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Full text of "Les oiseaux et les fleurs, allégories morales d'Azz-Eddin Elmocaddessi"

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LES    OISEAUX 

ET 

LES    FLEURS, 

ALLÉGORIES    MORALES 

D'AZZ-EDDIN    ELMOCADDESSI, 

PUBLIÉES    EN    ARABE, 

AVEC    UNE    TRADUCTION    ET    DES    NOTES  , 

Par  iM.  GARCIN  DE  TASSY. 


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• 


II 


PARIS, 

IMPRIMERIE    ROVALE. 


M.    DCCC.    XXI. 


Mon  livre  est,  pour  les  amis  assemblés,  comme  un  parterre  de 
fleurs  ;  il  éloigne  le  chagrin,  il  est  incomparable  par  son  élégance 
et  unique  par  son  exécution  ;  il  offre  le  plaisir ,  mais  les  pensées 
les  plus  sérieuses  y  sont  cachées. 


toijal  De  L  ç)u«5ttuclioii  pulnimic^  v  ^jj  icieo 
t)c'  L  oïDte  toual  De  la  J  Cciioit  D  boiiiieuu, 
^btvctlicu  De  2.  ctatS.Nc  De  l  otDte  Dc^ 
^ix lu le -cillai i lie  De  cJiiuicMc^,  elc.  elc,  c\c. 


tÀ6û??,4i€t/r  le  (yja?v/i. 


//e  mcj  //*m'ai/jc^  cc??i??ie  (z  ce///ù  r/cr?/ /rj  u'^c^iJ  e/ /r.f 


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tyf^a  net/  (/c  7'r//c/eréa  acj  c/oacj  aue  f/n/f7f/e 

i€  r^'où^  nu  u  me  Jicci  /n/ea^  c/e  ?/i  aWt?H?r?cr  Âar 
ce  carfçfrçr  mf/r/ j  /n/^j  aaftf/c??l  7)u/le  /oiJj  Je/on^ 

a  ameu?'J  r/u4ùJc  ^  a  ^'Cf/J  lot/crj  /mz/eJ  ccj  ?*^ou^C€à 
ae  / e/oijucnc^j    aac   /e   '7t  c/t  dc^»^ùJ  Actà   7nci?tJ 

jj  au  co9?2??i€ru€??ie?2/  ae  ^>o/re'  ecoye.  j. 


CiboLUMCLlU    le      uba^Ott^ 


c/aârc  lyej  -/iu?nc'/e  e/  l/'cJ'o/'et^an/ 
f^e?^vi/eur  e/  ù/cve  ^ 


J.  H.    Garcin. 


AVANT-PROPOS. 


I.  J_jES  allcgories  que  je  publie  ctaieiit  iné- 
dites. Hagi-Khalfa  ,  dans  sa  Biblio^rciphie 
(  QyoJfj  t_>-v^l  ^L«[  ^  oy^'  <-^ — *^-^  c^Us  ),  et , 
probablement  d'après  lui,  d'Herbeiot,  dans 
sa  Bihlioîlicquc  orientale,  se  contentent  d'en 
donner  le  titre  sans  aucun  autre  détail  ;  mais 
le  célèbre  William  Jones  s'exprime  ainsi  au  su- 
jet de  cet  ouvrage,  dans  ses  Poeseos  ûsiûtic^ 
Commetïtcirii ,  p,  ^^y,édït.  or.:  «  In  ter  opéra 
»  rhetoricanumerari  potest  libellus  ,  qui  ap- 
»  pellatur  jUjVl^jyJJI  ^^  à  J^j^^  (_^^^s=^  hoc 
'>  est,  Arcanoriim  patefaciïo  de  avïum  et  forum 
proprietcîtibus.  Auctor  fuit  Eup'Jdiii ,  qui 
cognomen  ^\J\  ,  sive  O/v/ro/vi,  adeptusest. 
Argiimcntum  persimile  est  Couleii  libro  , 
quem  Sylvûs  nomijiat  ;  scd  non  flores 
soliim  atque  berba[',  veriim  aves  etiam  , 
pnctereà    apis,  aranea,  bombyx  et  zepby- 


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[  viij  ] 
rus  etiam,  in  hoc  opusculo  loquentes  in- 
ducuntiir,  ac  de  suis  virtutibiis  veniistis- 
simè  disserentes.  Est  profecto  libelius  cùm 
piilcherrimarum  imaginum  copia,  tum 
»  orationis  nitore  ac  venustate  absolutissi- 
"  mus.  » 

Ainsi  que  l'observe  l'orientaliste  anglais , 
i'auteur  ne  s'est  pas  borné  à  mettre  en  scène 
des  fleurs  et  des  oiseaux,  ce  que  le  titre  semble 
annoncer  ,  mais  il  y  fait  paraître  des  in- 
sectes, des  quadrupèdes  >  la  nue  et  la  bougie 
même.  Du  reste,  il  y  a  quelques  différences 
entre  les  titres  des  manuscrits,  comme  je 
l'indiquerai  plus  bas. 

Azz-eddin  commence  par  établir  qu'il 
n'est  rien  dans  la  nature  qui  ne  soit  doué  de 
la  faculté  de  se  faire  entendre  d'une  manière 
sensible  ou  intellectuelle.  A  l'homme  seul 
est  réservé  l'usage  de  la  parole  ;  mais  les  autres 
créatures  animées  ou  inanimées  semblent 
aussi  s'exprimer  dans  un  langage  figuré,  dont 
leur  manière  d'être,  leurs  propriétés,  leurs 
habitudes    donnent  l'intelligence.    L'auteur 


[   ix   ] 

nomme  cette  sorte  de  langage  Jlil  qLJ  (*), 
Li/iL^ue  de  l'ctdt  ou  de  la  situation  ;  ce  que  Ton 
peut  rendre  par  langage  muet. 

