagna  enfin  le  Beled 
Nedjrftn,  dont  nul  Européen,  avant  lui,  n'avait  foulé  le  sol 
Il  y  a  longtemps  que  dans  ce  nom,   si  souvent  mentionné 

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SITE  DE  LA  CAPItALE  DES  MINÉENS.  107 

par  les  auteurs  arabes,  on  a  cru  reconnaître  la  ville  de 
Negrana  ou  Anagrana  de  la  célèbre  expédition  romaine 
d'iSlius  Gallus  (  ville  que  Ton  a  cru  pouvoir  identifier  avec 
la  Nagara  Metropolis  de  Ptolémée,  ce  qui  est  possible,  mais 
nullement  certain)  :  il  y  avait  donc,  dans  tous  les  cas,  un 
intérêt  historique  et  géographique  à  examiner  directement 
ces  localités,  c  Mes  excursions  dans  le  ouadi  ont  été  bien 
récompensées,  dit  le  rapport  de  M.  Halévy,  par  la  décou- 
verte de  Nagara  Metropolis  ;  les  Arabes  les  nomment  ac- 
tuellement Medinet-el-Khoudoud,  prononciation  incorrecte 
an  lieu  de  el-Oukhdoud,  nom  qui  se  trouve  dans  le  Koran, 
et  que  les  commentateurs  ont  à  tort  identifié  avec  Nedjrân^.» 
On  regrette  l'extrême  brièveté  de  cette  partie  du  rapport. 
Dans  une  sorte  d'appendice  consacré  au  «  classement  des 
inscriptions,  »  M.  Halévy  ajoute  seulement,  au  sujet  du 
Nedjrân  et  de  ses  ruines  :  «  Beled  Nedjrân^  vallée  déli- 
cieuse s'étendant  de  Test  k  l'ouest  entre  deux  chaînes  de 
montagnes,  et  située  à  trois  journées  de  marche  au  nord- 
est  de  Sada^....  Medinet-el-Khoudoud  est  une  grande 
mine  représentant  la  Nagara  Metropolis  de  Ptolémée,  si- 
tuée à  une  heure  à  Touest  de  Ridjla,  du  côté  méridional 
du  torrent*.  »  La  partie  sud  et  ouest  du  mur  d'enceinte 
est  moins  détruite  que  les  autres.  Ce  mur  est  construit 
avec  du  granit  très-dur,  et  manque  d'élégance.  »  C'est 
tout. 

L'identification  des  ruines  d'el-Ehoudoud  avec  la  Nagara 
Metropolis  du  géographe  alexandrin,  supposée  identique 
avec  YAnagranaoM  Negrana  de  l'expédition d'iElius  Gallus, 
n'est  encore,  je  le  répète,  que  la  simple  répétition  d'une 
hypothèse  qui  ne  s'appuie  jusqu'à  présent  sur  aucun  fait 

1.  Le  contexte  de  cette  phrase  n'est  pas  clair;  je  transcris. 

2.  Cest  ce  qu'avait  déjà  dit  Niebuhr,  d'après  ses  informations  lo- 
cales {Descr.  de  VArabie^  II,  114).  Sada  (Niebuhr  écrit  Saadé)  est  la 
capitale  du  Beled  Sahàn,  dans  le  N.  E.  du  Yémèn  {id.,  p.  113). 

3.  Ridjla  est  marquée  sur  l'Esquisse  de  M.  Halévy. 

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108  ASIE.  (n"  85-97.) 

direct.  C'est  un  point  qui  appelle  encore  la  discussion  cri- 
tique, et  sur  lequel  je  ne  pense  pas  que  les  découvertes 
épigrapfaiques  de  M.  Halévy,  d'ailleurs  si  précieuses  sous 
d'autres  rapports,  puissent  jeter  beaucoup  de  lumière. 

Revenons  à  la  narration  du  savant  voyageur  :  «  Ayant 
ainsi  atteint  la  limite  septentrionale  de  mon  expédition, 
il  fallait  penser  à  revenir  au  ouâdi  Saba  par  le  Djaouf 
supérieur.  Notre  chemin,  prenant  une  direction  sud-ouest, 
passa  par  des  contrées  fort  montagneuses.  Ces  diffé- 
rents pays,  si  intéressants  sous  le  rapport  de  la  géogra- 
phie, n'ont  rien  donné  en  fait  d'inscriptions....  Le  Djaouf 
supérieur  n'a  conservé  que  de  très-faibles  vestiges  de  son 
ancienne  splendeur.  D'innombrables  ruines  couvrent  le 
sol,  surtout  dans  le  voisinage  du  Khâridy  qui  a  ici  une 
respectable  largeur.  La  destruction  des  monuments  sabéens 
a  été  plus  complète  en  ce  pays  que  dans  leBeled  Hamdân: 
peu  d'édifices  restent  debout.  Tout  a  été  démoli  de  fond 
en  comble,  et  je  m'estime  heureux  d'avoir  pu  sauver  quel- 
ques fragments  épigraphiques.  Ce  sont  principalement  les 
environs  du  mont  Silyâm  qui  ont  donné  un  nombre  satis- 
faisant d'inscriptions.  On  peut  en  dire  autant  de  tout  l'es- 
pace qui  sépare  le  Djaouf  supérieur  du  Djaouf  inférieur. 
Le  nombre  des  ruines  qui  couvrent  la  plaine  au  long  du 
ouadi  Médeb  est  incalculable.  Outre  les  fréquents  tell  qui 
représentent  les  maisons  de  campagne  des  anciens  Sabéens, 
on  aperçoit  des  traces  de  villes  importantes.... 

Se  retrouvant  à  El-Ghayl  (dans  le  Djaouf  inférieur  )  le 
voyageur  entendit  les  Israélites  parler  d'une  ancienne  ville 
juive  nommée  Bérâkisch^  dont  ils  lui  faisaient  des  descrip- 
tions exagérées.  M.  Halévy  voulut  vérifier  par  ses  yeux. 
«  Quelle  ne  fut  pas  ma  surprise,  dit-il,  lorsqu'au  lieu 
d'un  hameau  juif  je  vis  les  restes  imposants  d'une  cité 
sabéenne,  et  justement  de  celle  que  je  cherchais  depuis 
longtempscommedevantêtre  la  troisième  ville  des  Minéens  *! 

1 .  Le  ouâdi  Me'tn,  dont  il  est  question  plus  haut,  est  contigu  au 

uigiuzeuoy  Google 


MAREB.  109 

Les  parties  du  mur  d'enceinte  encore  existantes  sont  litté- 
ralement couTertes  d'inscriptions  artistement  gravées.... 
Les  décombres  de  huttes  grossières  cachent  les  magnifiques 
restes  d'édifices  de  l'époque  antéislamique,  A  voir  les 
nombreux  débris  de  stèles  qui  gisent  partout,  on  ne  peut 
s'empêcher  de  penser  que  ce  devait  être  une  ville  religieuse 
par  excellence,  un  lieu  de  pèlerinage  pour  les  Sabéens. 
Dans  les  iuscriptions,  la  ville  porte  le  nom  i'Ytoul  ou  Itâly 
nom  qui  ne  parait  pas  avoir  été  connu  des  auteurs  grecs 
et  arabes.  La  place  est  k  une  demi-journée  à  Touest  d'El- 
Ghayl*. 

M.  Halévy  se  disposa  alors  à  visiter  le  territoire  célèbre 
de  Mareb,  dont  il  était  peu  éloigné.  L'antique  cité  de 
Mareb,  sur  laquelle  l'illustre  Niebuhr  recueillit,  il  y  a 
maintenant  un  siècle,  d'excellents  renseignements  indi- 
gènes, a  depuis  été  visitée  par  un  explorateur  européen, 
M.  Arnaud,  qui  en  a  rapporté  en  1843  une  moisson  d'ins- 
cçiptions  encore  inexpliquées  (voy.  le  Journ.  Asiat.  de  1845, 
t.  V  et  VI)  ;  la  richesse  môme  de  ce  résultat  du  voyage 
de  M.  Arnaud  était  une  puissante  incitation  pour  une 
nouvelle  tentative.  En  attendant  un  conducteur  qu'il  avait 
engagé,  M.  Halévy  parcourut  pour  la  seconde  fois  le 
ouâdi  Me'în.  Un  des  villages  qu'il  y  rencontra  porte  le 
nom  d'Inabâ  ;  une  conjecture  de  M.  Halévy  qui  nous  paraît 
heureuse  rapporte  ce  nom  à  Ylnapha  de  Ptolémée,  quoi- 
que par  un  de  ces  déplacements  dus  à  la  triste  méthode  du 
géographe  alexandrin  la  position  se  trouve  beaucoup  trop 
éloignée  dans  les  Tables  de  l'emplacement  qu'elle  devrait 
avoir  près  de  Mariaba, 

Du  ouâdi  Me'in  à  Mareb  la  distance  est  de  trois  journées 
faibles,  et  la  direction  au  sud.  Les  détails  descriptifs  de 

Djaouf  inférieur  où  se  trouve  El-Ghayl.  Cette  dernière  place  n'a  pas 
d'inscriptions ,  non  plus  que  ses  environs  immédiats. 

1.  Cette  indication  est  ainsi  donnée  dans  le  Rapport  (p.  85};  mais 
sur  la  carte  le  site  ruiné  est  marqué  au  nord  d'Ël-Ghayl. 

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110  ASIE.  (n~B5-97.) 

M.  Halévy  sur  la  vieille  cité  sabéenne  et  sur  la  digue  qui 
eu  est  voisiue  u'ajouteut  rieu  d'essentiel  aux  infor^iations 
de  Niebuhr  et  aux  notions  rapportées  de  visu  par  M.  Ar- 
naud :  nous  les  transcrivons,  toutefois,  à  cause  de  l'intérêt 
exceptionnel  de  ces  sites  historiques.  <  Ancienne  capitale 
du  royaume  sabéen,  Mareb  est  actuellement  détruite  de 
fond  en  comble,  à  Texception  de  la  partie  située  sur  la 
colline  qui  forme  la  ville  moderne  de  Mareb,  entourée 
d'un  mur  de  pierres  assez  solide.  La  ruine  qui  s'étend  le 
long  du  ouâdi  Ghibvân  ou  Dana,  autour  de  la  colline,  peut 
mesurer  environ  500  mètres  de  diamètre.  Au  milieu  des 
décombres  surgissent  de  nombreuses  colonnes  en  marbre, 
dont  la  plupart  sont  décapitées.  Elles  présentent  plusieurs 
faces  ;  la  forme  octogonale  domine,  et  la  forme  cylindrique 
est  des  plus  rares.  Sous  le  rapport  de  Tépigraphie,  Mareb 
est  loin  de  répondre  à  l'attente  de  l'investigateur  ;  mes 
recherches  ajoutent  peu  de  textes  à  ceux  qu'on  connaît 
déjà....  Il  faut  cependant  constater  que  les  circonstances 
ne  m'ont  pas  permis  de  faire  une  exploration  complète  du 
terrain  ;  je  n'ai  pas  même  pu  copier  les  stèles  que  j'avais 
entrevues  au  marché.  Un  futur  voyageur  pourra  avoir 
meilleure  chance.  La  (digue  est  située  à  trois  heures  de 
marche  à  l'ouest  de  Mareb,  à  l'entrée  de  la  vallée  étroite 
enfermée  entre  les  monts  Balaq  et  formant  le  lit  du  ouâdi 
Ghibvân  ou  Dana.  La  partie  conservée  dans  la  plaine  fait 
voir  les  restes  du  môle  avec  plusieurs  écluses.  Du  côté 
opposé,  c'est-à-dire  vers  le  sud-ouest,  on  signale  un  grand 
édifice  en  pierre  de  taille  d'une  admirable  construction, 
adossé  à  la  colline  et  s'appuyant  sur  un  roc  gigan- 
tesque....  » 

Là  se  termine  à  vrai  dire  le  voyage  d'exploration  épi- 
graphique  de  M.  Halévy.  Il  dut  renoncer  à  de  plus 
lointaines  excursions,  et  reprendre  le  chemin  de  la  côte 
qu'il  avait  suivi  en  venant.  De  Mareb  à  Sanâ,  il  longea, 
l'ayant  sur  sa  gauche,  un  des  deux  Khaoulân  (  le  plus 

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ARABIE  INTÉRIEURE.   SITES  ANCIENS.  lU 

méridional  )  que  l'on  connaît  dans  le  Yémèn.  Voici  ce  que 
M.  Halévy  rapporte  de  ce  canton  jusqu'à  présent  inexploré. 
«  Le  territoire  de  Khaoulân,  malgré  son  sol  très-accidenté, 
est  un  des  mieux  cultivés  de  l'Arabie^  et  les  villages  se 
suivent  k  peu  d'intervalle  ;  le  pays  abonde  en  céréales  et  en 
fruits,  n  parait  même  y  exister  un  bon  nombre  de  ruines  ; 
mais  les  habitants  se  distinguent  par  un  sauvage  fanatisme, 
nourri  par  la  foule  des  chérifs  qui  peuplent  plusieurs 
villages.  C'est  là  que  se  rassemblent  annuellement  les 
caravanes  de  pèlerinage  pour  la  Mecque....  » 

J'ai  tenu  à  donner  un  résumé  complet  de  cet  important 
voyage  de  M.  Halévy.  Quoique  les  explorations  géogra- 
phiques n'en  fussent  pas  Tobjet  essentiel  et  qu'elles  n'y 
aient  eu  qu'une  place  secondaire,  on  a  pu  voir  que  même 
sous  ce  rapport  elles  sont  d'une  importance  considérable, 
et  qu'on  en  peut  tirer  des  données  qui  apporteront  une 
amélioration  notable  à  cette  partie  de  la  carte  de  l'Arabie. 

Nous  n'avons  pas  à  nous  arrêter  à  la  deuxième  partie 
du  mémoire  de  M.  Halévy,  consacrée  au  déchiffrement 
provisoire  des  inscriptions  sabéennes  ;  néanmoins  nous  y 
trouvons  çà  et  là  des  remarques  bonnes  à  relever  pour  la 
géographie  comparée. 

Dans  l'inscription  n**  187  de  sa  collection  (  p.  497  ),  M. 
Halévy  lit  le  nom  d'une  tribu  de  Gaban,  qu'il  rapproche 
des  Gebanitœ  de  Pline.  H  est  question  dans  la  même  ins- 
cription des  rois  de  Me'în,  c'est-à-dire  des  Minaei,  un  des 
peuples  principaux  de  l'empire  sabéen. 

L'inscription  n**  192  lui  fournit  le  nom  de  la  ville  de  Qar- 
naou,  qu'il  rapproche  de  CamoUy  capitale  des  Minéens 
[Carna^  comme  écrit  Strabon,  ami  d'iÊlius  Gallus),  place 
que  Fulgence  Fresnel  avait  cru  retrouver,  d'après  les 
données  fournies  par  M.  de  Wrede,  dans  Al-Kam,  localité 
du  ouâdi  Doân,  au  nord  du  Hadramaut.  Toutes  ces  ques- 
tiens  restent  ouvertes  à  la  discussion  ;  mais  les  nouveaux 

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m  ASIE.  (n"  85-97.) 

faits  que  M.  Halévy  y  apporte  en  seront  de  précieux  élé- 
ments. 

L'inscription  280  mentionne  une  ville  de  Naschq,  dans 
laquelle  M.  Halévy  retrouve  Nesca^  une  des  places  miné- 
ejines  détruites  par  rexpédition  romaine.  La  localité  où 
l'inscription  a  été  trouvée  pourra  fixer  l'emplacement  de 
l'ancienne  cité.  Une  autre  inscription  (n<>  327  ),  relevée, 
comme  la  précédente,  à  El-Baydâ,  mentionne,  selon  la 
lecture  de  M.  Halévy,  le  roi  et  le  peuple  de  Kaminahou, 
«  le  Caminacum  de  Pline,  dit  le  voyageur,  chef-lieu  d'un 
petit  royaume  dépendant  de  Saba  et  détruit  par  iElius 
Gallus.  »  Nous  ne  voyons  pas  que  Pline  ait  mentionné  au- 
cun lieu  du  nom  de  Caminacum^  et  nous  ne  devinons  pas 
d'où  M.  Halévy  a  tiré  son  indication. 

Dans  l'inscription  504,  M.  Halévy  lit  le  nom  de  Qatabân 
(ville  ou  territoire),  qu'il  rapporte  aux  Catabani  que  les 
anciens  ont  connus  dans  le  S.  0.  de  l'Arabie,  et  que 
Strabon  place  vers  la  bouche  du  golfe  Arabique  (le  Bab-el- 
Mandeb).  Niebuhr  avait  déjà  rapproché  l'indication  de 
Strabon  du  district  de  Qdtaha^  avec  une  ville  du  même  nom, 
au  sud  de  Sana,  dans  la  direction  et  à  peu  près  à  mi-dis- 
tance du  golfe  d'Aden  (Descr.  de  V Arabie,  H,  p.  75)  ;  peut- 
être  cette  Qâtaba  duYémên,  et  la  Qatabân  de  l'inscription, 
ne  sont-elles  qu'une  seule  et  même  place.  La  découverte 
de  M.  Halévy  confirme,  dans  tous  les  cas,  les  textes  de 
Strabon  et  de  Pline,  et  rend  inutile  la  conjecture  de  M. 
Blau  {Zeitschr,  der  deutschen  Morgenl.  Gèsellsch.y  XXIV, 
1870,  p.  228),  qui  ^'après  une  variante  des  manuscrits 
proposait  de  lire  Gataphani  dans  le  texte  du  second  de  ces 
deux  écrivains,  en  vue  d'une  obscure  tribu  de  Gatafân. 


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ANATOLIE.  113 

m 

ANATOLIE. 

98.  De  Moltke.  Lettres  sur  rorient;  trad.  de  rallem.  Paris,  1872, 
gr.  in-18,  408  pages. 

Le  maréchal  de  Moltke,  alors  simple  officier  d*état-major  au  servie 
temporaire  de  la  Porte  avec  rautorisation  de  son  gouvernement,  a 
écrit  ces  lettres  de  1836  à  1839;  Toriginal  allemand  a  été  imprimé  à 
Berlin  en  1841.  M.  de  Moltke  concourut  dans  le  même  temps,  avec 
d'autres  officiers,  au  levé  de  plusieurs  parties  peu  connues  du  bassin 
de  l'Euphrate.  On  peut  voir  à  ce  sujet  notre  Description  de  l'Asie 
Mineure^  t.  II,  p.  803,  Paris,  1845. 

99.  G.  Perrot,  E.  Guillaume^  architecte^  et  J.  Delbet,  D'  en  mé- 
dec.  Exploitation  archéologique  de  la  Galatie  et  de  la  Bithy- 
nie....  24"  et  dernière  livraison.  Paris,  1872,  in-folio,  100  pages 
et  2  pi.  (la  livr.  6  fir.  25  c.  —  Didot). 

S  l".  M.  George  Perrot  et  son  ouvrage  monumental  sur  l'ancienne 
Galatie. 

M.  Perrot  vient  de  terminer  sa  grande  et  belle  publica- 
tion sar  la  Galatie.  Quoique  nous  ayons  suivi  d'année  en 
année,  dans  chacun  de  nos  précédents  volumes,  les  livrai- 
sons successives  de  ce  savant  et  magnifique  ouvrage  consa- 
cré à  une  des  provinces  les  plus  intéressantes  de  l'Asie 
Mineure,  nous  reproduisons  avec  un  vrai  plaisir  Taperçu 
résumé  que  M.  Waddington  en  a  donné,  en  présentant 
cette  24*  et  dernière  livraison  à  l'Académie  des  inscrip- 
tions. 

«  Les  auteurs  de  la  relation  furent  chargés  de  cette  explo- 
ration, d'après  les  ordres  de  l'empereur,  par  le  Ministère 
de  l'instruction  publique.  Leur  mission  datp  de  dix  années; 
elle  a  eu  des  résultats  importants  qui  font  honneur  à  la 
science  française.  M.  Perrot  s'est  occupé  de  la  rédaction  du 
texte  et  de  tout  ce  qui  touche  aux  recherches  d'érudition  ; 
M.  Guillaume  a  dessiné  les  monuments  et  levé  les  plans 
topographiques. 

l'année  OÉOGR.  XI.  8 

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114  ASIE.  (n"  98-99.) 

«  L'épigraphie  a  fourni  tme  ample  moisson  ;  les  textes 
nouveaux  ou  les  textes  déjà  connus,  relevés  avec  toute 
l'exactitude  désirable,  ont  abondé  surtout  en  Galatie. 
M*  Perrot  est  parvenu,  de  la  sorte,  à  donner  au  monde 
savant  une  série  plus  complète  des  légats  romains  de  cette 
province.  La  liste  qu'il  a  établie  ajoute  aux  noifîs  men- 
tionnés par  les  monuments  publiés  antérieurement  des 
personnages  importants.  L'histoire  et  la  chronologie  sont 
intéressées  à  ces  découvertes.  La  géographie  en  tirera  aussi 
profit.  M.  Waddîngton  cite  à  cet  égard  une  inscription  qui 
tranche  la  question  jusqu'ici  très-controversée  de  la  divi- 
sion administrative  de  la  Dacie.  Cette  province  comprenait 
trois  petits  gouvernements  procuratoriens. 

«  Les  travaux  les  plus  considérables  de  M.  Perrot  ont 
porté  sur  la  fameuse  inscription  du  temple  d'Ancyre,  con- 
nue sous  le  nom  de  Testament  d'Auguste  et  qu'il  faudrait 
appeler,  suivant  le  texte  latin,  Bes  yestœ  divi  Augusti  :  Ex- 
ploits  du  divin  Auguste.  Il  s'agissait  de  dégager  l'inscrip- 
tion des  constructions  qui  la  couvraient,  d'en  faire  une 
nouvelle  copie,  aussi  complète  et  exacte  que  possible,  et 
d'en  prendre  l'estampage  * . 

«  Grâce  aux.  recherches  et  aux  explorations  minutieuses 
de  M.  Perrot,  nous  avons  aujourd'hui  une  copie  et  un  es- 
tampage du  Testament  d'Auguste;  le  temple  d'Ancyre,  qui 
portait  cette  page  historique  de  première  importance,  puis- 
qu'elle est  pour  nous  la  source  la  plus  authentique  et  la 
plus  pure  où  nous  pouvons  puiser  pour  rétablir  la  biogra- 


1.  L'estampage  consiste  à  appliquer,  sur  la  surface  où  les  letties 
sont  gravées  en  creux,  un  papier  épais  préalablement  mouillé  ;  puis  à 
l'aide  d'une  brosse,  comme  s'il  s'agissait  d'obtenir  une  épreuve  typo- 
graphique, on  applique  exactement  sur  toutes  les  parties  du  monument 
la  surface  amollie  du  papier,  qui  prend  et  conserve  les  empreintes  en 
relief  ou  en  creux  du  morceau  de  pierre.  La  fidélité  de  ces  empreintes 
est  mathématique  ;  leur  conservation  est  indéfinie  ;  l'estampage  ainsi 
-  levé  peut  se  classer  dans  des  cartons  et  former  des  albums  aussi  pré- 
cieux pour  l'épigraphie  que  les  herbier»  pour  la  botanique . 


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ANCIENNE  GALATIE.  115 

phie  de  cet  empereur,  cette  page  est  maintenant  presque 
complètement  dans  nos  mains.  Je  dis  presque,  parce  qu'il 
nous  manque  encore  une  colonne  du  texte  latin,  la  neu- 
vième du  texte  grec  (l'inscription  est  bilingue)  qui  n'a  pu 
être  retrouvée.  U  est  à  désirer  que  de  nouvelles  fouilles 
nous  mettent  en  possession  de  ce  fragment^.  » 

Après  Ancyre,  l'exploration  de  MM.  Perrot  et  Guillaume 
se  dirigea  sur  l'ancienne  Pessinonte;  ils  dressèrent  un 
plan  détaillé  de  la  cité  galate. 

Malheureusement  pour  l'archéologie,  il  existe  dans  le 
voisinage  une  petite  ville  turque  dont  la  prospérité  provoque 
des  constructions  incessantes,  et  l'emplacement  de  Pessi- 
nonte est  devenu  une  sorte  de  carrière  d'où  Ton  extrait  des 
matériaux.  Les  marbres  les  plus  précieux,  les  antiquités 
les  plus  importantes  sont  ainsi  détruits  journellement  sans 
rencontrer  le  moindre  obstacle.  —  M.  Perrot  a  émis  le 
vœu  qu'on  envoyât  de  temps  en  temps  dans  ces  parages  de 
jeunes  savants  pour  recueillir  ou  conserver  ces  débris. 
M.  Waddington  croit  aussi  qu'il  y  aurait  intérêt  à  agir  de 
la  sorte. 

L'ancienne  Thalium,  dont  M.  Perrot  a  déterminé  avec 
rigueur  l'emplacement,  lui  a  fourni  peu  de  monuments  nou- 
veaux. Elle  était,  ce  semble,  le  centre  politique  d'une  tribu 
galate  inférieure  en  développement  et  en  civilisation  aux 
deux  tribus  congénères.  En  Gappadoce,  le  but  principal  des 
explorateurs  était  de  rapporter  des  dessins  fidèles  des  mo- 
numents. L'absence  de  ces  dessins  causait  des  incertitudes 


1.  M.  Beulé  a  expliqué  comment  cette  lacune  existe.  U  fallait,  pour 
dégager  rinscription,  démolir  les  constructions  modernes  qui  la  mas- 
quaient. On  n'en  obtenait  l'autorisation  qu'à  la  condition  de  recon- 
struire aussitôt  ce  qu'on  avait  démoli.  C'est  donc  par  fragments  isolés 
qu'on  a  relevé  le  texte.  Les  opérations  terminées,  on  s'est  aperçu  qu'on 
avait  omis  un  des  'fragments;  on  a  essayé  alors  de  pénétrer  de  nou- 
veau à  Vendroit  désigné;  mais  on  s'est  heurté  à  un  refus  obstiné  du 
Turc  propriétaire  de  l'immeuble  adossé  à  la  partie  qu'il  s'agissait  de 
revori. 


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116  ASIE.  (n*  98-99.) 

et  des  tâtonnements;  elle  détournait  la  plupart  des  numis- 
matistes  et  des  ëpigraphistes  de  l'étude  approfondie  des 
monuments.  MM.  Perrot  et  Guillaume  ont  satisfait  ample- 
ment à  ce  besoin.  Il  résulte  clairement  des  reproductions 
consignées  dans  leur  ouvrage,  que  la  Gappadoce  fut  soumise 
dans  Tantiquité  à  l'influence  assyrienne  ;  les  traces  de  cette 
influence  sont  désormais  incontestables,  évidentes.  La  con- 
clusion à  laquelle  nous  conduisent  le3  recherches  de 
M.  Perrot  et  les  dessins  de  M.  Guillaume  était  d'ailleurs 
indiquée  par  les  anciens  historiens  ;  on  avait  fait  trop  bon 
marché,  comme  il  arrive  souvent,  de  leur  témoignage.  Hé- 
rodote, auquel  il  faut  toujours  revenir  dans  les  questions 
ethnologiques,  avait  donc  eu  raison  d'écrire  que  les  indi- 
gènes de  la  Gappadoce,  ou  du  moins  d'une  partie  de  cette 
contrée,  étaient  des  Leupo-Phrygiens ,  c'est-à-dire  des 
Phrygiens  blancs,  en  un  mot  des  Sémites.  Une  monnaie 
d'un  satrape  de  Gappadoce,  frappée  à  Sinope,  nous  pré- 
sente en  effet  une  légende  en  caractères  araméens;  or,  il 
est  vraisemblable  que  la  légende  était  faite  pour  être  lue  et 
comprise  en  Gappadoce.  On  en  conclut  logiquement  qu'à 
l'époque  d'Alexandre,  les  Gappadociens  se  servaient  de  l'al- 
phabet araméen  et  parlaient  un  idiome  sémitique. 

M.  Waddington  signale  enfin  les  recherches  de 
MM.  Perrot  et  Guillaume  sur  l'art  phrygien,  sur  les  tom- 
beaux d'Âmasie  et  le  champ  de  bataille  de  Zéla,  où  Phar- 
nace  fut  vaincu  par  les  légions  romaines.  Il  termine  en 
félicitant  les  auteurs,  non-seulement  du  soin  et  de  la  persé- 
vérance qu'ils  ont  apportés  dans  leur  travail,  mais  encore 
de  l'heureux  exemple  qu'ils  ont  donné  en  déposant  leurs 
estampages  dans  la  bibliothèque  de  l'Université.  Entre  les 
mains  d'un  épigraphiste  tel  que  M.  Léon  Renier ,  leur 
classement,  leur  conservation,  le  profit  qu'on  en  retirera 
pour  les  recherches  et  les  vérifications  ultérieures  «ont  dé- 
sormais assurés.  Il  faut  souhaiter  que  l'exemple  soit  suivi, 
et  que  nos  établissements  publics  s'enricjiissent  de  collée* 

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LE   SITE   DE  TROIE.  117 

tions  analogues.  Elles  serviront  de  contrôle  aux  résultats 
acquis;  elles  deviendront  une  mine  précieuse  pour  les  sa- 
vants à  venir. 


S  2.  Le  site  de  Troie.  M.  Schliemann  et  ses  foailles. 

Nous  avons  précédemment  fait  connaître  les  intéressants 
voyages  archéologiques  de  M.  Henry  Schliemann  aux  lieux 
consacrés  par  les  deux  poèmes  d'Homère  {Année  géogr.^ 
t.  Vni,  1870,  p.  364);  et  en  exprimant  notre  sympathie 
pour  le  caractère  et  les  travaux  du  voyageur,  nous  ayons 
cependant  fait  nos  réserves  quant  à  ses  vues  sur  le  site  de 
Troie.  Avec  une  ardeur  qui  l'honore  et  que  rien  ne  décou- 
rage, M.  Schliemann  poursuit  ses  fouilles  dans  les  champs 
de  la  Troade.  Il  en  a  transmis  les  premiers  résultats  à  l'A- 
cadémie des  inscriptions,  en  réclamant  l'opinion  de  la 
savante  compagnie.  Voici  celle  '^ue  M.  Ern.  Renan  a  ex- 
primée au  sein  de  l'Académie  :  «  J'ai  reçu,  ainsi  que  notre 
confrère,  M.  Brunet  de  Presle,  plusieurs  communications 
de  M.  Schliemann,  relativement  aux  fouilles  qu'il  a  entre- 
prises à  Issarlik,  sur  les  hauteurs  qui  bordent  la  plainede 
Troie.  Jusqu'ici  nous  avons  cru,  en  présence  des  indica- 
tions qui  nous  étaient  transmises  et  qui  ne  comportaient 
aucun  résultat  bien  sérieux,  devoir  attendre  que  les  fouilles 
fussent  achevées  pour  en  entretenir  l'Académie.  Mais 
M.  Schliemann  iasiste  pour  que  la  communication  ait  lieu 
sans  délai.  D'autre  part,  les  journaux étrange]:s,  notamment 
la  Gazette  d'Augshourg^  se  sont  occupés  des  recherches  et 
des  découvertes  de  M.  SchUemann,  et  il  n'est  pas  inutile 
d'en  dire  notre  avis. 

«  M.  Schliemann  est  un  archéologue  doué  d'un  zèle  sans 
bornes,  mais  auquel  la  critique  fait  plus  défaut  que  la  bonne 
volonté.  Il  professe  pour  les  documents  homériques  un 
respect  qui  le  porte  à  les  considérer  comme  des  écrits  his- 
toriques d'une  exactitude  et  d'une  vérité  absolues»  H  faut 

uigiiizeu  uy  -<_«  v^  v^ -c  i >- 


118  ASIE.  (n*«  100-105.) 

saDs  donte  l'encours^er  dans  les  entreprises  qui  ont  pour 
but  ravancement  de  la  science  ;  mais  il  n'est  pas  inutile 
de  contrôler  ses  assertions  et  de  se  défier  de  ses  conjec«- 
tures.  » 


rv 

CAUCASE.   ARMÉNIE. 

KURDISTAN. 

100.  B.  DoRN.Auszûge  aus  zwei  morgenlândischen  Schriftelleni,be- 
treffend  das  Kaspische  Meer  und  angrànzende  lAnder,  Bulletin 
de  l*Acad.  impér,  de  St-Pétersh.,  t.  XVI,  n"  1,  mars  1871, 
p.  15-41. 

101.  De  Villeneuve.  La  Géorgie.  Ouvrage  publié  par  M.  F.  R.  Des 
Ayes,  avec  introduction.  Illustré  des  armes  royales  de  Géorgie. 
PariSj  1870,  in-12,  224  pages. 

Esquisse  historique.  Nul  pour  la  géographie. 

102.  A.  CuNYNGHAME.  Travcls  in  the  Eastem  Caucasus  and  the 
Gaspian  and  Black  seas,  especially  in  Dagestan,   and  on  the 

•     frontiers  of  Persia  and  Turkey,  1871.  Lond.,  1872,  in-8%  Maps 
and  illust.,  18  sh.  (Murray). 

103.  Aug.  H.  MouNSEY.  A  journey  through  the  Caucasus  and  the 
interior  of  Persia.  Lond,,  1872,  in-8",  14  sh.  (Smyth). 

104.  D'  G.  Radde  und  D'  G.  Sievers.  Reisen  im  armenischen  Hoch- 
land,  1871.  Mittheil.  dePetermann,  1872,n«  10  et  n»  12,  p.  367- 
380,  445-450, 

Il  y  a  aussi  une  lettre  de  M.  Raddé  sur  ce  voyage  au  n»  6  des  Mit- 
theilungen^  p.  206-209. 


106.  The  late  Rev.  Sam.  A.  Rhea.  Brief  Grammar  and  Vocabulary 
of  the  Kurdish  language  of  the  Hakari  dialect.  Joum.  of  the 
Amer,  Oriental  soc,  vol.  X,  n»  1,  p.  118-155.  New  Haven,1872, 


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PERSE.  119 


PERSE. 

106.  Major  B.  Lovbtt.  Survey  of  the  Perso-Kelat  frontier.  Proeee- 
dings  of  the  Roy,  Geogr.  soc.,  yol.  XVI,  n»  3,  p.  219-222, 1872. 

—  Du  môme  :  Route  from  Shiraz  to  Bam.,  Ibtd.,p.  261-264. 

107.  Major  E.  C.  Ross.  Report  on  a  journey  through  Mekran  (1865). 
/&i(i.,  XVI,  n°  2,  p.  13W41. 

Il  7  a  de  bonnes  indications  topographiques. 

108.  B.  DoRN.  Bamerkungen  zur  Géographie  Persiens.  Bulletin  de 
VAcad.  de  St-Pétersb,  t.  XV,  n»3,  nov.  1870,  p.  263-268. 

Remarques  sur  le  mémoire  de  M.  Mordtmann  sur  Hecatompylos 
{Sitzungsberichte  der  K.  Bayer.  Ahaâ.  1869,  oah.  4,  p.  499).  Discus- 
sion de  plusieurs  points  de  géographie  comparée  :  ReccUompyloSi 
Semina^  Comiseney  Zadrojoarta,  TagaSt  etc. 

• 

109.  Jul.  Oppert.  Sur  le  site  de  l'anciemie  "Pasar godas.  Journal 
Asta^,  juin  1872,  p.  548-555. 


S  1*^  Reconnaissance  de  la  frontière  E.  et  S.  E.  de  la  perse  par  des  officiers 
anglais  du  corps  du  génie. 


Bes  explorations  étendues  ont  été  faites  depuis  quelques 
années,  notamment  en  1870  et  1 87 1 ,  par  des  officiers  anglais 
dans  les  parties  sud-est  de  la  Perse.  Ces  explorations  ont 
eu  sûrement  pour  point  de  départ  des  études  prélimi- 
naires se  rattachant  à  la  pensée  d'une  ligne  de  chemin  de 

.fer  entre  la  Perse  occidentale  et  l'Inde;  mais  elles  ont  pris 
par  suite  le  caractère  quasi  diplomatique  d'un  règlement  de 
la  frontière  persane  du  côté  du  Balouchistân  et  de  l'Afgha- 
nistan. Quelques  communications,  encore  très-succinctes, 
ont  été  faites  à  ce  sujet  au  sein  de  la  Société  de  géographie 
de  Londres;  le  passage  suivapt  de  l'adresse  de  sir  Henry 

.  BawlinsoA  à  la  Société,  dans  la  séance  d'ouverture  de  la 


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^ 


120  ASIE.  (n°' 106-109.) 

session  de  1871-72  (13  novembre  1871),  fournit  d'utiles 
indications: 


En  Perse,  des  progrès  importants  s'effectuent  dans  les  explo- 
rations géographiques.  Une  reconnaissance  de  la  ligne  fron- 
tière entre  le  territoire  persan  et  Kélat  a  déjà  été  faite  sous 
les  ordres  de  sir  Frederick  Goldsmid,  et  le  capitaine  Saint-John 
est  au  moment  de  partir  de  Tehran  pour  le  Mékran,  afin  d'éta- 
blir une  carte  régulière  de  cette  région  jusqu'à  présent  presque 
inexplorée.  M.  Goldsmid  lui-môme,  ayant  avec  une  très-grande 
habileté  conduit  heureusement  à  terme  la  tâche  préliminaire 
d'amener  les  autorités  persanes  et  balouches  à  accepter  le  rè- 
glement d'une  ligne  frontière  régulièrement  déterminée  entre 
leurs  territoires  respectifs,  est  revenu  en  Angleterre  rendre  un 
compte  détaillé  de  ses  opérations,  et  il  est  maintenant  sur  le 
point  de  retourner  en  Orient  exercer  un  arbitrage  de  môme  na- 
ture entre  la  Perse  et  le  gouvernement  afghan.  Gomme  il  est 
accompagné  du  capitaine  Lovett,  du  corps  des  ingénieurs,  qui 
a  (^éjà  fait  des  relevés  topographiques  dans  le  Mékran,  nous 
pouvons  nous  attendre  à  ce  que,  dans  le  cours  du  printemps 
de  1873,  non-seulement  la  carte  du  Seïstan  aura  été  levée  scien- 
tifiquement, mais  que  l'on  ait  sur  toute  la  Perse  orientale  des 
notions  exactes  et  précises.  Il  est  probable  aussi,  les  projets 
d'un  chemin  de  fer  entre  TEurope  et  Tlnde  prenant  un  caractère 
de  plus  en  plus  positif,  que  bien  des  parties  peu  connues  des 
territoires  intermédiaires  serontrobjet  d'opérations  géodésiques, 
et  que  de  grandes  améliorations  seront  ainsi  apportées  aux  car- 
tes de  la  Turquie  d'Asie  et  de  la  Perse. 


Les  opérations  antérieures  du  capitaine  Lovett  sur  la 
frontière  et  dans  quelques  parties  du  Mékran,  auxquelles  le 
président  de  la  Société  de  Londres  vient  de  faire  allusion, 
ont  été  le  sujet  d'une  communication  au  sein  de  la  Société 
(ci-dessus,  n°  1 06)  ;  et  cette  communication  elle-même  a  donné 
lieu,  tant  de  la  part  du  président  que  de  plusieurs  membres 
présents,  à  des  remarques  qui  ont  de  l'intérêt  pour  la  géo- 
graphie du  pays  balouche,  qui  représente,  comme  on  sait, 
l'ancienne  Gédrosie.  M.  Rawlinson  retrace  un  aperça  suc- 
cinct des  reconnaissances  partielles  qui  ont  été  faites  dans  le 

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Lfc  MÉKRAN.  121 

Balouchistan,  reconnaissances  qui  ne  datent  que  du  voyage 
de  MM.  Pottînger,  Grant  et  Ghiistie  en  1810.  Ces  officiers, 
malheureusement,  ne  restèrent  pas  assez  longtemps  dans 
le  pays  pour  en  prendre  une  connaissance  intime  et  en  dé- 
terminer les  traits  caractéristiques.  Ainsi,  la  dépression 
remarquable  entre  deux  chaînes  parallèles  qui  se  prolongent 
si^r  une  longueur  de  3  à  400  milles,  ne  paraît  pas  avoir  at- 
tiré leur  attention,  quoiqu'il  y  ait  lieu  de  croire  que  c'est 
cette  vallée  longitudinale  qui  fut  suivie  par  Alexandre  quand 
il  ramena  son  armée  des  bords  de  l'Indus  au  golfe  Persi- 
que.  L'armée  arabe  qui' envahit  le  Sindhi  suivit  certaine- 
ment la  même  ligne  ;  car  on  pourrait  encore  identifier  une 
partie  des  stations,  dont  les  noms  n'ont  pas  changé  depuis 
1200  ans.  Dans  les  discussions  récentes  auxquelles  ontdonné 
lieu  les  lignes  proposées  pour  le  chemin  de  fer  de  Tlnde,  il 
a  été  souvent  fait  allusion  à  cette  vallée  comme  à  une  sorte 
de  lit  naturel  pour  un  chiemin  de  fer.  Cette  région  porte  à 
présent  le  nom  de  Mékrân,  nom  qui  très-probablement  (?) 
dérive  de  l'ancienne  tribu  de  Maka  nonmiée  dans  les  inscrip- 
tions cunéiformes.  Le  pays  était  alors  appelé  Gédrosie,  dé- 
nomination dont  rétymologie  est  inconnue. 

M.  Bartle  Frère  a  fait  observer  que  pour  beaucoup  de  ceux 
qui  cherchent  à  se  rendre  compte  de  la  configuration  du  pays, 
c'est  un  grand  sujet  d'étonnement  de  voir  que  les  villes 
semblent  se  déplacer  et  se  porter  de  çà  et  de  là.  Gela  pro- 
vient de  ce  qu'en  nombre  de  cas,  si  la  petite  vérole  se  dé- 
clare, par  exemple,  ou  s'il  perd  un  de  ses  enfants  ou  une 
pièce  de  bétail,  un  chef  mettra  le  feu  aux  huttes  en  bran- 
chages dont  sa  capitale  se  compose,  et  la  portera  sur  un  au- 
tre point  ;  si  bien  qu'à  moins  que  sa  ville  ne  soit  fixée  par 
quelque  circonstance  particulière,  comme  un  rocher  sur  le- 
quel sa  forteresse  soit  placée,  il  se  pourra  qu'elle  soit  trans- 
portée dans  un  circuit  peut-être  de  8  à  10  milles. 

Nous  ferons  remarquer  que  le  sujet  que  nous  touchons 
ici,  —  la  géographie  du  Mékran  et  les  premières  opérations 

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122  .     ASIE.  •  (n^  106-109.) 

des  ingénieurs  anglais,  —  a  déjà  été- mentionné  au  tomeYII 
de  V Année  géographique  (1868),  p.  148  et  suiv.,  n<*  123  à 
125.  Nous  y  avions  noté  deux  morceaux  du  major  Ross 
imprimés  à  Earatchî  en  1865,  et  dont  cette  année  seule- 
ment un  court  résumé  a  été  inséré  dans  le  Proceedings  (ci<- 
dessus,  n*  107).  M.  Ross,  dans  ce  résumé,  donne  une  idée 
générale  de  la  configuration  intérieure  du  Mékran  et  de  ses 
deux  longues  vallées  parallèles  (demmok  en  balouchî)  si- 
gnalées dans  l'adresse  de  sir  Henry  Rawlinson  d'après  ce 
document,  configuration  dont  on  ne  trouve  pas  trace  dans 
la  carte  construite  par  M.  Ed.  Weller  pour  la  Note  du  ma- 
jor Goldsmid,  au  37<»  volume,  p.  269,  du  journal  de  la  So- 
ciété de  géographie  de  Londres. 

S  2.  Quelques  notes  de  géographie  ancienne. 

Il  y  a  de  bonnes  indications  à  recueillir  pour  la  géogra- 
phie classique  dans  les  Remarques  de  M.  Dom  «  sur  la 
géographie  de  la  Perse  »  {n°  108).  M.  Jules  Oppert,  l'assy- 
riologue,  a  lu  à  la  Société  asiatique  de  Paris  un  mémoire 
assez  étendu  et  quelque  peu  diffus  sur  l'emplacement  de 
Pasargadse  (n®  109),  pour  lequel  il  n'admet  pas  Tidenlifica- 
tion  universellement  reçue  du  voisinage  de  Mourghâb.  Ses 
raisons  demanderaient  toute  une  discussion  d'une  nature 
trop  spéciale  pour  que  nous  puissions  l'aborder  ici;  disons 
seulement  que  les  notations  de  Ptolémée  sur  lesquelles  il 
s'appuie  sont  une  base  plus  que  fragile.  Toutefois  le  mé- 
moire de  M.  Oppert  contient  de  savants  aperçus,  et  méri- 
terait, nous  le  répétons,  une  discussion  contradictoire.  C'est 
une  question  réservée.  M.  Oppert  croit  pouvoir  porter  Pa- 
sargades  à  Qal'a-i-Dârâ,  à  50  kilomètres  de  la  ville  deForg, 
conséquemment  h,  plusieurs  journées  de  Mourghâb  dans  le 
sud-est. 


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INDE.  123 


VI 


INDE. 


110.  G.  Latham.  Nouvelle  route  de  Flnde  à  travers  TArabie  turque; 
trad.  d'Éd.  Simon.  Mémoires  et  travaux  de  la  Soc.  des  Ingé- 
nieurs civils,  avril-juin  1871,  p.  171-197. 

Ul*  J.  Garbett.  a  classical  Dictionary  of  Indîa,  illustrative  of  the 
Mythology,  Philosophy,  Literature,  Antiquities,  Arts,  Manners, 
Customs,  etc.,  of  the  Hindus.  Lond.,  1872,  in-8*',  x-792  p. 
(Trùbner). 

112.  Edm.  C.  P.  Hdll.  The  European  in  India;  or  Anglo-Indian's 
Vade-Mecum.  A  Handbook  of  useful  and  practical  information 
for  those  proceeding  to,  or  residing  in  the  East  Indies.  Lond,, 
1871,  in-8«,  300  p.  6sh.  (King). 


113.  Col.  H.  YuLE.  Notes  on  Hwen  Thsang's  account  of  the  Principa- 
lities  of  Tokhâristân,  in  which  some  previous  geographical 
identifications  are  reconsidered.,  Lond.,  1871,  in-S',  29  pages, 
avec  une  carte.  (Extrait  anticipé  du  journal  of  the  Roy.  Asiat. 
soc.) 

Le  savant  écrivain,  mettant  à  profit  les  nouvelles  informations  ac- 
quises dans  ces  derniers  temps  sur  le  Badakchân,  les  hautes  vallées 
de  roxus,  et  en  général  sur  les  contrées  qui  bordent  au  nord  la  chaîne 
de  THindou-kôh,  soumet  à  un  nouvel  examen  Içs  identifications  que 
nous  avons  établies  ou  proposées  il  y  a  douze  ans  pour  cette  partie  de 
ntînéraire  du  pèlerin  chinois  Hiouen-Thsang,  aller  et  retour  (Mé- 
moire Mialytique  sur  la  carte  de  VAsie  centrale  et  de  l'Inde,  con- 
struite d'après  le  Si-yu-ki  et  les.  autres  relations  chinoises  des  pre- 
miers  siècles  de  notre  ère,  pour  les  voyages  de  Hiouen-Thsang  dans 
VInde,  depuis  Vannée  629  jusqu'en  645,  par  M.  Vivien  de  Saint-Martin  ; 
formant  un  appendice  de  la  traduction  des  Mémoires  de  Hiouen- 
Thsang  par' M.  Stanislas  Julien,  t;  II,  1858,  ou  à  part,  in-8*,  178  pages 
avec  carte),  et  après  nous  par  M.  Alex.  Canningham  (Ihe  ancient 
geography  of  ïndia^  Lond.,  1871,  in-S").  Nous  n'accepterions  pas  sans 
réserves  tous  les  rapprochements  nouveaux  suggérés  par  le  savant 
critique,  et  en  somme  tous  les  jalons  essentiels  que  nous  avons  posés 
dans  notre  mémoire  pour  le  tracé  de  l'itinéraire  chinois  subsistent  ; 
mais  il  est  certain  qu'avec  les  nouveaux  moyens  de  comparaison  que 
Ton  possède  actuellement,  notre  travail  ne  pourrait  que  gagner  à  être 
repris  à  fond  pour  cette  partie  ;  C'est  une  tAche  que  nous  pourrons 
aborder  dans  un  moment  où  les  travaux  que  nous  avons  maintenant  à 
mener  à  terme  nous  laisseront  plus  de  loisir  :  les  observations  du.colo- 
nel  Yule  nous  y  seront  d'un  précieux  secours.  Nous  nous  plaisons  dès 
aujourd'hui  à  rendre  hommage  à  la  judicieuse  remarque  qui  lui  a  fait 


y  Google 


124  ASIE.  (^'^  110-152.) 

assimiler  à  une  joarnée  de  marche  l'expression  cent  li  si  habituelle 
chez  le  voyageur.  Cette  interprétation  éclaircit  et  simplifie  de  la  ma- 
nière  la  plus  heureuse  nombre  des  passages  de  la  relation. 

114,  Edw.  Thomas.  The  revenues  resources  of  the  Mughal  Empire  in 
India,  from  A.  D.  1593  to  A.  D.  1707  :  a  Supplément  to  the 
Chronicles  of  the  Pathan  kings  of  Delhi.  Lond.,  1872,  in-8«, 
60  p.  3  sh.  6  d.  (Trûbner). 

115.  W.  M.  ToRHENS.  Our  empire  in  Asia  :  how  we  came  by  it.  A 
book  of  confessions.  Lond,,  1872,  in-8*,  426p.  14  sh.  (Trûbner). 

Voir  les  développements,  ci-après,  S  5. 

U6.  Major  gênerai  sir  George  Le  Grand  Jacob.  Western  îndia  before 
et  during  the  mutinies.  Pictures  drawnfrom  life.  Lond,^  1871, 
in-8%  7  sh.  6  d.  (King). 

117.  H.  Griffin.  The  rajas  of  the  Punjab,  being  the  history  of  the 
principal  states  in  the  Punjab,  and  their  political  relations  with 
the  British  government.  Lahore,  1870,  in-8%  viii-18-662-xnT 
pages. 


118.  Col.  J.  T.  Walker.  General  Report  on  the  opérations  of  the 
Great  Trigonometrical  Survey  of  India,  during  1869-70.  Roorkee^ 
1870,  in-4°,  113  pages,  avec  5  cartes. 

Depuis  que  les  directeurs  de  la  grande  triangulation  de  l'Inde  ont 
pris  la  fructueuse  détermination  de  faire  explorer  par  des  indigènes, 
dressés  à  la  pratique  des  observations,  les  contrées  limitrophes  du 
nord  et  du  nord-ouest  de  Tlnde,  difficilement  et  périlleusement  acces- 
sibles aux  Européens,  les  rapports  annuels  de  la  Triangulation,  où 
sont  consignés  les  résultats  de  ces  explorations  complémentaires,  en 
reçoivent  un  haut  degré  d'intérêt  géographique.  Le  rapport  de  cette 
année  contient  l'exposé  fort  important  du  voyage  d'un  Persan  déjà 
précédemment  employé  dans  les  opérations  géodésîques  de  l'Inde,  et 
qui  n'est  désigné  que  sous  la  dénomination  de  Mirza.  Son  voyage  l'a 
conduit  de  Kaboul  à  Kachgar  par  le  Badakchàn  et  le  plateau  de  Pa- 
mir. Nous  y  reviendrons  plus  loin  d'une  manière  spéciiûe,  dans  la  sec- 
tion consacrée  au  Turkestan. 

119.  Major  T.  G.  Montgomerie.  General  Report  on  the  opérations  of 
the  Great  Trigonometrical  Survey  of  India,  during  1870-71. 
Dehra  Doon,  1871,  in-4*,  103  pages,  avec  7  cartes. 

Les  remarques  précédentes  s'appliquent  également  à  ce  Rapport.  Lo 
voyage  indigène  dont  il  contient  l'exposé  et  les  résultats  géographi- 
ques est  celui  duHavildar,  ou  sapeur  du  génie,  qui  est  allé  de  Peîchavèr 
au  Badakchàn  par  Tchitral.  Nous  y  reviendrons  également  dans  notre 
section  du  Turkestan. 


120.  D.  Brandis.  On  the  distribution  of  forests  in  India.   Océan 


yGoogk 


INDE.  125 

Highways  ;  the  Geographical  Record,  edited  &y  Cl.  R.  Markham. 
Octob.  1872,  p.  200-206. 

Cet  article  est  un  véritable  mémoire,  et  un  mémoire  d'une  grande 
importance  pour  l'étude  physique  et  climatologique  de  la  Péninsule 
hindoue. 

121.  Capt.  J.  Forsyth,  Bengal  staff  corps.  The  Higblands  of  Cen- 
tral India;  notes  on  their  forests  and  wild  tribes,  natural 
liistory,and  sports.  Lond,,  1871,  in-8*,  with  map  and  illustr. 
(Ghapman). 

Livre  d'une  haute  valeur  pour  l'ethnographie,  l'histoire  naturelle  et 
la  géographie  de  Vïn^.  La  beauté  de  l'exécution  et  des  accessoires 
répond  à  l'importance  de  l'ouvrage.  —  Voir  ci-après. 

122.  Wilton  Oldham.  North-Western  Provinces.  Historical  and  sta- 
tistical  Memoir  of  tbe  Ghazeepoor  district.  Part  1.  Allahabad, 
1870,  in-f»,  6-4-120-xxin-vin  pages;  cartes.  (Lond.,  Trûbner). 

Ce  volume,  plein  de  faits,  est  le  premier  spécimen  d'une  série  de 
rapports  descriptifs  entrepris  par  ordre  de  l'administration  supérieure, 
et  qui  doivent  embrasser  successivement  chacun  des  districts  des  Pro- 
vinces du  Nord-Ouest,  c'est-à-dire  tous  les  territoires  du  bassin  du  Gange 
(et  peut-être  du  Pendjab),  composant  la  Présidence  du  Bengale,  il  est 
présumable  que  les  deux  autres  Présidences  de  l'Inde  sont  ou  seront  ' 
l'objet  d'une  mesure  analogue.  J'ignore  si  le  rapport  de  M.  Westland 
sur  le  district  de  Jessore,  dont  je  ne  connais  que  le  titre  (ci-après, 
n»  137],  appartient  à  la  même  série.  Une  telle  entreprise,  dans  ses 
proportions  colossales,  ne  peut  être  conduite  à  terme  que  par  les 
ressources  et  la  volonté  persistante  d'un  gouvernement.  —  Vojez  ci- 
après,  aux  développements,  $  l", 

123.  W.  W.  HuNTER.  Annals  of  rural  Bengal.  Lond.,  1872,  in-8»,  xvi- 
475  pages.  5*  édit. 

Ouvrage  capital  pour  l'histoire  ethnologique  et  sociale  de  l'Inde.  La 
première  édition  est  de  1868.  —  Voir  ci -après. 

124.  Du  même  :  Orissa;  or,  the  vicissitudes  of  an  indian  province 
under  native  undbrilisb  rule.  Lond, y  1872,  2  vol.  in-8'>. 

Cet  ouvrage  forme  le  complément  du  précédent. 

125.  Du  môme  :  The  indians  Musalmans.  Lond.,  1872,  in-8%  220  p. 
10  sh.  6  d.  (Trtlbner). 

126.  Du  même  :  Guide  to  the  orthography  of  indian  proper  names; 
with  a  list  showing  the  true  spelling  of  ail  post  towns  and  vil- 
lages in  India.  Calcutta,  1871,  in-f",  159  pages, 

127.  Rev.  M.  A.  Sherring.  Hindu  tribes  and  castes  as  represen- 
ted  in  Benares.  Lond.,  1872,  in-4%  xxiii-405  pages;  2  1.  8  sh. 
(Trûbner). 

J28.  EsQUER,  président  du  tribunal  de  Pondichéry.  Essai  sur  les  castes 
dans  l'Inde.  Pondichéry,  1870,  iu-8%  500  pages. 


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126  ASIE.  (n- 110-152.) 

—  Rapport  sur  cet  ouvrage  fait  à  la  Société  de  géographie  de 
Paris,  par  M.  Vivien  de  Saint-Martin.  Bulletin  de  la  Société, 
novembre  1872.  (Voir  ci-après,  aux  développements.) 


129.  Rev.  W.  A.  Butler.  The  land  of  the  Veda  :  being  personal  ré- 
miniscences of  India.  iVeto  York,  1872,  in-8»,  550  pages,  carte. 
20  sh. 

130.  Ed.  Braddon.  Life  in  India  :  a  séries  of  sketches  showing  so- 
mething  of  the  Anglo-Indian,  the  land  he  lives  in,  and  the 
people  among  whom  he  lives.  lond, ,  1872,  in-8%  350  p.  9  sh. 
(Longmans).  * 

131.  Gapt.  A.  F.  P.  Hargourt.  Bengal  staff  corps.  On  the  Himalayan 
valleys.  Kooloo,  Lahoul.  and  Spiti.  Journal  of  the  Roy,  Geogr . 
soc,  vol.  XLI,  1871,  p.  245-257.  Map. 

Notes  recaeillies  pendant  une  course  en  I8689  sur  les  traits  physi- 
ques, le  climat  et  les  productions,  et  sur  le  peupla  des  trois 
vallées. 

132.  Will.  T.  Blanpord.  Account  of  a  visit  to  the  eastem  andnorthern 
frontiers  of  independent  Sikkim,  with  notes  on  the  zoology  of 
the  alpine  and  subalpine  régions.  Journal  of  the  Asiatic  society 
of  Bengal,  1871,  Part  2,  p.  367-420;  with  map. 

133.  S.  E.  Peal.  Notes  on  a  visit  to  the  tribes  inhabiting  the  hills 
south  of  Sïbsâgar,  Asam.  Journal  of  the  As.  soc,  of  BengtU, 
1872,  Part  1,  p.  9-31. 

134.  J.  M.  Foster.  Note  on  Gargâon,  Asâm.  Ihid,,  p.  32-41. 

135.  H.  Blochmânn.  Koch  Bihâr,  Koch  Hâjo,  and  Asâm,  in  the 
XVP"»  and  XVII*  centuries,  according  to  the  Akbàrnàmah, 
the  Pàdishàhnàmah,  and  the  Fathiyah  i  'Ibriyah.  Ibid.,  p.  49- 
101.    ■ 

136.  H.  L.  Jenkins.  Notes  on  a  trip  across  the  Patkoi  range,  from 
Assam  to  the  Hookoong  valley.  Journal  of  the  Roy,  Geogr,  soc, 
vol.  XLI,  1871,  p.  342-348;  map. 

La  chaîne  des  monts  Patkoî  couvre  au  sud  PAssam  oriental,  qu'elle 
sépare  du  Barmà.  D'après  les  indications  du  D' ûriffith,  qui  n'avait  vu 
qu'une  portion  de  ces  montagnes,  on  s'était  formé  Topinion  qu'elles 
constituent  une  barrière  formidable  entre  cette  extrémité  de  l'Inde  et  le 
bassin  da  haut  Iràvadi  par  lequel  on  pénètre  ici  sur  les  terres  de 
l'empire  Barmà  ;  tandis  que  les  informations  recueillies  par  M.  Jenkins 
de  la  bouche  des  indigènes  tendraient  à  établir,  au  contraire,  qu'il  s'y 
trouve  plusieurs  passes  d'une  élévation  médiocre.  Au  total,  cette  région 
très-peu  connue  attend  encore  une  exploration  régulière,  quoique  la 
carte  des  monts  Garo,  au  sud  de  l'Assam,  ait  été  faite  récemment  par 
les  ingénieurs  de  la  grande  carte  de  l'Inde. 


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INDE.  127 

137.  J.  Wbstland.  a  Report  on  the  district  of  Jessore,  its  antiqui- 
ties,  itshistory,  and  its  commerce.  Calcutta,  1871. 

138.  Mrs.  M.  Mitchell.  A  Missionary's  wife  among  the  wild  tribes  of 
South  Bengal.  Extracts  from  the  journal  of  Mrs  Murray  Mit- 
chell. With  introduction  by  D'  G.  Smith.  Edinb.,  1871,  in-12, 
78  p.  1  sh. 

139.  BÂ6D  RÂKHÂL  DÂs  Haldâr.  An  introduction  to  the  Mundâri 
language.  Journ.  of  the  As.  soc.  of  Bengal,  Part  1, 1871,  p.  46-67. 

Le  Mowiddrt  est  un  dialecte  de  la  langue  qui  fut  autrefois  parlée 
par  tous  les  habitants  aborigènes  des  plaines  du  Bengale,  mais  qui  fit 
place  graduellement  à  la  langue  des  Hindous  brahmaniques,  lorsque 
ceux-ci,  il  y  a  bien  des  siècles,  vinrent  occuper  le  pays.  L'idiome  abo- 
rigène ne  se  rencontre  plus  actuellement  que  dans  les  hautes  terres  de 
l'Ouest,  comprenant  le  Bîrbhoûm,  le  Mânbhoùm,  le  Singhbhoûm,  le 
Tchotâ  Nâgpoûr  et  quelques  portions  des  Provinces  Centrales,  cantons 
où  il  est  connu,  selon  ses  diverses  formes,  sous  les  noms  de  Santâli, 
Ho^  Moundârty  Korvâ^  Kouri,  etc.  On  en  retrouve  aussi  quelques  tra- 
ces dans  les  dialectes  de  certaines  peuplades  montagnardes  du  Népal, 
du  Bhoùtan,  de  TAssam  et  du  Barma.  Le  bengali  moderne,  dont  le 
fond  est  sanscrit,  en  a  gardé  un  certain  nombre  de  mots.  On  ne  saurait 
dire  avec  certitude  sous  quel  nom  la  langue  aborigène  fut  originaire  • 
'ment  désignée.  Le  nom  de  Moundâri  s'applique  au  dialecte  usité  dans 
une  partie  considérab'e  du  plateau  de  Tchota  Nagpour;  mais  les 
Moundà  eux-mêmes  donnent  à  leur  race  et  à  leur  langue  le  nom  de 
HorOf  mot  qui  en  moundarî  signifie  Homme. 

140.  Rev.  Th.  Jellinghaus.  Sagen,  sitten,  und  Gebràuche  der  Mun- 
da-Kohls  in  ChotaNagpore  {Zeitschr.  fur  Ethnologie,  A.  1871, 
b*  cah.,  p.  326-337;  6*  cah.,  p.  365-380). 

141.  Bâbu  Râsh  Bihâri  Bose.  Extracts  from  my  diary  regarding  a 
visit  to  Kharakpûr,  in  the  district  of  Munger,  and  several  places 
in  the  Banka  sub-divislon  (Bhâgalpûr).  Journ,  of  the  As.  soc. 
of  Bengal,  Part  1,  1871,  p.  22-33. 

142.  W.  SowEBBT.  Some  account  of  the  navigation  of  the  Nerbudda, 
or  Narmadâ  river;  with  remarks  on  the  gulf  of  Cambay.  Travr 
sactions  of  the  Bombay  Geogr.  soc,  vol.  XIX,  Part  2,  p.  17- 
38,  with  Maps.  Bombay,  1871. 

143.  J.  BuRGESs.  Index  of  the  towns,  villages,  etc.,  in  the  Punâ 
zilla  of  the  Bombay  Presidency;  wich  introductory  remarks, 
/bid.,  p.  39-120. 

144.  Rev.  G.  Richter.  Manual  of  Coorg.  A  Gazetteer  of  the  natural 
features  of  the  country,  and  the  social  and  political  conditiott 
of  its  inhabitants.  Mangalore,  1870,  in-8%  485  p.,  with  Map. 
16  sh. 

145.  D' A.  Chanot.  Notes  sur  Mahé,  Inde  française.  Archives  de  Mé- 
decine navale,  juillet  1872,  p.  5-16. 

Notes  intéressantes  sur  notre  petite  colonie.  La  population  de  la  ville 


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128  ASIE.  (N'*  110-152.) 

était  de  4S85  âmes,  et  celle  des  quatre  aidées  ou  villages  qoi  en  dé- 
pendent  de  3488  ;  en  toat  8073  habitants. 

146.  Annuaire  des  établissements  français  de  Tlnde,  1872.  Pondi- 
chéry,  1872,  in-18  (Paris,  Challamel).  3  fr.  50  c. 

147.  D'  £.  Friedel.  Ostindien  auf  der  intemationalen  Austellung 
von  1871;  zur  Kulturgeographie  des  Orients.  Zeïtschrift  der 
Gesellsch.  fur  Erdk.  %u  Berlin^  1872  (n»  40),  p.  314-336. 


148.  Kattyvar  (Goudjérât)  topographical  survey.  I(md.,1871, 8  feuil- 
les (au63  366»).1871,  24sh. 

149.  Punjab  and  its  dependencies,  with  portions  of  the  North-West 
provinces  and  Afghanistan,  lond,,  1870,  1  f»  (au  1013  856*). 
8sli. 

150.  Map  of  the  Punjâb,  compiled  in  the  surveyor-general's  office, 
Simla.  Sheet.  5. 1872  (8  miles  to  1  inch).  4  sh. 

151.  Skeleton  Map  of  Oudh,  compiled  in  the  surveyor-generars  of- 
fice, Simla.  1872  (4  miles  to  1  inch).  8  sh. 

152.  Atlas  of  India.  Quarter-sheet,  n»  11.  N.  W.  Simla^  1872^  1  sh. 
3  d.  —  Sheet,  72,  S.  W.  I6id.,  1  sh.  3  d. 


S  !•'.  Ëtude  administrative  des  territoires  de  llnde  anglaise. 
Le  district  de  Ghazlpoûr. 

Le  gouvernement  britannique  de  Tlnde  rentre  aujour- 
d'hui d'une  manière  sérieuse  dans  l'investigation  des  vas- 
tes territoires  de  la  Péninsule  ;  et  cette  investigatifin,  bien 
qu'entreprise  particulièrement  à  un  point  de  vue  d'utilité 
administrative,  n'en  promet  pas  moins  à  toutes  les  bran- 
ches de  la  science,  à  la  géographie  comme  à  l'histoire  na- 
turelle, à  l'ethnographie,  à  l'histoire  locale  et  à  rarchéolo- 
gie  comme  aux  études  économiques,  une  large  récolte 
d'informations  précises.  L'Inde  n'est  pas,  assurément,  un 
pays  inconnu  ;  toute  une  armée  de  voyageurs  savants,  sur- 
tout depuis  la  fin  du  dernier  siècle,  en  a  rapporté  une 
masse  prodigieuse  de  faits  et  d'observations  :  mais  si  les 
explorateurs  sont  nombreux,  le  champ  des  recherches  est 
immense,  et  bien  des  lacunes  restent  à  remplir.  Il  y  a 
d'ailleurs  des  renseignements  intimes  qu'une  administra- 


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INDE  ANGLAISE.  129 

tion  puissante^  avec  les  moyens  dont  elle  dispose,  ))eat 
seule  obtenir;  aussi  accueillons*  nous  avec  joie,  nous  qui 
depuis  longtemps  suivons  avec  un  vif  intérêt  la  marche 
des  études  indiennes  et  qui  y  avons  eu  une  faible  part, 
l'annonce  des  publications  dont  le  premier  spécimen  est 
entre  nos  mains. 

Il  y  a  près  de  trente  ans,  en  1844,  Tattention  du  gou- 
vernement de  Calcutta  avait  été  appelée  sur  ce  sujet. 
M.  Thomason  avait  élaboré  un  plan  de  travail  complet 
pour  la  description  circonstanciée  des  «  l^rovinces  du  nbrd- 
ouest,  y>  c'est-à-dire  des  provinces  dont  se  compose  la 
présidence  du  Bengale.  La  description  devait  être  faite  dis* 
trict  par  district,  et  les  éléments  en  étaient  recueillis  dans 
chaque  district  par  les  agents  mêmes  de  l'administration, 
d'après  un  cadre  uniforme  dont  il  n'y  avait  qu'à  suivre  les 
indications  et  à  remplir  les  cases.  C'est  à  peu  près  ce  qui  a 
été  fait  en  France  sous  le  Consulat  et  au  commencement 
du  premier  Empire  ;  et  dans  Flnde  même  un  travail  ana- 
logue fat  poursuivi  officiellement  dans  les  provinces  du 
Gange  inférieur,  de  1807  à  1814,  si  ce  n'est  que  la  tâche 
était  confiée  aux  soins  d'un  seul  et  très-capable  investiga- 
teur, le  D'  Francis  Buchanan  (devenu  plus  tard  sir  Fran- 
cis Hamilton),  qui  dut  cependant  la  laisser  inachevée. 
Suivant  le  plan  de  M.  Thomason,  les  informations  réu- 
nies dans  chaque  district  venaient  se  concentrer  à  Calcutta, 
où  les  matériaux  seraient  mis  en  œuvre.  CeAe  concep- 
tion, quoique  très-pratique,  n'aboutit  pas  alors,  ou  du. 
moins  s'arrêta  avant  d'avoir  donné  de  bien  grands  résul- 
tats ;  on  y  revient  aujourd'hui,  avçc  la  résolution  de  la 
mener  à  bonne  fin.  Il  semble  même  que  sans  chauger  les 
bases  proposées,  et  surtout  sans  en  altérer  le  caractère  es- 
sentiellement pratique  au  point  de  vue  de  l'administration, 
on  ne  se  refusera  pas  à  y  faire  entrer  les  éléments  pure- 
ment scientifiques  dans  une  proportion  plus  libérale.  Du 
Qioins,  la  description  du  district  de  Ghazipour,  qui  vient 
^'année  géogr.  XI.  9 

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130  ASIE.  (n*' 110-152.) 

d'être  publiée  sous  la  direction  de  M.  Wilton  Oldham  (d-^ 
dessus,  n""  122),  préseote-t-elle,  sous  ce  rapport,  des  infoi^ 
mations  très-abondantes. 

Voici  Tordre  que  Ton  y  suit  : 

Le  1""  chapitre  est  consacré  à  la  géographie  physique 
du  district,  formes  du  terrain,  élévation  du  sol^  rivières, 
climat  ; 

Le  2*,  aux  antiquités  et  à  l'ancienne  histoire,  y  compris 
les  monuments,  dont  quelques-uns,  les  plus  importants,  ont 
été  figurés,  notamment  le  pilier  de  Bitharî,  avec  un  fae^ 
simile  et  la  traduction  de  Titiscription  appartenant  à  un 
prince  de  la  deuxième  dynastie  deS  Goupta,  qui  régnait  à 
la  fin  du  IV"  siècle  de  notre  ère. 

Le  S""  chapitre  contient  Ténumération  historique  et  des- 
criptive des  tribus  entre  lesquelles  se  répartit  la  propriété 
du  sol; 

Le  4*  expose  l'état  du  district  sous  le  gouvernement  mu- 
sulman ; 

Le  5*  et  dernier  chapitre  contient  un  historique  eircoa- 
stancié  des  radjahs  de  Bénarès,  vassaux  du  nabab  d'Aoudh, 
jusqu'à  la  cession  que  ce  dernier  fut  contraint  de  faife 
de  la  cité  sainte  et  de  son  territoire  à  la  Compagnie, 
en  1775. 

;;:^  Suit  une  série  d'appendices  relatifs  à  différents  objets 
d'administration,  d'histoire  et  de  topographie,  entre  au- 
tres une  table  des  altitudes.  Le  point  le  plus  élevé  du  dis- 
*trict  esta  291  pieds  anglais  (un  peu  moins  de  89  mètrsf) 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  La  partie  supérieure  du 
Ghât  principal  de  Ghazîpoûr  (c'est-à-dire  des  gradins  qui 
descendent  au  Gange  pour  les  ablutions  des  dévots  hin- 
dous) est  à  57  mètres  au-dessus  de  la  mer. 

Le  tout  est  accompagné  d'une  série  de  cartes  où  le  dis- 
trict se  présente  sous  ses  diverses  attributions,  cartes  où 
l'on  pourrait  désirer  —  particulièrement  dans  la  princi- 
pale^ la  carte  physique  —  plus  de  détails  et  une  plus  grands 

uiyiiizeu  uy  -v^jv^v^-c  i>^ 


ÉTUDES  SOCIALES   SUR  l'iNDE.  131 

finesse  d'exécation,  mais  qui  renferment^  en  somme,  uno 
quantité  considérable  d'indications  importantes. 

Ghazîpoûr  est  un  des  six  districts  dont  se  compose  au- 
jourd'hui la  province  de  Bénarès,  une.  des  grandes  divi* 
sions  de  ce  que  Ton  a  nommé  les  provinces  du  nord-duest| 
dans  la  Présidence  du  Bengale.  Il  est  situé  au-dessous  de 
Bénarès  (ch;-l.  d'un  autre  district),  presque  tout  entier 
sur  la  rive  galichedu  Gange;  sa  superficie  est  de  2195  mil- 
les carrés  anglais  (5685  kil.  carrés),  à  peu  près  l'équiva- 
lent d'un  département  français*  La  population,  d'après  des 
relevés  déjà  anciens,  était  de  1  059  300  âmes,  186  habi- 
tants par  kilomètre  carré. 

S  2.  Étudo  historiqQe  et  économique  du  Bengale. 
Le  livre  de  M.  Hunter, 

A  côté  de  ces  grands  travaux  entrepris  sous  l'autorité 
immédiate  du  gouvernement  colonial,  il  se  publie  sur  plu-  " 
sieurs  parties  du  nord  de  l'Inde  d'autres  ouvrages  considé- 
rables dont  les  matériaux  sont  en  grande  partie  fournis  par 
l'administration,  et  qui  tirent  de  là  un  caractère  demi-offi- 
ciel. Telles  sont  les  savantes  et  très-remarquables  publica- 
tions de  M.  Will.  Hunter,  directeur  du  bureau  de  statis- 
tique du  gouvernement  de  Tlnde  ;  tel  est  aussi  le  Gazetteer 
ou  Dictionnaire  des  Provinces  Centrales,  publié  en   1867 
par  M.  Charles  Grant,  et  réimprimé  en  1868  (V.   notre 
précédent  volume,  p.  24).  Les  études  de  M.   Hunter  se 
rapportent   au  Bengale    et   aux  territoires   limitrophes; 
elles   ont  pour    objet  principal  les    tribus    aborigènes 
ce  qu'on  peut  appeler  les  couches  inférieures  de  la  po- 
pulation. Un  premier  ouvrage  s'est  attaqué  au  côté  linguis- 
tique de  ces  études  (V.  le  t.  VII  de  XAnnèCy  1868,  p.  130, 
no  98);  celui  dont  nous  enregistrons  aujourd'hui  la  S*'  édi- 
tion (ci-dessus,  à  la  Bibliographie,  n°  123)  s'attache  à  la 
vie  physique  et  morale,  aux  habitudes,  aux  mœurs,  aux 

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132  ASIE.  (n*^  110-152.) 

idées  religieuses,  aux  antécédents  historiques.  «  On  a  écrit 
de  beaux  livres  sur  la  puissance  britannique  dans  Tlnde  ; 
mais  ces  livres  s'attachent  aux  actes  du  goavernement  et  à 
la  biographie  des  gouverneurs,  non  à  l'histoire  du  peuple. 
Les  millions  d'êtres  qui  portent  silencieusement  notre  joug 
n'ont  pas  trouvé  d'annaliste.  » 

£t  ailleurs,  après  avoir  cité  ce  passage  de  M.  Hodgson  : 
«  Dans  les  vastes  djangles,  dans  les  cantons  montagtieux 
de  l'immense  continent  indien,  il  existe  des  centaines  de 
milliers  d'êlres  humains  dont  la  vie  ne  diffère  guère  de 
celle  des  Grermains  telle  que  Tacite  nous  la  décrit,  » 
après  avoir,  disons-nous,  cité  ce  passage,  M.  Hunter 
ajoute  :  <  Qu'une  branche  de  la  famille  humaine,  qui 
ne  compte  pas  moins  de  trente  millions  d'âmes,  ait  vécu 
durant  un  siècle  sous  la  domination  anglaise  sans  que  le 
monde  civilisé  ait  rien  appris  de  son  origine,  de  sa  lan- 
gue, de  son  genre  de  vie,  c'est  un  fait  qui,  certes, 
donne  matière  à  réflexion.  Tandis  que  la  race  à  peau 
blanche,  qui  s'est  emparée  des  plaines,  est  devenue  l'enfant 
d'adoption  de  la  science  contemporaine;  les  tribus  à  peau 
foncée,  les  premiers  maîtres  du  sol,  sont  restés  ce  que  nous 
les  avons  trouvés,  des  êtres  négligés,  oubliés,  relégués  au 
fond  des  montagnes  et  des  forêts  primitives  où  ils  cachent 
leur  vie  méprisée.  L'étude  des  langues  ariennes  a  plus  fait 
on  un  demi-siècle  pour  expliquer  l'histoire  de  l'homme, 
que  n'avaient  fait  auparavant  les  efforts  de  cinquante  gé- 
nérations de  savants.  De  la  découverte  du  sanscrit  date  une 
nouvelle  ère  pour  la  pensée  humaine.  La  grammaire  sans- 
crite est  devenue  la  clef  de  voûte  de  la  philologie,  et  la 
doctrine  des  écoles  brahmaniques  a  marqué  de  sa  pro- 
fonde empreinte  la  philosophie  moderne.  Mais  on  a  com- 
plètement négligé  les  autres  races  ;  et  cependant  ces  races 
ont  une  histoire  plus  ancienne  que  les  Aryas,  —  une  his- 
toire non  moins  instructive  peut-être,  si  nous  en  pouvions 
retrouver  la  trace.  Le  peu  d'investigateurs  qui,  à  une  épo-* 

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INDE.    ÉTUDES  SOCIALES   ET   POLITIQUES.  133 

que  déjà  ancienne,  prirent  intérêt  à  ce  snjet,  ont  été  dé- 
tournés de  leurs  recherches,  ou  les  ont  interrompues  pour 
une  raison  ou  pour  une  autre,  avant  de  les  avoir  poussées 
assez  loin  pour  qu'elles  aient  pu  attirer ,  et  encore  moins 
fixer  l'attention  des  savants  de  l'Europe  ;  et  le  gouverne- 
ment lui-même  a  trop  généralement  regardé  les  aborigènes 
du  Bengale  comme  des  êtres  non  susceptibles  d'améliora- 
tion, —  comme  une  race  dont  le  mieux  qu'on  puisse  es- 
pérer est  qu'elle  se  tienne  tranquille  jusqu'à  sa  complète 
extinction.  » 

Sauf  quelques  réserves,  il  y  a  certainement  un  grand 
fond  de    vérité  dans  ces  observations  ;  je  me  permettrai 
seulement  de  faire  remarquer   au  savant  auteur  que  les 
magnifiques  études  dont  la  connaissance  du  sanscrit  a  été 
le  point  de  départ  n'ont  pas  seulement  profité  à  la  restitu- 
tion de  nos  origines  et  de  celles  de  la  race  ftrienne  en  gé- 
néral, mais  qu'elles  ont  aussi  projeté  de  grandes  lumières 
sur  les  populations   non  ariennes  qui  occupaient  l'Inde 
avant  l'arrivée  des  Aryas.  Ce  que  l'on  sait  de  ces  temps 
primitifs  et  des  tribus  aborigènes,  on  le  doit  aux  premiers 
monuments  de  la  littérature  sanscrite.  Que  la  science  eu- 
ropéenne, depuis  un  demi-siècle,  se  soit  surtout  attachée 
au  côté  ârien  de  cette  riche  étude,  faut-il  s'en   étonner? 
Les  races  nobles  de  l'hi  stoire  retrouvaient  là  leurs  pre- 
miers titres  perdus  depuis  le  commencement  des  siècles. 
Mais  la  race  dépossédée,  celle  dont  les  restes  isolés  peu- 
plent aujourd'hui  les  forêts  de  l'Inde  et  les  vallées  de 
l'Himalaya,  qu'a-t-elle  donné  à  l'humanité  ?  Ce  n'est  pas 
à  dire,  loin  de  là,  qu'il  faille  exclure  ces  tribus  déshéritées 
du  cercle  de  nos  études;  ce  n'est  pas  à  dire,  surtout,  qu'on 
ne  leur  doive  pas  la  protection  et  la  justice  qui  sont  les  at- 
tributs de  la  force,  et  M.   Hunter  a  mille  fois  raison  de 
s'élever  contre  l'oubli  méprisant  dont  on  les  a  longtemps 
frappées. 
Toutefois,  au  point  de  vue  de  la  science,  cet  oubli,  tant 

u,g,uzeuuy^.vJOgle 


134  ASIE.  (n"  110-152.) 

8*enfaut,  n'a  pas  été  absolu.  Une  multitude  d'observations 
et  de  faits  sont  consignés  dans  les  bonnes  relations  de 
PInde,  —  et  Dieu  sait  si  elles  sont  nombreuses,  —  et  plus 
encore  daus  les  recueils  spéciaux.  II  est  un  homme  qui  à 
lui  seul  a  fait  immensément  sous  ce  rapport  :  c'est 
M.  Hodgson.  Ce  qui  a  été  publié  de  ses  recherches  en  est 
la  moindre  partie  :  une  masse  de  notes  et  de  papiers  rem- 
plissait un  coffre  oublié  dans  les  archives  de  la  Compagnie 
à  Calcutta.  Ce  sont  ces  notes  précieuses,  retrouvée»  par  un 
heureux  hasard,  qui  sont  devenues  le  point  de  départ,  et 
ont  fourni  le  fonds  des  belles  publications  de  M.  Hunter; 
lui-même  se  plaît  à  le  proclamer  *.  Cela  n'enlève  rien  au 
mérite  éminent  du  travail  de  M.  Hunter,  ni  à  la  valeur  de 
sa  mise  en  œuvre.  Les  matériaux  dont  il  dispoas  s'enno- 
blissent par  le  but  élevé  auquel  Tauteur  les  fait  cuneourir. 
Sa  pensée  ne  s'arrête  pas  à  la  science  abstraite  :  elle 
est  d'un  philanthrope  éclairé,  d'un  administrateur  judi- 
cieux et  d'un  homme  de  bien.  «  Dans  Tespoïr,  dit-il  (avec 
une  nuance  d'enthousiasme  qui  se  reflète  dans  tout  son 
livre),  d'intéresser  également  à  ces  races  négligées 
l'homme  d'étude  et  l'homme  d'Éiat,  je  me  propose  de  faire 
connaître  ce  que  j'ai  pu  apprendre  touchant  l'histoire,  la 
langue,  les  usages  et  les  aptitudes  des  montagnards .  du 


1.  On  ne  saurait  nommer  M.  Hodgson,  simple  fonctionnaire  dans 
le  service  civil  de  la  Compagnie  des  Indes,  et  longtemps  résidant  à 
.  Dardjeling  dans  le  Sikkïm,  sans  éprouver  un  sentiment  de  vénération 
reconnaissante  pour  les  services  incalculables  qu'il  a  rendus  à  la 
science  indienne  sans  Pombre  de  calcul  ni  d'intérêt  personnel.  Vers 
1838  (la  date  précise  m'échappe  en  ce  moment),  il  fit  don  à  la  Société 
Asiatique  de  Paris  d'une  suite  unique  des  livres  bouddhiques  du  Népal; 
et  ce  fut  l'étude  de  cette  collection  qui  en  portant  Eugène  Burnouf 
dans  cette  direction,  nous  a  valu  le  beau  livre  qui  a  pour  titre  Intro- 
duction à  V histoire  du  Bouddhismey  1845.  Ainsi  le  zèle  scientifique  de 
M.  Hodgson  a  enfanté  en  Europe  une  branche  d'études  qui  a  pris  une 
grande  place  dans  l'histoire  philosophique  de  Thumanité,  comme  il  a 
produit  dans  l'Inde  même,  après  une  masse  de  recherches  précieuses 
sur  les  populations  aborigènes,  les  travaux  actuels  de  M.  Hunter. 

uigiiizeu  uy  >.^«  v^  v^^pt  i n^ 


INDE.    PROVINCES  CENTRALES.  135 

Bîrbhoûm.  L'homme  instruit  verra  que  leur  idiome  et 
leurs  traditions  jettent  une  lumière  importante  sur  un 
chapitre  ignoré  de  l'histoire  de  notre  race.  L'homme 
d'État  voué  aux  affaires  de  l'Inde  s'apercevra  que  ces  en- 
fants de  la  forêt  ne  sont  pas  tombés  aussi  bas  qu'il  le  sup- 
posait au-dessous  de  l'état  moral  des  autres  nations,  qu'ils 
agissent,  comme  les  autres  hommes,  sous  l'impulsion  de 
leur  intérêt,  qu'ils  sont  accessibles  aux  mêmes  influences 
amélioratrices,  et  que  l'extension  future  de  nos  eptrepri* 
ses  dans  le  Bengale  repose  en  grande 'partie  sur  leur  apti- 
tude à  la  civilisation.  » 

Le'Bîrbhoûm,  dont  il  est  ici  question,  est  un  district  si- 
tué sur  la  limite  occidentale  du  Bengale  au  nord-ouest  de 
Calcutta.  C'est  une  contrée  légendaire,  ainsi  que  l'atteste 
le  nom  sanscrit,  Vîrabhoûmi.  Les  parties  montueuséi  de 
l'intérieur  sont  occupées  par  une  race  inculte,  les  Santals, 
qui  a  joué  un  certain  rôle  dans  les  dernières  insurrections 
du  nord  de  l'Inde*  C'est  au  tableau  historique  de  ^e  peu- 
ple aborigène  qu'est  consacré  en  très-grande  partie  le  livre 
remarquable  auquel  M.  Hunter  a  donné  le  titre  A'Annals 
of  rural  BengaL 


S  3.  Le  livre  du  capitaine  Forsyth  sur  le  haut  pays  de  Tinde  centrale. 

L'ouvrage  du  capitaine  d'État-major  J.  Forsyth,  the 
Highlands  of  Central  India  (ci-dessus,  n°  121),  présentera 
un  autre  point  de  vue  que  celui  de  M.  Hunter,  —  à  un 
point  de  vue  plus  particulièrement  pittoresque,  mai»  trèi- 
important  aussi  pour  l'histoire  naturelle  et  pour  l'ethno- 
graphie, —  présente,  dis-je,  un  intérêt  non  moins  grand. 
J'en  trouve  dans  le  Bulletin  de  la  Société  de  Géographie 
(août  1872)  une  fort  bonne  analyse  due  à  la  plume  très-com- 
pétente dn  lieutenant  de  marine  Francis  Garnier,  l'éner- 
gique et  habile  successeur  de  l'infortuné  de  Lagrée  dans 


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136  ASIE.  (n«»  110-152.) 

la  conduite  de  notre  expédition  du  Mékong;  je  puis  me 
borner  à  reproduire  cette  analyse. 

Ce  livre  présente,  sous  une  forme  attachante  et  pittoresque, 
la  description  physique,  politique  et  ethnographique  .d'une  con- 
trée restée  inconnue  jusqu'à  ces  derniers  temps,  et  qui  est  en 
dehors  des  tentatives  de  colonisation  directe  de  TAngleterre. 
C'est  la  partie  montagneuse  de  Plnde  qui  s'étend  à  l'est  de 
Bombay  et  au  sud  des  monts  Vindhyâ,  et  qui  comprend  la  vallée 
de  la  Nerbàda  et  la  partie  supérieure  du  bassin  delà  Godavérl. 
JA  se  sont  réfugiés  les  débris  des  populations  sinon  autochthones, 
du  moins  antérieures  à  Tinvasion  arienne,  et  M.  Forsyth  donne 
de  curieux  détails  sur  leurs  mœurs,  sur  leurs  traditions,  sur 
leur  transformation  successive  au  contact  de  la  civilisation  et 
de  Ik  religion  hindoues.  Au  milieu  des  forêts  et  des  collines  de 
cette  région  où  les  bêtes  sauvages  disputent  encore  le  terrain  à 
l'homme,  vivent  côte  à  côte  trois  races  différentes  :  les  Gonds 
qui  appartiennent  au  rameau  dravidien  qui  habite  le  sud  de  la 
Péninsule  ;  les  Kohls  et  lesKorkous  qui  parlent,  d'après  1&.  For- 
syth, une  langue  arienne,  quoique  n'appartenant  pas  à  la  race 
conquérante  de  l'Inde  ;  enfin,  les  Bhils  et  les  Bigas,  qui  auraient 
possédé  jadis  le  cours  de  la  Djemnah,  et  qui,  plus  anciens  que 
les  générations  précédentes,  auraient  été  refoulés  dans  les 
monts  Vindhyâ  par  l'arrivée  des  Aryas.  Pour  M.  Forsyth,  l'Inde 
présente  tous  les  caractères  d'un  pays  très-récemment  et  très- 
incomplétement  colonisé,  et  il  ne  faut  point  remonter  aussi 
haut  dans  son  histoire  qu'on  le  croit  communément  pour  re- 
trouver les  effets  du  premier  contact  des  Hindous  avec  les 
tribus  aborigènes. 

Au  point  de  vue  économique,  le  livre  de  M. -Forsyth  contient  ' 
des  faits  excessivement  instructifs  suries  résultats  de  l'incendie 
des  djangles  et  de  la  destruction  des  forêts,  sur  l'importance  que 
prennent  immédiatement  les  ressources  naturelles  de  ces  con- 
trées sauvages  dès  que  des  voies  de  communication  leur  sont 
offertes.  Les  erreurs  commises  par  le  gouvernement  anglais, 
quand  il  a  vcfulu  sauver  de  la  destruction  les  essences  fores- 
tières les  plus  précieuses,  telles  que  le  tek  et  le  sal  (Shorea 
robusia)  prouvent  combien  les  raisonnements  les  plus  ingénieux, 
appuyés  sur  les  faits  les  plus  concluants,  reçoivent  souvent  de 
l'expérience  les  démentis  les  plus  inattendus.  Somme  toute, 
après  un  long  séjour  et  de  minutieuses  comparaisons  faites  sut 
les  lieux,  M.  Forsyth  en  arrive  à  se  demander  si  les  avantages 

uigiiizeu  uy  >.^«  v^  Vv' pc  i n^ 


LES  CASTES   DE  l'iNDE.  137 

de  rincendie  des  forôts  ne  remportent  pas  sur  les  inconvénients» 
et  si  la  réserve  par  principales  essences  de  bois  de  charpente 
n'a  pas  des  effets  plus  nuisibles  qu^utiles.  Nous  recommandons 
vivement  à  nos  colons  et  à  nos  administrateurs  de  Gocbinchine 
Tétude  de  cette  partie  du  livre  du  capitaine  Forsyth.  Elle  tou- 
che à  des  questions  qtle  nous  devons  rencontrer  et  que  nous 
rencontrons  déjà  chaque  jour  en  Indo-Chine,  et  il  serait  bon  de 
nous  inspirer  de  l'exemple  de  nos  voisins  et  de  profiter  des 
leçons  que  leur  a  données  Pexpérience,  au  lieu  de  refaire  les 
mômes  écoles  et  de  passer  par  les  mêmes  hésitations  et  les 
mêmes  erreurs. 

Au  point  de  vue  de  l'histoire  naturelle  de  Tlnde  centrale, 
Touvrage  que  nous  analysons  est  plein  de  renseignements  et  de 
faits  bien  observés,  qui  offrent  aux  spécialistes  des  particula- 
rités curieuses.  Ainsi,  M.  Forsyth  croit  découvrir  un  rapport 
assez  intime  entre  la  faune  et  la  flore  de  la  contrée  et  la  consti- 
tution du  sous-sol.  Le  tek,  par  exemple,  parait  se  plaire  aux 
terrains  d'origine  volcanique,  et  le  sal  au  contraire  semble  les 
fuir.  Des  récits  de  chasse,  souvent  émouvants,  toujours  instruc- 
tifs, mettent  le  lecteur  au  courant  des  ressources  giboyeuses 
de  la  contrée,  et  lui  apprennent  à  connaître  sous  leurs  noms 
scientifiques  les  principaux  hôtes  de  ces  forêts  dont  ils  décri- 
vent les  mœurs.  On  trouve  dans  ces  récits  toute  la  passion  et 
toute  l'expérience  d'un  chasseur  consommé,  et  Ton  devine  en 
les  lisant  l'attrait  qui  a  déterminé  l'auteur  à  passer  plusieurs 
années  de  sa  vie  dans  cette  région,  loin  du  confort  et  des  rela- 
tions qui  rendent  si  agréable  le  séjour  des  autres  parties  de  la 
grande  colonie  anglaise.  Les  touristes  en  quête  d'émotions, 
les  tireurs  jaloux  d^éprouver  leur  adresse,  trouveront  dans  le 
livre  de  M.  Forsyth  d'excellents  conseils  et  de  précieuses  indi- 
cations, si,  fatigués  des  mesquines  chasses  de.PEurope,  ils  veu- 
lent tenter  le  sport  plus  nbble  du  tigre  et  de  Péléphant. 


$  4.  Les  castes  de  Tlnde,  leur  origine  et  lear  distribation. 
Le  livre  de  M.  Esquer. 