Partant  de  cette  idce  ,    il  se  suppose  au 
milieu  d'un  jardin  :  là,  occupe  à  étudier  les 


(♦)  Rien  n*est  si  commun,  chez  les  écrivains  arabes, 

que  ce  Jliî  qLJ  .  On  trouve  dans  la  Vie  de  Timur,  ^ar 
Ahmed  ben-Arabschah,  édit.  de  Manger,  t.  II ,  p.  go8 , 
un  passage  qui  explique  parfaitement  ce  que  les  Arabes 
entendent  par  cette  expression.  II  y  est  dit  qu'un  des 
soldats  de  Tamerlan  avait  pris  une  vache,  sur  laquelle 
il  avait  mis  tout  ce  dont  il  s'était  emparé,  et  qu'après 
deux  ou  trois  jours  de  marche,  cette  vache,  épuisée 
de  fatigue  ,  sembla  dire  ,  par  le  langage  muet  de  sa 
situation,  qu'elle   n'avait  pas  été   créée  pour  cet  usage: 

c>jlU.  f  jotJ  Lo  Lfcjf   LaJL^  ^LJj   c^3l jj    Nos   langues 

d'Europe,  quoique  bien  plus  sobres  de  métaphores  que 
les  langues  de  l'Orient,  mais  cependant  fertiles  en  figures, 
sur-iout  dans  la  conversation,  peuvent  même  nous  four- 
nir des  exemples  qui  feront  comprendre  le  sens  de  cette 
expression.  Nous  disons,  par  exemple:  «  Ce  gazon  invite 
5>  à  se  reposer,  ce  fauteuil  vous  attend,  5>  <?cc.  :  voilà  ce 
qu'en  arabe  on  appelle  langage  de  L'état j  en  eftet  ,  c'est 
comme  si  l'on  disait  :  ce  Ce  gazon  semble  ,  par  sa 
3>  manière  d'être  ,  vous    dire  ,  reposez-vous  ;  ce  fauteuil 

»  semble  par  sa  propriété  vous  dire,  je  vous  attends,  (Sec.  » 


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[  X  ] 

discours  emblématiques  des  objets  que  la 
nature  offre  à  nos  sens  ,  il  s'applique  à  les 
interpréter ,  et  son  livre  développe  tout  ce 
qu'une  imagination  orientale  peut  découvrir 
dans  ce  langage  mystérieux. 

Azz-eddin,  dans  sa  préface,  expose  son 
plan  à-peu-près  comme  je  viens  de  le  faire; 
toutefois  il  ne  s'exprime  pas  avec  la  pré- 
cision que  l'on  attendrait  d'un  Européen  : 
d'après  les  expressions  dont  il  se  sert ,  la 
dernière  partie  de  son  discours  préliminaire 
semblerait  devoir  en  être  la  première. 

Il  est  évident  que,  dans  ces  allégories,  l'in- 
tention de  l'auteur  est  de  tirer,  de  ce  langage 
muet  de  la  nature,  des  idées  non-seulement 
morales  et  religieuses ,  mais  encore  spiri- 
tuelles et  mystiques;  idées  qui  sont  bien  plus 
naturelles  qu'on  ne  le  pense  communément. 
En  effet,  «  ne  trouvant  rien  ici-bas  qui  lui 
»  suffise,  l'ame  avide  cherche  ailleurs  de  quoi 
»  la  remplir  :  en  s'élevant  à  la  source  du  sen- 
«  timent  et  de  l'être,  elle  y  perd  sa  séche- 
»  resse  et  sa  langueur;  elle  y  renaît,  elle  s'y 


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[  ^i  ] 

ranime,  elle  y  trouve  un  nouveau  ressort, 
elle  y  puise  une  nouvelle  vie,  elle  y  prend 
une  autre  existence  qui  ne  tient  point  aux 
passions  du  corps  ;  ou  plutôt,  elle  n'est  plus 
»  en  elle-incme,  elle  est  toute  dans  Tctre  ini- 
>»  mense  qu'elle  contemple,  et,  dégagée  un 
»  moment  de  ses  entraves ,  elle  se  console 
'•  dV  rentrer  par  cet  essai  d'un  état  plus 
sublime  ,  qu'elle  espère  être  un  jour  le 
sien.»  (J.  J.Rousseau,  Nouvelle  Heloise , 
t.  IVJ.ip.) 

Toutefois  ,  pour  enduire  de  miel  les  bords 
de  la  coupe  amcre  de  la  morale  et  de  la 
pictc  ,  l'auteur  a  suivi  une  marche  progres- 
sive dans  son  ouvrage;  aussi  ses  premières 
allégories  sont-elles  bien  plus  gracieuses  et 
bien  moins   mystiques  que  les  suivantes. 

.  .  Vcluti  puerîs  absïnthïa  tetra  medentes 
Cum  dare  conantur ,  prias  oras pocida  c'ircùm 
Continuant  jucllis  dulci  jiavoque  lïquore , 
Ut puerorum  œtas  ïmprovida  ludijicetur 
Lahrorum  tcniis ,  ïnterea  pcrpotet   amariun 
Absïnthi  iatÏQcni  i  dcceptaquc  non  c aplat ur , 

a  4 


[  xij  ] 
Scd  potïus  t al ï  facto  rccrcata  valescat  (*). 