L'ouvrage  considérable  sur  les  castes  de  Tlnde,  publié 
à  Pondichéry  par  notre  compatriote  M*  Escper,  juge  au 
tribunal  de  cette  capitale  de>*rinde  française,  touche  à  la 
fois  à  l'an  des  problèmes  historiques  les  plus  obscurs,  à 

uigmzeuuy  Google 


138  ASIE.  (n^- 110-152.) 

rail  des  problèmes  sociaux  les  plus  difficiles  qui  se  ren- 
contrefit  dans  l'iiistoire  de  Thumanité. 

L'inde  n'est  pas,  à  beaucoup  près,  la  seule  contrée  du 
xoonde  où  la  division  des  castes  se  soit  introduite.  On 
peut  dire  que  la  nature  en  a  déposé  le  germe  au  sein  de 
toutes  les  sociétés  humaines,  depuis  les  associations  lea 
plus  infimes  et  les  plus  rudimentaires,  jusqu'aux  organi- 
sations les  plus  élevées  dans  la  hiérarchie  historique  et 
philosophique.  Les  nations  les  plus  grandes,  les  plus  célè- 
bres et  les  plus  glorieuses,  dans  les  temps  anciens  ou  ac- 
tuels, les  ont  reconnues  sous  différents  noms  et  dans  des 
conditions  plus  ou  moins  absolues;  mais  nulle  part  elles 
ne  se  sont  développées  d'une  manière  aussi  étendue,  aussi 
complète,  aussi  profonde  que  dans  l'Inde.  Nulle  part  elles 
ne  sont  devenues  comme  ici  la  base  unique  de  la  société 
politique,  religieuse  et  civile,  l'institution  fondamentale 
d'où  tout  le  reste  dérivQ  et  à  laquelle  tout  se  rapporte. 
L'honorable  et  savant  magistrat  de  Pondichéry  a  voulu 
aborder  le  sujet  sous  toute»  ses  faces  et  l'étudier  dans 
toutes  ses  conséquences.  Il  s'est  proposé  de  remonter  aux 
temps  antiques  où  le  fait  primordial  s'est  changé  en  insti- 
tution ;  il  a  voulu  en  suivre  les  phases,  et  en  marquer  les 
conséquences  sur  le  développement  de  la  société  brahma- 
nique ;  il  en  a  étudié  l'état  actuel  avec  un  détail  qui  donne 
nn  grand  prix  k  cette  partie  de  son  travail;  il  a  recherché 
enfin  par  quels  moyens  efficaces,  en  brisant  les  liens 
trente  fois  ^séculaires  qui  enserrent  étroitement  la  société 
hindoue,  ou  pourrait  lui  rendre  l'initiative,  la  volonté, 
l'énergie  individuelle  qui  constituent  la  liberté  de  la 
conscience  humaine,  et  qui  sont  la  condition,  je  veux  dire 
une  des  conditions  essentielles  du  progrès  moral  aussi 
bien  que  du  progrès  matériel. 

Il  y  a  ainsi  dans  la  longue  et  consciencieuse  étude  de 
M.  Esquer  trois  points  de  vua  successifs,  trois  parties  dis- 
tinctes :  le  point  de  vue  historiaue^  qui  nous  fait  remonter 

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LES  CASTES  DE   L'iNDE.-  139 

ver»  les  origine»;  le  point  de  vue  social,  qui  suit  les  cas- 
tes dans  leur  état  actuel;  et  enfln  le  point  de  vue  philoso- 
phique, qui  leur  ouvre  les  horizons  de  l'avenir. 

De  ces  trois  divisions  de  l'ouvrage,  la  première,  je  dois 
le  dire  y  laisse  quelque  chose  à  désirer.  L'auteur,  qui  con- 
naît les  sources,  et  qui  pouvait  d'ailleurs  s'appuyer  sur  les 
publications  précieuses  oii  M.  Muir  les  a  savamment  réu- 
nies et  judicieusement  commentées,- ne  se  tient  pas  avec 
assez  de  fermeté  dans  la  seule  voie  utile  et  sûre,  celle  de 
l'investigation  directe.  Il  hésite  parfois  et  se  méfie  de  lui- 
mécne.  Cette  défiance  de  soi-même,  en  de  «tels  sujets,  est 
bien  naturelle  ;  mais  c'est  en  revenant  constamment  aux 
sources  que  l'esprit  se  fortifie,  que  la  vue  s'affermit.  Des 
ierivains  à  systèmes,  de  creux  déclamatenrs  sans  valeur 
sérieuse,  des  atiteurs  étrangers  aux  éléments  fondamen- 
taux de  la  question,  soit  par  leur  préoccupation  soit-disant 
philosophique,  soit  simplement  par  la  date  de  leurs  écrits, 
ne  sont  ni  des  guides  ni  des  lumières  en  de  pareilles  étu- 
des; Baynal  et  Court  de  Gibelin,  aussi  bien  que  les  succes- 
seurs et  leurs  émules,  ne  peuvent  que  troubler  et  fausser 
les  recherches.  Ici  la  méthode  et  les  aulorités  sont  d'une 
importance  exceptionnelle. 

J'ai  dit  que  l'aperçu  tracé  par  M.  Esquer  de  Tétat  actuel 
des  castes  dans  l'Inde  forme  une  portion  extrêmement  re- 
marquable de  l'ouvrage,  la  plus  remarquable  assurément 
au  point  de  vue  de  l'étude  des  faits,  et  celle  qui  restera  à 
titre  de  document  historique.  La  position  particulière  de 
l'auteur  lui  donnait  pour  cette  investigation  épineuse  des 
facilités  spéciales.  Rien  de  plus  confus,  de  plus  complicfhé, 
de  plus  obscur  que  l'interminable  classification  des  castes 
existantes  sous  une  multitude  de  dénominations,  que  la 
distinction  de  leur  position  respective ,  que  leur  valeur  et 
leur  importance  relatives  dans  la  société  indigène  telle 
qu'elle  existe  aujourd'hui  dans  l'Inde.  Non-seulement  les 
divisions  et  les  subdivisions  sont  infinies,  mais  tout  varie 

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140  ASIE.  (n»' 110-152.) 

de  province  à  province.  Un  document  officiel  de  1865,  cité 
dans  l'Appendice  de  la  nouvelle  édition  de  feu  M.  Henry 
EUiot  sur  les  populations  du  nord-ouest  de  FInde,  porte  à 
560  le  nombre  actuel  des  subdivisions  des  quatre  castes 
fondamentales  dans  ces  seules  provinces.  M.  Esqner  les 
suit  dans  les  diverses  parties  de  la  Péninsule,  depuis  les  pro- 
vinces tamoules  du  Midi  jusqu'aux  pays  du  Grange.  Il  nous 
montre  la  caste  autrefois  dominatrice  des  Brahmanes  des- 
cendue en' une  foule  de  cas  à  des  fonctions  subordonnées, 
sinon  serviles;  les  nobles  kchatryas,  les  héros  des  grands 
poèmes,  conseryant  dans  deux  ou  trois  provinces  seulement, 
sous  les  noms  de  Naïrs  et  de  Radjpouts,  la  tradition  et 
quelques  prérogatives  de  leur  ancienne  prépondérance  mi- 
litaire ;  enfin  la  troisième  caste  arienne  des  anciens  temps, 
celle  des  Yaïçyas,  qui  forma  jadis  le  fond  de  la  nation 
arienne ,  presque  entièrement  disparue,  au  moins  de  nom, 
et  fondue  maintenant  dans  la  classe  innombrable  des  Sou- 
dras  qui  fut  originairement  la  caste  impure  et  servile,  et 
qui  Torme  actuellement  les  neuf  dixièmes  de  la  nation  in- 
dienne. Cette  révolution  dans  la  prépondérance  relative  des 
Yaïçyas  et  des  Soudras  date  de  bien  loin,  du  reste  ;  elle  a 
eu  certainement  pour  cause  la  réaction  de  l'élément 
aborigène  contre  l'élément  conquérant  dans  une  grande 
partie  de  la  Péninsule  ,  et  nous  voyons  par  les  témoignages 
historiques  qu'elle  était  déjà  consommée  au  temps  du 
voyage  de  l'ambassadeur  Megasthène  dans  les  pays  du 
Oange ,  c'est-à-dire  au  commencement  du  troisième  siècle 
avant  l'ère  chrétienne.  Il  n'est  pas  sans  vraisemblance 
qu'elle  avait  coïncidé,  trois  siècles  plus  tôt,  avec  la  propaga- 
tion de  la  réforme  du  brahmanisme  par  le  bouddha 
Çâkyamouni. 

Cette  vue  nous  ramène  au  qôté  purement  historique  de 
la  question  des  castes.  La  distinction  des  castes,  je  l'ai  dit, 
était  en  germe  au  sein  des  tribus  védiques,  comme  elle  est 
au  fond  de  toutes  les  sociétés  humaines.  C'est  son  carac- 

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INDE.   CASTES.  141 

tère  indélébile  et  héréditaire,  c'est  sa  limite  infranchissable, 
c'est  sa  consécration  religieuse  et  d'institution  divine  qui 
Tont  marquée  d'un  cachet  si  profond  dans  la  constitution 
brahmanique,  et  lui  ont  donné,  sur  la  destinée  du  peupie 
hindou,  une  influence  crue  le  même  fait  social,  à  difiérents 
degrés  de  développement,  n'a  eu  chez  aucun  autre  peuple. 

En  vain  interrogerait-on  les  livres  indiens  pour  y  trouver 
la  trace  historique  de  l'origine  des  castes  ;  mais  cette  ori- 
gine est  écrite  dans  la  nécessité  même  et  dans  le  cours  na* 
turel  des  choses. 

Elle  fut  le  résultat  de  la  conquête. 

Elle  est  l'expression  historique  et  sociale  à  la  fois  de 
l'asservissement  d'une  race  ignorante,  grossière,  de  facultés 
bornées,  sans  organisation  politique,  par  une  race  infini- 
ment plus  développée  et  de  facultés  physiques  et  intellec- 
tuelles très-supéyeures. 

Si  regrettable  que  cela  puisse  paraître  au  point  de  vue 
abstrait  de  la  morale  absolue,  si  difficilement  explicable  que 
cela  puisse  être  au  point  de  vue  physiologique,  Teiistence 
sur  le  globo  de  races  humaines  inégalement  perfectibles, 
et  la  subordination  des  races  inférieures  aux  races  mieux 
douées  et  plus  nobles,  n'en  sont  pas  moins  deux  faits  uni- 
versels, qui  ont  eu  depuis  l'origine  des  temps  une  immense 
inâuencê  sur  la  marche  des  choses  A  les  destinées  de  Thu- 
manité. 

Nulle  part  cette  influence  ies  causes  physiques  sur  le 
développement  moral  n'a  été  plus  marqué  que  dans  l'Inde. 

Je  ne  puis  m'étendre  ici  sur  ce  sujet'  il  me  suffit  de 
renvoyer  au  rapport  inséré  dans  le  Bulletin  de  la  Société  de 
Géographie^  où  le  côté  historique  de  la  question  a  été  déve- 
loppé (V.  ci-dessus  la  Bibliographie  ^  n«  128).  Je  reviens 
au  livre  de  M.  Esquer. 

Les  deux  derniers  chapitres  del^Essai  sur  les  Castes  sont 
consacrés  à  la  civilisation  nouvelle  que  l'abolition  du  ré- 
gime des  castes  pourrait  donner  à  l'Inde,  Je  ne  sais  jus- 

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lk%  ASIE.  (n*»  110-152,) 

qu'à  quel  point  un  changement  aussi  radical  pourra  jatBais 
se  réaliser.  L'abolition  absolue,  au  sein  d'une  nation  d9 
170  millions  d'âmes,  d'une  institution  qui  remonte  à 
défi  milliers  d'années  et  qui  est  entrée  si  profondémeai 
dans  les  entrailles  de  la  société,  cette  abolition  seipbla 
bien  difficile  peut-être  d'ici  à  plusieurs  siècles  :  mais 
ce  qui  paraît  plus  aisément  et  beaucoup  plus  prochai- 
nement réalisable,  c'est  la  modification  des  mœurs  p^ 
l'éducation  européenne ,  c'est  le  changement  graduel  4eB 
idées,  des  habitudes  et  des  besoins,  et,  par  suite,  la 
refonte  progressive  des  vieilles  institutions.  C'est  une  tâche 
qui  revient  aux  Anglais,  par  suite  de  leur  position  politique 
dans  la  Péninsule,  et  il  faut  dire  que  le  gouvernement  bri^ 
tannique  en  a  compris  l'étendue.  Si  cette  tâche  est  réali- 
sable, on  peut  dire  qu'elle  s'accomplira,  car  elle  ne  repose 
pas  seulement  sur  une  idée  théorique,  si  grande  et  si 
généreuse  qu'elle  puisse  être  :  elle  répondpour  les  Anglais 
à  l'intérêt  pratique  de  leur  domination. 


§  5.  Le  passé  et  l'avenir  de  la  domination  anglaise  dans  l'Inde. 
^Le  Uyre  de  M»  Toirens. 

Ceci  MOUS  amène  au  travail  historique  de  M.  W.  Torreas, 
«  Notre  empire  en  Asid  :  comment  nous  l'avons  acquis.  » 
Cet  ouvrage  (n""  1 1 5),  qui  sort  de  la  ligne  commune  des 
histoires  purement  narratives,  est  un  exposé  de  la  formation 
de  l'empire  anglais  dans  l'Inde.  Il  dit  par  quels  procédés 
plus  ou  moins  avouables,  plus  ou  moms  légitimes,  les  par- 
ties diverses  de  cette  immense  agglomération  de  territoires, 
dont  l'étendue  égale  aujourd'hui  le  quart  de  l'Europe, 
sont  venues,  province  à  province,  grossir  le  premier  noyaa 
créé  par  lord  Clive  en  1757.  Un  article  de  M.  Mathy  sur 
ce  livre,  dans  la  Revue  des  Deux  Mondes  du  1"  mars  1872, 
présente  sur  la  situation  des  Anglais  dans  l'Inde  des  consi- 
dérations peut-être  un  peu  sombres,  mais  certainement 


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LES  ANGLAIS  DANS  L  INDE.  143 

vraies  au  fond,  et  dont  il  nous  parait  intéressant  de  repro* 
duire  quelques  extraits. 
Une  série  de  symptômes  qui  ressemblent  à  des  lueurs 
•  d'orage  appellent  de  mouveau  l'attention  des  hommes  d'État 
sur  l'Inde  anglaise.  L'assassinat  du  juge  suprême  Norman, 
a  été  suivi  de  celui  du  vice-roi  ;  les  fanatiques  savent  désor- 
mais que  les  plus  hauts  représentants  d'un  pouvoir  détesté 
sont  à  toute  heure  justiciables  de  leurs  poignards.  Les  at^ 
tentais  et  les  rébellions  se  multiplient.  A  Lahore,  doa 
bandes  d'indigènes  p^u^courent  les  rues  pendant  la  nuit  et 
les  remplissent  du  bruit  de  leurs  chants  qui  annoncent  la 
fin  prochaine  de  la  domination  étrangère,  et  la  ferme  réso« 
lution  des  opprimés  de  verser  leur  sang  à  torrents  pour  la 
liberté  et  pour  leur  foi.  D'un  bout  à  l'autre  de  Tlnde,  la 
conviction  se  fortifie  que  le  jour  n'est  pas  éloigné  qui  verra 
s'écrouler  l'empire  britannique  en  Asie,  et  que  l'œuvre  de 
la  délivrance  doit  s'accomplir  par  les  Russes  et  les  Chinois. 
D'où  vient  cette  croyance?  On  ne  sait  ;  elle  a  été  semée  dans 
l'ombre ,  elle  a  pris  racine ,  elle  se  développe  et  elle  com# 
mence  k  porter  ses  fruits.  Les  .causes  de  cette  hostilité 
sourde  des  populations  sont  multiples,  quoique  pour  Tex- 
pliquer  il  sufOse  du  souvenir  de  ces  traditions  de  terreur 
et  de  mauvaise  foi  insigne  qui  ont  permis  à  la  Compagnie 
des  Indes  de  s'assujettir  un  pays  de  150  millions  d'habi** 
tants.  «I  Une  guerre  de  Bengalais,  contre  les  Anglais,  dit 
Macaulay,  en  parlant  des  premiers  temps  de  la*  conquête, 
était  une  guerre  de  brebis  contre  des  loups.  »  Ce  n'est  que 
depuis  1858,  époque  où  la  Compagnie  fut  dépossédée  de 
ses  prérogatives  presque  souveraines,  que  le  gouvernement 
de  la  reine  a  fait  quelques  tentatives  pour  faire  oublier  dès 
torts  séculaires,  en  tse  préoccupant  sérieusement  des  intérêts 
matériels  de  ses  administrés,  en  créant  des  routes,  des  ca- 
naux, des  chemins  de  fer  et  des  télégraphes,  en  favorisant 
les  progrés  agricoles  et  industriels,  en  s'attachant  à  ré- 
pandre l'instruction  malgré  la  désapprobation  des  politi« 

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144  ASIE.  (n»»  110-152.) 

ques  de  la  vieille  école.  Ces  avances  tardives  sont  encore 
loin  d*avoir  produit  le  résultat  désiré;  elles  sont  restées  à 
peu  près  sans  effet  sur  la  partie  mahométane  du  peuple 
hindou,  dont  le  fanatisme  religieux  oppose  à  tout  rapproche-  . 
ment  une  barrière  invincible.  Ces  musulmans  se  soucient 
bien^  du  progrès  et  des  bienfaits  de  la  civilisation  I  Que  leur 
fait  la  sécurité  des  routes  ou  l'égalité  de  tous  devant  la  loi? 
Vouloir  les  réconcilier  avec  la  suprématie  chrétienne  est 
perdre  sa  peine.  Il  n'y  aurait  qu'un  moyen  de  les  con- 
tenter :  ce  serait  que  tous  les  Anglais  voulussent  bien  faire 
leurs  paquets  et  quitter  au  plus  vite  le  pays.  Les  mahomé- 
'  tans  de  l'Inde  ne  peuvent  oublier  les  temps  où  ils  étaient 
les  maîtres  de  ces  fertiles  contrées,  et  ils  n'ont  pas  renoncé 
à  voir  revenir  les  jours  de  splendeur. 

Des  observateurs  bénévoles  cherchent  parfois  à  se  faire 
illusion  sur  cette  disposition  des  esprits.  Si  l'on  en  croyait 
le  colonel  Nassau  Lees,  qui  a  été  longtemps  président  du  col* 
lége  musulman  de  Calcutta,  les  moslems  de  l'Inde  seraient 
aujourd'hui  «  parfaitement  résignés  à'  supporter  la  supré- 
matie des  Anglais  comme  un  mal  qu'il  faut  subir,  parce 
qu'on  ne  peut  le  guérir  ;  »  ils  seraient  «  prêts  à  vivre  aussi 
paisibles  et  aussi  satisfaits  sous  le  règne  britannique  qu'ils 
pourraient  le  faire  sous  tel  gouvernement  mahométan  qui 
lui  succéderait,  pourvu  qu'on  les  traite  avec  circonspection 
et  qu'on  les  gouverne  avec  sagesse.  »  Or,  celte  condition 
indispensable  est  loin  d'être  remplie,  dit  le  savant  colonel, 
et  il  insiste  sur  la  nécessité  de  modifier  l'enseignement  sco- 
laire, la  juridiction  et  les  formes  de  Tadministration  dans 
le  sens  d'une  plus  grande  autonomie  des  indigènes.  On  se 
réjouit  lorsqu'un  mollah  quelconque  déclare  que  le  pro- 
phète ne  défend  pas  absolument  aux  vrais  croyants  d'obéir 
aux  sectateurs  d'une  aut^e  religion,  s'ils  reconnaissent  au 
moins  l'un  des  quatre  livres  sacrés  (Pentateuque,  Psaumes, 
Évangiles,  Koran).  Ces  illusions  d'entente  cordiale  ne  tien- 
nent pas  devant  les  faits  graves  et  significatifs  qui  se  prq- 

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LES  ANGLAIS  DANS  l'iNDE.  145 

dnisent  chaque  jour.  Le  docteur  Hunier,  dans  un  livre 
publié  récemment,  nous  trace  un  sombre  tableau  des  rap- 
ports qui  existent  entre  les  mahométans  de  Tlnde  et  leurs 
maîtres  chrétiens.  Cette  publication  a  soulevé  une  polémique 
à  laquelle  ont  pris  part  tous  ceux  qui,  de  près  ou  de  loin, 
croient  connaître  la  situation  de  l'empire  britannique  en 
Asie  ;  mais  les  événements  ne  donnent  pas  raison  aux  opti- 
mistes. M.  Hunter  raconte  l'origine  et  le  développement 
progressif  de  la  conspiration  ouahabite,  qui,  profitant  de 
toutes  les  fautes  du  gouvernement,  a  jeté  ses  ramifications 
dans  toutes  les  parties  du  territoire.  Les  Ouahabites,  ces 
puritains  de  l'islamisme,  se  montrent  encore  plus  intrai- 
tables sur  les  bords  du  Gange  que  dans  leurs  oasis  de 
l'Arabie.  «Voilà  bientôt  trois  ans,  écrit  M.  Vambéry,  que 
les  Ouahabis  lancent  avec  une  audace  croissante  leurs  fusées 
révolutionnaires  de  leur  quartier  général  de  Patna.  Tantôt 
ils  fomenteront  une  petite  rébellion  des  tribus  montagnardes, 
tantôt  sous  leur  investigation  unfedaji  quelconque  (c'est  le 
nom  que  se  donnent  les  enfants  perdus  de  la  conspiration) 
ira  frapper  un  Européen  înoffensif,  afin  de  mériter  le  mar- 
tyre, ou  bien  l'on  verra  un  zélateur  de  cette  secte  prêcher 
ouvertement  aux  régiments  de  cipayes  la  révolte  et  la  guerre 
sainte  contre  les  infidèles,  c'est-k-dire  contre  leurs  maîtres. 
Et  que  font  les  Anglais,  en  présence  de  ce  jeu  dangereux? 
On  est  vraiment  étonné  qu'après  les  sacrifices  terribles  que 
leur  a  coûtés  la  dernière  guerre,  ils  n'attachent  pas  plus 
d'importance  aux  manœuvres  menaçantes  d'un  ennemi  aussi 
rusé  que  fanatique....  Quand  on  parle,  en  Europe,  du 
fanatisme  mahométan,  on  ne  pense  jamais  qu'à  l'islamisme 
de   l'Asie  occidentale;  or,  il  ne  faut  pas  oublier  que  le 
cfieîk'il-islam  de  Constantinople  lui-même  n'est  guère  mieux 
qu'un  infidèle  aux  yeux  de  ses  coreligionnaires  dePeïchavèr, 
de  Dehli,  de  Lahore  ;  tel  est  le  raffinement  de  la  doctrine 
au  centre  de  l'Asie.  Dans  le  nord  de  l'Inde,  le  flambeau  d& 
la  vraie  dévotion  n'est  point  Stamboul,  c'est  Bokhara..,.  » 

l'ANNéE  eéOGR.  ZI.  10        \ 

uiyiuzeuuy^OOgie 


146  ASIE.  (n"  110-151) 

Toutefois,  on  ne  saurait  disconvenir  que  la  politique 
actuelle  du  gouvernement  anglais  aboutit^  en  définitive,  è 
l'amélioration  matérielle  et  morale  du  pays  et  des  popnk- 
tions.  Les  impôts  sont  lourds  —  dans  un  sens  relatif  tu 
moins  ;  mais  le  produit  en  est  affecté  pour  la  plus  grande 
partie  à  l'entretien  de  l'armée  et  aux  travaux  publics.  Ofl  a 
consacré  des  sommes  très-considérables  à  la  construction 
âe  routes,  de  canaux  d'irrigation,  à  la  subvention  des  che- 
mins de  fer;  le  gouvernement  a  donné  sa  garantie  aai 
aetionnaires,  qui  ont  dépensé  un  milliard  et  demi  peur 
l'établissement  du  vaste  réseau  de  voie  ferrée  qui  relie  tous 
les  grands  centres  de  l'empire  en  traversant  les  contrées  les 
plus  fertiles.  Le  progrès  existe  donc  et  l'avenir  se  dessine; 
et  cependant  tous  ces  encouragements  acoordée  au  commerce 
et  à  l'industrie  ôommencent  à  peine  d'exercer  une  infliteDAe 
sur  le  sort  des  masses.  Il  ne  faut  pas  non  plus  oublier  qa» 
les  Anglais  viennent  rarement  dans  Tlnde  pour  s'y  fixer;  le 
climat  est  contraire  aux  Européens,  etiâs  s'en  vont  lorsqa'ili 
ont  fait  fortune.  C'est  ainsi  que  l'Inde  paye  chaque  anaée 
une  rançon  de  cent  einqu&nte  ou  deux  cents  miltions  à  des 
Anglais  qui  s'y  considèrent  comme  des  étrangers*  C'est  on 
drainage  lent,  mais  sûr,  qui  ne  peut  mA&quer  d'appauvrir 
le  pays,  et  qui  explique  bien  des  choses... . 

c  En  fin  de  cause,  n'oublions  pas  ce  que  fut  l'état  anté- 
rietir  de  ce  pays,  déchiré  sans  cesse  par  de  sanglantes  luttes 
intérieures;  rappelons-nous  la  misère,  l'abaissement  de  ces 
races,  le  despotisme  et  les  exactions  de  burs  radjahs  et  de 
leurs  nababs.  Elles  ont  changé  de  maitroB,  c'estvrai;  en  les 
contient  par  la  sévérité,  tant  pis  pour  les  rebelles  i  en  re- 
vanche, on  leur  octroie  un  avenir.  Si  la  fin  ne  justifie  pas 
les  moyens,  d'un  autre  côté  les  moyens  ne  doivent  pas  nous 
faire  regretter  la  fin....  » 

Et  à  ce  propos  citons  encore  un  ou  deux  passages  d'ua 
récent  article  du  Times  à  Toceasion  de  la  mort  de  Gholam 
Mohammed^  un  des  princes  feudataires  qui  conservent  eu 

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l'empire  anglais  dans  l'inde.  147 

core,  sous  la  protection  anglaise,  la  souveraineté  nominale 
d'un  de  ces  territoires  qui  ne  sont  pas  compris  jusqu'à  pré- 
sent dans  Fune  des  trois  Présidences.  Cet  article  est  inté- 
ressant au  point  de  vue  de  l'état  politique  de  la  Péninsule. 

Le  recensement  de  l'Inde,  dit  le  journal  anglais,  montre  que 
la  poj)ulatîon  musulmane  dans  ce  pays,  est  plus  redoutable  par 
le  nombre  qu'on  ne  le  supposait.  Elle  est  particulièrement  ex- 
posée à  des  tentations  de  conspiration  et  de  révolte.  Les  Hin- 
dous ont  reçu  en  héritage  la  tradition  de  la  servitude,  mais  les 
samsulmans  ont  vu  les  Anglais  les  remplacer  dans  leurs  positions 
de  race  conquérante  et  dominante  ;  ce  fait  n'est  que  d'hier.  Il 
est  de  la  plus  grande  importance  que  les  monuments  visibles 
de  leur  gloire  passée  disparaissent  paisiblement,  et  que  l'intérêt 
amène  les  représentants  des  familles  mahométanes  à  accepter 
la  loi  de  l'Angleterre.  Gholam  Mohammed  naquit  quand  son  père 
était  le  souverain  régDant,  Taillé  de  la  France  victorieuse,  et 
l'antagoniste  heureux  des  armes  anglaises  dans  le  Dékhan.  Il 
se  rattachait  ainsi  directement  et  personnellement  à  l'âge  d'or 
de  la  domination  musulmane  dans  le  Sud  de  Tlnde  ;  heureuse- 
ment aucun  de  ses  parents  n'est  en  situation  de  le  remplacer 
dans  l'imagination  de  ses  coreligionnaires.  Le  dernier  roi  de 
Behli,  dont  après  sa  chute  le  gouvernement  anglais  a  épargné 
la  vie  compromise  par  sa  complicité  dans  des  crimes  de  lèse- 
humanité,  est  mort  récemment  en  captivité,  et  avec  lui  a  dis- 
paru un  autre  anneau  de  la  chaîne  qui  rattachait  l'Inde  actuelle 
à  son  passé. 

Le  Nizam  reste  le  seul  grand  personnage  encore  investi  du 
pouvoir  souverain,  objet  des  aspirations  des  musulmans  de 
l'Inde;  mais  la  fidélité  de  la  cour  d'Haïderabad  pendant  la  ter- 
rible épreuve  de  1857,  a  montré  que  ce  n'est  pas  de  ce  côté  que 
la  désaffection  peut  trouver  un  appui.  Il  faut  espérer  que  le  gou- 
vernement de  rinde  réussira  à  donner  satisfaction  à  quelques, 
unes  des  aspirations  légitimes  des  mahométans;  et  quoiqu'ils 
ne  puissent  espérer,  sous  la  règle  égalitaire  du  gouvernement 
anglais,  de  recouvrer  la  prédominance  dont  ils  ont  usé  et  abusé 
sous  Haïder-Ali  et  Tippo-Saïb,  un  traitement  généreux  et  bien- 
Teiliant  pourra  lès  amener  avec  le  temps  à  oublier  les  mauvaises 
traditiona  de  leur  suprématie,  et  à  accepter  franchQment  les 
bienfaits  d'un  gouvernement  impartial  et  d'un  système  social 
équitable. 

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148  ASIE.  (N"  163-155.) 

VII 


TIBET. 

153.  Herm.  von  Schlàgintweit.  Reisen  in  Indien  und  Hochàsien, 
lg54-58.  T.  II.  Hochasien  :  der  Hymalaya.  lena,  1871,  in-S» 

Il  y  aura  un  S«  volame.  Voir  le  précédent  vol.  de  V Année,  p.  27,  n»  61. 

154.  Là  Mission  du  Tibet,  de  1855  à  1870,  comprenant  Texposé  des 
affaires  religieuses,  et  divers  documents  sur  ce  pays,  d'après 
les  lettres  de  M.  Tabbé  Desgodins,  missionnaire  apostolique , 
par  C.  H.  Desgodins,  Inspecteur  des  forôt^  en  retraite.  Verdun, 
1872,  in-8%  iv-4l9  p.,  avec  une  esquisse  du  Tibet  oriental. 
(Paris,  Palmé). 

155.  Itinéraire  de  Pa-tang  à  Terkalo,  et  description  des  vallées  du 
Kïn-cba-kiang  '(fleuve  Bleu)  et  du  La&-sang-kiang  (Gamboge), 
entre  le  30«  et  le  29*  parallèles  environ.  Extrait  d'une  lettre  de 
M.  Tabbé  Desgodins  à  M.  Francis  Gamier.  Bulletin  de  la  soe, 
deGéogr,,nov.  1871,  p.  343-348. 

La  moyenne  de  cinq  observations  de  hauteur  méridienne  solaire, 
faites  par  M.  Desgodins  et  recalculées  par  M.  Garnier,  a  donné  pour  la 
latitude  de  Yerkalo  ag^'S'SO"  N.  Il  y  a  une  autre  lettre  de  Tabbé  Des- 
godins à  M.  Fr.  Gamier,  au  cahier  d'octobre  1872  du  BuUettn^  p.  419. 


Les  lettres  de  M.  l'abbé  Desgodins. 

Un  missionnaire  français,  M.  Yshhé  Desgodins,  a  recueilli 
sur  le  Tibet  en  général  des  informations  qu'il  a  consignées 
dans  sa  correspondance  de  famillç,  et  que  son  frère  a  ré- 
cemment publiées  (n*^  154).  Le  livre  aurait  gagné  à  ne  ren- 
fermer que  les  communications  du  missionnaire,  sans  addi- 
tions étrangères  sur  lesquelles  il  y  aurait  fort  à  dire;  tel 
qu*il  est,  c'est  encore  une  bonne  acquisition  sur  un  pays  si 
peu  connu.  On  ne  saurait  oublier  que  le  plus  clair  de  nos 
renseignements  sur  l'intérieur  de  la  région  tibétaine,  c'est 
aux  missionnaires  que  nous  le  devons,  au  P.  deUa  Penna, 
notamment  et  surtout  à  MM.  Hue  et  Gabet.  Le  chapitre 


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TURKESTAN  ORIENTAL.  149 

oonsacré  aux  tribus  barbares  de  la  frontière  du  sud-est,  là 
où' le  Tibet  confine  à  la  Chine  méridionale  et  k  l'Indo- 
Chine,  n'est  pas  la  partie  la  m(nns  intéressante  du  livre  de 
M,  Desgodins.  Ces  peuplades  inhospitalières  n'ont  par  elles- 
mêmes  rien  de  bien  attrayant;  mais,  dans  leur  configuration 
physique  et  dans  leurs  dialectes  incultes,  on  retrouve  sou- 
vent, sur  l'origine  et  le  mélange  des  races,  des  données  qui 
n'existent  plus  ailleurs.  Est-il  besoin  de  rappeler  quel  ad- 
mirable parti  les  études  contemporaines  de  philologie  com- 
parée ont  tiré  de  cM  élément? 

Les  itinéraires  de  M.  Fabbé  Desgodins  h  travers  un  pays 
frontière  absolument  inexploré  seraient  d'un  grand  prix 
pour  la  géographie,  s'ils  étaient  accompagnés  d'observations 
et  de  remarques  précises.  D'après  des  lettres  adressées  à 
M.  Francis  Garnier  (voir  ci-dessus  le  n**  155),  le  mission- 
naire aurait  déterminé  les  latitudes  de  quelques  points  im- 
portants dans  la  contrée  qui  touche  à  la  frontière  çud-est 
du  Tibet  ;  mais  ces  observations  ne  nous  sont  pas  données 
dans  le  volume  actuel.  Comme  marque  de  sa  haute  estime 
pour  le  zèle  de  M.  l'abbé  Desgodins,  et  pour  lui  faciliter 
ses  observations  ultérieures,  la  Société  de  Géographie  de 
Paris  a  décidé  qu'un  compteur  serait  mis  à  sa  disposition. 

VIII 

LE  TVBILESTAN. 

TURKESTAN  INDEPENDANT.  YARRAND.  KACHOAR^   etC.  * 

156.  Meer  Izzut  Oollah.  Travels  in  Central  Asia,  1812-13.  Transla- 
ted  by  Capt.  Henderson,  Calcutta^  1872,  in-8«. 

Traduit  da  manuscrit  persan.  Ce  voyage  était  déju  connu  par  la  ver- 
sion partielle  que  Klaproth  en  a  donnée  en  1826  dans  le  2*  volume 
de  son  Magasin  Asiatique.  Pour  ceux  qui  n*auraient  pas  sous  les  yeux 
cet  important  recueil,  nous  en  lirons  l'introduction  suivante  dans  la» 
quelle  Klaproth  fait  bien  connaître  l'objet  et  la  nature  de  la  rela- 
tion: 

<  En  18i2,  M.  Moorcroft,  qui  avait  le  projet  de  visiter  les  oontrôes 


150  ASIE.  (N"^  156-162.) 

situées  an  nord  de  THimâlaya  lorsqif  ane  occasion  favorable  se  reneoiH 
trerait  pour  entreprendre  cette  excarsion,  y  envoya  à  Tavance  Mir 
l'zzet-Ullah,  qui  était  attaché  à  son  service.  Celui-ci  alla  de  Dehli  au 
Kachmtrj  de  là  au  Tibet^  Ae  ce  pays  à  Yarkand,  de  cette  ville  ^ 
Kachgar,  d'où  il  gagna  la  frontière  de  la  Chine,  Il  revint  par  Kho- 
kandj  Samarkandj  Boukhâra^  Balkh,  Khoulm^  Kabouly  Bâmiân^  et 
retourna  dans  les  plaines  de  l'Hiadoustan.  Pendant  cette  longue  course, 
il  tint  un  journal  exact  dans  lequel  il  nota  les  difTérents  endroit?  où  II 
passa,  et  les  objets  qui  fixèrent  son  attention.  Comme  il  était  doué 
â^inteiligoBoe  et  de  sagafiité,  il  recoeillit  beaucoup  de  renseignements 
précieux,  quoiqu'ils  ne  soient  ni  aussi  détaillés  ni  aussi  préoi«  que 
ceux  de  Moorcroft  lui-ménie.  • 

157.  Results  of  the  observations  teken  by  M.  R.  B.  Shaw  during  his 
journey  to  Yarkçind  in  the  year  1870;  calculated  by  W.  ElUs, 
of  the  Royal  Observatory,  Greenwich.  Journal  of  the  Roy. 
Geogr.  Soc.j  vol.  XLI.  1871,  p.  373-392. 

Les  observations  calculées  par  M.  Ellis  se  rapportent  à  la  latitude,  i 
la  longitude  par  les  distantes  lunaires,  à  la  déclinaison  magnétique  et 
aux  altitudes  au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  Les  éléments  de  ces  di- 
verses observations  sont  consignés  dans  une  suite  de  tableaux^  et  d'au* 
très  tableaux  contiennent  les  résultats.  Il  nous  a  paru  utile  de  grouper 
dans  un  tableau  d'ensemble  les  principales  données  qui  se  tirent  de  ees 
documents. 


Longitude. 

Altitude 

DécliRfttSOn 

Localités. 

Latitude. 

E.  de 
Greenw. 

E.  de 
Paris. 

en 

delà 

mètres. 

boussole. 

Tchagra. 

4658 

Mazimik,  Passe. 

6444 

Pafflxal. 

34» 14' 59" 

4703 

Gogra. 

34  18  53 

4791 

Sommet  du  Col. 

6025 

Patsalang. 

5244 

, 

Grim,  Passe. 

5093    ^ 

Tchouichou,  Passe. 

36  53  46 

3257 

Kochtak. 

37  22  28 

1721 

Kargalik. 

37  54    2 

1263 

Yanghl  Bazar. 

77°  8'   7" 

74047' 57'' 

1115 

Yarkand. 

38  24  41 

77  12    8 

74  51  58 

1000 

20 15' 

Ouîtoughrak, 

77  42  23 

75  22  13 

1688 

Olbek. 

86  26  23 

77  48  51 

75  38  41 

3434 

4  45 

Tchibra. 

36     6     7 

5126 

5  37 

Kara-Tâgh,  col. 

35  42  39 

5379 

2  35 

âomdo. 

78  30  52 

76  10  42 

5195 

I.eh. 

34T1 

4  20 

158.  Du  même  :  On  the  position  of  Peïn,  Tcharchand,  Lob  Noor,and 
other  places  in  Central  Asia.  Proceed.  ofthe  Roy,  Geogr,  soc. y 
XVI,  n«  3,  p.  242-253. 

Essai  d'éclaircissement  de»  chapitres  de  Marco  Polo  qui  touchent  à 
ces  parties  de  l'Asie  Intérieure. 


y  Google 


TURKESTAN   ORIENTAL.  151 

M.  Shaw  a  aussi  la  à  U  réunion  do  TAssûoiation  Britannique  à 
Brighton,  au  mois  d'août  dernier,  un  mémoire  on  the  phijèioal  feaiV" 
res  of  the  Pamir,  and  its  Aryan  inhabitants.  Comme  résultat  de  ses 
•  propres  observations  et  de  celles  de  M.  Hayward  (voif  le  précédent 
volume  de  VAnnée,  p.  35  et  44),  M.  Shaw  représente  les  hautes  step- 
pes de  Pamir  non  comme  un  plateau  ouvert  et  continu,  soutenu  par 
une  chaîne  méridienne  appelée  montagnes  de  Bolor  (c'est  Tidée  qu'on 
s'en  est  faite  généralement  jusqu'à  présent),  mais  comme  un  ensemble 
de  chaînons  dirigés  parallèlement  de  TEst  à  l'Ouest,  avec  des  lacs  dans 
les  dépressions  d'où  s'épanchent  des  cours  d'eau  qui  se  portent  les  uns 
au  levant,  les  autres  au  couchant.  Les  traditions  de  deux  grandes  bran- 
ches de  la  race  arienne  placent  leur  berceau  dans  cette  région;  aujour- 
d'hui encore  elle  est  occupée  par  une  race  entièrement  différente  des 
populations  tâtares,  et  qui  se  dit  du  même  sang  que  les  Tadjiks  de 
Bokhara,  dont  la  langue  est  le  persan.  Leur  peau  est  blanche,  les  che- 
veux souvent  de  couleur  claire,  les  yeux  brun-clair,  les  traits  fins,  la 
physionomie  régulière  et  d'une  soupe  européenne.  À  en  juger  par  le 
court  vocabulaire  que  l'auteur  a  pu  recueillir,  leur  langue  a  une 
affinité  plus  directe  avec  le  sanscrit  qu'avec  le  persan  moderne. 

159.  Letters  from  M.  G.  W.  Hayward  on  his  explorations  in  Gilgit 
and  Yassin.  Journal  of  the  Roy.  Geogr.  Soc,  vol.  XLI,  p.  1-46; 
wiih  Map. 

On  a  réuni  ici  les  dernières  lettres  de  M.  Hayward,  mort  assassiné 
dans  les  hautes  vallées  de  THindou-koh,  et  les  détails  que  l'on  a  re- 
cueillis sur  la  catastrophe  (voir  notre  précédent  volume,  p.  35  et  38). 
©n  trouve  à  la  suite  plusieurs  vocabulaires  des  dialectes  de  Ghilghit, 
de  Tchitral,  et  une  série  d'itinéraires  qui  seront  d'un  grand  prix  pour 
la  cartographie. 

Voici  quelques  remarques  et  une  ou  deux  observations  de  l'infortuné 
voyageur  ; 

«  Nos  cartes  placent  une  ville  de  Kachgar  vers  la  tête  de  la  vallée 
de  Tchitral  ;  il  n'y  a  pas  là  de  place  de  ce  nom.  Tout  le  pays  est  ap- 
pelé  Kachgar.  »  Cette  assertion  positive,  venant  d'un  observateur  tel 
que  M.  Hayward,  tranche  la  question  si  longtemps  débattue  des  deux 
Kachgar.  Le  voyageur  ajoute  :  «  Les  districts  de  Yassïn,  Ponyal  et 
Mastoûk  forment  le  haut  Kachgar;  le  Tchitral  forme  le  Bas- 
Kachgar.  » 

€  J'ai  trouvé  pour  la  latitude  de  Yassïn  36'>22'38"  N.,  et  7765  pieds 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer  (2367  mètres),  par  le  point  d'ébullitioii 
de  l'eau.  La  vallée  de  Ghilghit  varie  en  altitude  de  5ooo  à  5600  pieds 
(de  1500  à  1700  m.).  Les  calculs  d'altitude  s'appuient  sur  l'altitude 
adoptée  pour  Skardo  par  les  ingénieurs  de  la  grande  triangulation, 
2703  mètres. 

«  L*observation  a  donné  pour  la  latitude  de  Ghilghit  35*'55*2'';  et  pour 
la  latitude  de  Yassïn  36»22'44''.  » 

La  remarque  suivante  a  surtout  une  importance  capitale  ;  «  J'ai  tou- 
jours été  d'opinion  que  la  vraie  route  de  l'Inde  à  Yarkand  est  de  Peï- 
chavèr  par  la  vallée  de  Tchitral,  ou  du  Kachmir  par  les  vallées  de 
Yassïn  et  de  Ghilghit,  et  non  par  la  chaîne  de  Karakoram.  Je  suis  plus 
que  jamais  porté  à  maintenir  cette  opinion,  depuis  que  j'ai  vu  l'excel- 
lente route  qui  remonte  la  vallée  de  Yassïn.  » 

160.  Route  d'iBBAHiM-KnlN  de  Kachmir  à  Yarkand  par  Yassïn,  ea 

uigiiizeu  uy  >.^«  v^  v^' pc  i n^ 


152  ASIE-  (n"  156-162.) 

1870.  Proceedings  ofthe  Roy.  Geogr,  Soc.,  XVI,  n*  3,  p.  387- 
392. 

Cette  roQte  de  l'Inde  à  Yarkand  par  les  vallées  da  DardistaD,  recoin- 
mandée  par-dessus  toutes  les  autres  par  M-  Hayward,  est  précisément 
celle  qu'a  suivie  en  1870  Ibrahim-Khàn,  attaché  aux  travaux  de  la 
triangulation  de  l'Inde,  un  des  indigènes  employés  par  M.  Montgome- 
rie  dans  la  reconnaissance  scientifique  du  Tibet  et  du  Turkestan,  c'est- 
à-dire  des  régions  de  la  haute  Asie  difficilement  accessibles  aux  explo- 
rateurs européens.  Nous  avons  ici  un  itinéraire  complet  de  Srlaagar 
à  Yarkand  mesuré  en  kôs  de  station  en  station,  mais  sans  di- 
rections. 

161.  Major  T.  G.  Montgomerie.  A  Havildar  journey  through  Chitral 
to  Faizabadin  1870,  Ibid.  p.  253-261. 

Extrait  du  rapport  général  du  major  Montgomerie  sur  les  opérations 
de  la  triangulation  de  l'Inde  durant  la  campagne  de  1870-71  (voir 
ci-dessous,  le  S  2  des  développements). 

162.  Du  même  :  Eepori  oî  the  Mirza's  exploration  from  Caubul  to 
Kashgar  (1868-69).  Journal  ofthe  Roy.  Georg.  Soc.^  vol.  XLI, 
p.  132-193.  Map. 

Ceci  est  moins  le  Rapport  proprement  dit  de  l'explorateur  persan 
formé  à  l'école  des  ingénieurs  anglais  de  l'Inde  et  que  l'on  ne  désigne 
que  sous  l'appellation  de  Mirza,  qu'un  mémoire  du  major  Montgomerie 
où  le  Rapport  est  accompagné  d'un  'commentaire  perpétuel.  C'est  un 
morceau  précieux  pour  la  géographie  de  toute  cette  haute  région. 
(Voir  ci-dessous,  $  1).  —  Le  Rapport  proprement  dit  fait  partie  du 
General  Report  du  colonel  Walker  on  the  trigonometrical  survey 
publié  à  Rourkî  en  1870  en  un  vol.  gr.  in-4«>  de  113  pages,  avec  5  car- 
tes. (Voir  les  Mittheilungen  de  Petermann,  1872,  n°  1,  p.  40.) 


Les  explorations  anglaises  de  la  haute  région  au   nord-ouest  de  Tlnde. 
S  1*'.  Le  Mirza. 

On  voit  par  ces  relevés  bibliographiques  combien  les  ex- 
plorations poursuivies  avec  persévérance  depuis  quel- 
ques années  par  les  Anglais  dans  la  haute  région  qui  con- 
fine au  nord-ouest  de  Tlnde  sont  importantes ,  et  quels 
résultats  considérables  en  sont  déjà  sortis  pour  la  connais- 
sance physique  et  topographique  de  ces  pays  jusqu'à  pré- 
sent si  peu  connus.  Parmi  les  voyages  que  nous  avons  notés, 
celui  du  Mirza  mérite  une  attention  tout  à  fait  particulière, 
à  cause  du  très-remarquable  'commentaire  dont  le  major 
Montgomerie  Ta  enrichi  (ci-dessus,  n®  162):  nous  nous  y 
arrêterons  un  moment, 

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CONTRÉES  AU  N.   0.  DE  l'iNDE.  153 

Le  major  Montgomerie ,  en  traçant  d'abord  un  aperçu 
général  de  l'itinéraire  du  Mirza,  depuis  Kaboul  jusqu'à 
Kachgar,  fait  remarquer  que  dans  le  Badakchân  et  la  vallée 
du  haut  Oxus,  les  données  fournies  par  le  nouvel  explora- 
teur sont  en  parfait  accord  avec  celles  du  lieutenant  Wood, 
compagnon  d'Alexandre  Burnes  en  Î836*. 

c  Pandja,  d'après  les  déterminations  chronométriques 
du  lieutenant  Wood,  se  place  au  72*  degré  41'  de  longi- 
tude orientale  (ôreenv^r.),  par  37®  2'  de  latitude;  les  obser- 
vations du  Mirza  donnent  pour  la  latitude  37"  5',  et  pour  la 
longitude  72^39'.  »  Ce  rapprochement  est,  en  effet,  un 
précieux  certificat  de  la  valeur  du  nouvel  itinéraire. 

«  De  Kaboul  au  Badakchân,  et  de  là  à  Kachgar,  le  Mirza 
a  fait  une  reconnaissance  complète  de  la  ligne  parcourue. 
Les  directions  ont  été  notées  au  moyen  d'une  bonne  bous- 
sole prismatique,  et  les  distances  mesurées  au  pas,  le  Mirza 
et  deux  ou  trois  de  ses  hommes  se  relevant  dans  cette  tâ- 
che. Ils  avaient  à  la  main  un  ctiapelet  dont  ils  faisaient 
glisser  un' grain  de  cent  pas  en  cent  pas,  avec  un  grain  plus 
gros  pour  marquer  le  millième.  Des  déterminations  de  la- 
titude ont  été  prises' au  moyen  de  l'observation  du  soleil  et 
des  étoiles ,  sur  différents  points  importants,  à  Kaboul,  à 
Khoulm,  à  Faïzabad,  au  Sirikoul,  à  Kachgar,  etc.  Jusqu'à 
Pandja,  on  peut  comparer  ces  observations  de  latitude  avec 
celles  de  Griffiths  et  de  Wood,  et  les  résultats  concordent 
généralement  à  2  ou  3  minutes  près,  accord  aussi  satisfai- 
sant qu'on  peut  le  désirer,  les  voyageurs  n'ayant  sûrement 
pas  fait  leurs  observations  précisément  aux  mêmes  points;... 
on  peut  donc  conclure  avec  certitude  que,  sans  avoir  la  pré- 

1.  L'intérêt  que  les  nouvelles  explorations  ont  ramené  sur  ces  con- 
trées où  Si  peu  d'Européens  ont  pénétré,  a  fait  penser  à  réimprimer 
l'excellente  relation  du  lieutenant  John  Wood,  la  première,  et  jusqu'à 
ces  derniers  temps  la  seule  que  l'on  eût  sur  TOxus  supérieur  [a  Per- 
sonal Narrative  of  a  journey  to  the  source  of  the  river  Oxus,  Lond. 
1841,  1  vol.  avec  carte).  Un  mémoire  de  M.  Yule  donne  un  nouveau 
prix  à  cette  réimpression  (1872,  J.  Murray). 

V 

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154  ASIE.  (n«' 156-162.) 

oision  rigoureuse  qu'on  ne  peut  guère  attendre  que  d'un 
astronome  de  profession^  les  obnervationi  du  Mirza,  là  où 
l'on  ne  peut  les  contrôler,  donnent  les  latitudes  vraies  avec 
un  écart  maximum  de  4  à  5  minutes.  » 

Voici  la  liste  des  déterminations  principales  du  Mina, 
auxquelles  le  major  Montgomerie  a  fait  les  corfeetions  ju« 
gées  nécessaires  : 


Longitude. 

Altitude 

Localités. 

Latitude. 

E.  de 

Greenw. 

Paris. 

en 
mètrfrs. 

Khoulm  (Tâchkourgân)* 

86° 37' 

67047' 

65° 27' 

Koundouz. 

36  45 

69    4 

66  44 

Houstak. 

36  59 

69  51 

67  31 

1554 

Faîzabad. 

37     2- 

70  36 

68  16 

1554 

Ichkaschïm. 

36  45 

71  88 

69  18 

3292 

Pandja. 

37     5 

72  39 

70-19 

Lac  Pamir,  ou  Barkât  Ya3s(n. 

87  <4 

74  18 

71  58 

4054 

Sirikoul  (Tàchkourgàn). 

37  4i 

75  13 

72  53 

3348 

Tanghi-Hissar. 

38  58 

76  26 

74    6 

1585 

Kachgar  (Yangha  Chèhr,  ou  la 

Ville-Neuve). 
Le  Vieux  Kachgar^ 

39  26 

76  16 

73  56 

1554 

39  29 

76  12 

73  52 

C'est  sur  cet  ensemble  de  données  que  la  ctirte  qui  ac- 
compagne le  rapport,  ou,  pour  mieux  dire,  le  mémoire  du 
major  Montgomerie,  a  été  construite. 

Les  altitudes  ayant  été  déduites  du  point  d'ébuUitîon  de 
l'eau,  laissent  place  ,  ainsi  que  le  fait  observer  M.  Mont 
gomerie,  à  un  certain  degré  d'incertitude;  elles  peuvent .dn 
moins  fournir  une  approximation  satisfaisante  de  Tahitnde 
relative  des  différentes  places. 

M.  Montgomerie  fait  remarquer  que  la  position  de 
Kachgar,  telle  qu'elle  se  déduit  des  observations  du  Mirza, 
est  plus  orientale  que  sur  la  carte  du  Turkestan  construite 
en  1867  sous  la  direction  du  colonel  Walker,  «déplace- 
ment que  j'avais  prévu  il  y  a  déjà  plusieurs  années,  ajoute 
le  major,  lorsque  j'essayai  de  fixer  la  longitude  de  Yarkand, 
celle  de  Kachgar  m'ayant  paru  dès  lors  devoir  être  portée 
plus  à  Test,  » 

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LE  badakchAn.  155 

M.  Montgoînerie  fait  encore  remarquer  à  ce  sujet  que 
d'après  les  récents  explorateurs  russes,  la  longitude  de 
Kachgar,  telle  que  la  donnent  leâ  cartes  antérieures  y  de- 
mande à  être  reculée  d'environ  2  degrés  vers  l'est,  ce  qui  la 
mettrait  par  75"  57'  environ  (GreenWi).  «  Mais  il  convient 
de  remarquer  que  cette  approximation,  qui  est  de  15'  plus 
occidentale  que  la  longitude  76'^  12'  à  laquelle  je  me  suis 
arrêté,  ne  se  rattache  encore  qu'à  un  seul  point  fixé  astro- 
nomiquement,  à  savoir,  l'extrémité  occidentale  du  lac  Issi- 
koul,  dont  le  chiffre  pourra  bien,  peut-être,  recevoir  quel- 
que correction.  » 

Dans  rétat  actuel  des  choses ,  les  géographes  auront  à 
chjisir  entre  ces  deux  approximations,  celle  des  astrono- 
mes russes  et  les  combinaisons  du  major  Montgomerie. 
Dans  Tincertitude,  et,  en  attendant  une  vérification  directe, 
on  pourrait  s'arrêter  à  une  moyenne  provisoire. 

S  2.  Le  Havildar. 

Dans  sa  communication,  également  fort  importante,  sur 
la  reconnaissance  faite  par  le  Havildar  (ou  sapeur)  de  Peî- 
chavèr  au  Badakchân  (ci-dessus,  n*  161),  le  major  Mont- 
gomerie en  résume  les  principaux  résultats  dans  le  passage 
suivant  : 

«  La  longueur  de  la  route  reconnue  est  de  286  milles 
(460  kilom.),  à  travers  un  terrain  tout  à  fait  neuf  pour  l'ex- 
plorateur européen.  La  route  touche  un  grand  nombre  de  di- 
stricts, et  détermine  avec  toute  l'exactitude  désirable  un 
certain  nombre  de  places  importantes.  Elle  donne  à  la  géo- 
graphie environ  13  000  milles  carrés  (de  33  à  34000  kil. 
c.)  de  cette  terra  ignota,  et  elle  aidera  à  ébaucher  la  géo- 
graphie d'un  area  encore  plus  étendu.  La  route  est  éche- 
lonnée par  vingt  observations  de  latitude  faites  sur  cinq 
points.  Les  observations  du  point  d'ébullition  sont  très- 
maigres,  le  havildar,  qui  en  était  à  sa  première  expédition, 

uiyiuzeuuy^OOgle 


156  ASIE.  (n~  156-162.) 

n'appréciant j)as  suffisamment  cette  nature  d'observations. 
D'après  l'existence  d'un  glacier  et  la  présence  de  la  neige 
en  septembre,  ainsi  que  par  d'autres  inductions,  il  croit  pou- 
voir conclure  que  le  col  de  Naksân  (dans  l'Hindou-koh 
oriental)  dépasse  17  000  pieds  d'altitude  (5200  mètres),  et 
que  la  passe  de  Dora  peut  être  de  16  000  à  16  500  pieds 
(de  4900  à  5000  mètres). 

«  La  position  de  Tchitral  a  toujours  été  un  grand  desi- 
deratum ;  or,  le  bavildar  en  a  déterminé  la  latitude  par  trois 
observations  concordantes  auxquelles  on  peut  avoir  con- 
fiance, et  la  distance  parcourue,  combinée  avec  cet  élément, 
donne  vers  le  nord  de  Peîchavèr  une  position  en  longitude 
qui  ne  peut  pas  s'éloigner  beaucoup  de  la  position  vraie. 

<  En  somme,  le  havildar  a  rempli  sa  mission  d'une  i&a- 
nière  satisfaisante,  et,  de  plus,  il  a  fixé,  par  le  relevé  des 
directions,  la  position  d'un  certain  nombre  de  pics,  qui  ai- 
deront à  préciser  sur  la  carte  les  montagnes  environ- 
nantes. » 

Le  colonel  Walker  (dont  la  carte  a  été  mise  en  cause)  n'a 
pas  tout  à  fait  la  mêmQ  confiance  dans  le  concours  des 
auxiliaires  indigènes,  ni  dans  les  résultats  de  leurs  explo- 
rations. Toutefois,  il  fait  remarquer  que  la  détermination 
de  l'altitude  de  Tchitral  par  le  bavildar  à  un  peu  plus  de 
2100  mètres  seulement  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  est 
un  fait  remarquable  dans  la  géographie  physique  de  cette 
région.  Quand  on  considère  que  les  seuls  pics  de  l'Hindou- 
koh  dont  on  a  jusqu'à  présent  déterminé  la  hauteur,  ont 
de  6500  à  8500  mètres,  ce  fait  que  Tchitral  descend  pres- 
que à  2000  mètfes,  quoique  situé  à  peu  de  distance  de  la 
chaîne,  a  pu  d'abord  paraître  très^douteux,  jusqu'à  la  dé- 
termination de  l'altitude  de  Yassïn  par  M.  Hayward  à 
7700  pieds  anglais  (2350  mètres  environ) ,  Yassïn  étant  à 
peu  près  à  la  même  distance  de  la  ligne  de  faîte  de  l'Hin- 
dou-koh que  Tchitral.  Il  paraît  donc  probable  que  la  chaîne, 
dans  cette  partie,  éprouve  yne  dépression  considérable. 

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TURKESTAN  RUSSE.  157 

Quand  nous  connaîtrons  mieux  la  géographie  de  cette  con- 
trée, nous  aurons  probablement  à  faire  subir  ^  de  gi*â.nds 
changements  au  système  de  montagnes  tel  que  nos  cartes 
le  représentent.  Le  massif  fortement  accentué  qui  repré- 
sente actuellement  la  ligne  de  partage  entre  l'Oxus  et  le 
Cophès  se  trouvera  sans  aucun  doute  beaucoup  moins  éle- 
vé que  nous  ne  le  supposons,  et  il  pourra  bien  arriver  que 
les  plus  hautes  sommités  du  système  soient  au  sud  de  la 
ligne  de  faite. 


IX 

TURKESTAN. 

Suite. 
TURKESTAN  RUSSE. 

163.  F.  Marthe.  RussischeArbeiten  ûber  Asien,  ausdem  Jahre  1870. 
ZeUschr.  der  Gesellschaft  fur  Erdk,  zu  Berlin,  1871.  n»  35, 
p.  440-475. 

Cet  aperçu  des  travaux  scientifiques  des  Russes  en  1870  dans  la  zone 
moyenne  et  le  nord  de  TAsie,  fait  nécessairement  une  part  considéra-  , 
bit  au  Turkestan  russe,  où  des  reconnaissances  étendues  et  d'impor- 
tants levés  topographiques  ont  eu  lieu,  appuyés  sur  les  déterminations 
astronomiques  sans  lesquelles  il  n'y  a  pas  de  géographie  positive. 
Quoique  succincte,  à  raison  du  grand  nombre  de  sujets  qu'elle 
embrasse,  la  Notice  de  M.  Marthe  est  très-complète  pour  Tan- 
née 1970. 

1S4.  A.  Fedschenko.  Reise  in  Kokan  und  zum  Nordende  der  Pa- 
mir, 1871.  Mittheilungen  de  Petermann,  1872,  n*  5,  p.  161- 
168. 

La  première  relation  de  cette  course  scientifique  de  M.  Fedchenko 
dans  les  nouveaux  territoires  de  Turkestan  russe,  a  été  publiée  en  russe 
dans  une  brochure  imprimée  à  Tachkent  en  1871  ;  outre  la  rédaction 
allemande  que  nous  en  avons  ici,  M.  Marthe  en  a  aussi  donné  la  tra- 
duction dans  le  journal  (Zeitschrift)  de  la  Société  de  Géographie  de 
Berlin,  1872,  n»  38,  p.  170-189.  A  la  suite  de  sa  version,  M.  Marthe  a 
traduit  (p.  190-301)  un  autre  opuscule  de  M.  Fedchenko  intitulé  : 
•  Catalogue  des  localités  visitées  par  l'expédition  scientifique  envoyée 
dans  le  Turkestan  par  la  Société  impériale  des  Amis  des  Sciences  Na- 
turelles, de  l'AnthropologleJ  et  de  l'Ethnographie,  de  1869  à  1871,» 


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158  ASIE.  (N*»'  163-170.) 

opuscule  fort  important  par  les  données  hypsométriques  qu'il  contient, 
chaque  localité  étant  accompagnée  de  sa  cote  d'altitude.  Enfin,  M.  de 
•  K-hanikoff  a  bien  voulu  faire,  pour  la  Société  de  Géographie  de  Pa- 
ris, un  extrait  de  ced  documents  que  no  as  reproduisons  ci-après,  heu- 
reux de  rencontrer  un  tel  eoUaborateux.  Le  D'  Petermann  annonce  au 
reste  dans  les  Mittheilungen  la  publication  prochaine  d'une  relation 
plas  développée,  accompagnée  d'une  carte  construite  sur  les  documents 
nouveaux,  selon  la  coutume  qui  donne  une  si  haute  valeur  au  précieux 
journal  géographique  de  Gotha.  —  On  avait  déjà  de  M.  Fedchenko  un 
aperçu  descriptif  de  la  vallée  de  la  Zérafchân  (dont  la  célèbre  Samar- 
kand est  le  centre),  dont  une  traduction  anglaise,  accompagnée  d'une 
carte  provisoire,  a  été  insérée  au  t.  XL  du  journal  de  la  Société  de 
Géographie  de  Londres  (voir  le  précédent  vol.  de  V Année  Géographi- 
que, p.  51,  n°94). 

165.  Du  même  :  Note  on  the  ruins  in  Samarcand;  from  the  russian. 
Proceedings  of  the  Roy,  Geogr,  soc,  XV,  n«  5,  p.  393-396. 

166.  D'  Radloff.  Das  mittlere  Serafschanthal.  Zeitschrift  der  Ge- 
sellsch.  fur  Erdk.  zu  Berlin,  1871,  n"  35,  p.  401  439;  n»  36, 
p.  497-526  (avec  une  carte  construite  par  M.  Radloff  sur  les  re- 
connaissances militaires  de  Pexpédition  russe  de  .1868). 

Ce  morceau  est  le  résultat  d'un  voyage  fait  par  l'auteur  en  1868, 
avec  les  instructions  de  la  Société  de  Géographie  de  Saint-Péters- 
bourg. 

167  Major-general  Abramof,  chief  of  the  Zarafshan  district.  The 
principality  of  Karategin.  Transi,  from  the  russian  by  R.  Mi- 
chell.  Journal  of  the  Roy,  Geogr.  soc,  vol.  XLI,  1871,  p.  338- 
342. 

Premières  informations  un  peu  précises  sur  un  canton  jusqu'à  pré- 
sent inexploré  et  tout  à  fait  inconnu,  si  ce  n'est  de  nom.  —  Voir 
ci-dessous  la  notice  de  M.  de  Khanikoff  sur  la  relation  du  professeur 
Fedchenko. 

168.  Chepelew,  officier  d'état> major.  Le  défilé  et  les  glaciers  de  Mou- 
zarte,  dans  la  chaîne  du  Thian-chan  (trad.  du  russe  par  M.  Bros- 
set  îeixnQ).  St.-Pétersh.f  1872,  in-4%  16  pages. 

L'original  a  été  publié  dans  le  Bulletin  (Isvestïa)  de  la  Société  de 
Géographie  russe,  t.  VIII,  1872,  n"  4,  p.  113-137.  La  chaîne  neigeuse 
du  Thian-chan  (le  Mouz-tàgh,  ou  Montagne  de  Glace,  des  Mongols),  si 
longtemps  reléguée  pour  nous  presque  dans  le  domaine  de  la  géogra- 
phie mythique,  va  être  enfin  foulée  par  le  pied  des  voyageurs  euro- 
péens. Ainsi  que  le  fait  justement  remarquer  M.  SpSrer,  dans  son 
Aperçu  des  travaux  de  la  Société  de  Géographie  russe  en  I87i  (#t<- 
theil,  de  Petermann,  1872,  p.  213),  la  prise  de  possession  du  Tarbaga- 
taï  par  les  Russes  ouvre  un  nouveau  champ  à  l'activité  des  explorateurs 
ru>s;s,  dont  Kouldja,  par  sa  position,  devient  le  centre  naturel.  Le 
Thian-chan  oriental  cesse  d*étre  une  région  interdite  à  nos  investiga- 
tions. Voir  ci-après  aux  développements,  le  S  2. 

169.  Stebkitzki.  Les  steppes  des  Turcomans.  Bulletin  delà  Soc.  de 
Géogr,  de  Paris,  avril  1871,  p.  457-467. 

Cette  ji9te  n*«8t  qu'un  court  extrait  d'un  travail  considérable  adressé 


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TURKESTAN   RUSSE.  159 

par  M.  Stebnitzki  à  la  Société  rasse  de  Géographie  de  Tiflis,  et  qai 
donnera  probablement  lieu  à  une  publication  plus  étendue.  La  relation 
se  rapporte  aux  steppes  comprises  entre  la  côte  orieniale  de  la  mer 
Caspienne  et  la  moitié  inférieure  du  cours  de  TOsus  ou  Amou>déria,  et 
aux  tribus  torkomanes  qui  parcourent  cette  grande  région  entre  Khiva  ' 
.  et  le  Khoraçàn,  particulièrement  à  la  borde  nombreuse  des  Téké.  La 
partie  aujourd'hui  desséchée  de  Tancien  Ozus  est  comprise  dans  ces 
limites,  et  elle  est  l'objet  d'une  étude  spéciale  de  l'auteur  sur  laquelle 
nous  reviendrons  ci-dessous. 

170.  Les  Turkomans  Yomouds.  Extrait  de  la  Revue  Militaire  russe, 
janvier  1872.  Ibid.  juillet,  p.  158-170,  et  sept.  p.  319. 


S  i^'.  Les  parties  inexplorées  ou  peu  connues  du  Turkeskan  russe. 
Notes  de  M.  Fedehenko. 

M.  Pedchenko,  professeur  d'histoire  naturelle  à  TUni- 
versité  de  Kazan,areçu  delà  Société  des  Sciences  naturelles 
de  Moscou  la  mission  d'étudier  les  nouveaux  territoires  du 
Turkefitan  russe,  et  en  particulier  la  célèbre  vallée  de  Sa- 
markand arrosée  par  laZarefchân.  M.  Fedchenkoafaitcon-- 
naître  les  résultats  physiques  et  géographiques  de  sa  mission 
dans  quelques  publications  fragmentaires  qu'ont  reprodui- 
tes les  deux  principaux  organes  géographiques  de  rAlIema" 
gne  (ci-dessus  n"^  1 64  et  1 65) ,  et  doat  M.  de  Ehanikoff  a  donné 
à  la  Société  de  Géographie  de  Paris  une  analyse  succincte, 
avec  des  remarques  que  nous  reproduisons  : 

Les  explorations  de  M.  Fedchenko  comblent  des  lacunes  con- 
sidérables dans  nos  connaissances  du  territoire  de  Khokand,  et 
redressent  beaucoup  de  renseignements  erronés  admis  sur  la 
foi-  de  rapports  verbaux  peu  exacts.  Le  vaste  terrain  monta- 
gneux qui  s'étend  entre  la  limite  méridionale  de  Khokand  et  la, 
chaîne  de  THindou-kouch  n'est  maintenant  resté  inexploré  que 
sur  une  longueur  comparativement  insignifiante,  car  il  se  borne 
à  l'espace  compris  entre  le  Kizil-soii,  dernier  point  au  sud  visité 
par  M.  Fedchenko,  et  le  lac  Siri-koul  (lac  Victoria)  découvert  et 
déterminé  astronomiquement  par  le  voyageur  anglais  le  capitaine 
Wood. 

La  largeur  de  cette  bande  ne  dépasse  pas  la  distance  de 
Tachkend  à  Samarkand,  à  savoir,  420  kilomètres.  M.  Fedchenko 
a  donné  à  ses  lecteurs  une  idée  claire  et  assez  détaillée  sur 


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160  ASIE.  (n*»' 163-170.) 

l'orographie  et  l'hydrographie  du  khanat  de  Khokand;  mais  ce 
sont  surtout  les  renseignements  qu'il  a  fournis  sur  les  confins 
orientaux  de  cette  province  qui  ont  une  haute  importance  géo- 
graphique, car  là  le  zélé  voyageur  a  pu  déterminer  la  positj^ n 
du  partage  d'eau  entre  POxus  et  le  Jaxartes,  l'Amou  et  le  Syr- 
Daria  des  géographes  modernes,  de  même  que  la  position  de 
Ouzkend.  Cette  ville,  qu'on  plaçait  à  120  kilomètres  au  sud -est 
d'Andidjân,  n'en  est  éloignée  que  de  63  kilomètres  et  se  trouve 
exactement  à  l'orient  de  ce  dernier  point.  En  général,  le  levé  de 
M.  Fedchenko  recule  considérablement  à  l'orient  la  frontière 
qui  sépare  Khokand  des  possessions  de  Yacoub  Bek  de 
Kachgar. 

.  Les  montagnes  méridionales  du  khanat  de  Khokand  ne  sont 
pas  très-élevées,  et  s'étendent  en  collines  alignées  parallèlement 
en  plusieurs  chaînes.  Au  delà  de  ces  élévations,  aux  sources  du 
Sourkhab  (Eau  rouge,  Kyzil-sou  en  turc)  se  trouve  un  plateau 
élevé  d'un  peu  plus  de  8000  pieds  anglais  (environ  2400  mè- 
tres), nommé  Alaï.  Il  est  borné  au  sud  par  une  puissante  chaîne 
de  montagnes,  dont  les  cimes  sont  couronnées  de  neiges  éter- 
nelles. M.  Fedchenko  croit  que  la  hauteur  moyenne  de  ces 
cimes  n'est  pas  inférieure  à  5500  ou  5800  mètres,  mais  que  les 
plus  élevées  ont  certainement  25  000  pieds  anglais  de  hauteur 
absolue  (7600  mètres).  Quant  à  la  hauteur  de  la  ligne  des  neiges 
éternelles  dans  cette  partie  de  l'Asie,  le  voyageur  russe  la  fixe 
à  4300  mètres.  M.  Fedchenko  nomme  cette  large  bande  de  mon- 
tagnes chaîne  Trans-alaïenne,  et  dit  que  sa  pente  septentrionale 
sert  de  limite  au  sud  du  territoire  de  Khokand,  contigu  en  cet 
endroit  au  khanat  de  Karatéghin,  ou  Karaduighôn,  qui  n'a  pas 
100  000  habitants,  tandis  que  la  population  du  khanat  de 
Khokand  est  évaluée  par  M.  Fedchenko  à  7  ou  800  000  hommes. 

Karatéghïn  est  peuplé  de  Tadjiks  purs,  tandis  que  Khokand, 
d'après  le  voyageur  russe,  est  habité  par  des  Sartes,  mélange 
de  Turcs  et  d'Iraniens.  En  outre  des  Tadjiks,  la  province  de 
Karatéghïn  contient  aussi  des  nomades ,  les  Kara-Kirghiz.  Le 
chef  de  Karatéghin  se  considère  comme  étant  issu  d'Alexandre 
le  Grand,  et  prend  le  titre  de  chah.  Les  chefs  de  district,  à 
Khokand,  se  nomment  serkerdeh]  dans  le  khanat  de  Kara- 
téghïn, ils  portent  le  nom  de  beks.  L'administration  du  Kara- 
téghïn est  concentrée  dans  les  mains  d'un  employé  supérieur 
nommé  mirzadar^  qui  a  plus  de  pouvoir  que  le  chah  lui-môme. 
Les  impôts  sont  payés  en  produits  de  terre  et  en  travaux  pu- 
blics. Chaque  famille  est  astreinte  à  fournir  annuellement  au    ' 

A 

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LE   THIAN-CHAN.  161 

trésor  on  pot  de  beurre,  deux  bœufs,  et  une  certaine  quantité  de 
bois  de  chauffage  ;  en  sus,  elle  est  tenue  d'envoyer  un  certain 
nombre  d'hommes  pour  cultiver  les  terres  appartenant  au 
chah. 

M.  Fedcheoko  admet  l'existence  du  Pamir,  que  plusieurs 
géographes  considéraient  comme  problématique.  D'après  le 
témoignage  des  iodigènes,  il  y  a  deux  Pamirs,  le  grand  et  le 
petit,  Pamir  %  Kelân  et  Pamir  i  Khourd.  Ce  dernier  est, 
d'après  M.  Fedchenko,  probablement  celui  qui  figure  sur  les 
cartes  anglaises  autour  du  lac  Siri-koul  ;  quant  au  premier,  le 
voyageur  croit  qu'il  s'étend  au  sud  et  à  peu  de  dislance  des 
monts  Trans-alaïens,  et  qu'il  forme  un  vaste  plateau  jusqu'à 
présent  inexploré. 

Nous  n'irons  pas  jusqu'à  dire,  avec  M.  de  Ehanikoff,qu6 
la  communication  de  M.  Fedchenko  a  pour  Torographie 
de  l'Asie  la  même  signification  que  la  (Recouverte  des  sour- 
ces du  Nil  pour  la  géographie  de  T Afrique;  car  dans  cet 
ordre  d'appréciations  il  faut  faire  entrer  en  ligne  de  compte 
la  notoriété  historique.  Les  hauts  plateaux  qui  constituent 
la  terre  de  Pamir  ont  d'ailleurs  besoin  d'être  complètement 
et  régulièrement  reconnus  dans  leur  ensemble,  avant  que 
Ton  puisse  se  prononcer  d'une  manière  définitive  sur  leur 
nature  et  leur  caractère. 


S  9.  La  passe  principale  da  Thian^chan.  Première  reeonnaiisance  rasse. 

Nous  avons  fait  ressortir  déjà  l'intérêt  du  voyage  de 
M.  Ghépéleff,  un  des  officiers  d'état-major  du  corps  dW- 
mée  du  Turkestan  russe,  dans  la  partie  centrale  du  Thian- 
chan,  énorme  chaîne  à  laquelle  ses  glaciers  et  ses  neiges 
perpétuelles  ont  valu  le  nom  mongol  de  Mouz-tagh, 
<  la  montagne  de  Glace  3».  Cette  partie  de  la  chaîne,  qui 
sépare  la  nouvelle  possession  russe  du  Tarbagataî  (la  ci-de- 
vant Droûngarie)  des  États  aujourd'hui  indépendants  de 
l^achgar  et  de  Yarkand,  a  été  pour  la  première  fois  l'objet 
de  reconnaissances  partielles,  en  1869  et  70,  par  deux  qf- 
ïv'année  géoçb.  xî.  Ht 

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l62  ASiÉ.  (n*- 163-17O0 

fiders  rusi^étf,  MM.  Polttta.tsky  et  le  BaK)ii  de  Kaùffiars. 
Le  nouvel  explorateur,  M.  Ghépéîetf,  s'est  trouvé,  en  1871, 
dans  de  meilleures  conditions  que  ses  deux  prédécesseurs, 
et  a  ponssé  plus  avant  ees  reeonnaifRsances.  Il  s  fraàchi 
la  grande  et  difficile  passe  de  Mou^atrt,  q'tti  edt  là  roitité 
ïa  plus  ôrcËinaire  des  caravanes,  éi  î|  &  piî  levét  et  iûô- 
surer  à  la  chaîne  l'espace  qu'il  a  parcouru. 

Le  défilé  de  Mouzarl  i^'ottVrefi^r  la  partie  dn  Tkîan-efaan 
qui  ô'éteïid  à  Kestde  flssyk-koul.  On  le  regardé?  comme  la 
totfte  la  pîus  directe  éûtre  la  Dzoûngarie  et  le  ïùrkestân 
orientd.  Selon  le  témoignage  des  Chinois,  cette  passe  pré- 
sente des  difficultés  extraordinaires  et  des  dangers  sérieux, 
à  cause  des  immenses  glaciers  qui  l'entourent. 

M.  Chépéleff  donne  une  description  circonstanciée  de  ïi 
passe  et  des  opérations  qu'il  y  à  accomplies.  Lé  défaut  dé 
Baromètre  (if  n'avait  pu  s'en  procurer  ni  &  Tachkent  ni  i 
1^enyï)ne  lui  £  pas  permis  de  déterminer  ïa  bâufèur  du  col; 
mais  des  considérations  de  diverses  sortes  lui  font  évaluer 
a  4000  métrés  environ  l'attitude  du  sommet  dé  la  passé  au- 
dessus  du  niveau  de  la  mer.  La  longueur  du  défilé,  de- 
puis les  premiers  contre-forts  du  Thiân-ctafi  jusqu'au  som- 
met du  col,  a  été  mesurée  à  la  chaîné  et  s'est  trouvée  dé 
50  verstes^  Si  la  pente  méridionale  a  sensiblement  la 
même  étendue  que  k  p^tte  mesurée,  l'épaîsseur  du  mas- 
sif formé  par  la  chaîne  est  sur  ce  point  d'une  centaine  de 
verstes,  c'eôt-à-dt^é  d'un  degré  de  latitude,  un  peu  ptug  ou 
moins. 

L'étendue  de  te  Dffer  de  gl«eé  qiie  l€  tî>yâgëttf  a  visitée 
àvdt  près  de  8  vérités  âé  lùtiguevtt  Èuf  une  verëte  et  demie 
h  2  teri^teâ  de  large;  inâis  à  côm|yte^  àa  sdmmet,  visible  à 
Fest,  jusqu'à  t'exti^émlté,  ee  bâssiff  gltfcé,  q|ui  a  ùb€  pesite 
bien  apparente  verô  le  sud,  doit  avoir  titt  parcours  (FenvirôBr 
14  ^erstes. 

1 .  On  sait  que  \à  \em.é  ëet  un  feu  j^lu^  l'ôtigué  que  l€  MStaètte, 

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l'ancien  lit  ûe  l'oxus.  iéi 

Le  Yoyâgemr  termine  ainsi  sa  commumcatton  :  «  Kotis 
ce  saurions  nons  dire  entièrement  satisfaits  des  réèûHats  de 
notre  voyage  ;  nous  avions  espéré  faire  une  récolte  autre- 
ment abondante  d'obi^ervations  sûr  la  p'arfié  sud  dtt  défilé  de 
Mouzârt.  Là  présénde  du  piquéft  kacigàr,  à  {jèu  de  distance 
du  col,  etlé  iiianque  de  fourrage  pour  nos  chevaux,  nous  ont 
forcés,  sotts  pehie  de  très^graves  inconvénients,  àrebroussei 
chemin  plus  tôt  que  nous  ne  l'aurions  souhaité.  NéaninoinSy 
notre  excursion  a  contribué  à  constater  le  fait  de  l'existence 
d'immenses  glaciers  sur  le  veréant  sud  duThian-chan,  et  de 
l'extrême  difficulté  du  passage  de  Mouzart,  dont  nous  en- 
tretiennent les  sources  chinoises  a^ec  un  degré  d'exactitude 
que  nous  sommes  à  même  d'apprécier  aujourd'hui.  » 

S  3.  L*aDcien  lit  de  TOxus. 

M.  Stébnitzli  a  donné  sur  le  lit  desséché  du  bas  Oxus  (ci- 
dessus,  n"  169)  des  notions  précises  fondées  sur  Tétude 
sérieuse  d'une  partie  Bolable  de  cet  ancien  Kt.  Il  a  fait  des 
observations  Baroinétriqueé,  des  nivellements,  dès  collec- 
tions géologiqnes  qui  lui  ont  permis  d'arriver  k  des  con- 
clusions presque  certaines  sur  les  lÛÛ  derniers  kilomètres 
de  réneien  lif  dé  l'Oins,  c'èet-à-dire  sur  k  partie  de  ce  lit 
comprise  entre  la  mer  et  le  puits  Âïdïn. 

Les  lieux  explorés  par  M.  Stebnitzki  portent  des  traces 
si  évidentes  du  lit  d'un  fleuve  jadis  important,  que  l'on  ne 
peut  s'y  tromper.  Ses  deux  rives,  nettênïent  dessinées,  por- 
tent encore  les  marques  d'un  dépôt  alluvial^  on  retrouve  les 
mèmeé  vestiges  sur  les  bancs  et  léâ  mfoniicùles,  qui,  s'éle- 
vant  du  fond  du  lit  à  différentes  hauteurs,  ont  été  peu  à  peu 
attaqués  par  l'eau  à  mesure  qu'elle  btdssait.  La  netteté  de 
toutes  ces  traces  est  telle,  qu'on  serait  porté  à  croire  que 
Tesu  coulait  dans  ce  lit  il  n'y  à  pas  longtemps.  Â  droite  et 
à  gauche  de  cette  rigole,  ïé  terrain  s'élève  en  pente  et  forme 
une  vallée  qui  n'a  pas  moins  de  6  kilomètres  de  largeur. 

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164  •        ASIE.  (n*»  171-178.) 

Les  sillons  qui  creusent  le  flanc  des  montagnes  et  descen- 
dent jusqu'au  lit  de  TAmou-daria  sont  creusés  par  ses  af< 
fluents.  D'après  les  déterminatioi^s  barométriques  et  les 
nivellements  exécutés  par  M.  Stebnitzki,  le  lit  du  fleuve,  sur 
une  étendue  de  100  kilomètres,  aune  pente  peu  éensible 
vers  la  mer  Caspienne;  c'est  pourquoi  il  est  difficile  d'ad- 
mettre que  le  soulèvement  des  côtes  ait  amené  la  dispari- 
tion du  fleuve. 


X 

ASIE  RUSSE. 

Suite. 
SIBÉBIE.   TERBITOIRE  DE  L^AMOÛR  CD  MANDCHODRIE  RUSSE. 

171.  Bulletin  de  la  Soc.  de  Géographie  d*Irkoutz  (branche  Sibérienne 
de  la  Société  de  Géographie  russe).  T.1, 1870-71,  en  5  fascicules 
(en  russe). 

Voici  l'indication  des  principaux  morceaux  contenus  dans  le  yoIu- 
me  :  Boutïn^  expédition  à  la  recherche  d'une  roate  de  commerce  en 
Chine  par  la  Mongolie  orientale.  —  P.  Orloff,  changement  dans  le  ni- 
yeau  du  lac  Baïkal.  —  Dobrotvorsky,  la  partie  méridionale  de  Tile 
Sakhalïn.  —  Dybovtky  et  Hodlefsky,  études  sur  Textrémité  S.  0.  du 
lac  Baîlcal.  —  G.  Fritehé,  déterminations  astronomiques,  hypsométri- 
ques  et  magnétiques  de  vingt-deux  points  en  Mongolie  et  dans  le  Nord 
delà  Chine;  etc.,  etc. 

172.  G.  Kennàn.  Tent  life  in  Siben'a,  and  adventures  among  the  Ko- 
raks  and  other  tribes  in  Kamtchatka  and  T^orthem  Asia.  Lond.y 
1871 ,  petit  in-8». 

L'auteur  était  attaché,  en  1865  et  66,  à  la  commission  télégraphique 
qui  s'était  proposé  de  relier  TEurope  à  rAmérique  par  le  Nord  de 
l'Asie.  Quoique  son  tempérament  tienne  beaucoup  plus  du  touriste  que 
du  voyageur  sérieux,  on  ne  laisse  pas  de  glaner  çà  et  là  quelque  bonne 
remarque  sur  les  tribus  de  l'extrême  Sibérie. 

173.  W.  ScHOTT.  Die  fûrwôrtlichen  Anhànge  in  den  tungusischen 
Sprachen  und  in  Mongolischen.  Abhandlungen  der  K,  Akad,%u 
Berlin.  1869.  Berlin,  1870,  1"  Partie,  p.  267-307. 

174.  Fùrst  P.  Kropotkïn.  Die  bisher  in  Ost-Sibirien  barometrfsch 
bestimmten  Hôhen.  Mittheilungen  de  Petermann,  1872«  n**  9, 
p.  341-353.  t 

Le  prince  f,  Krapotkln,  à  qu  l'on  doit  déjà  dlntéressantes  commu-r 

uiyiiizeu  uy  >.^«  v^  v^' pc  i n^ 


ASIE  RUSSE. 


165 


nications  sur  la  Sibérie  orientale  et  le  nord-est  de  la  Mongolie  {Année 
géogr.y  t.  Y£,  1867,  p.  212  et  216),  a  réuni  ici,  d'un  grand  nombre  de 
sources  (auxquelles  se  sont  jointes  ses  propres  observations),  ce  que 
la  science  possède  jusqu'à  présent  de  données  hypsométriques  sur  la 
Sibérie  orientale.  Non-seulement  M.  Krapotkïn  a  dressé  une  liste  très- 
étendue  des  cotes  d'altitude  fournies  par  les  observateurs,  mais  il  a 
discuté  à  fond  les  données  relatives  à  quelques  points  principaux,  à 
Irkoatsk,  notamment,  à  Nertchinsk,  au  lac  fiaîkal,  etc.  Nous  tirons  de 
son  ample  catalogue  quelques  points  particulièrement  intéressants. 


Longitude 

Altitude 

Localités. 

Latitude. 

E.  de 
Paris. 

en 
mètres. 

Observateurs. 

IrkovtalL. 

52016' 

1010  56' 

370 

—  Niveau  de  l'Angara. 

362 

Balkal,  niveau  moyen. 

390 

Krasnovîarsk. 

56    1 

90  28 

147 

Nikolalefsk  sur  l'Amour. 

53    8 

138  25 

12 

Kirensk. 

57  47 

105  48 

245 

Erman. 

lakttutelL. 

62     1 

127  25 

98 

— 

Setioghinsk. 

51     5 

104  18 

477 

— 

Niveau   de  la   Selinga, 

près  de  la  ville. 

455 

Panzner. 

Kiakhta. 

50  19 

104  10 

705 

Erman. 

Nertchinsk. 

51   58 

114  15 

444 

— ' 

Okhotsk. 

59  21 

110  51 

4 

— 

Plateau  de  la  Vitïm,  point 

de  partage  du  lablo- 

novoï. 

52     3 

110  35 

1140 

Tchita  (niveau   de   Tin- 

Roda). 

52     1 

111  10 

538 

Confluent  de  la  Bistraïa 

et  de  l'Argoun. 

52   12 

118  22 

441 

Bargousïn. 

53  37 

107  20 

437 

Fuss. 

Kansk. 

56   12 

93   19 

192 

lénlsnelak. 

58  26 

89  44 

75 

— 

Nichneudinsk. 

54  53 

96  42 

376 

Syan-sïn  (Mandchourie). 

46  16 

127  21 

132 

Oussoltzefi*. 

Pé-toun          (Id,) 

45  17 

122  40 

192 

— 

Ghirïn             (Id.) 

•    43  47 

124  28 

210 

_ 

Confluent  de  la  Chilka  et 

de  la  Tchassovaïa. 

53  25 

117  42 

346 

Krapotkïn. 

Confluent  de  la  Mdîa  et 

de  l'Aldan. 

60  25 

132  11 

151 

.— 

Albazïn  (niveau  de  l'A- 

mour). 

53  22 

121  57 

244 

~ 

175.  Archimandrite  Palladius.  Récent  journey  through  Manchuria; 
transi,  from  the  russian.  Proceedings  of  the  Roy.  Geogr.  soc, 
vol.  XVI,  n»  3,  1872,  p.  204-217. 

Nouvelles  provisoires.  L'archimandrite  n'a  pas  encore  transmis  à  la 
Société  géographique  de  Pétersbourg  le  rapport  complet  de  son  im- 
portante excursion  aa  pourtour  de  la  Mandchourie.  Voir  notre  précé- 
dent volume,  p.  63. 


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166  ASIE.  (n^  179-182.) 

176.  N.  Puz^vAtsKr.  Voyages  dans  les  possessions  russes  de  TOus- 
souri,  de  1967  à  1S69.  St-Fétersh.,  1870,  in-8*,  356  pages^ayec 
une  carte  (en  russe). 

177.  Klikoff.  Aperçu  géographique,  météorologique  et  ethnogra- 
phique sur  les  côtes  du  golfe  de  Pierre-le-Grand  (Mandchourie 
russe).  Traduit  (du  russe)  par  le  éapit.  Ghardonneau.  An- 
nales hydrographiques  y  1872,  1*'  trim.,  p.  106-148,  avec  une 

carte. 

178.  Carte  d.u  détroit  de  Tartarie  ej  4e  Tembouchure  du  flewe  Amour 
(n-  2857). 

Pablic.  da  Dépôt  de  la  Marine. 

.—  Carte  de  la  côte  de  Tartaiie  russe  entra  la  baie  ÀxBMrica  et 
la  rivière  Tumen-Ula  (n-  2858).  Ibid. 

—  Côtp  de  la  Tartarie  russe,  entre  la  baie  San-Vladimir  ef 
baie  Strelok  (n«  2883). 


XI 

MONGOLIE. 

CORÉE. 

179.  L'abbé  Arm.  David.  Journal  d'un  •  voyageur  en  Mongolie  fait  en 
1866.  Pam,  1872,  gr.  in-4%  83  pages,  avec  6  cartes  itinéraires. 
(Extrait  des  Annales  du  Muséum,) 

180.  Àlph.  HiLNE  Edwards.  Coup  d'œil  sur  les  mammifères  de  la 
Chine  et  du  Tibet  oriental.  Bulletin  de  la  Soc.  d^AcclimcUat., 
mai  1872,  p.  239-252. 

D'après  les  collections  rapportées  par  M.  l'abbé  David. 

181.  Fr.  Hanemann.  Bemerkungen  zur  Karte  der  westlichen  Mon- 
golei.  Mittheilungen^de  Petermann,  1872,  n«»  9,  p.  326-330, 
Carte. 

La  carte  du  Nord  et  de  l'Ouest  de  la  Mongolie  qui  accompagne  cet 
article  est  principalement  basée  sur  celle  que  M.  Venioukoff  a  publiée 
en  1871  dans  le  t.  VII  du  Bulletin  (Isvestia)  de  la  Société  de  géogra- 
phie de  Saint-Pétersbourg.  La  notice  de  M.  Hanemann  n'analyse  pas 
seulement  les  bases  de  la  carte;  elle  trace  l'histoire  géographique  de 
la  Mongolie,  particulièrement  au  point  de  vue  cartographique. 


182.  JouÀN.  Expédition  de  Corée  en  1866.  Mémoires  de  la  Soc,  aca- 
démique  de  Cherbourg,  1871,  p.  145-228. 


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MONGOLIE.  167 

S  1*'«  ll^cj^ions  4aas  l^  fîorçl  ^  la  C^^nç  e(  U  Svid-Qaest  ()9 1^  Mongolie. 
IM.  l'abbé  David. 

Nouis  ftvoQfl  eu  oe^asiony  dans  noiVQ  jivéeié^îA  volume 
dd  r4«ni6  géographigue  (p.  70,  i>°  123,  «t  p.  74),  (i9  si- 
gnaler les  importants  voyages  de  M*  Ydbbé  DaFÎd,  de  la 
société  des  Lazaristes,  en  plusieurs  parties  de  la  China  et 
dans  les  contrées  lip^itrophes  à  rOuest  et  au  Nord-Ouest. 
Nous  aimons  à  faire  ressortir  ces  travaux  4^s  missionnai- 
res catholiques,  car  ils  ramènent  notre  pensée  yerpi  les 
grands  Missionnaires  français  du  dix-septième  et  du  dix- 
huitième  siècle,  eur  ceux  de  la  Chine  en  particulier,  qui 
n'ont  pas  p«u  aontrihné  alors  h  l'édat  et  à  l'autorité  du 
nom  de  laFranee  aux  yeux  des  nations  lointaines.  Quoi- 
que les  investigations  dii  voyage  fossept  principalement 
dirigées  vers  l'histoire  naturelle  et  la  géologie,  —  les  col- 
lections qu'il  a  lormées  dans  ci^te  double  série  sont  d'une 
richesse  et  d'une  importance  exceptionnelles,  —  la  géogra- 
phie n'a  pas  laissé  d'en  retirer  plus  d'une  information 
utile  ;  on  en  peut  juger  par  la  lettre  sur  laquelle  nous  se- 
rons ramenés  en  nous  occupant  de  la  Chine,  où  il  trace  un 
ap^erçu  de  ses  courses.  Nous  n'avons  à  nous  occuper  ici 
que  de  celles  qui  touchent  à  la  Mongolie,  et  en  particu- 
lier au  pays  d'Ourato,  canton  d'une  éteodoe  considérable 
situé  au  nord  du  grand  conde  du  Hoang-ho ,  tout  à  fait  à 
l'écart  des  routes  habituelles  des  voyegeurs.  L'Ourato  a 
cet  intérêt  hietorique,  que  très-probablement  il  dx>it  soA 
nom  aux  OyrcU  ou  Oviiràif  grande  tribu  que  l'on  trouve 
motionnée  dans  l'histoire  de  Djingbîz-Kbftn,  et  qui  cam- 
fait  sur  la  fronlière  septentrionale  de  la  Chine. 

s  2.  Le  pays  d*Oarato. 