Lucrèce,  de  Rer.  7iat.  1 ,  pjj — 4^- 

Le  voile  du  mystère  ,  d'abord  épais  ,  s'é- 
claircit  peu  à  peu  ,  et  se  soulève  même  quel- 
quefois ;  enfin  il  tombe  entièrement,  et  le 
nom  de  Dieu  vient,  dans  la  dernière  allé- 
gorie, expliquer  toutes  les  énigmes. 

La  mysticité  qui  règne  constamment  dans 
cet  ouvrage  n'est  pas  toujours  fort  intelli- 
gible :  mais  ce  qui  la  rend  sur-tout  difficile  à 
comprendre  (  comme  dans  tous  les  livres 
des  auteurs  mystiques  orientaux),  c'est  l'em- 
ploi d'un  grand  nombre  de  mots  détournés 
de  leur  signification  propre ,  et  adaptés  au 
langage  spirituel.  Quoique  je  me  sois  atta- 
ché à  donner,  dans  mes  notes,  l'explication 


(*)  Le  Tasse  a  imité  ainsi  ce  passage  : 

Cosi  aW  egrofanciul  porgiamo  aspersi 
Z)i  soave  lîcor  gli  orli  del  vaso  : 
Succhi  amari  inaannato  intanto  ei  beve, 
E  daW  ïnganno  suo  vita  r'iceve. 

Jér.  dél.  1,3. 


[  ^iJJ   ] 
Je  tout  ce   qui  offre   quelque  dilllcultc  ,  je 
vais  cependant    présenter  ici   une  iJce    du 
mysticisme  oriental,   pour    l'intelligence  de 
l'ensemble  de  l'ouvrage. 

Le  mysticisme  ou  spiritualisme  oriental , 
connu  sous  le  nom  de  doctrine  des  sofs  .  jy^] 
se  nomme  en  arabe  amÎ  f^jsu> /a  coniîdissducc  de 
Dieu.  Il  se  divise  en  divers  degrés  (  voyez  le 
Pend-namèh  de  M.  de  Sacy,  p.  i()y  et  suiv.  et  a 
Treat'ise  on  Sufism ,  or  A4dhomcddn  mysticism, 
dans  le  recueil  intitule  Transaciions  ofîlic  Iiîe- 
rary  Society  of  Bombay,  p.  (j^  et  suiv.  )  ;  mais  il 
suffit  de  savoir  qu'il  consiste,  en  général,  à 
se  détacher  totalement  du  moi  humain ,  à 
ne  désirer  que  Dieu ,  à  ne  respirer  que  pour 
Dieu,  à  n'aspirer  qu'à  jouir  d'un  état  par- 
fait d'intuition  surnaturel  et  extatique  ;  et  qu'il 
va  quelquefois  jusqu'à  se  mettre  non-seule- 
ment au-dessus  des  préceptes  positifs  de  la 
religion,  mais  encore  à  être  indifférent  à  la 
foi  et  à  l'incrédulité,  et  à  oublier  le  monde 
présent  et  le  futur.  Voici  i\^\\\  vers  de  Hafiz 
à  l'appui  de  ce  que  je  dis  : 


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3» 


[  xiv   ] 

o^ — -jî  c>_À_-*  ^L  jjj   ^:>j^ 

«  Moi  qui  ne  daigne  pas  baisser  la  tête 
vers  l'un  ou  l'autre  inonde,  je  plie  le  cou 
sous  le  fardeau  du   désir  qui  m'oppresse 

>'  d'obtenir  ses  faveurs  (  de  Dieu  ).   »   Pend- 

iiameli;  p.  p^  et  pj. 

^sjli  c>5Lj  ^*»^  oy^  ijj^^  ^jj 

«'  Ne  nous  demandez  ni  vertu,  ni  péni- 
tence, ni  piété:  la  vertu  ne  fut  jamais  le 
partage  d'un  libertin  que  l'amour  (  de  Dieu) 
'>  agite  de  ses  transports  les  plus  furieux.  '» 
Pend-namèh ,  p,  2S6 ;  et  voyez  p,  pj  et  suiv. , 
/y  et  suiv. ,  168  et  suiv. ,  182 — 8^,  2ji  et  suiv. 

Une  autre  observation  très-essentielle  à 
faire,  c'est  que  les  auteurs  mystiques  parlent 
toujours  de  la  divinité  sous  les  traits  d'une 
beauté  humaine.  Les  Arabes  emploient  com- 
munément le  mot  s>fï'i^,  et  les  Persans,  le  mot 
o—j^  pour  désigner  la  Divinité.  11  est  bien 
rare  que  les  sofis  nomment  cette  amie  par 


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[    XV     ] 

son  vcritable  nom;  leurs  poésies  sont  le  plus 
souvent  voluptueuses  ,  quelquelois  mcnie 
trop  libres ,  et  l'on  aurait  de  la  peine  à  les 
distinguer  des  autres  poésies  ,  si  quelques 
mots  n'échappaient  çà  et  là  à  ces  fervens 
adorateurs  de  Dieu. 

Azz-eddin  Elmocaddessi  ne  tombe  pas 
dans  les  excès  où  bien  des  quictistes  Persans, 
Hafiz  sur-tout,  sont  tombes.  Il  règne,  à  la 
vérité  ,  dans  son  livre  ,  ini  ton  mystique  ; 
mais  ce  ton  même  étant  modéré,  donne  à 
l'ouvrage  une  teinte  douce  et  sentimentale 
qui  ne  laisse  pas  d'avoir  des  attraits  pour  un 
lecteur  sensible. 

II  n'est  pas  inutile  de  remarquer  que  , 
dans  ces  allégories  ,  les  vers  ne  se  lient 
presque  jamais  avec  la  prose,  et  qu'ils  sont 
ordinairement  placés  dans  la  bouche  de  l'au- 
teur ,  quoiqu'ils  viennent  après  le  discours 
de  la  fleur  ou  de  l'animal  mis  en  scène,  et 
qu'ils  semblent  souvent,  sous  certains  rap- 
ports, être  une  suite  de  ce  discours.  Dans 
un  des  manuscrits,   l'auteur  place  toujours, 


[  xvj  ] 
avant  les  vers,  les   mots  (jj»^  cilfi  j  cJ^j,  ce 
qui  est  une   preuve  de  ce  que  j'avance.    Il 
n'est  pas  rare  que  les  vers  n'aient  même  au- 
cune analogie  avec  ce  qui  précède. 

Je  crains  que  le  jugement  qu'on  portera 
de  l'ouvrage  d'Azz-eddin ,  ne  soit  pas  très- 
favorable  ,  si  on  l'établit  d'après  les  règles 
sévères  de  notre  goût  ;  mais  si  on  se  laisse 
diriger  par  le  goût  asiatique ,  ce  qui  paraît  des 
défauts  deviendra  des  beautés  réelles ,  et  ce 
qui  semble  bizarre  ne  sera  plus  que  des  jeux 
d'esprit.  Toutefois,  j'ose  dire  qu'en  jugeant 
même  cet  ouvrage  conformément  au  goût 
européen ,  on  ne  peut  disconvenir  que  le  style 
n'en  soit  facile  et  élégant,  qu'il  n'y  ait  de  l'es- 
prit, des  idées  heureuses,  des  expressions 
vraiment  poétiques  et  souvent  un  agréable 
parallélisme  de  pensées  et  de  mots  (*);  mais, 

(*)  On  peut  voir  dans  le  fragment  des  Poeseos  asiat. 
Comm. ,  cité  ci-devant,  que  W.  Jones,  à  la  vérité  un  peu 
enthousiaste  quelquefois,  n'hésite  pas  à  considérer  cet 
ouvrage  comme  parfait,  tant,  à  cause  du  grand  nombre 
de  belles  figures  qui  s'y  trouvent,  qu'à  cause  de  l'élé- 
gance et  de  la  grâce  du  style. 


[   xvij  ] 
d'iiii  autre  côte,  on  ne  saurait  se  clissiinuler 
qu'il  n'y  ait   en  général  trop  de  vague,   et 
quelquefois  de  l'obscurité  et  peu  de   liaison 
dans  les  idées. 

L'épigraphe  ne  se  lit  que  dans  le  ins.  a: 
elle  est  très-probablement  d'un  copiste,  ce 
que  paraît  indiquer  le  mot'vxjlcll. 

II.  Je  n'ai  que  peu  de  choses  à  dire  sur 
l'auteur  de  ces  allégories.  Son  véritable  nom 
[i_ij  est  inconnu  (*)  ;  car  Azz-eddin  n'est 
qu'un  titre  lionorifirjue  [  oJJ  ],  et  j«.XJf  o^  ^\ 
/U  (jj  c^\  ^  ne  sont  que  des  surnoms  [  *aâjê=>  ] . 

Quant  à  l'adjectif  relatif  ^j-ill  Elmocaddessi 
(  formé  de  ^jû^\  ,  sous-entendu  o^  ,  Jéru- 
salem ) ,  il  signihe  de  Jérusalem  ,  ce  qui  in- 
dique qu'Azz-eddin  était  natif  ou  originaire  de 
cette  villeou  àw  territoire,  ou  qu'il  y  habitait. 
Hagi-Khalfa,  comme  je  l'ai  déjà  fait  obser- 


(*)  Cependant  Abou'Imahassen  le  nomme  f,!3<^\  o^\ 
mais  je  crains  que  ce  ne  soit  une  faute  du  copiste,  qui 
aura  oublié  de  faire  précéder  ce  mot  de  ^| 


ver,  ne  dit  rien  de  cet  auteur. Abou'lmahas- 
sen,  dans  son  Dict.  des  hommes  célèbres,  intitulé 
jjyitXAj  j^j^wilj  jUJf  ,)^\  (mss.ar.dehiBihJ. 
du  Roi,  ///"^  7^7  ^^  suiv.) ,  se  contente  de  dire 
qu*Azz-eddin  faisait  les  fonctions  d'iman  et 
de  vaez  (*),  qu'il  était  érudit  et  éloquent, 
qu'il  imitait  le  style  d'Ebn-Elgiouzî,  et  qu'on 
i'écoutait  avec  plaisir;  qu'il  pérora  un  jour 
devant  la  Caaha ,  en  présence  d'une  foule 
de  grands  et  de  savans;  qu'il  s'en  acquitta 
parfaitement  bien  ,  et  que  des  gens  ins- 
truits prirent  copie  exacte  de  son  discours  ; 
que  sa  mort  arriva  un  mercredi  1 8  scheval 
678  de  l'hégire  [2  i  février  i2  8ode  J.  C],  et 
fut  occasionnée  par  une  chute  qu'il  fit  d'un 
lieu  élevé. 