VQ%{ratQ  (nous  laissons  parlfr  M.  l'abbé  David)  forme 
un  royaume  resserré  de  l'Est  k  l'Ouest,  mais  très-étendu 

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168  ASIE.  {n«»  179-182.) 

du  Nord  au  Midi;  il  est  limité  à  l'Est  par  le  Toumèt^ 
pays  de  Kouï-hoa-tcheng  (Kou-kou-Khoto),  au  Sud  par  le 
fleuve  Jaune,  à  TOhest  par  le  royaume  d'Ala-chan,  mot 
que  les  Chinois  prononcent  Holo-Chan,  et  au  Nord  par  le 
Targampeï-li  et  le  Mao-ming-ngan,  principautés  distinc-' 
tes  dans  l^esquelles  les  Chinois  ont  pénétré  et  qu'ils  culti- 
vent. Cependant  le  roi  d'Ala-chan  ne  laisse  pas  encore  cul- 
tiver ses  terres  et  les  garde  en  pâturages. 

Le  pays  d'Ourato  n'est  traversé  par  aucun  cours  d'eau  ; 
de  petits  ruisseaux  coulent  seuls  au  milieu  des  vallées 
montagneuses.  La  chaîne  nommée  Oula-chan  par  les  Chi- 
nois est  la  continuation  du  Ta-tsing-chan,  et  s'étend  à 
rOuest  jusqu'en  vue  de  l'Âla-chan  dont  elle  est  séparée  par 
une  vaste  plaine  humide.  Au  Sud  des  montagnes,  le  long 
du  fleuve  Jaune,  s'étend  une  plaine  de  quatre  ou  cinq 
lieues  de  largeur  moyenne,  cultivée  en  majeure  partie 
jusqu'à  la  hauteur  de  la  vallée  de  HatameL  Au  Nord,  de 
vastes  terrains  sont  en  partie  réservés  aux  pâturages  des 
troupeaux  mongols,  et  en  partie  cultivés  par  les  Chinois, 
qui  escamotent  la  permission  de  labourer  les  meilleures 
terres  du  pays,  moyennant  une  rétribution  annuelle  en 
giains.  Ces  habiles  cultivateurs  empiètent  tous  les  jours,  et 
obligent  les  Mongols  d'aller  chercher  ailleurs  des  pâtura- 
ges. Toutefois  on  voit  aussi  des  Mongols  qui  laissent  le 
soin  peu  fatigant  des  troupeaux  pour  s'adonner  au  travail 
plus  lucratif  et  moins  chanceux  de  la  culture.  En  effet, 
chaque  hiver  un  peu  rigoureux  fait  périr  une  partie  de  leur 
bétail  et  les  réduit  à  une  excessive  pauvreté,  tandis  que 
les  industrieux  fils  du  Royaume  du  Milieu  sont  comparati- 
vement à  leur  aise.  Les  Mongols  qui  s'adonnent  à  l'agri- 
culture ont  adopté  le  costume  chinois;  mais  les  femmes 
portent  encore  souvent  les  cheveux  différemment  arrangés, 
surchargés  sur  les  tempes  de  bijoux  de  métal  ou  de  verre, 
reliés  à  leurs  boucles  d'oreilles.  Chez  les  Mongols  pur- 
sang  d'Ourato,  l'arrangement  des  cheveux  seul  constitue 

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MONGOLIE.  169 

la  différence  entre  le  costume  des  hommes  et  celui  des 
femmes.  Les  uns  et  les  autres  sont  toujours  chaussés  de 
longues  hottes  de  cuiry  portent  un  large  pantalon  à  la  chi- 
noise, ainsi  qu'une  longue  robe  qui  descend  jusqu'aux  ta- 
lons et  qui  est  liée  par  une  ceinture  fermée  à  droite  par 
cinq  boutons  ronds  de  cuivre.  La  coiffure  consiste  en  une 
assez  jolie  toque  conique,  à  bords  plus  oii  moins  ornés, 
faite  de  peau  fine  et  de  velours,  ornée  de  rubans  rouges 
qui  pendent  sur  le  dos.  Souvent  aussi  les  femmes  mettent 
par-dessus  leur  robe  une  sorte  de  large  gilet  sans  man« 
ches. 

Les  Mongols  que  j'ai  vus  paraissent  en  général  très-vi- 
goureux et  plus  fortement  constitués  que  les  Chinois;  ils 
ont  souvent  la  barbe  rousse,  assez  bien  fournie,  et  portent 
des  moustaches  ainsi  qu'une  petite  mouche  au  menton.  Les 
fournies  sont  loin  d'être  élégantes,  mais  elles  sont  très- 
robustes  et  montent  fort  bien  à  cheval.  Elles  sont  sou» 
vent  chargées  de  la  garde  des  troupeaux  et  des  travaux  les 
plus  pénibles  du  ménage,  qui  consistent  à  récolter  et  à  pré- 
parer les  argols  ou  fiente  des  animaux  herbivores  (seul 
eombustible  des  plaines  et  des  montagnes  déboisées),  à 
traire  les  vaches,  les  brebis  ou  les  chèvres,  à  faire  le 
beurre  et  le  détestable  fromage  de  ces  pays.  Les  Mongols 
se  nourrissent  très-pauvrement;  quoiqu'ils  ne  négligent 
pas  de  traire  au  beâoin  leurs  juments  et  leurs  chamelles, 
ils  n'auraient  pas  cependant  de  quoi  vivre  s'ils  ne  tro- 
quaient chaque  année  une  partie  de  leurs  animaux  et  de 
leurs  produits  contre  le  millet  et  le  blé-sarrasin  de  leurs 
voisins  chinois.  Quelque  peu  de  farine  d'avoine  ou  de  blé 
bouillie  à  l'eau  est  pour  eux  un  grand  luxe  de  table  ;  leur 
ordinaire  consiste  en  quelques  pincées  de  thé  noir  qu'ils 
font  bouillir  dans  une  marmite  en  y  ajoutant  du  sel,  et 
(s'ils  en  ont)  du  beurre  ou  du  lait,  et  une  petite  quantité  de 
millet  et  de  farine  des  plus  grossières. 

L'Ourato  se  divise  politiquement  en  trois  principautés  : 

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170  ASIE.  (n^  179-182.) 

le  Taung-Koung,  le  Tchoung^Kaimg  et  le  Si-Kaung  (prin- 
cipautës  Est,  Centre  et  Ooest)^  régies  pur  autant  de  petits 
princes.  GenxHÂ  se  réunissent  tous  les  ans  avec  les  prinoes 
dn  Mao-ming-ngan  et  du  Tiurgam-peï-li,  pour  traiter  des 
affaires  communes.  Tous  les  trois  ans  ils  doivent  aller  à 
Péking,  rendre  hommage  à  FËmpereur  et  en  reoevoir  des 
cadeaux  en  argent. 

Géographiquementy  TOurate  peut  de  même  se  diviser  en 
trois  parties:  l^  TOurato  m^éridional,  plaine  resserrée  entre 
le  fleuve  Jaune  et  la  chaîne  parallèle  de  rOuIa-chan,  mesu- 
rant une  centaine  de  lieues  de  Test  à  Touest;  2^  l'Ourato 
central,  région  montueuse  à  constitution  généralement  gra- 
nitique, mais  dont  les  pics  les  plus  élevés,  nommés  Matk- 
non-oula  par  les  Mongols,  n'ont  pas  plus  de  2Û00  mètres 
d'altitude.  Les  montagnes  occidentales  oSrent  esucove  quel- 
ques vallées  boisées,  tandis  qu'ailleurs  on  ne  reneontre 
guère  que  de  misérables  broussailles  qui  disparaissent  tous 
les  jours  sous  la  hache  et  la  pioche  des  Chinois;  3®r.Ourato 
septentrional,  renfermant  de  nombreuses  montagnes  assez 
basses,  et  des  plaines  oà  paissent  les  troupeaux  mongols, 
parmi  lesquels  comptent  des  yaks  venus  nutrefois  du  Tibet. 


S  3.  Une  trayersée  de  la  Mongolie  orientale.  Le  relief  da  Plateau. 
M.Przevalski. 

M.  de  Przevali^î,  auteur  d'une  importonte  relatiopi 
de  l'Asie  orientale  imprimée  en  langue  russe  à  Saint-Pé- 
tersbourg en  1870,  était  chargé  par  le  gouvemeiaent  russe 
d'une  mission  dont  l'objet  était  de  recueillir  des  matériaux 
statistiques  sur  ises  lointaines  possessioQS,  et  de  conetater 
la  siuiation  des  colonies  n^litaires  établies  de  distance  QP 
distance  sur  la  rive  droite  de  l'Oussouri.  Les  journaux  géo- 
graphiques d'outre^Rhin  ont  traduit  eii  allemapd  différents 
extraits  que  nous  leur  ^empruntons  k  potre  tour  ;  en  yom 
un  qui  se  rapp(»r(e  à  la  traversée  de  k  p^tie  du  Pi^au 


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MONGOLIE.  171 

de  la  Mongolie  entre  la  haute  Selinga  et  Péking.  Ce  mor- 
ceau avait  déjà  paru  dans  le  Bulletin  {Isvestïa)  delà  Société 
de  G-éographie  russe.  M.Przevalski  a  fait  cette  traversée  au 
mois  de  mars  18711.  Bien  que  se  trouvant  là  sur  un  terrain 
déjà  foulé  par  de  nombreux  Européens,  l'explorateur  paraît 
livoîr  beaucoup  ajoi^té  à  la  précision  des  notions  autérieures 
sur  les  conditions  physiques  et  la  configuration  de  ce  grand 
trait  du  relief  de  TAsie. 

De  Kiakhta  (800  mètres  au-dessus  de  la  mer},  le  Plateau 
de  la  Mongolie  s'étend  lespace  de  200  verstes,  jusqu'à  la 
iivière  Karagol,  sans  changer  sensiblement  de  niveau;  là  il 
8'élève  brusquement  d'environ  450  mètres,  puis  on  monte 
eonstamment  sur  un  parcours  d'environ  150  verstes,  pour 
gagner  un  nouveau  gradin  dont  Taltitude  est  de  près  de 
&000  mètres.  A  une  cinquantaine  de  verstes  plus  loin,  on 
atteint  le  maximum  de  l'altitude  de  cette  région,  2180  mè- 
tres; puis,  sur  un  parcours  de  340  verstes  le  niveau  descend 
graduellement  à  1067  mètres,  àmirchemin  environ  entrp 
Ourga  et  Kalgan.  Ici  le  terraia  se  relève  de  nouveau  durant 
un  parcours  de  380  verstes,  et  Ton  gravit  ainsi  le  troisième 
étage  du  Plateau  jusqu'à  ce  que  se  termine  l'escarpement 
méridional,  et  dont  la  hauteur  est  presque  de  2000  mè- 
tres. 

Dans  la  contrée  montagneuse  du  nord  du  Plateau  il  y  a 
des  forêts  qui  plus  au  sud  disparaissent  entièrement.  La 
dernière  forêt  se  trouve  à  une  cinquantaine  de  kilomètres  au 
sud  d'Ourga.  Parmi  les  arbres  de  ces  forêts  domine  le  Pir 
nus  sylvestris^  auquel  se  mêlent  çà  et  là  le  Pinus  LariXy  le 
Betula  et  le  Populus  Tremula.  Par  contre,  le  fond  des  var- 
iées et  la  pente  des  hauteurs  se  couvrent  partout  d'une 
^erbe  haute  d'un  pied  à  un  pied  et  demi,  qui  fournit  toute 
l'année  une  pâture  excellente  aux  troupeaux  des  Mongols. 

A  250  verstes  environ  au  sud  d'Ourga  commeuce  le  Gobi 
proprement  dit,  désert  qui  s'étend  de  l'ouest  à  l'est  sur  un  es- 
pace immense,  tandis  que  son  éteudue  du  nord  au  sud^  là  où 

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172  ASIE.  (n»'  179-182.) 

le  voyageur  l'a  traversé,  n*est  guère  que  de  600  verstes,  à 
peu  près  650  kilomètres. 

Le  Gobi  manque  absolument  de  bois;  çà  et  là  seulement, 
au  pied  d'une  hauteur  ou  sur  1q  bord  d'un  courant  dessé- 
ché, on  trouve  un  arbre  isolé,  objet  d'une  vénération  reli- 
gieuse pour  les  Mongols.  Dans  la  maigre  flore  du  Gobi,  lei 
espèces  dominantes  sont  les  graminées  et  les  composites. 

La  population  diminue  dans  la  même  proportion  que  les 
moyens  de  subsistance  ;  elle  devient  plus  rare  et  plus  dis- 
persée à  mesure  que  Ton  s'enfonce  dans  la  région  qui  vient 
d'être  décrite.  Le  Mongol  rompu  aux  intempéries,  et  le 
chameau  son  fidèle  compagnon,  peuvent  seuls  habiter  ces 
solitudes  sans  bois  et  sans  eau,  que  brûle  en  été  un  soleil 
tropical,  et  que  pénètre  en  hiver  un  froid  polaire. 

La  limite  naturelle  entre  les  hautes  terres  et  les  plai- 
nes basses  de  la  Chine  est  nettement  et  fortement  marquée. 
Elle  est  formée  par  une  chaîne  étroite  d'un  caractère  bien 
accusé,  quoique  sa  hauteurverticale  ne  dépasse  pas  l'altitude 
du  Plateau.  Des  passes  à  parois  verticales,  des  gorges  pro- 
fondes, des  sommets  escarpés  et  des  masses  colossales  de  ro- 
chers à  pic,  enfin  un  caractère  constant  de  stérilité  sauvage  : 
tels  sont  les  traits  qui  caractérisent  cette  chaîne  frontiWe , 
au  long  de  laquelle  court  la  célèbre  muraille  de  la  Chine. 
Le  chemin  qui  la  traverse  conduit  par  un  étroit  défilé  de  25 
verstes  de  longueur  jusqu'à  la  ville  de  Ealgan.  Cette  passe 
descend  par  une  pente  rapide,  particulièrement  dans  sa 
partie  supérieure.  Plus  loin  la  pente  est  moins  raide  ;  en 
somme,  Kalgan  est  plus  bas  d'un  millier  de  mètres  que  le 
rebord  du  Plateau. 

L'extrait  suivant  se  rapporte  an  bassin  de  l'Oussouri. 
Quoique  cette  descrij)tion  nous  ramène  à  l'article  précédent 
consacré  à  la  Mandchourie  russe,  nous  ne  croyons  devoir 
ni  la  transposer  ni  la  supprimer.  La  connexion  physique  do^ 
mine  ici  la  division  politique. 

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PLATEAU   MONGOL.  173 

Lji  partie  russe' du  bassin  de  TOussouri,  que  les  Chinois  ont 
définitivement  abandonné  à  la  Russie  par  le  traité  de  Péking 
de  1860,  s'étend  du  N.  au  S.  depuis  le  48«  jusqu'au  42«  degré 
de  latitude.  Il  est  baigné  à  TE.  et  au  S.  par  la  mer  du  Japon, 
jusqu'à  la  limite  de  la  Corée,  au  voisinage  du  port  russe  de 
Possièt,  point  oîi  la  ligne  télégraphique  russe  se  rejoint  actuel- 
lemeÀt  aux  lignes  sous-marines  de  la  Chine  et  du  Japon.  A  TO. , 
c'est  d'abord  TOussouri  qui  forme  la  limite  entre  POussouri  et 
la  Mandchourie  chinoise  ;  plus  haut  le  lacHanka,  qui,  toutefois, 
appartient  au  territoire  rasse,  sépare  les  deux  empires.  Du  lac 
Hanka,  la  limite  russo-chinoise  se  porte  d'abord  au  S.  0.,  puis 
au  S.,  jusqu'au  point  oh  les  frontières  russe,  chinoise  et  co- 
réenne se  réunissent.  Le  territoire  ainsi  délimité,  qui  formait 
antérieurement  la  partie  orientale  de  la  Mandchourie  chinoise, 
est  aujourd'hui  l'Oussouri  russe  dans  le  sens  le  plus  général  ; 
dans  une  acception  plus  restreinte,  les  Russes  appellent  terri- 
toire de  rOussouri  le  pays  arrosé  par  les  affluents  du  côté  droit 
de  la  rivière,  et  ils  appliquent  communément  le  nom  de  Trans- 
Oussouri,  Sa-Oussourishy  Krài^  au  pays  situé  au  sud  du  lac 
Hanka,  ce  qui  comprend  ce  côté  du  bassin  du  lac  et  la  côte  cor- 
respondante. 

Une  chaîne  de  montagnes  connue  sous  le  nom  de  Sikhoté- 
Aîin  s'étend  dans  une  direction  parallèle  à  la  côte  et  à  peu  de 
distance  de  la  mer  du  Japon,  depuis  l'extrémité  sud  du  terri- 
toire jusqu'à  Fembouchure  de  l'Amour.  La  hauteur  moyenne 
de  cette  chaîne  est  de  1000  à  1200  mètres  ;  quelques  sommités , 
cependant,  s'élèvent  jusqu'à  1600  mètres  et  plus.  A  l'est,  du 
côté  de  la  mer,  la  pente  est  rapide  et  se  termine  fréquemment 
en  falaises  escarpées  ;  à  l'ouest,  vers  l'Oussouri  et  l'Amour,  la 
descente  est  beaucoup  plus  allongée,  et  arrosée  d'un  grand 
nombre  de  cours  d'eau  qui  vont  aboutir  à  l'Oussouri.  Cette  der- 
nière rivière  a  ses  sources  dans  la  partie  méridionale  du  Si- 
khoté-Alïn,  à  70  verstes  (73  kilom.)  de  la  mer  ;  elle  n'est  là,  à 
son  origine,  qu'un  ruisseau  de  quelques  pieds  de  large.  Elle 
prend  bientôt  le  caractère  d'un  torrent,  se  fraye  sa  route  à 
travers  une  étroite  vallée,  et  jusqu'au  point  oîi,  elle  reçoit  par 
la  droite  la  Lifoudin^  elle  est  appelée  Sandogou.  Plus  loin,  elle 
prend  le  nom  à^Oulakhé.  C'est  seulement  après  qu'elle  s'est 
grossie  à  gauche  de  la  Dauhikhé  qu'elle  reçoit  le  nom  mand- 
chou d^Oussouri,  C'est  alors  une  rivière  de  130  mètres  environ 
de  large  ;  néanmoins,  à  cause  de  sa  rapidité  et  de  la  fréquence 
des  b^ncs  de  sable,  elle  n'est  encore  accessible  pour  la  vapeur 


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174  ASIE.  (n**  179-182.) 

qu'avec  des  petit*  «teame»,  et  seulement  atf  temps  des  hautes 
eaux.  L'Oussoûri  ne  oommeàee  à  être  navigable  pout  les  ba- 
teaux à  trfpettf  à  toutes  les  époques  de  Tannée  qu'après  avoit 
reçu  à  Fouest  le  Sonngadjii  déversoir  du  grand  lac  Hanka.  A 
partir  de  ce  point,  POussouri,  devenu  une  grande  et  no'bte'  ri-* 
vière,  coule  Au  nord  et  reçoit  de  droite  et  de  gauche  dès  tribu- 
taires de  plus  en  plus  importants,  notamment,  à  droite,  Vlma^ 
la  Biktn  et  le  Por^  et  par  la  gauche,  le  Nourèn  et  le  Nùt.  A  son 
confluent  avec  TAmoûr,  près  de  Rabarofka,  rOussôurî  a  î  ki-' 
lomètres  de  large.  La  lorigiieur  de  son  cours  est  dé  SOOverilteà, 
environ  850  kilomètres. 

Le  lac  Hanka,  qui  porte  ses  eaux  à  FOussouri,  a  là  kfrriîë 
d'une  ellipse  dont  legraBfd  axe  se  dirige'  du  sud  ad  noYd  suruncf 
longueur  de  80  verstes,  avec  une  largeur  de  6GF  vérstes  environ. 
Il  est  peu  profond;  on  n'a  trouvé  que  7  oii  8  mètres  dans  ss 
partie  centrale.  A  une  demi-verste  des  bords,  On  trouvé*  à  peine 
2  mètres.  Ce  peu  de  profondeur,  joint  à  la  fréquenté  agitation 
des  vagues  sous  des  rafales  violentes,  gène  sotrvetit  là  navi- 
gation. De  ses  nombreux  affluents,  les  principaux  vieninent  dâ 
sud  et  de  Fouest.  Le  plus  ck)nsi(îérable  est  ïe  LéfoU;  il  est  navi- 
gable pour  les  petits  bateaux  à  vapeur  sur  une  longueur  d'un© 
quarantaine  de  verstes  au-dessus  deson;embouchtfre:  Ainsi  qu'on 
Fa  dit  plus  haut,  le  Hanka  se  déverse  dans  FOussouri  par  le 
Soun^dji.  Bien  que  profond,  le  Soungadji  est  difficile  pour 
les  grands  steamers,  à  cause  de  ses  nombreux  méàndreis^^ 

Le  bassin  du  lac  Hanka  est  un  pays  plat  ;  des  mafrécages  im- 
pénétrables s'étendent  au  sud,  au  nord  et  à  Fest  du  lac.  A  FO. 
et  au  S.  0.,  il  est  bordé  par  des  steppes  pontuea>ses,  dont  kr 
sol  extraordinairem!enii  fertile  est  très -propre  à  Fagriculturé  et 
à  l'élève  du  bétail.  Déjà  quelques  colonies  russes  s'y  sont  éta- 
blies. 

La  côte  du  nouveau  territoire  russe  sur  la  mer  du  Japon  pré- 
sente plusieurs  baies  assez  spacieuses  ;  les  Jylus  im]f)értaàtes  por- 
tent les  noms  russes  de  Saint-Vladimir  y  Saint-OlgaySaiePierre' 
le-Grand  (la  Victoria  Bay  des  cartes  anglaises).  Celle-ci,  qèiest 
tout  à  fait  dans  le  sud,  se  ramifie  en  plusieurs  baies  ou  anses 
plus  petites  avec  de  bons  mouillages. 

A  cette  esquisse  topographique  du  territoire  de  FOussouri, 
M.  Przevalski  ajoute  un  tableau  développé  de  hi  végétâtioi^  de 
cette  région. 


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CHIKE.  175 

XII 


(83.  W.H.  Medhorst.  Brit.  consul,  Stiangaî.  the  fbreigner  in  far 
Cathay.  Lond,,  1872,  petit  in-Ô».  Map.  6  sh.  (Stanford)'. 

Guide  pràfîque. 

184.  D'  Martin,  de  la  légation  de  France  à  P'ékiti.  Sûr  la  statistique 
relative  au  dénoùibi'ément  de  la  population  en  Chine.  BuUetin 
de  la  Soc,  de  Ùéogr,,  juillet  1872,  p.  120-132. 

—  Quelques  généralités  sur  l'alimentation  en  Ghine.  Bulletin 
de  la  Soc.  d'AccUmmationj  ocï.  1»72,  p.  66^-62:2. 

—  Étude  générale  sur  la  végétation  dans  le  Nord  de  la  Chine, 
et  son  importance  au  point  de  vue  de  la  question  de  l'acclima- 
fatîon.  îbid,,  mars. 

—  Considérations  sur  la.  valeur  ethni(|Qe  de  la  mutilation  des 
pieds  de  la  femme  chinoise.  Dans  le  Bulletin  de  la  Soe,  d'An- 
thropologie de  Paris,  nov.  1871,  p.  304-313. 

185.  B*"F.  V.  RïchtAofen.  Letter  on  thé  prôvifioe»  of  Chékiaûg  and 
Nganhwel.  Shanghai,  t871,  in-4%  17  pa:géS. 

—  Letter  on  the  régions  of  Nanking  and;Chinkiang.  /6td.,1871, 
iai-4%  17  pages. 

Deux  lettres  adressées  à  la  chambre  de  Commerce  dé  Châfljg^haL 

186.  Eug.  Simon,  Conàuî  de  France.  L'àgricuîtùTe  en  Chiné,  à  propos 
d'une  carte  agricole  de  la  Chine.  BuUetin  de  la  Soc.de  Géogr,, 
déc.  1871,  p.  401-423. 

187.  M.  fàbbé  DàViô.  Lettré  sur  ses  tbyâges  e'û  Chine,  au  secrétaire 
général  de  la  Soc.  de  Géographie.  Ihid,,  p.  465-478. 

188.  E.  BuissoNNET.  De  Pékin  à  Shangaï,  souvenirs  de  voyages.  Pa- 
ris, 1871,  gr.  în-18.  3  fr.  50.  (Amyot.j 

188.  C**  Ludovic  de  Beauvoir.  Pékin,  Teddo,  San  Francisco  (3*  vol. 
du  Voyage  autour  du  Monde).  Paris,  1872,  gr.  in-18  avec  cartes 
étfig.,  4fr. 
Voir  le  vol.  précédent  de  V Année  géogt.,  p.  88,  n«  Hk» 

190.  Fr.  Garnier.  Des  nouvelles  routes  de  commerce  avec  la  Chine. 
SmeHii  dé  la  Sôt.  Oe  Géûgir.,  fevr.  1872,  p.  147.160'. 
L'auteur  s^oecupé  particalidrem^t  des  tentatives  faites  pxF  ït  àord 


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176  ASIE.  (n-  183-195.) 

da  Barmâ  et  par  le  Mékong,  —  la  route  anglaise  et  la  route  fran- 
çaise. 

191.  P.  Gave,  Ileut.  de  vaisseau.  L'Europe  et  la  Chine.  Revue  Marit, 
et  Colon.,  janv.,  et  févr.  1872,  p.  5  et  217. 

Étude  historique,  politique  et  commerciale. 

192.  H.  Fritsche.  Ueber  die  geographiscben  Gonstanten  Pekiogs. 
Bulletin  de  VAcad.  impér.  de  St-Péter$h,,  t.  XVI,  n»  6,  p.  465- 
486.  St-Pétersb.,  1871,  ln-4-. 

Les  résultats  de  M.  Fritsche,  déduits  pour  la  longitude  de  42  cnlmi- 
nations  lunaires,  et  pour  la  latitude  également  d'une  longue  série  d*ob- 
serTations  zénitales,  lui  ont  donné 

en  temps  en  arc 

tongit.  E.  de  Greenw.    7  h.  45  m.  54  sec.  55  =  1I6*28'44" 
—  (Paris  —  —  il4«  8'35") 

Lat.  N.  —  —  —  39«56'50" 

La  Connaissance  des  Temps  (1872)  donne 
Longit.  114»  8'30'* 

Latit.  39o54'13" 

—  Geographische,  magnetische  und  hypsometrische  Bestim- 
mungeD  aa  22  in  der  Mongolei  und  dem  nôrdlichen  China  ge- 
legenen  Orten.  St-Pétersh,,  1871,  in-4*',  40  pages,  avec  une 
carte.  (Extr.  du  Repertorium  fur  Météorologie  publié  par  TAcad. 
impér.}. 

193.  Rev.  J.  Edkins.  The  Miau-tsi  tribes;  with  a  Vocabulary  of  the 
Miau  dialects.Foochow,  1870,  in-8*,  17  pages.  (Lond.,  Trttbner. 
1  sh.) 

194.  Ney  Elias.  Map  of  the  Yellow  river.  Lond.,  1872,  2feuiUes  (au 
146  000*). 

Cours  inférieur  du  fleuve,  Tancien  et  le  nouveau  lit. 

195.  D' J.  BECHtiNGER.  Het  eyland  Forriiosa.  Batavia,  1871,  in-4*, 
20  pages. 

Excursion  sur  la  rivière  Tamsouï.  Notice  sur  les  aborigènes. 


Notes  diverses  sur  la  Chine.  M.  Tabbé  David. 

Dans  une  lettre  adressée  an  secrétaire  général  de  la  So- 
ciété de  Géographie  (ci-dessus,  n*  187),rabbé  David  rend 
compte  des  courses  qu'il  a  faites  sur  différents  points  de  la 
Chine  et  dans  qaelques-uns  des  territoires  limitrophes;  il  est 
arrivé  dans  le  pays  en  1862,  et  ne  Ta  quitté  qu'en  1870.  On 
peut  croire  que  durant  ces  neuf  années,  eii  dehors  de  sonmi- 


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SUR  LA  POPULATION   DE   LA  CHINE.  177 

nistère  apostolique  et  de  ses  recherches  d'histoire  naturelle, 
le  savant  abbé  a  beaucoup  vu,  beaucoup  observé;  il  est  re- 
venu riche  de  matériaux  nombreux  qu'il  espère  être  à  même 
un  jour  de  publier.  Quelques  notes  jointes  à  sa  lettre  sont 
de  nature  à  faire  désirer  la  prompte  réalisation  de  cette 
espérance. 

Voici  ce  que  M.  Tabbé  David  dit  de  la  population  de 
l'empire,  snjet  difficile  sur  lequel  il  y  a  eu  tant  d'avis  diffé- 
rents : 

«  Mes   voyages   dan$  une  grande  partie  de  la  Chine 
m'ont  convaincu  que  l'énorme  population  de  quatre  à  cinq 
cents  millions  d'âmes  qu'on  lui  attribue  n'est  pas  une  exa- 
gération^. Les  ravages  desTaïpings,  des  Nienfei^desTangs- 
mao,  des  Mahométans,ont  eu  beau  détruire  les  villes  et  les 
bourgades,  elles  ressuscitent  comme  par  enchantement  et 
en  peu  d'années.  C'est  qu'en  Chine  tout  le  monde  se  marie 
de  bonne  heure,  et  qu'il  faut  très-peu  à  un  ménage  pour 
vivre  et  prospérer,  les  Chinois  ayant  trouvé  l'art  de  réduire 
à  leur  plus"  simple  expression  leurs  besoins  pour  le  loge- 
ment, l'habillement  et  la  nourriture.  Aussi,  l'accroissement 
des  familles  est  tel,  que  l'excès  de  la  population  commence 
à  se  déverser  en  masses  épaisses  hors  des  limites  de  l'an- 
cienne Chine.  — *  Ainsi,  j'ai  vérifié,  dans  mes  voyages  de 
Mongolie,  qu'un  large  espace  de  la  région  qui  touche  à  la 
Grande  Muraille  est  devenu  exclusivement  chinois  en  peu 
d'années.  Même  le  grand  pays  des  Ortous  ou  Ordos,  qui 
étkit  encore  tout  mongol  à  l'époque  dujpassage  de  MM.  Hue 
et  Gabet,  est  maintenant  habité  et  cultivé  un  peu  partout 
par  les  familles  sorties  du  Chan-si  et  du  Chen-si  :  de  ma- 
nière que  la  race  mongole,  qui  dépérit  et  diminue  à  vue 
d'œil,  se  refoule  vers  l'intérieur  des  hauts  plateaux,  en 
abandonnant  aux  habiles  envahisseurs  leurs  meilleures  ter- 
res. Il  surgit  en  peu  d'années  d'innombrables  hameaux,  des 

1.  C'est  aussi  Topinion  de  M.  leû'  Martin.  Ci-dessus,  n°  184. 
l'ànnéb  géogr.  tu  '       12 

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!78  Asm.  {f^  183-1950 

bourgs  et  des  villes,  qai  continuent  à  dépendre  des  manda- 
rins du  lieu  de  leur  origine,  et  non  point  des  princes  mon- 
gols. 

«  D'un  autre  côté,  legouv^mementimpérial  a  fait  tout  son 
possible  pour  encourager  et  kvoriser  le  iamanismôf  et  il 
a  obtenu  par  là  plus  que  ce  qu'il  prétendait  par  la  giga»|efi- 
que  construction  de  la  Grande  Muraille,  c'estTà-^dire  la  sé- 
curité contre  les  incursions  des  populations  turbulentes  de 
l'Asie  centrale,  où  la  vie  nomade  du  pasteur  n'est  pas  tev- 
jours  une  ressource  suffisante  pour  Texistence.  En  effet, 
j'ai  TU  que  maintenant  toutes  ^es  lamilles  mongoles  safoiit 
un  devoir  de  consacrer  au  célibat  du  lamanismetaus  les  gar- 
çons en  général,  à  l'exception  d'un  seul;  et,  chose  coriense  1 
il  paraît,  d'un  autre  côté,  qu'il  y  naît  fort  ^aeu  de  fflle^.  Le 
fait  est  que  la  population  mongole  estaujourd'bui  t»Srcl«ir- 
sçmée,  et  se  soutient  misérablema^t  et  avec  peine  du  tb^ 
venu  incertain  de  ses  troupeaux,  tandis  que  les  indas^e»x 
enfants  de  l'empire  du  Milieu  profitent  de  toutes  les  occa- 
sions pour  avancer  leurs  empiétements.  Et  ils  font  bien  : 
l'activité  et  l'intelligence,  avee  l'aisance  relative,  cttaa- 
placent  peu  à  peu  l'inertie  et  k  misàre  des  pasteurs  moa- 
gols,  qui  paraissent  avoir  fiai  leur  temps,  ou  peu  s'en  &u4. 

<  Quant  à  l'intérieur  de  la  Chine,  j^dois  observer  f[ue 
plusieurs  des  principales  grandes  vlUesde  l'empire  awt  ;en 
décadence  évidente.  Ainsi,  on  sait  que  depuis  le  passage 
des  rebelles,  Nanking  est  à  peu  près  vide  d'liabitan48  à  l'in- 
térieur de  ses  musailles;  sa  fameuse  tour  de  peroeiaine 
n'existe  plus.  La  réunion  des  trois  villes  d'Ou-tcbazig^  de 
Han-keou  et  de  Han-yang,  dans  le  Hou-pé,  qui  faisait, 
d'après  les  relations  anciennes,  un  centre  de  population 
porté  à  six  ou  sept  millions  !  ne  contient  plus  peut*être  que 
le  tiers  de  ce  chiffre,  grâce  encore'aux  ravages  des  Taipii^. 
Péking  lui-même  ne  renferme  pas  aujourd'hui  un  milUon 
d'âmes,  bien  que  les  Chinois  affirment  le  contraire  :  la 
cause  de  cette  diminution  est  dans  la  misère  provenant  de 

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REMARQUES  SUR  LA  CHINE.  179 

h  Gemati^  dea  distribaijons  de  solde  et  de  liz  qi^ie  le  gou- 
?emem^  impénal  f^çait  à  ces  deu^  ou  trois  oejut^le 
tekyr)e»  ou  vexii^^es  de  la  ville.  Depuis  une  vingtaine 
d'aniiées>  les  reibelles  avaient  occupé  les  plus  riches  provin- 
068  de  Teippire  et  détruit  les  l^firques  impériales  destinées 
««  titiQsport  d^  çéré^es  de  la  capit;al^.  » 

l^i  MoâUnUi  pu  Mioù-tsè.  ce  A  quelques  journées  seuleoçienjt 
àrauest  de  T€Éieâ*tou(Sé-tGhouaîi)  se  trouve  \ine  série  dç 
diaînes  de  montagnes  et  de  rivières  qui  courent  du  çord  au 
mày  depuis  le  Kan-eou  jusqu'au  Yun-nan,  et  forment  l'an- 
dMine  et  yéiitfibie  frontière  mitu^eUe  entj:e  1^  Chine  et  les 
pays  des  barbares  Man-tsé  indépendants.  Politiquement, 
ces  nombreuses  princÂpautés,  répandues  entre  la  Chine,  le 
Tibet  et  \^  MongQlie,  dépendent  plus  ou  moins  d.^  manda- 
m,  lâce-rai  de  âé-t^iman,  de  mém^  que  tput  le  Tibet; 
mais,  en  réalité,  la^  plupart  dejs  MaH-tsé  font  che?  eu^ 
comme  ils  veulent.  Un  fait  curieux,  c'eçt  q^'^ne  de  ces 
principautés  bigrbiares  e^t  gouvernée  de  drpit  par  une 
femme^à  laquelle  les  Chinois  voisins  donnent  le  titre  de  Nyr 

«  Lee  peuples  lîifaaï^teé  içie  parlent  pa^  tOMS  h  znême  l^'^ 
gaçy  Çit  n'pint  poôixt  la^me  législation;  il  y  aura  là  matière 
à  d'intéresi^imtes  étu4c»s  philologiques  et  ethnologiques.  » 

Géographie  pkysiqifs.  <  Le  pays  des  barbues  est  tout  hé- 
rissé à»  montagnes  de  difficile  accès,  et  partiellement  boi- 
sées. G'Qst  \k  q^  j'^i  pbteiiu  mes  nouveautés  géologiques 
les  pln^  in^éres^autes.  G'e^st  ^ussi  4^9  cette  région  que  j'ai 
rei]|CK)ntré  les  moin^gnes  les  plus  hautes.  Dans  le  nord  de 
k  Qtùue  et  dans  rOui;atp,  ell^s  ne  dépasseut  pas  2000 
loètr^s  d'altitude  ;  le  I^-chan  ou  Luchfm»  le  somruet  le 
plus  élevé  connu  du  Kian-si,  n'a  que  1200  ou  1300  mè- 
treç.  —  }ILw  {m  Séstchçiuan,  la  plaine  de  Tcheu-tou  est 
déjà  ji  484  m^trfis  d'altitude.  La  maison  que  j'ai  habitée 
près  d'un  an,  dans  la  principauté  de  Moupîn,  est  à  2129 
mètres  au-dessus  de  la  mer,  et  le  chemin  qui  y  mène 

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180  ASIE.  (n-  183-195.) 

passe  à  plus  de  3000  mètres.  Le  Hong-chan-tïn,  ou  «  mon- 
tagne au  sommet  rouge,  »  a  environ  5000  mètres  d'al- 
titude :  je  suis  le  premier  et  je  serai  longtemps  le  seul  des 
Européens  qui  Taie  gravi  jusqu'à  une  de  ses  cimes  princi- 
pales. De  cette  hauteur  j'ai  aperçu  vers  le  Nord  et  vers 
rO.  S.  0.,  des  hauteurs  tellement  considérables,  que  ma 
montagne  ne  me  semblait  qu'une  colline.  Le  Hong-chan- 
tïn  a  ceci  de  particulier,  que  sa  partie  supérieure  reste  dé- 
couverte en  hiver,  tandis  que  les  nuages  s'arrêtent  et  se  dé- 
chargent de  leur  neige  dans  les  vallées  boisées  et  les  montagnes 
moyenues  ;  le  contraire  a  lieu  en  été.  Un  autre  phéno- 
mène qui  mérite  d'être  noté,  c'est  que  dans  l'immense  enton- 
noir formé  par  les  montagnes  qui  entourent  ma  résidence 
de  MoupîQ,  l'atmosphère  est  parfois  tellement  chaînée 
d'humidité,  qu'il  suffit,  pour  la  faire  résoudre  ^t  tomber 
en  pluie^  que  plusieurs  personnes  crient  beaucoup  ou  dé- 
chargent leurs  fusils  à  la  fois. 

c  A  cause  des  forêts  qui  subsistent  encore,  ces  régions 
montueuses  sont  humides  et  plongées  dans  des  brouillards 
presque  continuels,  qui  y  favorisent  la  croissance  des  Coni- 
fères et  des  Rhododendrons.  Ces  dernières  plantes,  dont  j'ai 
bien  distingué  seize  espèces  différentes,  quelques-unes  for- 
mant de  grands  arbres,  sont  à  feuillage  persistant  et  à  ma- 
gnifiques fleurs  rouges,  roses,  blanches,  jaunes... « 

«  Quant  à  la  distribution  géographique  des  animaux,  j'a- 
jouterai que  sur  110  espèces  de  mammifères  sauvages  que 
j'ai  notées  dans  la  Chine  septentrionale,  il  n'y  en  a  pas  dix  qai 
soient  européennes.  Pour  les  oiseaux,  sur  470  espèces  obser- 
vées par  moi  au  nord  du  Yan-tsé-kiang,  et  dont  je  viens  de 
donner  le  catalogue  dans  les-  archives  du  Muséum,  il  y  en  a 
plus  d'un  quart  qui  se  retrouvent  aussi  en  Europe  ;  et,  sur 
le  nombre  total,  il  y  en  a  140  que  les  naturalistes  n'avaient 
point  encore  signalées  comme  appartenant  à  la  faune  chi- 
noise. » 

Notes  économiques  et  sociales.  «L'ensemble  des  impressions 

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REMARQUES  SUR  LA  CHINE.  181 

produites  sur  mon  esprit  par  mes  différents  voyages  dans 
rintérieur,  me  porterait  à  croire  que  la  Chine  est  bien  moins 
riche  qu'on  ne  le  croit  généralement , et  qu'elle  suffît  à  grand'- 
peine  à  nourrir  son  exubérante  population  (laquelle  pour- 
tant se  contente  de  bien  peu).  En  dehors  de  la  houille,  onn'y 
connaît  guère  de  mines  métalliques  importantes  que  vers 
le  Tun-nan;  le  pays  est  généralement  déboisé,  et  il  n'y 
existe  plus  de  restes  de  forêts  que  dans  certaines  monta- 
gnes inaccessibles.  Les  Chinois  ne  plantent  point  d'arbres 
fruitiers,  ou  très-peu;  même  pour  la  construction  des  cer- 
cueils, on  commence  à  importer  du  bois  en  Chine  des  pays 
étrangers  et  même  d'Amérique.  En  général,  ces  populations 
sont  paisibles,  travailleuses  et  polies^pointadonnées  à  l'ivro- 
gnerie, mais  ne  résistant  pas  à  la  passion  toujours  crois- 
sante de  l'opium,  lequel  n'enivre  pas,  mais  ruine  la  santé 
et  la  fortune  des  familles.  Sans  la  jalouse  et  stupide  influence 
d'une  partie  des  lettrés  et  des  mandarins,  les  Chinois  ne 
haïraient  point  les  Européens  de  bonne  conduite.  J'ajouterai 
que  les  pures  races  jaunes  des  parties  septentrionale  et  orien- 
tale de  l'Empire  sont  plus  civilisées,  plus  retenues,  plus 
calculatrices,  moins  soumises  au  sentiment,  moins  accessi- 
bles à  l'affection  que  les  races  mélangées  de  l'Ouest  et 
du  Sud;  que  les  missionnaires  catholiques  vivent  géné- 
ralement en  paix  au  milieu  des  indigènes,  qui  les  res- 
pectent quand  même  elles  ne  veulent  pas  écouter  leur  pré- 
dication ;  que  les  tracasseries  à  leur  égard  sont  des  faits 
isolés  provenant  d'une  certaine  classe  d'hommes,  et,  dans  ces 
derniers  temps,  artificiellement  provoquées  par  les  sociétés 
secrètes,  nombreuses  en  Chine.  Malgré  tout,  il  y  a  chaque 
année,  en  moyenne,  quinze  à  vingt  mille  adultes  qui  em- 
brassent la  religion  chrétienne  (une  goutte  dans  l'Océan  I); 
et,  par  l'action  des  missionnaires,  le  nom  de  l'Europe,  de 
la  France  surtout,  sont  avantageusement  connus,  respectés 
et  estimés  dans  les  provinces  de  l'intérieur,  comme  tous  les 
voyageurs  peuvent  le  vérifier.  Par  aonséquent,  Tœuvre  de 

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182  ASIE.  (n«'  196-212-) 

ces  pionniers  de  la  cÎTilisatiôn,  Comme  on  les  appeito,  dok 
être  approuvée,  encouragée  et 'aidée  par  tons  les  honnêtes 
gens,  par  tous  ceux  qui  désirent  sincèrement  le  bien. 

é  Je  pais  dire,  d'un  autre  côté^opief  je  pense  que  la  Chine 
n'est  pas  préparée  ni  disposée  à  recevoir  notre  civilisation 
6ti^ôpéenne  ;  elle  n'éîi  veut  pas  et  elle  n'en  a  pas  hesoin. 
£Ue  possède  chez  elle  les  éléments  de  sa  prospérité  :  sa  per^ 
sonnalité,  si  originale,  qui  depuis  quatre  ou  cinq  mille 
ans  dure  sans  changements  essentiels^  n'est-eUe  pas  là  pour 
proteste^  contre  l'incessante  mutabilité  des  nations  occiden-^ 
taies?  Je  pense  que  le  jour  où  la  Chine  commencera  à  vou- 
loir introduire  chez  elle  des  réformes  importantes^  marquera 
l'heure  de  l'agonie  de  cet  empire  colossal,  quarante  ou  cin- 
quante fois  séculaire, 

«  Quant  à  l'instruction  scientifique,  elle  pénétrera  iiU 
ficilement  chez  les  Chinois,  à  moins  qu'ils  ne  se  résolvent 
k  adoptei^  une  langue  européenne  ou  à  introduire  chez  eux 
(ce  qui  se^it  mieux)  un  alphabet  phonétique  quelconque  i 
les  Ghinoiii  ont  beaucoup  d'aptitude  pour  tous  les  exemeee 
dé  méruoii^e.  » 


XIII 

INDO-CHINE. 

COCTIRCHINl  PRâlT^AISB. 

196.  Major  E.  B.  Slàbbn.  Bxpeditioa  from  Burma,  vift  the  Irraxraddy 
and  Bhamo,  to  South- Western  China  (1868).  Journal  of  the 
Roy.  Ùeogr.  soc,  vol.  XLI,  l87l,  p.  257-281.  Map. 

Voir  notre  précédent  vol.,  p.  80,  n«  143,  et  p.  82. 

Î97.  John  Anderson.  A  Report  on  the  expédition  to  western  Tunan, 
viâBhamô.  Calcutta,  1871,  in-K 

Le  D' John  faisait  partie,  comme  médecin  et  naturaliste,  de  l'èxpëdi- 
tion  da  major  Sladen.Une  des  parties  les  plasintéressaniea  de  son  rap- 
port pour  la  géographie,  est  celle  qui  touche  à  l'iravadî  supérieur  ;  M.  An- 
derson en  a  fait  l'objet  d'un  mémoire  spécial,  qui  est  imprimé  aa 


yGoogk 


INDO-CHINE.  183 

40*  vol.  (ISTO)  du  journal  de  la  So<^été  do  Géographie  de  Londres.  Voir 
le  précédent  Tolome  do  V Année,  p.  80,  n«  115. 

198.  Capit.  ViAL.  La  Birmanie  anglaise;  seé  ressources,  ses  revenus 
et  son  administration.  1864-68.  Revue  Maritime  et  Coloniale^ 
oct.  )871,  p.  417-469. 

199.  Capit.  Ed.  Wyts.  Prise  de  possession  des  provinces  de  Winh- 
long,  Chaudoc  et  fla-tièn.  Ibid.,  avr.  1072,  p.  91Î-922. 

Chapitre  d'histoire  rétrospective. 

200.  Là  Cochinchine  en  1871,  par  un  officier  de  marine.  Hefme  des 
Deux-Mondes,  l"janv.  1872,  p.  204-218. 

i^ote  écrite  dans  le  but  de  pousser  à  Textpnsion  des  grandes  cultures 
industrielles,  et  en  particulier  de  Tindustrie  sucrière. 

201.  La  Cochinchine  jugée  à  l'étranger.  Revue  Marii.  et  Colon, j  nov. 
1872,  p.  ^5-63. 

Note  extraite  du  Recueil  Ooneti^ire  belge. 

202.  F.  L.  Cbémazy.  Le  commerce  de  la  France  dans  l'extrême  Orient. . 
ibid,,  mai,  p.  221-252. 

383.  Capit.yiAL.  L'instruction  publique  en  Cochinchine.  Ibid.,  mars, 
p.  702-718. 


204.  Chronique  royale  du  Cambodge,  par  M.  Francis  Garhier.  Jour^ 
nal  Àsiat.,  juillet  et  août  1872,  p.  50  et  112. 

205.  P'  E.  T.  Hamy.  Coup  d'oeil  sur  l'anthropologie  du  Cambodge  ; 
Rapport  présenté  à  la  Société  d'Anthropologie.  Paris^  1872,  în- 
8%  26  pages. 

Extrait  du  Bulletin  de  la  Société  d'Anthropologie. 

Ce  mémoire  est  destiné  à  servir  d*instruct!ons  pour  M.  Mondières, 
chirurgien  de  marine  en  partance  pour  Saïgon.  C'est  un  morceau  de 
consciencieuse  et  savante  étude,  bien  qu'à  notre  avis  il  y  ait  de  sé- 
rieuses réserves  à  faire  sur  quelques  points,  —  ce  qui  n'a  rien  de 
surprenant  en  des  études  encore  si  peu  avancées.  H  nous  est,  par 
exemple,  impossible  d'admettre  avec  M.  Hamy  que  «  tout  ce  que  nous 
savons  des  Moi  ([des  hautes  terres  de  la  Cochinchine),  c'est  qu'ils  sont 
nègres  ;  »  bien  que  l'auteur  ajoute  que  «  sur  ce  point  tout  le  monde 
est  d'accord.  »  Outre  que  M.  Hamy  nous  paraît  employer  ici  le  terme 
Nègre  pour  Noir,  confusion  trop  ordinaire  dans  la  langue  commune, 
mais  qui  ne  doit  pas  se  trouver  dans  la  langue  scientifique,  il  est  tout 
au  moins  fort  inexact  de  dire  que  «  tout  le  monde  est  d'accord  >  à 
regarder  les  tribus  incultes  des  montagnes  de  la  Cochinchine  comme 
des  Nègres,  —  ou  même  comme  des  Noirs.  Dans  tous  les  cas,  le  trait 
caractéristique  de  ces  populations,  d'après  tout  ce  que  ceux  qui  les  ont 
vues  nous  en  apprennent,  c'est  la  coupe  européenne  de  leur  visage  et 
leur  physionomie  presque  caucasique,  absolument  distincte  des  traits 
mongoloïdes  des  Indo-Chinois,  aussi  bien  que  deS  Negritos  des 
Philippines.  C'est  là  le  point  capital,  sur  lequel  il  fallait  insister. 


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184  ASIE.  (n**  196-212.) 

M.  Hamy  fait  des  Mounda  une  race  i  la  fois  indienne  (antérieare 
aux  Aryas)  et  océanienne  ;  et  il  avance  de  plus  que  c  tout  autour  des 
massifs  des  Vindhyas»  refttge  des  Noirs  ulotriques,  habitent  les  Gonds, 
les  Kohls,  etc.,  noirs  liotriqaes,  parents  plits  ou  moins  proches  des 
Australiens..  >  Toutes  ces  assertions,  contre  lesquelles  s'élèvent  les 
faits  connus,  aussi  bien  que  les  analogies  physiques  et  linguistiques, 
sont,  à  notre  avis,  plus  que  contestables,  et  il  nous  est  impossible  de 
ne  les  pas  relever  dans  un  travail  d'ailleurs  si  estimable. 

206.  Brossard  de  Cdrbiont.  De  Saigon  à  Bangkok,  par  rintérieur 
de  rindo-Chine,  janvier-févr.  1811.  Revue  Marit.  et  Colon,  j 
juin  1872,  p.  440;  juillet,  p.  787;  août,  p.  45.  (Avec  une  petite 
carte  itinéraire.) 

Les  remarques  du  voyageur,  souvent  intéressantes,  sont  néanmoins 
écrites  un  peu  au  pied  levé.  Nous  aurions  aimé,  nous  Tavouerons, 
qu'ayant  à  traverser  une  contrée  encore  si  imparfaitement  connue,  un 
officier  de  la  marine  française  en  eût  pris  occasion  de  quelques  obser- 
vations plus  sérieuses  et  d'un  itinéraire  un  peu  mieux  étudie. 

207.  G.  Janneau.  Manuel  pratique  de  langue  cambodgienne,  conte- 
nant de  nombreuses  listes  de  mots  usuels....  et  une  carte  poli- 
tique du  royaume  deKhmêr.  Publié  par  le  gouvernement  de  la 
Cochincbine  française.  Saigon  y  1870,  in-4*,  274  pages,  autogr. 

—  Ëtude  de  l'alphabet  cambodgien ^  par  le  même.  Saigon,  1869, 
in-8*. 

208.  Lieut.  d'ÀRFEDiLLE.  Notes  sur  un  voyage  au  Laos  fait  en  1869, 
par  M.  d'Ar feuille,  lieut.  de  vaisseau,  et  M.  Rheinart,  capit. 
d'infant,  de  marine.  Revue  Marit.  et  Colori;  mars  1872,  p.  465- 
479. 

209.  L.  DE  Carné,  membre  de  la  Commission  d'exploration  du  Mé- 
kong. Voyage  en  Indo-Cbine  et  dans  FËmpire  Chinois.  PariSy 
1871,  gr.  in-8%  4  fr. 

Relation  posthume  qui  avait  déjà  paru  eu  une  série  d'articles  déta- 
chés dans  la  Revue  des  Deux-Mondes. 

Le  grand  ouvrage  de  la  Commission  du  Mékong,  que  les  circonstances 
ont  suspendu  depuis  deux  ans,  se  termine  actuellement  et  va  nous  livrer 
bientôt  la  plus  belle  publication  qui  ait  été  faite  sur  la  Péninsule.  En 
attendant,  voici  les  souvenirs  d'un  des  membres  de  l'expédition,  œuvre 
posthume  que  la  main  paternelle  dépose  sur  la  tombe  prématurée  du 
jeune  voyageur. 

21 0.  Thorel.  Notes  médicales  du  voyage  d'exploration  du  Mékong 
et  de  Cochinchine.  Paris,  1870,  in-8«. 

Notes  d'un  grand  prix  pour  l'ethnologie. 

211.  E.  H.  Man.  List  of  words  of  the  Nicobar  language,  as  spoken 
at  Camorta,  Nancowry,  Trinkutt  and  Katshall.  Journal  of  the 
Asiat.  soc.  ofBengal,  1872,  Part.  1,  p.  1-8. 

212.  De  Qdatrefages.  Étude  sur  les  Mincopies  et  la  race  Negrito  eo 
général.  Revue  d'Anthropologie,  n»*  1  et  2,  1872. 

Iles  Andaman. 


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COCHINCHINE  FRANÇAISE.  185 


S  l«r.  Quelques  notes  sur  la  Cochinchine  française.  Le  présent  et  Tavenir 
de  la  Colonie. 

Malgré  les  terribles  ëvénements  que  la  France  a  traver- 
sés, et  dont  elle  se  relève,  qne  dis-je?  dont  elle  s'est  déjà 
relevée  avec  une  énergie ,  avec  une  puissance  de  vitalité 
qu'elle  tire  de  son  passé  et  qui  fait  Tétonnement  du  monde, 
sa  lointaine  et  récente  colonie  de  TÂsie  orientale  ne  s'est 
pas  arrêtée  dans  son  mouvement  de  développement  écono- 
mique. Les  esprits  éclairés  et  pratiques,  tels  que  l'auteur 
du  travail  intitulé  «  la  Cochinchine  en  1871  »  (ci-dessus, 
n'  200),  lui  consacrent  de  bonnes  études  propres  à  éclairer, 
à  assurer  sa  marche.  «  Jusqu'à  ces  dernières  années,  dit 
r&rivain  que  nous  venons  de  citer,  s'est-on  bien  rendu 
compte  de  l'avenir  de  notre  conquête  ?  A-t-on  compris  que 
notre  établissement  ppuvait  avoir  un  autre  sens  que  la  prise 
de  possession  d'un  point  militaire  important  dans  l'extrême 
Orient  ?  11  est  permis  d'en  douter.  Tout  dans  le  principe 
s'opposait  aux  recherches  agricoles  :  l'agitation  du  pays, 
les  expéditions  fréquentes,  l'incertitude  qui  entraînait  avec 
elle  la  pénurie  de  tout  élément  colonisateur.  Ces  causes  de 
troubles  ont  aujourd'hui  disparu,  l'œuvre  d'établissement 
semble  durable  et  complète,  et  la  confiance  grandit  à  me- 
sure que  le  pays  révèle  sa  richpsse.  »  Et  l'auteur,  après 
^voir  exposé  quelques-unes  des  entreprises  vers  lesquelles 
se  portent  actuellement  les  capitaux,  ajoute  : 

Les  opérations  considérable»  dont  quelques  hommes  entre- 
prenants, soutenus  par  le  Comptoir  d'escompte  de  Saigon,  as> 
sument  aujourd'hui  k  responsabilité,  intéressent  vivement  l'es- 
prit public.  Si  le  résultat  répond  aux  espérances  que  tout  porte 
à  concevoir,  la  culture  nouvelle  gagnera  rapidement  du  ter- 
rain. Les  agriculteurs  de  nos  colonies  sucrières  prodiguent  de- 
puis longtemps  leurs  efforts  sur  un  sol  trop  souvent  appauvri, 
mal  sans  remède  en  raison  du  peu  d'étendue  des  terres  à  mettre 
en  exploitation  ;  beaucoup  d'entre  eux  n'hésiteraient  plus  sans 


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18$  ASIE.  (n°*  196-212.) 

doute  à  venir  apporter  en  Gochinchine  leurs  capitaux  et  leur 
expérience  des  cultures  industrielles.  Les  plantations  de  café  et 
de  poivre,  les  productions  telles  que  Tindigo  et  les  matières 
textiles,  qui  n'exigent  pas,  comme  la  culture  et  la  manipulation 
de  la  canne,  une  première  mise  de  fonds  considérable,  offrent 
un  large  champ  à  Finitiative  des  cultivateurs,  aux  établissements 
plus  restreints  ;  le  développement  dé  ce  genre  dé  travaux  au- 
rait Pheureux  effet  de  répandre  dans  Pintérieur  l'élément  eu- 
ropéen et  d'affirmer  aux  yeux  des  indigènes  la  valeur  de  nos 
moyens  d'action.  L'Annamite  se  groupera  sans  peine  autour  de 
ces  petits  centres  d'exploitation,  plus  à  portée  de  ses  facultés 
que  les  vastes  entreprises  ;  témoin  de  nos  succès,  ne  compren- 
dra-t-il  pas  les  avantages  de  ce  travail  de  grand  rapport,  trans- 
forma devant  lui  en  riches  produits  d'exportation  ?  N'est-il  pas 
permis  d'espérer  qu'un  jour,  comme  les  Indes  hollandaises,  la 
Gochinchine  doit  arriver  à  subvenir  dans  une  large  mesure 
aux  besoins  de  la  métropole? 

Il  fut  question  un  moment  d'abandonner  notre  coloxiie. 
«  C'eût  été  pour  la  France  une  immense  perte,  et  cepen- 
dant l'esprit  public  n'en  eût  pas  compris  k  grandeur.  On 
connaît  peu  la  Gochinchine ,  elle  n'a  d'antre  histoire  que 
celle  de  la  conquête,  et  c'est  à  peine  si  quelques  statistîqneis 
ont  donné  une  idée  de  l'étonnante  fertilité  de  son  sol.  Au 
lendemain  de  tant  d'épreuves,  la  vérité  doit  se  faire  jour. 
Travailler  sans  relâche,  accroître  jios  productions,  nous 
créer  des  ressources  nouvelles,  telle  est  aujourd'hui  la  loi 
qui  nous  est  faite;  elle  s'impose  à  tous  les  cœurs  vaillants 
^  qui  n'ont  pas  désespéré,  comme  le  seul  moyen  de  relever 
nos  ruines,  d'effacer  nos  désastres.  La  Gochinchine  est  ou- 
verte aux  hommes  d'initiative  et  d'intelligence  ;  elle  peut 
avec  leur  concours  contribuer  puissamment  à  l'teuvre  de 
réparation.  «  A  côté  de  ces  considérations  dont  nul  ne  mé- 
connaîtra la  force,  il  nous  sera  permis  de  tenir  compte 
aussi  de  tant  de  recherches  nouvelles  qu'appellent  encore 
la  géographie^  l'ethnographie,  les  langues  et  les  antiqui- 
tés de  l'Indo-Ghine  orientale,  devenue  notre  domaine.  La 
cartographie  de  la  Péninsule  est  ébauchée  à  peine  :  c'est  â 

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LA  RACE  BLANCHE  DE  l'eXTRÊME  ASIE.  187 

BOUS  de  la  eomptéter  ao  moiss  pour  une  part  conûéérablei 
Dans  ce  coin  de  FAsie,  comme  en  Egypte,  comme  sur  Ift 
Tigre,  comme  en  Babylonie,  comme  en  Syrie,  comme  au 
Mexique,  comme  en  Algérie,  notre  présence^  notre  appa- 
riti<in  même  passagère,  seront  devenues  l'occasion  d'études 
et  de  publications  qui  donnent  à  la  science  de  nouveaux 
horizons.  Le  bel  ouvrage  de  la  Commission  du  Mékong 
en  sera  l'inauguration. 

S  2.  Ùà  spéôfméh  de  la  ^ace  blaàchB  de  Textrétné  Asie. 

Dans  un  mémoire  dont  j'ai  inséré  quelques  extraits  au 
dernier  volume  de  Vannée  géographique  {f.  90)^  je  crois 
avoir  mis  en  évidence  l'existence,  au  cœur  du  Grand  Ar- 
chipel Asiatique  j  d'uâe  race  autochth&ne  qui  dans  ses  traits^ 
dans  la  coupe  du  visage,  dans  sa  douleur  même  et  dans  l'en- 
semble tout  entier  dé  sa  configuration  physique^  présente 
les  plus  grandes  analogies  atec  la  race  qualifiée  de  Gauca- 
sique,  dont  elle  paraît  eepéiËdant  bien  distincte.  Cette  race^ 
dont  on  retrouve  encore  des  représentants  plus  ou  moins 
jmrs  dans  les  îles  et  dans  les  groupeil  les  plus  considérables 
du  Gi^and  Archipel,  ^les  Battas  de  Sumatra,  les  Daïaks  de 
Borïféo,  les  Bîzaiàs  de  Mindanao,  etc.  —  a  été  l'élément 
primordial  dont  s'est  formée  la  race  Malaise,  par  croisemente 
contiiius  avec  des  essaims  de  populations  jaunes  sortis  de 
FAsie  orientale  ;  mais  en  dehors  de  ce  croisement  local,  elle 
â'esf  ^mifiéi»  dans  doux  grandes  directioifd.  Au  nord^est, 
à  l'est  et  au  sud-est,  elle  s'est  répandue  dans  toute  la  Po- 
lynésie, jusqu'aux  îles  Bavalj  jusqu'aux  Marquises  et  à  l'île 
de  Pâques,  jusqu'à  la  Kouvelle-Zélande  ;  au  nord,  elle  a 
peuplé  originairement  toutes  les  îles  échelonnées  en  une 
ligne  immense  en  avant  des  côtes  orientales  du  continent 
asiatique  :  l'archipel  du  Japon^Sakkalîn^  les  Kouriles.  Une 
des  pârtkularités  de  cette  race  est  d'être  en  quelque  sorte 
confinée  dans  des  îles  ;  néanmoins  elle  a  aussi  pénétré  dans 

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1S8  ASIE.  (n"  196-212.) 

les  parties  littorales  du  continent.  On  en  peut  signaler  des 
échantillons  aux  extrémités  N.  E.  de  la  Sibérie^  sur  quel- 
ques points  de  la  Mantchourie  maritime,  en  Corée,  dans  le 
sud  de  la  Chine  et  dans  Tlndo-Chine  orientale.  Dans  cette 
dernière  région,  un  des  membres  de  l'expédition  du  Mé- 
kongy  M.  le  D"*  Thorel  (ci-dessus,  n"*  210),  nous  en  montre 
un  exemple  remarquable. 

M.  Thorel,  en  effet,  d'accord  en  cela  avec  le  plus  grand 
nombre  des  voyageurs  qui  l'ont  précédé  dans  la  vallée  du 
Mékong,  a  décrit  des  sauvages  à  c  type.caucasique  »  dont 
le  spécimen  le  plus  pur  serait  représenté  par  la  grande 
tribu  des  Lo-los.  Les  Lo-los  sont  des  montagnards  confi- 
nés sur  les  hauts  sommets  du  Kambang.  «  Cette  curieuse 
tribu,  dit  notre  voyageur,  qui  ressemble  aux  races  indo-eu- 
ropéennes noii-seulement  par  les  traits,  mais  encore  parla 
manière  de  se  vêtir,  tout  à  fait  différente  chez  les  femmes 
de  celles  des  peuples  indo-chinois,  est  composée  d'individus 
grands  et  vigoureux.  Ils  ont  la  figure  énergique,  les  traits' 
accentués,  le  profil  droit,  les  yeux  horizontaux  et  bien  ou- 
verts, le  nez  droit,  assez  développé  et  parfois  busqué,  les 
pommettes  non  saillantes,  le  visage  parfois  ovale,  le  front  as- 
sez haut,  la  barbe  souvent  frisée  et  plus  abondante  que 
chez  les  peuples  voisins.  Leurs  formes  sont  accusées,  leurs 
muscles  sont  bien  dessinés,  mais  leur  teint  est  brun  et  ne 
permettrait  pas,  si  Ton  n'avait  les  caractères  précédents,  de 
les  différencier  des  autres  sauvages.  L'angle  formé  par  la 
branche  montante  du  maxillaire  inférieur  avec  le  corps  se 
rapproche  beaucoup  de  l'angle  droit,  ce  qui  permet  de  les 
distinguer  assez  facilement  des  Chinois,  des  Laociens,  et 
des  autres  tribus  sauvages,  chez  lesquels  cet  angle  est  or- 
dinairement très-ouvert.  » 

Il  importe  de  recueillir  tous  les  faits,  toutes  les  observa- 
tions qui  se  rapportent  à  ces  divers  rameaux,  afin  de  re- 
constituer scientifiquement  une  race  qui  réclame  une  place 

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JAPON.  189 

nouvelle,  et  une  place  considérable,  dans  la  classification 
ethnographique  du  globe. 


XIV 


LE  JAPON. 

213.  B'Hertet  de  Saint-Denis.  Mémoire  sur  l'histoire  ancienne  du 
Japon,  d'après  le  Ouèn'Hièn''Tong-Kao  de  Ma-touan-l!n.  Joum, 
Atiat.,  oct.-déc.  1871,  p.  386-431. 

Introdaction  à  ane  tradaction  de  la  partie  de  l'Encyclopédie  hietori» 
que  de  Matoaaolïn  qai  se  rapporte  au  Japon.  On  sait  qne  l'encyclopé- 
diste chinois  vivait  an  treizième  siètfle  de  notre  ère.  M.  d*Heryey  an* 
nonce  la  tradaction  complète  des  2S  livres  de  Matouanlïn  qui  h 
rapportent  aux  peuples  étrangers.  Qaant  an  mémoire  actuel,  M.  d'Her- 
vey  n*y  touche  pas  à  la  question  ethnologique  qce  le  siyet  coa- 
porte. 

214.  Capit.  T.  Blakiston.  Journey  round  the  island  oîYezo.Proeeed* 
ofthe  Roy,  Geogr.  soc,  XVI,  n«  3,  p.  188-202. 

Moreean  d'an  intérêt  capital  pour  cette  partie  extrême  et  peu  fré« 
qaentée  de  l'archipel  japonais.  —  Voir  ci-après. 

215.  Capit.  L.  Lcwal.  JLe  port  d'Hakodaté.  Les  intérêts  commerciaux 
européens  dans  le  Nord  du  Japon.  Revue  Marit.  et  Coion.,  sept. 
1872,  p.  378-387. 

216.  Von  Brandt,  gênerai  consul.  Ueber  die  Aïnos.  Zeitschrift  fût 
Ethnologie,  4*  année^  1872, 2*  cah..  Mémoires,  p.  23-30. 


S  i*'.  Le  mouvement  social  au  Japon.  LHnfluence  des  races. 
Japonais  et  Chinois. 

Le  mouvement  social  et  politique  qui  s'est  déclaré  au  Ja- 
pon se  développe  et  s'accentue  de  plus  en  plus;  ce  qui  fait 
la  force  de  ce  mouvementi  c'est  que  le  gouvernement  lui- 
même  en  a  pris  la  direction,  et  lui  donne  une  impulsion  de 
jbar  en  jour  plus  décidée  et  plus  vigoureuse.  A  la  distance, 
où  nous  sommes  des  événements,  bien  des  motifs  intimes  nous 
échappent,  sans  doute  :  mais  cette  immense  rénovation  de 
tout  le  système  politique,  civil,  administratif  et  religieux 
d*an  des  vieux  empires  de  TOrient^  n'en  reste  pas  moine  un 

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190  ASIE.  (n~  213-216,) 

des  faits  les  plus  extraordinaires,  un  des  plus  curieux  spec- 
tacles de  rhistoire  contemporaine.  Le  Japon^  vis-à-m  de 
la  Chine,  manifeste  en  ceci  une  fois  de  plus  les  différences 
qui  sortent  des  entrailles  menues  des  deux  races  et  de  leur 
diversité  originaire.  Il  n'y  a  en  effet  rien  de  commun  entre 
la  race  japonaise,  rameau  de  cette  ^ande  famille  océanienne 
dont  nous  signalions,  il  n'y  a  qu'un,  moment  (p.  187)  Tau- 
tonomie  méconnue,  et  la  raCe  chinoise  sortie  de  la  famille 
mongolique  :  il  n'y  a  eat^re  elles  lien  de  coEusiun,  rien  que 
les  formes  de  la  civilisation  que  le  Japon  a  reçue  autrefois 
de  la  Chine,  et  un  certain  degré  de  mélange  physique  qui 
s'esit  opéré  enlre  elles,  ce  qui  a  &il  longtemps  coxifondre 
les  deux  natio^^s.  La  Qhiixe  e.çt  imniphjQiisée  dans  le  vieux 
cadre  de  sa  eii^Meatîoii  matérielle  :  le  Japonais  est  le  re- 
présentant éminent  d'une  race  intellectuellement  et  mora- 
lement perfectible,  en  même  temps  qu^fii^iment  supé- 
rieure au  point  de  vue  physique. 

Nous  nous  bornerons  à  repr^uîre  quekpes  estzi^ts  des 
nombreuses  correfifKmdances  qui  arrivent  du  Jupo»  en  Su- 
rope. 

S  2.  DéM^  foujnîs  par  to^  correapondADcea. 

On  écrivait  de  Yédo,  fin  d'août  1872  : 

Le  Japon  subit  depuis  deux  ans  une  transformation  qui  sera 
certainement  Tun  des  phénomènes  les  plus*  curieux  de  notre 
é$>oque.  Ce  pays  si  longtemps  acbar^é  contre  toute  ic^e  ou 
toute  coutume  européenne,  seçihle avoir  r^Ojacê  ^  deis préjugés 
séculaires  et  s'engage  résolument  dans  une  voie  véritablement 
civilisatrice.  Loin  de  montrer  de  Tantipathie  contre  les  étran- 
gers, il  imite  leurs  modes,  il  s'assimile  leurs  progrès,  il  applique 
leurs  systèmes.  Aucun  peuple  n'est  plus  observatear  que  le 
peuple  japonais.  Chaque  fois  qu'une  ambassade  se  rend  en  Eu- 
rope, elle  y  étudie  les  institutions,  Içs  sts^tistiques  conu;ner- 
ciales,  Jes  découvertes  scientifiques,  et,  à  son  retour,  elle  four- 
nit au  gouvernement  des  informations  dont  il  ne  manque  pas 
de  tenir  compte. 

•      '        Digitizedby  VjOOQiC 


MOUVEMENT  SOCIAL  AU  JAt>ON.  191 

L^xposiMon  universelle  frappa  tout  particulièrement  les  Ja* 
ponais  qui  s'étaient  rendus  à  Paris,  et  ce  grand  résumé  de  la 
civilisation  générale  leur  fit  faire  les  réflexions  les  plus  utiles. 
D'autre  part,  le  gouvernement  s'aperçut  que  les  traités  signés 
primitivement  avec  tant  de  répugnance  devenaient  une  source 
4e  richesse  pour  le  pays,  et  il  se  décida  sans  hésitation  à  ac- 
cepter la  concurrence  commerciale  et  Témulatioii  pacifique  avec 
les  puissances  étrangères.  * 

La  situation  du  Japon,  l'apaisement  des  discordes  civiles,  le 
triomphe  complet  du  Bô^ado,  la  soumission  du  taïkoun,  celle 
des  principaux  daïmios,  contribuèrent  à  l'inauguration  d'une 
politique  réforaiatrice.  Le  B»%ado,  jeune  souverain  dont  Tiur 
teliigence  est  vive  et  les  intentions  libérales,  s'efforça  de  sub- 
stituer à  l'ancienne  organisation  féodale  du  pays  un  système 
de  gouvernement  fende  sur  des  principes  de  centralisation 
et  d'unité.  Ce  changement  n'est  pigs  encore  tout  à  Êiit  o|iéré. 
Mais  il  est  en  bonne  voie,  et  des  résultats  importants  ont  déjà 
été  obtenus.  Les  da![mios,  ^iétaientnaguère  de  vrais  seigneurs 
indépendants,  semblables  aux  grands  feudataires  de  l'Europe 
du  moyen  âge,  tendent  à  se  transfoi'mer  en  simples  gouver- 
neurs de  provinces,  en  préfets,  et  l'action  centrale  du  gouver- 
nement pénètre  déplus  en  plus  dans  les  anciens  clans,  qui  per- 
dent peu  à  peu  leur  caractère  séparatiste. 

En  même  temps,  le  'mikado,  qui  ne  veut  pas  dépendre' des 
daîmios  au  point  de  vue  militaire,  s^organise  une  armée  à  lui 
et  donne  toute  sa  confiance  à  la  mission  militaire  française  char- 
ge de  l'iBstrucUon  des  troupes.  Cette  mission,  dont  le  chef  est 
M.  le  colonel  Marquerie,  est  depuis  quelques  mois  à  Yééo,  où 
elle  a  reçu  le  meilleur  accueil  et  où  elle  accomplit  sa  tâche  à 
rentière  satisf^iction  du  gouvernement  japonais.  Les  désastres 
de  la  France  n'ont  nullement  altéré  les  sympathies  du  mikado 
'  pour  cette  grande  nation,  et  le  jeune  souverain  s'est  plusieurs 
fois  exprimé  en  termes  fort  justes  sur  les  preuves  d'héroïsme 
que  les  armées  françaises  ont  fait  admirer  au  milieu  de  leurs 
défîtes.  Il  a  donné  une  marque  visible  de  ses  sentiments,  en 
portai^t  l'uniforme  de  général  de  division  français.  Il  était  re- 
vêtu de  ce  costume,  lorsqu'il  a  quitté  récemment  Yédo  pour 
se  rendre  dans  ses  États  du  Sud.  Ge  voyage  produit  un  bon  ef- 
fet. Partout  les  populations  accourent  au-devant  du  monarque, 
en  lui  faisant  des  ovations  dont  le  caractère  est  aussi  sincère 
que  spontané.  ' 

L'étiquette  adoptée  par  le  mikado  est  de  plus  en  plus  ana- 


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192  ASIE.  (n- 213-216.; 

logue  à  celle  des  cours  de  l'Europe.  Il  a  aboli  les  génuflexions 
et  les  prosternations.  Lorsqu'il  passe,  le  peuple  salue,  mais  ne 
se  jette  plus  à  genoux  comme  autrefois.  Les  représentants  des 
puissances  étrangères  sont  reçus  en  audience  privée  dans  le  pa- 
lais impérial.  Cet  honneur  a  été  pour  la  première  fois  accordé 
au  ministre  français,  M.  Gutrey,  quand  il  a  quitté  Yédo,  en 
vertu  d'un  congé,  il  y  a  quelques  mois.  Le  chargé  d'affaires  de 
France,  M.  le  comte  Paul  de  Turenne,  qui  dirige  actuellement 
la  légation  en  Pahsence  du  ministre,  n'a  pas  été  moins  bien 
traité.  Ce  diplomate  a  présenté,  il  y  a  quelques  jours,  M.  l'ami- 
ral Garnaud  au  souverain,  et  en  a  reçu  Taccueil  le  plus  copr- 
tois.  Le  mikado  s'est  levé  en  voyant  entrer  le  chargé  d'affaires 
et  l'amiral,  et  il  les  a  entretenus  avec  une  grande  bienveillance. 
Ge  monarque  remplit  avec  zèle  les  mêmes  devoirs  que  les 
souverains  européens.  Il  préside  les  conseils  des  ministres  ;  il 
étudie  les  affaires;  il  s'occupe  de  Tarmée  ;  il  passe  des  revues, 
il  visite  les  provinces,  il  donne  des  audiences,  il  se  met  en  com- 
munication avec  son  peuple  et  avec  les  représentants  des  puis- 
sances étrangères. 

Les  Européens  et  les  AJhéricains,  auxquels  sont  ouverts  cinq 
ports  outre  Yédo,  y  font  un  commerce  très-actif,  aussi  profitable 
au  Japon  qu'à  eux-mêmes,  et  il  y  a  lieu  d'espérer  que  les  trai- 
tés dont  la  révision  se  prépare  en  ce  moment  ne  recevront  que 
dei^  modifications  libérales,  en  rapport  avec  le  progrès  des  idées 
et  le  développement  des  transactions.  L'expérience  a  démontré 
l'insuffisance  et  les  inconvénients  de  certaines  clauses,  et  avec 
du  bon  vouloir,  avec  un  esprit  conciliant  de  part  et  d'autre,  on 
arrivera  très-facilement  à  des  innovations  heureuses. 

Voici  quelques  passages  d'une  correspondance  anglaise, 
à  peu  près  de  la  ùième  dute  : 

Le  nombre  des  jeunes  Japonais  choisis  par  le  gouvernement 
pour  être  élevés  à  l'étranger  et  y  recevoir  l'instruction  néces- 
saire, est  de  250  en  Angleterre,  200  en  Amérique,  40  à  50  en 
France,  30  à  kO  en  Allemagne;  on  peut  dire,  en  général,  qu'ils 
font  des  progrès  remarquables. 

Parmi  les  constructions  en  cours  d'exécution  ou  déjà  termi- 
nées, il  faut  citer  surtout  l'arsenal  de  Yokoska  et  le  dock  de 
Graving  :  le  premier,  muni  de  nombreuses  machines  pour  la 
construction  des  navires  et  des  engins  nécessaires;  le  second, 
capable  de  recevoir  des  bâtiments  de  2000  à  3000  tonneaux.  Ge 

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JAPON.  193 

travail  a  été  exécuté  par  des  ingénieurs  français.  Environ  20 
phares  de  la  plus  parfaite  construction,  armés  des  appareils 
d'optique  les  plus  nouveaux  et  les  plus  coûteux  ont  été  établis 
et  sont  en  pleine  activité.  Ces  phares,  dont  quelques-uns  sont 
situés  aux  endroits  les  plus  dangereux,  ont  été  élevés,  pendant 
les  quatre  dernières  années,  par  des  ingénieurs  anglais  choisis 
par  le  bureau  du  commerce.  Quarante  milles  de  chemins  de  fer, 
dont  l'achèvement  est  prochain,  ont  été  également  construits 
sous  la  direction  d'Anglais,  et  200  autres  sont  actuellement 
en  préparation.  C'est  encore  sous  la  direction  d'ingénieurs 
anglais  qu'on  pose  im  fil  télégraphique  qui  traversera  le  pays 
et  qui  aura  plus  d'un  millier  de  milles  de  longueur.  La  Mon- 
naie impériale,  qui  est  un  établissement  grandiose,  possède  un 
essayeur  et  des  fonctionnaires  anglais.  Des  géomètres  de  même 
nationalité  sont  occupés  à  tracer  de  nouvelles  rues  dans  une 
grande  partie  de  Yédo,  où  Ton  élève  de  solides  bâtisses.  A  Yado, 
sur  la  côte  occidentale,  oi!i  se  trouvent  de  grandes  mines  d'or, 
un  ingénieur  des  mines,  d'Angleterre,  a  installé  des  machines 
pour  le  broyage  et  le  lavage  du  quartz  aurifère.  £n  différentes 
parties  du  pays,  des  médecins  sont  en  train  d'initier  les  indi- 
gènes aux  secrets  de  leur  art  ;  des  officiers  de  l'armée  et  de  la 
marine  leur  enseignent  l'art  militaire.  On  peut  ajouter  à  ce  ren- 
seignt ment  que  des  officiers  français  sont  chargés  d'une  mission 
semblable.  On  se  propose  enfin  de  fkire  venir  des  ouvriers  et 
des  machines  d'Angleterre  pour  faire  connaître  à  la  population 
ouvrière  les  procédés  de  la  fabrication  européenne. 

Une  lettre  particulière  nous  apprend  que  l'on  traduit  le 
Gode  Pénal  français,  qui  dorénavant  servira  de' base  à  la 
législation  criminelle. 


S  3.  Etat  actuel  da  Japon.  Aperçu  administratif,  moral, 
industriel  et  financier. 

Le  Japon  a  une  histoire  écrite  qui  embrasse  une  période 
continue  de  2532  ans.  Depuis  l'an  660  avant  J.  G.,  les 
souverains  de  ce  pays  n'ont  formé  qu'une  seule  dynastie, 
qui  dure  encore.  Son  empereur  actuel  est  le  cent  vingt- 
deuxième  de  sa  race. 

Depuis  vingt-cinq  siècles,  les  mœurs  du  Japon  n'avaient 

L'ANNÉS  GËOGR.  XI.  ^  13 


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194  •  ASIE.  (N°»  213-216.) 

pas  virtuellement  changé,  et  voilà  qu'aujourd'hui,  après 
s'être  mis  résolument  en  dehors  de  tout  contact  avec  le 
monde,  ce  pays  abandonne  tout  à  coup  ses  traditions,  cher- 
che à  modifier  complètement  sa  manière  d'être,  et  s'efforce 
d'adopter  les  lois  et  les  coutumes  européennes  et  de  pren- 
dre rang  parmi  les  nations. 

Le  système  de  gouvernement  du  Japon  est  actuellement 
emprunté  pour  une  partie  à  l'Europe.  Au  point  de  vue 
théorique,  le  mikado  est  un  souverain  absolu  qui  règne 
et  gouverne,  mais  en  réalité,  c'est  le'  grand  conseil  qui 
traite  les  affaires.  Les  ministres,  soit  individuellement,  soit 
réunis  en  ce  que  nous  appellerions  un  cabinet,  décident 
de  toutes  les  questions  ordinaires;  *mais  l'examen  des 
points  d'une  importance  réelle  est  réservé  au  grand  con" 
seil,  présidé  par  le  mikado. 

L'administration  locale  des  provinces  est  dans  les  mains 
des  préfets.  U  y  a  un  préfet  résidant  dans  chacun  dès 
soixante-qtdnze  districts  qui  forment  actuellement  la  divi- 
sion territoriale  du  Japon.  Les  pouvoirs  et  les  attribjitions 
de  ces  préfets  sont  beaucoup  plus  étendus  que  ceux  d'au- 
cun fonctionnaire  du  même  ordre  en  Europe.  Néanmoins, 
il  y  a  une  limite  à  leur  action  judiciaire;  ils  ne  peuvent, 
faire  exécuter  les  jugements  qui  emportent  le  bannisse- 
ment ou  Ja  mort  avant  que  le  ministre  de  la  justice  les  ait 
confirmés.  Dans  les  villages,  les  causes  sont  plaidées  de- 
vant les  officiers  civils  subalternes.  Toutefois,  tout  cela  est 
en  train  de  se  modifier. 

Les  finances  sont  nécessairement  la  grosse  question. 
C'est  "pour  la  première  fois  dans  l'histoire  du  Japon  qu'un 
budget  pour  l'année  courante,  un  budget  soigneusement 
calculé,  un  budget  sérieux,  enfin,  vient  d'être  préparé.  Il 
donne  l'exposé  des  recettes  et  des  dépenses  pour  1872. 

Le  total  des  recettes  est  de  305  millions  de  francs  (nous 
négligeons  les  fractions);  le  total  des  dépenses,  de  285 
millions  :  l'excédant  des  recettes  est  donc  de  20  millions 

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JAPON.   MOUVEMENT  SOCIAL.  195 

de  francs.  Mais  à  côté  de  ce  chiffre^  des  plus  satisfaisants 
en  tant  qu'état  normal,  il  faut  remarquer  que  le  Japon  a 
aujourd'hui  une  dette  élevée,  près  de  700  millions  de 
francs,  dont  45  millions  seulement  vis-à-vis  de  l'étranger. 
Après  les  finances,  k  question  la  plus  importante  aux 
yeux  des  Japonais  est  l'éducation.  Il  y  a,  même  des  en- 
thousiastes qui  veulent  que  Punique  devoir  du  gouverne- 
ment soit  d'enseigner  le  peuple  :  tout  1«  reste  n'est  pas 
digne  de  son  attention.  Un  ministre  de  l'instruction 
publique  a  été  définitivement  créé  en  1871,  et  si  l'on  con- 
sidère depuis  combien  de  temps  il  existe,  et  les  difficultés 
sérieuses  et  diverses  avec  lesquelles  il  a  eu  à  lutter,  il  a 
parfaitement  marché.  Les  écoles  primaires  publiques  aug- 
mentent rapidemdht  en  nombre,  surtout  dans  les  villes; 
mais  le  mouvement  est  bien  plus  marqué  dans  les  pro- 
vinces occidentales  et  sur  les  eôtes  qu'à  l'intérieur.  Jusqu'à 
présent,  ce  sont  les  écoles  privées  qui  sont  les*  plus  nom- 
breuses; et  comme  chacun  peut  en  fonder  une,  n'étant 
soumis  qu'à  une  autorisation  qui  est  toujours  accordée, 
elles  surgissent,  comme  par  enchantement,  partout  où  le 
Besoin  s'en  fait  sentir.  Il  n'exista  pas  encore,  néanmoins, 
de  statistique  sur  ce  sujet.  On  ne  peut  citer  ni  faits  ni 
chiffres;  mais  on  peçge  au  Japon  que  si  ce  mouvement 
continue,  il  n'y  aura  probablement,  dans  la  prochaine  gé- 
nération, pas  un  seul  homme  ni  ime  seule  femme  qui  né 
sachent  lire  et  écrire.  Ce  qui  aide  particulièrement  à  ce 
mouvement  en  faveur  de  l'éducation,  c'est  ce  fait  que 
même  sous  l'ancien  régime  l'éducation  était  très-générale, 
bien  qu'il  n'y  eût  aucune  intervention  du  gouvernement. 
•  Les  livres,  surtout  les  traductions  d'ouvrages  étrangers, 
augmentent  avec  une  rapidité  qui  indique  l'active  curiosité 
qui  s'est  emparée  des  classes  moyennes  aussi  bien  que  des 
classes  supérieures.  Les  journaux  et  les  presses  locales  se 
multipUent,  et  le  désir  d'acquérir  des  connaissances  peut 
être,  sans  exagération,  taxé  de  fiévreux^  surtout  dans  les 

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196  ASIE.  (n'»"  213-216.) 

villes.  Les  livres  qu'on  lit  le  j)lu8  sont  ceux  qui  racontent 
l'histoire,  les  mœurs  et  les  conditions  intërieures  des 
autres  pays,  les  traités  d'économie  politique  et  ceux  qui 
traitent  les  questions  morales. 

Les  Japonais  ont  toujours  eu  une  grande  prédilection 
pour  la  médecine.  La  science  de  l'ingénieur,  les  lyiines  et 
d'autres  questions  industrielles,  commencent  aussi  à  at- 
tirer leur  atteittion.  Pour  faciliter  l'étude  des  langues 
étrangères,  le  gouvernement  a  fait  venir  plusieurs  profes- 
seui^s,  et  a  envoyé  à  ses  frais  des  étudiants  en  Amérique  et 
en  Europe.  H  faut  même  ajouter  des  dames  à  la  liste,  car 
une  ex-princesse  et  sa  compagne  ont  débarqué  à  Marseille 
il  y  a  quelque  temps.  Elles  étaient  vêtues  à  la  française,  et 
en  ce  moment  elles  sont  en  Angleterre  où  elles  étudient  la 
grammaire  avec  ardeur. 

L'agriculture  a  toujours  été  habilement  pratiquée  au 
Japon,  et,  "hormis  l'emploi  de  machines  et  l'introduction 
de  nouvelles  plantes  et  d'engrais  minéraux  et  chimi- 
ques, il  n'y  a  pas  à  signaler  de  progrès  marqué.  H  n'est 
pas  un  mètre  de  terre  fertile  qui  ne  soit  utilisé,  et  une 
irrigation  bien  organisée  stimule  Tactivité  naturelle  de  la 
végétation,  particulièrement  sous  l'admirable  climat  des 
districts  fia  midi  et  de  l'ouest.  Le*riz  est,  bien  entendu, 
le  principal  produit  du  pays;  mais  le  thé,  la  soie  et  les 
œufs  de  ver  à  soie  (qu'on  peut  bien  compter  comme  des 
produits  de  l'agriculture),  les  haricots,  les  pois,  et  une 
grande  variété  d'autres  produits,  y  poussent  en  abondance. 
Le  Japon  produit  plusieurs  plantes  spéciales  d'une  valeur 
considérable  et  d'une  grande  importance  ;  surtout  le  mûrier 
à  papier,  dont  Técorce  et  les  jeunes  branches  servent  prin- 
cipalement à  fabriquer  le  papier  japonais,  l'arbre  à  circule 
laurier-camphre  et  l'arbre  à  gomn^e-laque.  L'ornementa- 
tion des  jardins  est  arrivée  dans  ce  pays  à  une  grande  per- 
fection. 
Le  Japon  est  très-riche  en  métaux.  On  y  trouve  en 

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JAPON.  197 

grande  quantité  les  métaux  précieux  et  les  métaux  utiles. 
Il  en  est  de  même  du  charbon^  et  quelques  mines  sont 
exploitées  sur  une  grande  échelle.  Le  cristal  de  roche  est 
abondant.  On  pêche  le  long  de  la  côte  des  perles  et  du 
corail;  mais  on  n'y  a  trouvé  jusqu'à  présent  ni  diamants 
ni  pierres  de  valeur.  On  sait  combien  les  Japonais  sont 
habiles  dans  l'art  de  travailler  les  métaux,  surtout  dans 
l'art  de  la  coutellerie  et  dans  celui  de  travailler  l'or  et  le 
cuivre.  Nous  n'avons  qu'une  idée  générale  de  l'incompa- 
rable fini^  de  la  délicatesse  de  leur  travail  et  du  talent  qu'il 
révèle.  Avec  l'habilité  qu'ils  ont  depuis  si  longtemps  et 
leur  aptitude  pour  l'imitation  (qu'-on  n'oublie  pas  qu'ils 
ont  construit  leur  premier  bateau  à  vapeur  et  sa  machine, 
uniquement  d'après  la  description  donnée  par  un  livre 
hollandais),  on  doit  s'attendre  à  ce  qu'avant  peu  ils  fabri- 
quent eux-mêmes  ceux  des  outils  et  des  ustensiles  que 
nous  leur  envoyons  encore. 

Il  n'y  a  pas  eu  jusqu'à  présent  un  grand  développement 
dans  les  manufactures^  bien  que  plusieurs  articles  d'Eu- 
rope, tels  que  le  verre  à  vitres,  le  vin  de  raisin  et  la  bière 
commencent  à  être  fabriqués  en  petites  quantités.  Quant  à 
la  fabrication  de  la  laque,  de  la  porcelaine  et  du  crêpe  de 
soie,  il  n'y  faut  souhaiter  aucun  changement;  elle  est  si 
parfaite,  que  les  étrangers  ne  sont  pas  parvenus  à  l'égaler. 
n  faut  bien  avouer  que  le  secret  de  la  bonne  laque  et 
du  filage  de  la  soie  n'a  jamais  été  découvert  en  dehors 
du  Japon. 

L'organisation  de  l'armée  et  de  la  marine  commencent 
seulement.  L'armée  est  organisée  d'après  le  mode  fran- 
çais ;  elle  porte  des  uniformes  français.  C'est  une  armée  de 
72  000  hommes,  sans  compter  la  garde  du  mikado  com- 
posée de  8300  soldats,  triés  pour  ainsi  dire.  La  marine 
se  compose  actuellement  de  19  navires  de  rangs  divers. 

Pendant  que  le  gouvernement  marche  ainsi  dans  la  voie* 
du  progrès,  les  sentiments  de  la  population  se  modifient  à 

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198  ASIE.  (n*»»  213-21&.) 

l'égard  de  ceux  qtii  importent  ces  idées  de  progrès,  et  elle 
leur  accorde  de  plus  en  plus  sa  sympathie. 