(*)  Aucun  des  manuscrits  dont  je  me  suis  servi  ne  porte 
ie  titre  de  Vaez  [  iicL  ]  qu'Abou'Imahassen  et  W.  Jones 
donnent  à  Azz-eddin  :  du  reste  ce  mot  signifie  prédi- 
cateur ;  et  l'on  désigne  ordinairement  par  ce  nom  la  per- 
sonne obligée  de  prêcher,  chaque  vendredi,  après  l'office 
solennel  de  midi.  Voyez  Mouradgea  d'Ohsson  ,  Tabl.  de 
l'Empire  ottoman,  t,  II ,  p.  ?6p. 


[  >^i>^  ] 

Soyouti,  dans  son  ouvrage  sur  l^Egypte , 
intitulé  oji>UJIj  j^-^jL^Î  j  ïj^U-Jl  (j.^  cjU^ 
(man.  av.  de  la  Bïhl.  du  Roi,  //."  7^/ A  parle 
trcs  au  long  d'un  ^>^l_*-JI  cm^  ^  ^.^^ y-  ^^>^ 
ne  en  577  ou  78  de  l'hcglre  [  i  181-83  de 
J.  C.  ],  et  mort  le  10  de  gioumada  i/*", 
660  de  l'hcgire  [  2  avril  1262  de  J.  C.]; 
mais  j'ai  peine  à  croire  que  ce  soit  notre 
Azz-eddin  ,  attendu  qu'on  ne  trouve  point 
dans  Soyouti  le  ^^^.^  Ehn-Ganem,  ni  le  *^ 
Elmocaddessi,  et  que  l'cpoque  de  la  mort  n'est 
pas  la  même.  Makrizi ,  dans  ^j3  i3jsX  djLJI 
S^\  (  ?Uiin.  ûr.  de  îci  Bihl.  du  Roi ,  ///  ^7^)> 
parle  aussi  d'un  a^^\  o^  ^  ^jJIjxi  ^;  je 
pense  que  c'est  le  mcme  dont  Soyouti  fait 
mention. 

Outre  les  allégories  que  Je  publie  (*),  on 
connaît  encore  d'Azz-eddin  les  ouvrages  sui- 
vans,  qui  sont  tous  mystiques  ou  ascétiques: 

\ ^ — ^  Jl     ^w«.L:tf«    jLh^'     O^^-^j  jIj-*^!    (^«■«  ^—>    c_jlx^=> 

Liber  de  detegendis  îuysteriis  virtutibusque  sanc- 

(*)  II  paraît  que  les  exemplaires  du  j\jj)i\  ,^^^=>  sont 


[xx] 

toruîu  ,  ûc  pmcldvis  dotihus  optimorum  (  Bihl. 
BoiUcianœ  m  an.  Or.  &c,  cataJ,  a  J,  Uri  conf. 
p-  i8j  ).  d^^J^  ,3-U^j  JJLyi  ^Jo  Via  ad  Deum 
accedcndi ,  cum  eo  se  coiijiingendi ,  atque  ah  eo 
henignam  poUiciîaîîoncîu  repetendï  (  Bihlioth. 
Av.  Hisp.  Escurial.  de  Casiri ,  t.l^\p.  221). 
^j«JjÎ  ^jJ^  c_)Ué=>  Dï aboli  confuîatio  (  ihid. 
p.  22y  ),  iit^l  J  ^^\  j'jyJî  ij<j,^  p  nicher 
Hortus  (ihid.  ihid.  ).  jySl}\  ^^^^  jyj\  ^}^ lj\^ 
Arcaiwriim  clavis  (ihid,  p.  ^2p),  Ce  dernier 
se  trouve  également  indiqué  dans  Hagi- 
Khalfa. 

III.  Les  manuscrits  que  j'ai  consultés  pour 
cette  édition  ,  sont  au  nombre  de  quatre, 

I .°  Manuscrit  de  format  in-i8 ,  écrit  avec 
soin,  et  vraisemblablement  par  un  homme 
instruit.  Jai  suivi  presque  constamment  ce 
manuscrit. 

2.°  Manuscrit  de  format  très -petit  //;-^/ 

rares  en  Europe  :  je  n'ai  trouvé  son  indication  que  dans 
le  Catalogue  des  Manuscrits  de  la  Bibliothèque  Bodleyenne ^ 
par  J.    Uri,  -p.  iS^^, 


[  ^v  ] 

ou  //;-(?/  Ce  manuscrit  n'est  pas  tout  écrit 
de  la  même  main  ;  le  premier  quart  est  d'une 
autre  écriture  que  le  restant  du  volume. 
Cette  première  partie  est  bonne,  et  vaut 
au  moins  ia  partie  correspondante  du  ms. 
///-/(?  ;  aussi  m'en  suis-je  servi  utilement 
quelquefois:  mais  quant  au  reste  du  volume, 
il  est  plein  d'interpolations  de  mauvais  goût, 
et  ne  m'a  cté  de  presque  aucune  utilité. 

Ces  deux  manuscrits  appartiennent  à 
M.  Varsy,  de  Marseille  ,  négociant,  ancien 
vice-consul  à  Rosette  ,  qui  possède  une  collec- 
tion assez  considérable  de  manuscrits  arabes. 
Ce  modeste  et  savant  orientaliste  a  bien  voulu 
me  communiquer  de  la  manière  la  plus  obli- 
geante ces  deux  manuscrits ,  avant  que  j'eusse 
connaissance  des  deux  autres  que  j'ai  eus  de- 
puis à  ma  disposition,  et  m'engager  lui-mcme, 
on  ne  peut  plus  amicalement,  d'en  donner 
une  édition. 

3.''  Manuscrit  arabe  de  la  Bibliothèque 
du  Roi,  apporte  par  Petis  de  la  Croix,  cote 
^66.  Ce  manuscrit,  déformât  très-petit ///-^.'^ 


[  ™i  ] 

ou  ithS.^  est  presque  illisible,  a  cause  de 
Fextrcme  i:^^::^e::ce  avec  :...^-  ....  -.  c>iccrir. 
li  y  avait  une  lacune  au  commencement,  qui 
a  été  réparée  ,  avec  aussi  peu  de  soin ,  par 
une  main  européenne.  Je  ::  ai  lirc  presc.;e 
aucun  secours  de  ce  mar/c^^crii ,  qui  e-:  ic:;- 
pli  d'omissions  et  defautc>  _.:.i\:^- 

-  4-°  Manuscrit  Je  format  tres-peiit  in-^f 
ou  in-S.'^  Ce  manuscrit  .  qui  irA^p^a  rient, 
est,  après  le  manuscrit  ui-ià  de  M.  A  arsv , 
celui  qui  vaut  le  mieux;  mais  la  icv: action  en 
est  presque  toujours  !  r  .vc:;p  'f:.i  T  :_  :e 
que  celle  ces  trois  aui.'r-,  i;.:-:out  dan-  les 
dernières  aiie^'ories .  cù  ion  reconnaît  de 
inierpolations  i::^:  :c:?:er.  J  .,:  ^onné  ces 
ditions  dans  mes  notes,  seuiement  :  :  ^  ^:.e 
j*ai  cru  qu'elles  pourraient  intéresser  ?e  lec- 
teur; du  reste,  ce  manuscrit  m'a  servi  .  jz 
utilement. 

Ces  quatre  mss.  re  c  :  ::c:  :  e:  :  :  :  des 
ni  gloses.  Je  désignerai  le  premier  par  la  lettre 
A ,  le  second  par  la  lettre  b  ,  fe  troisième  par 
ia  lettre  c,  et  le  qua:r:e:::e  par  la  Jettre  D. 


3 
j 


Outre  les  différences  que  Ton  remarque 
dans  la  rédaction  de  ces  mss.,  on  en  voit  éga- 
lement quelques  légères  dans  le  titre.  Au  lieu 
de  fJ^  ^wt  &c. ,  qui  est  la  leçon  du  ms.A,  le  ms. 

B  porte  oL^jjj^^jJ^j^'^'^L?^^  L^  '  '^  ^^-  c- 
jyj^^  j  &c.  simplement,  et  le  ms.  d  J^  j  &c. 

Je  dois  faire  observer  ici  que  les  vers  qui 
accompagnent  plusieurs  des  dernières  allé- 
gories, sont  tout  différens  dans  les  quatre 
mss. ,  ce  qui  semble  indiquer  qu'ils  n'appar- 
tiennent pas  à  fauteur,  mais  qu'ils  ont  été 
ajoutés  par  les  copistes. 

IV.  Traduire  à  la  lettre  un  écrivain  arabe , 
c'est  s'exposer  à  écrire  de  l'arabe  en  mots 
français  et  à  ne  pas  être  entendu;  traduire 
trop  librement,  c'est  risquer  d'être  à  coté  du 
sens  de  l'auteur,  de  dénaturer  ses  idées,  et 
de  ne  point  faire  connaître  la  hardiesse  des 
métaphores  et  fexagéraiion  du  style  orien- 
tal. J'ai  tâché  de  tenir,  dans  ma  traduction, 
une  rouie  intermédiaire.  Quand  je  me  suis 
un  peu  trop  éloigné  du  mot  à  mot,  j'ai  ordi- 

b  2 


[  xxiv   ]  * 

iiairement  donne  l'interprétation  littérale 
dans  mes  notes;  quand  j'ai  omis  quelque 
chose  ,  j'en  ai  le  plus  souvent  averti;  quand 
j'ai  déplacé  des  phrases ,  j'en  ai  presque  tou- 
jours prévenu  le  lecteur.  Mais,  pour  ne  pas 
multiplier  inutilement  les  notes ,  je  me  suis 
dispensé  de  ces  détails,  lorsque  j'ai  cru  pou- 
voirie  faire  sans  inconvénient.  Dans  les  pas- 
sages où  l'auteur,  entraîné  par  le  parallélisme 
des  expressions ,  a  sacrifié  la  clarté  et  la  jus- 
tesse de  la  pensée  à  une  rime  ou  à  une  anti- 
thèse ,  j'ai  été  forcé  d'adopter  le  sens  qui 
m'a  paru  le  plus  plausible  :  les  orientalistes 
savent  combien  il  est  alors  difficile  d'être 
certain  de  celui  qu'a  en  vue  l'auteur. 

Je  n'ai  mis  dans  les  notes  que  les  expli- 
cations qui  m'ont  paru  nécessaires  à  l'intelli- 
gence du  texte  et  de  la  traduction.  Si  j'avais 
voulu  m'étendre  sur  tous  les  mots  peu  usités  , 
sur  toutesles  expressions  énigmatiques  et  figu- 
rées, sur  toutes  les  tournures  hardies,  enfin 
sur  la  couleur  mystique  qui  règne  par-tout 
dans  cet  ouvrage,  mes  notes  seraient  devenues 


[    XXV    ] 

lin  commentaire  perpétuel,  et  j'aurais  outre- 
passé les  bornes  que  l'on  s'impose  pour  l'ordi- 
naire dans  ce  genre  de  travail.  Par  la  même 
raison ,  je  n'ai  fait  que  les  citations  que  j'ai 
crues  véritablement  utiles  (*). 