Il  n'y  a  pas  plus  de  deux  ans,  un  étranger  n'aurait  pas 
osé  s'aventurer,  sans  une  forte  escorte  militaire,  dans  les 
rues  de  Yédo,  le  dernier  des  ports  ouverts  au  commerce 
européen;  et  dans  le  fait,  les  attentats  audacieux  auxquels 
donnait  lieu  la  haine  de  la  population  pour  «  les  barbares 
étrangers  »  conseillaient  les  plus  grandes  précautions.  Au- 
jourd'hui, Tétran^er  réside  dans  la  capitale  du  Japon  aussi 
tranquillement,  aussi  sûrement  que  chez  lui. 

Laptrpulation  aisée  de  la  capitale  s'habille  presque  ex- 
clusivement à  Teuropéenne,  et  le  sobriquet  de  Kétojin 
(étranger  velu),  que  Ton  entendait  retentir  naguère  à 
chaque  coin  de  rue,  quand  passait  un  Européen,  a  presque 
complètement  disparu  de  la  bouche  du  peuple. 

,  S  4.  Tézo  et  les  Aïnos. 

• 

Nulle  relation,  avant  M.  Blakiston,  n'avait  donné  des 
détails  aussi  nombreux,  aussi  précis,  sur  la  topographie 
de  rile  de  Tézo  et  sur  les  habitants.  On  n'avait  vu  jusqu'à^ 
présent  que  le  littoral  sud  et  ouest  de  l'île;  le  capitaine 
Blakiston,  pour  son  voyage  autour  de  Tîle  entière,  était 
pourvu  d'une  commission  du  gouvernement  de  Yédo. 
Voici  le  portrait  que  l'explorateur,  qui  a  eu  les  meilleures 
occasions  de  voir  et  d'observer  les  Alnos,  fdt  de  ce  peuple 
plus  célèbre  que  connu  : 

«  Les  traits  des  Aïnos  indiquent  une  origine  absolument 
différente  des  Japonais',  des  Chinois,  des  Mongols,  des 
Mantchoux  et  des  Tibétains. 'Tandis  que  tous  ces  peuples 
se  distinguent  par  un  visage,  glabre  et  des  yeux  obliques, 
les  ÂïQos  ont  le  crâne  couvert  d'une  profusion  de  rudes 

*  1.  De  ceux  des  Japonais  qu^sont  devenus  quasi  Chinois  par  le  mô- 
lange  du  sang  à  une  époque  ancienne,  mais  non  des  Japonais  que  ce 
mélange  n'a  pas  atteints.  V.  S.  M. 

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GRAND  ARCHIPEL  ASIATIQUE.  199 

cheveux  noirs  qui  tombent  autour  de  la  tête  en  lourdes 
masses  cpie  le  peigne  n'a  pas  touchées,  et  qui  se  confon- 
dent avec  d'épaisses  moustaches  et  des  barbes  descendant 
presque  jusqu'à  la  ceinture.  Les  yeux  sont  grands,  rondS| 
d'un  noir  brillant  ;  les  pommettes  ne  sont  pas  proémi- 
nent^; le  nez  est  grand  et  d'une  belle  forme.  Le  corps, 
cependant,  paraît  chétif  et  faible,  et  l'expression  de  leur 
regard  révèle  à  la  fois  une  longue  oppression  et  l'absence 
de  toute  culture.  Ils  fabriquent  leurs  grossiers  vêtements 
avec  des  écorces  d'arbres.  Ils  reçoivent  de  leurs  patrons 
japonais,  qui  les  emploient  à  la  pêche  et  à  la  chasse,  des 
rations  et  quelques  objets  d'habillement,  mais  non  une 
paye  en  argent  qui  serait  pour  eux  sans  valeur.  On  ne  les 
a  pas  encouragés  à  s'adonner  à  la  culture  du  sol  ;  ils  n'ont 
guère  d'établissements  que  sur  la  côte.  Quoique  beaucoup 
d'entre  eux  soient  des  hommes  de  très-bonne  mine,  les 
femmes,  en  général,  sont  loin  d'être  jolies  *  et  les  agré- 
ments dont  elles  se  tatouent  les  lèvres  ne  les  embellissent 
pas.  » 


XV- 


GRAND  ARCHIPEL  ASIATIQUE. 

2K.  J.  RiJNENB^G.  De  Oost-Indische  Archipel.  Beknopt  aardrijskun. 
dig  leerboek  en  beschrijving  der  zeden  en  gewoonten  van  de 
verschillende  volsksstammen.  Arnhegn,  1871,  in-8*,  103  p.  et 
24  cartes  (Willink). 

218.  Van  Leent.  Le»  possessions  néerlandaises  des  Indes  orientales. 
Bornéo  (Contiibutions  à  la  géographie  médicale).  Archives  de 
Médecine  navale,  janvier  et  février  1872,  p.  5-22,  81-95, 

219.  Lient.  C.  de  Crespigny.  On  Northejn  Bornéo.  Proceed,  of  the 
Roy.  Geogr.  Soc,  XVl,  n»  3, 1872,  p.  171-183. 

Avec  un  vocabulaire  de  six  langues  ou  dialectes  de  Bornéo. 

1.  Ce  qui  est  le  cas  à  peu  pr^s  de  tous  les  peuples  incultes,  où  les 
femmes  sont  les  bètes  de  somme  de  la  tribu.  V.  S.  M. 


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200  ASIE.  (n"  217-222.) 

220.  A.  Neveu.  Timor  et  les  Timoriens.  Revue  Marit,  et  Colon.,  mai 
1872,  p.  169-189. 

Extrait  d'un  mémoire  publié  par  M.  A.  de  Castro  dans  les  Annaes  do 
Gonselho  ultramarino. 

221.  De  Qu/tREFAGES.  Les  Negritos.  BuUetin  de  la  Soc.  de  Géogr.^ 
mars  1872,  p.  306-310. 

Voir  ci-dessus,  p.  184,  n«  212. 

222.  Carte  des  îles  Philippines,  Gélèbes  et  Moluques.  Public  du  Dé- 
pôt de  la  Mar.,  1872  (n»  3002). 

—  Mer  de  Chine  (n«  3003). 


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OGÉANIE 
I 

GÉNÉRAUTÉS. 

223.  G.  Gerland.  Die  ethnographischen  Verhâltnisse  des  Grossen 
Océans.  Mittheil.  de  Peterxnann,  1872,  n"  4,  p.  140-144.  Carte. 

M.  Gerland  résume  ici  les  étades  et  la  doctrine  exposées  dans  le 
6«  volame  da  grand  ouvrage  de  Waitz,  Anthropologie  derNaturvôlker, 
Tolame  consacré  aux  peuples  Océaniens.  La  carte  est  celle^qui  accom- 
pagne le  livre.  Le  D'  Wtdtz  est  mort  avant  d'avoir  pu  compléter  son 
bel  et  savant  ouvrage  :  M.  Gerland,  professeur  au  gyninase  de  Halle,  a 
accepté  la  tâche,  toujours  difficile,  de  compléter  l'œuvre  posthume.  — 
En  dehors  du  Grand  Archipel  qu'il  rattache  avec  raison  à  TAsie,  l'au- 
teur partage  les  peuples  océaniens  en  quatre  groupes  :  les  Micronésiens, 
les  Polynésiens,  les  Mélanésiens  et  les  Australiens,  division  plus  géo- 
graphique qu'ethnographique.  Dans  sa  Notice,  M.  Gerland  examine 
succinctement  les  rapports  qui  existent  de  groupe  k  groupe  dans  cha^ 
cane  de  ses  quatre  divisions. 

224.  Dana.  On  corals  and  coral  islands.  New  York,  1872,  in-8». 

Nous  citons  ce  titre  dtprès  le  Journal  de  Silliman,  auquel  nous 
empruntons  également  la  citation  suivante,  où  l'auteur  expose  ses  vues 
sur  la  géographie  sous-marine  du  Grand  Océan  : 

Les  lies  de  Corail  sont  littéralement  des  monuments  construits  sur 
des  terres  disparues;  et  nous  trouvons  là  un  témoignage  qui  montre 
que  le  Grand  Océan  a  ses  chaînes  de  montagnes  sous-marines,  ou  des 
Ûgnes  de  sommets  volcaniques,  non  pas  seulement  sur  des  centaines, 
mais  sur  des  milliers  de  milles  de  longueur.  Ce  témoignage  visible 
prouve  que  quelques-unes  des  rangées  de  hautes  îles  ont  une  longueur 
sons-marine  plus  grande  que  les  chaînes  émergées  :  par  exemple,  la 
lign^  des  tles  Havaï  ou  Sandwich,  dont  la  longueur  n'est  que  de 
400  milles  depuis  Havaï  jusqu'à  Kaouaï,  on  530  milles  jusqu'à  Bird 
island,  le  dernier  Ilot  rocheux  du  groupe  à  Touest,  mais  que  l'existence 
des  lies  de  corail  sous- marines  nous  fait  suivre  dans  cette  direction 
jusqu'à  la  distance  de  2(^oo  milles  à  partir  d^Havaï.  Et  combien  au  delà» 
nous  reste  Inconnu,  dans  cette  partie  de  l'Océan  où  la  ligne  des  îles  de 
corail  sous-marines  dépasse  la  limite  des  mers  de  récifs  madrépori- 
ques,  c'est-à-dire  de  la  région  où  il  est  possible  de  constater  la  présence 
des  coraux? 


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202  •  ocÉANiE.  (n^' 223-225). 

<  On  a  reconnu  que  d'autres  rangées  de  sommets  sous-marins  s'éten- 
dent à  travers  tout  le  Grand  Océan  central,  là  même  où  pas  un  rocher 
ne  s'élève  au-dessus  de  la  surface.  Toutes  les  lies  madréporiques  qui 
existent  entre  les  lies  Paumotou  et  Tile  Wake,  vers  170<>  de  longit.  E. 
(Greenw.)  et  ig'^  lat.,  au  nord  des  groupes  Ralik  et  Radak  formant  Tar- 
chipel  Marshall,  sont  disposées  en  lignes;  et  de  même  que  les  îles 
hautes  également  disposes  en  lignes  immédiatement  au  sud  des  pré- 
cédentes, elles  sont  rangées  d'une  manière  presque  uniforme,  en  une 
courbe  portant  au  N.  0.  à  l'extrémité  occidentale.  Les  îles  de  corail 
couronnent  donc  le  sommet  des  lignes  d'élévations,  et  toutes  ces  lignes 
constituent  dans  leur  ensemble  une  immense  suite  de  hauteurs  de  plus 
de  5000  milles  de  développement.  Les  lies  de  corail  sont  donc  les  té- 
moins de  l'orographie  sous-marine  du  globe  terrestre,  en  même  temps 
que  des  changements  de  niveau  que  le  temps  a  opérés  lentement  au 
fond  de  l'océan.  »,  ,  * 

225,  Courants   de    rOcéan  Pacifique  Nord.  Annales  hydrographi- 
ques, 1872,  2*^  trim.,  p.  287-299. 

Renseignements  extraits  de  Vlfnited  States  Coast  Survey  Report 
de  1867,  par  l'assistant  G.  Davidson  chargé  de  la  reconnaissance  de 
la  côte  d'Alaska.  Ces  renseignements  dont  très-précis  et  très-circon- 
stanciés. 


II 
AUSTRALIE.       , 


226.  Ch.  Ruelens.  La  découverte  de  rAustralie.  Notice  sur  un 
manuscrit  de  la  bibliothèque  de  Bruxelles.  ÀnverSy  1812^  in-8*. 

Nous  ne  connaissons  de  cet  opuscule  que  le  titre.  En  Angleterre, 
M.  Major,  à  qui  l'on  doit  déjà  de  boift  travaux  historiques  sur  l'Aus- 
tralie, a  lu  au  sein  de  la  Société  des  Antiquaires  de  Londres  on  mé- 
moire intitulé  Fwlher  facts  in  the  history  of  the  early  discovery  of  ' 
Australia,  Dans  un  précédent  travail,  M.  Major  avait  montré  que  les 
Portugais,  longtemps  avant  les  Hollandais,  avaient  eu  connaissance  du 
continent  australien  ;  dans  ce  nouveau  mémoire,  M.  Major  établit,  sur 
des  documents  jusqu'à  présent  ignorés,  notamment  d'après  une  carte 
récemment  acquise  par  le  British  Muséum,  carte  signée  d'Oronce  Fine 
de  Brian çon  et  datée  de  1531,  que  les  premières  notions  connues  de  ce 
qui  fut  nommé  plus  tard  la  Nouvelle-Hollande  se  trouvent  sur  de» 
cartes  françaises  fort  antérieures  aux  découvertes  portugaise^.  Le  mé- 
moire de  M.  Major  n'est  pas  encore  imprimé;  on  en  trouve  une  analysa 
succincte  dans  la  dernière  Âddresa  du  président  de  la  Société  de  Géo- 
graphie de  Londres,  27  mars  m2{Proceedings  de  la  Société,  voLXVIy 
no  4,  p.  852). 

227.  D'  Paul  Topinard.  Étude  sur  les  races  indig^nes  de  PAustralie. 
Paris,  1872 ,  in-Ô%  120  pages.  (Extrait  du  Bulletin  de  la  Soc, 
d'Anthropol,  févr.  1872.)  —  Voir  ci-après. 


y  Google 


a\jstralie.  203 

228.  Nbdmayer.  Ueber  die  intellectuellen  und  moralischen  Eigens- 
chaften  der  Eingeborenen  Australiens.  Zeitschrift  fur  Ethnolo- 
gie, 1871,4*  cah.,  Mémoires,  p.  69-80. 

229.  D'  H.  Beckler.  Die  Ureinwohner  Australiens.  IX  Jahreslericht 
des  Vereins  fur  Erdkunde  %u  Dresden,  Dresd.,  1872,  in-S", 
p.  M8. 

«  Sur  Tethnographie  australienne,  lire  le  résumé  de  M.  Gerland  (ci- 

dessus,  n»  223),  au  t.  VI  de  V Anthropologie  der  NaturvôlJceTf  p.  706- 
810.  • 

230.  Du  même.  Das  Murray-und  Darlin&Gebiet;  eine  geographische 
Skizze.  VII  Jahreshericht  des  Vereins  fur  Erdk,zu  Dresden. 
Dresden,  1870,  p.' 74-94. 

231.  Mrs.  E.  MiLLETT.  An  australian  parsonage;  or,  the  Settler  and 
the  Savage  in  Western  Australia.  Lond.^  1871,  in-8  (Stanford). 

232.  J.  FoRREST,  govemment  surveyor.  Journal  of  an  expédition  to 
explore  the  country  from  West  Australia  to  Port  Eucla,  and 
thenceto  Adelaide,  South  Australia.  Journal  ofthe  Roy,  Geogr, 
Soc,  vol.  XLI,  p.  361-372.    ' 

233.  J.  m!  Gilmore's.  Reisen  in  Central  Australien,  zur  Aufsu- 
chung  von  Spuren  Leichhardfs,  1871.  MiUheilungen  de  Peter- 
mann,  1872,  n«  12,  p.  441-445,  avec  carte. 

234.  D'  G.  Nedmayer.  Hypsometrische  Messungen  in  Verbindung 
mit  den  Arbeiten  des  Magnetical  Survey  of  Victoria.  Mittheilun- 
gen  de  Petermann,  1871,  n«  12,  p.  441-450.  Carte. 

235.  Ch.  H.  Eden.  My  wife  and  I  in  Queensland.  Lond.,  1872,  in-8» 
(Longmans) . 

236.  G.  S.  Baden-Powell.  New  homes  for  the  old  country.  Lond, , 
1872,  in-8«  (Bentley). 

237.  Th.  HaM.  Map  of  Queensland  (au  1  500  000).  Brisbane,  1871, 
4sh. 


238.  D'  J.  D.  Macdonald.  Notes  sur  la  topographie  et  l'histoire  na- 
turelle  de  Tîle  Lord  Howe  (trad.  de  l'angl.  par  le  D'  Rochefort) . 
Archives  de  Médec,  navalej  avr.  1872,  p.  241-250. 

La  belle  île  qui  fait  l'objet  de  ce  rapport  est  située  à  400  milles  envi- 
ron à  TE-  de  la  côte  dii  New  South  Walés,  sous  le  parallèle  de  Port 
Ik^acquarie  (vers  le  32«  degré  de  lat.  S.). 


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204  OCÉANIE.  .  .  (n*>»  226-238.) 


S  1*'.  Stades  sur  la  race  aborigène  de  TAustralie.  Neamayer. 
Beckler.  Topinard. 

Quelque  bas  qu'elle  soit  placée  dans  l'échelle  morale  et 
physique,  la  population  aborigène  de  TÂustralie  n'en  ap-^ 
pelle  pas  moins,  au  même  titre  que  les  autrep  groupes  de  la 
lamille  humaine,  les  études  sérieuses  de  l'anthropologie. 
Déjà  bien  des  rechercUlBS,  bien  des  travaux  partiels  exis- 
tent sur  ce  sujet,  et  aujourd'hui  encore  nous  avons  à  noter 
deux  études  intéressantes  de  M.  Neumayer  et  de  M.  Beckler 
(ci-dessus,  n^  234  et  229);  mais  jusqu'à  présent  le  sujet  n'a 
été  nulle  part,  à  notre  connaissance,  traité  dans  son  ensem- 
ble d'une  manière  aussi  complète  que  dans  le  Rapport  du 
D' Topinard  n*>  227). 

C'est  un  travail  achevé,  aussi  judicieux  que  savant  et  pro- 
fondément étudié.'  Nous  n'en  pouvons  faire  connaître  que  la 
conclusign,  telle  que  l'auteur  la  formule  :  «  En  résumé, 
j'admets  qu'il  existe  en  Australie  deux  éléments  ethniques 
primordiaux,  qui  par  leur  mélange  en  proportions  variables 
forment  une  série  dont  les  deux  extrêmes  correspondent  à 
deux  races  distinctes. 

«  La  première  est  dolichocéphale,  de  haute  taille,  ro- 
buste et  bien  proportionnée  de  corps  ;  elle  a  les  cheveux 
longs,  droits  et  lisses,  les  traits  vigoureusement  dessinés  et 
la  peau  couleur  chocolat  ou  cuivre  foncé.  D'une  intelligence 
pi^oportionnée  à  des  besoins  restreints  et  appropriés  au  mi- 
lieu où  elle  se  meut,  ses  générations  actuelles  se  refusent 
à  accepter  la  vie  sociale  comme  la  comprennent  les  Aryens . 
Donc,  comme  toute  création  jetée  hors  de  son  milieu,  elle 
devra  succomber.  Ses  représentants  sont  encore  nombreux, 
et  constituent  la  masse  de  la  popuUtion  indigène  du  tsonti- 
nent. 

«  La  seconde  est  plus  dolichocéphale  encore,  de  petite 
taille,  mal  faite.de  corps;  elle  a  le  teint  noir  foncé,  les  che- 


yGoOgl 


t 


LETCHHARBT.  205 

veux  frisés  ou  crépus,  le  crâne  petit  et  rond,  les  mâchoires 
très-prognathes,  le  sclérotique  jaunâtre,  les  pieds  plats,  pas 
de  mollet,  etc.  ;  ces  caractères  plus  ou  moins  négroïdes  à 
Torigine  restent  d'ailleurs  à  préciser.  D'une  intelligence 
moindre  que  la  précédente,  elle  semble  presque  incapable 
de  subvenir  à  ses  besoins.  De  notre  civilisation  elle  n'a- . 
dopte  que  les  vices,  et  s'éteint  d'autant  plus  rapidement  que 
les  Européens  sont  entrés  en  contact  avec  elle  les  premiers. 
Depuis  longteipaps  elle  obéissait  à  A  loi* de  concurrence  vi- 
tale vis-à-vis  de  l'autre  race  ;  l'intervention  aryenne  lui  a 
porté  le  dernier  coup.  11  y  a  donc  urgence  d'étudier  les 
ifiisérables  restes,  représentés  çà  et  là,  dans  les  tribus  mix- 
tes, par  les  femmes  surtout  et  par  les  cas  d'atavisme  ^  et 
peut-être  aussi  dans  quelques  rares  tribus  iiiférieures.  »Le 
Rapport  du  D'  Topinard  est  destiné  à  servir  désormais  de 
manuel  ethnologique  aux  explorateurs  sérieux  du  continent 
australien. 

Précisément  on  annonce  (Soc,  de  Géogr.  ae  Londres, 
séance  du  9  décembre  1872)  que  deux  expéditions  simulta- 
nées sont  au  moment  d'entreprendre  l'exploration  intérieure 
de  la  moitié  occidentale  du  continent.  L'une  des  deux  ex- 
péditions a  été  mise  çur  pied  par  le  gouvernement  de  South 
Australia,  et  elle  est  placée  sous  le  commandement  de 
M,  W.  Gosse;  l'autre  est  une  entreprise  privée  équipée 
aux  frais  de  M.  Elder,  et  qui  est  munie  de  chameaux.  L'une 
et  l'autre  partent  des  stations  permanentes  de  la  grande  li- 
gne télégraphique,  presque  au  centre  du  continent,  et  e^les 
doivent  se  porter  à  l'ouest  en  suivant  des  lignes  à  peu  près 
parallèles,  mais  séparées  par  un  intervalle  d'au  moins  100 
milles,  ou  160  kilomètres. 

S  2.  Vestiges  de  rezpédition  de  Leichhardt. 

On  a  si  souvent  annoncé  des  découvertes  qui  semblaient  de 
nature  à  jeter  quelque  jour  sur  la  catastrophe  inconnue 

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SOe  OCÉANIE.  (n^  226-238.) 

dîins  laquelle  ont  dispacru,  il  y  maintenant  vingt-quatre  ans, 
Leiclibardt  et  sa  caravane  (voir  le  t.  V  deY Année  géograph.^ 
p.  206  ;  le  t.  IX,  p.  100,  etc.),  que  Tintérêt  public  s'est  un 
peu  émoussé  à  ce  sujet.  Voici  cepenaant  une  note  répétée 
par  tous  les  journaux  australiens,  qui,  en  la  supposant 
exacte,  comme  elle  en  a  toute  l'apparence,  dirait  le  dernier 
mut  dç  ce  lugubre  mystère.  * 

V Argus  de  Melbourne  raconte  que  des  restes  humains  et 
des  fragments  de  vêtements  européens,  provenant  proba- 
blement de  la  compagnie  d'exploration  de  Leichhardt,  ont 
été  apportés  à  Melbourne  par  Tinspecteur  de  police  Gil- 
more,  qui  a  récemment  terminé  son  second  voyage  de  re- 
cherches dans  l'intérieur  du  pays  (ci-dessus,  n*»-233  de  la 
bibliographie). 

Dans  son  premier  voyage,  M.  Gilmore  avait  pénétré  jus- 
qu'à *Wantat  ta,  localité  située  à  l'ouest  de  Bftroo,près  du  25® 
degré  de  latit.  et  le  140"  degré  de  longit.  (Greenw.).  Là  il 
trouva  prës^l'une  colline  de  sable  des  restes  qui  paraissaient 
être  ceux  de  quatre  Européens,  avec  des  débris  de  vêtements 
également  européens.  Les  naturels  du  pays  lui  dirent  qu'en 
ce  lieu  quatre  blancs,  et  plus  loin  trois  autres,  avaient  été 
înes  il  y  a  longtemps.  M.  Gilmore  ne  pouvant  continuer 
ses  recherches  à  cause  des  inondatiohs,  revint  à  Brisbane 
en  luars  1871  avec  les  objets  qu'il  avait  découverts. 

Il  commença  sa  seconde  recherche  le  13  septembre  de  la 
même  année,  en  partant  de  la  station  de  police  de  fiulloo- 
Barracks,  située  à  environ  800  milles  de  Brisbane.  D  prit 
une  route  différente  de  celle  qu'il  avait  suivie  la  première 
foiy^  et  arriva  à  Wantatta  où  il  trouva  de  nouveaux  frag- 
ments d'ossements  humains,  provenant,  suivant  toute  ap- 
parence, de  crânes  d'hommes  de  race  européenne. 

A  environ  cent  milles  à  l'ouest  de  Wantatta,  il  arriva  à  un 
vaste  campement  d'indigènes*  Il  découvrit  une  quantité  de 
riilir^ues  européennes  qui  consistaient  en  débris  d'habille- 
ments tels  qu'on  en  porte  dans  un  voyage  d'exploration, 

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MÉLANÉSIE.  207 

des  pantalons,  une  moitié  de  bas,  des  morceaux  de  tissus 
imperméables,  des  fragments  d'une  toile  détente  et  de  cou- 
vertures blues,  un  briquet,  du  crin  en  quantité  suffisante 
pour  rembourrer  une  selle.  Deux  chiens  de  berger  existant 
encore  dans  le  pays  prouvaient  le  passage  des  blancs  dans 
ces  parages.  De  nombreux  objets  fabriqués  en  poil  de 
chèvre  démontraient  que  les  naturels  avaient  utilisé  les  trou- 
peaux de  chèvres  que  Leichhardt  avait  emmenés. 


.  in 

MÉLANÉSIE.  , 

MOUVELLE-GUINÉE.   NOUVELLE-CALÉDONIE^   etC. 

NOUVELLE-ZÉLANDE. 

239.  Guido  Coba.  Spedizione  italiana  alla  Nuova  Guinea.  Roma,  1872 
petit  in-8%  39  pages. 

240.  Die  Insel  Tud  in  der  Torres-Strasse,  und  ein  Besuch  an  der 
•       Sûdkùste  von  Neu-Guinea.  Mittheil,  dePetermann,  1872,  n"  7, 

p.  254-256. 

U  semble  que  la  Nouvelle-Guinée,  restée  jusqu^à  présent  une  des 
grandes  lacunes  de  la  catte  du  globe,  soit  sur  le  point  de  s'ouvrir 
devant  les  efforts  simultanés  des  explorateurs.  Un  jeune  et  zélé  natu- 
raliste italien,  M .  Odoardo  Beccari,  dont  M.  Cora  nous  raconte  les 
préparatifs  ;  un  autre  naturaliste,  M.  Meyer,  qui  a  passé  à  Célèhes  une 
partie  de  1871;  une  expédition  préparée  par  le  gouvernement  hollan- 
dais, et  une  pointe  anglaise  dirigée  du  cap  Yorlc  sur  la  côte  opposée 
du  détroit  de  Torrès,  doivent,  selon  toute  apparence,  aboutir  enfin, 
sur  un  point  ou  sur  un  autre,  à  des  résultats  importants.  C'est 
une  «hose  assez  singulière  qu'une  terre  grande  deux  fois  cotime  l'An- 
gleterre et  l'Ecosse,  et  qui  forme,  à  vrai  dire,  le  prolongement  de 
l'Australie,  ait  jusqu'ici  excité  si  peu  d'intérêt  chez  les  investigateurs 
ai^glais,  pour  ne  parler  que  de  ceux  dont  cette  terre  nouvelle  est  en 
quelque  sorte  le  domaine  naturel. 


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208  OCÉANIE.  (n^''  239-243.) 

241.  Notes  d'un  colon  sur  la  Nouvelle-Calédonie.«Jîttîi€^m  de  la  Soc. 
de  Géogr.j  février  1872,  p.  216-236. 

Note  instructive,  faisant  bien  connaître  Tétat  actuel  de  la  Noavelle- 
Calédonie.  (Voir  aussi  notre  précédent  volume,  p.  I0î2).  Voici  ce  que  la 
Note  dit  des  aborigènes  :  <  La  population  indigène  s'élève  actuellement 
à  95  000  habitants,  chiffre  plus  supposé  que  vérifié.  Les  Néo-calédo- 
niens sont  d'une  belle  race,  stature  élancée  et  athlétique,  comme  celle 
^  des  montagnards  en  général  ;  ils  sont  braves  et  belliqueux,  portent  des 

turbans  pittoresques  faits  avec  une  étoffe  fabriquée  dans  le  pays, 
quelques-uns  formant  un  cûne  au-dessus  de  leur  tête  ;  ce  costume  est 
complété  par  un  pagne  autour  des  reins.  Letomahavirk  est  leur  insé- 
parsLble  compagnon;  tout  honmie  qui  n'a  pas  de  flèche  en  porte  un. 
Us  mettent  leur  fronde  dans  le  turban,  ou  roulée  autour  du  cou  et 
pendante  par  derrière.  Ils  portent  les  projectiles  dans  un  filet  autour 
de  la  ceinture;  comme  ces  pierres  sont  effilées  aux  deux  extrémités, 
elles  sont  assez  dangereuses.  La  fronde  est  leur  mode  oe  combat  le 
plus  ordinaire.  L'usage  des  flèches  ^t  commun  à  tous  les  sauvages; 
elles  sont  lancées  au  moyen  d'une  petite  corde,  lâche  à  une  extrémité 
et  nouée  à  l'autre.  A  distance  d'une  portée  de  fusil,  ces  flèches  ont 
^  encore  une  grande  vigueur  et  peuvent  transpercer  un  homme.  > 

242.  Parquet,  ancien  chef  du  service  topographique  à  la  Nouvelle- 
Calédonie.  Topographie  de  la  Nouvelle-Calédonie  septentrio- 
nale. Revue  Maritime  et  Colon,,  août  1872,  p.  291-294. 

L*auteur  de  la  Note  a  exécuté,  à  Téchelle  du  20  ooo*  et  dû  50  000*, 
le  le/é  de  la  partie  nord  de  la  colonie. 


Llle  des  Pins. 

Voici  line  notice  sur  l'île  des  Pins,  où  sont  installés  une 
partie  des  déportés  :  • 

Llle  des  Pins  se  présente,  quan4  on  arrive  du  large,  sous 
Paspect  d'une  terre  peu  élevée,  dominée  vers  son  centre  par 
un  mamelon.  A  mesure  que  Ton  avance,,  et  bien  avant  que  Ton 
puisse  distinguer  les  détails  de  la  côte,  on  voit  surgir  les  cimes» 
des  pins  qui  croissent  en  abondance  sur  les  bords  de  l'Ile  prin- 
cipale, et  couvrent  une  partie  des  lies  basses  qui  forment  les 
divers  jnouillages  de  Kaa,  de  PAlcmène  et  de  Gadji. 

Placée  à  l'extrémité  sud-est  de  la  grande  terre  dont  elle 
semble  n'être  que  le  prolongement.  Pile  des  Pins  ];eçoit,  en  tou- 
tes saisons,  les  vents  frais  de  la  mer,  et  la  température,  qui  dé- 
passe rarement  trente  degrés  centigrades  pendant  le  jour,  est 
toujours  fraîche  pendant  la  nuit  en  été  et  souvent  presque 
froide  en  hiver. 

L'tle  entière  ne  compte  guère  aujourd'hui  que  deux  mille 


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NOUVELLE-CALÉDONIE.  209 

cinq  cents  habitants,  parmi  lesquels  mille  indigènes  dei  Tîle 
Mare,  qui,  forcés  par  suite  de  guerres  de  religion,  d^évacuer 
leurs  villages,  sont  venus,  sous  la  conduite  de  deux  mission- 
naires catholiques,  s'établir  à  Tile  des  Pins.  On  n'observe  dans 
rile  aucune  maladie  épidémique  ou  endémique,  et  des  Euro- 
péens voués  au  travail  ne  pourraient  se  trouver  nulle  part  dans 
des  conditions  hygiéniques  meilleures. 

Quoique  à  première  vue  l'Ile  paraisse  exclusivement  réservée 
à  Texploitation  des  bois  de  sapin,  il  y  reste  assez  de  terrain 
libre  pour  qu'on  puisse  se  livrer  à  l'élève  du  bétail  et  tenter  les 
plus  importantes  entreprises  agricoles.  £lle  est  formée  d'un 
vaste  plateau  large  d'environ  huit  kilomètres  au  nord,  s'amin- 
cissant  en  courant  vers  le  sud,  et  séparé  de  la  mer  par  des 
plaines  assez  basses  auxquelles  il  se  relie  par  des  peates  assez 
raides.  Le  sous-sol  de  ces  plaines  est  madréporique,  poreux  par 
conséquent,  et  permettant,  par  l'Iufiltration,  aux  eaux  qui  pa 
raissent  stagnantes,  de  se  renouveler  en  s'écoulant  vers  la  mer. 
C'est  à  cette  constitution  géologique  qu'est  due  l'immunité  de 
fièvres  paludéennes  qui  existe  dans  ces  îles,  malgré  les  marais 
qui  en  bordent  souvent  les  côtes.  Le  sol  du  plateau  central  est 
impropre  à  la  culture,  n'étant  composé  que  de  scories  ferrugi- 
neuses sur  lesquelles  croissent  quelques  rares  fougères,  mais 
il  n^en  est  pas  de  même  des  plaines  qui  l'entourent  ;  là,  la  terre 
est  fertile,  Teau  abonde,  la  végétation  est  luxuriante.  On  y 
trouve  en  un  mot  tous  les  éléments  indispensables  à  rétablisse- 
ment d'une  colonie  pénitentiaire. 

Le  choix  qui  a  été  fait,  pour  y  fonder  le  premier  centre  agri- 
cole, d'une  des  vallées  de  la  plaine  d'Uro,  présente  les  avan- 
tages suivants  :  proximité  d'un  mouillage  d'accès  relativement 
facile;  communication  avec  la  grande  terre  sans  avoir  à  passer 
par  le  canal  de  la  Havanah  ;  abondance  d'eau  douce,  car,  en 
outre  des  deux  ruisseaux  qui  existent  entre  Tapen  et  Kaa,  les 
premiers  travaux  d'installation  qu'on  a  exécutés  ont  amené  la 
découverte  de  nappes  d'èau  à  très-faibles  profondeurs  ;  £nfîn, 
facilité  d'établir  le  long  des  contre-forts  ufie  route  en  dehors  des 
marais,  de  donner  une  position  dominante  à  la  force  militaire 
chargée  de  la  surveillance  des  déportés  et  du  maintien  du  bon 
ordre. 

Le  gouvernement  local  de  la  colonie  a  déjà  pris  toutes  les 
dispositions  pour  organiser  le  service  de  la  déportation. 

Un  commissaire-adjoint  de  la  marine  a  été  nommé  directeur 
de  la  déportation  à  Nouméa,  et  un  lieutenant  de  vaisseau  com- 

l'année  GÉOGR,  XI,  J4 

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2ia  OCÉANIE.  (n^»  239-243.) 

mandant  à  l'Ile  des  Pins.  Un  marché  a  été  passé  pour  assurer 
la  délivrance  de  là  viande  fraîche  aux  déportés  annoncés  ;  un 
détachement  d'infanterie  de  mariné,  ainsi  qu'un  garde  princi- 
pal du  génie,  ont  été  envoyés  à  Uro  pour,  Tinstallation  préparée, 
recevoir  à  leur  arrivée  ceux  des  déportés  qui  auraient  souf- 
fert de  la  traversée. 

Telles  sont,  en  résumé,  les  bases  sur  lesquelles  le  service  de 
la  déportation  à  Pile  des  Pins  va  reposer  dès  son  début.  Les 
dispositions  prises  font  face  à  tous  les  besoins  d'une  première 
installation.  Elles  pourront  être  améliorées  ou  recevoir  un  plus 
grand  développement  ;  mais  dès  maintenant  elles  ne  laissent  au- 
cune partie  du  service  en  souffrance,  et  suffisent  pour  assurer 
Pexécution  de  la  loi  du  23  mars  1872  dans  les  conditions  qui 
ont  été  votées  par  PAssemblée  nationale. 

Des  dispositions  analogues  ont  été  prises  dans  2a  presqu'île 
Ducos,  qui  est  voisine  de  Nouméa,  et  dans  laquelle  doivent  être 
internés  les  condamnés  à  la  déportation  dans  une  enceinte  for- 
tifiée. 


243.  H.  Greffrath.  Die  politischen  Zustânde  auf  den  Fidschi-Inseln. 
Zeitschr.  der  Gesellsch.  fur  Erdk.  zu  Berlin,  VI,  1871  (n«  3C), 
p.  540-548. 

L'archipel  Fidji  est  en  train  de  se  faire  américain  ;  et  de  même 
qu'aux  lies  Havaï,  on  y  joue  de  la  manière  la  plus  comique  au  parle- 
mentarisme constitutionnel.  «  A  l'exception  de  quelques  emplois  infé- 
rieurs occupés  par  des  indigènes,  presque  tous  les  fonctionnaires  sont 
Américains  ;  on  y  trouve  aussi  quelques  Anglais  remplissant  les  fonc- 
tions de  juges,  de  ministres,  le  métier  de  maitres  de  poste,  etc.  Le 
gouvernement  a  un  organe  officiel,  la  Ficlji  Government  Gazette,  où 
les  décrets  officiels  sont  insérés  en  anglais.  Pâques  est  une  fête 
»  publique,  et  le  gouvernement  a  même  établi,  pour  imiter  les  Améri- 
cains, un  jour  solennel  d'actions  de  grâces,  U9  <  Thankgivings  day  > 
(11  avril),  où  Ton  prie  l'Être  suprême  de  préserver  l'Ile  ou  le  groupe 
d'îles  des  orages  qui  pourraient  le  menacer.  »> 

Il  faut  se  souvenir,  après  tout;  qu'il  y  a  une  vingtaine  d*années,  les 
imsulaires  étaient  encore  anthropophages.  Dans  les  familles  on  étran> 
glait  les  vieillards,  de  peur  qu'ils  ne  devinssent  â  charge  à  la  commu* 
nauté.  A  la  mort  d'un  chef,  ses  femmes  et  ses  esclaves  étaient  offerts 
en  holocauste;  les  parents  avaient  le  droit  de  tuer  leurs  enfants,  les 
maîtres  leurs  esclaves,  les  chefs,  tous  les  gens  du  commun.  Le  meur- 
tre et  la  guerre  étant  un  passe  temps,  il  n'y  avait  pas,  â  cette  époque 
une  moitié  de  la  population  qui  mourût  de  mort  naturelle.  Le  goût  de 
la  chair  humaine  n'est  peut-être  pas  tout  à  fait  passé  chez  les  Fidjiens  ; 
cependant,  en  ces  dernières  années,  il  n*y  a  eu  que  très-peu  de  cas 
d'anthropophagie.  Les  indemnités  que  les  Américains  ont  réclamées 
pour  les  victimes,  ont  suffi  pour  mettre  un  terme  à  cette  abominable 
coutume* 


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NOUVELLE-ZÉLANDE.  211 

Opérations  géodésiques  à  la  Nouvelle-Zélande. 

M.  H.  Jackson,  ingénieur  en  chef  de  Wellington  (Nou- 
velle-Zélande), et  M.  J.  T.  Thompson,  ingénieur  en  chef 
de  la  province  d'Otago,  ont  fait  en  1871  une  série  d'obser- 
vations ayant  pour  objet  de  fixer  rigoureusement  la  longi- 
tude absolue  d'un  point  qui  deviendrait  le  méridien  initial 
dans  toutes  les  opérations  géodésiqfues  de  l'archipel.  Les 
deux  observations  ont  déterminé  en  premier  lieu,  par  la 
méthode  des  cuhninations  lunaires,  la  longitude  absolue  de 
deux  points  extrêmes,  l'observatoire  de  Hutt,  àWellington,  et 
l'observatoire  de  Rgckyside  à  Gaversham,  province  d'Otago; 
puis,  comme  moyen  de  vérification,  on  a  déterminé  l'inter- 
valle en  longitude  des  deux  observatoires  au  moyen  de  l'ap- 
pareil électrique.  L'intervalle  trouvé  par  ce  procédé  s'est 
accordé  d'une  manière  merveilleuse  ^vec  celui  que  les  deux 
observateurs  avaient  déduit  de  leurs  observations  astronomi- 
ques :  la  différence,  réduite  en  mesures  linéaires,  n'était  que 
de  7°*,6.  La  longitude  de  l'observatoire  de  Wellington,  d'a- 
près les  observations  astronomiques  qui  ont  servi  de  base 
k  cette  opération  délicate,  est, de  1 1  h.  39  min.  50  sec.  72 
à  l'E.  du  méridien  de  Greenwich  (the  Australasianj  16 
déc.  1872). 

Réduite  en  arc,  la  longitude  de  l'observatoire  de  Wel- 
lington est  de  174»  57'  40"  E.  Gr.  =  172'»  37'  30"  E.  de 
Paris.  Cette  longitude  n'apporte  pas  de  changement  sensi- 
ble à  la  position  assignée  par  les  cartes  antérieures.  C'est 
une  vérification. 


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212  OCÉANiE.  (n"  244- 


IV 

POLYNËSIR. 

RÉGION  ANTARCTIQUE. 

244.  Rev.  Luther  A.  Gulick,.M.  D.  A  Vocabulary  of  the  Ponape  dia- 
lect,  Ponape-English  and  English-Ponape  ;  with  a  grammatical 
sketch.  Journal  of  the  Amer.  Orient,  Soc,  ?ol.  X,  n»  1,  p.  1- 
109.  New-Ba-o^,  1872,  in-8". 

Lllé  ponapi,  on  Panipèt,  est  une  des  îles  principales  du  groupe 
oriental  des  Carolines. 

245.  Contre-amiral  A.  de  Lapelin.  Llle  de  Pâques  (Rapa-Nuï).  fi^vue 
Marit.  et  Colon.,  nov.  1872,  p.  105-125;  déc.,  p.  526-544. 

246.  Carte  des  archipels  Taïti,  Pomotou,  etc.  Corrigée  en  1872.  Dé- 
pôt de  la  Marine  (n*  985). 

247.  Carte  des" îles  Hawaï;  corrigée  en  1872  (n*  1151). 

248.  Carte  des  lies  Marshall  et  Gilbert;  idem  (n«  1153), 

249.  Carte  des  îles  situées  dans  l'Océan  Pacifique  entre  12*  latit.  N. 

—  6»  latit.  S.,  et  142»  —  172«  longit.  0.;  idem  (n»  1154). 

—  Iles  situées  entre  20»  —  36»  latit.  S.,  et  127«  —  156»  longit. 
0.;  idem  (n«  1158). 


250.  De  Neumayer.  Die  Erforschung  des  Sûd-Polar-Gebietes.  Zeitsehr, 
der  Gesellsehaft  fur  Erdk.  xu  Berlin,  1872  (n»  38),  p.  120-170. 
Carte. 

Les  expéditions  ponr  Tobservation  da  Passage  de  Vénas  dirigent 
déjà  Tattention  vers  la  zone  Antarctique. 


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AMERIQUE  DU  SUD 


I 

p£hou. 


251.  Clem.  R.  Markham.  Reports  on  the  discovery  of  Peru*  Transla- 
ted  and  edited,  with  notes  and  an  Introduction.  Lond,,  1872, 
in-S"  (Publications  of  the  Hakluyt  society). 

Voir  notre  précédent  volume,  p.  160,  n*  314.  —  Ce  nouveau  volume 
de  l'infatigable  secrétaire  de  la  Hakluyt  society  est  une  addition  d*une 
grande  valeur  et  d'un  grand  intérêt  à  la  série  déjà  si  précieuse  des 
publications  faites  par  l'association.  Sur  ce  sujet,  M.  Markham  est  en 
plein  dans  son  domaine.  Au  milieu  des  travaux  géographiques,  aussi 
variés  qu'importants,  entre  lesquels  le  savant  écrivain  a  partagé  sa  vie, 
le  Pérou  tient  une  place  considérable.  Il  a  déjà  traduit  pour  la  société 
Pascual  de  Andagoya,  où  se  trouve  la  plus  ancienne  notice  du  Pérou  ; 
les  voyages  de  Cieza  de  Léon,  1532-1550;  la  vie  de  DOn  Àlonzo  deGuz- 
man,  1518-1543;  une  introduction  à  l'expédition  d'Ursua  et  Aguirre, 
'1560-61  ;  et  enfîn,les  Commentaires  Royaux  des  Yncas,  écrits  par  l'Ynca 
Garciladso  de  la  Vega.  M.  Markliam  a  publié  une  Grammaire  et  un 
Dictionnaire  Quichua.  De  sa  personne  il  a  exploré  le  Pérou  et  les  fo- 
rêts des  Andes  orientales,  de  1852  à  1854,  et  comme  botaniste  il  8*est 
fait  grand  honneur  en  introduisant  la  culture  de  l'arbre  à  quinquina 
de  l'Amérique  du  Sud  dans  Tlnde,  en  1860  et  i861. 

Le  volume  actuel,  qui  est  à  vrai  dire  un  recueil,  renferme  au  total 
un  exposé  sommaire  de  l'épisode  le  plus  émouvant  qui  se  rencontre 
tdails  la  merveilleuse  histoire  des  conquêtes  espagnoles  ;  et  quoique  ra- 
contés avec  moins  de  détails  que  dans  Herrera  et  d'autres  compila- 
teurs, les  faits  y  reçoivent  un  caractère  particulier  de  fraîcheur  et  de 
vie,  de  cette  circonstance  que  les  récits  nous  sont  transmis  par  des  té- 
moins oculaires  et  des  observateurs  intelligents.  Les  documents  com- 
pris dans  le  volume  sont  au  nombre  de  quatre  : 

1.  Relation  de  la  conquête  du  Pérou,  par^Froncisco  de  Xer««,  secré- 
taire de  François  Pizarre; 

2.  Rapport  de  Miguel  de  Àstetey  sur  l'expédition  de  Fernand  Pizarre 
à  Pachacamac  ; 

3.  Lettre  de  Fernand  Pizarre  là  l'Audience  royale  de  Saint-Do- 
mingue ; 


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214  AMÉRIQUE  DU  SUD.  (n*»'  251-254.) 

4.  Rapport  da  notaire  Pedro  Sancho  sur  la  distribution  de  la  rançon 
d'Atahuallpa. 

Ainsi  qu'on  peut  bien  le  supposer,  le  morceau  capital  est  le  récit  de 
Garcia  de  Xeres,  écrit  sur  les  lieux  par  ordre  de  Pizarre. 

Inutile  d'ajouter  que  les  additions  de  l'éditeur  rehaussent  singulière- 
ment rintérét  et  la  valeur  de  cet  ensemble  de  documents. 

ariî.  Du  même  ;  On  the  geographical  positions  of  the  tribes  which 
formed  the  empire  of  the  Yncas;  with  an  appendice  on  the 
name  of  Aymara.  Journal  of  the  Roy.  Geogr.  Soc.j  vol.  XLI, 
p.  281-338;  avec  un  plan  de  la  ville  de  Cuzco. 

—  Un  extrait  de  cet  important  travail  avait  été  déjà  inséré  au 
vol.  XV  des  ProceedingSy  déc.  1871,  p.  367-381,  sous  ce  titre 
d  ifférent  :  on  the  races  of  the  Peruvian  Andes,  and  on  the  com- 
munication between  the  Andes  and  the  Atlantic. 

2ïi^.  1,  H.  Rochelle,  Président  of  the  peruvian  hydrographie  Com- 
mission of  the  Amazon.  Geographical  positions  in  the  valley  of 
the  Amazon.  Proceedings  ofthe  Roy,  Geograph,  Soc,  vol.  XVI, 
n-  3,  juillet  1872,  p.  271-274. 

Les  positions  dont  se  compose  cette  liste  sont  au  nombre  de  57; 
elles  appartiennent  au  cours  de  TUcayati,  du  Huallaga  et  du  haut  Ama- 
zone, et  sont  toutes  comprises  dans  les  limites  du  Pérou.  Tous  les 
points  sont  fixés  en  latitude  et  en  longitude,  avec  addition,  pour  quel- 
ques-uns, de  l'observation  barométrique  d'altitude.  M.  Henry  Rochelle, 
président  de  la  commission  hydrographique  instituée  au  Pérou  pour 
l'exploration  du  bassin  supérieur  de  l'Amazone,  en  communiquant  la 
liste  au  Président  de  la  Société  de  Géographie  de  Londres  (1871),  y 
ajoute  cette  annotation,  que  <  toutes  les  positions  que  la  liste  com- 
prend ont  été  obtenues  par  des  observateurs  soigneux  et  compétents, 
pourvus  de  bons  instruments.  »  C*est  donc  un  document  d'une  valeur 
considérable  pour  la  carte  du  Pérou. 

3S4.  F.  Chardonneau,  capit.  de  frégate.  Instructions  nautiques  sur 
la  côte  du  Pérou,  d'après  Aurelio  Garcia  y  Garcia,  capit.  de  la 
marine  péruvienne;  avec  additions.  Paris,  1872,  in-8*,  vn-211 
pages,  4  fr.  (Public,  du  Dépôt  de  la  Marine). 


Explorations  hydrographiques  dans  le  Pérou. 

Nous  relevons  le  passage  suivant  dans  YAddress  du  Pré- 
sideût  de  la  Société  de  Géographie  de  Londres^  le  22 
mai  1871,  document  qui  n'a  été  publié  qu*au  mois  d'oc- 
Lôhre  suivant,  a  Le  gouvernement  du  Pérou  poursuit  son 
utilô  et  louable  entreprise  de  faire  explorer  les  parties 


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PÉROU.  215 

peu  connues  de  Tintérieur  du  pays  K  La  Société  a  été  te- 
nue au  courant  des  progrès  qui  y  ont  été  faits  jusqu'à 
présent  par  son  correspondant  à  Lima,  Don  Felipe  Paz 
Soldan.  Nous  apprenons,  par  cette  voie,  que  la  reconnais- 
sance et  le  levé  dès  rivières  les  plus  importantes  des  par- 
ties du  Pérou  situées  à  l'est  des  Andes,  ont  été  continués 
sans  interruption. 

Le  gouvernement  du  Pérou  attache  une  grande  impor- 
tance à  cette  œuvre,  qu'il  regarde  comme  indispensable  à 
la  colonisation  de  ces  fertiles  régions,  et  à  l'ouverture  des 
communications  avec  l'Europe  par  TÂmazone  et  l'Atlan- 
tique. Pour  la  réalisation  de  ce  plan,  des  steamers  ont  été 
construits  pour  la  navigation  des  rivières,  et  de  coûteux 
établissements  ont  été  fondés  sous  la  direction  d'ingé- 
nieurs et  de  topographes  européens  ou  nord-américains. 
L'exploration  du  rio  Utcubamba  et  d'autres  rivières  a  été 
confiée  à  M.  Arthur  Wethermann,  qui  en  a  fait  un  relevé 
exact  appuyé  sur  une  série  nombreuse  d'observations 
astronomiques.  Le  rio  Pachitea  a  été  aussi  très-soigneu- 
sement examiné,  et  a  été  trouvé  facilement  navigable:  — 
résultat  d'une  grande  importance,  en  ce  qu'il  confirme  l'es- 
poir du  prochain  établissement  d'une  grande  route  com- 
merciale, conduisant  des  districts  peuplés  du  Pérou  en 
Europe  par  la  voie  de  FAmazone.  Un  peu  plus  au  sud,  on 
a  entrepris  la  reconnaissance  des  grandes  rivières  qui  ont 
leur  origine  au  voisinage  des  mines  d'argent  de  Gerro  de 
Pasco,  et  qui  se  portent  vers  l'Amazone.  Trois  rivières 
considérables,  le  Paucartambo,  l'Occobamba  et  le  Tchan- 
chamayo,  s'unissent  ici  pour  former  le  Perene,  rivière  de 
plus  de  100  mètres  de  large  et  de  5  à  6  mètres  de  profon- 
deur. Un  pt*oblème  intéressant  qui  reste  à  résoudre,  est 
de  savoir  si  le  Perene  est  navigable  jusqu'à  sa  jonction 
•avec  le  Tambo  et  l'Ucayali  :  car  dans  ce  cas  une  naviga- 

1.  Voir  à  ce  sujet  le  t.  VIII  de  VÀnnée  Géographique,  p.  142. 

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216  AMÉRIQUE   DU  SUD.  (n**»  255-261.) 

tîon  à  vapeur  d'une  énorme  étendue  sera  possible,  en  re- 
montant les  rivières  à  partir  de  l'Atlantique^  jusqu'à  une 
assez  courte  distance  de  Lima  francMssable  en  chemin 
de  fer< 


II 


CHILI.  RÉPUBLIQUE  AR6ENTINF. 

PATAGONIE. 
URUGUAY.  PARAGUAY. 

2r>5.  Dirgo  Barros  Arana.  Principales  rasgos  de  la  jeografia  de  Chili 
(Aperçu  substantiel  formant  le  15®  chapitre  des  Elementosdejeo- 
orafia  fisica  de  M.  Arana,  p.  296-330;  Santiago  de  Chili,  1871, 
m-é%  Raymond). 

2.>6,  Fr*  Seybold.  Eine  Reise  in  den  Cordilleren  von  Chile.  Mittheil. 
dtr  Geogr.  Gesellsch.  in  Wien,  1871,  n«  12,  p.  601-603. 

Fourvu  de  deux  baromètres  à  mercure  et  d'un  anéroïde,  M.  Seybold 
a  traversé  deux  fois  (aller  et  retour)  les  Andes  chiliennes  au  mois  de 
février  1871.  Il  a  pris  64  mesures  de  hauteur  dont  il  fera  Tobjet  d'un 
tï-aT  ni  1  ultérieur  ;  voici  quelques-unes  de  ses  cotes,  qu*il  communique 
aaas  sa  lettre  au  prof.  Hochstetter  : 

ï'ortillo  occidental,  ou  de  los  Piuqnenes 4174  mètres. 

Portillo  oriental  (Portillo  proprement  dit) 4568  » 

Vlsta-Flor,  estancia  à  l'entrée  des  plaines 1083  » 

PCLQt  le  plus  élevé  de  la  passe  Diamante. 37S7  -  > 

Laguna  del  Diamante 3330  » 

Point  de  partage  des  eaux  entre  le.  Chili  et  les 

provinces  Argentines,  au  sud  du  volcan  Maïpé.  3413  » 

Tilla  de  San  José. 940  » 

Santiago  de  Chile.. .^ 626  » 


2S7.  Kïch,  C.  Mayne.  Instructions  pour  naviguer  dans  le  détroit  de 
Mat^cllan....  Trad.  de  Tangl.  par  MM.  E.  Talpomba  et  de  La- 
pierre,  Paris^  1872,  in-8%  viii-176,  p. 
Public,  du  Dépôt  de  la  Marine.  Bossange. 

SlàB.  K.  D.  Thomas.  Hanes  Cymry  America....  (Histoire  des  Gallois 
■l'Amérique,  par  le  Rev.  R.  D.  Thomas.  Utica  (État  de  New 
Tûik),  1872,  in-8«,  vM79-17 1-177-8-16  pages  (T.'p^). 

Une  note  du  Journal  des  Savants  (juillet  (1872),  évidemment  sortie 
d^nnfi  plume  particulièrement  compétente,  donne  sur  ce  livre,  destiné 


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RÉPUBLIQUE  ARGENTINE.  217 

à  nne  publication  restreinte,  des  détails  dont  il  nous  paraît  intéressant 
de  reproduire  an  mqins  quelques  parties.  <  Il  n'y  a  pas  en  Europe  de 
population  plus  digne  d'intérêt  et  de  sympathie  que  celle  du  pays  de 
Galles,  que  rattachent  à  la  France  de  si  étroites  affinités  de  race. 
Lorsque,  après  une  lutte  de  deux  siècles,  la  masse  de  la  population 
celtique  de  la  Grande-Bretagne  a  été  définitivement  expulsée,  dé- 
truite ou  asservie  par  les  Anglo-Saxons,  les  Bretons  et  les  Gambriens 
surent,  à  force  d'héroïsme,  garder  leur  indépendance  nationale  et  la 
maintenir  longtemps  encore  après  la  chute  de  la  domination  saxonne. 
Us  ont  su  depuis,  ce  qui  n'est  peut-être  ni  moins  difficile  ni  moins 
I  méritoire,  conserver  leur  langue,  et,  grâce  à  elle,  tous  les  caractères 

I  distinctifs  qui  constituent  une  nationalité  morale.  La  principauté  de 

I  Galles  {Cymru  en  gallois,  Wales  en  anglais),  compte  aujourd'hui  environ 

I  douze  cent  mille  habitants  restés  en  grande  majorité  fidèles  à  la  langue 

de  leurs  ancêtres,  le  cymraeg  (le  c  se  prononce  toujours  fc),  idiome  ap- 
parenté de  très-près  à  notre  breton  armoricain,  et,  de  plus  loin,  au 
gaélique  d'Irlande  et  d'Ecosse.  Chaque  année,  il  se  publie  dans  cette 
langue  une  vingtaine  de  Revues  ou  de  journaux  politiques  et  littéraires, 
ainsi  qu'un  nombre  considérable  d'ouvrages  sur  les  sujets  les  plus  di- 
vers. Mais  la  principauté  est  trop  étroite  et  trop  peu  fertile  pour  suffire 
au  rapide  accroissement  de  sa  féconde  population;  aussi  les  Gallois 
émigrent-ils  chaque  année  par  milliers  dans  les  grandes  villes  de  l'An- 
gleterre, en  Australie,  et  surtout  aux  États-Unis  d'Amérique.  L'un  de 
ceux  qui  ont  pris  ce  dernier  parti,  le  Rév.  R.  D.  Thomas,  plus  connu 
de  ses  compatriotes  sous  le  nom  littéraire  d'Iorthryn  Gwynedd,  s'est 
proposé,  dans  l'ouvrage  actuel  dont  le  premier  volume  vient  de  pai 
raitre,  de  faire  l'histoire  des  divers  établissements  gallois  de  la  grande 
république,  et  de  réunir  tous  les  renseignements  statistiques,  géogra- 
phiques, biographiques,  bibliographiques  et  autres,  qui  se  rapportent 
à  leurs  intérêts  moraux,  nationaux  ou  matériels.  Il  a  entrepris  là  une 
tâche  considérable,  qui  lui  a  déjà  coûté  de  longues  années  de  voyages 
et  de  recherches,  et  dont  il  parait  s'être  acquitté  avec  beaucoup  de 
conscience  et  de  soin.  , 

fl  M.  Thomas  donne  en  terminant  quelques  biographies  de  Gallois 
américains.  Il  évalue  le  nombre  des  Gallois,  ou  descendants  de  Gallois 
des  États-Unis,  à  enviro»  trois  cent  mille.  D'après  des  éléments  d'in- 
formation assez  incomplets,  il  en  compte  cent  quinze  mille  comme  par- 
lant le  gallois;  ce  chiflire  est  très-probablement  inférieur  à  la  vérité.  Le 
nombre  des  publioations  périodiques  en  langue  galloise  y  est  de  huit  : 
deux  journaux  hebdomadaires  et  six  revues  mensuelles.  Malgré  ces 
louables  efibrts,  les  établissements  nouveaux,  noyés  au  milieu  des  flots 
toujours  grossissants  d'une  population  parlant  l'anglais,  ne  pourront 
éviter  le  sort  des  établissements  plus  anciens,  qui  n'ont  plus  aujour- 
d'hui rien  de  gallois. 

<  Ne  pouvant  se  résoudre  à  l'extinction  de  leur  langue  et  de  leur 
nationalité,  malheureusement  probable  dans  un  avenir  plus  ou  moins 
lointain,  un  certain  nombre  de  Gallois  patriotes  résolut,  il  y  a  quelques 
années,  de  fonder,  loin  de  tout  centre  de  population,  une  colonie  pure- 
ment galloise  où  ils  pussent  concevoir  l'espérance  de  se  développer 
librement  et  de  perpétuer  indéfiniment  la  langue  et  le  génie  de  leurs 
aïeux.  Une  association  se  forma  à  cet  efi'et  dans  la  principauté,  sous 
la  présidence  de  M.  Michael  D.  Jones,  directeur  du  collège  indépendant 
de  Bala  (comté  de  Merioneth),  et,  en  1865,  un  premier  groupe  d'émi- 
grants  vint  commencer  en  Patagonie  l'établissement  d'une  colonie  au- 
tonome sous  la  suzeraineté  de  la  Confédération  Argentine.  Cette  co- 


y  Google 


213  AMÉRIQUE   DU  SUD.  (N*»' 262-278.) 

lonie  naissante  est  située  par  43  degrés  de  latitude  S.  environ, 
sur  les  bords  du  Rio  Chupat,  que  les  émigrants  appelèrent  dans  lenr 
langue  le  Camwy  (le  sinueux).  Pendant  les  premières  années,  ils  eu- 
rent beaucoup  à  souffrir  et  à  lutter  contre  bien  des  difficultés.  Us  ont 
aujourd'hui  passé  la  période  la  plus  difficile  ;  ils  voient  peu  à  peu  leur 
nombre  s'augmenter  et  leurs  ressources  s'accroître....  » 


269.  D'  Joâo  Ribeiro  de  Almeida.  Brèves  consideraçôes  âcerca  de 
alguns  documentos  trazidos  do  Paraguay.  Revista  trimensal  do 
instîtuto  do  Brasil,  T.  XXXIII,  1870,  p.  186-206. 

260.  F.  C.  JoDRDAN.  Atlas  historico  da  guerra  do  Paraguay.  Rio  de 
Jan,y  1871,  in-f". 

261.  A.  Brunel.  Biographie  d'Aimé  Bonpland,  compagnon  de  voyage 
et  collaborateur  d*Alex.  de  Humboldt,  Orléans,  1871,  in-S", 
189  p.  et  portrait  {Paris,  Guérin). 


III 

BRÉSIL. 


262.  Em.  Liais.  Cliniat,  géologie,  faune  et  géographie  botanique  du 
Brésil.  Paris,  1872,  in-8».  Carte. 

263.  Ern.  Ferreira  Franca  Filho.  Apontamentos  diplomaticos  sobre 
os  limites  do  Brasil.  Revista  Trimensal  do  inslituto  do  Brasil, 
T.  XXXIII,  1870,  p.  213-236. 

264.  Fr.  Almeida  e  Sa.  Compéndio  da  geographia  da  provincia  de 
Paranâ.  JRio  de  Janeiro,  1871,  in-16,  88  p.  7  fr. 

265.  Joaq.  Ferreira  Moutinho.  Noticia  da  provincia  de  Mato-Grosso, 
sequida  de  un  roteiro  da  viagem  da  sua' capital  é.  de  San  Paulo. 
1871,  in-8». 

266.  Memoria  sobre  o  capitania  do  Cearâ;  copia  d'um  documento 
existente  no  archive  publico.  Revista  Trimensal,  T.  XXXIV, 
1871,  p.  255-286.  •   ^ 

Document  géographique,  historique  et  économique  daté  de  1814. 

267.  D' César  ^ug.  Marques.  Diccionario  historico  e  geographico  da 
provincia  do  Maranhâo.  Maranhao,  1870,  in-folio.  • 

268.  Ant.  Bern.  Pereira  do  Lago.  Itinerario  da  provincia  de  Ma- 
ranhâo, começado  em  Janeiro  de  1820.  Revista  Trimensal, 
T.  XXXV,  2°  trim.  1872,  p.,385-422. 

Manuscrit  tiré  des  archives  du  gouvernement  de  Maranh3o 


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BRÉSIL.  219 

269.  J.  Vito  ViEiRÀ  DE  Càrvai^hû.  Alguns  apontamentos  da  viagem 
feila  por  terra  d'esta  corte  a  cidade  de  Cuyabâ  (1865).  Ibid, 
p.  423-438. 

La  cartographie  peut  profiter,  dans  ce  morceau,  d'un  itinéraire  cir- 
constancié de  Goyaz  à  Cuyabâ.  < 

270.  M.  Tabbé  Durand,  ancien  Missionnaire  au  Brésil.  Considéra- 
tions générales  sur  l'Amazone.  Bulletin  de  la  Soc.  de  Géogr., 
nov.  1871,  p.  312-339. 

M.  l'abbé  Durand,  qui  a  longtemps  figuré  dans  les  rangs  de  nos.  Mis- 
sionnaires parmi  les  plus  dévoués,  les  plus  actifs  et  les  plus  instruits, 
non-seulement  résume  ici  les  notions  contenues  dans  les  meilleurs 
ouyfages  généraux  et  particuliers  sur  le  fleuve  des  Amazones,  mais  il 
parle  aussi  en  homme  qui  a  vu,  et  bien  vu,  les  contrées  intérieures  de 
cet  immense  bassin.         , 

271.  Du  même  :  Le  Rio  Negro  du  Nord  et  son  bassin.  Paris,  18^2, 
in-8»,  38  pages.  (Extrait  du  Bulletin  de  UTSôC.  de  Géogr.,  janv. 
et  févr.). 

272.  Du  môme  :  Coup  d'œil  sur  l'ensemble  des  voies  navigables  de 
l'Amérique  du  Sud,  et  du  bassin  de  TAmazone  en  particulier 
(Morceau  lu  au  mois  d'octobre  1872  à  Bordeaux,  dans  une  des 
séances  du  «  Congrès  de  l'Association  française  pour  l'avance- 
ment des  sciences,  »  et  imprimé  dans  le  Monde,  7  novembre). 

273.  Du  même  :  Les  Indiens  du  Brésil,  et  en  particulier  du  bassin 
de  l'Amazone  (Lu  à  la  même  réunion,  et  imprimé  dans  le  même 
journal,  14  novembre). 

274.  Ch.  Fred.  H  art  t.  On  the  tertiary  basin  of  the  Maranoij.  The 
American  Journal  of  science,  juillet  1872,  p,  53-58. 

Nous  n'avons  inscrit  cette  note,  dont  la  spécialité  géologique  est  en 
dehors  de  notre  cadre,  qu'à  raison  de  quelques  remarques  que  nous  y 
trouw>ns  sur  le  nom  du  grand  fleuve  américain.  «  Ce  nom  est  propre- 
ment Rio  das  AmazonaSy  rivière  des  Â.mazone8  ;  mais  au  Brésil  on  dit 
communément  o  Amazonas^  l'Amazone.  Le  nom  de  Maragnon,  espa- 
gnol Maranon^  sur  lequel  il  ^a  eu  tant  de  discussions,  est  indubita- 
blement le  même  mot  que  le  tupi  Pa/ranâ,  qui  signifie  rivière  ;  la 
'forme  portugaise  de  Maranon  est  Maranhao  (Maranham).  if  et  p  sont 
des  consonnes  permutables,  ainsi  qu'on  le  voit  par  un  grand  nombre 
de  mots  de  la  moderne  lingua  gérai:  morandû  ou  porandû  (question- 
ner), puraçei  ou  mura^ei  (danser),  etc.  La  voyelle  finale  de  paranâ 
est  souvent  plus  on  moins  nasale  ;  de  là  les  noms  géographiques  brési- 
liens Paranan,  Juparanan.  » 

275.  L.  R***  L'abolition  de  Tesclavâge  au  Brésil.  Revue  MarUime  et 
Colon,,  janv.  1872,  p.  148-155. 

Considérations  historiques  et  économiques.  Texte  de  la  loi  du  28 
sept.  1871,  promulguée  par  la  comtesse  d'Eu,  régente  du  Brésil^  pen- 
dant le  voyage  en  Europe  de  son  père  Don  Pedro  II,  pour  régler  l'é- 
mancipation des  esclaves. 


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220  AMÉRIQUE  DU  SUD.  (n°'  262-278.) 

276.  Ch,  Pradez.  Nouvelles  études  sur  le  Brésil.  Paris,  18T2,  in-lî, 
272  pages.  (Thorin). 

277-  Krn.  Mouchez,  capit.  de  vaisseau.  Atlas  naudque  du  Brésil.  Pa- 
ris, 1872.  (Public,  du  Dépôt  de  la  Marine.  —  Voir  ci-après.) 

2TB,  Revista  Trimensal  do  instituto  kistorico,  geograpbico  e  ethnç- 
graphico  do  Brasil.  T.  XXXIV,  1871,  en  4  fascicules  trimestriels, 
455  pages;  t.  XXXV,  1872,  1"  et  2*  trimestres,  440  pages.  Rio 
de  Janeiro, 


S  !•'.  Les  publications  géographiques  sur  le  Brésil.  « 

L'empire  du  Brésil  a  été  l'objet,  depuis  quelques  an- 
nées, de  relations  et  de  publications  descriptives  fort  re- 
marquables :  il  suffit  de  rappeler  les  noms  de  Baril  de 
la  Hare,  Biard,  Agassiz,  Hartt,  Wallace,  Bâtes,  Orton, 
Mouchez,  etc.  Le  nouvel  ouvrage  que  vient  de  nous  don- 
ner  M  Liais  sur  cette  immense  contrée  *,  prendra  rang 
parmi  les  plus  importantes  de  ces  publications  (ci-dessus, 
n-  262). 

On  en  jugera  par  l'appréciation  que  M.  Élie  de  Beau- 
mont  en  a  faite  au  sein  de  T Académie  des  sciences  : 

L^ ouvrage  de  M.  Liais,  publié  par  ordre  du  gouvernement 
impérial  du  Brésil,  est  un  véritable  monument  élevé  par  notre 
co  ni  patriote  aux  sciences  naturelles.  Chargé  d'abord  comme 
ingénieur  de  diverses  explorations  pour  les  travaux  de  l'em- 
pire brésilien  et  pour  l'exploitation  de  mines,  M.  Liais  a  parcouru 
le  pays  pendant  plus  de  treize  ans  et  a  recueilli  un  nombre 
énorme  de  documents.  Il  lui  eût  fallu  pour  tout  dire  un  second 
volume  au  moins  égal  à  celui  qui  vient  d'être  publié,  c  Cette 
ratnarque,  ajoute-t-il,  justifiera  la  forme  exclusivement  scien- 

l .  Oïl  doit  déjà  à  M.  Em.  Liais  (aujourd'hui  directeur  de  TObserva- 
toire  de  Rio  de  Janeiro)  deux  ouvrages  de  premier  ordre  sur  le  Brésil  : 
Hytiiographie  du  haut  San^Francisco,  cartes  et  texte,  grand  in-f*, 
Parii,  1865;  Vespace  céleste  et  la  nature  tropicalSj  Paris,  1865,  gr. 
m-H"",  Bien  qu'ayant  pour  sujet  en  général  la  région  tropicale  du 
T^ûu veau-Monde,  le  second  de  ces  ouvrages  touche  d'une  manière 
plus  «péciale  au  Brésil.  Voir  le  T.  IV  de  V Année  géôgraphiquey 
p.  2im. 


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BRÉSIL.  221 

tifique  à  laquelle  je  me  suis  arrêté,  malgré  tout  le  prix  que 
j'attache  à  la  vulgarîsatîon  de  la  science.  »  Il  a  fallu,  en  effet, 
aller  au  plus  pressé  et  consigner  sans  pdrases  une  multitude  de 
faits  concernant  la  géologie,  la  géographie  botanique  de  Tem- 
pire.  Ce  très-grand  nombre  de  renseignements,  soigneusement 
discutés,  a  nécessité  de  la  part  de  Tauteur  une  science  extrê- 
mement générale  et  néanmoins  très-approfondie.  M.  Liais, 
malgré  ces  travaux  multiples,  n'en  a  pas  moins  continué  avec 
bonheur  ses  études  astronomiques,  et  nous  sommes  heureux  de 
pouvoir  dire  que  la  science  comptera  bientôt  au  Brésil  un  éta- 
blissement modèle  ;  des  instruments  d'observation  sont  en  con- 
struction en  France,  et  Tobservatoire  brésilien  pourra  bientôt 
marcher  de  pair  avec  nos  observatoires  européens. 

L'ouvrage  de  M.  Emmanuel  Liais  est  subdivisé  en  trois  pai^ 
ties  principales,  comme  Tindique^  son  titre,  et  orné  d'une  carte 
générale  du  Brésil.  Toute  la  géologie  de  l'empire  est  mainte- 
nant établie^  sa  faune  aux  temps  récents  et  quaternaires  est 
passée  en  revue  ;  toutes  les  espèces  vivantes  sont  décrites  et 
en  quelque  sorte  prises  sur  nature.  Il  en  est  de  même  pour  la 
flore,  les  climats  et  les  curiosités  naturelles  du  pays.  Les  cha- 
pitres consacrés  aux  mines  présentent  un  vif  intérêt,  et  seront 
lus  avec  d'autant  plus  d'empressement  que  l'auteur  du  livre  a 
contribué  pour  beaucoup  à  la  découverte  de  plus  d'un  gise- 
ment et  réglé  le  meilleur  mode  d'exploitation  à  adopter. 

L'exploitation  des  mines  au  Brésil  est  encore  en  ce  moment 
presque  complètement  limitée  à  Tor,  aux  diamants,  et  à  quel- 
ques pierres  accompagnant  le  diamant,  telles  que  les  topazes 
jaunes,  les  chrysobéryls,  les  béryls  ou  algues  marines,  et  cer- 
taines tourmalines  vertes  appelées  aussi  c  émeraudes  du  Bré- 
sil. 3)  Il  existe  cependant  des  mines  de  fer,  de  plomb,  de  cuivre; 
malheureusement  les  moyens  de  transport  à  bon  marché  font 
encore  défaut.  Dans  l'intérieur,  à  Minas  Geraes,  on  exploite  au 
charbon  de  bois,  et  seulement  pour  la  consommation  locale,  le 
fer  oligiste  dont  la  qualité  et  la  pureté  sont  renommées. 

Les  recherches  de  M .  Plant  ont  fait  connaître  l'existence  au 
sud  de  l'empijre  de  vastes  dépôts  de  houille  de  très-bonne  qua- 
lité, qui  pourront  être  facilement  exploités  quand  un  chemin  de 
fer  projeté  permettra  de  porter  le  combustible  à  la  mer.  A 
côté,  on  rencontre  des  dépôts  de  carbonate  de  fer  et  des  mines  * 
de  cuivre.  Les  filons  plombifères  sont  très-abondants  au  Brésil  ; 
le  minerai  se  compose  de  galène,  et  quelquefois  il  renferme  de 
l'argent.  Il  parait  probable  aussi  qu'on  découvrira^  sans  be^U" 

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222  '       AMÉRIQUE  DU  SUD.  (N**»  262-278.) 

coup  chercher,  du  mercure;  on  a  déjà  trouvé  des  cristaux 
de  cinabre  dans  les  dépôts  quaternaires  diamantifères. 

L'exploitation  des  diamants  se  fait  sur  un  assez  grand  nombre 
de  points  de  l'empire,  notamment  à  Diamantina,  à  Bagagem 
et  dans  les  Ghapadas  diamantinas  de  Tintérieur  de  Bahia  ;  mais 
en  somme,  cette  exploitation  est  très-limitée,  quand  on  la  com- 
pare à  Pétendue  des  dépôts  diamantifères.  Le  mode  d'extraction 
usité  est  à  peu  près  le  seul  possible .  On  amasse  le  casccUho  en 
tas  sur  le  bord  de  Teau  et  on  le  lave  ensuite  dans  des  batias. 
On  en  sépare  à  la  main  les  plus  grosses  pierres,  et  on  étale  le 
résidu  graveleux  dans  la  batia,  après  que  Teau  en  a  enlevé  les 
sables  et  les  argiles  ;  puis  on  tourne  ce  vase  de  façon  à  faire 
tomber  les  rayons  du  soleil  dans  son  intérieur.  Le  diamant  se 
fait  alors  reconnaître  par  son  éclat  particulier,  supérieur  à 
'celui  des  autres  pierres.  Pour  des  yeux  moins  exercés,  une 
couche  d'eau  au-dessus  des  pierres  aide  à  le  reconnaître,  à 
cause  de  son  fort  pouvoir  réfringent  ;  il  apparaît  alors  comme 
une  bulle  lumineuse. 

Beaucoup  de  placers  aurifères  ont  été  exploités  au  Brésil  et 
épuisés  dans  le  siècle  dernier;  il  en  reste  toutefois  encore  à  ex- 
ploiter sur  jane  multitude  dé  points,  surtout  dans  le  bas  du  Val 
du  Rio  das  Velhas. 

M.  Liais  appelle  l'attention  sur  le  nombre  énorme  de  filons 
aurifères  du  Brésil,  qui  pourraient  être  avantageusement  ex- 
,  ploités  ;  la  question  d'exploitation  se  réduit  à  broyer  économi- 
quement une  grande*quantité  de  pierres,  parce  que  si  la  teneur 
par  mètre  cubique  n'est  pas  aussi  grande  que  pour  certains 
âlonsdelaCalifornie  et  de  l'Australie,  le  volume  est  incompara- 
blement plus  considérable.  On  regagne  par  la  quantité  ce  que 
l'on  perd  en  qualité.  Avec  les  machines  hydrauliques,  un  ren- 
dement de  5  grammes  d'or  par  mètre  cube  peut  payer  les  frais 
d'exploitation  pour  un  filon  pyriteux  jusqu'à  des  profondeurs 
moyennes. 

Le  bel  ouvrage  de  M.  Liais  comble  une  lacune  regrettable, 
et  il  faut  féliciter  le  gouvernement  du  Brésil  d'en  avoir  or- 
donné la  publication;  elle  profitera  certainement , aux  progrès 
de  la  science. 

S  3.  La  cartographie  du  Brésil. 

Au  milieu  des  sanglantes  et  stériles  agitations  dans  les- 
quelles se  cousumenty  depuis  un  demi-siècle,  les  anciennes 

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BRÉSIL.  223 

colonies  espagnoles  du  Nouveau-Monde ,  deux  États ,  le 
Brésil  et  le  Chili,  restent  calmes  et  prospères  ;  aussi  est-ce 
là  seulement  que  se  poursuivent,  d  une  manière  fructueuse 
et  continue,  les  paisibles  travaux  de  la  science,  et  en  par- 
ticulier les  études  topogi*aphiques.  Nous  avons  mentionné 
le  levé  géodésique  que  le  gouvernement  chilien  a  fait  exé- 
cuter sur  son  territoire ,  et  la  carte  à  grande  échelle  qui 
est  maintenant  en  cours  d*exécution.  Le  Brésil  est  trop 
vaste  pour  songer,  de  longtemps,  à  une  pareille  œuvre; 
mais,  si  nos  informations  sont  exactes,  le  gouvernement  a 
décidé  que  tout  ce  que  l'on  possède  dans  les  archives  de 
matériaux  partiels,  gravés  ou  manuscrits, — et  il  y  en  a 
d'excellents, — que  toutes  les  reconnaissances,  les  notices, 
les  rapports,  etc.,  seraient  mis  à  contribution  pour  en  con- 
struire, à  une  échelle  convenable,  une  carte  de  l'empire 
qui  serait  jusqu'à  nouvel  ordre  la  carte  officielle.  On  doit 
^tre  maintenant  à  l'œuvre  pour  cette  élaboration,  qui 
répond  à  un  véritable  besoin  scientifique.  L'empereur, 
personnellement,  attache  un  grand  prix  et  porte  un  vif  in- 
térêt aux  travaux  de  cette  nature  ;  on  a  pu  en  juger  pen- 
dant le  voyage  qu'il  a  fait  dernièrement  en  Angleterre  et 
en  France,  voyage  de  savant  et  d'artiste  plutôt  que  de  sou- 
verain. 

Au  point  de  vue  de  l'hydrographie  maritime,  nulle 'con- 
trée n'est  aujourd'hui  mieux  partagée  que  le  Brésil.  Déjà, 
depuis  1818,  la  longue  ligne  de  côtes  de  ce  vaste  pays  avait 
été  relevée  par  d'habiles  marins,  tant  étrangers  que  natio- 
naux. Dans  ces  dernières  années,  un  des  officiers  les  plus 
instruits  de  la  marine  française ,  le  capitaine  Ernest  Mouchez, 
a  repris  et  complété  ce  grand  travail.  £n  présentant  l'Atlas 
nautique  du  capitaine  Mouchez  à  l'Académie  des  Sciences 
(10  juin),  l'amiral  Jurien  de  la  Gravière  a  fait  ressortir, 
en  quelques  mots,  le  caractère  et  la  valeur  de  l'œuvre.  L'ap- 
préciation d'un  pareil  juge  est  précieuse  à  recueillir. 

«J'ai  l'honneur  d'appeler  l'attention  de  l'Académie,  a  dit 

uiyiiizeu  uy  >.^«  v^  v^' pc  i n^ 


224  AMÉRIQUE  DU  SUD.  (n***  262-278.) 

l'amiral,  sur  un  atlas  comprenant  51  cartes,  que  M.  le 
capitaine  de  vaisseau  Mouchez  a  levées  sur  les  côtes  du 
Brésil  depuis  1864.  Ce  levé  des  côtes  orientales  de  TAmé- 
rique  du  Sud  a  été  exécuté  pendant  trois  campagnes  suc- 
cessives, sur  des  navires  attachés  au  service  de  la  station 
navale,  navires  qui  ne  pouvaient  être  que  momentanément 
distraits  de  leur  mission  militaire.  Il  a  donc  fallu  recourir 
à  des  méthodes  rapides,  à  des  procédés  ingénieux,  pour 
terminer  en  aussi  peu  de  temps  et  dans  de  semblables  con- 
ditions un  travail  qui  comprend  plus  de  mille  lieues  de 
côtes  entre  TÂmazone  et  la  Plata.  On  connaissait  déjà  le 
levé  sous  voiles.  M.  Mouchez,  en  mettant  à  profit  l'instru- 
ment plus  docile  dont  il  disposait,  nous  a  montré  ce  qu'on 
pouvait  attendre  du  levé  sous  vapeur;  il  a  su  combiner 
très-heureusement  les  routes  du  navire  et  les  détermina- 
tions astronomiques,  les  stations  faites  à  terre  et  les  relève- 
ments pris  de  la  mer.  Les  détails  de  la  côte,  les  sondages,, 
ont  pu  être  ainsi  rattachés  à  un  certain  nombre  de  points 
culminants  dont  la  position  avait  été  fixée  avec  toute  la  pré- 
cision désirable. 

c  Quant  aux  ports,  aux  divers  mouillages  accessibles 
aux  navires  européens,  ils  ont  été  levés  avec  assez  de  soin 
et  construits  à  assez  grande  échelle  pour  qu'on  puisse  les 
fréquenter  aujourd'hui  avec  une  sécurité  complète.  Les 
positions  géographiques  sur  lesquelles  s'appuie  l'ensemble 
de  cette  exploration  ont  été,  de  la  part  de  M.  Mouchez, 
l'objet  de  nombreuses  observations ,  exposées  dans  un  mé- 
moire particulier  ^  » 

1.  Nous  avons  donné  le  titre  de  ce  mémoire  au  t.  VIII  de  V Année 
Géographique  y  p.  90,  n*  108.  Voir  aussi  p.  117  du  m6me  volume. 


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GUYANE.  S2& 

IV 

VANÏSCÉUl  et  COLOMBIE. 

GDTANES. 


379.  H.  Bf.  and  P.  V.  N.  Mtbbs.  Life  and  nature  under  the  tropics^ 
or  sketches  and  travels  among  the  Andes  and  on  the  Orinoco, 
Rio  Negro  and  Amazon».  New  York,  1871,  in-8%  10  sh.  (Ap- 
pleton). 

Section  de  Texpédition  américaine  de  1867,  dont  nne  autre  teetion, 
celle  deQaito  i  rAtlantiqne  par  i*Amazone,  a  en  pour  historien  M.  Or- 
ton.  (Voir  le  t  IX  de  VAnnée  Géogt,,  p.  177). 

280.  H.  A.  WiCKHAH.  Rough  notes  of  a  joumey  through  the  wilder- 
ness,  from  Trinidad  to  Para,  Brazil,  by  way  of  the  great  cata- 
racts  of  the  Orinoco,  Atabapo,  and  Rio  Negro.  Also  a  previous 
joumey  among  the  Soumoo  or  Woolwa,  and  Moskito  indians. 
Central  Aoierica.  Lond,,  1872,  in-8*,  illustr.,  1&  sh.  (Carter). 

281.  Fr.  Engel.  National  und  Racen-Typen  des  Tropischen  Amerika. 
ZciUchr.  fàrEthnolj  1871,  p.  18-51. 

282.  A.  Ernst.  Die  Goajiro  Indianer.  Eine  ethnogr.  Skizze.  Ibid., 
1870,  p.  328-336,  394-403.  Avec  Une  carte  et  une  pi. 

283.  Du  même  :  Anthropological  remarks  on  the  Population  of  Ve- 
nezuela. Memoirs  read  hefore  Ihe  AfUhropolog,  sœ.  of  london, 
1867-69  (vol.  III).  Lond,,  1870,  in-8»,  p.  274-287. 

L*autear  rappelle  d'abord  les  chiffres  différents  qai  ont  été  donnés 
de  la  population  de  la  république.  Hnmboldt  Tévalnait,  au  commen- 
cement du  siècle,  à  soo  ooo  &mes  ;  Codaszi,  en  1841,  après  nne  longue 
période  de  guerres,  donnait  le  chifik'e  de  701 633.  Le  recensement  de 
1344  fournit  les  données  suivantes  : 

HabitenU  libres i  173574 

Itonomisos  (demi-aflhmehis) 93  314 

Esclaves 21  628 

1213  716  habitants. 

«  Ce  recensement,  dit  Tanteur,  est  le  plus  digne  de  confiance  de  tous 
ceux  qui  ont  été  faits  dans  le  Venezuela.  »  M.  Emst  ne  pense  pas,  eu 
égard  aux  conditions  de  diverse  nature  dans  lesquelles  le  pays  est 
placé,  que  Ton  puisse  y  évaluer  à  plus  d'un  pour  loo  l'aecroissement 
normal  actuel  de  la  population.  Partant  de  cette  base,  et  s'appuyant 
sur  le  recensement  de  13U,  on  ne  pourrait  guère  porter  la  population 
de  1373  qu'à  1  S60  000  âmes. 

Les  éléments  constitutifs  de  cette  population  sont  les  créoles  blancs» 
les  faces  métis  à  divers  degrés»  les  étrangers»  les  iribus  aborigènesi  L^à 


2ât|  AMÉRIQUK  DU  SUD.  (n*'  279-287.) 

nègres  liront  jamais  été  nombreux  A  Vénézaela,  maintenant  moins 
que  jamais.  Parmi  les  étrangers,  les  pins  nombreux  sont  les  ti{«Aai, 
venus  des  lies  Canaries.  M.  Ernst  pense  que  leur  nombre  doit  être  ac- 
tuellement de  35  à  36  000.  G*ést  une  classe  industrieuse  et  actïTe. 
Après  les  Islenos  Tiennent,  pour  le  nombre,  les  Allemands,  puis  les 
Mord-Américains,  Il  n\  a  pas  dans  le  pays  .looo  familles  de  purs  créoles 
blancs.  Tous  les  eib^^i^'  sèift  éi»mm^^s;%'eAt  le  fond  dominant 
de  la  population.  Au  point  de  vue  moral,  Tauteur  en  fait  un  triste 
portrait. 


suiviç  d'un  recueil  jj^  contes,  îablês  pt  chansoçs  en  créofe,  avec 
iraductipn  en  regarct,  notes  et  coœimentairès.lÊtuàé  §urï»gram- 
inaîré  créole.  AntibèSf  1872,  in-â2,  vi-îlô  p. 

??&•  JDr  j),  G,  3RÎNTPW.  T^e  imw^î^  i*ug«?«ç  ^  Qmm^  m  its  1'»- 

guUtic  aod  etbnologifal  r^atipos.  EUiadilphi^,  1871,  in-4*, 
^      18  pages.  5  sh.  (^filtrait  d^  TrimMoctiom  jofthe  JtfiTeaMm  Fhi- 
io§(^h,  m.  y  yol.  py,  Part  3j.  —  Voir  .ci-^r^?,  1 2. 

J»ojiç  .4*a5tre9  trvrpni  d»  mèça^  Mogul^  spjr  Iç»  i^ipm^  améri- 
<»ins,  voir  le  précédent  vof .  deVAflnie^  p,  IM.  n»*  206  ejt  ^67.  M.  Brin- 
Un  A  aussi  publié  un  puidè  deiicnptif  en  Floride,  't>U,  p.  120, 

286.  D^  A.  P.  ÂRA^GO.  Snsa^  etnô|grafic(^  isobi:e  Ips  Iclïorigeiies  dêi 
Estado  de  Antioquia  en  ColcÀnMa.  i*ari^,.  1871,  în^,  82>. 

ièi.  PbÎTCE  DE  Léon  y  âtaria  Paz.  6a{i;à  ^eograèpa  dé  Ip$  ISsààx» 
Unidos  dé  CoiuiïilÂa,  antijgûa  VÏvl€^  Grana&.  Pkr%  1872, 4 


$  V*  V^^  èxploraJBon  4anii  làà^yaii^  àujglàisê. 

Noua  appfènoûs  paùr  la  ^erpi^TÇ  A4^W  %  présideBt 
de  la  Soci^t^  de  Londres  (mai  isfi)  su§  403  Reconnais- 
sanoes  imporiantes  ont  en  Iteti  éft&ft  h  {Arliefl  smpérieiires 
de  la  (juyi»e  anelaisè.  M.  G.  B.  Brown,  âe  la  Commis- 
sion géologique  oe  |a  Guyane,  déjà  poui}n  par  la  découverle 
de  la  magnifique  cascade  de  Kaïeieur  dans  Tintérieur  de 
la  colonie,  a  continué  è^$  exploirati<!fi^|  sur  un  terrain  fé- 
cond en  décourertes,  même  après  o^Ues  de  Rob*  Sièhom- 
butyk.  M.  Btot^  à  fiit  un  èlatpeîi  jîip^qnô|anëé  de  la  ré- 
gion  des  sources  dé  l'iSsStBquibo  et  du  Gorentyti  :  on 


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QUYAÎ^K»  $87 

sait  que  la  preimèr^  de  ees  deux  rivières  travwae  du  eud 
an  nord  toujte  la  loQgneurde  la  Guyane  anglaise,  el  que  la 
second^  sépare  la  colonie  britannique  de  la  Guyane  bol- 
landaise.  M.  Brown  a  reconnu  également  l'espace  .9<mprie 
entre  1^  tête  des  defuc  fleuves^  et  il  a  constaté  que  la  ligne 
de  faîte  comprise  dans  cet  intervalle  est  très-diffënente  de 
ridée  qu'on  e'en  forme  d'après  Torograpbie  un  peu  fantai- 
siste de  pos  cartes.  «  Là  où  elles  dessinent  une  chaîne  de 
monti^nes  d'un  aspect  formidable  sous  les  noms  de  Sierra^ 
Aca/rai  et  de  S.  Tumuraqmj  M.  Brown  a  parcouru  un  pays 
ondulé,  élevé  seulement  de  200  mètres  en  moyenne  au- 
dessus  de  la  mer,  sans  y  rencontrer  d'autre  obstacle  qu'une 
épaisse  forêt  et  des  terrains  marécageux.  La  montagne  la 
plus  baute  qui  ait  été  observée  n'avait  qu'une  altitude  de 
378  mètres  :  du  baut  de  cette  montagne,  l'explorateur  em- 
brassa une  vaste  perspective  sur  le  pays  montueux  qui 
s'étend  au  sud,  dans  les  provinces  brésiliennes  de  Grâo- 
Para  et  d'Amazonas.  M.  Brown  put  ae  convaincre  toi  qu'il 
n'y  a  pas  de  chaîne  proprement  dit^  dans  cette  partie  de 
la  ligne  du  partage  des  eaui:.  » 

$  3.  Les  Aravaks. 

Le  mémoire  de  M.  Brinton  sur  les  AYavaks  (n**  485),  tou- 
che aux  origines  mêmes  et  aux  migrations  anôiennes  d'une 
fraction  considérable  de  la  race  américaine  du  Sud  ;  ce 
travail  prend  par  là  une  importance  qui  nous  oblige  d'en 
donner  une  analyse  succincte. 

Les  Aravaks  sont  une  tribu  d'Indiens  qui  aujourd'hui 
demeure  dans  la  Guyane  anglaise  et  dans  la  Guyane  ho)"^ 
landaise,  entre  les  rivières  Corentyn  et  Pomeroun.  Ils  &o 
nomment  eux-mêmes  Loukkounou;  ce  sont  leurs  voisins 
qui  leur  appliquent  la  dénomination  méprisante  d^Arouaks 
(dont  les  Européens  ont  fait  Aroaquis,  Aroacos,  Aravaks, 
etc.),  c'cst-k-dîre  dô  «  Mangeurs  de  farine  »,  d'après  leur 

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228  A»IÉRIQUE  DU  SUD.  (n'*  279-287.) 

habitude  paisible  d'extraire  un  article  important  de  nour- 
riture de  la  moelle  amylacée  du  Mauritia  flexuosa,  et  de 
la  racine  comestible  du  manioc  (le  cassave,  sagou  ou 
tapioca), 

La  tribu  ne  compte  guère  que  2000  âmes;  et  eu  égard  à 
ce  peu  d'importance  numérique,  il  semble  que  les  Aravaks 
ne  méritent  pas  plus  qu'aucune  des  obscures  tribus  indien- 
nes d'arrêter  l'attention  des  ethnologues.  Mais  si  Ton  peut 
montrer  que  dans  les  siècles  passés  les  Âravaks  ont  occupé 
toute  la  chaîne  des  Antilles  jusqu'à  proximité  des  côtes  du 
continent  septentrional  de  TAmérique,  ils  prennent  dès 
lors  une  tout  autre  importance;  et  selon  qu'il  sera  établi 
que  leurs  rapports  de  parenté  les  rattachent  aux  populations 
du  continent  du  Nord  ou  de  celui  du  Sud,  nous  serons 
conduira  à  une  vue  différente  de  la  marche  des  anciennes 
migt  ations  chez  les  aborigènes  du  Nouveau-Monde.  S'il  se 
trouve  en  outre  que  cette  tribu  des  Aravaks  est  précisément 
celle  dont  Christophe  Colomb  et  Pierre  Martyr  ont  dépeint 
la  simplicité  touchante  en  une  langue  si  poétique,  Thistorien 
éprouvera  le  désir  de  connaître  plus  intimement  Tétat 
passé  et  présent  de  ce  petit  peuple.  Or,  je  crois  pouvoir 
montrer  que  telle  a  été  autrefois  l'habitation  géographique 
des  Âravaks. 

Bien  que  dans  leur  configuration  générale  il  n'y  ait  rien 
qui  le»  distingue  des  autres  rameaux  de  la  race  Rouge,  ils 
n'en  oui  pas  moins  des  traits  nationaux  fortement  marqués. 
Leur  stature  est  plus  petite  que  grande^  car  elle  atteint  à 
peine  1  mètre  6  cent,  (moins  de  5  pieds,  ancienne  mesure 
française)  ;  mais  ils  sont  fortement  membres,  agiles  et  bien 
faits.  Le  front  est  bas,  le  nez  plus  caucasique  qu'il  n'est 
habituel  dans  leur  race,  et  le  crâne  a  la  forme  que  les  crâ- 
niûlogistes  ont  qualifiée  d'orthognatho-brachycéphalique. 
Aussi  loin  que  portent  nos  témoignages,  on  reconnaît  à 
ce  peuple  un  excellent  caractère.  Hospitaliers,  d'humeur 
pacifique,  prompts  à  accepter  les  arts  les  plus  humbles  di 

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GUYANE.  S29 

la  civilisation  et  les  préceptes  les  plus  simples  du  christia- 
Disme,  ils  ont  toujours  présenté  un  contraste  frappant  avec 
leurs  voisins,  les  cruels  et  belliqueux  Garibes. 

Les  Âravaks  sont  divisés  en  une  cinquantaine  de  familles, 
dont  la  généalogie  se  conserve  soigneusement  dans  la  ligne 
féminine;  les  mariages  sont  interdits  entre  les  membres 
de  la  même  famille. 

Après  cette  vue  générale,  M.  firinton  donne  une  esquisse 
grammaticale  de  l'idiome  aravak;  puis  il  reprend  :  «  Les 
Âravaks  sont  essentiellement  d'origine  et  d'affiliations  sud- 
américaines.  Les  plus  anciens  explorateurs  du  continent  en 
parlent  comme  d'un  peuple  qui  demeurait  sur  les  rivières 
de  la  Guyane,  et  qui  avait  des  établissetments  jusqu'au  sud 
de  l'équateur  (de  Laet,  Novus  Orbis,  lib.  xvii,  c.  6).  De 
Laet,  dans  sa  carte  de  la  Guyane,  place  une  grande  tribu 
d'Arowaccas  à  trois  degrés  au  sud  de  la  ligne,  sur  la  rive 
droite  de  TAmazone.  Le  docteur  Spix,  durant  ses  voyages 
dans  le  Brésil,  rencontra  de  leurs  villages  fixes  près  de 
Fonteboa  sur  la  rivière  Solimoes,  et  près  de  Tabatînga  et 
de  Castro  d'Avelaes  (Martius,  Ethnographie  und  Sprachen- 
kwnde  Âmerika'Sy  t.  I,  p.  687).  Ils  s'étendaient  à  l'ouest 
au-delà  des  bouches  de  l'Orénoque,  et  il  est  même  question 
jusque  dans  la  province  de  Santa-Marta,  dans  les  monta- 
gnes qui  s'étendent  au  sud  du  lac  Maracaybo  »  (Ant.  Ju- 
lian,  la  Perla  de  la  Americay  la  provincia  de  Santa  Marta, 
p,  149.) 

Vis-à-vis  de  ces  affinités  sud-américaines  qui  sont  évi- 
dentes, il  faut  remarquer  qu'aucune  affinité,'  soit  verbale, 
soit  grammaticale,  n'existe  entre  l'aravak  et  le  maya  du 
Tucatan,  non  plus  qu'avec  le  chahta-muskoki  de  la  Flo- 
ride et  de  la  côte  nord  du  golfe  du  Mexique. 

La  chaîne  d'îles  qui  s'étend  de  Trinidad  à  Porto-Rico  a 
été  appelée  îles  Caribes  ou  «  des  Caraïbes.  »  Il  faut  pourtant 
remarquer  que  les  Caraïbes  eux-mêmes  ne  se  donnent  nul- 
lement comme  ayant  occupé  ces  îles  durant  un  long  espace 

uigmzeu  uy  -vj  v^  v^ -c  i >^ 


â30  AMÉRÏOÙE  DU  SUD.  (l^*  288-292.) 

de  tempi^.  Ils  sèf  soutiennent  fort  bien  que  dil  continent  ils 
passèrent  dans  tiës  îles  il  y  li  tiné  géûétation  on  deux,  et 
qu'ils  les  trouvèrent  occupées  par  utié  race  paisible  qu'ils 
nomftient  Inéri  ou  Ignéri.  Ils  exterminèrent  les  mâles  de 
cette  race  ou  les  refoulèrent  dans  l'intérieur,  mais  ils  gar- 
dèrent les  femmes  pour  leur  propre  usage.  De  là  est 
venue  une  différence  marquée,  dans  les  lies  Garibes,  entre 
ridiome  àêB  hommes  et  eeM  des  femmes,  de  que  l'on 
eoimatt  de  1&  langue  de  ces  dernières  montre  clairement 
qu'elles  appartenaient  k  la  race  aravaque,  et  qtie  les  Ignéri 
appartenaient  ainsi  à  cette  race. 

Après  avoir  établi  que  les  Aravaks  oat  occupé  la  chaîne 
des  Petites  Antilles,^  M.  Brinton  se  demaude  si  ce  peuple 
s'était  également  répandu  dans  les  QrandeS  Antilles  ;  et 
l'examen  de  ce  que  l'on  sait  des  anciens  idiomes  d'Haïti, 
de  Cuba,  des  îles  Bahama,  etc.,  le  conduit  à  l'affirmative. 

«  Cette  investigation,  dit  Fauteur  en  terminant,  montre 
qu'ici  comme  ailleurs,  l'homme,  dans  ses  migrations,  suivit 
le  fil  conducteur  de  la  nature  organique.  Il  est  bien  eotinu, 
en  effet,  que  la  flore  et  la  faune  des  Antilles  appartiennent 
à  l'Amérique  du  Sud,  de  même  que  l'archipel  s'y  rattache 
également  par  sa  constitution  géologique.  Ainsi  donc,  les 
ancêtres  des  plus  anciens  habitants  connus  de  la  longue 
chaîne  des  Antilles  eurent  leur  point  de  départ  au  loin  dans 
le  Sud;  et  lentement,  de  rivière  en  rivière,  d'île  en  lie,  ils 
s'avancèrent  jusqu'à  une  très-faible  distance  du  continent^ 
du  Nord.  » 

ANTILLES. 


288.  Tb.  B^ANQ.  On  t1}e  physical  geography  and  ^peology  çf  tbe  Yf^^t 
India  islands.  Proceedings  of  the  Philosoph.  soc,  Philddelpkià, 
XII,n»86,jân.-jùlil871. 


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ANTILLES.  231 

289.  C.  E.  Caspari,  ing'  hydrographe.  Une  mission  à  la  Guadeloupe. 
Notes  de  géographie.  Bfivue  Marit.  et  CoUmiàle,  cet.  1871, 
p.  377-416. 
Géologie.  Côtes.  Météorologie. 

290.. £.  PiCHÀRDo.  Nueva  Garta  geotopographica  de  la  isla  de  Cuba. 
Éaiana,  iStO,  in-4*. 

291.  Bagot.  The  Bahamas;  a  Sketch.  lond.,  1871,  pet  in-8%  1  ah.;. 
Map. 

Tableau  physique,  économique,  géographique  et  statistique. 

292.  Proceedings  of  the  Scientific  Association  of  Trinidad.  Part  8, 
1869.  Port  ofSpain  (Trinidad),  1871  (Lond,,  Trùbner),  5  sh. 

Koua  remarqaons  dans  ce  cahier  :  Notes  of  a  yisit  to  Dominica,  hy 
J.  L.  Ooppy,  —  ](ïotes  of  a  voyage  round  the  island  of  Trinidad,  by 
W.  Carr,  i»art.  2  ;  —  etc. 


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AMÉRIQUE  DU  NORD 


En  franchissant  la  zone  étroite  qui  sépare  l'Amérique  du 
Sud  de  l'Amérique  du  Nord,  nous  entrons  dans  un  do- 
maine tout  nouveau  d'activité  scientifique.  C'est  ce  que 
vont  £aire  ressortir  tout  à  l'heure,  dans  la  section  consa- 
crée k  la  grande  République  américaiiie,  le  nombre  des 
publications,  la  multiplicité  des  entreprises  et  l'impor- 
tance des  résultats. 


AMÉRIQUE   CENTRALE. 


393.  H.  Gaumier.  L'Amérique  Centrale,  son  présent,  son  avenir;  ou 
Considérations  générales  sur  cette  importante  et  fertile  région, 
au  point  de  vue  du  développement  du  commerce  et  de  Tindus- 
trie  française.  Carcassonne,  1872,  in-4%  108  p. 

294.' De  Bizemont,  lieut.  de  vaissean.  Le  percement  de  l'isthme  de 
Panama.  Kev.MariU  et  Colon.  ^  nov.  1872,  p.  172-190. 
Notes  analytiques  extraites  de  la  publication  soivante  : 

295.  S.  T.  Albert.  Is  a  canal  practicable?  Notes  historical  and  sta- 
tistical  upon  the  projected  routes  for  an  interoceanic  ship  canal 
between  the  Atlantic  and  Pacific  Océans.  Cincinnati  ^  1871, 
in-8*,  87  pages,  Map. 

296.  Alfr.  Netmark.  Le  Honduras,  son  chemin  de  fer,  son  avenir 
industriel  et  commercial.  Pom,  1872,  in-8»,  76  p.  2  fr.  50. 
(Dentu). 

297.  D.  Crescendo  Cabbillo,  Presbitero.  Bisertacion  sobre  la  histo- 
ria  de  la  lengua  Maya  o  Yucateca.  BoUtin  de  la  Sociedad  de 


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â34  AMÉRIQUE  DU  NORD.  (n°*  293-317.) 

Geografia  y  Estadistica  de  la  republ.  Mexicana,  T.  IV^  Mexico, 
1872,  p.  134-195. 

tî9B,  Bu  même  :  Disertacion  sobre  la  literatura  antigua  de  Yucatan. 
Ibid.y  1871,  p.  257-271. 


II 

MEXIQUE. 

29d.  E.  Mendoza.  Ànahuac.  Mexico.  Tçnochtitlan.  Éàlei^tik  de  la  5q- 
deâaâ  de  ÏSéogrâphià  ^  EsiddÛHcd  ifèineàfiii,  à*  âér.,  t.  ÎV, 
1872,  p..  26«r273. 
Hfiokerçhet  étyioologiqms. 

300.  Fr.  PixENTBi».  efaserTàotopet  a  là  âlsfft^cioj»  «Q^e  èl  idtmxMi 
Otomi,  leida  ^  la  §ocie<iad  Meipcana  por  e.l.  S*"  p.  Crum^esiado 
Hendoza'.  /bid.,  p.  224-236. 

iJDl.  G.  Hat.  Apuntes  geographicos,  estadi'sticôs  y  hbtéricos  deîdis- 
trito  de  Texcoco.  Ihid,,  p.  236-250. 

302.  J*  Pdtts.  Chihuahua;  apuntes  descriptives  de  ese  estado.  Ibid^, 
p.  279-283- 

303.  B.  Ballbsteros.  Ruinas  de  Chicomostoc,  Zacatecas.  Ibid,^ 
p.  250-256. 

304.  Man.  Gdtibrrez.  Ligerisimas  Notioias  sobre  antiguedades  de 
Indios  en  la  prbvineia  de  Nueta-Galicia.  IhUL,  1S71,  f,  f77-M). 

aû5.  BuscHMiWîN.  Der  ^pDorischen  Çràihmatiltî"  iitthèiî..  ip/wiiM^ 
hiïigen  aer  kœn.  Akadeiniè  »u  Éerlih^  1$|9, 1,  p.  ë7-2o§. 
y.  le  t.  VU  de  VAnnée,  p.  323,  n»  385. 


m   . 

ÉXAX«*UlnEt. 

3iOa.  J.  D.  9*  Ckh±  the  Oréàt  tlépubHc.  k  descriptive,  âUiistfdU 
and  liisioricài  tieW  of  thé  Sîtâte  ànd  Tèrritdriës  of  ifië  îiiiericaii 
Union.  PhUadelphia,  1872,  in-8»,  1118  pages.  45  it: 

307.  AgHfiR  and  ^.bAMS.  New  ê6mtiiërciàl,top6ghlt)'fiiéât  ând  UtéM- 
c&l  Àtla^  and  âazëttèer  of  tbe  United  ÈUx^,  WHh  lÉatià  lifiowing 


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ÉTATS-UNIS.  235 

ttie  DominioB  of  Canada^  Ëuropa,  and  a^und  the  world.  New 
Torhj  18T3,  gr.  in-f%  lit)  Maps,  252  pages.  260  fr. 

308.  G.  W.  Dean.  Longitude  -  détermination  across  the  continent. 
The  ArMricàn  Journal  of  science,  déc.  1871,  p.  441-448. 

Compte  rendu  4'nne  opératipn  par  le  télégraphe  électrique,  pour  dé- 
terminer la  longitude  de  San  Francisco  par  rapport  à  robseryatoire  de 
Cambridge^  Mass^^ïhusçtts.  La  moyenne  des  résultats  4e  Topération  a 
donné  pour  la  longitude  de  San  Èrancisco  3  h.  25  m.  7  s.  260  0.  de 
Cambridge.  Voici  quelques  positions  Intermédiaires  : 

Cambridge  to  Omaha ji>  89"^  i$<  159 

—        toSaltLake 2    43     4  257 

Omaha  to  Sait  Lake l     3    49  081 

Omaha  to  San  Francisco 1    45    52  094 

Sait  Lake  io  San  Francisco o    42     3  024 


309.  List  of  élévations  ând  distances  in  thàt  pôftîOft  of  the  U.  S.  west 
of  the  Mississipi  river  ;  coUated  ànd  arranged  by  Prof.  G.  Tho- 
mas, assistant  U.  S.  Geological  Survey  Under  D'  F.  V.  Hayden. 
Washington,  1872,  in-12,  32  pages. 

310.  J.  DisTuftNELL.  Distance  Tables  acress  the  continent.  Philadel- 
phia,  1871,  inrl8, 110  pages.  3  fr. 

311.  DU  même  :  The  gréât  laked,  ôr  inlailid  àeas  of  Affleriça.  Phila- 
delphia,  1871,  in-8%  255  p.  8  fr, 

312.  Die  néu  entdeckten  Geyser-Gebiete  am  bberen  Yellowstone  und 
Madison  rivers.  Nach  dem  offiziellen  Bericht  ton  F.  V.  Hayden. 
Mittheilungen  de  Petermann,  187Î,  n?'  7  et  9,  p.  241-253,  321- 
326.  Carte. 

313.  Raoul  LB  Rot.  Les  Geysers  de  Californie.  Revue  des  Deux- 
MondeSy  15  janv.,1872,  p.  449-461. 

314.  0.  W.  HoLLET.  Niagara,  its  history  and  geology,  incidents  and 
poetry.  Toronto,  1872,  in-12,  165  p.,  with  illuslr.  (Huntér). 


315.  Edw.  H.  Hall.  Àppleton's  Handbook  of  american  travels.  The 
Southern  Tour  s  being  a  Guide  through  Maryland,  district  of 
Columbia,  Virginia,  North  Carolina,  etc.  Lond.,  1872,  in-8<>, 
432  p.,  8  slu  (Low). 

316.  B.  F.  Dfi  Costa.  Rambles  m  Hount  Désert  With  sketohes  of 
travel  on  the  New  England  coast,  from  isles  ef  Shoals  to  Grand 
Menau.  New  York,  1871,  in-16,  ^75  p.  11  fr. 

317.  Mount  Washington  in  winter;  or,  the  expériences  éfa  scien- 
tific  expédition  upon  the  highest  mountain  in  New  England, 
1870-71.  Boston,  1871,  in-12,  370  p.,  carte. 


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236  AMÉRIQUE  DU   NORD.  (n"*  318-342.) 

318,  £,  M.  Rdttenbbr.  History  of  the  indian  tribes  of  Hudson  ri- 
ver :  their  origin,  manners,  and  customs.  Lond.f  1871,  gr.  in- 
8%  illustr.  (Albany). 

3Î9,  J.  M.  Hawks.  The  Florida  Gazetteér;  New  Orléans,  1871,  in-8», 
216  pages.  11  fr. 

3'ZD.  A  Guide  to  Florida,  «  the  land  of  flowers,  »  containing  an  histo- 
rical  sketch....  New  York,  1872,  in-l6,  78  p.  3  fr. 

TZ\.  W.  Brady.  Glimpses  of  Texas,  its  divisions,  resources.  Houston, 
1871,  in-16,  83  p.  Map.  5  fr.  50  c. 

X12.  H«  Harrisse.  Histoire  critique  de  la  découverte  du  Mississipi 
(1673), d'après  les  documents  inédits  du  Ministère  de  la  Marine. 
Mëvue  Marit  et  Colon.,  mars  1872,  p.  642-663. 

Chapitre  extrait  de  roavrage  de  M.  Harrisse  sur  la  Nouvelle-France 
(ci-après,  à  la  section  da  Canada).  M.  Margry,  auteur  de  savants  tra- 
vnax  sur  l'histoire  des  navigations  et  des  découvertes  françaises  du 
xiT'  au  XVI»  siècle  (voir  au  t.  VI  de  Y  Année  Géograph.f  p.  562,  n"  638 
et  S39),  a  contesté  quelques  points  de  Touvrage  de  M.  Harrisse,  dans 
UDB  Note  imprimée  au  cah.  de  juin  (1872)  de  la  Revue  Maritime, 
IK  ^55-559. 

323^  Progrès  et  situation  de  q^elques  tribus  indiennes.  Journal  des 
Missions  évangéliques,6e]^t.  1872,  p.  343-346. 

Il  s'agit  ici  des  tribus  cantonnées  dans  llndian  Territory.  Voir  ci- 
après,  aux  développements. 

Wi.  G.  Watne.  Kansas,  her  resources  and  developments.  Cincin^ 
nfiii,  1871,  in-8%  95p.3fr. 

3'i5.  Cb,  (krleton  CtoFFiN.  *The  Seat  of  Empire.  Boston,  1871,  petit 
iri'8%  viii-232  p.,  illustr.  and  Map. 

Notes  d'un  touriste  sur  le  Wisconsin  et  le  Minnesota*  La  partie  la 
plus  utile  du  livre  est  la  carte  qui  y  est  jointe,  et  qui  a  pour  titre 
|j.irticuner  :  Map  of  the  North  West,  from  explorations  by  the  U.  S. 
ecgineers  and  royal  engineers  of  England,  and  Union  and  Northern 
paciac  R.  R.  surveys.  1870  (au  5  ooo  ooo«). 

J26.  L.  Bill.  Minnesota,  its  character  and  climate....i^eti7  York  y  ISll, 
10-12,  207  p.  8  fr. 

ït3T.  B.  Mattocks.  Minnesota  as  a  home  for  invalids.  Philad.,  1871, 
iu-16,  200  p.  8  fr. 

328.  Minnesota,  its  resources  and  progress,  its  beauty,  heathfulness 
aad  fertility....  Compiled  by  the  commissioner  of  statistics. 
Minv^apolis,  1871,  in-8%  80  p.  Map. 

3211»  J,  RiCHARDSON.  Wonders  of  the  Yellowstone.  New  York,  1872, 
în-8",  illustr.  7  fr.  50  c. 


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ÉTATS-UNIS.  237 

330.  Fr.  Parkman.  The  discovery  of  the  Great  West.  1871,  in-8*, 
10  sh.  6  d. 

331.  R.  Byron  Johnson.  Very  Far  West  indeed;  a  few  rough  expe* 
riences  and  adventures  on  the  N.  W.  Pacific  coast.  Lond,,  1872, 
in-8*,  10  sh.  6. 

332.  J.  H.  TiCE.  Over  Ihe  plains  and  on  the  mountains  of  Kansas  and 
Colorado.  New  Yorky  1872,  in-8%  270  p.  6  sh. 

333.  Comte  Ed.  des  Gourtis  de  La  Groye.  Rapport  sur  le  territoire 
de  TArizona  et  les  mines  d'argent  de  Tumacacori.  Paris,  1871, 
in-4%  18  p.  (Uchaud). 

334.  CI.  Kmo.  Montaineering  in  the  Sierra  Nevada.  Boston,  1872, 
in-8%  292  p  ,  10  sh. 

335.  Côte  occidentale  de  l'Amérique  du  Nord.  Côte  de  la  Californie. 
Instructions  pour  la  navigation  sur  la  côte  de  la  Californie,  de 
la  haie  de  San  Diego  à  la  baie  San  Francisco.  Trad.  de  Paméri- 
cain,  et  corrigées  d'après  les  documents  les  plus  récents,  par 
A.  Frickmann,  lient,  de  vaisseau.  Paris,  1872,  in-8%  76  pages. 
1  fr.  50.  (Bossange). 

336.  Côte  occidentale  de  TAmérique  du  Nord.  Côtes  de  POrégon  et 
du  Territoire  de  Washington.  De  la  baie  Pélican  à  l'entrée  du 
détroit  de  Juan  de  Fuca.  Instructions  trad.  de  l'américain  et 
corrigées  d'après  les  documents  les  plus  récents,  par  le  môme. 
Paris,  1872,  in-8-,  112  p.  2  fr. 

Publications  du  Dépét  de  la  Marine. 


337.  H.  Hoffmann.  Californien,  Nevada,  und  Mexico.  Wanderungen 
eines  Polytechnikers.  Baself  1870,  in-8*,  iv-428  p.  (Schweig- 
hauser). 

338.  Rob.  von  Schlaointweit.  Californien,  Land  und  Leute.  Leips,, 
1872,in-8''(Mayer). 

339.  J.  G.  Plater-Frowd.  Six  mooths  in  Califomia.  1872,  in-8». 
(Lond.  Longmans). 

340.  Prof.  S.  Knebland.  The  wonders  of  the  Ybsemite  yalley  and  of 
California.  Boston,  1871,  in-4».  21  fr. 

341.  J.  Blake.  Remarques  sur  le  climat  de  la  Californie;  trad.  de 
l'anglais  par  F.  Berton.  Le  Globe,  organe  de  la  Société  de  Géo- 
graphie de  Genève,  t.  X,  1871,  p.  111-123. 


342.  Récent  geographical  yfork  in  the  United  States.  Thê  American 
Journal  of  science,  mai  1872,  p.  321*327. 
Voir  aui  déyelopptmenti)  «i-après^ 


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^^ 


238  AMÉRIQUE   DU  NORD.  (n***  343-358.) 

943.  Geographieal  wbrfc  in  the  United  Staten  dwlpg  18T1;  |in  ^d- 
dress  by  Daniel  G.  Gilman  at  the  American  Geographiçal  So- 
ciety, 30  janv.  1872.  New  York,  1872,  in-8-,  30  pages.  ' 
Voir  çi-après,  aux  développements. 

344.  F.  V.  Hatden.  Preliminary  Report  of  the  United  States  geolo- 
gical  survey  of  Wyoming ,  and  portions  of  eontiguons  territo- 
ries  :  being  a  second  Annual  Report  of  progress.  yçw/iingftcm, 
1871,  in-8»,  512  pages. 

M*  Hayden,  chef  de  la  commission  géologique  pour  l'exploratioù  dès 
Territoires  de  TÛuest,  à  successivement  rédigé  une  série  dé  rapports, 
accompagnés  de  cartes,  plans,  coupes,  etc.,  dont  on  peut  voir  le  relevé 
analytique  aux  JfiiftheUungen  de  Petermann,  1872,  n»  11,  p.  426. 

345.  F.  V.  Hayden.  The  hot  springs  and  Geysers  of  the  Yellowstone 
and  Firehole  rivers.  American  Journal  of  science,  febr.  and 
mars,  1872,  p.  105-115,  161-176.  Cartes.      , 

346.  Du  même  :  The  Yellowstone  National  Park.  Ibid,,  apr.,  p.  294- 
297  ;  carte. 

347.  Exploration  in  southem  Nevada  and  Arizona.  Ibid.,  mars, 
p.  232. 

348.  J.  D.  Hagde  and  G.  Kma.  United  States  geographical  explora- 
tion of  the  40*  Parallel.  Vol.  3.  Wash.,  ^871,  in-4*,  664  p.,  avec 
37  pi.  et  un  atlas  de  14  pi.  0t  cartes.  265  fr. 


349.  Ninth  Census  of  the  United  States.  Statistics  of  population.  Tà« 
blés  1-8.  Washington,  1872,  in-4»,  392  pages.  21  sh. 

3^50.  Report  of  the  superintendant  of  the  9*  Census  of  tlie  United 
sûtes.  Washington,  1871,  in-4%  56  p.  S  sh. 

351.  Ninth  Census  of  the  U.  S.,  1870.  Population  of  côunties,  of 
towns  ànd  yillages,  and  classified.  New  York,  1871,  in-S**,  46  p. 
Map. 

352.  De  Bobelli.  Sur  les  documenta  officiels  .du  bureau  du  Cçsia  à 
Washington.  Bulletins  de  la  Soc.  d* Anthropologie  de  Paris, 
févr.  1872,  p.  168-172. 

353.  Les  Indiens  aux  £tats-Uni«.  Extrait  du  Rapport  du  secrétaire 
d'État  pour  l'Intérieur,  du  gouvernement  de  Washington.  Bul- 
letin de  la  Soc,  de  Géogr.  de  Paris,  févr.  1872,  p.  ilâ^îiô. 


354.  H.  Harrissb.  BibliothecaAmericanavetusiissima;  a  description 
of  Works  relalingto  Ameriea,  published  j^twften  XH  years  l^sn 
and  1551.  Additrons.  Paris,  1871,  in-4?. 
Voir  le  t.  Y  de  V Année  Géographique,  p.  389  et  299. 


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STATS-UUÏS.  239 

3§5*  ^.  B.  Baldwbi.  Ancifnt  Anariea^  ia  Kotes  on  americtn  àr- 
chaeoiogy.  tond.,  1872,  petit  iA-8t,  10  ^h.  6.  (Trâbner). 

356.  G**  J.  H.  Simpson.  Coronado's  march  in  search  of  the  Seven 
Cities  of  Cibola  (1540),  and  discussion  of  their  probable  ioca- 
tion«  Armviai  Report  ^tbê  hon^  ôf  R^ffenU  ofth^  S'mtthsonian 
T/tsHtutioit  forï869.  Wask.,  1871,  în-è*,  p.  309-34^.  Map. 

^^  au  If*  snivuit. 


3&7.  Annual  fteport  of  tfae  Boftrd  of  Régents  <tf  the  Smitiisonian 
Institution,  for  the  year  1869.  Washington ,  1871,  in-8»,  430 
PfBiges. 

-*  Id«m,  for  tfae  year  1870.  I&t4.)1872. 

voici,  dans  ces  deui  volumes,  les  morceaul  qui  touchent  à  la  géo- 
SCap|iîi0  et  à  l'ethnographie. 

Babinet,  de  TAcad.  des  soiencas  de  Paris.  The  Zfortbem  seas , 
p.  286-296  (trad.  d*an  article  sar  le  voyage  du  prince  Napoléon  dans 
les  faers  dtl  Nord,  sur  le  yacht  kt  Rbine  Sorignse.)—  J.  H*  SiM-« 
psoN.  Coronado^s  march  in  searoh  of  the  m  Seven  Cities  of  Cibola,  • 
and  discussion  of  their  probable  location  ;  p.  309-340.  Après  avoir  suivi, 
daAs  un'éxpofté  analytique,  la  marche  de  Gorotiado  à  la  recherche  des 
Ètft  eifés  fh  Cibola^  Tauteur  aborde  la  question  du  site  qu'il  faut  as- 
aigner  à  ces  sept  viUes  devenue^  légendaires.  Le  passage  suivant  de 
son  mémoire  (p.  328)  en  résàiùe  suffisafnmeiH  les  conclusions  :  «  Gai» 
Utin,  squier,  Whipplè,  fè  prdf.  Turner  èi  Kern,  se  HOnt  prononcés 
pon^  Zalli  et  son  voisinage.  Eînory  et  Abèrt,  au  contrait,  obt  conjec- 
turé que  CiboUetta,  Moquiflo,  Pojnati,  Cb'verù,  Aeoflia,  Laguna  et  Po- 
blacon,  groupe  de  [sept]  villages  situé  à  i«0  milles  environ  vers  !',{:.  de 
ZUni,  représentent  lés  ■  Sept  Cités.  »  Enfin,  1\3.  Morgan,  dans  la  Korth 
American  RevièW  a  pensé  que  Tes  ruines  du  Chaco,  a  une  centaine  de 
milles  vers  le  K.  E.  de  Zufli,  satisfont  pltis  complètement  aux  condi- 
tions du  probfême  telles  que  lèb  posent  la  relation  de  Côronado,  celle 
de  Caslafieda,  et  d'antres.  Quant  à  moi,  je  rais  pour  Zuili  et  le  terri- 
toire environnant*  >  -r  J.  Lunnocg.  .The  aoolal  aftd  r^Uj^ogs  condition 
of  the  lower  races  of  Man;  p.  3^1-362.  —  Becquerel.  Forests  and 
fteir  cKmatto  influence*,  p.  994-41  <l.  ~  Le  lôéâèfre  Original  de  M. Bec- 
querel (150  pages  in-4^  et  nue  pL),  'est  an  t  XXXV  dés  Mémoires  de 
VAcad,  des  sciences  d$  Paris. 


358.  Territory  of  the  United  States,  from  the  Mississipi  river  to  the 
Pacific  Océan;  compiled  from  authorized  explorations,  by  lient. 
X.  Wa82«n  nnd  E.  FiÈTHOLn,  iinder  the  diteettoA  cff  the 
chief  of  corps  of  Engineers.  Nêfu)  York,  1868,  4  feuilles  (au 
3000000*). 

Cette  belle  carte,  remarquable  par  la  nouveauté  des  détails  et  la 
^nesse  de  l'exécution,  contient  le  résultat  de  toutes  les  études,  d^ 
toutes  lés  explorations  et  de  tous  les  levés  géodésiques  exécut&'s  pajr 
lea  diveirses  cônrinTseioiis  et  par  les  ingénieurs  américains,  |usqu*à  Ik 
date  de  sa  publication,  entre  le  Mississipi  et  le  Grand  Océan. 


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240  AMÉRIQUE  DU  NORD.  (N"  359-362.) 

359.  £d.  H.  KniOHT.  Map  of  ihe  countrj  tributary  to  the  Northern 
Pacific  Railroad.  Compiled  from  english,  canadian  and  ameri- 
can  officiai  sources  and  original  surveys.  New  York,  1871, 
1  feuille. 

Cette  carte,  qui  donne,  comme  la  précédente,  tout  le  territoire  com- 
pris entre  le  Mississipi  et  TOcéan,  s'étend  moins  an  snd  et  davantage 
an  nord.  Elle  est  comprise  entre  le  38*  et  le  60*  parallèles,  et  consé- 
quemment  elle  embrasse  la  moitié  occidentale  de  TAmérique  Anglaise. 

Noas  aTons  mentionné  plus  haat  la  carte  <  des  Ingénieurs  »  jointe 
au  livre  de  M.  Carleton  Coffin  (n»  269),  qui,  pour  beaucoup  de  détails 
récemment  acquis,  complète,  comme  celle  de  Knight,  la  belle  carte  de 
Warden  et  Freyhold. 

360.  Military  Map  of  the  United  States,  by  E.  Frethold.  New  York, 
Office  of  the  chief  of  Engineers,  War  department.  1870.  4  feuil- 
les, aa  5  000  000*. 

Cette  carte  ne  donne  pas  le  figuré  du  terrain;  mais  tontes  les  lignes 
de  communication  y  sont  tracées. 

,  361.  Aug.  Petbbmann.  Neue   Karte  der  Vereinigten  Staaten  von 
Nord-Amerika,  in  6  Blattern  (au  3  700000"). 

Cette  magnifique  carte,  dont  3  feuilles  ont  déjA  paru,  fait  partie  de 
la  nouvelle  édition  de  TAtlas  de  Stieler.  Elle  est  exécutée,  sous  la  sa- 
vante direction  du  D' Petermann,  par  les  habiles  auxiliaires  attachés  A 
l'établissement  géographique  de  Jol.  Perthes  A  Gotha  ;  la  gravure,  aussi 
bien  que  le  dessin  topographique,  répondent  A  la  perfection  scienti- 
fique et  matérielle  A  laquelle  sont  arrivées  aujourd'hui  les  productions 
de  ce  grand  établissement. 

362-  Capit.  Raymond,  and  M'  E.  von  Diezelski.  The  Yukon  river, 
Alaska,  from  fort  Yukon  to  the  sea,from  a  reconnaissance  made 
under  the  orders  of  Major  General  H.  W.  Halleck,  U.  S.  army, 
commanding  the  military  division  of  the  Pacific,  by  capt.  Ch. 
W.  Raymond,  corps  of  Engineers,  assisted  by  M'  J. Major, july- 
sept.  1869.  Wash.  1871,  1  feuille,  au  1  OOOOOO'. 

Cette  carte  apporte  de  notables  modifications  A  celle  de  M.  Dali  (t.  ix 
de  VAnnée  Géographique^  p.  140).  Voir  ci-après,  aux  développements, 
S  8. 

D&VELOPPBMENTS. 


S  i».  Les  études  sur  la  géographie  physique  des  territoires  de  l^Union 
américaine. 

Gomme  toutes  les  nations  qui  sont  encore,  si  l'on  peut 
dire,  à  l'état  de  formation  matérielle,  les  Américains  du 
Nord  concentrent  à  peu  près  exclusivement  leurs  travaux  et 
leurs  forces  intellectuelles  sur  leur  propre  territoire^  Mais 


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ÉTATS-UNIS.      .  241 

aussi  ils  y  déploient  une  puissance  de  volonté,  une  étendue 
de  ressources,  une  habileté,  une  constance,  une  énergie, 
qui  sont  vraiment  faites  pour  étonner  le  vieux  monde.  C'est 
la  force  de  l'homme  dans  la  virilité  des  ftges  héroïques^ 
secondée,  décuplée,  par  le  concours  de  la  science  moderne. 
De  l'Atlantique  au  Mississipi,  la  terre  est  conquise  et 
domptée  ;  mais  du  Mississipi  aux  Montagnes  Rocheuses, 
des  Montagnes  Rocheuses  à  TOcéan,  les  Américains  ont 
devant  eux  un  autre  monde,  un  monde  immense  qui  était 
vierge  encore  il  y  a  trente  ans  à  peine,  et  qui  commence 
seulement  aujourd'hui  à  s'animer  de  la  vie  civilisée.  La 
chaîne  du  géomètre  y  fait  son  œuvre  en  même  temps  que 
la  hache  du  pionnier  et  la  charrue  du  colon. 

Nous  ne  pouvons  entrer  dans  le  détail  infini  des  études 
et  des  travaux  qui  se  poursuivent  sans  interruption  sur  ces 
immenses  territoires  de  l'Ouest  :  l'ingénieur  des  chemins 
de  fer,  l'arpenteur,  le  géologue,  le  naturaliste,  et  souvent 
avec  eux  î'ethnologiste  et  l'archéologue,  s'y  donnent  la 
main  et  marchent  de  front.  Les  ingénieurs  jetèrent,  il  y  a 
vingt  ans,  le  premier  réseau  d'une  carte  de  ces  contrées 
alors  presque  inconnues.  Leur  œuvre,  depuis  lors,  s'est 
étendue  et  perfectionnée  jour  par  jour;  et  l'on  possède 
aujourd'hui  des  cartes  topographiques  de  ces  territoires, 
qui  pour  le  détail  et  l'exécution  le  cèdent  à  peine  aux  plus 
heaux  travaux  de  la  géodésie  européenne  (n**  358-362,  etc.). 
Une  portion  considérable  de  ces  études  ont  pour  objet 
la  géologie  (n»  342-348.)  ;  car  ce  qui  importe,  en  même 
temps  que  la  détermination  topographique  du  sol,  c'est 
d'en  connaître  exactement  la  nature  et  les  ressources  ;  mais 
on  sait  combien  l'étude  du  relief  touche  de  près  aux  inves- 
tigations géologiques.  Ainsi,  nous  trouvons  dans  un  tra- 
vail de  M.  Thomas,  assistant  de  M.  Hayden,  chef  de  la 
commission  géologique  de  l'Ouest  (n**  345-347),  un  relevé 
de  l'altitude  des  points  principaux  du  pa;s  qui  s'étend  à 
l'ouest  du  Mississipi;  nous  en  détachons  un  des  tableaux 

l'année  GÉOGR.  XI.  16 

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24Î  AMÉRIQUE  DtJ  NOM.  (N»*  293-362.) 

(!e  1 1*}  ot  sont  groupées  les  altitudes  prineipales  da  Colo- 
rado. Ce  tableau  a  cela  de  particulièrement  intéressant, 
qu'il  embrasse  une  partie  considérable  de  ce  qu'on  peut 
nommer  le  Massif  Central  des  Montagnes  Rocheuses, 
c'est-à-dire  de  cette  partie  du  système  d'où  les  principales 
mières  du  centre  du  continent  américain  descendent  vers 
les  mers  environnantes  :  la  Tellow  Stone  river,  la  Plate 
river  et  l'Ârkansas,  vers  le  Missouri  et  le  Mississipi;  le 
Rio  Grande  del  Norte,  directement  vers  le  golfe  du  Mexi- 
que ;  le  Rio  Colorado,  vers  le  fond  du  golfe  de  Californie; 
la  rivière  Lewis,  branche  principale  de  l'Orégon,  vers  U 
Grand  Océan.  Ces  grandes  rivières  ne  sortent  pas  toutes 
directement  du  Colorado;  mais  toutes  descendent  du 
massif  dont  le  Colorado  est  le  centre.  Yoiei  le  tableau 
dressé  par  M.  Thomas. 


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ÉTATS-UNIS. 


S43 


Pointé  mesurés. 


Altilude  «tt^d^ms  é«  la  mer 


eo pieds angl.    en  mètres, 


M.  Harvard  (Whitney.) . 

Pic  '6ray • 

M.Lincoln ...,. 

M.  Xale • 

Pî6Pikê(Parry)....... 

Pic  Long .,... 

Pic  Barry....... 

X.  nota. 


V.  Wright  iB.  de  la  Passe  Berthoud) . 
Cherry  Créék  bivide. 


BsoYtr. 

Gold  en  Ci ty 

M.  Vembn. ........ ^ •. 

Golden  Gâte « 

Confluent  des  Clear  fcreeks  N.  el  S. . 

Black  Hawk  1 ; 

Centï^l  City> 

Missoury  City ,.,, 

Head  Virginia  Cafidà .«.. 

Idaho , 

Georgetown . . .  .• 

Passe  Berthoud 

Passe  ^ai^der. « 

Passe  lônô 

Passe  Âig»tiiie, 

Pas^e  Çeorgia  Gulch ! 

Passe  Uté 

Passe  Vn^qUez  (e^m^) 

Hot  3prings  (Idaho  City) .  

Hot  dpriH§s  tMiddlé  PaH^ 

3odamiAgs  (près  le  Pic  Pike) 

Gold  ffill.. 

Jefferson  (South  Park) 


Poôt  Berthoui4  î>ai» 
OsborB'slake....... 

PicVelie 

M.  Aûdubon '.. 

U^  s«p4rie«r^  de  ^  vf^étati^ 

guriencPikç...... ". ; 

Sur  le  Snowy  Range. . . . '. '. . . 

Sarl•ll^>bldl]^n.... 

Sur  le  Pic  Long 

Sur  tes  tnonts  "Wliid  River 

Sur  le  PicGilhtFt  (M*-  UioU.  Biajden) 


UtiO 
14146 

\m 

i4sia 

14  056 

13  m 

23878 

11800 

7576 

6817 
5882 
6479 

'an 

7643 
8043 
9073 
9ëâ0 

8245 

10  896 
11670 
12400 

m 

11  200 

7726 
6515 
8636 

mz 

9943 

9325 

.8821       - 

13  4^6       ] 

13  402      I 

arhore^nie 

12  000 
liste 

10800 
10 160 
lUOO 


3383 


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244  AMÉRIQUE  DU  NORD.  (n"  293-362.) 

Aux  tableaux  qu'il  a  réunis  dans  son  travail,  M.  Thomas 
ajoute  les  remarques  suivantes  : 

«  L'examen  des  tableaux  qui  précèdent,  joints  à  ceux 
que  Ton  trouve  dans  les  rapports  de  M.  Hayden  pour  1870 
et  71,  révèle  quelques  faits  importants  touchant  la  topo- 
graphie de  rOuest;  parmi  ces  faits,  je  puis  mentionner 
les  suivants  comme  étant  d'un  intérêt  général, 

«  Le  LIano  Estacado,  «  la  Plaine  Palissadée  »,  à  son 
extrémité  nord,  immédiatement  en  deçà  de  la  rivière  Cana- 
dienne, varie-  en  élévation  de  1000  à  1200  mètres  environ 
au-dessus  de  la  mer,  tandis  qu'à  l'extrémité  sud,  où  la 
ligue  du  capitaine  Pope  Ta  coupée,  le  Llano  atteint  une 
élévation  de  1430  mètres.  Au  nord,,  le  Uano  est  quelque 
peu  irrégulier  et  accidenté,  et  le  point  le  plus;41evé  est  vers 
le  bord  occidental;  au  sud,  il  est  beaucoup  plus  uni,  et  le 
plus  haut  point  est  près  de  l'escarpement  oriental.  L'alti- 
tude moyenne  de  ce  large  plateau  est  d'environ  1200  mè- 
tres au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  » 

Un  fait  nouveau  dans  'rhypsoinétrie  de  l'Amérique  du 
Nord,  c'est  qu'une  portion  notable  du  grand  bassin  fermé 
compris  entre  les  Montagnes  Rocbei^es  et  la  Sierra- 
Nevada  est  au-dessous  du  niveau  de  la  mer.  Yoici  à  ce 
sujet  ce  que  nous  lisons  dans  le  journal  de  la  société  de 
Géographie  de  Genève  (n»  3  de  1872),  d'après  une  corres- 
pondance de  San  Francisco. 

Dans  une  séance  récente  (juin  1872]  de  l'académie  des 
Sciences  de  San  Francisco,  «-nous  apprenons  du  même 
coup  que  la  Californie  a  maintenant  sôii  àçadéinie,  —  le 
colonel  Gray,  à  la  demande  du  président,  a  donné  lec- 
ture d'un  extrait  de  son  rapport  comnie  ingénieur  de  la 
compagnie  «  Southern  Pacific  Railroad.  »  Se  référant  au 
rapport  ïait  précédemment  par  le  profeisséur  Williamson, 
qui  montre  par  des  observations  barométriques  qu'une 
^'rande  partie  du  désert  du  Colorado  est  au-dessous  du 

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ETATS-UNIS.  S45 

niveau  de  la  mer,  il  a  trouvé  dans  son  dernier  arpentage 
que  ce  âùt  est  vrai. 

c  Les  notes  que  Tinginieur  assistant  E.  A.  Phelps  a 
prises  pendant  qu'il  déterminait  les  niveaux  de  la  ligne 
entre  la  passe  San  Gorgonio  et  le  fort  Tuma,  énoncent 
des  fidts  remarquables,  concordant  avec  le  rapport  du  pro- 
fesseur Williamson. 

«  A  une  distance  de  65  milles  du  sommet  de  la  passe 
San  Oorgonioy  dans  une  direction  sud,  on  atteint  le  ni- 
veau de  la  mer.  Descendant  par  une  pente  douce  de 
24  milles  6/10%  la  route  arrive  à  203  pieds  (62  mètres) 
an-dessous  du  niveau  de  la  mer.  La  plus  forte  dépression 
(66  mètres)  se  trouve  à  6  [milles  plus  .loin.  Encore  20 
milleS)  et  Ton  se  retrouve  au  niveau  delà  mer. 

c  La  longueur  totale  de  la  partie  du  chemin  qui  est  au- 
dessous  du  niveau  de  la  mer,  est  de  50  milles  6/10*.  » 

Un  autre  fait  curieux  de  la  géographie  naturelle  de  la 
Galifomip,  est  Texistence  des  geysers,  ou  petits  volcans 
d'eau  chaude,  dans  une  vallée  pittoresque  k  une  soixantaine 
de  milles  au  nord  de  la  baie  de  San  Francisco.  On  s'est 
beaucoup  occupé,  dans  ces  derniers  temps,  des  geysers 
californiens;  une  intéressante  excursion  de  M.  Raoul  Le 
Boy  (n"*  313)  nous  donne  des  détails  précis  sur  le  phéno- 
mène et  la  localité.  Le  voyageur  termine  son  récit  par  ces 
remarques: 

c  Ce  n'est  guère  qu'en  Islande  que  le  phénomène  des  geysers 
a  été  étudié  de  près,  hesgeyms  d'Islande  diffèrent  en  bien  des 
points  des  sources  jaillissantes  de  la  Californie;  la  différence 
principale,  c'est  que  l'eau  de  ces  dernières  est  de  composition  sul- 
fo-alcaline,  tandis  que  celle  des  geysirs  islandais  est  saturée 
d'acide  silicique.  On  explique  la  formation  des  geysirs  par  l'in- 
filtration des  eaux  dans  les  crevasses  des  roches  volcaniques. 
Nul  doute  que  les  causes  des  éruptions  ne  soient  les  mômes  en 
Californie.  Tous  les  sommets  voisins  des  geysers  californiens 
sont  couverts  de  neiges  et  de  glaciers,  donnant  aussi  naissance 

uigiiizeu  uy  >._j  v^  Vv' pc  i n^ 


t4e  AMÉRIQUE  BU  HÛRD.  (n"^  393-362.) 

à  é^SfimaasM  finBititto  ci*fiU  qw  a'iiifiltc^ni  dftft^  las  fe^tiQs  i|t 
les  cavernes  pour  ressortir  plus  tard  en  qojQniies  jaillissantes 
pt  tb^rtBAlds.  En  Californie,  toutefois,  la  source  est  perinà- 
nenté,  quoique  dans  dé  moindres  proportions;  en  Islande,  le 
èàraôtëre  prédominant  Ses  gêjsirs  est  rintermittenee. 

Puisque  n^mB  afo&t  eouneré  e^  parag^j^b^  m  giaicl^ 
partie  à  des  mesiires  d'altitude ,  disfias  etusor^  qu^ 
MM.  Ramier  et  Baker,  effieioTS  ds  Goest  Sunt^y»  £tats- 
Oiiie,(mt  déterminé  pouriabaiiteur  duai^nt  Reinier» point 
ealmioant  du  lerriteire  dq  Wathiugton,  daas  le  plwne  des 
Saeeade  Mouutains^  14>444  pieds  anglaja  (4408  mètres); 
c'est  4  pieds  de  plus  que  le  m^t  Shaata  (ai}treu(Bud  plue 
méridional  dea  monts  Cascade,  vers  41''  l/24e  jatitude).  ]je 
mont  Rainier  est  èiiué  par  46?  il'  9" de  jatit.  $f .  e|  ISI*  ^V 
fig'^  de  leogit.  0.  de  &r.  ^  U9?  81'  la'^û*  4l»  Paris. 
L'altitude  du  ment  Baker  (Gqloml)»  «oglaùe)  «  i\4  ^té- 
rieurement  trouvée  de  3278  mètres. 


S  2.  Les  travaox  géodésiquès  dahft  la  région  dé  l*0uedt. 

M.  Daniel  ôilman,  dans  une  Addrese  au  sein  de  lu 
société  de  Gréographie  de  New  York  (janvier  Wi)t  et 
VÀmmoanfùurnai  of  Smneê  dans  un  article  spéQial  (ei- 
dessus,  n^  842-843),  oist  l'un  et  l'autre  passé  en  revve  lee 
travaox  géedésîqueB  récemment  eaéentés  on  en  coors  d'exé- 
cution dans  les  territoires  de  l'Ouest  des  États-Unis  ; 
nous  avons  utilisé  ces  deux  documents  en  rédigeant  le 
résumé  suivant  : 

tAafmort  du  corps  des  fng^énUurà  de  Varmèefèdèraie,  La 
ticht^  prwcipalQ  de  p§  çorp^  iipienti^qi|Q  ^st,  en  temps  de 
paix,  de  surveiller  la  oonslruelion  et  l'entretien  dès  forlie- 
cations,  d'exécuter  les  travaux  que  le  conuneree  exig# 
dans  les  ports,  les  rivières  et  les  lacs.  ÏI  n'est  question  ici 
que  de  ce  qui  touche  plt^  particulièrement  aux  choses  d^ 
géographie. 

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ETATS-UNIS.  ^  247 

— ^  Beoannaùsanoes  dei  grands  tacs.  £«  TeçannaissaBce 
des  grands  lacs  intérieurs,  maintenant  soi^s  I4  direction  du 
major  Gomstoeky  du  corps  des  ingénieurs,  a  été  poursuivie 
dans  le  cours  de  l'année  dernière  sur  les  Ucs  Supérieur^ 
Michigan,  Saint-Glair  et  Gfaamplain<  et  s'est  étendue  au 
fleuve  Saint-Laurent.  —  Dans  le  lao  Supérieur,  on  a  com- 
plété le  relevé  des  Àpostle  islands.  La  triangulation  fonda- 
mentale ^  été  portée  des  Porcupine  Mou^tain8  à  Duluth,  pe 
qui  fait  une  distance  de  120  milles  ;  la  ligne  de  base  de 
Minnesota  Point  a  été  mesurée;  on  a  dé^rminé  par  le 
télégraphe  électrique  l'intervalle  en  }ongitude  entre  Duluth 
etSaini-Paul;  enfin,  on  af«it  des  observations  azimuthales 
de  longitude  et  de  latitude  aux  stations  de  premier  ordre 
de  l'extrémité  occidentale  du  lac. 

Des  déterminations  analogues  ont  été  faites  dans  le  lao 
Miehigan,  et  l'hydrographie  intérieure,  a  marché  de  &ont 
avec  le  relevé  des  côtes. — La  triangulation,  l'hydrographie 
et  la  topographie  du  lac  Saint-plair  sont  complétées. 

Une  reconnaissance  a  été  faite  à  partir  du  45*  parallèle 
(limite  nord  de  l'État  de  ]^ew  York),  jusqu'à  l'extrémité 
orientale  du  lac  Ontario.  Presque  tous  les  signaux  sont 
érigés  pour  la  triangulation,  et  une  partie  des  angles  sont 
mesurés.  La  topographie  et  l'hydrographie  ont  été  portées 
du  45*  parallèle  jusqu'à  10  milles  au  S.-O.d'Ogdensbui^h. 

Plusieurs  cartes  ont  été  préparées  pour  la  gravure. 

La  longitude  de  Détroit  (où  est  placé  l'observatoire  ac- 
tuel pour  la  reconnaissance  des  lacs)  a  été  déterminée  à 
24"»  0"«  12  ±  O"**  02,  par  rapport  à  Washington.  La 
bûgitude  entre  Détroit  et  Duluth,  et  entre  Duluth  et 
Saint-Paul,  a  aussi  été  déterminée  par  la  connexion  télé- 
graplyque. 

—  Nevada  et  Arizona.  Une  expédition  oi^anisée  sous 
les  auspices  de  l'administration  du  génie  aux  États-Unis, 
pour  la  reconnaissance  des  territoires  inexplorés  du  Ne- 
vada méridional  et  de  FArizona,  expédition  placée  sous  la 

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248  AMÉRIQUE   DU   NORD.  (n^«  293-362.) 

direction  du  lieutenant  G.  M.  Wheeler,  s'est  mise  en  cam- 
pagne dans  les  premiers  jours  du  mois  de  mai  1871,  et  a 
poursuivi  ses  travaux  jusqu'au  mois  de  décembre.  Les 
neiges  des  Montagnes  Rocheuses,  et  d'autres  difficultés, 
ont  reculé  jusque  vers  la  fin  de  janvier  l'arrivée  de  Texpé- 
dition  scientifique  à  Washington,  où  les  explorateurs  sont 
actuellement  occupés  (mars  1872)  à  rédiger  leur  rapport 
officiel.  L'objet  principal  de  l'expédition  était  de  faire  la 
carte  et  la  description  d'une  portion  de  la  contrée  inhospi- 
talière sur  laquelle  on  n'a  eu  jusqu'à  présent  que  les  rap* 
ports  incohérents  de  quelques  hardis  prospectors. 

Le  corps  entier  de  l'expédition,  y  compris  l'escorte,  etc., 
se  montait  à  80  ou  90  personnes,  divisées  en  deux  troupes 
principales  qui  devaient  se  réunir  chaque  mois  à  des  points 
désignés.  Le  parti  se  subdivisait,  d'ailleurs,  selon  les  cir- 
constances, de  manière  à  embrasser  la  plus  grande  super- 
ficie possible.  L'expédition  ayant  quitté  le  grand  chemin 
de  fer  du  Pacifique  à  Carlin  et  à  Battle  Mountain,  dans]  le 
Northern  Nevada,  les  deux  troupes  se  dirigèrent  rapide- 
ment au  sud  et  gagnèrent  Belmont,  où  commencèrent  les 
travaux  sérieux  de  l'exploration.  De  ce  point  jusqu'au  Co- 
lorado, les  lignes  à  explorer  formaient  un  réseau  continu 
embrassant  toute  la  laideur  du  Nevada,  et  s'étendant  même 
sur  la  Californie  et  TUtah.  Les  opérations,  un  peu  res- 
treintes sur  certains  points,  furent  poussées  au  Sud  à  tra- 
vers l'Arizona,  et  se  terminèrent  à  Tucson.  Un  petit  déta- 
chement explora  en  bateaux  le  Colorado  sur  un  espace  de 
200  milles,  depuis  le.  fort  Mojave  jusqu'au  confluent  de 
Diamond  Creek,  plus  de  100  milles  au-dessus  du  point 
où  s'était  arrêté  le  lieutenant  Yves,  et  40  milles  au«des§us 
du  débouché  de  Big  Canon.  De  nombreuses  vues  photo- 
graphiques ont  été  prises  sur  tous  les  points  intéressants. 
Outre  les  opérations  ordinaires  au  sextant,  six  points  ont 
été  fixés  rigoureusement  en  longitude  et  en  latitude  par  des 
observations  zénithales.  On  a  relevé  sur  toutes  les  lignes 

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ÉTATS-UNIS,  249 

parcourues  des  profils  barométriques  et]  des  observations 
météorologiques. 

£n  histoire  naturelle,  on  a  fait  de  nombreuses  collec- 
tions qui  ne  peuvent  manquer  de  fournir  une  nombre  con» 
sidérable  d'espèces  nouvelles,  et  on  a  recueilli  une  masse 
d'informations  sur  la  distribution  des  animaux  et  des 
plantes.  En  géologie,  on  a  réuni  des  matériaux  pour  la 
construction  approximative  d'une  carte  de  la  région  explo- 
rée, qui  reliera  l'ouvrage  de  Newberry,  Blake  et  Ântisell 
sur  l' Arizona  à  celui  de  King  au  40*  parallèle. 

À  leur  retour,  M.  W.  Hamel,  ingénieur  en  chef,  et  deux 
autres  membres  de  l'expédition,  furent  massacrés  par  les 
Apaches.  M.^  Hamel  avait  la  réputation  méritée  d'un  topo- 
graphe d'une  rare  habileté;  sa  mort  est  une  grande  perte 
pour  la  science.  Les  résultats  de  son  dernier  travail  ont 
pu  être  recueillis  et  seront  d'un  grand  usage  dans  la  con- 
struction de  la  carte. 

—  Levé  du  40*'  parallèle.  Le  levé  du  40""  parallèle  est  en 
progrès.  On  a.  fait  une  nombreuse  série  d'observations  sur 
les  conditions  actuelles  du  cUmat  du  Grand-Bassin,  ses 
lignas  isothermes,  ses  moyennes  annuelles  et  mensuelles  de 
température,  etCc  Une  double  collection  très-considérable, 
botanique  et  zoologique,  a  été  formée.  La  reconnaissance 
a  conduit  à  un  examen  scientifique  très-complet  d'une  zone 
qui  traverse  le  système  presque  entier  de  la  Cordillère. 
Les  roches  de  notre  limite  orientale,  dit  le  rapport,  sont 
déjà  celles  des  formations  atlantiques,  et  doivent  être  pour 
les  géologues  l'objet  d'une  longue  étude.  Les  ressources 
agricoles  du  bassin  sont  très-limitées  ;  sur  88  000  kilo- 
mètres carrés  qui  ont  été  examinés  dans  la  région  nord  du 
Nevada,  on  estime  que  2600  kilomètres  sont  susceptibles 
de  culture,  même  en  tirant  parti  pour  l'irrigation  des 
rivières  et  des  cours  d'eau.  La  minute  des  cartes  a  été 
rapportée  à  l'échelle  de  2  milles  au  pouce,  et  on  en  a  fait 
par  la  photographie  une  réduction  de  4  milles  au  pouce, 

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250  AMÉRIQUB  DU  NORD*  (n"^  293-362.) 

formant  trois  feuilles.  Ces  feuilles  sont  en  préparation  pour 
être  gravées  sur  pierre.  Les  textes  sont  prêts  pour  rim* 
pression. 

—  Reconnaissance  des  rivières  de  VOuest.  La  riTÎère  de 
Gninberland  a  été  levée,  d'une  part,  depuis  NashviUe  jus^ 
qu'à  rembouchure  de  la  rivière;  d'autre  part,  depuis 
Nashville  jusqu'aux  rapides  du  cours  supérieur.  De  ce  def- 
nier  point  jusqu'à  l'embouebure,  le  cours  de  la  rivière  est 
de  595  milles  (957  kilomètres).  Voici  quelques  altitudes 
rapportées  à  la  maré^  moyenne  à  Mobile  s 

Au  pied  des  chutes 235  mètres. 

Rivière  Laurel 209  — 

Smith^s  shoals,  à  la  tôte 198  — 

—            au  pied 182  — 

Pointe  Bumside 182  — 

Nashville 111  — 

Confluent  de  la  rivière 87  *— 

On  a  fait  une  reconnaissance  préliminaire  de  \%  rivière 
Wabash,  depuis  Wabasb  jusqu'à  l'embouchure. 

Le  lieutenant  Adams,  du  corps  des  ingénieurs,  a  fait 
aussi  une  première  reconnaissance  de  la  Fre^ch  Broad 
river. 

On  a  fait  la  reconniiisgance  d'une  ligne  propre  à  l'exé- 
cution d'un  canal  navigi^>le  entre  Hennepiut  sur  la  rivière 
Illinois,  et  Rock  island  sur  le  Mississipi,  passant  par  Cra- 
neseo,  canal  dont  la  longueur  serait  d^65  milles^  avec  une 
branche  d'ftUnienHtion  navigable  d§  38  milles  v^nai^t  de 
Dixon. 

Une  série  d'études  a  été  faite  sous  la  direction  du  lieu- 
tenant colonel  Rajniolds»  pour  l'amélioratÎQp.du  Mississipi 
et  de  ses  tributaires. 

Sur  la  côte  du  Pacifique,  des  reconnaissances  plus  ou  moins 
détaillées  de  diverses  rivières  ont  été  faites  dans  plusieurs 
régions,  notamment  de  la  Yillamette  au-dessus  d'Oregon 
Gity,  de  l'Umpqua,  et  de  plqsieurs  parties  du  Sacramentp. 

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ÉTATS-UNIS. ,  i^l 

II.  Letâ  $0yms  de  Jetiotostone^  Iss  gejaers  ai  rem»r- 
qaa]>Ia8  qui  ont  été  trouYés  dans  lu  vallée  du  haut  Yellow- 
stone,  la  proposition  i^doptéa  dans  la  Gougrès  de  réserver, 
pour  en  faire  un  parc  national,  la  partie  de  la  vallée  la 
plus  intéressante  par  aes  phénomènes  naturels,  et  enfin 
la  posiibtlité  que  la  vallée  de  Yellowstone  soi^  adoptée  pour 
le  traeé  du  Northern  Pacifio  Railrpad,  ont  récemment 
attiré  Fatlentioit  générale.  Les  prineipales  sources  d*infor- 
maliens  venues  à  notre  connaissance  sont  les  suivantes  : 

Description  pittoresque  de  la  région  des  geysers  d'uprès 
les  observations  de  l'exploration  Washburne-Langford, 
dans  le  Scribner's  Mmlhly  de  1871  ; 

La  relation  de  Walter  Trumbull^  dans  V(h>erlani 
Monthly  de  mai  1871  ; 

Le  rapport  du  docteur  Hayden,  1871^  dans  VAmerican 
journal  of  i$imo^^  voL  III,  1872,  p.  161  et  S94; 

La  relation  d'une  reconnaissance  (1871)  du  capitaine 
J.  W.  Barlow  du  CQrps  des  ingénieurs,  publiée  dans  diffé- 
rents journaux  de  janvier  et  de  février  1872» 

Sur  les  dernières  cartes  publiées  (jusqu'à  la  fin  de  1871) 
par  le  Bureau  des  ingénieurs,  le  cours  supérieur  des 
rivières  Tellowstone  et  Fire  Hole  est  asaex  faiblement  des- 
siné; mais  sur  la  carte  de  M.  de  Laey,  ingénieur  en  chef 
de  la  Montana,  le  tracé  de  ces  deux  rivières  est  mieux 
arrêté  et  la  nomenelature  plus  circonatanciéeà 

m«  Rmoe  du  Northtm  Pa$iHê  Raikoad.  Des  études 
d'un  second  chemin  de  fer  à  travers  le  continent,  par  le 
haat  Missouri  et  la  vallée  de  la  Golumbia»  ont  beaucoup 
ajouté  h  notre  connaissance  de  ces  contrées.  Cette  région 
est  celle  dont  le  voyage  de  Lewis  et  Glarke  en  18Q4,  & 
et  6,  nous  donna  les  premières  notions;  elle  fut  de  nouveau 
recimnue  par  le  général  Stevens  en  1853,  bk  et  55  (dont  le 
rapport  forme  la  1"^  partie  du  t.  XII  de  VU.  $.  Paçifip 
Bailroad  Report),  et  elle  a  été  encore  examinée  avec  soin 
par  le  capitaine  J.  Mnllan,  qui  a  construit,  de  1858  à  1862» 

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252  AMÉRIQUE   DU   NORD.  (n~  293-362.) 

une  route  militaire  depuis  le  fort  Walla  Walla  sur  la  Go- 
Imnbia,  jusqu'au  fort  Benton  sur  le  Missouri.  Le  rapport 
du  capitaine  Mullan  a  été  imprimé  par  ordre  du  gouverne- 
ment eu  1863. 

Le  conseil  du  Northern  Pacific  Railroad  a  publié,  Tan- 
nëe  dernière,  le  rapport  d'une  reconnaissance  de  la  route 
faite  en  1869  par  le  général  W.  Milnor  Roberts.  Le  même 
ingénieur  a  consacré  Tété  de  1871  à  l'examen  du  point  de 
partage  des  Montagnes  Rocheuses,  entre  lapasse  Lewis-and- 
Gkrk  au  nord  et  la  passe  Deer-Lodge  au  sud,  distance  de 
près  de  100  milles  qui  embrasse  tous  les  cols  de  la  grande 
chfîîne  dont  le  Northern  Pacific  Road  peut  profiter.  lia 
ensuite  descendu  la  vallée  de  la  Yellowstone,  ainsi  qu'il  a 
été  dit  plus  haut. 

Dans  le  même  temps,  le  général  T.  L.  Rosser  a  reconnu 
une  route  entre  le  Missouri  à  fort  Rico  et  la  Yellowstone. 

M.  Frank  Wilkeson  a  également  étudié,  dans  le  cours 
de  Tété  dernier,  la  géologie  de  la  région  comprise  entre 
Cadotte's  Pass  et  Deer-Lodge  Pass ,  au  point  de  Yue  du 
charbon  et  du  fer. 

M.  Gh.  A.  White  a  traversé  la  Grande  Plaine  de  la  Go- 
lumbia  et  la  Grande  Coulée. 

Ces  quatre  rapports  ont  été  imprimés  en  vue  d'une  pro- 
chaine publication. 

IV.  Carte  des  routes  de  transport  dans  le  Minnesota  et  le 
Dakota.  Une  carte  des  routes  du  Minnesota  et  du  Dakota, 
comprenant  les  chemins  de  fer,  vient  d'être  construite  par  le 
général  Holabird,  quartermaster  en  chef  du  département  de 
Dakota,  et  publiée  à  l'échelle  de  10  milles  au  pouce.  Les 
courB  d'eau,  les  lacs  et  les  chemins  sont  soigneusement  indi- 
qués, de  même  que  les  établissements  des  colons  et  les  vil- 
kf^es  ;  naturellement  le  relief  est  dessinéd'une  manière  moins 
précise.  Cette  grande  contrée  attire  maintenant  tellement 
l'attention  et  se  développe  si  rapidement,  que  cette  carte 
préparatoire,  dont  l'exécution  présentait  de  grandes  dif- 

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ÉTATS-UNIS.  253 

ficultës,  est  d'un  intérêt  tout  particulier.  Parmi  les  indica- 
tions notables  que  donne  la  carte,  nous  citerons  les  lacs, 
qui  sont  un  des  traits  si  particulièrement  caractéristiques 
du  Minnesota  et  du  Dakota  oriental,  la  ligne  du  partage 
des  eaux  entre  le  golfe  du  Mexique  et  la  baie  d'Hudson, 
l'esquisse  du  a  Coteau  des  Prairies  »  et  du  «  Coteau  du 
Missouri,  »  et  enfin  lé  tracé  du  chemin  de  fer  du  Pacific 
du  Nord. 


S  3.  La  région  dn  Far  West.  Snite.  La  Californie.  Géodésie.  État  politique 
et  social. 

Parmi  les  publications,  généralement  si  remarquables, 
qui  se  rapportent  aux  investigations  géologiques  et  aux 
opérations  géodésiques  poursuivies  sur  les  nouveaux  terri- 
.  toires  de  TOuest,  il  en  est  peu  d'aussi  importantes  et  d'aussi 
complètes  que  celles  de  M.  Whitney  sur  la  Californie. 
«  Tout  le  monde  parle,  dit  M.  Cilman,  des  immenses  res- 
sources naturelles  du  Golden  State,  ie  pays  de  VOr;  mais 
peu  de  gens,  même  parmi  ceux  qui  l'habitent,  se  rendent 
bien  compte  des  admirables  recherches  dont  ces  richesses 
ont  été  l'objet  de  la  part  du  chef  de  la  commission  géolo- 
gique, et  de  la  belle  exposition  qu'il  en  a  faite  dans  ses 
rapports.  Il  nous  parait  que  si  le  mot  géologie  a  pour  quel- 
ques-uns un  charme  particulier,  d'autres  n'y  attachent 
qu'un  sens  trop  restreint.  On  ne  se  dit  pas  assez  que  sous 
cette  désignation  générale  se  trouvent  compris  bien  d'autres 
objets  d'une  attribution  toute  pratique  :  de  belles  cartes, 
'habilement  élaborées,  du  territoire  entier,  avec  des  plans 
à  plus  lai^e  échelle  des  localités  d'une  importance  parti- 
culière; une  vaste  étude  de  la  configuration  physique  du 
pays,  comme  première  base  des  investigations  sur  le  cli- 
mat, sur  l'agriculture,  sur  les  facilités  de  communication 
et  les  conditions  de  salubrité  d'une  contrée  neuve  encore, 
et  qui  appelle  tant  de  développements;  une  analyse  toute 

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254  '  AMÉRiOtîK  D0  KOftD.  (n**  293-362.) 

nouvôile  au  isol  et  de  ses  couches  inféideul^s,  lion-lseuleitient 
soDU  letir  aspect  théoriquement  scientifique,  mais  surtout 
au  point  du  vue  des  applications  Usuelles;  enfin,  une  étude 
complète  dés  animaux  et  des  plantes  indigènes.  L'éte&due 
de  l'État,  ses  magnifiques  ressources,  les  beautés  qu'il 
renferme,  la  ra|)idité  merveilleuse  de  sbn  développement, 
ses  perspectives  de  ridiesse  et  d'iDflaence,  tout  œlâ  ren- 
dait fort  désirable  que  la  nouvelle  et  complète  ezplbratî<m 
fût  entreprise  sur  un  bon  plan,  d'après  de  bonnes  mé- 
thodes et  par  des  observateurs  compétents.  Toutes  ces 
conditions  ont  été  remplies.  Il  en  était  une  encore  tout  à 
fait  nécessaire  :  des  subsides  suffisants.  Il  y  a  eu  quelque 
hésiuticm;  mais  aujourd'hui  l'Etat  parait  déttdé  à  &ire 
achever  l'œuvre  comme  Jslle  doit  l'être.  Quelque  aifeiit 
qu'elle  ait  eoûté,  on  peut  affirmer  qu'une  telle  dépense  Ae 
sera  jamais  regrettée.  Les  principes  d'une  stricte  écMO^ 
mie  exigeât  eux-mêmes  qu'une  pareille  œuvre  soit  v%ett- 
reusement  poursuivie  et  complètement  achevée.  »  D'après 
le  relevé  qu'en  bit  M.  Gilman,  voici  quel  était  l'état  des 
pubhcatïons  au  commencement  de  l'année  1872  : 

l"*  Une  carte  de  la  baiB  de  San  Francisco  et  de  ses  envi- 
rons, à  l'échelle  de  S  tiaiUes  au  pouce;  2*  une  carte  «i  4 
feuilles,  à  Téchelle  de  6  milles  an  jpouce,  comprenapt 
60,000  milles  carrés  environ  (155)0<K)  kii.  carrés),  de  la 
partie  centrale  et  la  plus  peuplée  de  TËtat  :  deux  femlles 
de  cette  carte  sont  i  peu  près  terminée»,  et  les  deux  autres 
sont  jMtre  les  mains  des  gravefurs;  9^  une  earte  générale 
de  l'État,  à  la  fois  topo^phiqué  et  g$elegique,à  l'échdle 
do  18  milles  au  pouce,  également  trè^-avancée;  4»  quàti» 
volumes  dé  texte  iilus&é^  outre  le  Guide  Yosén^te^  et 
diverses  brochures,  le  premier  de  ces  volumes  consacré  k 
la  configuration  gfeérale  de  l'Étot,  les  deux  suivante  à  la 
paléontoiegie,  le  quatrième  à  Tmlithôlûgie*  Il  y  aumen 

1.  V.  le  précédent  Vol.  de  lUniWé  Géogrûphiguef  p*  110,  n«!t4l4 

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CALIFORNIE.  '255 

outre  un  Volume  jpour  la  botanique,  ud  autre  pour  la  cou- 
ehyliologie,  un  autre  pour  la  géologie  propre.  L'œuvre,  on 
le  voit,  a  des  proportionis  tout-à-  fait  monumentales. 

A  eôté  de  ces  appréciations  nationales  en  ce  qui  touche  le 
développement  et  les  remourcés  de  la  Californie,  on  verra 
avec  grand  intérêt  l'appréciation  étrangère  faite  dans  de 
bonnes  conditions  d'exactitude.  Voici  quelques  extraits  du 
rapport  adressé  au  ministre  de  la  Marine  et  des  Colonies 
par  Taillai  commandant  en  chef  la  division  française  de 
rOcéan  Pacifique.  Ce  rapport  cohtieiit  d'ailleurs  dés  infor- 
mations toutes  nouvelles  sur  la  colonie  française  de  S&n 
Francisco. 

D^uis  l'^oqne  à  laquelle  je  visitai  la  Californie,  en  novem* 
bre  1857,  jusqu'à  ce  jour,  que  de  progrès  en  tous  genres  à  con- 
stater, aussi  bien  dans  Tordre  moral  que  dans  Tordre  maté- 
riel! 

Le  comité  de  vigilance  qui  avait  purgé  San  Francisco  de  ses 
bandits,  }a  loi  de  Lynch,  encore  en  pleine  vigueur  dans  les  pla*- 
cers  éloignés,  ne  sont  plus  que  des  souvenii*  qui  ne  se  rçtroft- 
ventque  dans  la  conversation  des  plus  vieiq:  pionniers.  Partpiat, 
maintenant,  régnent  la  sécurité  et  le  respect  de  la  loi.  San 
Francisco,  avec  sa  p(H>ulation  de  172  000  habitants  dont  IQOpo 
Chinois,  est  parfaitement  gardé  par  un  corps  de  cent  poUce* 
mon,  et  ce  n'est  plus  que  dahs  les  districts  éloignés,  les  plu$ 
près  des  indiens,  dans  ces  parties  reculées  de  TjÉlat  o%  Tespcit 
d'aventures  conduit  encore  des  squatters  et  des  chercheurs  de 
nfines,  que  se  renouvellent  Iss  scènes  de  meurtre  et  les  appli- 
cations de  la  loi  de  Lynch  si  fréquentes  dans  les  premiers  temps 
de  cette  colonisation  cosmopolite. 

Cette  amélioration  morale  s'est  fait  également  sentir  ps^oii 
nos  compatriotes  si  fortement  mêlés  à  Torîgine. 

En  ce  moment,  il  n'existe  pas  ailleurs  un  point  où  Ton  puisse 
trouver  une  population  française  plus  patriote,  plus  travail- 
leuse, plus  sagement  économe  que  celle  qui  réside  à  San  Fran- 
cisco» Le  nombre  en  a  grandement  diminué  ;  de  vingt  à  vingt- 
cinq  mille  auquel  on  les  estimait  en  1857,  il  est  peut-être,  en 
ce  moment,  dans  tout  TËtat,  réduit  à  une  dizaine  de  mille,  dont 
trois  ou  quatre  mille  habitent  San  Francisco*  Quelques-uns 

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256  AMÉRIQUE   DU  NORD.  (n" 293-362.) 

seulement  ont  acquis  une  belle  position  de  fortune  ;  mais  l'ai- 
sance est  générale  parmi  eux,  et  Testime  dont  ils  jouissent  est 
universelle.  Cette  estime,  ils  la  doivent  à  leur  probité  en  affai- 
res, à  leurs  habitudes  de  travail,  et  aux  établissements  qu'ils 
ont  fondés  à  grands  frais  au  moyen  de  la  mutualité,  soit  pour 
venir  en  aide  à  toutes  les  infortunes,  sans  distinction  de  natio- 
nalité, soit  pour  inculquer  ou  fortifier  ces  principes  d'économie 
et  de  prévoyance.... 

Grâce  à  ces  institutions  si  libérales  et  si  utiles,  où  la  diffé- 
rence de  nationalité  n'est  jamais  une  cause  d'exclusion,  la 
colonie  française  de  San  Francisco  jouit  d^une  honorabilité  jus- 
tement méritée,  et  l'on  ne  voit,  pour  ainsi  dire,  jamais  le  nom 
d'un  de  nos  compatriotes  devant  la  justice  américaine. 

Pendant  la  guerre,  cette  population  a  donné  plus  d'un  mil- 
lion, et  plusieurs  de  ses  enfants  ont  quitté  volontairement  les 
positions  les  plus  belles  pour  courir  à  la  défense  du  pays. 

Le  commerce  français  est  à  San  Francisco  et  en  Californie 
ce  qu'il  est  partout  dans  le  Pacifique.  Les  nouveautés,  les  arti- 
cles de  Paris,  les  modes,  la  bijouterie,  la  parfumerie,  le  com- 
merce des  vins,  occupent  la  plus  grande  partie  de  nos  natio- 
naux. Quelques-uns  sont  à  la  tôte  d'importantes  maisons 
d'affaires,  ou  ont  fondé  des  fabriques  de  lainages  qui  donnent 
de  forts  beaux  résultats  ;  tandis  que  par  l'industrie  de  quelques 
autres,  le  jardinage,  et  surtout  la  culture  de  la  vigne,  se  sont 
si  largement  développés,  que  la  production  du  vin  s'accroît 
en  Californie  dans  une  vaste  proportion. 

Quant  à  notre  commerce  maritime,  il  a  été  représenté,  en 
1870,  par  20  navires  avec  9760  tonneaux,  et  en  1871,  par  14 
navires  avec  6328  tonneaux. 

Cette  diminution  dans  nos  importations  directes  à  San  Fran- 
cisco n'est  point  un  fait  isolé  dans  le  commerce  général  de 
cette  place  ;  la  facilité  des  transports  par  le  chemin  de  fer 
transcontinental  a  amené  un  résultat  semblable  pour  toutes  les 
importations  maritimes,  et  surtout  pour  celles  des  ports  des 
États-Unis  de  l'Atlantique.... 

On  ne  peut  parler.de  la  Californie  sans  dire  un  mot  de  sa 
production  minière. 

Si  on  ne  s'en  rapportait  qu'aux  publications  officielles,  .cette 
production  aurait  beaucoup  décru,  car  au  lieu  de  300  millions 
de  francs  environ  à  laquelle  on  l'estimait  en  1857,  nous  trou- 
vons, d'après  ces  documents,  que  les  exportations  d'or  et  d'ar- 
gent, en  1871,  n'auraient  été  que  de  U5  millions  de  francs.  Si 


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CAUFORNIE. 

on  y  ajoute  les  9k  millions  de  francs  de  pièces  d'or  et  d'argent 
frappées  cette  même  année  par  la  Monnaie  de  San  Francisco, 
on  n'arrive  qu'au  chi£fre  de  239  millions  de  francs.  Mais  si  l'on 
tient  compte  des  découvertes  récentes  démines  très  riches  d'or 
et  d'argent,  des  moyens  perfectionnés  employés  actuellement 
pour  leur  exploitation,  des  nombreux  capitaux  qui  sont  venus  en 
aide  à  l'industrie  minière,  on  ne  trouve  pas  exagéré  le  chiffre 
de  400  millions  qui  m'a  été  donné  comme  représentant  le  ren- 
dement actuel  des  mines  de  la  Californie. 

Ne  fût-il  réellement  que  de  239  millions  de  francs,  quelle 
situation  meilleure  actuellement  pour  ce  pays,  se  suffisant  non- 
seulement  à  lui-même,  mais  pouvant  exporter  90  millions  de 
francs  des  produits  de  son  sol,  quand  on  la  compare  à  celle  de 
l'époque  où  les  mines  lui  donnaient  300  millioDS,  mais  qu'il 
fallait  échanger  contre  des  objets  de  première  nécessité;  main- 
tenant nous  trouvons  qu'il  a  pu  vendre  à  l'étranger,  en  1871  : 

Laine 33 750000  fr. 

Blé 15  900  000 

Farines 8  700  000 

Vins 3  660000 

Eaux-de-vie  du  pays 555  000 

Fourrures 555  000 

Cuirs 1 905000 

Peaux 1  730  000 

Saumon  salé 740  000 

Bois  de  construction 1 610  000 

Mercure 4  985  000 

Minerais  de  cuivre 610  000 

Minerais  d'argent 4  900  000 

Métaux  divers  (l'or  non  compris).  4  100  000 

Produits  divers 6 280000 

Total 89  980000  fr. 

Les  exportations  générales  de  la  Californie  se  résument  pour 
1871  par  : 

Or  et  argent 144  770000  fr. 

Produits  du  pays 89980000 

Exportations  des  marchandises 
de  provenance  américaine  ou 
étrangère ' 55 185  000 

Total 289  935  000  fr. 

l'année  géogr.  XI.  r-  ^^    T 

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258  AMÉRIQUE   DU   NORD.  (n°*  293-362.) 

Le  produit  \inicole  de  la  Californie,  en  1871,  aurait  été  de 
7  millions  de  gallons,  soit  28  millions  de  litres  ou  128 OÛO  de 
nos  barriques  »  dites  ^bordelaises  ;  mais  comme  il  y  a  encore 
beaucoup  de  jeunes  lignes,  que  Ton  en  plante  continue Ikment, 
que  leur  rendement  est  énorme,  fabuleux,  dirai-}e,  on  pense 
qu'avant  cinq  ans  oe  produit rfiera  doublé^ 

iLes  plants  de  France,  d'Espagne,  d'Allemagne,  ;de  Madère, 
du  Levant,  n.ôme  loeux  de  la  vigne  sauvage  dfi  JCalifoinif.,  «ont 
été  mis  à  contribution;  mais,  partout,  ce ^ sont  les  .plants  fran- 
çais qui  dominent,  ce  qui  est  dû  autant  à  ileur  bonne  .qualité 
qu<'à  ce  qiie.ee  sont  nos  compatriotes  qui  ont  introduit  aaelte 
culture  en  Californie  comme  bu  Gbili. 

Jusqu'à  (se  moment,  les  vins  sont  de  médiocre  tqialitè;  ce- 
pendant, j'ai  trouvé  quelcpras  bons  ordinaires. 


S  4.  Le  dernier  recensement  des  États-Unis. 

Le  recensement  périodique  d'une  grande  nation  est  tou- 
jours un  important  sujet  d'étude  à  bien  des  points  de  vue; 
cela  est  viai  .surtout  pour  un  pays  tel  que  les  États-Unis,  où 
tous  les  éléments  nationaux,  où  toutes  les  forces  sociales 
sont  dans  un  travail  continu  de  développement  et  de  trans- 
formation. M.  le  vicomte  de  Borelli,  dans  une  note  commu- 
niquée à  la  Société  d'anthropologie  de  Paris,  a  mis  en  saillie 
quelques-uns  des  faits  généraux  qui  ressorlent  du  neuvième 
receii  sèment  de  l'Union  américaine  (voir  à  la  Bibliographie, 
n"349, 350,  35} ,  352),  particulièrement  en  ce  qui  touche  à 
Taccroissement  des  diverses  classes  de  la  population  aux 
États-Unis. 

,  L'augmentation  du  nombre  des  Noirs  {coloured  popula- 
tion) depuis  la  fin  du  dernier  siècle  se  réssume  ainsi  : 

1790 

Esclaves -697  681 

Libres.  .• 59^27 

lh60 

Esclaves 3  953760 

Libres  •..  •. 488  070 


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ÉTATS-CNIS.  259 

U70  (esclavage  aboli) 

Nombre  total 4  480  000 

'Voici,  pour  la  môme  période,  la  progression  de  la  popu- 
lation )3lanche  : 

Immigrants 

Date.  Population,  pendant  la  décade. 

1790 3172006 

1800 ,  4  306446 

1810 5862073 

.1820 7  862  166  250000 

1830 10537378  151824 

1840 14195  805  599  125 

1850 19553068  1713251 

1860 t:69.:2537  2508214 

1870 33586989  2491214 

Indiens.  Les  Indiens  îaxedy  c*est-à-dire  citoyens  des 
États-Unis  et  soumis  à  l'impôt,  étaient  en  1860  au  nombre 
de  44,021;  il  n'y  en  a  p^us  actuellement  que  25,731.  Le 
chiffre  a  donc  diminué  de  près  de  moitié.  C'est  dans  les 
£tats  de  Californie  et  de  Michigan  qu'ils  sont  le  plus  nom- 
breux : 

Eu  Californie 7241 

Dans  le  Michigan 4926 

Le  nombre  total  des  Indiens  se  décompose  ainsi  (18'  0): 

Taxés 25  731 

Nomades  (approxmativement) ...       ?3i 740 
Recensés Iî3  2^1 

Total  de  la  population  indienne . . .       a83  712 

En  somme,  les  33  586  989  hommes  de  race  blanche,  les 
4  480  000  Noirs  et  les  383  712  Indiens  ,' auxquels  il  faut 
ajouter  63  254  Chinois,  donnent  aux  [Êtatf-Unis,  à  Ja  date 
de  1670,  unfe  population  totale  de  38  513  955  ame^ 


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260  AMÉRIQUE   DU   NORD.  (n°'  293-362.) 

$  5.  Les  Indiens. 

Nous  avons  reproduit  sans  y  rien  changer  la  note  de 
M.  Borelli,  à  cause  des  indications  intéressantes  qu'elle 
donne  sur  plusieurs  points  ;  néanmoins  elle  présente,  en  ce 
qui  regarde  la  population  indienne  des  États-Unis,  des 
différences  assez  notables  avec  un  document  spécial  d'un 
caractère  officiel,  le  Rapport  du  secrétaire  d'État  du  gouver- 
nement de  Washington  pour  le  département  de  l'Intérieur 
(ci-dessus,  n*»  353  de  la  Bibliographie).  Ce  document 
mérite  d'être  reproduit. 

Le  rapport  que  nous  citons  est  bien  fait  pour  encourager 
ceux  qui  croient  les  Indiens  capables  de  civilisation.  La 
valeur  des  produits  agricoles  qu'ont  obtenus  cette  année  leurs 
différentes  tribus,  en  y  comprenant  celle  des  Cherokîs 
(pour  laquelle  les  chiffres  manquent  encore,  mais  dont,  en 
se  basant  sur  les  résultats  de  l'année  passée,  on  peut 
évaluer  la  production  k  plus  d'un  million  et  demi  de  dollars), 
s^élève  à  environ  dix  millions  de  dollars.  Les  Indiens  ont 
216  écoles,  avec  323  professeurs,  et  8920  élèves. 

Grâce  à  la  politique  pacifique  adoptée  par  le  Gouverne- 
ment, la  paix  n'a  été  troublée  que  par  quelques  tribus 
nomades  de  l'Arizona,  du  Nouveau-Mexique  et  du  Kansas 
occidental.  Elle  a  été  promplement  rétablie  parles  autorités 
militaires,  et  aujourd'hui  l'ordre  existe  chez  ces  populations 
que  l'on  contiendra  plus  facilement  à  l'avenir  en  obtenant 
des  plus  turbulentes  d'entre  elles,  ce  qu'il  est  permis  d'espé- 
rer, qu'elles  viennent  occuper  des  terrains  que  leur  réserve- 
rait la  République.  Il  serait  fort  à  désirer  à  ce  sujet  que  le 
Congrès  leur  concédât  avec  libéralité  des  vivres,  des  effets 
d'habillement,  du  matériel  de  culture. 

Sur  la  ligne  du  Nord-Pacifique,  dans  le  territoire  de 
Dakota,  les  Sioux  ont  fait  contre  le  railway  des  démonstra- 
tions hostiles,  que  de  prudentes  dispositions  ont  heureuse- 
ment neutralisées.  Il  faudra  d'habiles  ménagements  pour 

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ÉTATS-UNIS.  261 

se  concilier  l'amitié  de  cette  nombreuse  et  puissante  tribu. 
Les  faits  sont  de  nature  à  réjouir  les  partisans  de  la  poli- 
tique actuellement  suivie  à  l'égard  des  Indiens.  Non-seule- 
ment ceux  d'outre  eux  qui  sont  depuis  longtemps  en 
contact  avec  les  blancs,  comme  dans  l'État  de  New  York, 
le  Michigan  et  le  Wisconsin,  mais  même  les  Indiens  du 
Kansas,  du  Nebraska,  du  Territoire  indien,  dont  les  rela- 
tions avec  nous  sont  plus  récentes,  ont  fait  de  considéra- 
bles progrès  dans  la  civilisation,  tant  au  point  de  vue  de  la 
culture  du  sol  qu'à  celui  de  l'instruction. 

Le  nombre  d'Indiens  sous  la  juridiction  des  Ëtats-Unis 
est,  d'après  les  données  les  plus  approximatives,  d'environ 
321  000.  Dans  ce  nombre  sont  compris  les  75000  Indiens 
de  l'Alaska,  et  3663  autres  qui  ne  vivent  pas  en  tribus,  et 
sont  dispersés  dans  les  États  de  la  Floride,  de  la  Caroline 
du  Nord,  de  l'Indiana,  de  l'Iowa  et  du  Texas.  Mais  ceux- 
ci,  comme  ceux  de  l'Alaska,  échappent  en  fait  à  l'action  des 
nouvelles  mesures  adoptées  par  le  Gouvernement.  Les 
242  300  Indiens  sont  distriSués  ainsi  qu'il  suit  : 

Territoire  de  Washington 15  487 

—  Orégon 24503 

—  Californie 7  383 

—  Arizona 5  066 

—  Nevada 6  000 

—  Utah 12800 

—  No uveau- Mexique.. ..  18  640 

—  Colorado 7  300 

—  Dakota 27  815 

—  Idaho 4469 

—  Montana 18835 

—  Wyoming 2  400 

—  Nebraska 6410 

—  Kansas 6  0.52 

Indien 53476 

—  Minnesota 6337 

—  Wisconsin \ . . .  6  355 

—  Michigan 8093 

—  New  York..........  4804 

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262  AMÉRIQUE    DU   NORD.  (n°'  293 -362.) 

Lee  Ixidien.s  sous  la  juridiction  des  Étata-Gjais.  occupent 
aujourd'hui  des  concessions  de  torrainfl  d'une  surface  totale 
d'3  228473  milles  carrés,  soit  13.7  8 't6  971  acres.  En  en 
déduisant  le  Territoire  indien  au  sud  du  Katnsas,  il  reste, 
pour  172  000  Indiens,  une  étendue  de  terrains  réservés  de 
96  155  785  acres,  ou  558  acres  par  habitant.  Lsitarrain 
de  ces  concessions'  est  généralement  de  bonne  qualité,  et 
susceptible  d'une  culture*  productive.  Des  traités  en  garan- 
tissent la  possession  aux  Indiens  contre  l'immigration  des 
blancs. 

L9  Territoire  indien  proprement  dit.  est  situé  h  Touest 
du  Missouri  et  de  TArkansas,  etau  sudduKansas.  D'une 
superficie  de  44  154  240  acres ,  il  contient  environ  60  000 
habitants.  A  Test  du  96°  de  longitude,  le  sol  y  est  d'excel- 
lente qualité,  bien,  arrosé,  et  peut  largement  rémunérer  les 
travaux  du  colon,  A  Totlest  du  96%  entre  ce  degré  et  la 
vallée  de  l'Arkansas,  le  terrain  ^t  montagneux  et  d'une 
culture  moins  avantageuse.  Il  s'y  trouve  de  riches  dépôts 
de  charbon,  et  probablement.d'antres  mines  dont  Texploita- 
tion  serait  lucrative.  Dans  la  vallée  de  l'Arkansas,  le  sol 
est  d'une  excellente  qualité  sur  une  étendue  de  10  milles; 
plus  à  l'ouest,  quoique  moins  fertile  que  dans  la  partie 
orientale  du  territoire,  il  est  propre  à  l'exploitation:  le 
Territoire  indien  ne  compte  actuelle  ment  qu'un  habitant 
par  630  acres.  Si  Ton  pouvait  y  transporter  tous  les  Indiens 
de  la  République,  à  l'exception  de  ceux  de  l'Alaska  et  de 
ceux  qui  sont  dispersés  dans  les  États  nommés  plus  haut, 
chacun  d'eux  aurait  180  acres  de  terrain,  c'est-à-dire  plus 
qu'il  n'en  faut  pour  vivre  confortablement.  Et  d'un  autre 
côté,  leur  départ  des  territoires  qu'ils  occupent  aujourd'hui 
ouvrirait  au  travail  des  blancs  une  contrée  d'une  surface  de 
93  6  '2  731  acres.  Réunir  toutes  les  tribus  indiennes  dans 
un  territoire  comparativement' restreint  est  le  problème  qui 
s'impose  maintenant  à  nous.  De  sa  solution  dépend,  en 
grande  partie,  la   destinée    de   la    race    indienne.  Si  ses 

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ÉTAÎB-UNÎS*  263 

membreB  amy&Btà  se  faire  une  juste  idée  de  leur  av^n; 
ils  reconnaîtront  qu^à  moin&  d'accepter  les  bons  officeti  de 
notre  gouvernement,  et  de  s'efforcer  franchement  de 
travailler  pour  leur  part  au  progrès,  les  difficultés  et  les 
dangers  de  leur  existence  actuelle  ne  peuvent  que  s'aggraver 
parsuit&du  flot  croissant  de  rémigrstion  des^  blanûs.  qui 
réclament  chaque  jour  avec  plus  d'in "distance  les  terrain&de 
chasse  et  les^  concisions  actuellement  occupés  par  euz. 
Plusieurs  tribus  le  reconnaissent  et  sont  disposées  àfieprêter 
aur  mesure»  qne  nous  suggérera  le  soin.de.  leurs>intécôts  : 
avec  de  la  prudence- et  une  rigoureuse:  observation  des 
traités,  il  n^est  pas  douteux  qu'on  ne-puisfie  réussir  dansle 
plan  exposé  plus  haut. 