J'ai  puisé  dans  le  Seïd  Jorjani ,  Kitah  Ta- 
rifdî,  les  définitions  des  termes  mystiques , 
et  dans  le  commentateur  Beïdhawi,  des  dé- 
veloppemens  sur  différens  textes  du  Coran  , 
ou  sur  des  allusions  à  des  passages  de  ce 
livre.  J'ai  eu  ainsi  l'occasion  de  citer  de  ces 
deux  auteurs  plusieurs  fragmens  qui  étaient 
inédits.  Motarrézi ,  Meïdani  &c.  m'ont  en- 
core fourni  quelques  autres  morceaux  qui 
paraissent  aussi  pour  la  première  fois. 


(*)  Rien  n'eût  été  plus  facile  ,  dans  un  livre  de  ce 
genre,  que  de  mettre  à  profit  le  conseil  de  l'ami  de  Cer- 
vantes :  ce  No  hay  mas  sino  hacer  de  manera  que  vengan 
3î  a  pelo  algunas  sentencias,  ô  latines,  que  vos  sepais  de 
33  memoria ,  6  a  lo  ménos  que  os  cuesten  poco  trabajo 
3>  el  buscallos,  (Sec.  «  Sans  parler  des  écrivains  orien- 
taux, les  ouvrages  d'une  multitude  d'auteurs  anciens  et 
modernes  eussent  été  pour  moi  des  sources  inépuisables 
de  citations. 


[   xxvj  ] 

Dans  les  endroits  obscurs ,  je  me  suis  fait 
une  loi  de  donner  les  variantes  ;  dans  le  res- 
tant de  l'ouvrage  ,  j'en  ai  peu  donné ,  par 
une  raison  toute  simple  :  c'est  que ,  ies  mss. 
orientaux  s'accordant  rarement  entre  eux,  ce 
travail,  d'ailleurs  peu  utile,  aurait  également 
trop  alongé  les  notes. 

J'ai  suivi  à  la  rime  l'orthographe  que  mes 
manuscrits,  et  tous  les  manuscrits  en  géné- 
ral ,  observent  dans  ce  cas;  laquelle  consiste 
à  retrancher  les  points  du  o  [  f^yj^  ^L>]  et  à 
substituer,  dans  les  adjectifs  verbaux  défec- 
tueux, le  ci  à  la  nunnation  du  kesra  ,  exi- 
gée par  les  règles  de  permutation. 

Comme  j'ai  donné  la  traduction  de  ces 
allégories,  j'ai  cru  pouvoir  me  dispenser  de 
mettre  des  voyelles  et  des  signes  orthogra- 
phiques au  texte  arabe  :  aussi  n'en  verra- 
t-on  que  lorsque  cette  omission  aurait  pu 
jeter  du  louche. 

Sur  plusieurs  objets  d'histoire  naturelle 
descriptive,  j'ai  eu  recours  à  l'extrcme  obli- 
geance de  M,  le  Baron  Alexandre  de  Hum- 


[  xxvij   J 

bolJt,  qui  veut  bien  m'honorer  d'une  amitic 
particulicrc.  Cet  illustre  savant,  pour  exécu- 
ter plus  facilement  le  plan  Je  son  voyage 
en  Asie  ,  se  livre  avec  ardeur,  et  avec  le  suc- 
cès qui  couronne  toutes  ses  entreprises,  à 
l'ctude  des  langues  orientales  :  aussi  doît-on 
ajouter  le  titre  d'orientaliste  à  ceux  que 
lui  donne  l'universalité  de  ses  connaissances. 
Je  dois  à  ce  cclcbre  voyageur,  et  à  deux  de 
ses  doctes  collaborateurs,  M.  Kunth,  cor- 
respondant de  l'Acadcmie  des  sciences  et 
professeur  de  botanique  à  Berlin,  et  M.  Va- 
Jenciennes,  aide-naturaliste  au  Muséum  du 
jardin  du  Roi,  des  notes  intéressantes  que 
j'ai  refondues  dans  les  miennes,  et  qui  ne 
peuvent  manquer  d'y  répandre  un  intérêt 
scientifique. 

Je  prc'sente  cet  essai  de  mes  travaux  sous 
les  auspices  de  M.  le  Baron  Silvestre  de  Sacy, 
qui  a  la  bonté  de  m'accorder  une  affectueuse 
bienveillance,  et  qui  m'a  permis  de  recourir, 
dans  les  passages  les  plus  épineux,  à  fa  mine 
également  inépuisable  de  sa  complaisance  et 


[  xxviij  ] 

de  son  savoir.  «Lorsque  quelque  chose  vous 
»  paraît  embrouiilé  ,  dit  un  poëte  arabe, 
»  consultez  un  homme  habile ,  et  suivez 
»  avec  docilité  ses  avis.  » 

A — ^<t* — y  Vj  Ix^  jjLi3       L^y^i  ^Ay^  j^'  <-jv  (jU 


Paris ,  ce  2  avril  1 821. 


PREFACE 


D  AZZ-EDDIN  ELMOCADDESSI. 


'^•^^--^/^.'*^^^*-^  ■%^'^  ■%, 


AU     NOM     DU     DIEU     CLEMENT     ET     MISERICORDIEUX. 