Ajoutons^  d'après  la  lettre  d'un  missionnaire  (Bibiiogr., 
n^  323),  un  détail  assezcurieux  sur  l'organisation  intérieure 
des  Ghérokîs,  la  principale  des  tribus  group.ée&  dans 
rindian  Territory  : 

«  Les  délégués  dee  douze tribusa}ntinnent.dof  se  réuniD et 
de  discuter  Ibs  lois  fondamentales  destinées-  à  senvicde^base 
à  la  Confédération.  La-  tribu  des  Ghérokîs  paraît  ne  pas 
être  favorable  à  Tadopti on  d'une  Constitution  écrite  ^  Son 
objet,  ainsi  que  le  disaient)  tout  dernièrement  saa  délégués, 
est  de  fonder  un  gouvernement  d'opinion^  avant.de  songer 
à  faire  un  gouvernement  de  paroles. 

«  Nous  devons,  ont  dit  les  chefs  de  la  tribu,  noua  occu- 
c  per  à  graver  les  institutions  dans  le: coeur  de  nos  conci* 
c  toyens-;  celles-là  seul  es  sont  durables.  Quant  à  les.inscrire 
«  sur  du  papier,  autant  vaudrait  les  confier  à  l'éconce  de 
c  l'arbre;  Le  chêne  de  la  forêt  croît  tous  les  an»,  et  il  change 
«  d'éoorce  chaque  année.  li  en  est  de  même  de.  la>  nation 
c  indienne;  Il  n'y  a  que  deux  choses  qui  ne  passent  point: 
m  TeE^rit  de. l'homme  et  le  cœur  du  chêne.  Tenonsrnous-en 
«  à  l'esprit,  si  nous  voulons  vivre  et  durer.  » 

«0  Au  départ  du.  dernier  courrier.,  on  était  généralement 
d'avis  délaisser  sommeiller  les questions.constitutionnelles, 

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264  AMÉRIQUE   DU  NORD.  (n*' 293-362.) 

pour  ne   s'occuper   que  de  Torganisation  intérieure  des 
tribus  et  des  rapports  qui  doivent  les  lier.  » 

S  6.  Notes  archéologiques. 

Jetons,  avec  M.  Baldwin  (n«355),  et  avec  l'examen  sub- 
stantiel q/i'une  plume  compétente  en  a  fait  dans  YAthe- 
nxum  de  Londres,  un  caup  d*œil  sur  les  anciens  temps  de 
la  race  américaine. 

Ge  que  nous  savons  des  origines  américaines,  nous  le 
devons,  en  partie,  aux  observations  des  récents  explora- 
teurs, en  partie  aux  récits  plus  ou  moins  impartiaux,  plus 
ou  moins  dignes  de  foi  des  Espagnols  du  seizième  siècle. 
Ces  observations  et  ces  récits  sont  consignés  dans  de  nom- 
breux volumes  écrits  en  espagnol  ou  en  allemand,  en  fran- 
çais ou  en  anglais,  et  beaucoup  de  ces  poudreux  in-folios 
ne  sont  pas  d'un  accès  facile  pour  la  généralité  des  lec- 
teurs. Réunir  ces  matériaux  épars  et  en  présenter  une  vue 
d'ensemble,  tel  est  l'objet  que  s'oÉft  proposé  M.  Baldwin. 

Les  restes  de  l'ancienne  civilisation  américaine  —  la  ci- 
vilisation autochthone  antérieure  à  Tarrivée  des  Européens 
—  se  retrouvent  dans  trois  foyers,  dans  trois  centres  sépa- 
rés mais  presque  contigus,  ou  du  moins  reliés  entre  eux 
par  des  vestiges  intermédiaires. 

Geluji  du  Nord  embras&e  la  vallée  du  Mississipi  et  de  ses 
tributaires;  c'est  un  large  triangle  dont  le  sommet  toucha 
aux  grands  lacs,  et  dont  la  base  s'appuie  au  golfe  du 
Mexique. 

Le  foyer  central  couvre  le  plateau  mexicain  et  se  pro* 
longe  dans  l'isthme  qui  relie  les  deux  Amériques  ;  il  com- 
mence à  la  vallée  du  Nouveau-Mexique  et  aux  plaines 
d'Arizona,  et  se  termine  au  delà  du  Yucatan  et  du  Guate- 
mala. 

Le  troisième  foyer,  celui  du  Sud,  occupe  une  longue 
bande  de  pays  entre  le  Pacifique  et  les  Andes,  depuis  le 

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ORIGINES  AMERICAINES.  265 

voisinage  de  Quito,  sous  l'équateur,  jusqu'au  delà  du 
plateau  péruvien  et  aux  approches  de  la  frontière  du 
Chili. 

I.  Si  nous  partons  de  la  première  de  ces  trois  divisions, 
celle  du  Mississipi,  communément  désignée,  dans  la  lan- 
gue des  archéologues  américains,  sous  le  nom  de  région 
des  «  Mound-Builders,  »  nous  trouvons  dans  les  territoires 
les  plus  septentrionaux,  dans  le  Michigan,  le  lowa,  le 
Missouri,  et  particulièrement  dans  le  Wisconsin,  —  c'est- 
k-dire  au  pourtour  méridional  des  grands  lacs,  —  une 
étendue  de  pays  caractérisée  par  la  présence  de  vastes 
monticules  artificiels  (mounds)  auxquels  les  constructeurs 
primitifs  ont  donné  les  formes  bizarres  de  divers  animaux, 
oiseaux,  serpents,  etc.,  et  quelquefois  aussi  la  forme  hu- 
maine dans  des  proportions  gigantesques.  Puis  vient  une 
seconde  région  dont  l'État  d'Ohio  peut  être  regardé  comme 
le  centre,  bien  qu'elle  embrasse  la  vallée  tout  entière  de 
rOhio  et  de  ses  tributaires,  comprenant  la  Virginie  occi- 
dentale, rindiana,  une  partie  du  Michigan,  Tlilinois,  et  de 
plus  le  Missouri.  Ce  qui  caractérise  cette  région  archéolo- 
gique, ce  sont  des  monticules  ou  mounds  de  forme  pyra- 
midale, hauts  habituellement  de  deux  à  neuf  ou  dix  mètres, 
mais  s'élevant  parfois  jusqu'à  vingt  et  trente  mètres.  Leur 
forme  ordinaire  est  celle  d'un  carré  ou  d'un  rectangle,  et 
l'on  y  monte  par  des  degrés  extérieurs.  Cette  région  est 
remarquable  encore  par  des  lignes  de  retranchements,  des 
levées  de  terre  hautes  d'un  mètre  et  demi  à  neuf  ou  dix 
mètres,  formant  ainsi  des  enceintes  retranchées  d'une 
étendue  très-variable,  depuis  un  hectare  jusqu'à  vingt  et 
vingt-cinq,  mais  s'étendant  parfois  jusqu'à  cinquante,  cent, 
cent  cinquante,  trois  cents  hectares.  U  ne  se  trouve  pas  moins 
de  dix  mule  pyramides  et  quinze  mille  enceintes  retranchées 
dans  l'Ohio  seul.  U  y  a  eu  là,  évidemment,  un  centre  de 
population  native  extrêmement  considérable. 

Continuons  de  descendre  la  vallée  du  Mississipi.  Dans 


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266  AMÉRIQUE   DU  NORD:  (n"'  293-362.) 

les  plaine&fbrtiles  qui* bordent. le  golfe dii  Mexique^  eiiiâW 
vançant  à  l'ouest  jusqu'&a  delà^  dn  Rio  fiistudB^  las^eoi- 
ceintes  deviennent  plus  petites  et  moins  nombreuses^,  en 
même' temps  que  les  montioules^  peut-être  plns^m)mbreux 
encore  et  conservant  le  même  caractère ^  sont  moin  s^élevéa. 
Gène  sont  plus  que  des  pyramides^ tronquées,  our plutôt  des 
platée- formes  k  quatre  faces.  De  laides- terras8BSi,.des pas^ 
sageB<  élevés,  des aguadas  ou. réservoirs  artiôcielS)  sont,  avec 
l'emploi  de  briquea  séchées  au  soleil^  les- traits  particuliers 
à  cette  troisième  circonscription;  ces<  reste»  d'anciennes 
coH&ftruGtions  s'y  rapprochent  beaucoup  plusi  que  œlleft^  de 
rOhio  du  caractère  des  monument»  de  l'Amérique  centnde. 
G'eet  une  transition. 

£n  somme,  lesf  constructeurs  des  monticules  du  Nord» 
les  mound'-builders^  paraissent  être  resté&t  à  un. degré* de 
culture  inférieur  à  celle  de  leurs  congénères  de  la  zonfitoen- 
traie  (l'Anafanac  et  Tlsthme)  et  des  Andea  du  Sud.  Glétât 
néanmoins  un  peuple  agricole;  ils  avaient  l-usag^  de& éJlof* 
fes  tissées,  et  leurs  poterie»  se  montrent  parfois  presque 
égales  à  celles  du  Pérou.  Ou;  ai  quelque  lieu  de  suppiosar 
qu'ils  avaient  une  certaine  connaissance  de  rastronomie^ 
Leurs  outils  et. d'autres  ustensiles. étaient  en.  cuivrci  en.ar^ 
gent  et  en  diverses  pierres  dures^.le  porphyre,  le  greystona-^ 
Tobsidienne. 

II.  Au  Mexique  et  dans  l'Isthme,  nous  trouvons  ^ale- 
nrent  les  antiquités  natives  distribuées  en  trois  ciroonscrip  < 
tiens  distinctes.  Dans  le  Ghiapa,  le  Tabasoo^  l'Oaxaoa^.le 
Yucatan,  le  Honduras,  le  Tehuantepec  et:  la.  Giiatamada^ 
les  ruines  consistent  en  villes  étendues  bâties  en  pierca,.  en 
palais  ornés  de  riches  sculptures,  et  s*élevant  sur  de-hautes 
plates-formes  pareilles  à  celles  du  bas  Mississipi,  les- 
quelles, selon  toute  probabilité,  eurent  la.  même  destina- 
tion.  Cette  circonscription  contient  sans  douta  les  reates^de 
la  civilisation  la  plus  andsnne  de  la:  zoneoentraie.da  l'A»- 
mérique;  bien •  que  quelques-unes  des  citë& du. Yocatan, 

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ORIGIN&S  AMÉRICAINES.  267 

TJxmal  par  exemple,  paraissent  avoir  été  encore  habitées 
au  temps  de  la  conquête,  les  habitants  ne  savaient- rien  de 
Tilles  plus  anciennes.  La  plupart  de  ce8viliesen>  ruine  ont 
été  envahies  par  la  végétation,  et  l'on  sait  que  d'autres 
cités  gisent  ensevelies  au  milieu  des  forêts  à  peu  près 
inexplorées. 

On  est' mieux  renseigné  surla  ciiiconscription  mencadne^ 
centre  de  la  civilisation  aztèque ^ au- tomp^- de  la  conquête; 
et  bien  qu'on  ait  quelques  doutes  sur  certains  points  des 
premières  descriptions  espagnoles  de  la  ville  de  Mexico^  il 
e^t  indubitable  qu'un  état  dé  civilisation  relativementïéle^^ 
quoique  inférieur  à  celui  du  Oaxaca,  du  Yucatan  et  du 
Guatemala,  existait  dans  la  célèbre  vallée  où  s'élevait  la  ca- 
pitale aztèque,  avec  ses'  palais  et  ses  grandes  constmotions 
religieuses, 

La  troisième  circonscription  de  la  zone  centrale,  —  la 
première  en  partant  du  nord^  et'  la  première  aussi  dans 
Tordre  des  temps,  —  se  trouve  dans  le  Nouv»aurMexique 
et  r Arizona,  parmi  les  Indiens  PaebloS)  comme*  on  lei 
nomme,  dont  l'état  sociàF  a  pour- trait' caractéristique  un 
mode  d'habitation  tout. à  fait  particulier.  Qu'où  imagine  un 
vaste  bâtiment,  un  grand  massif  de  forme 'quadrangulaire 
et  composé  de  trois  ou  quatre  étages  sup^posés,  chaque 
étage  divisé  en  petites  cellules  oii  sont  réparties  le&ifamil^ 
les  :*  c'est  là'j  dans  cette  construction  unique^  qu^estiooncea-' 
trée  toute  la  communauté.  Ce  sont  des  villages  d'une  nai!- 
ture  toute  spéciale.  La  construction,  dans  son  ensemble^ 
n'est  pas  sans  analogie  avec  quelques-uns  des  grande  édi- 
fices qui  se  voient  plus  loin  dans  le  Sud,  tels  que  lé^palais 
de  Palenqué,  ou  la  «  Gà«a  del  Gobemador  »  à  Uxmali.Ges 
bâtiments  communs  étaient  en  usage  au  temps- de- la  ooa* 
quête,  et  on  en  trouve  encore  d'habités  en  quelques  en- 
droits. Les  Puébios  ont  un  degré  de  culture  trèfl-supérieur 
aux.tribus  errantes  du  Nord,  avec  lesquelles  ils  sont  cons- 
tamment en  guerre. 

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268  AMÉRIQUE   DU  NORD.  (n^*  293-362.) 

III.  Dans  le  Pérou  encore,  les  ruines  consistent  en  cités, 
en  palais,  en  forteresses,  en  grands  travaux  publics,  no- 
tamment en  aqueducs  et  en  routes  pavées,  admirablement 
construites  dans  toute  retendue  de  TEmpire^.  Le  caractère 
des  constructions  péruviennes  différait  de  ceux  de  l'ar- 
chitecture aztèque.  Elle  était  généralement  unie  et  d'ua 
style  massif.  Les  temples  des  Péruviens  n'avaient  pas  la 
forme  de  pyramides  tronquées,  et  leurs  grands  édifices  ne 
s'élevaient  pas  sur  des  terrasses.  Leurs  outils  étaient  en 
bronze,  quoiqu'ils  connussent  le  fer.  Leurs  notions  astro- 
nfbiiques  paraissent  avoir  été  inférieures  à  celles  des  Amé- 
ricains du  Centre. 

En  dehors  de  cet  ensemble  de  faits  réunis  avec  soin  et 
discernement,  nous  ne  suivrons  pas  l'auteur  dans  ses  rai- 
sonnements sur  l'origine  et  la  génération  des  civilisations 
américaines.  II  admet,  ce  qui  paraît  tout  à  fait  manifeste, 
que  la  civilisation  péruvienne  et  celle  de  l'Ânabuac  ont  eu 
leur  développement  distinct  et  isolé;  mais  quanta  la  cul- 
ture morale  et  matérielle  des  diverses  régions  du  Centre 
et  du  Nord,  il  serait  enclin  à  en  tracer  la  marche  du  Sud 
au  Nord,  tandis  que  la  contraire  parait  infiniment  plus  pro- 
bable. Sur  un  autre  point  considérable,  l'auteur  paye  son 
tribut  aux  hypothèses  qui  ont  dominé  si  longtemps  dans  les 
spéculations  scientifiques,  à  savoir,  les  prétendues  analo- 
gies fondamentales  que  des  savants  sans  critique  ont  cm 
trouver  entre  l'Ancien  et  le  Nouveau-Monde,  et  les  consé- 
quences que  l'on  en  tirait  sur  les  origines  de  la  civilisation 
plus  ou  moins  développée  des  indigènes  américains.  U  faut 
bien  admettre  un  foyer  originel  de  civilisation  au  sein  de 
l'espèce  humaine  ;  mais  on  semble  reculer  devant  l'idée 
que  le  même  fait  psychologique  ait  pu  se  produire  au  sein 

1.  Sur  ce  sujet  des  antiquités  péruviennes,  il  faut  renvoyer  au  re- 
marquable travail  de  M.  Squier,  que  nous  avons  analysé  dans  notre 
précédent  volume  (p.  162),  et  à  celui  de  M.  Cléments  Markham  dans 
le  volume  actuel  (ci-dessus,  p.  213,  n*  251). 

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SOCIÉTÉS  SAVANTES.  269 

de  plusieurs  races,  dans  la  mesure  des  facultés  et  des  apti- 
tudes propres  à  chaque  race.  II  n'y  a  là,  certes,  rien  qui 
puisse  froisser  le  sentiment  religieux  non  plus  que  le  sen- 
timent philosophique;  et  Ton  peut  dire  qu'aucun  phéno- 
mène ne  s'accuse  avec  plus  d'évidence  que  celui-là  dans 
l'histoire  de  l'humanité. 


S  7.  Sociétés  savantes  et  associations  scientifiques. 

La  Société  de  géographie  de  New  York,  fondée  en  1854 
et  à  qui  Ton  doit  déjà  de  très-intéressantes  publications, 
vient  de  reprendre  non  pas  le  cours  de  ses  travaux,  qui 
n'ont  pas  été  interrompus,  mais  la  suitQ  de  son  Journal 
suspendu  pendant  la  guerre  de  sécession.  La  deuxième  par- 
tie du  tome  II,  qui  a  paru  récemment,  contient  les  procès- 
verbaux  des  séances  de  la  Société  pour  les  années  1868, 
1869  et  1870,  avec  YAddress  du  président,  M.  P.  Daly, 
pour  la  dernière  de  ces  trois  années.  Sept  mémoires  sur 
des  sujets  variés  de  géographie  générale  complètent  cet 
important  fascicule.  Un  discours  de  M.  Hayes  développe  un 
plan  d'exploration  polaire,  que  jusqu'à  présent  il  ne  lui  a 
pas  été  donné  de  réaliser^;  un  mémoire  sur  le  même  sujet 
est  dû  au  capitaine  Silas  Bent,  de  la  marine  américaine. 
M.  de  Costa  remonte  aux  premiers  voyages  des  Northmen, 
c'est-à-dire  des  Norvégiens  et  des  Danois,  dans  les  parties 
de  r  Amérique  qui  avoisinent  le  Groenland  et  l'île  de  Terre- 
Neuve.  M.  Hartt,  le  savant  naturaliste  à  qui  la  science  est 
redevable  d'un  des  meilleurs  livres  que  nous  ayons  sur 
le  Brésil  (voir  notre  précédent  volume,  p.  173,  b?  320,  et 
175),  a  donné  ici  un  mémoire  «  sur  la  géologie  du  Brésil.  » 
M.  Parker  traite  «  de  l'origine  astronomique  du*  magné- 
tisme polaire,  »  et  M.  Sterry  Hunt  «  des  volcans  et  des 
tremblements  de  terre.  »  Enfin,  notre  compatriote  Paul  du 

l.  Voir  notre  précédent  volume,  p.  405,  n»  734. 

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270  AMÉRIQUE   DU   NORD.  (n°'  293-362.) 

Ghaillu,  qui  a  conquis,  il  y  a  quelques  années,  une  .si  ra- 
pic'e  popularité  par  sa  relation  de  la  Terre  des  Gorilles 
(le  pays  de  YOgovai),  donne  un  curieux  mémoire  «  sur  la 
race  défi  Pygmées  de  l'Afrique  équatorialei,  »  peuple  dont 
le  nomest  Obongo,  et  qui  semble  appartenir  à  la  même 
famille  que  les  Dokko  elles  Akka  de  l'Afrique' équatoriale*. 
Nous  avons  eu  déjà  occasion  de  citer  VAddress  annuelle  de 
1872,  qui  a  eu  pour  auteur  M.'  Gilman,  et  qui  touche 
presque  exclusivement  à  des  sujets  américains.  La  Société 
de  New  Yoik  embrasse,  on  le  voit,  le  champ  tout  entier 
des  sciences  géographiques,  sans  compter  le  riche  domaine 
de  l'ethnologie  et  delà  géographie  américaines,  où  il  reste 
encore  tant  d'investigations  à  poursuivre  et  tant  de  questions 
à  résoudre. 

Sur  ces  derniers. sujets,  on  doit  à  Tlnstilut  Smithsbnien 
la  publication  de  précieux  travauit.  Comme  toujours,  le 
dernier  Rapport  annuel  du  bureau  de  ce  grand  établisse- 
ment scientifique  (ci -dessus,  n°  257)  renferme  des  mor- 
ceaux de  rintérêt  le  plus  varié.  L'Institut  Smithsonien  a 
^  pour  origine  le  legs  fait  .par  un  généreux  citoyen  au  gou- 
vernement des  Etats- Uois,  pour  la  fondation  d'un  établis- 
sement des'iné  à  favoriser  le  pro^^rès  et  la  diffusion  de  îa 
science  dans  le  monde  entier  ^.  Il  possède  aujourd'hui  un 
vaste  bâtiment  contenant  une  biblioihèque  nombreuse,  des 
instruments  nécessaires  aux  recheiches  scientifiques,  et 
des  musées  dont  les  iichesses  .s'accroissent  xapidement 
par  les  dons  et.leséihai^geF.  Chaque  année,  il  fait  paraître 
trois  clasfies  de  publications.  La  première  comprend,  sous 
le  titrcgécéral  de  Contributions  ta  knowledge,  une  série  de 
volumes  in-4*'  qui  consistent  en  jnémoires  donnant  pour 

1.  Sar  les  Akkv,  vjoir  le  rapport. d^.iiiu  du  D'  Schweinfurth,  ci- 
dessus,  p,  23. 

2.  Nous  emirui.loni:  cette  nolice  au  Journal  des  savants. 


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INSTITUT  SMITHSONIEN.  271 

la  science  des  Tésultats  nouveaux  dus  à  des  recherches 
originales  provoquées  ou  aidées  par  riB&titut.  La  seconde, 
qui  porte  .le:.titre  àBjîisadIaneous  Collections,  est  -surtout 
destinée  à  la  prop^^gation  des  «eonnaîssances  scientifiques 
parmi  le  grand  public;  elle  se  compose  de  volumes  in-S<> 
pôlatife,  pouriktpluparty  àirhistoire  înaturelle,  à  Petbno- 
kigie  fit  à  ila  météorologie.  Les  'Rapports  annuels,  avec 
kurs  appendîoes,  forment  la  trmsième  série;  ils  soLt 
pcéâentés  au  Congrès  ^t  publiés  £ux  frais  du  ^ouverne- 
mfint. 

.Le  dernier  rapport,  .outr^  des  renseignements 'sur  l'or- 
ganisation de  rinstitut  et  diveis  documents  administratifs, 
contient,  comme  de  coutume,  un  appendice  étendu  eom- 
pjfenant  un  grand  nombre  de  mémoires  ;  quelques-uns  sont 
(Triginaui^  d'autres  sont  des  traductions  de  travaux  étran- 
gers, déjà  publiés  en  diverses  langues.  Parmi  ces  derniers, 
ceux  des  savants  français  tiennent  une  large  place;  les 
noms  de  MM.  Bertrand,  Élie  de  Beaumont,  Marey,  Ba- 
binet,  Becquerel,  s'y  trouvent  à  côté  des  noms  de  plu- 
sieurs savants  ai  glais,  allemands,  italiens  et  suisses.  On 
remarquera,  dans  le  Rapport  du  stcrélaire,  des  notes  inté- 
re^BôantfiS  pour  l-e^imographie  sur  divers  objets  recueillis 
récemment  ohez  un  grand  nombre  de  tribus  de  T. Amérique 
du  Nnrd,  et,  dans  l'appendice,  un  travail  du  généralJ.  H. 
Simpson  sur  rexpédition  du  Coronado,  tmvoyée  en  1540 
par  le  vioe-roi  du  Mexique  à  la  recherche  des  «  sept  cités 
de  Gibûla  \,  »  Nous. signalerons  encore  les  uRemarques  du 
docteur  Arthur  Schootsur  la  colossale  figure  de  stuc  connue 
sous  le  nom  de  Gara  gigafitesca  d  Yzamal,  et  très-imparfai- 
tement décrite  par  Stephens  dans  ses  Incidents  of  iravel 
in  Yucaian. 

Je  jae  puis  mB  .refuser  au  plaisir  de  ciier  .les  réflexions, 
aussi  censées  qu!ûj)porlunes,  du.sava.nt  secirétai.  e.de  TAs- 

l.  Voirtci'-desfius,  p..  239,  .i)*>  35*. 

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272  AMÉRIQUE  DU  NORD.  (n^*  293-362.) 

sociation  smithsonienne  sur  la  marche  actuelle  et  la  mé- 
thode des  investigations  ethnologiques,  heureux  de  retrou- 
ver là  des  vues  (jue  j'ai  moi-même  exprimées  en  plus  d'une 
occasion,  moins  bien  et  avec  moins  d'autorité. 

c  L'ethnologie,  il  faut  le  reconnaître,  est  aujourd'hui 
dans  une  condition  élémentaire,  je  veux  dire  dans  la  pé- 
riode que  toute  science  doit  nécessairement  traverser,  celle 
de  la  collection  des  matériaux  ;  les  déductions  que  Ton 
peut  actuellement  tirer  des  faits  acquis  ont  donc  un  carac- 
tère essentiellement  provisoire.  Il  est  vrai  que  des  témoi- 
gnages de  rancieûneté  de  l'homme  sur  la  terre,  plus 
grande  qu'on  ne  Tavait  admis  jusqu'à  présent,  se  sont 
accumulés  d'année  en  année  ;  néanmoins,  on  ne  peut  dire 
en  toute  sincérité  que  la  question  soit  pleinement  résolue. 
On  peut  trouver  d'autres  hypothèses  que  celles  qui  ont  été 
mises  en  avant  pour  expliquer  les  faits  observés.  L'inves- 
tigation, dans  tous  les  cas,  doit  être  poursuivie  sans  s'ar- 
rêter à  des  idées  préconçues.  Soyons  certains  que  la  reli- 
gion et  la  vraie  science  ne  peuvent  être  en  opposition  : 
Tune  bien  comprise,  l'autre  exactement  interprétée,  s'ac- 
corderont dans  le  résultat  final.  Nous  devons,  en  un  mot, 
nous  attacher  à  cette  règle  posée  par  l'évêque  de  Londres, 
dans  une  conférence  tenue  à  Edimbourg,  «  que  l'homme 
«  de  science  doit  suivre  sa  marche  honnêtement,  patiem- 
«  ment,  avec  réserve  et  défiance,  observant  les  faits,  en- 
ce  registrant  ses  observations,  et  suivant  sans  dévier  ses 
ce  raisonnements  jusqu'à  leurs  conclusions  légitimes,  con- 
c  vaincu  que  ce  serait  trahir  à  la  fois  la  majesté  de  la 
«  science  et  la  majesté  de  la  religion,  que  de  dévier  de  parti 
«  pris,  si  peu  que  ce  puisse  être,  de  la  droite  ligne  de  la 
«  vérité.  »  Il  faut  d'ailleurs  se  garder  de  prendre  pour 
vérités  absolues  les  hypothèses  provisoires  de  la  science, 
et  ne  pas  vouloir  expliquer  prématurément  les  contradic- 
tions apparentes  qtii  peuvent  se  présenter  entre  les  deux 
grands  domaines  de  la  pensée,  contradictions  qui,  après 

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INSTITUT    SMITHSONIEN.  273 

tout,  ne  proviennent  peut-être  que  de  nos  vues  incomplètes 
de  la  connexion  des  phénomènes.  » 

Il  n'est  pas  sans  intérêt  de  rappeler  les  principaux  docu- 
ments, relations  ou  mémoires  relatifs  aux  sciences  géogra- 
phiques ou  à  Tethnographie,  publiés  depuis  sa  création  par 
l'Institut  Smithsonien.  En  voici  le  relevé  : 

Grammar  and  Dictionary  of  the  Yoruba  language,  wilh 
an  introductory  description  of  the  country  and  people  of 
Yoruba;  by  the  Rev»  J.  Boweii^  1858.  (Smiths.  Con- 
trib.  X.) 

A  Dictionary  of  the  Chinook  jargon  (Oregon),  by  G. 
Gihhs,  1863.  (Miscell.  Collect.  VU.)- 

Vocabulary  of  the  jargon,  or  trade  language,  of  Oregon, 
byD'  Rush  Mitchell,  1853.  (In-8<>,  22  pages.) 

Instructions  for  research  relative  to  the  ethnology  and 
philology  of  America,  by  the  same,  {Ibid,) 

Arcbœology  of  the  United  States,  or  sketches,  historical 
and  bibliographical,  of  the  progress  of  information  and 
opinion  respecting  vestiges  of  antiquity  in  the  .U.  S.,  by 
Sam.  F.  Haven,  1856.  (Sm.  Gontr.  YIII.) 

Publication  capitale. 

,  The  antiquities  of  Wisconsin,  by  A.  Lapham^  1855. 
[Ibid.  VII.) 

Observations  on  mexican  history  and  archaeology,  by 
Br.  Mayer,  1856.  {Ibid.  IX.) 

Grammar  and  Dictionary  of  the  Dakota  language,  edited 
by  Rev.  R.  Riggs,  1852.'  (Sm.  Contrib.  IV.) 

Ancient  monuments  of  the  Mississipi  valley,  by  E.  G. 
Squier  and  E.  H.  Davis,  1847.  {Ibid.  I.) 

Aboriginàl  monuments  of  the  state  cf  New  York,  by 
E.  G.  Squier,  1850.  {Ibid.  II.) 

Portraits  of  North  American  Indians,  with  sketches  cf 
scenery,  etc.,  by  J.  M.  Stanley,  1852,  in-8**,  76  pages, 
(Miscell.  G  IL) 

L* ANNÉE  GÉCGR.  XI.  18 

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274  AMÉRIOUE  DU  NORD-  (n'»^  293-362.) 

Qoiitributioiis  to  the  physical  geography .  of.  ther  United 
States.  Part.  1.  On  thôr  phy€âeal  gwgwfliyt  of  the-Missi»- 
sipi  Valley,  by  Ch.  Ellet,  1850,  in-4%  64  p.  et  1  pi.  (Smiths 
Gontrib.  IL) 

Geological  researches  in  China»  Mongolià,  and  Japan, 
18^2-65,  by  Raph.  Pumpelly^  1866,  in-4%  173  pages, 
9  pi.,  etc.  {Ibid.  XV.). 

Physical  observations  in  the  Arctic  seas,  by  Is.  J.  Hayes^ 
1860-61.  Published,  1867,  in-4,  286  p.  {Ibid.  XV.) 

Physical  observations  in  the  Arctic  seas,  by  E.  K.  Kane, 
1853-55.  Publ.  1860,  in-4«,  340  pages ,''(/6irf.  X,  XI,  XII, 
XIII.) 

S  8.  L'Alaska. 

Terminons  cet  exposé,  bien  rapide  malgré  son  étendue, 
des  récents  travaux  géographiques  aux  États-Unis,  par 
quelques  mots  sur  l'Alaska,  —  ce  vaste  territoire  boréal 
qu'on-  appelait  naguère  l'Amérique  russe;  les  renseigne- 
ments que  nous  allons  transcrire  nous^  sont  fournis  par 
VAddress  de  M.  Qiiman  au  sein  de  la  Société  de  géogra- 
phie de  New  York. 

La  reconnaksance  du  capitai&e  G«  W..Raynumd;siirla 
rivière  Yukon,  commencée  au  printemps  de  18619,  futr.ter^ 
minée  daos  l'été  suivant;. et  le:.rapf»rtp  acoûiQpagnA<â!ime 
carte  (ci-dessus,  n^  362),  a  été  soumisi au: jQongrà.vâEL avril 
1871.  Le  point  principal  de  Pexploraiion  était ia  détecmi- 
nation  astrononmque  du. fort  Yukon,  longitoda  et  latitude.. 
L'exploraticKQ  devait  aussi .  poirteri  somi  attentîoii  snr>  letcom- 
merce  de  la  contréd|  et. examinée  la  condition  des. tribsu  na- 
tives* Il  ét9.it  également  char;g[é  de  constater,  autant'  que.  pos- 
sible, les  ressources  du  fleuve  Yukon. et  de  se&txibutaiiee. 

Le  fort  Yukon,  qui  marque  le  point  le.  plus  septofilrio- 
nal  du  fleuve^  était,. jusqu'à  ces  dërnièree tannées^  la. sta- 
tion extrême  à  l'ouest  de  la  Compagnie  de.  la  baie^d'Had- 

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ALASKA.  275  • 

son.  On  le  regardait  néanmoins  comme  se  trouvant  à 
Touest^  de- lât  limite  anglo«riisse^  et  dans  oe  cas  son  .établis- 
sement était  contraire  aux  terme» du  traité  entre.la  Grande- 
Bretagne  et  la  Russie.  Les  Russes  avaient  donné  fort  peu 
d'attention  à  cette  question. in temationale^  mais  il  n'en  fut 
plus  dé  même  des  Américains,  qui,  après  Tacquisition  de 
FAlaska,  commencèrent  à  remonter  le  fleuve  dans  un  Lut 
de  commerce.  Il  devenait  donc  important  de  fixer  l-exaote 
position  du  fort  :  le  capitaine  Raymond  s'offrit  pour  cette 
tftche  délicate.  Un  petit  steamer  fut  approprié  à  ce  serriee. 
On  commença  à  remonter  le  fleuve  le  4  juillet  1869;  le  31 
du  même  mois  on  atteignait  le  fort,  après  un  trajet  entiè- 
rement par  eau  dcplus  de  1600  kilomètres.  La  latitudi  ^nt 
déterminée  à  66*  33' -(à  7";  et  pour  la  longitude  les  obsevt- 
tions  donnèrent  145*»  17' 47"  à  PO.  de  Greenwich  (147  37' 
57*  0.  de  Paris).  La  question  de  nationalité  était  fixée*  ; 
le  fort  est  sur  le  territoire  américain.  La  Commission  en 
prit  possession  le  9'  août,  et  ob  y  arbora  le  drapeau  de 
rUnion. 

La  carte  construite  par  le  capitaine  Raymond  présente 
les  résultats  géographiques  de  l'expédition.  Les  cartes  an- 
térieures étaient  basées  sur  celle  du  lieutenant  russe  Za- 
goskïn,  qui  fut  levée  de  1842  à  1843,  avec  les  corrections 
et  les  additions  de  Dali,  de  Whymper,  de  Smith  et  d'au- 
tres explorateurs  de  la  Compagnie  télégraphique^.  «Le 
rapport  du  capitaine  Raymond,  qui  forme  110  pages  in-8% 
est.  ttès-clair,  plein  de  faits,  et  jette  une  grande  lumière 
sun  la  nouvelle  acquisition  américaine.  Les  documents  sor- 
tis de  cette  reconnaissance,  avec  l'ouvrage  de  M.  Davidson 


1*.  Aux  tennes  du  traité  de  1825  entre  l'Angleterre  et  là  Russie^  la 
limite  orientale  de  la  ci -devant  Amérique  rosse  suit  le  141"  degré  à 
PO.  dû  méridien  de  Greenwich  (et  non  pas  le  131%  oomm^eil  est  dit, 
par.  une  erreur  typographique,  au  tome  VI  de  V Armée  géographique  j 
p.  388), 

24.  Voir  le  précédent  volume  de  VAnnéé,  p.  124,  n*  2T7,  et  p.  140. 


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S76  AMÉRIQUE    DU    NORD.  (n"  363-371.) 

du  Goast  Survey  (ci-dessus,  p.  202,  n^"  225] /et  les  relations 
de  MM.  Whymper  et  Dali,  sont  les  premiers  fruits  géogra- 
phiques de  Tacquisition  de  TAIaska.  » 

L'Alaska,  au  total,  est  un  triste  pays,  —  un  pays  à  pel- 
leteries, rien  de  plus.  Une  région  où  le  thermomètre  cen- 
tigrade descend  jusqu'à  38  degrés  au-dessous  de  zéro,  et 
où  l'on  regarde  comme  des  hivers  doux  ceux  qui  se  main- 
tiennent entre  —  23*  et  — 12®  cent. — ,  n'est  pas,  on  le  com- 
prend, une  contrée  à  colonisation.  Les  étés  sont  courts  et 
chauds,  quoique  la  neige  reste  sur  le  sol.  Les  végétaux 
dont  la  croi&îsance  est  rapide,  tels  que  les  navets,  les  radis 
et  les  laitues,  sont  cultivés  au  voisinage  des  côtes  de  Touest 
et  du  sud.  Le  pays  est  assez  bien  boisé  dans  l'intérieur, 
principalement  en  peupliers  et  en  saules.  Sur  toutes  les 
côtes  au  nord  des  îles  Aléoutes,  et  sur  les  bords  de  la  mer 
Arctique,  la  rare  population  se  compose  d'Eskimos;  dans 
l'intérieur,  la  population,  un  peu  plus  nombreuse,  appartient 
à  la  grande  race  des  Indians  du  <^ontinent. 


IV 

CONFÉDÉRATION  DU  CANADA. 

DOMINION.] 

363.  H.  Barrisse.  Notes  pour  servir  à  l'histoire^  à  la  bibliographie 
et  à  la  cartographie  de  la  Nouvelle-France  et  des  pays  adjacents, 
1540-1700;  par  l'auteur  de  la  BiUiotheca  Àmericana  vetustis- 
sima.  PariSy  1872,  in-8».  xxxni-365  pages.  15  fr.,  20  fr.  et  25  fr., 
selon  le  papier  (Tross). 

Cet  oavrage  a  pour  nous  un  intérêt  tout  particulier,  a  dit  M.  MUler 
en  présentant  à  TAcadémie  des  inscriptions  (mai  1872)  le  beau  volome 
de  M.  Harrisse,  puisqu'il  est  consacré  à  une  de  nos  plus  importantes 
colonies.  L'introduction  contient  une  histoire  des  archives  de  notre 
marine.  On  y  voit  comment  les  pièces  originales  concernant  cette  par- 
tie de  radministration  se  sont  perdues  par  suite  de  Tabus  qui  permet- 
tait aux  secrétaires  rPËtat  de  considérer  comme  propriété  privée  les 
archives  des  ministères.  Celles  de  la  marine  ne  datent  que  de  la  fin 
du  dix-septième  siècle.  La  première  formation  en  remonte  à  GoU>ert. 


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CANADA.  277 

Des  1680,  elles  offraient  déjà  une  collection  de  papiers  assex  considé- 
rable poar  qu*un  commis  spécial  fût  chargé  de  les  mettre  en  ordre. 
Le  premier  établissement  parait  avoir  été  formé  à  Saint-6ermain-en- 
Laye.  Les  archives  furent  ensuite  transportées  à  Paris.  En  1763,  elles 
vont  à  Versailles.  Ce  n'est  qu'en  1837  qu'elles  sont  définitivement  ins 
tallées  à  Paris,  au  ministère  de  la  marine,  après  avoir  souffert  de  nom- 
breuses  déprédations. 

Gomme  annexe  des  archives  de  la  marine,  il  y  a  encore  ce  qu'on  ap- 
pelle le  Dépâty  qui, depuis  1817,  se  trouve  rue  de  l'Université;  cet  éta- 
blissement ne  contient  pas  moins  de  quatre  dépôts,  distincts  de  celui 
du  ministère  de  la  marine. 

M.  Barrisse  ne  s'est  pas  borné  à  compulser  ces  précieuses  collec- 
tions ;  il  a  aussi  mis  à  contribution  la  Bibliothèque  et  les  Archives  na- 
tionales, où  il  a  trouvé  des  documents  du  plus  haut  intérêt. 

Ce  livre  donne  une  description  critique  de  touff  les  ouvrages  publiés 
avant  1700  qui  traitent  du  Canada  et  de  la  Louisiane,  de  tous  les  docu- 
ments datés  de  cette  période,  mais  imprimés  depuis,  et  de  toutes  les 
cartes  manuscrites  ou  gravées  relatives  à  la  géographie  de  ces  pays. 
Un  grand  nombre  de  ces  pièces  sont  décrites  pour  la  première  fois.  La 
plus  ancienne  remonte  à  1545. 

C'est  un  travail  important  et  curieux  auquel  son  auteur  a  voulu 
donner  le  titre  modeste  de  bibliographie  ;  acceptons-le,  en  igoutantque 
c'est  un  modèle  de  bibliographie  érudite.  Indépendamment  de  la  des- 
cription exacte  de  chaque  pièce,  on  y  trouve  de  nombreux  détails  his- 
toriques, littéraires  et  biographiques  touchant  l'auteur  de  la  relation 
ou  de  la  carte.  Nous  citerons  entre  autres ,  comme  particulièrement 
intéressantes,  les  aventures  de  Jacques  Cartier  et  de  Roberval,  l'his- 
toire de  Samuel  de  Champlain,  la  fameuse  relation  envoyée  par  les 
jésuites,  l'histoire  de  la  colonie  fondée  par  les  Sulpiciens  à  Montréal, 
l'histoire  critique  de  la  découverte  du  Mississipi  par  JoUiet  et  Mar- 
quette, enfin j  les  aventures  du  récollet  Hennequin. 

La  cartographie  comprend  trois  parties  :  1»  cartes  inédites  ;  2*  cartes 
gravées  non  datées  ;  3*  cartes  gravées  et  datées.  Viennent  ensuite,  sous 
le  titre  de  Notes  historiques,  les  indications  groupées  chronologique- 
ment des  documents  de  tout  genre  qui  peuvent  intéresser  l'histoire  de 
la  Nouvelle-France,  tels  que  ordonnances,  fragments,  lettres,  mé- 
moires, etc.;  plusieurs  de  ces  pièces  sont  reproduites  intégralement. 

364.  Ch.  Marshall.  The  Canadian  Dominion.  Lond.,  1872,  in-8%  12 
sh.  6  d.  (Longmans). 

365.  Capl.  W.  F.  Butler.  The  great  Lone  Land;  an  Account  of  the 
Red  River  expédition,  1869-70,  and  subséquent  travels  and  ad- 
ventures  in  the  Manitoba  couDtry;  and  a  winter  journey  across 
the  Saskatchewau  valley  to  the  Rocky  Mountains.  Lond.,  1872, 
in-8%  10  sh.  6  d.  (Low). 

Livre  plein  d'animation,  riche  en  détails  attachants  et  d'un  vif  in- 
térêt. 

366.  Capt.  G.  L.  Hdyshe.  The  Red  River  expédition.  Lond.,  1871, 
in-8»,  10  sh.  6  d.  (Macmillan). 

367.  Fr.  PooLE.  Queen  Charlotte  islands.  Lond,,  1871,  in-8"  (Hurst), 

Récit  d'une  tentative  faite  en  1862  et  63,  au  compte  d'une  compagnie 

uigiiizeu  uy  >.^«  v^  v^' pc  i n^ 


278  AMÉRIQUE   DU   NORD.  (n***  363-371.) 

qui  s'était  formée  pour  exploiter  les  mines  que  Ton  supposait  exister 
dansies  Ues  de  la  Reine-Charlotte.  Si  les  recherches da  capt.  Peole  n'ont 
pasrépondu  entièrement  à  l'attente  des  spéculateurs,  elles  ont  pourtant 
constaté  l^xistence  dn  euivre  et  d'autreamétaux  dans  quelqaes-nnes 
des  lies  de  l'archipel,  et  elles  y  ont  reconnu^  quantité  de  bonnes  terres, 
de 'beaux  bois  de.construction  et  deaariB^,  un  climat  doax,^t  un 
extrême  abondance  de  gibier. 

368.  R.  L.  Daswood.  Chiploquorgan;  or,.lifeby'the  camp  fire  in  Do- 
miuioa  of  Canada  .and  Newfoundlaiid.  Dublin,  1872^  in-8*. 

369.  La  province  de  Québec  et  Pémigràtion' européenne.  Publié  par 
ordre  du  gouvernement  de  la  province  de  Q\ièbec,  Québec,  im- 
primerie de  VÉvénement,  1870,  in-8?,  142  pages  et  carte. 

'Le  but  de  cette  publication  est  de  faire cofinaitre  la  prorince  de  Qué- 
bec aux  émigrants  européens.  On  y  troirre  de 'nombreux  renseigne- 
ments sur  l'organisation  politique  et  la  législation  du  pays,  snr  la  po- 
pulation, le  climat,  le  sol,  les  productions,  etc. 

370.  Commission  des  Canaux.  Lettre  des  commissaires  des  Canaux  à 
rhonor.  secret.  d'État,  au  sujet  de  ramélioration  de  la  naviga- 
tion intérieure  du  Canada.  Oitotwi,  1871,  gr.  in-8*,  329  pages, 
avec  carte  et  pèans. 

Un  acte  de  la  reine  Victoria  avait  institué,  au  mois  de  novembre 
.1870,  une  commission  chargée  de  faire  une  enquête  approfondie  sur 
les  moyens  à  prendre  pour  compléter  et  améliorer  le  système  de  navi- 
.gationinterieare.de  la  nouvelle  «  Puissance  »  du  Cariada.  I^e  rapport 
*  de  cette  commission  renferme  des  renseignements  fort  abondants  sur 
les  questions  de  génie  civil  et  de  commerce  qui  faisaient  l'objet  de 
l'enquête,  Iss  avis  des  chambres  de  commerce  de  la  Confédération  et 
4les  pasties  limitrophes  des  États-Unis,  et  un  grand  nombre  de  doca- 
.mants-st^tistiqu  es  dénature  à  intéresser  les  économistes  et  tous  ceux 
4}ui  tiennent  à  suivre  le  mouvement  de  progrès  dont  les  possessions 
.britanniques  de  l'Amérique  du  Nord  sont  le  théâtre.  Une  carte  détail- 
lée accompjtgne  le  volume.  (Notices  biographiques  du  JourmU  des  5a- 
vanis^) 

371.  J.  W.  Trdtch,  supveyor  gênerai  of  British  GoUimbia.-M^  of 
British  Columbia,  prepared  at  the  LaBds  and  Works  office,  Bri- 
tish Golumbia,  from  surveys.  1871.  1  feuille,  25  mill.  angl.  au 
pouce.  7  sh.  6  d. 


La  grande  ligne  'de  chemin  de  fer  du  Canada.  - 

On  sait  que  le  projet  existe  depuis  longtemps  d'ouvrir  à 
travers  le  territoire  canadien,  en  proioi^geant  à  Touest  les 
voies  déjà  existantes  dans  la  vallée  du  Saint-Laurent,  une 
grande  ligne  inter-ooéanique  qui  mette  en  communication 
directe  l'Atlantique  septentrional  et  le  Grand  Océan.  Le  do- 

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CANADA.  279 

cninent  sum&t,  fourni  sur  ce  sujet  par  les  journaux  du 
Dominion,  outre  son  intérêt  technique,  contient  aussi  de 
bonnes  données  sur  la  configuration,  générale  du  pays. 

Diaprés  le  rapport  des  ingénieurs  canadiens,  la  nouvelle  vcie 
ferrée  qui  doit  partir  de  Québec  pour  aboutir  à  l'océan  Pacifi- 
que traversera  un  pays  plus  fertile  et  sera  de  beaucoup  plus 
courte  que  le  chemin  de  fer  américain  qui  relie  New  York  à 
San  Francisco.  Les  détails  suivants  sur  la  topographie  de  ces 
régions  donnent  à  cette  opinion  la  valeur  d'une  certitude. 

A  partir  d'Ottawa,  à  Tembouchure  de  la  rivière  Montréal,  sur 
une  distance  d'environ  280  milles,  le  sol  n'offre  aucun  obstacle 
sérieux.  Un  peu  plus  haut,  vers  la  chute  d'eau  qui  se  trouve 
produite  par  l'angle  formé  par  la  rivière  Montréal  (latitude  %8® 
6',  longitude  81®  20'),  point  le  plus  élevé  entre  la  rivière  Népi- 
jon,  le  terrain  n'est  pas  à  plus  de  800  pieds  au-dessus  du  niveau 
de  la  mer. 

En  se  dirigeant  vers  Touest,  à  la  distance  de  280  milles  de  la 
rivière  Népijon  (longitude  88®  25')  et  sur  un  parcours  ayant 
105  milles  de  longueur,  le  pays  est  des  plus  favorables  à  la 
construction  d'un  chemin  de  fer.  De  la  rivière  Népijon,  en  plon- 
geant dans  la  direction  du  lac  Supérieur,  les  difficultés  devien- 
nent plus  grandes  ;  mais  aucune  n'est  insurmontable. 

D'Ottawa  au  fort  Garry,  au  nord  du  môme  lac,  jusqu'au  pas- 
sage de  la  Tête-Jaune  (FeWow?  Head  Pass),  le  pays  est  fort  acci- 
denté, sanç  toutefois  présenter  des  obstacles  bien  sérieux. 

En  marchant  toujours  dans  la  direction  de  l'ouest,  jusqu^au 
lac  des  Bois,  on  arrive  sur  la  lisière  de  la  grande  plaine  de 
Saskatchewfto,  ayant  un  parcours  de  1000  milles  de  long  à 
partir  de  ce  point  jusqu'à  son  extrême  limite  formée  par  les 
Montagnes  Rocheuses. 

Cette  plaine  est  une  seconde  vallée  de  l'ouest  pour  la  beauté, 
la  fertilité  et  l'étendue.  Le  sol  y  est  couvert  de  hautes  herbes 
et,  par  intervalles,  semé  de  bois  qu'arrosent  des  rivières  et  des 
lacs  navigables  extrêmement  poissonneux.  Dans  ces  régions 
l'hiver  est,  chose  assez  étrange,  plus  doux  que  dans  les 
États  américains  du  Nord.  La  neige  n'arrive  jamais  à  avoir 
plus  de  douze  à  dix-huit  pouces  d'épaisseur»  et  il  est  rare 
qu'elle. durcisse  à  la  surface*  et  se  revête  d'une  couche  de  glace. 
Les  aninuiux  passent  l'hiver  hors  de  Tétable,  et  ils  ne  sont  ja- 
mais plus  gras  que  dans  cette  saison.  Les  chevaux  et  les  bœufs 

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i'80  '  AMÉRIQUE   DU  NORD.  (n**' 363-37 1 .) 

que  l'on  soumettrait  à  un  pareil  régime  au  Canada  ou  dans 
TAmérique  du  Nord  périraient  infailliblement. 

Il  paraîtrait  que  les  ingénieurs  canadiens  sont  tombés  d'ac- 
cord pour  adopter,  comme  passage  à  travers  les  Montagnes  Ro- 
cheuses, la  Passe  de  la  Tête- Jaune  ;  ce  passage,  qui  se  trouve 
à  la  latitude  52®  5V,  est  le  plus  court  et  le  plus  direct. 

Voici  maintenant  le  chiffre  des  distances  à  parcourir  : 

De  Montréal  à  Ottawa 115  milles. 

D'Ottawa  à  Mattawan. 195     — 

De  Mattawan  à  Fort  Garry 985     —■ 

De  Fort  Garry  à  la  Passe  de  la  Tête- Jaune 985     — 

De  là  aux  confins  de  la  Colombie  anglaise 52     — 

Route  par  le  Fraser  supérieur  (Colombie  anglaise)  445     — 

Longueur  totale  de  Montréal  à  l'océan  Pacifique.     2777  milles. 
Longueur  du  chemin  de  fer  de  New  York  à  San 
Francisco 3305      — 

Différence  en  faveur  du  chemin  canadien 528     — 

On  évalue  le  chiffre  des  dépenses  à  625  millions  de  francs. 
Sur  cette  somme,  l'Angleterre  s'est  portée  garante  de  300  mil- 
lions, et  le  gouvernement  canadien  d'une  somme  pareille.  Ce 
dernier  a  maintenant  150  millions  affectés  à  la  construction  de 
sa  li^ne. 


La  ligne  de  démarcation  anglo-américaine  dans  le  détroit  de  Fi;ca.  Quelques 
détails.  La  sentence  arbitrale  de  Tempereur  Guillaume. 

La  frontière  entre  les  États-Unis  et  les  possessions  an- 
glaises dans  TAmérique  du  Nord  n'a  été  qu'en  partie  déli- 
mitée. En  1846,  les  deux  pays  conclurent  un  traité  dans 
lequel  des  stipulations  furent  insérées  pour  achever  la  déli- 
mitation ;  Tun  des  articles  de  ce  traité,  celui  qui  se  rap- 
porte principalement  à  la  question  actuelle,  est  ainsi  conçu  : 

«  A  partir  du  point  du  49«  parallèle  de  latitude  nord,  oi!i  la 
frontière  délimitée  dans,  les  traités  et  conventions  existants 
entre  les  deux  pays  se  termine,  la  ligne  frontière  entre  les 
territoires  de  S.  M.  Britannique  eT  ceux  des  États-Unis  sera 
prolongée  à  Fouest,  le  long  dudit  49«  parallèle  de  latitude  nord. 


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DÉTROIT  DE   FUCA.   '  281 

jusqu'au  miliçu  du  canal  qui  sépare  le  continent  de  Pile  de 
Vancouver,  et  de  là,  au  sud,  en  longeant  le  milieu  dudit  canal 
et  celui  du  détroit  de  Fuca,  jusqu'à  rocéan  Pacifique.  Il  est  en- 
tendu, toutefois,  que  la  navigation  entière  desdits  canal  et  dé- 
troit, au  sud  du  49*  parallèle  de  latitude  nord,  reste  libre  et 
ouverte  aux  deux  parties.  » 

Quelques  détails  géographiques  sont  ici  nécessaires  pour 
expliquer  Pimportance  du  différend  qui  depuis  cette  épo- 
que a  séparé  l'Angleterre  de  PAmérique,  au  sujet  du  tracé 
de  la  frontière  entre  Pîle  de  Vancouver  et  le  continent 
américain*  Le  canal  qui  sépare  cette  île  de  la  terre  ferme 
se  compose  du  golfe  de  Géorgie  au  nord,  du  détroit  de  Fuca 
au  sud,  et  d'un  archipel  dans  lequel  se  trouve  Pîle  de  San 
Juan,  gisant  entre  ces  deux  points  extrêmes.  C'est  cet  ar- 
chipel qui  cause  la  difficulté.  Il  se  compose  d'un  groupe 
d'îles  séparées  par  trois  canaux  :  Pun,  nommé  le  canal  du 
Haro,  court  entre  Vancouver  et  San  Juan  ;  le  second,  celui 
du  détroit  de  Rosario^  sépare  le  groupe  d'îles  du  continent 
américain  ;  le  troisième,  moins  grand  et  moins  bien  déter- 
miné, traverse  à  peu  près  le  centre  du  groupe*. 

Or,  depuis  1846,  les  commissaires  chargés  de  la  délimi- 
tation de  cette  partie  de  la  frontière  ont  échoué  dans  leur 
t.âche,  parce  que  de  chaque  côté  ils  ont  voulu  tracer  la 
ligne  de  séparation  de  façon  que  Pîle  de  San  Juan,  qui 
contient  un  port  magnifique  et  qui  domine  l'entrée  des 
eaux  de  Vancouver  et  de  la  Colombie  anglaise,  appartînt 
au  pays  que  les  commissaires  représentaient.  Les  choses 
en  étaient  là  en  1871,  lorsque  l'Angleterre  et  les  États- 
Unis  conclurent  le  traité  de  Washington^  destiné  à  amener 
la  solution  de  tous  les  différends  qui  divisaient  les  deux 
pays  ;  l'article  suivant  de  ce  traité,  par  lequel  la  question 
de  San  Juan  est  soumise  à  l'arbitrage  de  l'empereur  d'Aï- 

1.  L'Amirauté  anglaise  a  publié,  ou  plutôt  corrigé,  en  1872,  une 
Chart  of  Haro  and  Rosario  StraitSy  surveyed  hy  capt.  G.  H.  Richards, 
1858-59  (au  145,800»),  5  sh. 

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28â  ABIÉRIQUE   DU  NORD.  (n°*  363-371.) 

lemsgne,  eiplique  claireme&t  quelles  étaient  les  préten- 
tions respectives  des  deux  parties  : 

ff  Attendu  qu'il  a  été  stipulé  par  Tarticle  1®'  du  traité  conclu 
à  Washington,  le'I5  juin  1846,  entre  Sa  Majesté  Britannique  et 
les  États-Unis,  que  la  ligne  frontière  entre  les  territoires  de 
Sa  Majesté  Britannique  et  des  États-Unis,  à  partir  du  point  du 
49» parallèle  de  latitude  nord,  jusqu'où  il  a  déjà  été  déterminé, 
sera  continué  à  Pouest  le  long  audit  parallèle  de  latitude  nord, 
jusqu'au  milieu  du  oanal  qui  sépare  le  continent  de  Plie  de  Yan- 
eouver,  et  de  là,  au  sud,  en  longeant  le  milieu  dudit  canal  et 
celui  du  détroit  de  Fuca  jusqu'à  l'océan  Pacifique  ; 

«  Attendu  que  les  commissaires  nommés  par  les  deux  hautes 
parties  contractantes  pour  déterminer  cette  partie  de  la  fron- 
tière qui  court  au  sud  par  le  milieu  dudit  canal,  ont  été  dans 
rimpassibilité  de  s'accorder  à  ce  sujet  ; 

«  Attendu  que  le  gouvernement  de  Sa  Majesté  Britannique 
prétend  que  cette  ligne  frontière  devrait,  aux  termes  du  tradté 
prérappelé,  être  tracée  à  travers  le  détroit  de  Rosario,  et  que 
le  gouvernement  des  États-Unis  soutient  qu'elle  devrait  suivre 
le  canal  de  Haro  :  il  est  convenu  que  les  prétentions  respectives 
du  gouvernement  de  Sa  Majesté  Britannique  et  du  gouverne- 
ment des  États-Unis  seront  soumises  à  l'arbitrage  et  à  la  sen- 
tence de  S.  M.  l'empereur  d*Allemagne,  qui,  prenant  en  consi- 
dération l'article  prémentionné  dudit  traité,  décidera  là -dessus, 
finalement  et  sans  appel,  laquelle  de  ces  prétentions  est  la  plus 
en  concordance  avec  la  fidèle  interprétation  du  traité  du  15  juin 
1846. » 

Les  Anglais  soutenaient  que  ce  qui  devait  guider  la  déci- 
sion de  l'arbitre  était  la  question  de  savoir  laquelle  des 
deux^lignes  rivales  devait  être  considérée  comme  «  le  canal  » 
en  1846,  et  devait  par  conséquent  être  admise  comme' eelte 
que  le  traité  avait  eu  en  vue.  Il  est  certain,  disaient-ils,  que 
depuis  le  temps  de  Vancouver  jusque  longtemps  après 
1 846,  le  détroit  de  Rosario  a  été  seul  employé  communé- 
ment par  les  navires  se  rendant  du  détroit  de  Fuca  dans 
les  eaux  de  la  Colombie  anglaise  ;  ce  n'est  que  depuis  la 
colonisation  de  Tîle  Vancouver  que  le  canal  de  Haro  est 
devenu  d'un  usage  fréquent,'  Il  n'est,  en  outre,  pas  dou- 

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DÉTROIT  DE  FUQA,  263 

tevx  que  sur  les  cartes'dressées.par  les  géographes  anglais, 
immédiat emeilt  après  la  conclusion  du  traité  de  1846,  la 
ligne  frontière  était  tracée  de  façon  à  donner  San  Juan  à 
l'Angleterre. 

Par  contre,  les  Américains  n'ont  jamais  cessé  de  soute- 
nir qu'en  concluant  le  traité  de  1846  ils  ont  uniquement 
entendu  renoncer  à  leur  prétention  que  la  frontière  de- 
vait suivre  en  droite  ligne  le  49»  parallèle  à  travers  l'île  de 
Vancouver  jusqu'à  l'océan  Pacifique ,  et  que  tout  ce  qui  se 
trouve  au  sud  de  cette  ligne,  à  l'exception  de  Vancouver, 
devait  continuer  à  leur  appartenir  ;  ils  peuvent  en  outre  dé- 
montrer qu'actuellement  tout  au  moins  le  canal  de  Haro 
est  autant,  sinon  plus,  «  le  canal  »  que  le  détroit  de  Ro- 
sario. 

Telle  est  la -question  que  les  jurisconsultes  de  l'empe- 
reur Quillaume  ont  étudiée  pendant  de  longs  moiç,  et  au 
sujet  de  laquelle  Fempereur  vient  de  prononcer  sa  sen- 
tence. 

Celte  sentence,  dont  voici  le  texte,  a  donné  raison  aux 
prétentions  américaines  : 

Tïous,  Guillaume,  par  la  grâce  de  Dieu  empereur  d'Allema- 
gne, roi  de  Prusse,  etc.,  etc. 

Après  examen  fait  du  traité  entre  les  gouvernements  de  Sa 
Majesté  Britannique  et  des  États-Unis  d'Amérique,  en  date  du 
6-8  mai  1871,  en  vertu  duquel  les  gouvernements  susnommés 
ont  soumis  à  notre  arbitrage  la  question  pendante  entre  eux,  à  • 
savoir:  si  la  ligne  de  frontière  qui,  suivant  le  traité  de  Was- 
hington du  15  juin  18(i6,  après  avoir  suivi  la  direction  ouest 
du  parallèle  de  latitude  nord  vers  le  milieu  du  canal  qui  sé- 
pare le  continent  de  Tlle  Vancouver,  se  dirigeant  ensuite 
vers  le  sud  en  passant  par  le  milieu  dudit  canal  et  des  détroits 
de  Fuca  pour  aboutir  à  Tocéan  Pacifique,  devrait,  d'après  la 
prétention  du  gouvernement  britannique,  passer  par  les  détroits 
de  Rosario,  ou  par  le  canal  de  Haro  suivant  la  réclamation  du 
gouvernement  des  États-Unis  ; 

Considérant  que  nous  sommes  requis  de  décider  sans  appel 
laquelle  de  ces  deux  réclamations  est  la  plus  conforme  à  la 
saine  interprétation  du  traité  du  15  juin  1846  ; 

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284  AMÉRIQUE   DU  NORD.  (n^«  363-371.) 

Après  avoir  pris  en  considération  Pavis  des  experts  et  des 
jurisconsultes  chargés  parnous  de  faire  un  rapport  sur  les  mé- 
moires et  contre-mémoires  des  parties,  avons  formulé  notre 
décision  ainsi  qu'il  suit  : 

La  prétention  du  gouvernement  des  États-Unis,  savoir  :  que 
la  ligne  frontière  entre  les  territoires  de  Sa  Majesté  Britan- 
nique et  ceux  des  États-Unis  doit  passer  par  le  canal  de  Haro, 
s'accorde  tout  à  fait  avec  la  saine  interprétation  du  traité  con- 
clu entre  les  deux  gouvernements,  en  date  de  Washington, 
15  juin  1846. 

Donné  et  signé  de  notre  main  à  Berlin,  le  21  octobre  1872. 

Guillaume. 


L'archipel  de  San  Juan,  ce  petit  groupe  d'îles  qui  vient 
d'être  adjugé  aux  États-Unis,  augmente  l'immense  terri- 
toire de  l'Union  d'une  superficie  d'environ  440  kilomètres 
carrés.  L'île  de  San  Juan  est  la  plus  grande;  mais  quel- 
ques autres,  Shaw,  Ohcas,  Lopez,  Waldson,  Blakeley,  De- 
catur,  méritent  aussi  le  nom  d'îles  ;  elles  sont  toutes  sépa- 
rées les  unes  des  autres  par  des  canaux  étroits,  quoique 
profonds  et  navigables.  Presque  toute  la  superficie  des  îles 
est  utilisable,  soit  pour  l'exploitation  des  bois,  soit  pour  la 
culture  ou  pour  l'élève  des  bestiaux.  Toutes  Jes  îles  sont 
couvertes  de  collines  dont  les  pentes  septentrionales  sont 
boisées,  tandis  que  les  versants  tournés  vers  le  midi  sont 
généralement  dépourvus  d'arbres  et  revêtus  d'une  herbe 
,  abondante  jusqu'aux  sommets.  Le  climat  de  l'archipel  est 
beaucoup  plus  doux  et  plus  agréable  que  celui  du  continent 
voisin.  Il  est  donc  probable  que  les  îles  de  San  Juan,  qui 
possèdent  en  outre  d'admirables  ports,  prendront  dans  l'a- 
venir une  réelle  importance. 


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CARTE  DF,   I/ARCHIPKL  SA.N   JUA.N 

^iit£'tr  t'Mf  df  VajicouYVi'  &t   le  TtfrT'iltfîr'i'  de  Hii.^/tm0tj>fi 

A%'iiC    LUS    DETJiOITM    Df:  IDWO   ET  OE   R^i.SAÏUO 

el'  In  non V elle    liniîlo 

entre  la  Colombie  Anglaise  cl  U^^  ÏAnis  Tins       ^ 


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REGION   ARCTIQUE 


372.  W.  Bradford.  The  Arctic  régions.  Illustrarted  with  photographs 
taken  on  an  Art  Expédition  to  Greenland.  With  descriptive  nar- 
rative, by  an  Artist.  Lond,,  1872,  gr.  in-folio.  120  pi.  photogr, 
25  guinées  (Low). 

Le  voyage  dont  cette  publication  est  le  résultat  a  eu  lieu  en  1869. 

373.  Ch.  ToMLTNSON.  Winter  in  the  Arctic  régions,  and  Summer  in 
the  Antarctic  régions.  Lond,,  1872,  in-S",  386  pages.  (Society  for 
Promoting  Christian  Knowledge.) 

374.  Capt.  Sherard  Osborn.  On  the  exploration  of  the  North  Polar 
Basin  ;  with  a  résumé  of  récent  Swedish,  German,  and  Austrian 
attempts  to  reach  the  polar  circle  from  tbe  Atlantic  Océan. 
Proceedings  ofthe  Roy,  Geogr.  «oc,  vol.  XVI,  n"  3,  juillet  1872, 
p.  227-240. 

On  n'a  ici  que  des  extraits  d*an  important  mémoire,  qui  sera  sans 
doute  inséré  m  extenso  dans  le  prochain  voiume  du  journal  de  la  So- 
ciété; mais  on  trouve  à  la  suite  le  résumé  d*une  discussion  pratique, 
où  8*est  produit  pour  la  première  fois  le  plan  d'une  expédition  an- 
glaise que  la  Société  de  géographie  de  Londres  voudrait  organiser,  et 
sur  lequel  nous  aurons  à  revenir  tout  à  l'heure. 

375.  Clem.  Markhau.  The  threshold  of  the  unknown  région.  Océan 
hightmySy  juillet  1872,  p.  115-116  (les  pionniers  des  explorations 
polaires);  août,  p.  155-157  (Wilh.  Barentz)  ;  sept.,  p.  181-182 
(H.  Hudson);  cet.,  p.  215-217  (pêcheurs  de  baleine  dans  les  mers 
du  Spitzberg);  nov.,p.  254-256  (expéditions  modernes  à  la  li- 
mite des  banquises  arctiques);  déc. ,  p.  292-294  (la  baie  de 
Baffin);  janv.  1873,  p.  322-327  (Smith  Sound). 

Le  savant  auteur  de  cette  suite  d'articles,  écrits  dans  la  même  pen- 
sée que  le  mémoire  du  capitaine  Osborn,  retrace  les  antécédents  histo- 
riques des  entreprises  actuelles. 

371).  Papers  on  the  eastem  and  northern  extension  of  the  Gulf 
Stream  ;  from  the  gerroan  of  D'  A.  Petermann,  D'  W.  von 
Freeden,  and  D'  A.  Mdhry.  Translated,  in  the  U.  S,  Hydro- 
Rraph.  Office,  in  charge  of  Capt.  R.  H,  Wyman,  U.  S.  N.,  by 
E.  R.  Knorr.  Washington,  1871,  in-4%  388  p.  with  maps. 


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286  RÉGION  ARCTIQUE.  (n**'  372-390.) 

377.  Second  Supplément  of  the  papers  on  the  eastern  and  northero 
extension  of  the  Gulf  Slream ,  published  by  the  U.  S.  Hydro- 
graph.  Office.  Washington^  apr.  1872,  in-4%  27  p.  cart. 

378.  Belcher  (vice-amiral).  Le  grand  courant  équatorial^  nommé 
à  tort  Gulf-Stream;  mémoire  traduit  de  Tangl.  par  M.  le  capit 
de  frégate  A.  Guépratte.  Revue  marit»  et  colon.,  sept.  1872, 
p.  403-436. 

379.  Masqueray. 

Voir  ci-dessous  aux  développements,  p.  306. 

380.  K.  Kdhn.  Ueber  die  Ursachen  des  eisfreien  Meeres  in  den  Nord- 
poJar-Gegenden-  Zeitsehr,  der.  Oesterr.  Gesellsch.  fur  MeUoro- 
tofliie,,  VU,  1872,  n«  10,. et  Mittheû,  der  Geogr.  Gesellsch.  in 
Wien,  1872,  n«  5,  p.  209-217. 

381.  H.  MoHN.  Resultate  der  Tiefsee-Temperatnr-Beobachtungen  im 
Mèere  zwischen  Grônland,  Nord-Ettropa  und  Spitrbergen.  Mit- 
theilungen  de  Petermann,  1872,  n-  8,  p.  315-318  (n"  66  des 
Brforschungen  der  Polar-Regionen,  ci-dessous). 

382.  Th.  y.  Hedglin.  Reisen  naoh  dem  Nordpolâr-Meer,  in  den  Jah- 
ren.l87û  und  1871.  Braunschmeig ^  1872,,in-8«  (t.  I").  Wester- 
mann. 

—  O:  PïiAAS.  von  Heuglin's  geologische- Untersuehungen  in  Ost- 
Spitzbergen.  Miitheil.  de  Petermann,  1872,  n«  7;  p.  275-277. 

383..  Lieut.  Wbypreght.  Rapport  à  TAcadémie  imp.  de  Vienne  (sur 
son, voyage  de  1871,  avec  le  lieut.  Payer,  dans  la  mer  du  Spitz- 
berg^«  Le.  Gio&e,  journal  de.la^Soc. de.  géogr.  de  Genève,  1872, 
n«^3,  p.  95. 

Traduction  d'au  document  dont  nous  avons  noté  Toriglûal  dans  le 
voL  précédent  de  l'Année,  p.  402,  n»  712.  Le  mémoire  du  lient.  Wey- 
preoht'a.ét6  auasi  inséré  dans  la^^étie  des  «  EïforsfilifLni^a»  desift^- 
tbtsikmgm,  ci-après,  p.  289,  sous  le  n«  56  de  la  série.. 

384»  Qjifilques  particularités  des  régions  Arctiques. /&id.',  p.  110. 
ODQnutts  polatree»  Miragc^i.  Lainières  aKetiqiie»4  FaaM.boréale. 

385.  J.  K.  J.  DE.JONGE.  Nova  Zembla.  De  Voorwerpen  door  de 
nederlandsche  zeevaarders  na  huDn«  overwintering  aldaar  in 
1597,  achetergelaten,  en  in-  1871,  door-capitei»  Garlsen,  terttg- 
gevonden.  S*Gravenhage,  1872,  in-8",  36  page»,  avec  une 
carte  et  2  illustr.  (Nijhoflf). 

386.  Mer  de  Kara  (instructions  nautiques).  AnnaUs  hyâtographi- 
quesy  1871,  2'  semestre,  p.  195-203. 

LM  instruction»  ici  résumées  renferment  ies  deos  rapports  ds  capit. 
■    JOliiMuie0e»(lS69  et  1870'),  tradniU  des  MlttbtiluBg^n  do  iPetcrmann. 


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RÉGION  ARCTIQUE.  287 

387.  B.  M.  PiBBcaB.  A  Report  on  tfreresottrcwoflceland  and  Green- 
land.  Washington,  1872,  in-8%  72  pages  et  2  cartes.  6  fr. 

388.  D'  Pansch  (de  Texpédition  allemande).  L'été  au  Groenland.  Le 
Globe,  journal  de  la  So<x  de  géogr.  de  Genève,  1872,  n"  1-2,  . 
Bulletin,  p.  39-47. 

389.  D'  I.  J.  Hâtes*  The  land  of  désolation;  being  a  personal  Narra- 
tive of  adventure  in  Greenland.  london,. 187 l^.ia-8%  328  pages. 
14  sh,  (Low). 

Le  voyage  auquel  cette  publication  se  reporte  est  de  1869  ;  c'est 
moins  une  relation  proprement  dite  qu'un  livre  de  vulgarisation. 

390.  Augustus  Petermann.  Géographie  und 'Erforschung  der  Polar- 
Regionen.  Mittheilungen,  1868-1872. 

Sous  ce  titre  général,  le  D'A.  Petermaim.  publi».  depuis  1868,  dans 
les  Mittheilungen^  une  suite  aujourd'hui  considérabU  de  Mémoires,  de 
Noticeset  de  Relations^  accompagnés  de «artes  originales^ relatifs  à  la 
Région  Polaire.  La  decnière relation  publiée  de  cette  longue  série  {MU- 
iheii.i  1872,  n*  12,  décembre),  porte  le  n«  72.  Lie  numérotage  de  la  sé- 
rie ne  date  pas  de  Torigine;  M.  Petermann  n'a  songé  qu'assez  tard  à 
en  former  ainsi  un  ensemble  compris  dans  un  même  cadre.  Le  numé- 
rotage ne  commence  qu'au  n»  51,  au  moiii  de  décembre  1871  ;  mais  ce 
chiffre  rattache  implicitement  à  la  série  tout  ce<.qui  appartient  à  la 
question  polaire,  dans  les  Mittheilungen,  depuis  le  mois  de  mai  1868 . 
Aucune  région  du  monde  n'aura  été  plus  complètement  étudiée ,  et 
plus  à  fond.  Malgré  l'étendue  que  la  série-aiprise,  nous  croyons  faire 
une  chose  à  la  fois  intéressante  et  utile  en  donnant  ici  le  relevé  com- 
plet des  morceaux'.daaI.eUe  «e  oemipose.  Noua,  traduisons  les  titres  en 
français. 
<N«  1).  A.  Petermann^  la  Quostlondu  Pôle;  I868yp.  169-175. 

(2).  L'expédition  allemande  an.  Pôle  Nord  ;  id.,  p.  207-228. 

(3).  L'expédition  suédoise  de  186éi  id.,  p.298'304« 

(4).  L'expédition  allemande,  etc.;  p.  332-3<i2.  Cartes. 

(5).  L'expédition  allemande;  retour,  p.  368-372. 

(6).  L'expédition  allemande  ;  id.,  p.  426-428. 

(?)•  L'expédition  suédoise^  id.,p.  429-436 . 

(8).  L'expédition  suédoise;  id.,  p.  453-456. 

(9).  La  terre  polaire- récemment  découverte  (Terre  de  yraogell),et  les 
voyages  à  la  mer  Glaciale  au  nord  du.détroitde  Bériog,  de  1648  à  1867; 
1869,  p.  26-37:  Carte. 

(le).  G.  BSrgen  et  R^.Copeland.  Histoire  saccincte  des  hivernages 
dans  les  régions  Arctiquesâdurant  les  .cinqnaate  deenières  années  ;  id., 
p.  142-152. 

(11).  W.  V.  Freeden.  Obserrations  scientifiques,  faites  par  la  pre- 
mière expédition- aUemande;  id.»  p.  201-219.  Carte». 

(12).  Deuxième  expédition  allemande. . Première?  nouvelles;  id., 
p.  341-350;  Carte. 

(13).  Nouvelles  diverses  :  Hosenthal,  Albert,  .Carlsen,  etc.;  id., 
p.  350-355^ 

(14).  Rob.  Brown.  Observations  sur  le.  Groenland*  Les  mammifères; 
id.,  p.  461-465. 

(11).  R..  Bro WD. Les  mammifères  du.GreeBland«âinte,i870,  p.  41-47. 

(16).  R.  Brown.  Les  Cétacés  des  mers  du  Groenbuui;  id.,  p.  133  139. 


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288  RÉGION   ARCTIQUE.  (no«  372-390.) 

(il).  Le  relief  da  fond  de  la^mer  Glaciale  près  .du  Spitzberg,  d'après 
les  sondages  de  l'expédition  suédoise;  id.,  p.  142>144.  Carte. 

(18).  Navigation  du  capit.  Johannesen  dans  la  mer  de  Kara  en  1869; 
Id.,  p.  194-199.  Carte. 

(19).  Le  Gulf-Stream.  État  des  notions  acquises  sur  la  température 
thermométrique  de  la  partie  nord  de  l'Atlantique-,  id.,  p.  202-244. 
Carte. 

(20).  C.  Irminger.  La  température  du  nord  de  l'Atlantique  et  da 
Gulf-Stream  ;  id.,  p.  244-249. 

(21).  Observations  météorologiques  faites  à  l'ile  Bâren  par  M.  Tobie- 
sen;  id.,  p.  250-254. 

(22).  A.  Petermann.  Instructions  pour  la  deuxième  expédition  alle- 
mande à  la/  mer  Polaire,  1869-1870  ;  id.,  p.  254-264. 

(23).  La  découverte  et  la  reconnaissance  des  parties  les  plus  septen- 
trionales du  Groenland  oriental,  par  Clavering  et  Sabine,  en  1823;  id., 
p.  320-329. 

(24).  Voyage  de  M.  de  Heuglin  et  du  comte  Zeil  au  Spitzberg;  id., 
p.  337-341. 
(25).  Retour  de  l'expédition  allemande,  sept.  1870  ;  id.,  p.  382-385. 
(26).  La  deuxième  expédition  allemande;  id.,  p.  408-422.  Carte. 
(27).  Explorations  de  MM.  de  Heuglin  et  Zeil  au  Spitzberg  oriental; 
id.,  p.  422-423. 

(28).  Expédition  de  M.  NordenskjSld  au  Groenland  occidental,  mai- 
juillet  1870  ;  id.,  p.  423-424. 

(29).  Explorations  de  MM.  de  Heuglin  et  Zeil  au  Spitzberg  oriental. 
Suite.  Id.,  p.  443-451. 
(30).  Explorations  russes  dans  la  mer  Polaire  ;id.,  p.  451-453. 
(31).  A.  von  Middendorf.  Le  Gulf-Stream  à  l'est  du  cap  Mord;  187f , 
p.  25-34. 

(32).  Navigation  du  capit.  Johannesen  autour  de  la  Nouvelle-Zemble, 
dans  l'été  de  1870;  id.,  p.  35-37. 

(33).  Courses  et  observations  des  baleiniers  norvégiens  dans  la  mer 
de  Kara  en  1870;  id.,  p.  9.7-110.  Carte. 

(34).  Jul.  Payer.  La  seconde  expédition  allemande;  id.,  p.  121- 
131. 

(85).  Relevés  de  M.  de  Heaglin  au  Spitzberg  oriental  ;  id  ,  p.  176-182. 
Carte. 

(36).  Payer.  La  seconde  expédition  allemande;  suite.  Id.,  p.  183- 
195.  Carte. 

(37).  Découverte  du  Fj5rd  François-Joseph  sur  la  côte  orientale  du 
Groenlcind,  août  1870;  id.,  p.  195-200. 

(38).  A.  Petermann.  La  seconde  expédition  allemande.  D'  Pansch, 
sur  le  climat,  etc.,  du  Groenland  oriental,  etc.;  id.,  p.  217-225. 
(39).  Expédition  russe  dans  la  mer  Glaciale  ;  id.,  p.  226-229. 
(40).  Navigation  du  capit.  Johannesen  au  pourtour  delà  Nouvelle- 
Zemble  en  sept.  1870;  id.,  p.  230. 

(41).  Expédition  de  recherches  de  M.  Rosenthal  dans  la  mer  de  Sibé- 
rie ;  id.,  p.  335-340. 

(42).  Capit.  J.  Melsom.  La  pèche  du  chien  de  mer  dans  la  mer  Gl«- 
ciale;  id.,  p.  340-344. 

(43).  Expédition  de  MM.  Payer  et  Weyprecht  à  la  Terre  K3nig-Karl, 
à  1*E.  du  Spitzberg  ;  id.,  p.  344-350. 
(44).  Expédition  américaine  du  capit.  Hall  ;  id.,  p.  351-357. 
(45).  Expédition  de  M.  Octave  Pavy  au  nord  du  détroit  de  Bering; 
id.,  p.  357-358. 


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RÉGION    ARCTIQUE.  289 

(46).  Rob.  Brown.  L'intérieur  du  Groenland;  id.,  p.  377-389  (voir  ci 
dessus  les  n"  14, 15,  16). 

(47).  Jul.  Payer.  La  deuxième  expédition  allemande.  Voyage  en  ra- 
deau à  rinlet  Ardencaple;  id.,  p.  401-406.  Avec  une  planche. 

(48).  Du  même  :  Un  hiver  sous  le  cercle  polaire  ;  id.,  p.  406-413. 

(49).  Du  même  :  La  chasse  au  Groenland;  id.,  p.  413-423. 

(50).  Découverted'unemerPolaire libre, par MM.Payer  etWeyprecht; 
sept.  1871;  id.,  p.  423-424. 

51.  Notes  préliminaires  sur  l'expédition  autrichienne  des  lieute- 
nants Weyprecht  et  Payer ,  dans  la  mer  de  la  Nouvelle-Zemble  ; 
p.  457-463. 

52.  Relevé  des  sommes  souscrites  pour  les  expéditions  allemandes 
à  la  mer  Polaire,  et  des  sommes  dépensées;  Id.,  p.  463-466. 

53.  Expéditions  et  courses  diverses  dans  les  mers  Polaires,  jusqu'à 
la  fin  de  1871.  Lamont,  Weyprecht,  etc.Id,,  p.  466-472.  Carte. 

54.  Expédition  américaine  du  capit.  Hall;  id.,  1872,  p.  17-21. 

55.  Expédition  de  M.  Rosenthal  à  la  Nouvelle-Zemble  ;  id.,.p.  21-31. 

56.  Notice  adressée  à  TAcadémie  de  Vienne  par  le  lient,  de  vaisseau 
Weyprecht,  sur  son  expédition,  avec  le  lient.  Payer,  aux  mers  de  la 
Nouvelle-Zemble;  id.,  p.  69-74. 

57.  Expédition  de  M.  Rosenthal  à  la  Nouvelle-Zemble.  Suite.  Id., 
p.  75-77. 

58.  Les  découvertes  anglaises  et  norvégiennes  au  N.  £.  du  Spitzberg. 
Smith,  Ulve,  etc.  Id.,  p.  lOl-lll.  Avec  2  cartes. 

59.  La  Terre  de  Gillis,  la  Terre  du  Roi  Charles,  etc.;  état  des  no- 
tions en  1872.  Id.,  p.  111-112.  Carte. 

60.  Expéditions  diverses  dans  la  mer  Glaciale. Weyprecht  et  Payer,  etc. 
Id.,  p.  145-150. 

61.  Les  bois  et  les  plantes  ramassés  en  mer  par  la  deuxième  expé- 
dition allemande  ;  id.,  p.  150-152. 

62.  E.  L()ffler.  Notes  sur  l'hydrographie  du  Cattégat;  id.,  p.  175- 
176. 

63.  Hivernage  de  l'expédition  hollandaise  de  Heemskerck  et  Barentz 
à  l'extrémité  nord  de  la  Nouvelle-Zemble,  1596-97;  id.,  .p.  177-189. 
Avec  fig. 

64.  Expédition  de  M.  Rosenthal  à  la  Nouvelle-Zemble,  1871.  Suite. 
Id.,p.  217-222. 

65.  La  grande  entrée  des  régions  centrales  du  bassin  polaire,  etc. 
Id.,  p.  273-280. Carte. 

66.  H.  Mohn.  Résultats  des  observations  de  température  sous-ma- 
rine, entre  le  Groenland,  le  Spitzberg  et  le  nord  de  TEurope^  id., 
p.  315-318. 

67.  Nouvelles  des  expéditions  polaires  jusqu'au  2  sept.  1872.  —  Le 
capit.  Altmann  à  la  terre  du  roi  Charles  (Karls-Land)  ;  id.,  p.  353-364. 

68.  Cinq  mois  de  navigation  ouverte  dans  les  eaux  de  la  Nouvelle- 
Zemble;  résultats  de  l'expérience  acquise  par  les  baleiniers  norvégiens, 
de  1869  à  1871  ;  id.,  p.  381-395.  Avec  2  cartes. 

69.  Nouveaux  relevés  de  l'extrémité  nord  de  la  Nouvelle-Zemble,  par 
.  MM.  Mack,  D6rma  et  Carlsen,  en  1871  ;  id„  p.  395-396.  Cartes. 

70.  A.  Wolfert.  L'aurore  boréale  n'est  ni  un  phénomène  magnétique 
ni  un  phénomène  électrique;  id.,  p.  412-419. 

71.  Expédition  de  M.  Rosenthal  à  la  Nouvelle-Zemble,  1871;  Suite. 
Id.,  p.  420-421. 

72.  Nouvelles  diverses  du  retour  des  expéditions  polaires  de  1872. 
Altmann,  Smith,  Whymper,  et3.  Id.,  p.  457-470. 

l'année  géogh.  XI,  •  19 

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290  RÉGION   ARCTIQUE*  (n^s  372-390.) 

L£«  lâTfTDIS  ET  UBS    EXPÉDITKHfft  PWJUilESw 

RÉSULTATS  DE  1872.  CAMPAGNE  DE   1873. 

S  1^'.  Vue  géRécsO^. 

Le  iBOirvwiiftent  qui  depuis  sept  «iw  s'est  pepoiié  d'une 
manière  &i  ronoarquable  vers  TexploratiQn  et  Tétnde  des 
régions  boréales,  s'organise  et  s'étend  de  plus  en  plus.  Les 
puJbJicatîûns  qui  se  multiplient  ténioîgneat  de  Tintérét 
qu'on  y  attache  (ci-dessus,  à  la  bibliographie,  n**  372  et 
suiy.}.  Le  plus  fervent  des  instigateur  de  ce  grand  mou- 
vement d'investigations  du  Nord,  le  docteur  Au  gustusPeter- 
mann  de  G^ha,  eonttuua  sans  interruption,  da&s  ses  MU- 
theilungen,  la  série  imposante  de  mémoires,  de  relations  et 
de  notices  qu'il  a  consacrée  à  t  la  géographie  et  à  l'explo- 
ration des  régions  polaires  »  {ibidem^  n°  390).  Le  grand 
but^  l'arrivée  au  Pôle,  n'est  pas  encore  atteint;  mais  sur 
la  route,  les  acquisitions  de  détail  se  multiplient.  L'hydro- 
graphie de  rOcéan  glacial  se  perfectionne  ;  la  physique  du 
globe  s'enrichit  de  faits  nouveaux;  la  carte  de  ces  parties 
extrêmes  de  notre  hémisphère  s'améliore  et  se  complète. 
Le  Spitzberg  et  les  terres  qui  l'avoisinent,  la  Nouvelle- 
Zemble  et  les  mers  qui  la  baignent,  le  Groenland  dans  ses 
parties  orientales,  nous  sont  maintenant  mieux  connus.  La 
pensée,  qui  se  familiarise  avec  les  frimas  et  les  glaces, 
s'attache  aux  phénomènes  qui  s'y  dérobent  et  veut  en  avoir 
le  dernier  mot.  Aussi,  chez  les  hommes  de  fer,  chez  les 
hardis  marins  qui  se  dévouent  à  cette  tâche  formidable, 
l'ardeur  croit  avec  les  obstacles;  jamais  l'éoergie  humaine 
ne  s'est  déployée  avec  plus  de  puissance  que  dans  ces  redou- 
tables entreprises,  où  il  fant  affironter  tous  les  périls  et 
toutes  les  souffrances. 

Qu'a-t-on  fait  dans  l'année  qui  se  tarmine,  çt  que  va- 

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EXPÉDITION   AUTRICHIENNE.  291 

t*-on  faire  dans  rannée  qui  commence?  Quelles  expédi- 
tion» $e  poux8ui)ireiit  ou  se  préparent?  Quelles  questions  ont 
été  déÏMittues,  quels  problèmes  agités,  qaels  faite  nouveaux 
acquis?  YoUh  ce  que  nous  voulons  dire  aussi  brièvem^ni 
que  possible,  df  le  cadre  et  l'espace  ne  nous  persneUenl 
pa«  de  noi^  éteqdre. 


S  ».  L'exp^ditioAiautrifîJMewM  .dçB  lieatenaats  Weyprecht  et  Payer. 

Psarmi  les  entreprises  en  coura  d'exécution,  celle  de 
MM. Weyprecht  etPayer  est  une  de  celles  sur  lesquelles  on 
fonde  les  plus  grandes  espérances.  L'objet  en  est  purement 
scientifique,  et  les  préparatifs,  auxquels  une  souscription 
publique  a.  largement  pourvu,  ne  laissent  rien  à  désirer. 
Nous  avons  fait  connaître  l'année  dernière  les  antécédeo^ts 
de  cette  expédition*.  Le  plan  que  MM.  Weyprecht  et Pa^er 
en  ont  développé  daiius  un  exposé  adressé  aux  corps  savants^ 
au  gouvernement  et  au  public,  a  trouvé  une  vive  sympathie 
dans  le  midi  de  l'Allemagne.  L'Autriche  a  voulu  entrer  à 
son  tour  dans  cette  noble  compétition  scientifique,  où  sont 
aujourd'hui  représentées  les  plus  grandes  puissances  mari- 
times du  monde.  Une  somme  importante  fournie  par  TÊiat 
a  formé  le  noyau  d'une  souscription  promptement  remplie, 
et  qui  a,  en  très-peu  de  temps,  atteint  le  chiffre  de  cent 
soixante-quinze  mille  florins  —  plus  de  quatre  cent  trente 
mille  fcancs.  Un  steamer  de  deux  cent  vingt  tonneaux,  qu'on 
a  baptisé  le  Tegetlhoffy  capable,  au  besoin,  de  marcher  à 
la  voile,  et  pouvant  naviguer  aisément  même  dans  des  eaux 
peu  profondes,  a  été  construit  et  approprié  dans  le  port  de 
Breoieii-Haven,  d'où  Texpédition  est  partie  le  13  juin  de 
cette  année  1872.  La  machine  est  d'une  force  de  quatre- 
vingt-*quinze  chevaux.  Les  approvisionnements,  charbon  ^ 

1.  Voir  le  vc^ume  {)récédent  de  V Année  Géogra$khiqu.e ^  p.  41ô» 

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292  RÉGION  ARCTIQUE.  (N<^'  372-390.) 

part,  sont  faits  pour  trois  ans.  La  première  année  doit  être 
consacrée  à  l'exploration  complète  du  bassin  déjà  reconnu 
Tannée  précédente,  entre  le  Spitzberg  et  la  Nouvelle- 
Zemble,  et  l'on  se  propose  d'hiverner  dans  le  golfe  de  Taï- 
mour  ou  aux  environs  du  cap  Tchéliouskïn ,  le  Severo 
Yostokooï  des  Russes,  point  le  plus  septentrional  de  la  côte 
sibérienne  et  de  tout  l'ancien  continent  (la  latitude  approxi- 
mative est  de  n^  1/2).  La  seconde  année  sera  consacrée 
à  Tespace  compris  entre  le  cap  Tchéliouskïn  et  les  îles  de 
la  Nouvelle-Sibérie;  la  troisième  année,  à  l'intervalle  de  la 
Nouvelle-Sibérie  au  détroit  de  Bering,  intervalle  dans 
lequel  se  trouve  la  Terre  de  Vrangell.  Tel  est  le  plan  que 
se  sont  tracés  les  auteurs  de  l'entreprise,  sachant  bien, 
d'ailleurs,  qu'en  ceci  comme  en  tout,  il  y  a  à  compter  avec 
l'iinprévu.  Il  va  sans  dire  que  dans  tout  ce  parcours  de  la 
moitié  orientale  du  bassin  Arctique — orientale  par  rapport 
à  la  mer  du  Spitzberg  —  les  explorateurs,  s'élevant  dans  le 
Nord  aussi  haut  que  possible,  consacreronjt  toutes  leurs 
forces  à  constater  les  conditions  de  cette  partie  du  bassin 
polaire,  où  le  voyage  célèbre  du  capitaine  de  Vrangell  en 
1821,  d'accord  avec  leurs  propres  observations  de  l'année 
dernière  au  nord  de  la  Nouvelle-Zemble,  tendraient  à 
.  établir  l'existence  d'une  mer  ouverte  au  delà  d'une  zone  de 
glaces  fixes  ou  flottantes  voisine  du  pourtour  boréal  des 
deux  continents.  Vraie  ou  non,  cette  théorie  de  la  mer 
libre  au  Pôle  ne  peut  que  recevoir  une  vive  lumière  de 
cette  expédition,  si  MM.  Payer  et  Weyprecht  parviennent 
à  Taccomplir.  Le  but,  ici,  n'est  pas  d'aller  au  Pôle  :  l'expé- 
dition est  avant  tout  un  voyage  d'observations  dans  la  mer 
de  Sibérie.  Il  est  bon  de  rappeler  que  sauf  de  pénibles 
navigations  côtières,  et  la  double  reconnaissance  de  l'ar- 
chipel de  la  Nouvelle-Sibérie  et  de  la  Terre  de  Vrangell 
exécutée  simultanément  il  y  ajuste  un  demi-siècle,  la  mer 
qui  baigne  la  Sibérie  au  nord  n'a,  jusqu'à  présent,  été  vue 
par  aucun  navigateur.  L'expédition  de  MM.  Payer  et  Wey- 

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EXPÉDITION    AUTRICHIENNE.  293 

precht  aura  donc  toute  Timportance  d'un  voyage  de  décou- 
vertes au  sein  d'une  mer  inexplorée,  pourvu  qu'ils  puissent 
se  maintenir  dans  des  eaux  libres  à  quelques  degrés  au- 
dessus  du  continent.  A  ce  point  de  vue,  l'expédition  prend 
une  place  à  part  au  milieu  des  voyages  arctiques,  et  mérite 
amplement  l'intérêt  tout  spécial  dont  elle  est  l'objet. 

Il  faut  dire,  cependant,  que  le  voyage,  à  son  début,  n'a 
pas  rencontré  un  temps  aussi  favorable  qu'on  aurait  pu 
l'espérer.  De  Bremer-Haven,  d'où  le  Tegetthoff  est  parti  le 
13  juin,  jusqu'à  Tromsô  (à  l'extrémité  nord  de  la  côte  de 
Norvège),  où  l'on  arriva  au  commencemeut  de  juillet,  la 
mer  fut  magnifique  et  la  température  délicieuse;  mais 
après  le  départ  de  Tromsô,  qui  eut  lieu  le  14  juillet,  le 
ciel  ne  tarda  pas  à  se  montrer  moins  clément.  Les  extraits 
suivants  d'une  lettre  du  lieutenant  Payer,  écrite  du  cap 
Nassau  (sur  la  côte  occidentale  de  la  Nouvelle-Zemble),  à 
la  date  du  21  août,  donne  d'intéressants  détails  sur  cette 
première  pbase  de  l'expédition  : 

Du  milieu  des  glaces^  16  août.  Nous  sommes  auprès  du  cap 
Nassau,  VUltima  Thule  de  la  région  connue,  en  compagnie  du 
navire  Vlshjœrn^  vivement  pressés  par  les  glafces.  Depuis  trois 
jours,  nous  avons  une  tempête  de  sud -ouest,  qui  chasse  les 
glaces  en  fortes  masses  confuses  plus  haut  vers  le  nord-ouest  ; 
si  le  vent  passe  au  nord,  la  position  sera  plus  critique  ;  avant- 
hier,  VIshjœrn  a  été  jeté  sur  le  flanc. 

Nous  sommes  partis  de  Trqpiso  le  14  juillet  et  nous  avons 
rencontré  la  glace  à  74»  1/2  nord  et  48°  longitude  est,  dans 
une  région  où,  durant  les  années  ordinaires,  on  ne  trouve,  à 
cette  époque  de  l'année,  sur  plusieurs  centaines  de  milles,  au- 
cun morceau  de  glace.  Sans  nous  embarrasser  autrement,  nous 
y  avons  pénétré,  et  jusqu'au  3  août  nous  nous  sommes  avancés 
à  cent  milles  plus  loin  jusqu'à  la  côte  de  la  Nouvelle-Zemble, 
où  nous  avons  trouvé  sous  le  Ik^  degré  des  eaux  libres,  mais 
qui  étaient  de  nouveau  fermées  à  la  presqu'île  de  l'Amirauté. 

Le  7,  marche  laborieuse  à  travers  les  glaces  tantôt  plus  min- 
ces, tantôt  plus  épaisses,  et  ainsi  jusqu'au  cap  Nassau. 

Devant  nous  s'étend  un  groupe  d'Iles  basses,  extraordinaire- 

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294  RÉGION  ARCTIQUE.  (n^'   372-350.) 

ment  désolées,  auxquelles  s'ftttache  encore  la  ti€%e  de  Tan  der- 
nier. Nous  attendons  toujours  un  vent  favo4fabk. 

18  août.  Aujourd'hui  a  été  hissé  le  pavillon  de  gala.  C'est  la 
fête  de  Tempereur,  qui  sera,  pour  la  première  fois,  célébrée 
dans  les  régions  arctiques. 

L'état  de  la  glace  et  de  la  température  est  afftreux  cette  an- 
née; tandis  que  les  années  précédentes,  à  cette  époque,  les 
chasseurs  de  morses  ont  déjà  fait  ample  récolte  sans  grands 
obstacles,  cette  fois  aucun  ne  s'est  encore  présenté.  Des  trois 
navires  qui  ont  tenté  l'aventure,  il  y  a  trois  semaines,  deux,  à 
40  milles  de  nous  environ  au  sud-ouest,  ont  été  brisés  entre  les 
glaces. 

Depuis  que  nous  noua  trouvons  dans  ees  parages,  la  tempé- 
rature est  rarement  montée  aurdessus  de  zéro;  ajoutez  à  oela 
beaucoup  de  neige  qui  ne  fond  pas  par  cette  basse  tempéra- 
ture, ce  qui  augmente  encore  les  masses  de  glace.  L'an  der- 
nier, d'ici  jusqu'à  2  degrés  1/2  au  nord,  on  n'apercevait  pohit 
le  moindre  morceau  de  glace.  Tout  pourtant  n'est  pas  encore 
perdu  ;  huit  jours  de  dégel,  et  nous  pouvons  avoir  devant 
nous  des  centaines  de  milles  libres  de  glaces;  la  saison  la  plus 
favorable  ne  fait  que  de  commencer.  Le  plus  triste,  c'est  qu'au 
lieu  d'être  sur  la  côte  de  Sibérie,  nous  devons  pour  la  première 
fois  hiverner  ici  dans  la  Nouvelle-Zemble. 

Dans  les  circonstances  ordinaires,  nous  devrions  avoir  déjà 
dépassé  ce  point  ;  le  principal  est  que  le  navire  et  l'équipage  se 
portent  bien.  Nos  matelots  s'amusent  comme  des  enfants  de  ce 
nouveau  genre  de  navigation,  et  supportent  parfaitement  le 
climat,  quoique  plus  légèrement  vêtus  que  lés  marins  de  Nor- 
vège. Je  tiens  beaucoup  à  ce  qu'ils  ne  se  dorlottent  pas  avant 
le  temps,  pendant  l'été.  Nous  avons  des  vêtements  et  des  pro- 
visions pour  trois  ans,  et  cela  en  excellente  quantité.  Les  beef- 
teaks  de  phoques  et  d'ours  font  florès. 

La  machine  est  excellente  et  consomme  peu  de  charbon,  en 
sorte  que  nous  avons  de  quoi  chauffer  amplement  pendant  cin- 
quante jours,  compris  la  cuisine  et  les  poêles.  Ceux-ci  n'ont  pas 
encore  été  allumés;  étant  bien  vêtus,  nous  nous  en  passons 
jusqu'à  présent. 

On  profite  de  ce  séjour  involontaire  pour  exercer  les  hommes 
et  les  chiens  à  la  manœuvre  des  traîneaux.  Tous  les  jours^  trois 
ou  quatre  de  ces  traîneaux  s'en  vont  au  delà  des  lies ,  et  re- 
viennent chargés  de  bois  de  flottaison,  de  collections  de  pierres 
et  de  plantes,  de  gibier,  etc.  Quelles  sont  ces  îles?  Les  cartes 

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EXPÉDITION   PAVY»  295 

de  la  Nourelle-Zôtnble  ne  nous  renseignent  aucunement;  à  par- 
tir de  la  presqu'île  de  T Amirauté,  lacune  complète. 

Quand  une  fois  nous  aurons  tourné  le  cap  Nassau,  les  points 
d'appui  nous  manqueront  totalement.  En  attendant,  nous  re- 
cueillons des  collections  et  des  observations  importantes. 
Vlf^arn  fera  connaître  l'époque  àc  laquelle  nous  serons  partis 
d'ici. 

Il  parait  que  dans  les  derniers  jours  le  temps  s'est  assez 
aTmélioré  pour  que  le  bâtiment  puisse  quitter  le  cap  Nassau, 
oti  Ton  avait  craint  d'être  forcé  d'hiverner.  Le  comte  Wil- 
czeka,  commandant  du  navire-conserve  (attaché  à  Texpé- , 
dition),  télégraphie,  le  20  septembre,  de  Hammerfest 
(Laponie-norvégienne,  près  du  Cap-Nord),  où  il  est  de 
retour,  que  le  Tegetthoff  Bysii  gagné  le  gdfe  de  Petchora, 
quoique  les  glaces  fussent,  cette  année,  plus  dangereuses 
que  de  coutume.  «  Béjk,  dit  le  télégramme,  l'expédition  a 
recueilli  une  abondante  moisson  de  faits  géographiques.  » 
Maintenant  que  les  baleiniers  ont  quitté  les  mers  boréales 
et  que  les  glaces  ont  coupé  les  communications,  il  ne  faut 
plus  attendre  de  nouvelles,  au  moins  par  mer,  jusqu'à  la 
saison  prachaine. 


S  3.  L^expédition  de  M.  Octafe  Favy. 

C'est  aussi  par  la  mer  de  Sibérie,  mais  par  son  extré- 
mité opposée,  que  M.  Octave  Pavy  s'est  proposé  d'attaquer 
la  route  du  Pôle.  Nous  avons  dit  déjà  ce  qu'est  M.  Pavy*. 
Il  est  de  famille  française,  quoique  né  à  la  Nouvelle-Or- 
léans. Il  fut  jusqu'au  dernier  moment  Tami  dévoué,  le 
coopérateur,  le  bras  droit  de  Gustave  Lambert,  une  des 
victimes  de  la  funèbre  journée  de  Buzenval;  et  depuis  la 
mort  de  celui  qui,  chez  nous,  s'était  fait  le  missionnaire 
ardent  des  investigations  polaires,  il  a  repris  pour  son 

1 .  Voir  notre  précédent  volume,  p.  419. 

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296  RÉGION  ARCTIQUE.  (n°' 372-390.) 

compte  ridée  du  hasardeux  voyage  dont  Gustave  Lambert 
fut  le  promoteur.  Il  a  repris  l'idée,  mais  il  a  modifié  le 
plan,  tout  en  choisissant,  comme  Gustave  Lambert,  le  dé* 
troit  de  Bering  et  la  Terre  de  Yrangell  pour  point  de 
déparf.  Au  lieu  du  pesant  bâtiment  où  Gustave  Lambert 
avait  englouti  le  plus  clair  de  ses  ressources,  et  qui  gît 
encore  inactif,  à  l'heure  qu'il  est,  dans  un  des  bassins  du 
Havre,  M.  Pavy  s'est  arrêté  à  un  système  de  radeaux  en 
caoutchouc,  susceptible,  selon  les  circonstances,  d'avancer 
sur  la  glace  ou  de  prendre  la  mer.  Il  a  donné  à  son  appa* 
reil  le  nom  c  de  Radeau-Monitor  modifié.  »  Ge  radeau, 
construit  à  Pétropaulovsk,  gagnera  de  là  le  cap  Takân, 
vis-à-vis  de  la  Terre  de  Vrangell,  soit  par  terre  à  travers 
la  pointe  sibérienne,  soit  par  mer  en  contournant  le  Gap 
Oriental  ;  c'est  de  là  que  commencera  l'expédition.  M.  Pavy, 
comme  Gustave  Lambert  et  le  docteur  Petermann,  croit  que 
le  centre  polaire  est  occupé  par  une  mer  libre  entourée 
d'une  ceinture  de  glaces  :  le  problème  est  de  franchir  cette 
zone  de  glaces  qui  enveloppe  le  bassin  central.  La  Terre 
de  Yrangell,  d'après  les  données  fournies  par  l'habile  ex- 
plorateur dont  elle  a  reçu  le  nom,  a  paru  un  point  d'attaque 
favorable,  soit  qu'elle  ait  au  nord,  comme  les  reconnais- 
sances de  M.  de  Yrangell  semblent  l'indiquer,  une  grande 
mer  ouverte,  soit  qu'elle  se  prolonge  au  loin  dans  la  di- 
rection du  pôle. 

A  la  fin  de  juin  dernier  (1872),  M.  Pavy  exposait  son 
programme  et  ses  théories  au  sein  de  l'Académie  de  San 
Francisco  —  c'est  cette  ville  qui  a  dû  être  son  point  de 
départ  —  et  il  devait  prendre  la  mer  bientôt  après  sur  le 
paquebot  de  Yokohama,  pour,  de  là,  gagner  Pétropaulovsk, 
oîi  se  feront  les  derniers  préparatifs.  Depuis  lors,  nous 
manquons  absolument  de  nouvelles;  il  faut  encore  nous 
en  tenir  au  plan  de  l'explorateur.  A  partir  du  cap  Ya- 
kan,  son  équipage  doit  se  composer  de  huit  hommes 
aguerris  aux  mers  du  Nord.  Cent  rennes  et  un  attelage  de 

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EXPÉDITION   HALL.  297 

cinquante  chiens  lui  serviront  d'animaux  de  trait  et  en 
même  temps  de  provisions  de  réserve.  M.  Pavy  croit  à  un 
courant  chaud  continu  (le  courant  japonais  '),  qui  part  de 
l'Océan,  franchit  le  détroit  de  Bering,  coupe  le  bassin  po- 
laire,  et  revient  à  TÂtlantique  par  le  détroit  de  Smith. 
C'est  par  cette  dernière  route  que  l'explorateur  compte  opé- 
rer son  retour.  L'expédition,  telle  qu'elle  est  conçue,  n'en 
tirerait^on  que  des  résultats  partiels,  ne  peut  être,  si  elle 
aboutit,  que  très-précieuse  pour  la  solution  de  cette  grande 
question  préliminaire  :  la  Mer  Libre. 

S  4.  Expédition  américaine.  Le  capitaine  HalL 

La  route  par  laquelle  Octave  Pavy  se  propose  de  revenir 
de  sa  pointe  sur  le  pôle  -—  le  détroit  de  Smith  et  la  mer  de 
Baflin  —  est  précisément  celle  que  l'expédition  américaine, 
conduite  par  le  capitaine  Hall,  a  choisie  pour  pénétrer  dans 
le  bassin  polaire.  Nous  avons  donné,  l'année  dernière, 
d'amples  détails  sur  le  capitaine  Hall  et  ses  antécédents, 
aussi  bien  que  sur  les  préparatifs  de  son  voyage  actueP. 
Le  bâtiment  qui  porte  l'expédition  a  été  nommé  le  Polaris; 
il  est  amplement  muni  des  approvisionnements  et  des  appro- 
priations nécessaires  pour  une  course  qui  est  à  la  fois  un 
voyage  de  découvertes  et  un  voyage  d'observations  scienti- 
fiques. L'objectif  du  capitaine  Hall  est  le  pôle;  et  conmie 
moyens  d'exploration,  là  où  le  Polaris  serait  arrêté  par 
une  barrière  de  glaces,  il  est  muni  de  traîneaux  et  de  bar- 
ques propres  à  sillonner,  selon  le  besoin,  la  mer  gelée  ou 
les  eaux  libres.  Rien  n'a  été  négligé  de  ce  qui  appartient  à 
la  prévoyance  humaine.  M.  Hall  a  passé  plusieurs  années 
de  sa  vie  parmi  les  indigènes  de  la  baie  d'Hudson  et  des 
parties  avoisinantes,  sur  lesquelles  il  a  publié  en  1864  un 


1.  Ci-dessus^^p.  202,  n»  225. 

2.  P.  420  et  suiv.  de  notre  précédent  volume. 


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298  RÉGION  ARCTIQUE.  (n°»  372-390.) 

livre  cari«tfx*«  Par  les  habitiwies  matérieHes  et  t'aeclhna* 
tation,  le  capTtmne  se  ▼ante  d^être  devenu  tm  vérinabk 
Esqmmao.  Si  celte  adeptien  volomaire  dv  genre  de  vie  des 
baveifrs  d'baile  a  qudqiae  ehose  qtti  répngae  ^«elqiie  peu 
à  nelpe  pruderie  européenne^  on  ne  saurait  diseoD^ieiiir 
qu'elfe  &  dft  le  préparer  admirablement  à  ses  entreprise 
actueiie^ 

Le  Pôlaris  a  quitté  le  port  de  New  York  le  2f6  jrâ  1871; 
lee  dernières  noiarvelles  qu'en  en  ait  eues  sont  du  24  août 
suivant,  et  datées  de  Tessiussak,  le  dernier  établismment 
danois  sur  la  côte  occidentale  du  Groenland  (73^  24'  latît.), 
à  peu  de  distance  au  nord  d'Upemavik.  Le  bâtiment  était 
en  partance,  se  portant  au  N.-O.  vers  le  détroit  de  Smith. 
D'i^rès  le  plan  primitif  tracé  pour  rexpédition*,  le  Polaris 
devait  s'engager  dans  le  détroit  de  Jones  (Jones  Sound), 
qui  débouche  à  l'entrée  du  détroit  de  Smith  vers  le  76'  pa- 
rallèle, et  qui  s'enfonce  à  l'ouest  vers  des  espaces  encore 
ignorés,  Tenirée  du  Jones  Sound  ayamt  seule  été  jusqu*à 
présent  reconnue:  on  avait  pensé  que  cette  route  ineiplorée 
offrait  un  excellent  diamp  de  découvertes  et  une  bonne 
voie  vers  le  bassin  polaire.  Dans  sa  dépèche  du  24  août? 
M.  Hall  informait  le  département  de  la  marine  que  des 
renseignements  reçus  à  Upernavik  lui  avaient  fait  modifier 
cette  partie  de  ses  instructions^  et  qu'au  lieu  de  s'engager  à 
l'ouest  dans  le  détroit  de  Jones,  ii  allait  pousser  droit  au 
nord  sur  le  détroit  de  Smith  et  le  Canal  Kennedy. 

On  v(ài  par  là  que  d'ici  à  longtemps,  probablement,  il  ne 
faut  pas  s'attendre  à  des  nooivelles  de  l'expédition*  Id.  Hall 
doit  être  en  ce  moment  lancé  en  plein  inconnu. 

1.  Life  with  Esquimaux,  1864,  2  vol. 

2.  Les  instructions  tracées  pour  le  voyage  ont  été  traduites,  avec 
des  remarques,  dans  la  JLetue  Maritime  et  Cohniate,  juillet  1^72, 
p.  685-727. 


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EXPÉDITIONS  DrVERSBS.  299 


S  5.  L'ezp6dit}oD  «lédoifte  dais  les  meT«  du  Spiteberg.  M.  Kordemkj61d.  '- 
Courses  diverses  dans  les  mêmes  eaux.  M.  de  Heuglin.  M.  Smith.  Les  ba- 
Miniers. 


L'expédition  qtte  les  SutMois  rtnoweltefit  cette  année 
dans  le  bassin  polaire,  sous  la  direction  de  M.  Norfens* 
kjôld,  nous  ramïène  anx  mers  du  Spitzberg.  M.  Nordens- 
kjôld  est  tm  des  vétéfàne  ées  expéditiens  arctiqtieB  :  ce 
nouveati  voyage  est  potir  lui  &a  moins  k  sixième.  Les 
préparatifs,  anjrquels  le  gouvernement  suédois  a  eontribué 
pour  une  grandie  part,  ont  été  faits  sur  une  large  échelle. 
L'expédition  se  compose  de  deux  navires,  le  F&lhem  et  le 
Gladan.  Le  premier  est  un  steamer  où  sont  installés  les 
observateurs  et  les  instmmeBrts;  le  second  estnn  briek, 
p  orteur  des  provisions,  etc.  M,  Nordenskjôld  se  proposait 
de  consacrer  la  première  partie  de  la  saison  à  compléter 
l'hydrographie  du  Spitzberg  oriental  ;  puis,  au  moyen  de 
barçpres-traîneaux,  il  veut  s'élever  aussi  haut  que  possible 
dans  la  direction  du  pôle,  en  se  maintenant  à  peu  près 
sous  le  même  méridien.  Le  savent  Suédois  ne  croit  pas  à 
l'existence  d'une  mer  libre  aux  approches  du  pôle;  mais 
il  croit  possible,  en  combinant  les  deux  moyens  de  transport 
par   l'eau  et  par  la  glace,  d'effectuer  l'examen  complet 
du  bassin  arciiqne.  Il  semblerait  bien  en  effet,  d'après 
tontes  les  tentatives  faites  depuis  cinquante  -ans,  que  là 
seulement  serait  la  voie  certaine  pour  arriver  à  une  solu- 
tion, 11  est  bon,  cependant,  de  voir  à  ce  sujet  les  remarques 
pratiques  consignées  dans  le  journal  de  la  société  Géogra- 
phique de  Genève  (te  Globe) ,  au  prenrier  cahier  de  !872, 
pjçe  47. 

Malheureusement  l'état  de  la  mer,  pour  l'expé*tion 
suédoise  pas  plus  que  pour  l'expédition  autridûenne,  ne 
s'est  trouvé  favorable.  Les  deux  navires,  saisis  par  les 
glaces  au  nord  du  Spitzberg,  n'ont  pu  même  atteindre  le 


y  Google 


300  RÉGION  ARCTIQUE.  (n^'  372-390.) 

petit  groupe  des  Sept* Iles  désigné  comme  point  de  relâche 
et  de  ravitaillement  ;  les  craintes  sur  le  sort  de  M.  Nor- 
denskjôld  et  de  ses  compagnons  ont  été  assez  fortes,  pour 
qu'un  navire  de  secours,  le  vapeur  YAlbertf  ait  été  envoyé 
de  Christiania.  On  paraît  rassuré  maintenant  sur  la  position 
de  M.  Nordenskjôld;  mais  Tannée  est  perdue  pour  l'expé- 
dition.   • 

Cette  année  comme  tous  les  ans,  de  nombreux  baleiniers 
ont  sillonné  les  parties  extrêmes  de  U  mer  du  Nord  ;  et 
plusieurs  en  ont  rapporté,  maintenant  que  Tattention  est 
particulièrement  éveillée  sur  les  recherches  dont  cette 
région  est  l'objet,  des  observations  d'un  grand  intérêt. 
M.  Altmann  le  premier  a  donné  des  indications  un  peu 
précises  sur  la  Terre  de  Gillis  et  la  Terre  du  Roi  Charles 
(Earls-Land),  à  Test  du  Spitzberg;  et  sur  le  côté  oriental 
du  Spitzberg  lui-même,  on  possède  actuellement  des  no- 
tions toutes  nouvelles,  non-àeulement  grâce  aux  courses  de 
M.  Âltmann,  mais  aussi  de  plusieurs  explorateurs  intré- 
pides, notamment  de  M.  de  Heuglin  et  d'un  gentleman 
anglais,  M.  Leigh  Smith,  qui  a  lancé  son  yacht  dans  ces 
parages  redoutables.  Il  a  été  constaté  que  la  pointe  N.-E. 
du  groupe  du  Spitzberg  est  au  80^  degré  10'  de  latitude 
Nord,  par  25°  48'  à  l'est  du  méridien  de  Paris.  Cet  affreux 
archipel  du  Spitzberg,  cStte  terre  de  sombres  frimas  et  de 
montagnes  glacées,  nous  est  devenu  depuis  quelques  an- 
nées une  contrée  presque  familière,  tant  son  nom  reparait 
souvent  dans  les  explorations  arctiques  dont  il  est  devenu 
un  des  principaux  centres. 

Un  des  plus  .curieux  épisodes  de  ces  courses  dans  les 
mers  boréales,  a  été  la  découverte  de  la  cabane  en  bois 
construite  en  1596  par  le  célèbre  Barentz  et  ses  compa- 
gnons, que  la  pefte  de  leur  navire,  écrasé  par  les  glaces, 
força  de  séjourner  sur  la  côte  nord  de  la  Nouvelle-Zemble. 
Cette  découverte  a  été  faite  en  1871  par  le  capitaine  nor- 
végien Elling  Carlsen.  Cette  cabane,  élevée  à  la  hâte  par 

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EXPÉDITIONS   DIVERSES.  301 

les  naufragés  hollandais  il  y  a  deux  cent  soixante-quinze 
ans,  semblait  avoir  été  construite  la'  veille,  tant  elle  est 
dans  un  étonnant  état  de  conservation.  Elle  n'avait  évi- 
demment été  vue  par  personne  depuis  que  Barentz  V^ 
quittée;  tout  y  était  resté  comme  au  moment  du  départ  des 
naufragés.  M.  Carlsen  y.  a  trouvé  de  nombreux  objets 
abandonnés,  dont  le  gouvernement  de  Hollande  a  fait  l'ac- 
quisition :  c'est  un  souvenir  des  premières  tentatives  qui 
ont  été  faites  pour  aller  en  Orient  par  les  mers  du  Nord. 
M.  Carlsen  a  rapporté  entre  autres  l'horloge  qui  figure 
dans  la  vue  intérieure  que  Gerrit  de  Yeer  a  donnée  de  la 
cabane  dans  sa  relation  personnelle  du  naufrage;  on  y  a 
trouvé  aussi,  parmi  différents  ustensiles,  un  cadran  en 
cuivre  par  le  milieu  duquel  un  méridien  est  tracé,  et  qui 
servait,  à  ce  que  l'on  croit,  à  déterminer  les  déviations  de 
la  boussole.  Cet  instrument  nautique  du  seizième  siècle  est 
peut-être  le  seul  qui  existe  aujourd'hui  en  Europe.  Il  y 
avait  là  encore  différents  volumes  dépareillés,  et  jusqu'à 
une  flûte  qui  a  appartenu  à  Barentz.  On  ne  peut  voir  sans 
émotion  cette  collection  curieuse. 

Il  ne  paraît  pas,  en  définitive,  que  la  Germania  doive 
entreprendre  cette  année  un  troisième  voyage;  mais  le 
directeur  des  Mittheilimgen  ^  M.  Augustus  Petermann, 
l'actif  instigateur  des  deux  expéditions  de  1868  et  1870, 
n'en  suit  pas  moins  avec  une  vigilance  infatigable,  ainsi 
qu'on  l'a  vu  plus  haut,  les  moindres  incidents  des  entre- 
prises arctiques,  dans  la  série  de  notices,  de  documents  et 
de  mémoires  que  renferme  chaque  cahier  mensuel  du 
journal  géographique  de  Gotha.  Le  comité,  de  Brème  pré- 
pare, à  ce  que  Ton  nous  annonce,  la  publication  prochaine 
de  la  relation  des  deux  expéditions  allemandes,  où  seront 
consignés,  avec  le  récit  historique,  l'ensemble  des  résul- 
tats scientifiques  fournis  par  les  deux  voyages. 

La  marine  russe  avait  songé,  elle  aussi,  à  entrer  dans 
la  lice  ;  elle  y  a  renoncé,  au  moins  pour  cette  année.  L'ex- 

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302  RÉGION  ARCTIQUE.  (n°'  372-390.) 

pédition  de  MM.  Payer  et  Weyprecht,  qm  doit  avoir  pour 
principal  théâtre  la  mer  de  Sibérie^  n'a  peut-être  pas  été 
saQ$  influence  sur  ceUe  al>Âtenlion«  Il  faut  voir,  sur  les 
idées  qui  se  sont  produites  en  Eussie  à  ce  sujet,  un  bon 
résumié  dans  le  journal  de  la  société  de  Gréographia  de 
Genève  {le  Gkbe,  t.  X,  1871,  Bulletin,  p.  139  à  IH),  et 
surtout  un  mémoire  de  M.  Niéviéjine  traduit  du  russe  par 
M.  le  capitaine  F.  Ghardonoeau,  dans  la  Revue  Maritime 
et  Coloniale,  octobre  1872,  p.  825-847,  L'auteur  de  ce 
remarquable  travail  trace  d'abord  un  aperçu  des  tentatives 
de  navigation  polaire  &ites  dans  ces  derniers  temps  enlre 
le  Groenland  et  le  Spitzberg,  aussi  bien  qu'au  sud-est  du 
Spit^Êj^  et  à  Test  de  la  Nouvelle^-Zemble  ;  puis  il  ozpo&e 
et  discute  le  rapport  de  la  société  de  Géographie  russe  sur 
l'exploration  des  mers  de  la  Sibérie.  M.  Niéviéjine  pense 
qu'un  des  meilleurs  points  de  départ  pour  la  reconnais- 
sance du  bassin  arctique  serait  l'archipel  de  la  Nouvelle - 
Sibérie  ou  la  Terre  de  Vrangell. 

S  6.  Résultats  géographi^aes. 

Malgré  les  difficultés  insurmontables  que  le  ciel  et  la  mer 
ont  opposées  cette  année  à  l'airancement  des  entreprises 
arctiques  dans  les  mers  du  Spitzberg,  il  n'y  en  a  pas  moins 
eu  des  résultats  considérables  pour  la  géographie  et  la  phy- 
sique du  globe.  La  carte  du  S-pitzberg  oriental  a  été  com- 
plétée par  M:  de  Heuglin  et  M.  Altmann,  et  Ton  a  eu  pour 
la  première  fois  quelques  notions  positives  sur  la  nature  et 
la  disposition  des  Terres  du  Roi  Charles  et  de  Gillis  (voir 
les  n*»»  59,  67  et  7â  des  Erforschungen  de  la  série  Peter- 
mann,  ci*dessus  n""  390  de  notre  bibliographie^  et  poujr 
M.  de  Heuglin  nos  n°*  382  et  39d,  (27  et  28,).  Pour  la  pre- 
mière fois  aussi,  la  navigatlooi  du  pourtour  eiotier  de  la 
Nouvelle-Zemble  a  été  accomplie,  et  la  carte  de  l'extré- 
mité nord  de  cette  grande  île  arctique  a  subi  une  tcaos- 

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PROJET  ANGLAIS.  303 

forxoation  complète.  On  a  aussi  recoimu  que  la  mer  de 
Eara,  à  Test  de  la  Nouvelle-Zemble,  est  presque  tous  les 
ans  libre  de  glaces^  D'importantes  éindes  sur  cette  région 
jusqu'à  présent  très-peu  connue  ont  été  rapportées,  et 
sont  consignées^  avec  des  cartes  origiojales,  dans  la  série 
Petermann  (voir  particulièrement  le  n^  68  des  Erforschun- 
gen  pour  la  relation  de  M.  Garlsen,  les  n"  55,  "^7  et  64, 
où  «ont  consignées  les  obsenrations  de  M.  Rosentha!,  et 
une  lettre  de  M.  de  Heuglin  dans  le  Bulletin  de  l'Aca- 
démie de  Saint-Pétersbourg,  t.  XVI,  1871,  p.  566)*  N'ou- 
bliâns^  les  publireationsida  MM.  Pansch^  Pierce  et  Bûb. 
Bfowu  sur  le  Groenland  (cÎHfecwus,  n«*  3i87,  388  et  390, 
(i4  à  16)  de  la  bibliographie,  et  notre  volume  précédent, 
p.  4.04,  u^  729), 

S  7.  Projet  anglais  d'une  nonyelle  expédition  arctique. 

Nous  venons  de  nommer  le  Groenland  :  cette  immense 
contrée  polaire,  sur  laquelle,  jui^u'à  priésent,  nos  infor-, 
mations  sont  si  bornées^  va  prendre  daaas  les  études  arcti- 
ques une  place  toute  nouvelle  et  très-importante,  si  le  plan 
de  la  société  de  Géographie  de  Londres  pour  une  nouvelle 
expédition  au  Nord  se  réalise.  Lasse,  et  presque  honteuse, 
du  rôle  inactif  auquel  elle  est  depuis  longtemps  confinée, 
en  présence  de  l'activité  que  déploient  pour  les  investiga- 
tions arctiques  d'autres  nations  de  l'Europe  et  de  l'Amé- 
rique, la  société  de  Londres,  à  l'instigation  persévérante 
du  capitaine  Osborn  et  d'autres  hommes  émiments  apparte- 
nant à  la  marine  royale,  a  résolu  de  tenter  un  nouvel 
effort  près  du  gouvernement,  pour  l'amener  k  concourir  à 
une  nouvelle  expédition  polaire.  Jusqu'à  présent,  le  trésor 
public  se  monire  as&a  peu  disposé  à  endosasr  cette  nou- 
velle ckacge,  qiuelque  engageantes  que  sodent  les  raéaons 
qu'on  lui  présent-e  ;  quoiqu'il  arriva,  le  plan  de  la  société, 
en  mèmeiemps  qu'il  est  nouveau  et  se  distingue  de  tous 

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30^  RÉGION  ARCTIQUE.  (n«'  372-390.) 

les  autres,  nous  paraît  très-rationnel  et  fort  bien  conçu. 
Actuellement  ou  plus  tard,  il  sera  certainement  exécuté.  Il 
est  donc  intéressant  de  le  faire  connaître. 

Voici,  en  résumé,  l'exposé  qui  a  été  présenté  au  ministre, 
et  quelques-uns  des  points  principaux  du  programme  re- 
commandé par  les  délégués  de  la  société  de  Londres  : 

L^opînion  collective  des  marins  et  des  savants  ne  peut  laisser 
aucun  doute  sur  Pimportance  des  résultats  d'une  expédition 
dont  le  champ  d'exploration  s'étendra  sur  près  de  deux  millions 
de  milles  carrés,  sous  le  80"  degré  de  latitude  nord.  Cette  ex- 
pédition doit  conduire  à  la  solution  de  nombreuses  questions 
relatives  à  la  géographie  physique,  à  la  géologie,  à  l'histoire 
naturelle,  au  magnétisme  terrestre,  à  l'anthropologie  et  à  la 
météorologie. 

En  1865,  le  président  de  la  Société  de  géographie,  sirRoda- 
rick  Murchison,  soumit  au  gouvernement  la  proposition  d'une 
exploration  des  régions  arctiques;  mais  la  décision  fut  ajournée 
jusqu'au  jour  où  l'on  pourrait  déterminer,  grâce  aux  expédi- 
tions de  la  Suède  et  de  l'Allemagne  alors  parties  par  le  Spitz- 
berg,  quelle  était  la  route  qu'il  convenait  d'adopter.  Sept  an- 
nées d'efforts  infructueux  dans  cette  direction  ont  confirmé  la 
preuve  recueillie  déjà  par  les  explorateurs  antérieurs,  qu'il 
n'était  pas  possible  de  pénétrer  dans  les  glaces  de  ce  côté.  On 
est  aujourd'hui  à  peu  près  unanime  dans  Topinion  que  la  route 
par  la  baie  de  Baffîn  et  le  détroit  de  Smith  est  celle  qui  promet 
le  plus  de  résultats  favorables  à  la  science,  et  en  même  temps 
le  moins  de  risques  pour  la  vie  des  navigateurs. 

L'expédition  américaine  commandée  par  le  capitaine  Hall 
s'est  engagée  dans  une  direction  tout  à  fait  différente,  par  le 
détroit  de  Jones  *  ;  elle  doit  revenir  en  1873.  Elle  ne  consiste 
qu'en  un  petit  bâtiment;  les  résultats  qu'elle  peut  obtenir  seront 
par  conséquent  limités. 

L'expérience  acquise  de  1850  à  1872,  période  pendant  la- 
quelle des  expéditions  conunandées  par  des  officiers  anglais, 
américains,  suédois  et  allemands,  ont  parcouru  dans  différents 
sens  le  cercle  arctique,  a  prouvé  qu'a  l'aide  de  la  vapeur  et 
des  connaissances  acquises  sur  l'ofganisation  la  plus  convena- 
ble pour  ces  voyages,  sous  la  direction  d'un  chef  intelligent, 
on  n'est  pas  exposé  à  de  très-grands  dangers. 

1.  On  a  vu  plus  haut  p.  298,  que  cet  itinéraire  projeté  a  été  modifié. 

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PROJET  ANGLAIS.  305 

Depuis  1865,  diverses  expéditions  suédoises  et  allemandes 
ont  tenté  l'exploration  des  régions  arctiques  inconnues,  en  pé- 
nétrant dans  les  glaces,  entre  le  Groenland,  le  Spitzberg  et  la 
Nouvelle-Zemble  ;  les  chefs  de  ces  expéditions  sont  convaincus 
que  ces  routes  sont  impraticables*  Cette  conclusion  détermine 
la  route  qui  doit  être  suivie.  La  région  inconnue  couvre  un  es- 
pace de  plus  d'un  million  de  milles  carrés.  On  doit  chercher  ces 
trois  avantages  :  la  perspective  la  plus  étendue  de  découvertes 
dans  les  diverses  branches  de  la  science,  la  certitude  de  par- 
courir des  espaces  encore  inexplorés,  et  la  plus  grande  sécurité 
possible  pour  la  vie  des  navigateurs  qui  s'engagent  dans  l'ex- 
pédition. 

On  ne  peut  trouver  ces  avantages  que  là  où  il  existe  une  Ion 
gue  ligne  de  côtes,  parce  que  c'est  dans  le  voisinage  des  terres 
qu'on  peut  faire  les  découvertes  les  plus  importantes.  L'exis- 
tence et  la  direction  d'un  courant  de  l'Atlantique  qui  descend 
le  long  des  côtes  orientales  du  Groenland  fait  supposer  que 
cette  terre  s'étend  au  nord  bien  au-delà  des  points  qui  ont  été 
explorés  jusqu'à  présent.  Sa  largeur,  dans  sa  partie  la  plus  sep- 
tentrionale connue,  dépasse  600  milles,  et  il  n'y  a  pas  d'autre 
terre  offrant  des  conditions  semblables  aux  confins  du  monde 
inconnu  des  mers  polaires.  L'objet  de  l'expédition  au  pôle  doit 
donc  être  d'explorer  les  côtes  inconnues  du  nord  du  Groen- 
land. 

L'expédition  devrait  être  composée  de  deux  bâtiments  à  hé- 
lice de  médiocre  grandeur,  dont  l'un  stationnerait  à  l'entrée 
du  détroit  de  Smith,  tandis  que  l'autre  s'avancerait  le  plus  loin 
possible  au  nord,  en  maintenant  ses  communications  avec  Tau 
tre  bâtiment.  Du  point  extrême  atteint  par  l'expédition,  des 
excursions  en  traîneau,  dès  le  commencement  du  printemps, 
partiraient  dans  différentes  directions  pour  explorer  les  ré- 
gions inconnues.  Les  avantages  indirects  de  ce  plan  seraient, 
outre  la  découverte  d'une  longue  ligne  de  côtes,  la  sécurité  du 
retour,  le  bâtiment  le  plus  engagé  pouvant  toujours  trouver  du 
secours  à  l'entrée  du  détroit  de  Smith  et  se  replier  au  besoin 
jusqu'aux  établissements  danois  du  Groenland,  comme  l'ont  fait 
de  précédentes  expéditions. 

Les  avantages  directs  seraient  la  découverte  de  la  partie  sep- 
tentrionale du  Groenland  et  des  résultats  importants  dans  la 
plupart  des  sciences  physiques,  tels  que  la  détermination  des 
contours  du  Groenland,  la  reconnaissance  de  l'étendue  et  de  la 
nature  de  la  partie  septentrionale  de  cette  région,  ainsi  que 

L'AUNÉE  GÉOGR.  XI.  20 

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306  RÉGION  ARCTIQUE.  (n*^  372-390.) 

de  Pexistenôe  de  forêts  qui  ont  existé  jusqu'au  pôle,  ainsi 
que  cela  est  démontré,  fait  qui  dément  les  théories  antérieures 
de  la  géologie  sur  la  température  et  les  conditions  du  globe 
pendant  la  période  tertiaire. 


S  8.  Étude  sur  le  Gulf  Stream. 

On  sait  quel  rôle  important  appartient  aa  Grulf  Stream, 
comme  agent  de  température,  dans  la  constitution  physique 
de  TÂtlantique  septentrional  et  d*une  partie  des  mers  arc- 
tiques, et  par  suite  dans  la  direction  à  donner  aux  explo- 
rations polaires  ;  la  mention  de  «quelques  trataux  remar- 
quables dont  ce  grand  courant  océanique  a  été  récemment 
le  sujet  (ci-dessus  à  la  bibliographie,  n*'*376  à379),  est  donc 
ici  parfaitement  à  sa  place.  Parmi  ces  travaux,  nous  dis- 
tinguons particulièrement  celui  de  M.Masqueray  (n^  379),  où 
les  questions  que  le  sujet  soulève  sont  exposées  avec  autant 
de  lucidité  que  de  profondeur  :  ceux  des  lecteurs  qui  n'ont 
pas  sous  les  yeux  cet  excellent  travail,  nous  sauront  gré 
d'en  insérer  ici  quelques  extraits. 

M.  Masqueray  rappelle,  en  commençant,  Timportant 
mémoire  que  le  docteur  Petermann  a  publié  sur  le  Grulf 
Stream  (ci-dessus,  n^  376).  «  Les  nombreuses  observations 
sur  lesquelles  l'auteur  s'est  appuyé,  et  les  conséquences 
auxquelles  il  s'est  trouvé  conduit,  doivent  nous  engager  à 
l'étudier  de  près,  si  nous  osons  recueillir  l'héritage  de 
Gustave  Lambert  ;  car  les  courants  dont  le  docteur  Peter- 
mann constate  l'existence  peuvent  nous  ouvrir  ou  nous 
fermer  l'accès  du  pôle.  Sous  ces  hautes  latitudes^  une 
connaissance  profonde  de  la  physique  du  globe  est  la  pré- 
paration nécessaire  d'une  expédition  maritime.  Le  ther- 
momètre y  devient  un  guide  presque  aussi  important  que 
la  boussole,  et  le  plus  mince  varech  flottant,  un  animalcule 
microscopique,  y  arrêtent  le  navigateur  ou  l'entraînent  à 
leur  suite.  Ce  n'est  pas  seulement  à  force  de  patience  et 

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GULF  STREAM.  307 

d'énergie  que  Hayes  a  pu  faire  flotter  la  bannière  des 
États-Unis  sur  le  bord  de  la  mer  libre,  ni  que  Ross  a 
franchi  la  banquise  du  pôle  sud.  » 

Après  diverses  considérations  sur  les  discussions  qu'ont 
souleyées  quelques  vues  théoriques,  l'auteur  du  mémoire 
entre  dans  l'exposition  du  sujet.  C'est  sur  cette  partie  ins- 
tructive du  travail  que  nous  voulons  surtout  fixer  l'attention 
de  nos  lecteurs. 

On  sait  que  les  eaux  du  golfe  du  Mexique,  accrues  du  Mis- 
sissipi,  augmentent  de  volume  sous  Tardent  soleil  du  tropique, 
se  gonflent,  et  se  frayent  violemment  passage  vers  TAtlantique 
plus  froid  et  d'un  niveau  moins  élevé.  Ce  courant  du  golfe  (Guîf 
Stream)  roule  vers  le  nord  en  suivant  la  côte  d'Amérique.  Ses 
eaux,  d'un  bleu  sombre,  se  distinguent  nettement  sur  la  surface 
de  l'Océan  au-dessus  de  laquelle  son  axe  s'élève  d'environ  deux 
pieds;  il  a  comme  des  rives  indiquées  par  des  sillons  d'écume. 
Sa  vitesse  est  telle  qu'il  file  quatre  nœuds  en  trente  secondes, 
c'est'à-dire  k  milles  marins  ou  3  milles  géographiques  à  Theiure, 
en  sortant  du  golfe  :  au  cap  Hatteras,  il  file  encore  trois  nœuds. 
Il  se  fait  place  à  mesure  qu'il  descend  vers  le  nord,  et  sa  lar- 
geur, qui  n'est  que  de  2^  milles  géographiques  dans  le  détroit 
de  la  Floride,  est  plus  que  doublée  au  nord  de  Gharleston.  Nos 
fleuves  terrestres  ne  peuvent  donner  aucune  idée  de  cet  énorme 
torrent  de  l'Atlantique.  Suivant  la  côte  d'Amérique,  il  s'incline 
vers  l'est  par  le  45®  parallèle,  à  une  certaine  distance  des  côtes 
de  la  Nouvelle-Ecosse  et  de  Terre-Neuve,  traverse  la  moitié  de 
l'Atlantique,  et  lance  une  dérivation  considérable  vers  les  Aço- 
res,  les  côtes  d'Espagne,  de  France  et  du  Maroc.  Cette  dériva- 
tion, heurtée  par  les  terres,  se  replie  sur  elle-même,  et,  décri- 
vant une  ellipse  dont  le  grand  axe  serait  la  distance  qui  sépare 
les  lies  Bahama  des  Canaries,  revient  au  point  de  départ  du 
Gulf  Stream  par  la  mer  des  Caraïbes.  C'est  dans  Tintérieur  de 
cette  ellipse  nommée  mer  des  Sargasses^  que  Christophe  Co- 
lomb rencontra  ces  fameuses  prairies  de  varech,  praderias  de 
yerba^  que  tous  les  navigateurs  de  ces  parages  y  trouvent  en- 
core, amas  flottants  qui  demeurent  emprisonnés  sur  la  surface 
de  la  mer  par  le  courant  qui  les  enveloppe. 

Le  courant  polaire  heurte  donc  par  le  travers  le  Gulf 
Stream  précisément  au  point  d'où  ce  dernier  envoie  vers  les 
côtes  d'Espagne  sa  dérivation  orientale.  Les  eaux  froides  et 

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308  RÉGION    ARCTIQUE.  (n°'  372-390.) 

ternes  font  fléchir  le  tiède  courant  mexicain  sur  lequel  passent 
les  icebergs. 

Le  Gulf  Stream  résiste  et  poursuit  sa  route  ;  mais  il  semble 
que  ses  eaux  tourbillonnent  sous  un  tel  choc.  Une  partie  de 
son  courant,  comme  revenant  sur  elle-même,  décrit  un  arc  de 
cercle  dans  la  direction  du  nord-ouest,  ne  peut  traverser  le 
courant  polaire,  le  côtoie,  descend  vers  le  Nord,  et  s'engage 
précisément  dans  ce  canal  de  Davis  que  semble  remplir  son 
adversaire.  Elle  se  glisse  le  long  de  la  côte  occidentale  du 
Groenland,  et,  bien  qu'elle  se  refroidisse  au  contact  des  glaces, 
elle  se  fait  encore  sentir  dans  la  baie  de  Melville  au  débouché 
du  Smith  Sund.  L'autre  partie  du  Gulf  Stream,  de  beaucoup  plus 
considérable,  va  baigner  les  côtes  d'Irlande  et  d'Ecosse,  les 
Shetland,  les  Forcer  et  l'Islande. 

Il  suffit  d'avoir  visité  l'Irlande  ou  de  jeter  les  yeux  sur  une 
carte  de  lignes  isothermes,  pour  savoir  que  le  Gulf  Stream  n'est 
point  anéanti  par  le  courant  polaire  à  la  hauteur  de  Terre- 
Neuve.  L'Irlande  et  les  côtes  d'Ecosse  jouissent  d'un  climat 
constamment  doux.  Si  le  raisin  n'y  mûrit  point,  bien  que  les  ' 
hivers  y  soient  moins  rudes  qu'en  Hongrie  ei  en  Moldavie, 
c'est  que  la  chaleur  de  l'été  n'est  pas  suffisante.  Mais  le  myrte 
peut  y  croître,  et  les  troupeaux,  aJjrités  contre  les  bourrasques 
par  des  parcs  circulaires  plantés  de  pins,  y  passent  en  hiver  la 
plus  froide  saison  ;  tandis  que  sur  les  côtes  de  Terre-Neuve  et 
du  Labrador,  les  phoques  s'étendent  sur  leurs  bancs  de  glace 
par  une  température  moyenne  de  —  8  et  —  16  degrés  Réau- 
mur.  La  chaleur  semble  croître  en  Angleterre  à  mesure  qu'on 
s'élève  vers  le  Nord,  dans  les  terres  profondément  découpées, 
parmi  les  petites  lies  tout  entières  baignées  par  le  Gulf  Stream. 
Sans  lui,  sans  la  tiède  barrière  dont  il  les  enveloppe,  elles  se- 
raient envahies  par  les  glaces  du  courant  polaire,  emprisonnées 
dans  les  icebergs.  Il  les  protège  môme  de  son  atmosphère  ;  car, 
à  proprement  parler,  il  a  son  atmosphère  :  il  attiédit  les  lourds 
vents  d'Ouest  qui  roulent  sur  sa  surface  vers  les  côtes  d'Eu- 
rope, il  les  charge  de  sa  vapeur  d'eau,  et  cette  vapeur  se  résout 
en  brouillards  épais,  qui,  loin  de  refroidir  les  lies,  y  conser-  \ 
vent  la  chaleur.  Mais  plus  encore  quelles  Shetland  et  les 
Faroer,  l'Islande,  qui  touche  au  cercle  polaire,  participe  à  l'in- 
fluence bienfaisante  du  Gulf  Stream,  notamment  dans  sa  partie 
occidentale.  Reykjawik  donne  -{-  1®  en  janvier ,  quand ,  par  la 
môme  latitude,  dans  le  canal  de  Davis,  Lichtenfels  donne  —  9, 
et  Gotthaab  —  8.  c  Je  dois  avouer,  raconte  le  docteur  Hander- 


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GULF   STREAM.  309 

son,  que  je  m'effrayais  grandement  à  l'idée  de  demeurer  un 
hiver  en  Islande.  Quel  ne  fut  pas  mon  étonnement  de  trouver 
que  non-seulement  la  température  y  est  plus  élevée  qu'au  Da- 
nemark où  j*avais  passé  Thiver  précédent,  mais  encore  que 
l'hiver  islandais  ne  le  cède  en  rien  aux  plus  doux  hivers  de  la 
Suède.  Les  moutons  et  les  chevaux  ordinaires  y  demeurent 
toute  l'année  en  plein  air.  Les  lacs  près  de  Reykjawik  ne  gè- 
lent guère  que  de  deux  pouces,  et  le  plus  grand  froid  qu'on  y 
ait  observé  pendant  treize  années  est  de  12»  R.  »  La  tempéra- 
ture de  la  mer  qui  baigne  la  côte  occidentale  de  l'Islande  est  de 
-j-  8»  en  été,  et  +  2®  en  hiver.... 

Le  Gulf  Stream  subit  entre  l'Islande  et  les  Faroer  la  même 
attaque  qu'auprès  de  Terre-Neuve  :  moins  violente  il  est  vrai, 
car  le  coin  du  courant  polaire  est  moins  aigu  cette  seconde  fois 
que  la  première,  mais  cependant  assez  forte  pour  que  dans  le 
mois  de  juillet  les  froides  eaux  de  0^  fassent  plier  les  lignes 
isothermes  de  2*  de  près  de  soixante-quinze  lieues.  Le  treibeis 
(glace  flottante  en  fragments),  entrant  dans  le  Gulf  Stream 
comme  les  icebergs  du  Labrador,  apparaît  sur  la  côte  orientale 
de  l'Islande.  Les  résultats  de  ce  second  choc  sont  analogues  à 
ceux  du  premier.  De  même  qu'à  la  hauteur  de  Terre-Neuve 
une  mince  partie  du  Gulf  Stream,  se  redressant  sous  le  coup  du 
courant  polaire,  a  pris  une  direction  Nord  et  a  pénétré  dans  le 
détroit  de  Davis,  de  même,  au  nord-est  de  l'Islande,  au  point 
où  pour  la  seconde  fois  le  courant  polaire  heurte  le  Gulf 
Stream,  une  dérivation  assez  considérable  se  détache  du  cou- 
rant mexicain,  et,  mêlant  ses  eaux  bleues  aux  eaux  vertes  du 
pôle,  descend  vers  le  Spitzberg.  Elle  refoule  les  icebergs ,  at- 
teint la  côte  occidentale  du  Spitzberg,  s'insinue  dans  ses  fjords, 
le  dépasse,  puis,  manquant  de  forces,  s'arrête  et  s'arrondit  de- 
vant un  formidable  cirque  de  glaces  qu'elle  semble  maintenir. 
Sans  doute,  à  80»  au  nord  de  l'Equateur,  par  le  parallèle  du 
Smith  Sund,  le  Gulf  Stream  ne  conserve  pas  les  6  degrés  de 
chaleur  qu'il  possédait  encore  sur  les  côtes  d'Islande  ;  mais  on 
y  trouve  encore  en  juillet  une  moyenne  de  2  degrés,  et  même 
de  k  sur  certains  points.  Grâce  à  lui  l'hivernage  est  possible  au 
Spitzberg. 

Pendant  qu'une  branche  du  Gulf  Stream  descend  ainsi  vers 
le  Spitzberg,  le  courant  principal,  toujours  tiède  de  8  à  6%  se 
dirige  toujours  aussi  vers  le  nord-est,  enveloppant  la  côte  de 
Norvège.  iFrûholm,  à  l'extrémité  de  la  pointe  la  plus  septen- 
trionale de  l'Europe,  jouit  en  hiver  du  climat  de  Toulouse.  La 

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310  RÉGION  ARCTIQUE.  (n<^*  372-390.) 

Norvège  entière ,  qui  dépasse  de  cinq  degrés  de  latitude  le 
cercle  polaire,  vit  da  Gulf  Stream,  depuis  Lindesnaes  dans  la 
mer  du  Nord,  jusqu'à  Yardô,  près  de  la  mer  Blanche.  Elle 
lui  doit  son  commerce,  sa  nourriture  de  chaque  jour,  ses  sau- 
mons, ses  bancs  de  harengs  qui  couvrent  la  mer  à  la  hauteur 
de  Âaswer  sous  le  cercle  polaire...* 

Deux  fois  déjà,  à  l'ouest  et  à  Test  du  Groenland,  le  courant 
polaire  a  heurté  le  Gulf  Stream  par  le  flanc  :  deux  fois  il  est 
sorti  vainqueur  du  combat.  La  première,  il  a  pu  atteindre  l'Is- 
lande, les  Faroer  et  les  côtes  d'Ecosse;  la  seconde,  le  Spitzberg 
et  les  côtes  de  Norvège.  Maintenant  il  touche  à  sa  fin,  ou  du 
moins  il  va  se  perdre  en  divers  courants  secondaires  difficiles 
à  suivre,  même  la  sonde  et  le  thermomètre  à  la  main,  dans  la 
mer  de  Kara,  le  long  de  la  Sibérie,  et  jusque  dans  le  bassin 
libredelaPoljnia...« 

Nous  ne  suivrons  pas  plus  loin  M.  Masqueray;  c'est  au 
mémoire  même  que  doivent  recourir  ceux  qui  voudront 
entrer  à  fond  dans  Tétude  de  cet  important  chapitre  de 
l'hydrographie  des  mers  occidentales. 


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EUROPE 


RUSSIE. 


391.  Will.  H.  DixoN.  La  Russie  libre,  voyage  trad.  de  Tangl.  par 
E.  Jonveaux.  Paris,  1872,  gr.  in-8*,  488  pages,  avec  75  grav. 
dans  le  texte  (Hachette). 

La  Russie  libre  est  une  étude  complète  et  vivante  de  Timmense  Em- 
pire, tel  qae  Ta  fait  sa  libération  du  servage.  Ce  n'est  point  par  la  fa- 
çade trompeuse  de  Saint-Pétersbourg  où  tant  de  voyageurs  s'arrêtent 
d'ordinaire,  c'est  par  Ârkhangel,  la  porte  du  Nord,  b  foyer  glacé  de  la 
vieille  famille  moscovite,  que  l'auteur  a  abordé  la  Russie.  Il  descend 
profondément  dans  l'intérieur  de  ce  peuple  muet  et  si  peu  connu  ;  il 
ausculte,  pour  aiqsi  dire,  sessoufirances  cachées  et  sesvagues  instincts 
d'un  destin  meilleur.  Il  fait  défiler  devant  le  lecteur,  en  les  observant 
et  en  les  interrogeant  au  passage,  ses  prêtres,  ses  moines,  ses  pèle- 
rins, ses  mendiants,  les  sectaires  de  ses  hérésies  mystérieuses,  les  Co- 
saques et  les  Kirghis  nomades  qui  chevauchent  ^dans  ses  steppes  à 
perte  de  vue.  De  cette  investigation  si  curieuse  résulte  un  livre  rempli 
de  faits  nouveaux  et  d'aperçus  pénétrants,  qui,  à  l'intérêt  d'une  rela- 
tion pittoresque,  joint  les  révélations  précises  d'une  solide  enquête. 
On  ne  p^at  eonoattre  la  Russie  noaveUe  saob  avoir  lu  le  voyage  de 
M»  Diion  (Paul  de  Saint- Victor). 

392.  L.  DE  FoNTENAY.  Voyago  agricole  en  Russie.  Paris,  1872,  in-8^ 

393.  F.  Rem  Y.  Die  K.rim,  in  ethnograpbiscber,  landscbaftlicher,  und 
hygîenischer  Beziehung.  Leipzig,  1872,  petit  in-8%  xiv-244  p. 
Carte  et  fig. 

394.  F.  J.  WiEDEHANN.  Ueber  die  Nationalitat  und  die  Sprache  der 
jetrt  ausgestorbenen  Kree^nen-  in  Kurland.  Mémoires  de  Va- 
cad,  impér.  as  St.  PéUrsb,,  t.  XVII,  n"  2,  119  pages,  gr.  in-4'', 
1871. 

Monographie  complète,  ethnographique  et  linguistique,  de  cette 
tribulive  des  Krévinghes,  qui  a  joué  un  rôle  assez  considérable  dans 
l'ancienne  histoire  delà  Russie. 

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312      '  EUROPE.  (n«*  391-400.) 

395.  H.  HowoRTH.  The  Finns  and  some  of  ther  allies  (Mémoire  lu  le 
3  juin  1871  au  sein  de  rAnthropological  înstitute  de  Londres). 

D'après  la  note  analytique  insérée  dans  rAtheuaeum,  l'objet  de  ce 
mémoire  est,  en  premier  lieu,  d'établir  nettement  la  distinction  qui 
sépare  les  Finnois  des  Lapons,  deux  peuples  entièrement  difiërents  par 
les  destinées  historiques,  la  configuration  physique,  les  usages  et  le 
genre  de  vie  (quoique  les  deux  idiomes  soient  de  la  même  famille)  ; 
et  en  second  lieu,  de  montrer  que  les  Esthoniens  appartiennent  à  la 
branche  finnoise  plutôt  qu'à  la  branche  lapone.  L'auteur  a  réuni  une 
série  de  témoignages  montrant,  contre  l'opinion  commune,  que  l'éta- 
blissement des  Finnois  et  des  Esthoniens  dans  leurs  demeures  actuelles 
est  de  date  très-récente  ;  il  remonte  jusqu'à  leur  première  patrie  au- 
delà  de  la  Dvina,  où  les  Norses  ou  Norvégiens  les  connurent  sous  le 
nom  de  Biarmiens,  et  les  premiers  chroniqueurs  russes  sous  le  nom 
de  Tchoudes  Sarvaloks. 

396.  Bulletin  (Isvestïa)  de  la  Société  impériale  de  Géographie  russe. 
T.  VU,  cah.  5-8, 1871;  t.  VIII,  cah.  1,  1872  (en  russe). 

Voici  l'indicatipn  des  principaux  morceaux  contenus  dans  ces  ca- 
hiers : 

T.  VIII,  6«  cah.  Notices  sur  les  Turkomans;  —  Przwalskif  Notes 
sur  le  S.  E.  de  la  Mongolie  (V.  ci-dessus,  p.  166)  ]— Krapotkïn,  Études 
scientifiques  en  Finlande.  —  7»  cah.  Vénioukoff,  Notice  sur  la  popula- 
tion d'une  partie  de  la  Dzoungarie  (le  khanat  de  Kouldja  et  la  prov.  de 
Semipalatinsk  ou  Dzoungarie  russe)  ;~  du  même  :  Carte  du  Nord-Onest 
de  la  Mongolie,  et  Notice  explicative  (v.  ci-dessus,  p.  166).  —  8*  cah. 
PalladiuSj  les  Mantzi  de  l'Oussouri  (v.  ci-dessus,  p.  165);  —  Fe'nton- 
koffj  Éléments  de  la  populationrdu  Territoire  de  l'Amour.  —  T.  VIII, 
l«'cah.,  Fedchenko,  sur  son  voyage  à  Kokand  (v.  ci-dessus,  p.  157). 

397.  Compte-rendu  annuel  des  travaux  de  la  Société  de  Géographie 
russe.  St.  Pétersb.,  1872,  in-8%  170  p.  (en  russe). 

398.  Mémoires  de  la  Société  de  Géographie  russe.  Géographie  géné- 
rale; section  mathématique  et  physique.  T.  II,  rédigé  par  P.Sé- 
ménofif;  St,  Pétersh.,  1869,  in-8%  719  pages,  avec  3  cartes  (en 
russe). 

Danilefski;  Recherches  sur  le  delta  du  Kouban  ;  Carte.  —  Du  même, 
Quelques  réflexions  sur  la  terminologie  géographique  des  Russes,  à 
l'occasion  des  mots  liman  et  ilmen.  —  Extraits  d'une  lettre  du  même, 
sur  les  résultats  de  son  voyage  à  la  Manitch.  —  Helmenen,  sur  la 
question  de  Tensablement  de  la  mer  d'Azof.  —  P.  Teiiékoff,  le  terri 
toire  du  Touroukhansk.—  V.  Latkïn,  l'industrie  du  cercle  de  Ienisseï- 

—  T.  IV,  rédigé  par  P.  Krapotkïn.  St,  Fétersb.,  1871,  in-8»; 
536  p,  avec  6  cartes  et  7  tableaux*. 

J.  B.  Auerbackf  lemontBogdo,  étude  géologique  et  paléontologique. 

—  E.  Lenzj  Ce  que  nous  savons  de  l'ancien  cours  de  l'Amou-daria-, 
Cartes.  —  A.  Kouchakavitch,  Aperçu  géographique,  ethnographique  et 
économique  du  cercle  de  Kodjend;  Cartes.  —  C.  Mischenkoff,  Observa- 
tions faites  durant  l'expédition  de  la  vallée  de  Zérafchàn  ;  —  Archiman- 

1.  Le  3»  volume  n'est  pas  encore  paru. 

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RUSSIE.  în3 

drite  Palladiue,  Notes  de  Yoyage  de  Peking  à  Blagovetchensk  à  travers 
la  Mandchourie,  en  1870.  ^  B»"  Maïdel,  Notice  sur  les  travaux  de  l'ex- 
pédition de  la  Mourmàn. 

—  Section  ethnographique,  t.  IV  ;  rédigé  par  M.  I.  Savélief. 
St.  Pétersh.,  1871,  in-8%  634  pages,  avec  2  cartes. 

Chants  religieux  de  la  secte  des  <  serviteurs  de  Dieu,  »  recueillis  par 
M .  Barsoff.  —  A.  Galkïn^  Mémoire  explicatif  de  la  carte  ethnogra- 
phique du  roy.  de  Pologne.  —  P.  Mitkoûtzki,  Fragments  de  la  langue 
des  Slaves  de  TElbe.  —  Vilîiers  de  l'hle-Âdam,  le  village  de  Knèsnaïa 
Gora  et  ses  environs,  esquisse  ethnographique.  —  Polonskij  les  Kou* 
riles,  aperçu  géographique,  ethnographique  et  historique.  —  N.  Mal- 
fioffj  les  Bulgares.  —  Archimandrite  Leonidas,  Éclaircissements  sur  la 
carte  des  trois  églises  slaves  autonomes  de  la  presqu'île  de  Balkan. 

—  Section  Statistique,  t.  Il,  St,  Pétersh.  1871,  in-8%  385  p. 

y.  Makchéïef,  Matériaux  géographiques,  ethnographiques  et  statis- 
tiques sur  le  Turkestan.  —  A.  Popoff,  Mouvement  de  la  population  du 
gouvernement  de  Vologda.  —  Th.  Popoff^  Notes  de  voyage  sur  Hankao 
et  les  fabriques  russes  de  thé.  —  N.  iroïamki.  Notions  statistiques 
sur  la  Servie.  —  v/.'^Radloffj  Relations  commerciales  entre  la  Russie 
et  la  Mongolie  occidentale. 

399.  J.  Spôrer.  Die  Arbeiten  der  Kaiserl.  Russischen  Geographischen 
Gesellschaft  im  Jahre  1871.  Mittheilungen  de  Petermann,  1872, 
n^e,  p.  211-216. 

Dans  cet  aperçu,  M.  SpSrer  a  concentré  les  résultats  des  principaux 
travaux  contenus  dans  les  publications  que  nous  venons  d'énumérer. 

400.  Manuel  Militaire  et  Statistique.  Russie.  Édité  par  une  société 
d'officiers  d'État-Major,  et  rédigé  par  le  G*'  Obroutcheff.  St.  Pé- 
tersh, j  1871,  in-4*,  1157  pages,  avec  un  atlas  de  36  cartes  (en 
russe). 

M.  H.  Wagner  a  donné  dans  les  Mittheilungen  de  Petermann,  1872, 
p.  236,  un  aperçu  analytique  de  cette  importante  publication. 


Un  mot  sur  la  géographie  militaire  de  la  Russie. 

Voici  une  courte  notice  qui  a  son  intérêt;  elle  est  em- 
pruntée par  la  Correspondance  Slave  à  une  publication  du 
capitaine  Brakenbourg. 

La  Russie,  n'ayant  point  &  craindre  d'invasion  du  côté 
de  Test,  a  porté  vers  TOccident  tout  J*efiFort  de  sa  défen- 
sive. 

C'est  surtout  depuis  la  guerre  de  Grimée  qu'elle  a  fait 
les  plus  grands  sacrifices.  La  construction  de  ses  chemins 

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314  /     EUROPE.     ^  (n°»  391-400.) 

de  fer  et  de  nouvelles  fortereeses  oo:t  été^  à  ce  point  de 
vue^  sa  préoccupation  la  plus  constante  depuis  plue  de  dix 
ans. 

Les  chemins  de  fer  ont^  en  effet,  en  Ruesie,  une  impor- 
tance stratégique  considérable* 

Quatre  lignes  se  dirigent  vers  Tonest;  quatre  autres 
lignes  vont  au  sud.  Toutes  sont  disposées  de  façon  à  pou- 
voir concentrer  et  transporter  rapidement^  en  très*peu  de 
temps,  une  armée  formidable,  soit  vers  les  frontières 
allemandes,  soit  sur  les  rives  de  la  mer  Noire. 

En  outre,  les  voies  ferrées  forment  un  immense  réseau 
assurant  les  communications  constantes  entre  les  fortes 
resses  de  Kertch  sur  la  mer  Noire,  et  de  Kief  sur  le  bas 
Dnieper,  avec  Moscou,  aussi  bien  qu'entre  celles  du  nord, 
telles  que  Sveaborg  et  Viborg  en  Finlande  avec  Saint- 
Pétersbourg. 

Mais  où  le  génie  des  fortifications  a  vraiment  fait  des 
prodiges,  c'est  en  Pologne. 

On  a  transformé  ce  pays  en  un  quadrilatère  aussi  redou- 
table que  celui  de  l'ancien  royaume  lombard. 

Il  est  formé  de  quatre  forteresses,  c'est-à-dire  de 
Modiïn,  Novogeorgievsk,  Ivangorod  et  Brzesc-Litevski. 

Ces  forteresses  constituent  des  refuges  inexpugnables, 
celle  de  Modiïn  surtout.  Située  au  confluent  du  Bug  et  de 
la  Yistule,  elle  est,  suivant  l'expression  de  M.  Brakenburg, 
la  forteresse  idéale. 

Immense,  silencieuse  et  sombre,  aussi  propre  à  l'attaque 
qu'à  la  défense,  elle  n'a  point  de  population  civile.  Des 
troupes  de  toutes  armes^  voilà  ses  seuls  habitants.  Donc 
rien  k  ménager  en  temps  de  guerre. 

Ivangorod  est  moins  important.  Mais  Brzesc-Litevski  ne 
le  cède  guère  &  Modiïn.  Toute  armée  s'engageant  dans  les 
plaines  de  la  Pologne  devrait  immobiliser  des  forces  énor- 
mes pour  tenir  tête  à  ces  forteresses,  qui  sont  ^provision- 
nées et  armées  sur  le  pied  le  plus  formidable^  Modiïn,  rien 

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RUSSIE.  315 

que  dans  ses  casemates,  peut  renfermer  20,000  hommes, 
et  elle  n'offre  aucune  prise  à  l'ennemi,  sinon  par  la  bombe. 
^  Cette  dernière  est  l'œuvre  du  général  Totleben,  qui  a 
hérité  de  la  science  de  Vauban.  Ce  quadrilatère,  placé 
dans  l'espace  que  la  Pologne  occupe  au  centre  de  l'Europe, 
s'appuie  au  sud  sur  la  citadelle  de  Zamosc,  qui  ferme  la 
route  de  Léopold  à  Varsovie,  et  sur  celle  de  Bobruïsk,  com- 
mandant le  pays  entre  la  Dvina  et  le  Dnieper,  pendant  que 
le  eentre  de  la  défense,  par  le  bas  Dni^er,  se  trouve 
à  Kief. 

Dunabourg  protège  en  arrière  la  jonction  des  chemins 
de  fer  de  Varsovie  à  Saint-Pétersbourg,  et  celle  de  Riga 
protège  Smolensk,  tandis  que  Cronstadt  couvre  la  capi* 
taie  russe. 

De  plus,  c'est  à  Varsovie  que  se  rencontrent  les  grandes 
voies  de  Posen  et  Breslau,  de  Lemberg  et  de  Craeovie. 

Ville  fort  médiocre  par  elle-même»  Varsovie»  au  point 
de  vue  xnilitaire,  aune  importance  redoutable  que  lui  don- 
nent les  travaux  dedé&nse  de  Hodlïn  et  de  Brzesc-Iitevski. 
Enfin,  commumdant  la  Vistule,  elle  ferme  hermétiquement 
les  chemins  de  Pétersbourg  et  de  Moscou. 

Voilà  quinze  sxxs  que  le  tzar  et  ses  ct^nseillers  consacrent 
leurs  efforts  et  tout  Targent  dont  ils  ont  pu  disposer  à  ce 
prodigieux  et  gigantesque  travail.  A  cette  heure,  la  fron- 
tière russe  vers  l'Occident  présente  un  front  redoutable  de 
forteresses,  reliées  entre  elles  par  des  voies  ferrées  qui 
mettent  toutes  les  parties  de  l'empire  en  communication. 


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316  EUROPE.  (n-  401-412.) 

II 

TURQUIE   D'EUROPE. 

PRINCIPAUTÉS. 


401.  Faits  commerciaux  relatifs  aux  ports  de  la  Turquie.  Annales 
du  Commerce  extérieur,  n"  1889.  Turquie,  n»  30  (avril  1872)- 
36  pages. 

Ce  no  présente  nn  tableaa  complet  du  mouvement  de  tous  les  ports 
de  la  Turquie,  en  Europe  et  en  Asie,  pour  Tannée  1868  en  général,  et 
pour  quelques  ports  pour  1869  et  1870. 

402.  Paul  Chaix.  Le  Danube;  amélioration  de  son  embouchure.  Le 
Globe,  journal  de  la  Soc.  de  Géographie  de  Genève,  t.  XI,  n'  3, 
1872,  p.  51-56. 

«  Le  Danube  est  le  premier  fleuve  de  l'Europe,  sinon  par  le  volume 
de  ses  eaux  et  retendue  de  son  bass'  n,  du  moins  par  son  importance 
commerciale  et  celle  des  États  qu*il  traverse  et  dessert.  Il  se  décharge 
dans  la  mer  Noire  par  trois  embouchures,  dont  l'intermédiaire,  celle  de 
Soulina,  est  la  seule  employée  malgré  son  faible  volume  d'eau,  ses 
bancs  et  ses  coudes,  parce  qu'elle  n'est  pas  barrée.  En  vertu  d'un  ré- 
cent traité,  une  Commission  nommée  par  sept  puissances  européennes 
intéressées  dans  la  question,  siège  à  Galatz  pour  administrer  tout  ce 
qui  est  relatif  à  la  navigation  des  bouches  du  Danube,  et  la  perfection- 
ner. Cette  navigation  avait  l'inconvénient  de  n'être  possible  que  pour 
de  très-petits  bâtiments,  d'exiger  des  transbordements  très-incommodes 
entraînant  une  grande  dépense  de  temps  et  d'argent,  d'obliger  les  vais- 
seaux à  stationner  dans  une  rade  ouverte  pendant  une  mauvaise  saison, 
ce  qui  occasionnait  d'innombrables  sinistres.  La  Commission  s'est  mise 
activement  à  l'œuvre.  Par  des  draguages  et  des  coupures  aux  endroits 
convenables,  par  des  digues  prolongées  fort  loin  dans  la  mer,  elle  a 
graduellement  creusé  et  rectifié  le  chenal.  Elle  en  a  ouvert  l'accès  en 
tonte  saison  à  des  bâtiments  d'un  assez  fort  tonnage.  Elle  a  ainsi  dimi- 
nué dans  une  proportion  énorme  le  nombre  des  sinistres  et  le  temps 
requis  par  les  besoins  du  service,  en  augmentant  parallèlement  le 
nombre  des  vaisseaux  qui  viennent  prendre  cargaison  et  le  total  des 
exportations.  Les  frais  de  tout  genre  ont  été  notablement  réduits  et  le 
seront  encore.  » 

403.  Ferd.  von  Hochstetter.  Das  Vitos-Gebiet  in  der  Central-Tùrkei- 
MittheiL  de  Petermann.  1872,  n»'  1  et  3,  p.  1-4, 82-100;  carte. 

Morceau  fort  important  pour  l'orographie  et  l'hypsométriede  la  Tur. 
quie.  Nous  y  reviendrons  plus  bas  dans  nos  développements.  —  La 
partie  historique  des  voyages  de  M.  de  Hochstetter  comme  géologue 
d'une  commission  d'études  autrichienne  pour  le  tracé  du  chemin  de 
fer  de  Belgrade  à  Salonique  (/?ets«  durch  Humelien,  etc.),  est  au  Joor- 


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TURQUIE.  317 

nal  de  la  Société  de  Géographie  de  Tienne  (_MiUheilungen  der  Geogr. 
Gesellsch.  in  Wien)j  1870-1871.  —  Voir  aussi  notre  volume  précédent, 
p.  294,  n»  476 . 

404.  À.  BoDÉ.  Die  tûrkischen  Ëisenbahoen^  und  die  Géologie  der 
Central-Tûrkei.  Sitzungsbericht  der  Wiener  Akademiej  Lx,  374. 
—  Du  même  :  BerichtiguDgen  zurHahn'schenKarte  des  Flussge- 
biets  des  Drin  und  des  Yardar,  in  Nord-Albanien  und  Macédo- 
nien. Ibid.y  p.  633. 

Voir  le  vol.  précédent  de  VÀnnét  Géogr.,  p.  294,  n»  478. 

405.  Alb.DuMONT.  Souvenirs  de  l'Adriatique.  Revue  des  Veux  Mondes^ 
l"oct.,  l"nov.,  l"déc.  1872.  , 

Morceau  d'an  vif  et  puissant  intérêt,  et  en  même  temps  d^une  haute 
valeur  comme  étude  historique,  ethnographique  et  géographique.  Mous 
y  reviendrons  ci-après. 

406.  Lehnert.  Zur  Kenntniss  von  !Siid-Albanien.  Mittheilungen  der 
Geogr,  Gesellschaft  in  Wien,  oct.  1872,  p.  441-471  ;  carte. 

Les  cartes  de  la  côte  albanienne,  qui  reposent  toutes  sur  le  levé  de 
Marieni,  datant  de  1824,  ne  sont  ni  complètes  ni  d'une  exactitude  suf- 
fisante pour  l'usage  de  la  marine  ;  il  a  été  décidé  en  1870  que  la  côte 
de  l'Albanie  turque  serait  comprise  dans  le  levé  général  de  la  partie 
.  orientale  de  l'Adriatique  exécuté  par  les  officiers  de  la  marine  autri- 
chienne. M.  Lehnert,  lieutenant  de  vaisseau,  chargé  de  la  portion  de 
ce  travail  comprenant  la  baie  de  Valona  et  Tembouchure  de  la 
Yoïoussa,  a  mis  à  profit  les  facilités  que  lui  donnait  cette  mission  pour 
recueillir  sur  le  pays  les  notes  et  les  renseignements  physiques,  géo- 
graphiques et  statistiques  dont  se  compose  son  mémoire.  La  carte,  à 
l'échelle  du  300  000",  est  une  excellente  acquisition  ;  en  la  comparant 
à  la  récente  carte  de  l'Épire  et  de  la  Thessalie  de  M.  Kiepert,  on  com- 
prend quels  prodigieux  changements  un  véritable  levé  de  la  Turquie 
d'Europe  apportera  dans  le  tracé  de  nos  cartes  actuelles,  toutes  con- 
struites à  peu  près  exclusivement  sur  de  simples  renseignements. 

407.  F.  Kanitz.  Reise  im  Bulgarischen  Donau,  ïimok-und  Sveli  Ni- 
koIa-Balkan-Gebiet.  JUittheil.  de  la  Soc.  de  Géogr.  de  Vienne, 
1872,  n"»  2  et  3,  p   61-72,  105-112. 

Remarques  sur  les  cartes  de  ces  cantons  mal  connus.''— Voir  le  pré- 
cédent volume  de  V Année  Gébgraphique,  p.  293,  n»  474. 

408.  Du  même  :  Zur  Synonymik  der  Orts-Nomenclatur  West-Bulga- 
riens.  Mittheil,  der  Geogr.  Gesellschaft  in  Wien,  mai  1872  (xv, 
5),  p.  217-220. 

Liste  de  localités  de  la  Bulgarie  occidentale,  sous  la  double  forme 
des  noms,  turque  et  bulgare. 

409.  H.  Kiepert.  Carte  de  FEpire  et  de  la  Thessalie.  Berlin,  1871, 
2  feuilles  (au  500000'). 

Cette  carte,  sauf  pour  les  côtes,  n*est  à  vrai  dire  qu*une  étude  basée 
sur  la  combinaison  des  itinéraires  fournis  jusqu'à  présent  par  les  voya- 
geurs. Dans,  une  certaine  mesare,  cette  combinaison  peut  conduire  à 


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318  EUROPE.  (n"  401-412.) 

placer  d*ane  manière  au  moins  approiimative  les  villes  principales  et 
les  positions  intermédiaires  ;  mais  le  figuré  du  terrain  et  le  tracé  des 
riyières  restent  forcément  très-incertains  et  livrés  en  grande  partie  à 
l'arbitraire.  ^  Voir  nos  remarques  ci-dessus,  au  n°  406. 

410.  £.  D£GUBERRATis.  L'Ëpiro;  relazione  d'un  viaggio  da  Janina  a 
Yalona.  BoUettino  délia  società  Geogr.  itcUiana,  vol.  YIII.  Oc- 
tob.  1872,  p.  1-26. 

411.  P.  Bataillàrd.  Les  derniers  travaux  relatifs  aux  Bohémiens  de 
l'Europe  orientale.  Paris ^  1872,  in-8'',  80 pages  (Franck). 

M.  Bataillàrd  s'est  consacré  depuis  de  longues  années  à  Tétude  des 
questions  qui  se  rattachent  à  l'origine,  aux  migrations,  à  Tidiome  et 
aux  habitudes  de  cette  race  dégradée.  On  lui  doit  déjà  deux  publica- 
tions sur  ce  sujet  :  De  Vapparition  et  de  la  dispersion  des  Bohémimt 
en  Europe j  1844  ;  et  Nouvelles  recherches  sur  Vapparition  des  Bohé- 
miens en  Europe,  1849. 


412.  JuBiBN  DE  LA  Grayière.  Les  mlssions  extérieures  de  la  marine. 
Délimitation  du  Monténégro,  ii^tme  des  Deuo;  Mondes,  l^'avr.  1872, 
p.  Ô73-596. 


Souvenirs  d'une  mission  qui  remonte  à  1858.  Pour  qui  voit  dans  rhis-         i 
toire  autre  chose  que  le  froid  squelette  du  fait  matériel,  les  lignés  soi-         ' 
vantes,  qui  terminent  l'attachant  récit  de  Tamiral  Jarien  de  laGravière,         | 
ne  peuvent  être  lues  sans  une  sympathique  émotion  -,  et  ce  passage         i 
n'est  pas  le  seul  où  l'auteur  de  ces  pages,  écrivain  non  moins  éminent 
que  brave  et  savant  marin,  ait  révélé  par  un  mot,  par  un  cri  sorti  da 
cœur,  les  sentiments  qui  à  l'heure  actuelle  remplissent  Tàme  du  dé- 
voué patriote,  du  citoyen  honnête  homme  :  «  Je  n'essayerai  pas,  écrit- 
il,  de  contredire  les  philosophes  qui  prétendent  que  ■  la  vertu  est  si 
<  nécessaire  aux  hommes  et  si  aimable  par  elle-même,  qu'on  n'a  pas  be- 
*  soin  de  la  connaissance  d'un  Dieu  pour  la  suivre;  »  je  n'en  croirai  pas 
moins  cette  doctrine  tout  à  fait  insuffisante  pour  entretenir  dans  les 
Âmes  le  culte  exalté  de  la  patrie....  Les  plus  grandes  nations,  les  plus 
nobles  races  sont  exposées  à  fléchir  sous  le  poids  de  leurs  discordes  in 
testines.  On  les  voit  alors  s'éclipser  pendant  de  longs  siècles.  L'histoire 
ne  nous  ofire  que  trop  d'exemples  de  ces  désastreux  effacements  ;  mais 
l'histoire  nous  apprend  aussi  que  ces  nations  peuvent  renaître  da 
moindre  germe,  lorsqu'elles  ont  conservé  le  respect  de  leur  langue,  la 
mémoire  des  hauts  faits  du  passé,  et  cette  dernière  étincelle  de  vie,  la 
foi  religieuse,  capable  à  elle  seule  de  tout  féconder.  > 


S  i*'.  Ouverture  des  chemins  de  fer  dans  la  Turquie  d'Europe.  Études 
orographiques.  M.  de  Hochstetter.  M.  Kanitz. 

L'Europe  voit  s'opérer  en  ce  moment,  ou  tont  au  moins 
se  préparer  une  transformation  fort  remarquable  dans  une 
de  ses  parties  les  moins  accessibleS|  la  Turquie.  Ce  qui  fut 


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TURQUIE.  319 

autrefois  Tlllyrie,  la  Macédoine  et  la  Thrace,  ces  pays  de 
transition  entre  la  civilisation  romaine  et  la  barbarie  ger- 
manique, est  resté  jusqu'à  présent  une  contrée  en  dehors 
de  l'Europe  chrétienne  et  civilisée,  au  point  de  vue  géo- 
graphique jnoins  connue  que  l'intérieur  de  la  Chine.  Peu 
de  voyageurs  ont  pu  l'étudier  d'une  manière  un  peu  sé- 
rieuse; aucune  carte  régulière  n'en  a  été  levée.  Cet  état  de 
choses  va  changer,  du  moins  tout  l'indique.  Un  double 
réseau  de  chemins  de  fer,  convergeant  d'une  part  sur 
Ouskoub,  au  nord-ouest  de  Salonique,  de  l'autre  sur  An- 
drinople,  va  porter  la  vie  dans  des  provinces  jusqu'à  pré- 
sent sans  communications  extérieures,  comme  des  voies 
spacieuses  ouvertes  à  travers  les  sombres  cités  du  moyen 
âge  y  jettent  tout  à  coup  l'air  et  la  lumière.  La  Porte  a 
accueilli  les  propositions  de  l'Autriche  et  concourt  à  ces 
grands  travaux.  Les  études  sont  déjà  terminées  pour  une 
au  moins  des  lignes  les  plus  importantes,  la  ligne  de  Bel- 
grade à  Salonique.  II  va  de  soi  que  ces  travaux  préparatoires 
apportent  à  la  géographie  positive  et  à  la  cartographie  des 
matériaux  aussi  précieux  que  nouveaux.  La  hauteur  des 
montagnes,  la  forme  dss  massifs,  la  direction  des  vallées, 
l'importance  des  pentes  et  des  points  de  partage^  le  relief 
tout  entier,  en  un  mot,  de  ces  contrées  figurées  d'une 
manière  encore  si  incertaine  sur  nos  meilleures  cartes, 
malgré  les  études  méritoires  de  Boue  et  de  Yiquesnel,  vont 
enfin  reposer  sur  des  levés  directs  et  des  mesures  précises. 
Les  communications  du  géologue  de  la  commission  d'études 
instituée  par  l'Autriche,  M.  Ferdinand  de  Hochstetter 
(ci-desssus,  n**  403  de  la  bibliographie),  permettent  déjà 
d'apprécier  Timportance  des  corrections  qu'en  recevra  le 
tracé  des  cartes  actuellement  les  plus  autorisées,  telles  que 
la  Turquie  d'Europe  en  4  feuilles  de  M.  Henri  Kiepert  de 
Berlin,  dont  la  seconde  édition,  presque  entièrement  rema- 
niée, a  paru  Tannée  dernière.  Un  savant  voyageur  viennois, 
M.  Kanitz,  qui  réunit  à  l'habileté  pratique  de  l'ingénieur 

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320  EUROPE.  (n^*  401-412.) 

le  savoir  dQ  l'archéologue  et  la  main  de  l'artiste,  a  pu 
constater  l'extrême  imperfection  d'une  autre  partie  de  la 
carie,  celle  où  se  trouve  la  Bulgarie.  Cette  dernière  pro- 
vince, que  le  Danube  inférieur  sépare  de  la  Yalakhie  et 
qui  s'appuie  au  midi  sur  la  chaîne  des  Balkhang,  a  toujours 
été  regardée,  au  reste,  comme  la  plus  mal  connue  de  toute 
la  Turquie.  M.  Kanitz  (n**  407)  en  a  parcouru  dans  tous 
les  sens  la  moitié  occidentale,  il  a  traversé  les  passes  du 
Balkhan  sur  un  grand  nombre  de  points,  et  la  publication 
prochaine  qu'il  annonce  ne  peut  manquer  d'avoir  une 
graude  valeur  ^  D'un  autre  côté,  la  Russie  a  obtenu  de  la 
Porte,  il  y  a  longtemps  déjà,  l'autorisation  de  prolonger 
jusqu'à  la  mer  de  Marmara  la  mesure  du  méridien  de 
Laponie,  ce  qui  permettra  de  lever  trigonométriquement 
toute  la  Thrace  orientale.  Cet  ensemble  de  travaux  techni- 
ques n'intéresse  pas  seulement  les  géographes  ;  les  chan- 
gements dont  ils  sont  l'indice  dans  la  politique  interna- 
tionale des  puissances,  et  ceux  qu'ils  apporteront  dans  les 
relations  de  l'Europe  orientale,  ont  une  portée  qui  n'échappe 
à  personne. 

Le  travail  de  M.  de  Hochstetter,  que  nous  venons  de 
mentionner,  mérite  que  nous  nous  y  arrêtions  d'une 
manière  plus  spéciale. 

L'auteur  était  attaché  comme  géologue,  en  1869,  à  une 
commission  d'ingénieurs  autrichiens  chargés  des  études 
préliminaires  du  chemin  de  fer  de  Belgrade  à  Salonique. 
M.  de  Hochstetter  a  eu  à  sa  dispositipn,  pour  la  construc- 
tion de  sa  carte,  les  levés  et  les  études  de  la  commission, 
qu'il  a  pu  étendre  sur  certains  points  par  ses  investigations 
personnelles.  M.  de  Hochstetter  s'est  appuyé,  au  point  de 
vue  de  l'ensemble,  sur  la  grande  carte  en  13  feuilles  (au 

1.  Elle  formera  le  complément  naturel  d'un  très-beau  et  très -instruc- 
tif volume  publié  par  M.  Kanitz,  il  y  a  quatre  ans,  sur  la  Servie  : 
Serbien,  historisch-ethnographische  Reisestudien  ;  Leipzig,  1868,  Ivol. 
in-8\ 

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TURQUIE.  321 

864  000}  de  la  Turquie  et  de  la  Grèce  par  le  capitaine  de 
Scheda;  mais  il  n'a  pas  tardé  à  reconnaître  qu'à  mesure 
que  du  centre  de  la  Macédoine  on  s'avance  à  l'ouest,  on 
entre  dans  une  région  de  plus  en  plus  mal  connue.  La  région 
du  Yitocz,  en  particulier,  était,  on  peut  dire,  absolument  vide 
d'indications  sérieuses;  tout,  sur  les  cartes,  y  est  tracé  à 
peu  près  au  hasard. 

Sur  l'orographie  de  la  Turquie  centrale,  M.  de  Hochs- 
tetter  fait  les  remarques  suivantes  : 

«  Les  écrivains  de  l'antiquité  mentionnent  comme  les 
plus  hautes  montagnes  de  la  Macédoine  et  de  la  Thrace 
le  BertUcus^  le  Scardus^  VOrbeltts^  le  Scomius  ou  Scom- 
hruSj  le  Rhodope  et  VHaemm.  Nous  trouvons  en  même 
temps  chez  eux  cette  idée,  que  ces  montagnes  coupaient  eu 
ligne  directe  la  péninsule  Illyrique  depuis  l'Adriatique 
jusqu'à  la  mer  Noire.  Cette  vue  a  été  non«seulement 
adoptée  par  les  modernes,  mais  on  l'a  transformée  en  cette 
fausse  hypothèse  d'une  chaîne  alpine  centrale  parcourant 
sans  interruption  la  Péninsule  depuis  les  Alpes  jusqu'au 
Pont;  et  cette  chaîne  prétendue  a  figuré  sur  les  cartes  et 
dans  les  livres,  jusqu'à  ce  que  les  découvertes  de  Boue,  de 
Yiquesnel,  de  Grisebach,  de  Lejean  et  deHahn,  aient  gra- 
duellement montré  la  fausseté  de  cette  conception.  Les 
travaux  des  explorateurs  dont  je  viens  de  rappeler  les  noms 
nous  ont  fait  connaître,  au  moins  dans  leurs  grands  traits, 
les  montagnes  de  la  Boumélie;  mais  il  n'en  reste  pas  moins 
encore  un  problème  des  plus  difficiles,  celui  de  se  rendre 
nettement  compte  du  chaos  orographique  que  présente  la 
Péninsule. 

«  Déjà  Grisebach  avait  démontré  d'une  manière  péremp- 
toire  que  lé  Bertiscusde  Strabon  répond  aux  Alpes  d'Alba- 
nie, et  le  ScorduSy  ou  Scardus^  au  Ghar-dâgh  actuel.  On 
sait  que  VHaemus  n'est  autre  que  le  Balkan,  et  que  le  Rho- 
dope  porte  encore  aujourd'hid  le  même  nom.  Bestent  VOr- 
helus  et  le  Scomius j  le  premier  ordinairement  identifié  avec 

l'année  GÉ0«R.  XI.  ^   21 


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32â  EUftbPliî  (n^'  401-412.) 

lé  I^ériill  et  iè  fiUo-dagli,  tjui  sôtit  les  plus  hàlltés  sotii^ 
niités  diu  Rhodopiè  à  Pbuest  et  ati  iibrd-dùeât,  et  le  sfecotid 
avec  le  mont  Vitobz,  où  Vitbs. 

tié  Vitobz  s'élëvë  èiiire  le  Balkàn  et  le  Rilo.  Le  ptiissànl 
massif  ëjrétiitîque  ^ui  formé  bette  grande  ïnbntagne  repose 
SÛT  une  base  pi'esqtie  circtilaire,  et  se  drëâse,  pareil  à  un 
cône  volcanique,  à  la  hauteur  de  2330  mètrëë  au-dessus  du 
niveau  de  la  mer.  Qiatre  dés  prinbipales  titières  de  la 
Turquie  d'Europe,  la  Maritza^  la  Strouma^  VIskèr  et  la 
Moravd  de  BulgàHe  (du  tnoins  par  un  de  âeâ  principaux 
afiluënts,  la  Nischdva)^  y  oilt  leur  Origine^  de  même  que 
qiiàlrë  systëtnes  de  motitâghes  ont  là  leur  point  de  i'en- 
contre  ail  cœui*  dé  là  Houiiiélie  :  le  BalkhaUj  les  montagnes 
centrale^  de  là  Bdùmélie,  le  Rhodope,  et  les  montagnes  de 
la  haute  Mœsië.  h 

À  cette  occàsioii,  dans  un  autre  ordre  d'études^  je  rap- 
pellerai le  trè8-remài*qu?lble  voyage  que  M.  Albert  Dû- 
ment, uh  dés  élèves  aisiingu^ë  de  noti'e  école  d'Athènes, 
a  fait  éii  Roùmélie  (1* ancienne  l'hrace)  de  1868  à   1869^ 
dans  un  but  de  recherches  archéologiques,  et  dont  les  ré- 
sultats généi-aûx  nous  sofit  connus  par  tin  rapport  publie 
en  1871  (Voir  notre  précédent  Volume,  p.  296).  Des  tra- 
vaux tels  qiie  ceux  de  M.  Albert  DtLmont,  tels  aussi  que 
la    Mission  archéologique    m    Macédoine    dé  M.    Léon 
Heuzey,  donl  la  8«  livraison  a  paru  récemment  *,  isoutiett- 
nent  dignement  dans  la  géographie  savante  le  vieil  hon- 
neur scientilicfue  dii  liom  français.  La  belle  étude  que 
M.  Albert  Dumont  vient  de  donner  sur  l'Albanie,  et  â 
laquelle  nous  consacrons  le  paragraphe  suivant,  est  digne 
de  ses*  savantes  communications  sur  la  Thrace. 


1.  Grand  in-4%  texte  et  planches.  M.  Heuzey,  déjà  connu  dans  le 
monde  savant  par  un  voyage  intitulé  le  Mont  Olympe  et  VÀcamaniè, 
1860, 1  vol.,  est,  comme  M.  A.  Dulnoht,  un  élève  de  rficole  d'AtUèlles. 

,  uigiiizeu  uy  -^^JV^v^-C  i>^ 


ALBANtË.  323 


S  2^.  L'Albanie. 


Dans  Tété  de  1872,  M.  Albert  Dumont  poursuivait,  dans 
les  parties  littorales  de  l'Albanie,  les  investigations  archéo- 
logiques qui  lui  ont  donné  en  Thrace  de  si  importants 
résultats.  Il  y  trouva,  comme  Français,  un  accueil  dont  il 
était  heureux  et  fier.  «  Nous  pûmes  voir  *,  dit-il,  en  Alba- 
nie et  en  Épire,  combien  les  derniers  événements  ont  peu 
changé  dans  ces  parties  reculées  de  l'Europe  l'idée  qu'on 
se  fait  de  la  France.  Ces  peuples  ont  suivi  avec  une  sur- 
prenante curiosité  tous  les  incidents  de  la  guerre;  pour  la 
première  fois  des  bulletins  turcs,  grecs,  italiens,  les  tenaient 
au  courant  des  batailles  livrées  en  Occident.  Les  musul*- 
mans  sont  pour  le  voyageur  français  tels  que  je  les  avais 
vus  en  1864  et  en  1868.  Il  m'a  été  impossible  de  saisir  le 
moindre  changement  dans  leur  manière  de  se  conduire  à 
notre  égard.  Ils  ont  sur  cette  guerre  une  opinion  très -sim- 
ple et  toute  fataliste  :  l'épreuve  a  été  cruelle;  il  faut  atten- 
dre le  lendemain.  Les  chiffres  de  l'emprunt  ont  pénétré 
dans  ces  provinces.  C'est  une  surprise  tout  à  fait  étrange 
que  d'entendre  votre  hôte,  un  paysan  ou  un  petit  proprié- 
taire qui  vous  reçoit  dans  une  cabane  perdue  au  fond  des 
montagnes,  à  quatre  ou  cinq  jours  delà  mer,  vous  parler  des 
milliards  que  nous  avons  souscrits.  Ces  sommes,  dont  nul 
ne  se  fait  une  idée  quelque  peu  précise,  sont  devenues  lé- 
gendaires comme  les  trésors  d'un  prince  aussi  riche  que 
les  Francs,  le  calife  Haroun-al-Raschid.  Ni  les  Albanais, 
ni  les  Grecs,  ni  les  Slaves,  ne  pensent  autrement  que  le» 
Turcs.  Pour  ces  contrées  nous  sommes  ce  que  nous  étions 
hier^  ce  que  nous  serons  demain.  La  foi  dans  nos  destinées 
n'a  pas  été  atteinte.  Nous  contribuons  du  reste  à  la  main- 
tenir en  ne  changeant  rien  en   Orient  à  nos  anciennes 

1.  M.  Dumont  était  accompagné  d'un  artiste,  M.  Ghaplain. 

uiyiuzeuuy^OOgle 


324  EUROPE.  {tr^  401-412.) 

habitudes.  Si  la  station  navale  du  Levant  a  été  diminuée, 
cette  réduction  est  provisoire/et  notre  drapeau  a  para  cette 
année  sur  tous  les  points  où  il  se  montrait  d'ordinaire.  • 
.  M.  Dumont  était  entré  dans  le  pays  par  la  Dalmatie;  il 
trace  de  cette  contrée  un  aperçu  qui  appartient  au  géogra- 
phe par  Texactitade  et  la  précision,  à  l'artiste  par  sa  couleur 
et  sa  vie.  «  La  Dalmatie  a  une  des  formes  les  plus  bizarres 
que  présente  la  géographie  politique  de  TEurope,  forme 
tout  artificielle,  sans  limite  naturelle,  si  ce  n'est  à  l'occi- 
dent, où  elle  s'arrête  à  la  mer.  C'est  un  long  triangle  dont 
la  base  est  tournée  au  nord,  et  qui,  descendant  ensuite  vers 
le  sud,  se  rétrécit  rapidement,  au  point  de  n'avoir  plus, 
quand  il  se  termine,  que  3  ou  4  kilomètres  de  large.  Dans 
le  district  de  Raguse,  tel  est  ce  peu  de  profondeur,  que  les 
Turcs,  de  leurs  montagnes,  pourraientbombarder  par-dessus 
l'empire  d'Autriche  une  flotte  qui  naviguerait  dans  l'Adria- 
tique :  violation  de  la  neutralité  qui  n'a  pas  été  prévue 
par  le  droit  des  gens.  Autre  bizarrerie  :  le  territoire  otto- 
man coupe  la  Dalmatie  en  trois  morceaux.  Pour  aller  par 
terre  d'Almissa  à  Slano,  et  de  Gastelnovo  à  Gravesa,  il 
faut  en  demander  la  permission  aux  soldats  du  Grrand-Sei- 
gneur. 

«  Cette  province  n'est  qu'une  bande  de  terre,  un  véri- 
table ruban.. Plus  de  quatre-vingts  îlots  forment  devant  la 
côte  une  guirlande  de  200  milles  de  longueur.  On  navigue 
au  milieu  des  flores.  Le  sol  est  pierreux,  d'un  rouge-brun, 
accidenté  par  de  grands  rochers,  découpé  comme  une  den- 
telle. Ces  teintes,  tristes  et  pâles  quand  le  ciel  est  voilé, 
s'illuminent  de  couleurs  dorées  dès  que  le  soleil,  qui  se 
eache  rarement  dans  ces  contrées,  les  inonde  de  lumière. 
A.  l'orient  s'élèvent  les  hautes  chaînes  de  l'Herzégovine  et 
de  la  Bosnie  ;  k  l'occident,  l'œil  se  perd  sur  les  flots  de 
l'Adriatique.  Cette  navigation  a  toutes  les  beautés  que  peut 
donner  la  triple  réunion  de  la  mer,  des  montagnes  et  du 
soleil,  l'intérêt  d'un  voyage  où  l'on  passe  d'un  canal  à  un 

uigmzeuuy  Google 


ALBANIE.  325 

autre,  sans  perdre  jamais  de  vue  la  terre,  les  maisons^  les 
champs,  le  spectacle  de  l'activité  humaine.  Tantôt  le  bateau 
longe  des  côtes  boisées,  découvre  de  vertes  et  fraîches  val- 
lées, comme  le  canal  des  Gastelli,  que  les  nobles  vénitiens 
avaient  couvert  autrefois  de  villas  ;  tantôt,  à  Sebenico  par 
exemple,  il  entre  dans  des  golfes  profonds,  sinueux,  où  la 
mer  encaissée  et  paisible  semble  ne  plus  être  qu'un  large 
fleuve.  Partout  les  jeux  de  la  lumière  et  de  l'eau  sont 
infinis,  dans  ces  criques,  sous  ces  rochers  profonds,  sur  ces 
longs  détroits  que  le  ciel  colore  de  teintes  toujours  variées, 
depuis  les  longues  traînées  pâlissantes,  mêlées  de  paillettes 
brillantes  que  laisse  le  soleil  couchant,  jusqu'à  l'éclat  des 
feux  du  midi.  Plus  on  descend  vers  le  sud,  plus  les  aspects 
ont  de  grandeur.  Les  bouches  de  Gattaro  sont  un  des  plus 
beaux  points  du  monde.  A  peine  a-t-on  dépassé  Yitaglina 
qu'on  ne  voit  plus  l'Adriatique.  Elle  forme  ici  un  grand 
lac,  qui  lui-même  en  forme  cinq  autres,  lac  entouré  de 
montagnes  à  pic,  partout  couvert  de  chantiers,  de  maisons, 
de  villages,  de  forteresses.  C'est  la  Suisse,  mais  sous  le 
soleil  d'Orient,  une  Suisse  où  le  pied  des  montagnes 
plonge  dans  la  mer. 

«  Les  villes,  poursuit  le  voyageur,  sont  sur  la  côte  ou 
dans  les  lies.  On  entre  en  général  en  Daimatie  par  Zara  ; 
ainsi  la  capitale  de  la  province  est  à  rextrême  nord,  sur  la 
frontière,  place  singulière  pour  un  chef-lieu,  qui  du  reste 
.  ne  mérite  ce  privilège  ni  par  sa  richesse  ni  par  sa  popula- 
tion. C'est  un  centre  administratif  qui  perdrait  demain  la 
moitié  de  ses  habitants,  s'il  cessait  d'être  la  résidence  du 
gouverneur.  Le  moyen  âge  a  légué  aux  temps  modernes 
sur  cette  mer  six  ou  sept  cités,  dont  la  plus  importante 
compte  à  peine  10  000  habitants.  Quand  les  événements 
les  réunirent  sous  une  administration  commune,  le  doge 
établit  un  provéditeur  à  Zara,  qui  était  le  point  du  pays  le 
plus  rapproché  de  Venise.  Le  feld-maréchal  autrichien 
succéda  au  provéditeur.  C'est  au  temps  et  à  l'histoire,  plus 

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326  E^RQPE;  (n°'  401-412.) 

encore  qu'à  ]§  nq^ispn  de  HabsJjQiiirg,  qu'il  f^ut  fgprppher 
Tabs^nçe  en  cette  pfpyii^pe  d'iiq^  capitale  naturelle.  Zar^fi 
4es  magasins,  up  çorso  pt  de^  fonptioi^naires.  SebenipQ, 
SpalaiQ,  Trau,  Ajinissa,  Raguse,  Caftaro,  g^rdpijt  çn  aefpept 
plus  original.  Ce  jBont  de  vieilles  cominui}es  4i?  n^pyeîi  te®> 
perdues  sur  les  derniers  rochers  dp  TEu^ppe,   sliurps  et 
occidentales,  p^vilisées  et  b^rbarps.  De  petitps  rues  tor- 
tueuses qui  grimpent  en  escalier,  pavées  de  cailloux  b]ai}cs 
ou  de  grandes  dalles  glissantes,  —  des  ma^sops  solide^  ^t 
noires,  bâpes  de  gyj[?sse8  pierres  brunies  par  Jes  siècles, 
bardées   de  barreaux  de  fer,  ornées  (l'écussons,  de  b^ 
reliefs,  de  statues,  —  la  place  publique  où  est  le  palais  4p 
Ig.  commune,  la  Jpggia  pu  siégpait  le  ji^ge,  —  ja  4on^n^, 
édifice  important  dans  un  pays  qifi  en  tirait  Ip  p}us  cl^ff 
de  ses  revenus,  —  le  por};,  petit,  bien  ferpé,  fl^pqué  4p 
hautes   tours,  accessible  par  un  goulet  étroit,  vérita|)le 
prison  o(j  oij  meftai);  \e^  navires  sous  plef,  -rr  le  dôme  et  jf^s 
églises,  que  yipgt  génératipps  ont  cqmblées  ^e  présent^  : 
toutes  ces  villes  pnt  le  même  aspect;  elles  sppt  g.ijjpur4'lmi 
ce  qu'elles  étaient  au  seizième  sièple....  » 

«  Dès  qu'on  s'éloigne  de  la  côte,  on  ne  frpuve  plu§  que 
de  grands  villages.  Knxp,  Qbrav^tz,  Scardppa  mêpae,  ne 
peuvent  prétendre  au  titre  de  villes.  ÎJomJjre  de  chpfs-Ueijx 
de  district^  inscrits  en  lettres  capitales  sur  la  carte,  sont 
des  créations  administratives  nées  4'Jiîer  et  qui  pourraient 
disparaître  demain.  Le  Dalmate  moderpp  n'aipe  pus  les 
agglomérations;  pomme  ses  ancêtres,  donjt  le  Porphyrogé- 
nète  disait,  c  jDe  peuple  ne  peut  souffrir  que  deux  cajjapes 
soient  Tune  près  de  l'autre,  »  il  dispprsp  ses  n^a^ops  çi^ 
de  grands  espaces.  Vpus  arrivez  à  Zemenico,  yous  en  sor- 
tez sans  avoir  vu  autre  chose  qu'une  église  et  un  poste  de 
spldats.  Vous  demandez  le  phef-lieu  du  canton,  on  vous 
réppnd  que  vous  y  è^es;  vo^re  gi^idp  vous  montre  à  4p^9| 
sur  une  hauteur,  cinq  ou  six  maisons;  vous  en  découvrez 
quelques  autres  dans  la  plaine  et  sur  une  seconde  collinp  : 

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ALpfNlE.  327 

CQ  mot  dp  Z^mejïicQ  ^9t  ?^ne  ^i^prçssiq^  g^ûg]:.apt)jqaQ.  Lps 
savai^ts  qui  cpf^sulfe^t  )a  c^fjt^  de  1$^  Q^lm^tie  publiée  rë- 
cemQ^e^t  en  vingt  fpi^flles  p^r  ('^t^ilTmajor  autrichien  peu- 
vent être  sArs  que  tou^ps  1|5§  Jpcalitp§  qui  oflt  Tfipijneii^r  de 
figurer  ^ur  cp  docun^pnt  f g^sei]a|)lpi^f  pl^s  ou  moipç  ^  Ze- 
menico.  >» 

L' Albanie,  où  M.  Albert  Pi^pqqnt  enfre  p?i.f  §cutari,  le 
place  ^u  milieu  d'un  nouv^a^  cf^^inp  d'ol);$erva^ipff$.  ^^ 
Daimatie,  c'est  \e  pays  surtout  qu'il  étudie  ;  en  Alb;^p|ey  c'est 
le  pppplp.  L'Albanais,  —  le  Sfcypétar,  cpmme  il  ^f\  nomme 
lui-même,  -rr  est  un  peuple  vjerge,  presque  uij  peuple  pri- 
mitif, qui  n'a  rien  d'Pi^pppé^n.  Familier  ^vep  l'antiquité 
hellénique,  M.  Di^ippi^f  est^  pf^^que  instant  frappé,  dans 
le  costume,  dans  les  pœ^r^,  dans  |es  ha})jtudps,  d'analo- 
gies qi^i  lui  rappellent  les  C^f^çs  f^ps  tei^ips  homériques. 
liQS  Skypétar^  occupent,  du  feste,  ce  qpi  fut  autrefois  la 
terre  des  ^pélasges,  et  il  y  a  gfande  apparence  qu'une  par- 
tie au  moiqs  du  sang  de  la  race  priuipr4iale  cou|e  «ncore 
dans  leurs  veines. 

«  L'Albanajs  a  une  parfai|;e  distinction;  la  tête  petite,  le 
Dez  fin,  Vœil  vjf,  ouvert  en  amande,  le  cou  long,  Ip  cprps 
inaigre,  }j38  jambes  hautes  e^  nerveuses,  il  r^ppellp  le  type 
pre;p;pf  du  Grec,  tel  que  la  sculpture  archaïque  l'a  repré- 
sente sur  les  marbres  d'Égine.  Il  n'est  pa^  jusqu'au  cos- 
tume qui  pi9  fasse  souvenir  de  l'antiquité,  l^  fustanpUe 
hianphe  f^ppe^jp  pe  que  devait  être  la  tuniqup  plissée  à  la 
ceinture  ;  les  grandes  guêtres  qui  enveloppant  les  jambes 
jusqu'aux  geupux  sont  |es  cnémidps  de  ykge  héroïque.  Le 
costume  p'est^  pas  étoffé  pt  flottant  comme  à  la  belle  époque 
grepque  ;  mais  on  voit  bien,  par  les  vases  d'ancien  style, 
que  les  Hellènes  4'^utrefois  n'avaient  pas  sur  c^  point  les 
habitudes  des  contemporains  de  Périclès.  p'est  en  Albanie 
qu'ilfaut  chercher  aujourd'hui  l'explication  des  plus  anciens 
costumes  helléniques. 

«  Il  n'y  a  pas  de  lien  entre  les  différentes  tribus  d'Al- 

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328  EUROPE.  (n"  401-412.) 

banîe^  dijt  encore  M.  Albert  Dumont.  Elles  parlent  des 
dialectes  peu  différents,  portent  nn  nom  commun,  se  réunis- 
sent contre  l'ennemi  étranger.  En  temps  de  paix,  chacune 
d'elles  reste  isolée  dans  sa  montagne.  Leur  pays  est  divisé 
en  clans  qui  s'administrent  comme  il  leur  plaît,  ou  plutôt, 
—  car  le  mot  administrer  est  faux,  —  qui  vivent  à  leur 
guise.  Aucune  organisation  n'est  plus  simple  :  les  vieillards 
ou  pliaks  s'occupent  des  rares  questions  qui  peuvent  se 
présenter,  par  exemple  de  l'époque  où  on  conduira  les 
troupeaux  au  pâturage,  de  la  division  de  ces  pâturages, 
des  réclamations  qu'il  faut  faire  à  un  clan  voisin,  des  dé- 
bats qui  s'élèvent  entre  deux  habitants.  Ce  n'est  pas  qu'il 
y  ait  une  règle  établie,  encore  moins  une  loi  écrite  ;  mais 
les  chefs  de  famille  se  réunissent  naturellement  pour  les 
décisions  qui  les  intéressent.  Il  en  était  de  même  dans 
toute  la  Grèce  primitive,  où  les  gouvernants  de  chaque 
tribu  s'appelaient  les  vieillards^  ^épcyTEç.  Ces  anciens  inon- 
dent la  justice,  assis  en  cercle  sur  des  pierres,  comme  ceux 
qu'on  voyait  sur  le  bouclier  d'Achille....  » 

Le  voyageur  dit  encore  :  «  L'ancien  Monténégro  et  la 
Mirditie  actuelle  font  bien  comprendre  ce  qu'était  l'état 
homérique,  réunion  de  plusieurs  clans,  déjà  plus  avancé, 
plus  près  d'une  organisation  régulière  que  le  pW  albanais. 
Le  gouvernement  y  était  celui  de  tous,  surtout  celui  des 
vieillards  ;  un  chef,  dont  l'autorité,  tantôt  contestée,  tantôt 
acceptée,  n'avait  rien  de  défini,  gouvernait  avec  les  notables 
et  avec  le  peuple.  C'était  la  nécessité,  non  une  constitu- 
tion ou  même  la  réflexion,  qui  avait  établi  cet  état  de 
choses;  il  ne  prit  quelque  force  que  par  la  consécration  reli- 
gieuse. Les  rois  grecs  furent  puissants  quand  ils  rattachè- 
rent leur  origine  aux  divinités  de  TOlympe  ;  les  princes  de 
Mirditie  et  de  la  Montagne-Noire,  quand  ils  eurent  un 
caractère  religieux.  » 

Et  enfin  cet  autre  passage  :  «  La  vie  albanaise  est  très« 
simple  ;  —  ces  peuples  ne  sont  pas  agriculteurs,  et  ils  ont 

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ALBANIE.  329 

le  mépris  du  travail  pénible.  Ils  conduisent  leurs  trou- 
peaux aux  pâturages,  comme  faisaient  les  héros  grecs,  qui 
étaient  tous  bergers.  Si  la  saison  est  trop  mauvaise,  ils  brû- 
lentduboisetenvendentlecharbon.G'estlàcertainementrin- 
dustrie  la  plus  primitive  que  l'historien  prisse  imaginer.  Us 
viventdans  des  maisons  misérables  ;  beaucoup  de  ces  cabanes 
possèdent  quelques  objets  précieux,  trésor  du  maître  :  non- 
seulement  des  armes,  mais  des  aiguières  ciselées,  des  col- 
liers d'or,  quelquefois  d'admirables  bijoux.  Gomment  ces 
merveilles  se  sont-elles  égarées  dans  ces  montagnes  ?  Nul 
ne  le  sait.  Les  Albanais  les  pins  considérés,  ceux  qu'on 
appelle  des  pliaksy  et  que  l'on  regarde  comme  l'élite  de  la 
race,  prennent  part  aux  travaux  les  plus  vulgaires.  Pendant 
que  le  fils  conduit  les  bœufs  aux  champs,  comme  Ménélas, 
le  père  construit  sa  maison  lui-même  comme  Ulysse.  Pour 
le  dîner  où  il  vous  reçoit,  il  tue  lui-même  le  mouton,  ce 
que  faisait  aussi  Achille.  On  s'assied  par  terre,  au  miUeu 
des  ustensiles  les  plus  communs;  vous  voyez  circuler  de 
main  en  main  une  coupe  prise  sur  des  ennemis  civilisés. 
Les  femmes  de  la  maison  vous  servent.  Le  repas  fini,  le 
pliak  prend  la  guzla  et  en  joue  lui-même,  pendant  que  les 
jeunes  gens  luttent  à  la  course  et  aux  jeux  d'adresse,  ou  se 
réunissent  pour  le  cholo^  cette  vieille  danse  où  les  hommes 
se  tiennent  par  la  main  et  simulent  la  marche  des  victimes 
dans  le.  labyrinthe  de  Crète.  Ainsi  tout  reporte  le  souve- 
pir  aux  descriptions  homériques.  > 

Nourri  ainsi  de  rapprochements  instructifs,  et  d'ailleurs 
plein  d'observations  et  de  faits  qui  font  admirablement 
conniutre  l'état  des  populations  et  la  situation  du  pays,  le 
récit  du  savant  voyageur  est  un  des  plus  attachants  que 
m'ait  fait  rencontrer  la  bonne  fortune  de  mes  lectures. 


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330  -         EUROPE.  (n°413. 

m 

GRECE. 


41S.  D'R.  ScHiLLBACH.AusflugnachOeniadae  inAkarnanien.-^ctohr. 
der  Gesellsch.  fur  Erdk.  %u  BerltUy  VIIj^^«  cah.  (n''38),  1872, 
p.  9M19. 


Recensement  da  royaume  de  Grèce  en  1870. 

On  vient  de  publier  les  résultats  officiels  du  recense- 
ment exécuté  au  mois  de  mai  1870  dans  toute  retendue  du 
royaume  de  Grèce*.  M.  le  conseiller  d'État  Alexandre 
Mansolas,  dans  son  rapport  préliminaire,  nous  apprend 
que  ce  recensement  a  été  pratiqué  diaprés  le  mode  géné- 
ralement adopté  par  les  États  européens  depuis  le  congrès 
de  statistique  de  Florence  en  1867,  au  moyen  de  cartes 
individuelles,  par  conséquent  avec  des  garanties  de  certi- 
tude plus  complètes  que  dans  les  opérations  précédentes. 
Mais  çur  différents  points,  par  suite  de  difficultés  locales 
insurmontables,  il  s'est  prolongé  bien  au  delà  du  term^ 
fixé  par  la  loi.  De  plus,  pour  les  citoyens  vivant  à  l'étranger 
et  particulièrement  dans  l'empire  ottoman,  et  dont  Finscrip- 
tion  devait  se  faire  aux  consulats,  au  bout  d'un  an  les  listes 
n'étaient  pas  encore  complètes.  Enfin,  dans  la  comparaison 
avec  les  résultats  du  recensement  antérieur,  des  réserves 
doivent  être  faites  au  sujet  de  certains  chiffres,  notamment 
de  ceux  fournis  par  les  districts  montagneux  du  Nord,  sur 
la  frontière  turque.  Les  populations  vivent  dans  un  état  de 
demi-barbarie,  et  l'action  administrative  ne  peut  s'y  exer- 
cer avec  la  même  régularité  que  dans  le  reste  du  royaume. 

Pour  la  première  fois,  on  a  inscrit  dans  ce  relevé,  à  côté 

1.  Plétysmos  tés  Hellados  kata  to  etos  1870.  Athènes^  1871. 

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4îj  cbjfire  fie  |a  pppulatîqn  ré§î4ftii|  djps  |^  }ppalit^  (^èî^o- 
f(ii),  celui  (}es  çitoyeqç  qui  lépal|3ïpept  ei^  fpRt  pt^rtjp,  j^jpfs 
njême  qu'ils  h^biteift  teipporairement  dans  4'aptre§  Ipcfi- 
lités  o\\  à  rétr^pger.  Gpmipe  dans  cette  pation,  dont  une 
forte  partie  s'adonne  au  commerce  et  à  iVmarinjB,  Jes  4é- 
pjaceipept^  §on(;  noipbreîix  et  confii)]^pls,  i}  exi^tq  n^tqrel- 
lenaent  des  différences  considérablps  eptre  pe§  ideif^f^  caté- 
goriels. Les  grapdes  yilje^  en  particulier,  qi»i  preçque  Coptes 
sont  des  ports  de  naer,  dpnnent  popr  |a  population  effective, 
qui  repferme  nombre  d'étrangers^^  un  chiffre  dépassant  de 
beaucoup  celui  de  1^  population  natipnale. 

Aussi  placerqps-npus  les  deux  résultats  ^p  face  l'uq  ^e 
l'autre,  et  en  rapprocherons-nous  lej^  cjiiflrep  pfficipjs  ^n 
recensement  antérieur,  afin  que  d'un  coup  d'œil  on  puisse 
sp  rendre  compte  du  mouvement  qui  s'est  prp,du|f  danç  }a 
pppulatjpn  p^endan^  ces  djx  dernières  année?. 

Nômes.  Population  effective.  Née 

1861  1870       dans  le  pays. 

Attiqjie  et  Béptie 116  02^  136  BOk  Jll  65p 

Eubée 72  368  82  541  8350^ 

Locride  et  Phocide 102  291  108  421  106  426    . 

Acarnanie  et  Étoile 109  392  127  693  121  956 

Achaïe  et  Élide 138  249  149  561  147  149 

Arcadie 113  719  131740  140  922 

Laconie....; 96  546  105  851  108  342 

Messénie.....'. 117  181  130417  128853. 

Argolide  et  Gorinthie. ...  112  910  127  820  138  409 

Gyclades 118  130  123  299  123  783 

Corfou^ 99  533  96  940  Î5  94Q 

Céphalonie 92  929  77  382  80  004 

Zante.. 44  760  44  557  44  813 

1096810   1  437  026    }  431  761* 

1.  On  retrouve  les  mêmes  chiffres,  mais  avec  un  détail  de  subdivi- 
sions où  nous  ne  croyons  pas  devoir  entrer  ici,  dans  là  publication  de 
M.  Behm,  formant  le  n-  33  der  Ergânzungshefte  des  Mittheilùngen  de 
Petermann  (Gotha,  1872),  p.  27  à  29. 

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332  '  EUROPE.  (n*413.) 

Le  nombre  total  de  la  population  civile  effective  est  donc, 
d'après  le  dernier  recensement ,  de  1437  026  ftmes,  se 
subdivisant  en  1  431  761  nationaux  et  5261  étrangers.  En 
y  ajoutant  l'armée  de  terre,  12  420  hommes;  la  flotte  de 
guerre,  1315  hommes,  et  7133  personnes  exécutant  des 
voyages  sur  mer,  le  total  s'élève  à  1  457  894  âmes.  La  dis^ 
proportion  entre  les  deux  sexes  est  frappante,  puisque,  sur 
ce  total,  il  n'y  aurait  contre  754  176  hommes  que  703  718 
femmes.  L'accroissement  de  la  population  depuis  neuf  ans 
n'a  pas  dépassé  une  moyenne  générale  de  1  p.  100.  Elle 
est  plus  élevée  dans  les  anciennes  provinces,  où  la  popula- 
tion s'est  élevée  de  1  096  810  âmes  en  1861,  k  1  225  673, 
ce  qui  donne  une  augmentation  de  une  tète  sur  85,  que 
dans  les  îles  Ioniennes.  Dans  ces  pays  annexés,  pour  nne 
période  de  cinq  ans,  l'accroissement  n*a  été  que  d^une  tête 
sur  643.  Quelques  îles,  comme  Leucade  et  Zacinthe,  ont 
même  subi  une  diminution,  d'ailleurs  insignifiante,  de  po- 
pulation. 

Ce  fait  s'observe,  du  reste,  dans  d'autres  îles  faisant  pré- 
cédemment partie  du  royaume  et  principalement  dans  celles 
d'Hydra,  Santorin,  Ândros,  Âmorgos,  Milos,  Eythnos, 
Eeos,  Mykonos,  qui  ont  perdu  en  moyenne  de  un  douzième 
à  un  sixième  de  leurs  habitants.  Gomme  leur  climat  est 
d'une  salubrité  reconnue,  cette  diminution  ne  peut  s'expli- 
quer que  par  une  émigration  assez  forte  vers  des  places  de 
commerce  pks  importantes.  Dans  le  fait,  la  plus  grande  et 
la  plus  fertile  des  Gyclades,  Naxos,  et  la  plus  commer- 
çante, Syra,  présentent  une  augmentation  considérable  qui 
compense  presque  la  perte  éprouvée  par  le  reste  de  l'ar- 
chipel. 

Ce  recensement  né  fournit  pas  de  renseignements  sur  la 
population  propre  à  chacpie  localité,  ce  qui  tient  à  ce  que 
le  plus  souvent  la  commune  {démos)  en  tant  que  circonscrip- 
tion politique»  comprend  plusieurs  localités  distinctes,  pa^ 
fois  jusqu'à  trente  ou  quarante.  On  peut  cependant  citer 

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AUTRICHE.  333 

quelques  exceptions  :  ainsi  le  Pirée  qui,  de  6452  âmes  en 
1861,  s'est  élevé  à  11047,  et  Hermopolis,  dans  Tîle  de 
Syra,  qui  possède  20  996  habitants  et  n'en  avait  que  18  511 
en  1861.  Au  contraire,  Galaxidi,  dans  le  golfe  de  Gorinthe, 
est  tombé  de  6185  à  4579  âmes. 

Mais  la  commune  formée  par  la  capitale  elle-même, 
Athènes,  renferme  15  autres  localités  distinctes;  celle  de 
Fatras,  la  seconde  ville  du  royaume  pour  l'importance  de 
son  commerce,  en  contient  27, de  sorte  que  l'accroissement 
de  43  371  à  48  107  âmes  pour  Athènes  et  de  23  020  à  26 190 
pour  Patras  doit  être  partagé  entre  chacune  de  ces  villes 
et  les  bourgades  environnantes.  Quant  aux  autres  grandes 
villes,  telles  qu'Argos,  Sparte,  Tripolis,  Chalcis,  Lamia, 
auxquelles  sont  annexées  en  moyenne  de  10  à  20  bourgades, 
les  chiffres  donnent,  ou  une  augmentation  peu  considérable, 
ou  un  état  stationnaire  de  la  population. 


IV 


AUTRICHE. 

414.  Der  Golf  von  Buccari-Porto  Rè.  Bilder  und  Skizzen.  Pragf,  Druck 
und  Verlag  voû  H.  Mercy,  1871,  in-4^,  vm-l25  pages,  imprimé 
sur  papier  peau-vélin,  avec  vignettes,  eaux-fortes,  plans,  figures 
en  couleur,  et  deux  grandes  cartes  lithochromiques. 

Ce  beaa  volame,  œuvre  d'artiste  et  de  prince,  est  da  même  auteur 
que  la  splendide  relation  des  lies  Baléares  dont  nous  avons  annoncé 
l'apparition  en  1869  {Année  Géographique^  t.  IX,  p.  S78),  et  dont  nous 
aurons  tout  à  Theure  à  mentionner  le  2*  volume  (ci->après,  à  l'article 
Espagne).  Au  fond  de  la  mer  Adriatique,  entre  Tlstrie  et  la  Croatie,  le 
golfe  de  Quamero  se  creuse  un  large  bassin  qui  s'enfonce  profondément 
dans  les  terres.  Semé  d'Iles  bizarrement  déchiquetées,  ouvert  au  souffle 
violent  des  vents  du  sud,  enveloppé  de  côtes  abruptes  et  découpées,  ce 
beau  golfe  est  un  de  ces  lieux  que  les  marins  redoutent  et  que  recher- 
chent les  admirateurs  des  grands  sites.  La  coupure  étroite  et  assez 
profonde  qui  prend  le  double  nom  de  ces  deux  villes,  Buccari  et  de 
Porto  Rè,  est  une  des  rades  principales,  et  des  plus  pittoresques,  de  la 
côte  orientale  du  Quamero,  sur  le  littoral  carintbien;  la  plume  et  le 
crayon  du  voyageur  en  décrivent  d'une  manière  saisissante  les  aspects 
et  les  localités.  Les  plans,  les  vues  et  les  esquisses  complètent  l'œuvre 
géographique.   * 


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334  EtJJFtbi^È.  (n°'  414-425.) 

41ô.  MoAumenia  spectaiitia  historiatn  Slavoriini  méridionàliùm.Hdidit 
academia  Scientiarum  et  Ârtium  Slavoruin  tneridioaalium. 
Vol.  II.  Agram,  1870,  in-8%  xxxyi-464  pages. 

416.  K.  Keleti,  Direktor  des  kônigl.  ungar.  Statistischen  Bureau's. 
Uebersicht  der  Bevôlkerung  des  Staatsgebiets,  der  Wohnver- 
hâltnisse  und  Hausthiere  sânltnilicher  Lânder  der  Ungarischen 
Krone.  Auf  Grund  der  Ërgebnisse  der  im  Jahre  1870  durchge- 
fûhrten  Voikszàhlung,  und  anderer  amtlichen  Daten  zusammen- 
gestellt.  Pest,  1871,  in-4%  40  p.  1  fr.  %  c. 

Résultats  sommaires  du  dernier  recensement,  îïrésentés  d'une  ma- 
nière claire  et  pratique.  Les  tableaux  comprennent  la  Hongrie,  la  Tran^ 
sylvanie,  Fiume,  la  Croatie,  la  Slavonie  et  les  Frontières  Militaires. 
Outre  les  résultats  généraux,  on  trtiiive  ici  la  liste  de  toutes  les  locali- 
tés de  5000  âmes  et  au-dessus'. 

417.  E.  Sayous.  Notice  sur  une  carte  philologique  de  la  Hongrie. 
Bulletin  de  la  Société  de  Géogr.de  Paris^  avr.  1872,  p.  440-443. 

Le  savant  professeur  appelle  dans  cette  note  toute  l'attention  des 
cartographes  sur  la  correction  des  nomenclatures  nationales. 

418.  W.  ObermOller.  Zur  Ahstammung  dei*  Magyaren.  MittheiL  der 
Geogr.  Gesellsch.  in  Wien,  1871,  n"  12,  p»  655-589. 

419.  Rich.  KiEPERT.  Die  Ruinen  von  Sarmizegetusa.  Zeitschr,  der 
Gesellsch.  fur  Erdk,  au  Berlin,  VII,  1872  (n«  39),  p.  263-268; 
carte. 

420.  Heimatskunde  der  Bucovina.  Caernow^ilHj  1872,  petit  in-8», 
vi-61  pages. 

Manuel  scolaire. 

421  é  D*^  F,  Krackowizer.  Heimatskunde  von  OberôstfeirrBieh.  Lins, 
1872,  in-8%  iv-140  p. 

Manuel  de  môme  nature  que  le  pirécédètit.  O'atltrës  provinces  de  la 
Monarchie  autrichientie,  où  les  études  géographiques  sont  trè&-encou- 
ragées,  possèdent  des  Manuels  analogues. 

422.  K.  HoFMANN  und  J.  Stûdl.  Wahderiingën  in  der  Glockner- 
Gruppe.  Mûncherij  1871,  in-8'',  391  p.,  avec  éàrte  et  illustra- 
tions. (Extrait  de  la  Zeiischr,  des  Deutschen  Àlpen-Vereins). 
2  thl.  1. 

423.  J.  V.  :^iNGERLE.  Sitten,  Branche,  uiid  Meinungen  deâ  Tiroler 
Volkes.  Innshr.j  1871,  in-8%  1  thl.  26  sgr.  (Wagiier). 

1.  M.  Behm,  dans  sa  récente  publication  formant,  sous  le  titre  die 
Bevôlkerung  der  Erdé,  le  n*»  33  der  Ergànzungshefte  ou  Cahiers 
complémentaires  des  Mittheilungen  de  Petermann,  a  pu  donner, 
d'après  une  communication  du  Bureau  statistique  do  la  Coiitonne  de 
Hongrie,  la  population  des  localités  de  2000  âmes  et  au-dessUà  (p.  65 
et  suiv.). 


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ALLEMAGNE.  336 

424.  Àib.  WoLFP:  Le  Tyrol  et  la  CarinthiCi  Mœurs,  paysages,  lé- 
gendes. Paris,  1872,  gr.  in-18.  3  fr.  50  c.  (Lévy). 

425    Dan.LÉvT;  VAutriche-Hongriej  ses  institutions  et  ses  nationa- 
lités Paris/lSn^  in-12,  xîxi-3ll  pages  (Didier) ; 

Les  difficultés  d'organisation  intérieure  qui  divisent  en  ce  moment 
les  esprits  dans  l'empire  autHchien  et  attirèntjà  si  juste  titre^  l'atten- 
tion du  public  européen,  donnent  un  intérêt  particulier  à  ce  livre,  où 
elles  sont  consciencieusement  étudiées  et  exposées  avec  clarté.  M/  Da- 
niel Lévy  présente  d'abord  le  tableau  statistique  dés  races  diverses 
réunies  sous  le  sceptre  de  la  monarchie  austro-hongroise;  puis,  après 
avoir  tracé  rapidement  l'histoire  de  la  formation  de  l'empire  et  celle 
des  royaumes  de  Hongrie  et  de  Bohême,  il  parle  avec  plus  de  détails 
dd  réveil  des  nationalités,  des  soulèvements  de  1848  et  des  divers  essais 
de  réorganisation  jusqu'à  la  constitution  de  décembre  1867.  Entrant 
alors  pleinement  dans  son  sujet,  il  fait  connaître  les  institutions  des 
deux  moitiés  de  l'ëm^irëj  en  deçà  et  au  delà  de  la  Lëiiha,  leë  parle- 
ments, les  délégations  et  les  diètes  ;  il  étudie  ensuite  le  programme  et 
les  tendances  des  principaux  partis,  et  termine  en  faisant  ressortir  la 
nécessité  d'un  accord  fondé  sur  des  concessions  réciproques.  Si  toutes 
les  parties  du  sujet  traité  par  l'auteur  n'ont  pas  été  également  étu- 
diées, si,  par  exemple,  les  questions  intéressant  les  populations  slaves 
paraissent  trop  peu  approfondies,  l'ouvrage  de  M.  Lévy  n'en  est  pas 
moins,  'dans  son  ensemble,  utile  et  intéressant,  en  ce  qu'il  présente 
réiltiies  un  grand  nombre  d'informations  qui,  jusqu'ici,  li'étaient  pas 
facilement  à  la  portée  du  public  français.  >  (^Noticeê  bibliogrûph.  du 
Journ.  des  Sav.)» 


ALLEMAGNE. 

EMPIRE. 

426.  Jules  Zeller.  Origines  de  rAllemagne  et  de  l'Empire  Germa- 
nique. Paris,  1872,  in-8"»  (Didier). 

Bien  que  formant  un  ouvrage  complet  en  tant  qu'étude  des  origines, 
cet  ouvrage  n'est  cependant  que  le  l^"^  volume  d'une  Histoire  d'Alle- 
magne dont  les  autres  parties  paraîtront  successirement.  —  Voy.  ci- 
après,  aux  développements. 

427.  A.  Geoffroy.  Les  origines  du  germanisme.  Reijue  des  Deux^ 
Mondes,  1"  mars  18'/2,  p.  158-187. 

Fin  d'un  savant  travail  dont  nous  avons  mentionné  les  deux  pre- 
mières parties  dans  notre  précédent  volume,  p.  324,  n«  591. 

428.  W.  Kellner.  Chatten  und  Hessen.  Ârchiv  fût  das  Studium  det 
neueren  Sprachen.  1871,  p.  85. 

519.  Â.  DoFREâi^E.  Racé  allemande  et  race  française.  Dualité  de  là 


.oogle 


336  EUROPE.  (n*  426-437.) 

race  Teuto-Germanique.  Différence  orig^elle  entre  la  race  aile» 
mande  et  la  race  française.  Paris,  1872,  in -8*,  iv-88  pag;es. 

Travail  d'une  yalenr  scientifique  fort  inégale;  mais  ce  qu'on  y  poor- 
ratt  reprendre  de  vague,  de  hasardé,  de  mal  défini  dans  les  premières 
parties,  est  racheté  par  le  sentiment  et  Texpreasion  des  dernières 
pages. 

43G.  £.  ScHATZMATR.  DeutschlandsNorden  undSûden.  Skizzenihrer 
nationalen  Eigentbûmlichkeiten.  Braunschweig ,   1871,  in-8*. 

2  fr.  50  c.  (Bruhn). 

431.  H.  NOB.  In  den  Voralpen.  Skizzen  ans  Oberbayem.  Mûnchen, 

1871,  in-8».  5  fr.  50  c.  (Gummi). 

432.  H.  Frôlich.  Die  Schwàbische  Alb.  Stuttgart,  1872,  in-8".Carte. 

3  fr.  (LéVy). 

433.  A.  Wàltenbebger.  Orographie  der  AlgSLuer  Alpen.  Augshwrg, 

1872,  in-4*,  20  pages,  avec  une  carte  et  une  coupe.  5  fr. 
(Lampart). 

434.  J.  G.  Rau  und  K.  A.  Ritter.  Historische  Earte  der  Rheio- 
Pfalz.  Nach  dem  politischen  Territorial-Bestand  im  J.  1792 
bearbeitet.  Neustadt,  1871,  in-f*  piano.  1  thl. 

435.  H.  ScHWEBDT  und  A.  Ziegler.  ThQringen.  Hildburghausen^ 
1871,  in-8%  2  thl. 

436.  A.  J.  Barch.  Das  Rhôngebirge  :  Wegweiser.  Fulda,  1871,  in-8*. 
3  fr.  (Maier). 

437.  H.  MÔHL.  Wandkarte  der  Rheinpfalz.  Kaiserslautern.  1871, 
9  feuilles  (au  100  000').  18  fr.  (Tascher). 


L'île  Helgoland. 

Les  détails  suivants  sur  cet  îlot  de  la  Mer  du  Nord,  alle- 
mand par  sa  situation  géographique,  anglais  par  Tannexion 
politique,  sont  empruntés  à  la  Revue  Maritime  et  Coloniak 
du  mois  de  mars  1872. 

En  Angleterre  on  donne  une  attention  particulière  à  l'ile 
d^Helgoland  depuis  que  notre  puissance  maritime  commence  à 
se  développer  dans  la  mer  du  Nord,  et  que  Pimportance  straté- 
gique de  nie  a  été  de  nouveau  mise  en  lumière  par  la  guerre 
franco-allemande.  Que  le  gouvernement  anglais  soit  loin  de 
songer  à  renoncer  à  cette  lie,  c'est  ce  dont  on  ne  saurait  dou- 
ter, alors  même  qu'il  n'aurait  pas  commencé  à  fortiOer  Helgo- 


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ALLEMAGNE.  337 

land  comme  il  Pa  fait  il  y  a  quelque  temps.  On  sait  que  plusieurs 
canons  Armstrong  de  12  et  de  40  sont  arrivés  d'Angleterre,  et 
ont  été  placés  sur  TOberland  (plateau  supérieur  de  PUe  sur  le- 
quel s'étend  une  partie  de  la  ville  d'Helgoland,  et  qui  du  côté 
Sud  cooûne  à  la  mer  par  des  talus  à  pic).  On  y  remarquait  déjà 
quelques  fortifications.  Les  habitants  de  Plie,  dont  le  gouver- 
nement anglais»  lors  de  sa  prise  de  possession  en  1807,  a  con- 
servé tous  les  anciens  droits,  sur  lesquels  il  ne  prélève  encore 
aujourd'hui  aucun  impôt,  et  qu'il  abandonne  pour  ainsi  dire  à 
leur  propre  autorité,  ne  désirent  pas,  dans  de  pareilles  condi- 
tions, être  réunis  au  Danemark,  dont  ils  relevaient  naguère, 
non  plus  qu'à  PAllemagne.  Gomme  ils  ont  conscience  du  danger 
dont  leur  île  est  menacée  par  suite  des  envahissements  de  la 
mer,  les  questions  politiques  ont  pour  eux  une  importance  se- 
condaire, car  ils  sont  souvent  obligés  de  s'expatrier  et  de  re- 
noncer à  leur  nationalité.  La  région  haute  de  PUe,  le  rocher 
proprement  dit,  consiste  en  une  masse  argileuse  et  molle,  que 
les  intempéries  détériorent  facilement.  La  décroissance  progres- 
sive de  Pile  s'explique  par  là,  sans  que  d'autres  phénomènes 
tels  que  l'action  destructive  des  hautes  marées  soient  venus  ac- 
célérer la  marche  delà  nature....  Que  le  rocher  disparaisse,  et 
sa  base  se  réunissant  à  PUe  du  Sable  qui  s'étend  à  PEst,  créera 
pour  la  navigation  des  dangers  plus  sérieux  que  les  Goodwin- 
Sands,  si  redoutés,  de  la  côte  anglaise.  Il  faut  dire  que  ce  ro- 
cher qui  se  dresse  au  milieu  des  flots  est  un  point  de  repère  le 
jour,  surtout  par  temps  de  brume,  de  pluie  ou  de  tempête  ;  la 
nuit,  par  le  phare  qui  y  est  allumé  ;  point  de  repère  précieux 
pour  les  navires  à  destination  de  l'Elbe,  à  cause  des  courants 
très-dangereux  de  Pembouchure,  et  par  cela  même  indispen- 
sable aux  navigateurs. 


A  propo»  de  rAUemagne.  De  rimpassibilité  philosophique  en  histoire. 

M.  Zeller,  professeur  d'histoire  à  PÉcole  Normale  et  à 
l'Ëcole  Polytechnique,  vient  de  publier  le  premier  volume 
d'une  Histoire  d* Allemagne^  qui  promet  à  notre  littérature 
historique  une  œuvre  d'une  valeur  sérieuse.  L'auteur  y 
combat  plus  d'une  idée  reçue  ;  mais  ses  vues  s'appuient 
toujours  sur  une  solide  érudition.  Un  critique  autorisé, 
M.  Fustel  de  Goulanges  a  fait  néanmoins,  dans  la  Revue 

L'àMNÉB  GtiOOR,  XI.  23 

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338  EUROPE.  (no"  426-437.] 

des  Deux-Mondes^  quelques  réserves  sur  certaines  tendances 
de  Teisprit  de  Thistorien,  auxquelles  les  derniers  événe- 
ments ne  sont  pas  étrangers.  «  Ce  ne  sont  pas  nos  récents 
désastres,  dit  le  critique,  qui  ont  appris  à  M.  Zeller  k  con« 
naître  ]a  Germanie.  Le  livre  qu'il  vient  de  publier  était 
écrit  il  y  a  dix  ans.  La  préface  seule  est  nouvelle,  et  ce  n'est 
pas  elle   que  nous  louons  ici;  nous  oserons  même  dire 
qu'elle  fait  tache,  qu*elle  dépare  un  livre  de  pure  science 
historique.  Elle  sent  l'ennemi,  et  nous  ne  voudrions  pas 
qu'un  historien  fût  un  ennemi.  Elle  est  faite  pour  la  guerre, 
et  nous  ne  croyons  pas  en  France  que  l'histoire  doive  être 
une  œuvre  de  guerre.  Dans  le  corps  même  de  l'ouvrage, 
un  ton  d'amertume  perce  trop  souvent.  L'auteur  semble 
avoir  de  l'antipathie  et  presque  de  la  rancune  à  l'égard  de 
son  sujet.  Il  ne  dit  que  la  vérité;  mais  il  ne  se  cache  pas 
d'être  heureux  quand  la  vérité  est  défavorable  à  l'Alle- 
magne. Le  fond  est  d'une  érudition  exacte  et  sûre  ;  la  forme 
est  trop  souvent  celle  de  la  récrimination  et  de  la  haine. 
Ce  défaut  choquera  sans  nul  doute  quelques  lecteurs  fran- 
çais ;  au  moins  ne  saurait-il  choquer  les  Allemands  :  quel 
est  rhistorien  d'outre-Rhin  qui  jetterait  la  première  pierre? 
«  Assurément  il  serait  préférable  que  l'histoire  eût  tou- 
jours une  allure  plus  pacifique,  qu'elle  restât  une  science 
pure  et  absolument  désintéressée.  Jîous  voudrions  la  voir 
planer  dans  cette  région  sereine,  où  il  n'y  a  ni  passions,  ni 
rancunes,  ni  désirs  de  vengeance.  Nous  lui  demandons  ce 
charme  d'impartialité  parfaite  qui  est  la  chasteté  de  l'his- 
toire. Nous  continuons  à  professer,  en  dépit  des  Allemands, 
que  l'érudition  n'a  pas  de  patrie.  Nous  aimerions  qu'on  ne 
pût  pas  la  soupçonner  de  partager  nos  tristes  ressentiments, 
et  qu'elle  ne  se  pliât  pas  plus  à  servir  nos  légitirnes  regrets 
qu'à  servir  les  ambitions  des  autres.  L'histoire  que  nous 
aimons,  c'est  cette  vraie  science  française  d'autrefois,  cette 
érudition  si  calme,  si  simple,  si  haute  de  nos  bénédictins, 
de  notre  académie  des  inscriptions,  des  Beaufort,  des  Fré- 

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ALLEMAGNE.  339 

ret,  de  tant  d'autres,  illustres  ou  anonymes,  qui  ensei^ 
gnèrent  à  l'Europe  ce  que  c'est  que  la  science  historique, 
et  pii  semèrent,  pour  ainsi  dire,  toute  l'érudition  d'aujour- 
d'hui. L'histoire  en  ce  temps-là  nç  connaissait  ni  les  haines 
de  parti,  ni  les  haines  de  race  ;  elle  ne  cherchait  que  le 
vrai,  ne  louait  que  le  beau,  ne  haïssait  que  la  guerre  et  la 
convoitise.  Elle  ne  servait  aucune  cause;  elle  n'avait  pas 
de  patrie;  n'enseignant  pas  Tinvasion,  elle  n'enseignait 
pas  non  plus  la  revanche.  Mais  nous  vivons  aujourd'hui 
dans  une  époque  de  guerre.  Il  est  presque  impossible  que 
la  science  conserve  sa  sérénité  d'autrefois...,  » 

M.  Giraud,  en  présentant,  au  nom  de  l'auteur,  le  livre  à 
l'Académie  des  Sciences  Morales  et  Politiques,  en  a  donné 
l'aperçu  suivant: 

L'Histoire  d'Allemagne  de  M.  Zeller  va  jusqu'à  la  fin  de  la 
guerre  de  Trente  ans.  Le  premier  volume,  qui  traite  des  Ori- 
gines de  VAllemagne  et  de  V'empire  gerxrianique^  est  plein  de 
science  et  d'érudition.  Après  une  introduction  renfermant  des 
considérations  sur  la  civilisation,  la  ppUtique  et  la  science  alle- 
mandes et  sur  l'empire  allemand  et  TAllemagne,  l'auteur  dé- 
bute par  Tétude  du  sol  sur  lequel  s'est  établie  la  race  germa- 
nique, de  sa  constitution  géologique,  de  sa  ççnfiguration 
géographique  et  de  ses  rapports  avec  les  autres  contrées  de 
l'Europe. 

11  s'occupe  ensuite  de  la  race  elle-même  et  de  ses  affinités 
avec  les  deux  autres  races  entre  lesquelles  elle  est,  pour  ainsi 
dire,  enfermée  :  la  race  slave  et  la  race  celliquel  Le  chapitre 
suivant,  consacré  aux  mœurs  des  anciens  Germains,  est  un  sa- 
vant commentaire  du  livre  de  Tacite,  avec  des  conclusions  dif- 
férentes. M.  Zeller  met  la  race  "germanique  en  présence  de  Ja 
civilisation  romaine.  Il  montre,  penda,nt  les  deux' premiers  siè- 
cles, Rome  contenant  et  refoulant  ces  barbares  :  Ghérusques 
Marcomans,  Bataves,  Daces  ;  il  raconte  les  campagnes  de  Dru- 
sus,  de  Tibère,  de  Germanicus,  qui  vengèrent  sur  Marbod  et 
sur  Armin  le  désastre  de  Drusus,  en  forçant  la  barbarie  à  re- 
culer. 

Mais  pendant  les  deux  siècles  suivants,  les  Germains  repren- 
nent l'avantage,  et  l'on  voit  l'invasion  en  marche,  puis  l'inva- 
sion réalisée,  devenue  définitivement  maltresse  du  sol.  Mais  à 

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340  EUROPE.  (n«"  438-456.) 

cette  période  succède  celle  où  la  Gaule  gallo-franke  prend  une 
sorte  de  revanche  sur  la  Germanie.  Les  deux  derniers  chapitres 
(vi«  et  Yii«)  du  volume  sont  consacrés  à  la  Germanie  mérovin- 
gienne et  à  TAIlemagne  karolingienne.  Le  vi**  est  complet;  le 
vu«,  très-étudié,  ne  se  termine  pas  avec  le  volume  :  il  ne  con- 
duit le  lecteur  que  jusqu'à  là  conquête  de  la  Saxe,  et  devra  se 
continuer  dans  le  second  volume.  Cette  première  partie  de 
l'important  travail  de  M.  Zeller  contient  des  vues  nouvelles  et 
profondes  ;  c'est  l'œuvre  d'un  esprit  sérieux,  patient  et  lacide. 


VI 

ROYAUME  DE  PRUSSE. 

EMPIRE  D'ALLEMAGNE. 


438.  G.  Neumann.  Das  deutsche  Reich  in  geographischer^  statisti- 
scherund  topographischer  Beziehung.  Berlin,  1872,  in-8*. 
(MûUer). 

Réimpression  développée  et  modifiée  de  l'ouvrage  poblié  par  l'aa: 
teur  il  y  a  quatre  ans  sous  le  titre  de  Géographie  des  Preussùchen 
Staates.  L'ouvrage  formera  2  volumes,  publiés  en  25  livraisons  à  1  fr.25. 
U  n*a  encore  paru  que  les  premières  livraisons.  G*est  un  travail  moins 
descriptif  que  statistique. 

439.  Militair-Geographie  das  deutschen  Reiches.  Frankf,  a.  Jf.  1872, 
in-8«,  ix-348  p.  5  fr. 

440.  N.  E.  TuxEN.  Les  nouveaux  port»  militaires  de  l'Allemagne; 
trad.  du  danois  par  Spldi.  Revue  Marit,  et  Colon, ,  cet.  1872, 
p.  709-732  (avec  additions  et  carte). 

s        Jahde,  Kiel,  etc.,  etc.  Ënumération  des  ports  et  de  tous  les  points 
militaires  de  la  côte  prussienne. 

441.  G.  Berenberg.  Die  Nordsee  Insein  an  der  deutschen  Kûste. 
Uanover,  1872  (3«  édit.),  in-8%  153  p.  Carte.  3  fr.  75  c. 

442.  H.  A.  Meybr.  Untersuchungen  ûber  physikalische  Verhâltnisse 
des  westUchen  Theils  der  Ostsee.  Ein  Beitrag  zur  Physik  des 
Meeres.  Kiel,  1871,  in-f%  211  pages  et  6  tabl.  8  thlr. 

443.  Lagneau.  Sur  l'ethnologie  des  populations  du  Nord-Est  de  l'Al- 
'  lemagne.  Bulletins  de  la  Soc.  d'anthropologie  de  Paris,  août- 

sept.  1871,  p.  196-202. 

444.  RocHET.  Sur  le  type  prussien.  If«liefms  de  la  Soc,  d^anthropol, 
août-sept.  1871,  p.  188-196. 

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PRUSSE,   PAYS-BAS,   SUISSE.  341 

445.  Th.  FoNTANE.  Wanderungen  durch  die  Mark  Brandenburg-Ost- 
Havellând.  Berlin,  1872,  in-8%  3  thlr.  (Besser). 

446.  Verzeichniss  sammtlicher  Ortschaften  der  Preussischen  Provinz 
Sachsen.  MagdeburQf  1872,  in-4*.  2  thlr.  (Braensch). 

Il  se  publie  actuellement  en  Prusse  des  dictionnaires  spéciaux  de 
chaque  province.  Outre  celui  dont  nous  venons  de  relever  le  titre, 
nous  connaissons  l'existence  de  GazetUrs  analogues  pour  les  provinces 
de  Silésie,  de  Hanovre  et  de  Prusse  orientale.  Nous  présumons  que 
chaque  province  doit  avoir  le  sien  sur  le  même  plan.  Ck>mme  nous 
n^avons  encore  aucun  de  ces  Dictionnaires  provinciaux  entre  les  mains, 
nous  n'en  pouvons  rien  dire  de  plus  quant  à  présent. 

447.  C.  GRiEF.  Zur  Geschichte  der  Vermessungen  und  Kartographie 
der  Elbherzogthûmer.  viii-ix^  Jahreshericht  de  Vereins  fur 
Erdkunde  su  Dresden,  Dresden,  1872,  in-8%  p.  46-59. 

448.  Preussischen  Generalstabs  Topographische  Karte  vom  ôstlichen 
Theil  der  Monarchie  (au  lOOOOO»).  Feuilles  45  (Pr.  Eylau); 
64,  Elbing;  89,  Arys;  127,  Willenberg;  146,  Sauldau.  Berlin  y 
1871  (Scbropp).  Chaque  feuille,  1  fr  25  c. 


VII 

PAYS-BAS. 

BELQIQnFriSUISSE. 


449.  Topographische  Atlas  van  het  koningrijk  der  Nederlanden,  op 
den  Schaal  van  1  :  200  000.  Yervaardigd  volgens  de  topogra- 
phische en  militaire  Kaart  op  het  Topographisch  Bureau  van 
het  département  van  Oorlog.  s*  Gravenhagey  Topographisch 
Bureau,  1871,  in-4%  20  cartes.  12  fl.  (Smulders). 

'  450.  P.  BoEKEL.  Het  Haarlemmermeer,  wat  het  was,  en  wat  het  is. 
AmsUrdam,  1872,  in-8*,  82  p.  fl.  0,30  (Funke). 

451***  La  Hollande  et  l'Empire  Germanique.  Hevwe  des  Deux^Mondes, 
15  avr.  1872,  p.  737-763. 

Article  de  géographie  politique  ;  la  page  suivante  en  renferme  la 
substance  : 

Dans  une  conversation  —  très-piquante  par  la  forme,  très-sérieose 
pour  le  fond  —  entre  un  Allemand,  un  Français  et  un  Hollandais,  ce- 
lui-ci dit  au  premier  :  «  Yous  partez  toujours  de  l'idée  que  nous  som- 
mes des  Allemands  comme  vous,  sauf  quelques  différences  extérieures 
ne  touchant  pas  au  fond.  A  ce  compte,  la  France  aurait  le  droit  de 
réclamer  comme  ses  enfants  les  Wallons  de  Belgique,  les  Romands 
I  de  Suisse,  les  Italiens  du  nord.  Ne  confondez  donc  pas  la  race  et  la 

I,  u,g,uzeuuy^.vJOgIe 

I 


342  EUROPE.  (n'*'  457-467.) 

• 
nation;  autrement  on  ne  saurait  ce  que  l'Europe  va  devenir.  Mous 
sommes  en  majorité  d'origine  germanique,  cela  est  vrai,  bien  que  nous 
comptions  aussi  de  nombreux  éléments  celtiques  dans  nos  popula* 
tions;  les  Danois,  les  Scandinaves  en  général  sont  aassi  d'origine 
germanique.  Voulez-vous  également  les  annexer?  Notre  langue  est 
germanique,  comme  les  leurs  et  comme  l'anglais,  mais  elle,  n'est  pas 
du  tout  un  dérivé,  encore  moins  un  patois  de  rallemand.  Elle  est  aussi 
originale  que  la  vôtre.  Elle  se  rattache  comme  la  vôtre  au  vieux  tronc 
germanique,  dont  elle  est  une  branche  ipdépendantè,  poussée  parallè- 
lement aii  haut-allemand,  lequel  n'est  devenu  (juê  peu  à  peu  l'alle- 
mand moderne.  Il  y  a  même  des  savants  qui  prétendent  qu'elle  est 
plus  rapprochée  que  la  vôtre  du  tronc  primitif.  Un  Hollandais  et  un 
Allemand  ne  se  comprennent  pas  quand  ils  se  parlent  chacun  dans  sa 
langue.  Notre  articulation  est  inute  difîerente.  Voyez  vous-même  :  nous 
sommes  trois  ici  de  nationalité  distincte  ;  pour  lier  conversation,  comme 
je  ne  sais  pas  parler  allemand  et  que  vous  ne  savez  le  hollandais  ni 
l'un  ni  l'autre,  nous  avons  dû  recourir  au  français.  Je  ne  me  .flatte  pas 
de  parler  très-purement  cette  langue,  cependant  je  la  parle  sans  diffi' 
culte  avec  les  personnes  que  mes  fautes  n'effarouchent  pas;  des  mil- 
liers dé  mes  compatriotes  sont  dans  le  même  cas,  et  Je  vois  combien 
vous  autres  de  la  haute  Allemagne  vous  ave2  de  peine  à  ne  pas  estro- 
pier tout  mot  français  où  se  rencontre  un  /",  un  p  ou  un  d.  Au  surplus, 
qu'importe  cette  question  de  langue?  Nous  parlerions  allemand  comme 
les  Suisses  et  les  Alsaciens  que  nous  ne  serions  pas  Allemands  pour 
cela.  Notre  histoire,  nos  anciennes  constitutions,  nos  mœurs,  nos  qua- 
lités et  nos  défauts  réunis,  tout  nous  distingue  de  vous,  et  si  rien  ne 
nous  empêche  de  rester  bons  amis  sur  la  base  du  respect  de  nos  droits 
réciproques,  vous  pouvez  être  certains  de  nous  avoir  pour  ennemis 
irréconciliables  dès  que  vous  ferez  sérieusement  mine  de  nous  «ssn  - 
jettir....  » 

452.  Statistique  de  la  Belgique.  Population.  Recensement  général, 
31  déc.  1866.  Publié  par  le  Ministre  de  l'Intérieur.  BruxelleSj 
1870,  in-4%  736  pages. 

453.  Carte  topographique  de  la  Belgique,  publiée  par  le  Dépôt  de  la 
Guerre  (au  40  000«). Feuille  13,  Bruges;  14,  Lokeren  ;  22,  Gand  ; 
23,  Malines;  29,  Courtray;  37,  Tournay.  BruxelleSj  1871.  La 
feuille,  7  fr.  50  c.  (Muquardl). 


454.  F.  M.  ZiEGLER.  Die  geograpl^ischen  Arbeitep  in  der  Schweiz 
wàhrend  des  Jahres'  1871.  Mittheilungen  der  Geograph,  Ge- 
sellsch.  in  Wien,  B*»  xv,  1872,  p.  223-230,  276-289. 

455.  E.  Plantamour,  R.  Wolf  et  A.  Hirsch.  Détermination  télégra- 
phique de  la  différence  de  longitude  entre  la  statiun  astrono- 
mique du  Righi-Kulm  et  les  observatoires  de  Zurich,  et  de 
Neuchâtel.  Genève  et  Bâle,  1871,  m-4",  222  p.  et  3  tableaux. 
8  fr.  (Georg). 

456.  Carte  générale  de  la  Suisse;  réduite  de  la  carte  de  Dufour. 
Berne,  1871-72;  4  feuilles,  10  fr.  (Dalp). 


y  Google 


ITALIE.  343 

VIII 


ITALIE. 

457.  Ferd,  Giugni.  Dizionario  del  regno  d'lt,alia,  comprese  le  pro- 
viiicie  délia  Venezia,  di  Mantova  ê  di  Roma,  e  circoscrjzione 
administrativa,  électorale  e  giudiziaria.  Firenze ,  Stamperia 
Reale,  1871,  iii-8%  892  pages.  5  1.  60. 

458.  L.  Gnegco.  Nuovo  Dizionario  dei  comuni  del  Regno  d'Italia, 
ampliato  con  quelli  del  territorio  Romano,  colla  circoscrizione 
amministrativa,  e  populazione  desunta  dagli  ultimi  censimenti. 
Savona,  1871,  in-8,  272  p.  21: 

459.  Dizionario  classico,  storico,  çorografico  ed  archeologico  dell* 
Italia  anlica  e  modema.  Napoli,  1872, 10-4"  (Morano).  1"  fasci- 
cule, 32  p. 

Nous  nd  croyons  pas  que  ce  dictionnaire  ait  été  continué. 

460.  BoUettino  del  Cliib  Àlpino  italiàno.  Relazioni  di  eîcursioni  e  sa- 
ille, osservazioni  scientifiche  ,e  particolârità  alpestri,  pubblicate 
per  cura  deila  direzione  del  club.  Vol.  V,  n*  18.  Torino  (1872), 
p.  221-528,  avec  Cartes,  vues  et  panorama. 

46i.  Cav.  Luigi  Maggiulli  e  duca  Sigi:im.  Gastromedxàno.  Le  inscri- 
xioni  Messapiche  raccolte.  Lecce,  1871;  in-16,  vn-72  pages,  et 
bxin  fac-similé. 

D'autres  travaux  linguistiques  sont  signalés.  On  mentionne  un  Essai 
suUa  storia  délia  lingua  e  dei  diaietii  d'italiajde  M.Napoleone  Chaiz; 
une  Grammaticù.  storica  délia  lingua  italianot  de  M.  Fornaciari  ;  un 
ouvrage  considérable  de  M.  I.  Ascoli,  sous  le  titre  de  Saggi  Ladini  ; 
enfin,  iin  travail  important  de  M.  J.  Flechia  sur  les  dialectes  du  Pié- 
mont. Mais  nous  n'avons  sur  ces  publications  que  des  indications  in- 
suffisantes, car  les  communications  littéraires  et  scientifiques  avec 
ritalie  sont  encore  imparfaites  et  limitées.  Le  journal  géographique  de 
M.  Cora  va,  nous  Tespérons;  combler  ces  regrettables  lacunes. 

462.  A.  CoviNO.  De  Turin  à  CUambéry,  ou  les  vallées  de  la  Dora  Ri- 
paria  et  de  TArc,  et  le  tunnel  des  Alpes  Gottiennes.  I.  Notices 
topographiques,  historiques  et  statistiques.  II.  Tunnel  du  Mont- 
Cenis.  III.  Itinéraire  de  Turin  à  Chambéry,  et  Excursions  dans 
les  Alpes.  Turin  y  1871,  in-8°,  ISO  pages,  cartes  et  illustr. 
3  fr.  50  c. 

463.  Raffaele  Pareto.  Relazione  suiie  condizioni  agrariê  ed  ingie- 
niche  délia  Campagna  di  Roma.  t-Hrenze,  1872. 

M.  de  liaveleye  a  donné  dans  la  Revue  des  Peux-Mondes  (1"  juin 
1872,  p.  711)  lin  extrait  analytique  dei  ce  travail. 

uigiiizeu  uy  >.^«  v^  Vv' pc  i n^ 


344  EUROPE.  (n"^  468-473.) 

464.  H.  Jordan.  Topographie  der  Stadt  Rom  im  Alterthum,  Berlin, 
1871,  2  vol.  in-8^  7  fr.  (Weidmann). 

465.  A.  MoROSi.  Ricerche  intorno  air  origine  délie  colonie  greche 
nella  Terra  d'Otranto.  Archivio  per  VAntropologia  e  Ut  Etr^o- 
logia,  I,  1871,  p.  325. 

466.  A.  HoLM.  Délia  geograiîa  antica  di  Sicilia,  prima  versione  ita- 
liana  di  P.  M.  latino.  Palermo,  1871,  in-16, 104  p.  2  1.  50. 

467.  V.  Fréville.  Visite  aux  îles  Caprée  et  Nisita.  Limoges,  1872, 
in-8%  152  p. 


IX 

ESPAGNE. 

PORTUGAL. 


468.  Die  Balearen,  in  Wort  und  Bild  geschildert.  2**'  Band.  Die 
eigentlichen  Balearen.  LeipXig,  1871,  in-folio,  iY-666  pages, 
avec  frontispice,  planchés  en  couleur  et  nombreuses  gravures 
dans  le  texte. 

Ce  deuxième  Yolume  d*an  livre  vraiment  princier,  est  digne  dui*"  vo- 
lume paru  en  1869  (voir  le  t.  VIII  de  l'Armée  Géographique^  p.  378). 
Je  puis  aujourd'hui  joindre  an  titre  de  Touvrage  le  nom  de  Tauteur  que 
j'ignorais  alors  :  c'est  Tarchiduc  Ludwig  Salyator,  un  des  fils  du  ci- 
devant  duc  de  Toscane,  dépossédé  par  Victor-Emmanuel,  actuellement 
roi  dltalie,  au  mois  de  mars  1860.  C'est  ajouter  encore  à  Thonneur  d'an 
grand  nom,  et  faire  un  noble  usage  de  son  indépendance,  que  de  pro- 
duire de  telles  œuvres,  auxquelles  nous  ont  d'ailleurs  habitués  les 
princes  de  la  Maison  d'Autriche.  Le  volume  actuel  est  consacré  à  l*!le 
Majorque  ;  outre  la  splendeur  de  l'exécution  artistique,  c'est  certaine- 
ment le  travail  le  plus  étendu  et  le  plus  complet  qui  existe  sur  la  géo- 
graphie, l'histoire  politique,  la  statistique  et  l'histoire  littéraire  de 

nie. 

469.  J.  Fr.  Bladé.  Défense  des  Ëtudes  sur  Torigine  des  Basques. 
Paris,  1872,  in-^%  16  p. 

L*an  dernier,  M.  d'Avezac  a  écrit  une  critique  assez  vive  du  livre  de 
M.  Bladé  sur  l'origine  des  Basques  (voir  le  précédent  volume  de  VAn^ 
née  Géographique,  p.  S39);  M.  Bladé  répond  ici  à  cette  critique.  Ce 
sont  des  morceaux  à  lire,  aussi  bien  que  le  livre  lui-même,  par  tons 
ceux  qui  prennent  intérêt  à  cet  ordre  d'études. 

470.  W.  Webster.  Note  au  sujet  de  Touvrage  de  M.  J.  F.  Bladé  sur 
Torigine  des  Basques.  Dans  les  ISxploratiojis  pyrénéennes , Bul- 
letin de  la  Société  Ramond,  Bagnères,  avr.  1872,  p.  55-76. 

Voidan  auxiliaire  pour  M.  d'Avezac.  La  note  de  M*  Webster  est 

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ESPAGNE.  345 

écrite  en  anglais;  eDe  0*étend  rartont,  et  d'ane  manière  compétente, 
sur  le  côté  de  la  question  spécialement  traité  par  Guill.  de  Hnmboldt. 
L'aateur  de  la  note  yréftate  très-péremptoirement  les  idées  de  M.Bladè. 
M.  Webster  est  beancoop  moins  précis  et  entre  moins  dans  le  fond  des 
faits  quand  il  aborde  le  côté  ethnologique  de  la  question.  On  sent  qu'il 
n'est  plus  là  sur  un  terrain  familier. 

471.  C.  KiNG.  MountaineeriDg  in  the  Sierra  Nevada.  Lond.  1872, 
petit  in-8%  10  sh.  6  d.  (Low). 


472.  E.  A.  DE  BBTTENConRT.  Diccionario  chorographieo  de  Portugal, 
corn  as  divisoes  administrativa,  judicial,  ecclesiastica  e  militar. 
Precedido  de  um  resumo  de  chorogfaphia  patria.  Lissahon^ 
1870,  in-16,  157  pages.  Carte.  7  fr.  50  c. 

473.  Carta  corografîca  dos  reinos  de  Portugal  e  Algarve,  1 :  100  000' . 
Feuilles  10  et  22.  Lissàb.  1870-71  (chaque  feuille,  7  fr.  50  c). 


Quelques  données  sur  Torigine  des  Basques. 

A  la  suite  de  Tarticle  de  M.  Webster,  on  trouve  un 
appendice  de  M.  Ânt.  d'Âbbadie  (également  écrit  en 
anglais)  au  sujet  des  rapports  grammaticaux  (il  y  a  aussi 
des  rapports  de  vocabulaires)  qui  existent  entre  l'eskuara 
ou  basque  et  le  galla.  Nous  donnons  la  traduction  de  ce 
morceau,  comme  pièce  à  consulter  dans  une  question 
d'ethnologie,  la  parenté  originaire  des  Basques,  qui  est 
bien  loin  encore  d'être  élucidée. 

c  Les  botanistes,  avec  grande  raison,  donnent  seriatim  les  ca- 
ractères de  leurs  familles.  Les  philologues  semblent  éviter  cette 
marche  lumineuse,  à  tort  à  ce  que  je  crois.  La  famille  (?)  tou- 
ranienne,  que  je  n'admets  pas  comme  telle,  est  ainsi  définie  par 
Brace,  the  Races  of  the  Old  World  (New  York,  1863)  :  V  En- 
semble de  caractères  qui  ne  se  retrouvent  pas  ailleurs  (défini- 
tion négative  qui  n'en  est  pas  une)  ;  2"*  agglomération  ;  3"  faci- 
lité de  produire  des  formes  nouvelles  ;  4**  absence  d'irrégularité 
dans  les  formes;  5*  divergence  rapide  de  dialectes;  6*  eupho- 
nisme,  c'est-à-dbre  harmonie  des  voyelles,  idée  étrangère  aux 
Sémites  et  aux  Ariens. 


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346  *       EUROPE.  (n®"  474-484.) 

k  Je  dôntie  ci-après  lès  traits  bstractéristiqnes  de  là  famille  que 
j'appelle  hamiiique,  par  là  raison  que  des  §ejzé  groupes  ou 
peuplades  que  j'ai  étadiés  le  premier  se  nomme  lui-même  Ham^ 
ou  Khamtinga,  c'est-à-dire  «  langue  de  Khani.  i  Dans  cet 
idiome,  le  locatif  se  forme  comme  en  basque,  en  ajoutant  nue 
syllabe  après  le  génitif  (basque,  amareklD,  f  avec  la  mère  >}. 
Tous  ou  presque  tous  mes  caractères  hamitiques  s'appliquent 
au  basque.... 

«  Pour  citer  quelques  rapports  de  mots,  owio,  mère,  est  basque; 
h(U)ury  enfant,  est  basque.  Une  tribu  doggo  se  nomme  Bask^ou 
Basketa;  une  province  de  TÉthiopie  est  appelée  Àlava.Un  Doggo 
avec  qui  je  causais  en  oromo  (où  gallâ)  me  donna  de  nombreux 
exemples  de  doublés,  régimes  dans  ses  verbes,  précisément 
comme  en  basque.  Je  suis  donc  pleinement  autorisé  à  dire  à 
regard  du, basque  ce  que  Linné  disait  i,  Jussieù  à  la  vue  d'une 
nouvelle  plante  :  faciès  afrïcanà,  i 

.  Après  avoir  récapitulé  quelques-unes  des  particularités 
grammaticales  dé  ce  ({u'il  â  nommé  la  famille  hamitiqne, 
M.  d'Âbbadie  ajoute  : 

c  Arobjection  que  beaucoup  de  ces  traits  caractéristiques  sont 
ariens,  je  réponds  qu'il  en  doit  être  ainsi;  que  l'àrien  est  seu- 
lement une  famille  secondaire  ;  qu'aucune  famille  n'est  absolu- 
ment pure,  mais  que,  pareilles  à  beaucoup  de  formations  géà- . 
logiques.  Tune  passe  pluâ  ou  rnoins  dans  l'autre.  J*explique  de 
cette  manière  les  racines  polylittérales  de  la  famille  sémitique. 
Elles  semblent  être  d'origine  hamitique. 

c  Cette  théorie  n'ayant  pas  éié  publiée,  n'a  ps^s  été  discutée, 
et  encore  moins  acceptée  par  les  philologues.  Elle  parait  néan- 
moins expliquer  beaucoup  de  faits  anormaux,  ou  du  moins  re- 
gardés comme  tels  dans  Tétat  présent  de  la  philologie.  » 


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GRANDE-BRETAGNE,  347 

■  X 

6RANDE-tiRiTA6N£. 

ANGLETERRE.  ECOSSE.  IRLINDE. 


474.  A.  G.  Ramsay,  Director  gênerai  of  the  geological  surveysof  the 
United  Kingdom.  Physical  Geology  and  Geography  of  GreatBri- 
tain.  (3«  éd.)  Lond,  1872,  petit  in-8».  7  sh.  6  d.  (E.  Stanford). 

475.  Rob.  A.  "WiLLiAïts.  Notes  on  river  basins.  Lond,  1873,  in-8*, 
'r    83  pages  (Longmans). 

Malgré  la  généralité  de  son  titre,  ce  petit  traité  se  rapporte  exclusi- 
vement à  la  géographie  naturelle  de  la  Grande-Bretagne. 

476.  White.  History,  Gazetteer  and  Direclory  of  Lincolnshire,  and 
the  city  and  diocèse  of  Lincoln.  Sheffieldj  1872,  in-S».  884  pages- 
30  sh. 

477.  Patr.  Walker.  Rambles.  In  the  New  Forest,  Winchester, 
Farnham,  the  Eme,  Ballyshannon,  Exeter^  Liverpool,  Salisbury, 
Canterbury,  etc.  Lond,  1872,  petit  in-8«.  10  sh.  6  d.  (Long- 
mans). 

Morceaaz  successivement  publiés  dans  le  Frcisers^s  Magasine. 

478.  Th.  NicHOLAS.  Annals  and  antiquities  of  the  counties  and  county 
familles  of  Wales.  Lond,  1873,  2  vol.  gt.  in-S",  63  sh.  (Long- 
mans). 

479.  Cl.  Markham.  The  Ordnance  Survey  of  the  Kingdom.  Océan 
Highways,  London  Geographtcal  Accord  ,nov.  1872,  p.  256-258; 
déc,  p.  294-296;  janv.  1873,  p.  327-329. 

Historique  de  ce  grand  établissement  géodésique,  son  objet,  ses 
travaux. 

480.  Walter  Thornbdry.  Old  and  New  London.  A  Narrative  of  its 
history,  its  people.  Lond.  1872,  in-8°  lUustraled, 

481.  Tli.  Wright.  Uriconium;  a  historical  âccount  of  the  ancient 
roman  city.  Lond.  1872,  in-8'  (Longmans). 

482.  T.  B.  JoHNSTON  and  Colonel  J.  A.  Robertson.  The  historical 
geography  of  the  clans  of  Scotland.  Edinb.  J872,  petit  in-4*, 

\  with  plans  and  maps.  7  sh.  6  d.  (K.  Johnston). 

483.  R.  CowiE.  Shetland,  descriptive  and  historical.  Àberdeen,  ISll, 
in-12,  326  p.  4  sh.  6  d.  (Smith). 

484.  Ch.  Adderlby.  The  self-gOTernment  in  the  colonial  possessions 

uigiiizeu  uy  >_jv^Vv'^in_ 


348  EUROPE.  (n***  485-491.) 

of  England.  Review  of  Colonial  Policy.  (Article  de  M.  de  Blerzy 
sur  ce  sujet  dans  la  Revue  des  Deux-Mondes,  V  jany.  1872. 


XI 

FBiLNGE. 
S  1".  Généralités. 


485.  CoRTAifBERT.  Géographie  élémentaire  de  la  France;  ouvrage 
rédigé  conformément  aux  programmes  de  1872  pour  la  classe 
de  septième.  Pom,  1873,  in-12,  vin-120  p.,  fig.dans  le  texte. 

486.  E.  Levasskur.  Géographie  de  la  France  et  de  ses  colonies. 
Paris,  1872,  gr.  in-18, 143  pages. 

487.  Ad.  JoANNE.  Petit  dictionnaire  géographique,  administratif, 
postal ,  télégraphique,  statistique,  industriel  de  la  France,  de 
l'Algérie  et  des  colonies,  contenant,  pour  chaque  commune  et 
pour  les  principaux  hameaux,  le  nom  de  la  commune,  sa  popu- 
lation, rindication  du  département,  de  Tarrondissement  et  du 
canton  auxquels  elle  appartient,  les  bureaux  de  poste  ou  télé- 
graphiques qui  la  desservent,  les  stations  de  chemins  de  fer  qui 
y  sont  établies,  les  établissements  industriels,  etc.  Parts,  1872, 
in-8»,  iY-799  pages  (Hachette), 

Abrégé  du  grand  Dictionnaire  géographigue  de  la  France'  (voir  le 
t.  VIII  de  l'Année  Géographique,  p.  419,  n»  554),  et  offrant,  sons  de 
moindres  dimensions,  les  mêmes  qualités  de  recherches  approfondies, 
de  nomenclature  complète  et  d'exactitude  scrupuleuse. 

488.  Ludovic  Lalanne.  Dictionnaire  historique  de  la  France,  conte- 
nant rhistoire  civile,  politique  et  littéraire,  Thistoire  militaire, 
rhistoire  religieuse  et  la  géographie  historique.  Paris,  1872, 
gr.  în-8%  iv-1843  pages  à  2  colonnes.  25  fr.  (Hachette). 

L'immensité  des  matières  renfermées  dans  cette  encyclopédie  natio- 
nale a  obligé  Tauteur  de  se  resserrer  pour  chaque  article  dans  la  pins 
grande /Concision  possible;  mais  si  le  Dictionnaire  historique  de  la 
France  répond  brièvement  à  la  plupart  des  questions  qu'on  lui  adresse, 
il  est  bien  peu  de  questions  auxquelles  il  ne  fasse  une  réponse,  et  une 
réponse  nette  et  précise,  c  Nous  avons  voulu  résumer  par  ordre  alpha- 
bétique, dit  Tauteur  dans  sa  préface,  ce  qui  touche  à  l'histoire  des 
hommes  et  des  choses  de  notre  patrie.  Des  faits  sans  phrases,  des 
noms  et  des  dates,  voilà  ce  que  Ton  doit  uniquement  chercher  dans 
notre  livre....  La  partie  biographique  est  la  plus  considérable,  comme 
cela  devait  être.  La  partie  généalogique  est  très-développée..-..  » 


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FRANCE.  349 


S  2.  Géographie  physique.  —  Frontièrea* 

489.  Atlas  météorologique  annuel  de  TObservatoire  de  Paris,  pour  les 
années  1869,  1870  et  1871  réunies.  Paris,  1872,  in-4*,15  pages 
de  texte  et  9  cartes. 

Voici  la  liste  des  neuf  cartes  de  ce  répertoire  que  dirigeait  M.  De- 
laanay  : 
1.  Carte  générale  des  stations  météorologiques  de  I*Europe; 
3.  Carte  générale  des  stations  météorologiques  de  la  France  ; 

3.  Carte  hypsométrique  de  la  France  (au  5  000  000*); 

4.  Carte  des  orages  du  9  mai  i86S  ; 

5.  Carte  des  orages  du  17  juillet  1866; 

6.  Carte  des  orages  du  23  juillet  1867  ; 

7.  Carte  des  écarts  thermométriques,  mars  1872; 

8.  Carte  des  températures  du  mois  de  mars  1872; 

9.  Carte  des  pluies  du  mois  de  mars  1872. 

490.  H.  DE  Lagrbné,  ingénieur  des  Ponts  et  Chaussées.  Cours  de 
navigation  intérieure.  Fleuves  et  rivières.  Ahheville,  1871 ,  in-4' 
de  222  pages.  Tome  II,  texte. 

491.  Bblgrand,  inspecteur  général  des  Ponts  et  Chaussées.  La  Seine; 
études  hydrologiques.  Pa/ris,  1872,  un  fort  vol.  gr.  in-8*  illustré, 
et  atlas  de  80  pi.  35  fr.  (Dunod}. 


Sur  l'hydrographie  et  le  régime  de  la  Seine. 

A  roccasion  des  crues  extraordinaires  de  la  Seine 
en  1872,  nn  journal  a  publié  un  article  qui  contient  des 
renseignements  intéressants  sur  le  régime  de  la  rivière,  et 
qui  résume,  dans  une  certaine  mesure,  l'important  travail 
de  M.  Belgrand,  dont  nous  venons  de  donner  le  titre. 

On  sait  que  la  Seine,  avant  d'être  resserrée  dans  le  lit  qu'elle 
remplit  actuellement,  occupait,  à  la  façon  d'un  bras  dé  mer, 
toute  la  vallée  de  laquelle  émergeaient,  comme  des  îles,  Mont- 
martre, les  Buttes  Ghaumont,  et,  sur  la  rive  gauche,  le  sommet 
de  la  montagne  Sainte-Geneviève.  Les  travaux  de  M.  Belgrand 
sur  ce  bassin  de  notre  fleuve  ne  laissent  aucun  doute  à  ce  sujet. 

Cette  largeur  était  encore  considérable  au  commencement  de 
Tère  chrétienne;  et  quoique,  d'après  l'empereur  Julien,  le  cours 


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350  EUROPE.  (n°'  492-496.) 

de  la  Seine  fût  des  plus  réguliers  et  ne  présentât  que  rarement 
des  crues  extraordinaires,  elle  s'étendait  encore  assez  loin  dans 
les  prairiea  qui  la  bordaient  depuis  Bercy  jusqu'au  Pré-auï- 
Clercs,  et  plus  loin,  Grenelle  et  Billancourt. 

La  première  inondation  dont  il  soit  question  dans  nos  annales 
est  celle  que  rapporte  Grégoire  de  Tours,  et  qui  eut  lieu  en  583. 
«  La  Seine  et  la  Marne, dit  l'historien,  causèrent  une  si  grande 
inondation  autour  de  Paris  que  beaucoup  de  naufrages  eurent 
lieu  entre  la  cité  et  la  basilique  de  Saint-L^urept-  ^On  croit 
que  l'église  Saint-Laurent  dont  il  est  question  était  située  snr 
l'emplacement  de  celle  jjui  existe  encore  au  faubourg  Saint- 
Martin.  Il  est  en*  effet*  jjémo'ntrë  qu'il  y  avait  pntre  l'Ar-, 
senal  et  Saint-Laurent  un  canal  qui  occupait  à  peu  près  l'em- 
placement de  notre  canal  de  TGurCij,  mais  qui  recevait  les  eaux 
de  la  Seine  et  abritait  les  bateaux  perîdapt l'hiver.  ' 

Nous  n'avons  pas  de  détails  bien  précis  sur  les  inondations 
de  821,  886,  1196,  1288,  1296  et  1540.  La  hauteur  des  eaux 
pour  ^615,  fjp  juillet,  est  donnée  par  certains  ouvrages  comme 
i^yant  été  <Jo  9  mètres  4  :  mais  cq  cHififre  est  réduit  par  d'autres 
à  8  mètres  4.  En  1649,  1651,  1658  et  1690,  la  Seine  atteignit 
7  n^ètres  Ç4,  7  mètres  83,  8  mètres  81,  et  7  mètres  55. En  1711, 
elle  marqua  7  mètres  62,  et  ^n  décembre  1740,  7  mètres  91. 

Cette  crue  de  1740  est  une  des  plus  intéressantes,  en  ce 
qu'elle  nous  permet  de  démontrer  la  possibilité  du  fait  rapporté 
par  saint  Grégoire.  C'est  surtout  sur  la  rive  droite  de  la  Seine 
et  par  le  faubourg  Saint-Antoine  que  le  jQeuve  se  répandit  dans 
Paris.  On  peut  voir  encore  ou  du  moins  nous  avons  vu,  il  y  a 
quelques  années,  près  de  la  porte  de  l'hôpital  des  Quinze-Vingts 
une  inscription  rappelant  ce  fait,  file  est  sj^insi  conçue  : 

c  X.e  35  décembre  1740,  la  pointe  de  Içt  rivi&rre  est  venue  vis- 
à-vis  de  cette  pierre.  Signé  :  Bouquet,  » 

Dans  notre  siècle,  les  plus  hautes  eaux  ont  été  :  en  1802,  7 
mètres  44  centimètres;  en  1836,  par  deux  fois,  6  mètres  40 cen- 
timètres et  7  mètres;  en  1850,  6  mètres  5  centimètrjss  ;  et  en 
1866,  6  mètres  20  centimètres. 

La  comparaison  de  ces  chiffres  permet  encore  de  conclure 
que  depuis  l'ère  chrétienne  les  crues  de  la  Seine  ont  toujours 
été  de  moins  en  moins  considérables.  Au-dessus  de  8  iiiètres 
dans  le  dix- septième  siècle,  elles  n'atteignent  plus  une  seule 
fois  ce  chiffre  dans  le  dix-huitième  siècle,  et  depuis  le  commen- 
cement du  dix-neuvième,  elles  n'ont  dépassé  qu'une  fois  7  mè- 
tres '  .    ■ 


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FRANCE,    HYDROGRAPHIE.  351 

H  est  probable  que  cette  diminution  constante  correspond  avec 
une  diminution  équivalente  dans  le  volunae  ordinaire  des  eaux, 
lia  biauteur  naoyenue  calculée  par  Lalande  était  en  effet  de 
1  mètre  25  centimètres.  Les  évaluations  du  commencement  du 
siècle  ne  dctnnaient  plus  que  1  mètre  24  centimètres.  Nous  ne  sa- 
yons  si  de  nouveaux  calculs  ont  été  faits  depuis  1840. 

Par  contre,  les  plus  basses  eaux  ont  été  constatée?  en  1858. 
Elles  ont  été  alors  de  0™85  au-dessous  de  l'étiage  du  pont  de  la 
Tournelle,  qui  avait  été  établi  sur  les  basses  eaux  de  1719. 

Les  années  1731,  1767,  178Ç,  1794,  1800,  1803,  1822,  1863 
et  1864^ont  été  aussi  inférieures  au  niveau  de  1719;  il  n'y  a  que 
1790  qui  l'ait  exactement  reproduit. 


492.***Les  précipices  de  la  cascade  de  Gavamie.  Explorations  pyre-^ 
nëennesj  Bulletin  delà  Société  Ramond,  cet.  1872,  p.  181-184. 

«  G*e8t  une  course  insensée,  dit  l'anteur  de  la  note,  dont  je  ne  fais 
mention  que  pour  en  détourner  ceux  qui  voudraient  la  faire  et  qui 
tiennent  à  là  vie.  » 

493.  Comte  H.  Russbll.  Le  Mont-Perdu  (3351  mètres).  Son  ascension 
par  l'est.  Ibid.j  p.  184-192. 

494.  Gh.  Mabtins.  Une  station  géodésique  au  sommet  du  Ganigou, 
dans  lès  Pyrénées-Orientales.  Revue  des  Deux-Mondes,  15  déc 
1872,  p.  867-887. 

Sous  ce  titre  un  peu  limité,  le  savant  auteur  de  ce  travail  ne  re- 
trace rien  moins  que  l'histoire  de  la  géodésie  française.  Nbus  y  re- 
viendront. 

495.  Ed.  Whtbiper.  Escalades  dans  les  Alpes,  de  1860  à  1869.  Trad. 
de  Tangl.  par  Ad.  Jeanne.  Paris,  1873,  gr.  in-8",  iv-431  pages, 
avec  108  gravures  et  6  cartes  (Hachette) 

Je  ne  sus  pas  de  roman  plus  émouvant  qne  les  EsccUades  dans  es 
Alpesy  de  M.  Edouard  ^hymper,  an  touriste  leste  comme  un  chamois, 
•plus  hardi  qu'un  aéronaute,  que  l'attrait  des  ascensions  a  saisi  comme 
une  vocation,  et  qui  est  parti  de  Londres,  un  beau  jour,  en  déclarant 
la  guerre  aux  montagnes.  Pour  venir  à  bout  de  cette  gigantomachie 
hasardeuse,  il  avait  la  volonté  à  défaut  dès  bras  d'un  Titan.  Les  pics 
les  plus  ardus,  les  cimes  les  plus  farouches  des  Alpes  du  Dauphiné,  de 
la  Suisse^  de  Tltalie  et  de  la  Savoie  ont  été  domptés  par  son  pied  vain- 
queur. Je  vous  recommande  son  escalade  du  Cervin,  une  montagne  de 
quatre  mille  quatre  cent  quatre-vingt-deux  mètres  d'altitude,  inacces- 
sible entré  toutes,  dressée  et  taiUée  à  pic,  entourée  d'une  ceinture 
d'immenses  précipices.  M.  Whymper  assiégea  six  fois  cette  forteresse 
imprenable  de  la  nature,  six  fois  il  fut  repoussé.  Un  jour,  entre  autres, 
il  tomba  de  soixante-dix  mètres  en  sept  ou  huit  bonds.  L'artillerie 


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352  EUROPE.  (n**  497-498.) 

même  ne  manqaa  pas  à  la  défense  de  la  place.  A  défaut  de  boulets,  la 
montagne  lançait  à  son  assaillant  les  pierres  de  ses  avalanches.  An 
septième  as