JLoUANGES  à  Dieu,  dont  réJoignement  est 
proximité,  dont  la  proximité  est  éloignement; 
dont  la  grandeur  ne  saurait  se  décrire,  ni  en  style 
léger,  ni  en  style  sérieux;  dont  la  sainteté  sublime 
est  au-delà  de  toutes  bornes  et  de  tout  cafcuf. 
Louanges  à  Dieu,  qui  a  tiré  le  Monde  du  néant; 
qui  a  déposé  dans  chaque  être  des  vues  de  sagesse 
qui  prouvent  l'existence  d'un  créateur;  et  qui  a 
doué  l'homme  de  raison  pour  juger  entre  les  choses 
contraires.  C'est  par  l'inspiration  de  ce  Dieu  tout- 
puissant  que  l'homme  a  acquis  les  connaissances 
qu'il  possède,  et  qu'il  a  su  distinguer  le  vrai  du 
faux,  la  certitude  de  l'erreur. 

Celui  qui,  dirigé  et  soutenu  par  des  intentions 
droites  et  pures,  se  livrera  à  des  réflexions  sé- 
rieuses, ne  tardera  pas  h  comprendre  que  toutes 

'  A 


('■  ) 

les  créatures  sont  dans  les  mains  de  la  Provi- 
dence, qui,  ainsi  qu'elle  condamne  les  unes  au 
malheur,  accorde  le  bonheur  aux  autres,  et  les 
comble  de  ses  bienfaits  et  de  ses  dons  les  plus 
précieux,  sans  que  personne  puisse  arrêter  l'effet 
de  la  miséricorde  de  Dieu ,  ni  donner  ce  qu'il 
refuse. 

Si  l'œil  de  ton  intelligence  était  dégagé  de  toute 
matière  hétérogène  ;  si  rien  ne  souillait  le  miroir  de 
ta  conscience,  et  si  tu  prêtais  l'oreille  de  l'attention, 
chaque  être  saurait  t'apprendre  ce  qui  manque  à 
ses  désirs ,  et  la  peine  qu'il  endure  de  cette  pri- 
vation cruelle.  Ecoute  le  zéphyr  qui  murmure 
dans  le  feuillage,  sur  les  pleurs  des  nuées  dont 
les  mouvemens  semblent  imiter  le  fîux  et  le  re- 
flux de  la  mer,  et  qui  gémit  sur  le  doux  sourire 
de  l'éclair  que  suit  l'éclat  de  rire  de  la  foudre. 
Considère  ensuite  le  printemps  :  il  vient  te  ré- 
jouir par  l'heureuse  arrivée  de  ses  roses  ;  il  vient 
t'annoncer  que  la  rigueur  du  froid ,  qui  l'avait  pré- 
cédé ,  est  passée.  Il  s'avance  vers  toi  :  le  sombre 
hiver  se  retire,  et  un  manteau  diapré  vient  revêtir 
la  nudité  des  champs.  Le  saule  d'Egypte  se  plaint 
à  toi  du  balancement  de  ses  rameaux  :  la  margue- 
rite semble  te  présenter  l'armée  des  fleurs ,  où 
règne  la  plus  agréable  variété,  et  qui  agitent  de- 
vant toi   leurs  étendards   empreints  de  leur  bon- 


(  i  ) 

heur:  le  narcisse  se  lève  sur  sa  lige,  comme  })our 
faire    sa    prière  :   l'anémone   paraît   avec   sa  rohe 
déchirée  ;  elle  frappe  ses  joues  de  rose ,  comme  si 
elle  avait  perdu  quelqu'un  qui  lui  fût  cher;  le  gre- 
nadier t'exprime  ce  que  lui  fait  souffrir  l'excès  du 
feu  ardent  qu'ont  allumé  en  lui  les  cruels  dédains 
et  l'éloignement  de  son  amie  :  le  rossignol ,  sur  le 
rameau   qui   le    balance,    module   de  tendres  ac- 
cens  ;  on  croirait  qu'il  fîatte  les  cordes  d'une  Ivre. 
L'amant,   en    proie  à  la  mélancolie  de    l'ajiiour, 
n'est  plus  maître    de   sa  passion,  et  il  confie  au 
zéphyr  le  nom  adoré  qu'il  tenait  caché  avec  tant 
de  soin:  troublé  par  l'odeur  suave    qui  vient  de 
Najd  , séjour  de  sa  maîtresse,  il  erre  ivre  de  plaisir 
dans  les   lieux  solitaires,  asiles  de  ses  tête-à-tête, 
et  va  se  réfugier  auprès  de  cette  beauté  divine,  qui 
connaît  ce   qu'il    exprime    de    son    amour   et    ce 
qu'il  cache  dans  son  cœur. 

Le  contemplatif,  pénétré  de  reconnaissance 
pour  les  faveurs  abondantes  qu'il  a  reçues ,  s'étudie 
k  creuser  la  mine  de  la  sagesse,  ne  veut  du  lait 
que  la  crème  la  plus  pure,  et  n'ignore  pas  que 
Dieu  n'a  créé  aucun  être  pour  l'abandonner  dans 
un  état  d'inutilité.  Chaque  créature  occupe  en  effet 
le  rang  qu'elle  doit  tenir;  elle  ne  s'écarte  jamais  de 
la  route  qui  lui  a  été  tracée,  et  elle  confesse  la 
vérité   des  promesses  et  des  menaces  de  Dieu  :  il 

A  2 


(4) 

n'est  rien  ,  enfin,  qui  ne  paie  au  Très-haut  un  tribut 
de  louantes.  J'unis  mes  faibles  accens  à  ce  concert 
unanime  des  êtres ,  et  je  prie  ce  Dieu  tout-puis- 
sant de  seconder  mes  efforts  et  d'inspirer  mon 
génie.  Je  bénis  et  salue  son  Prophète,  à  qui  il  a 
accordé  une  révélation  ,  pour  faire  éclater  sa  gloire, 
et  qu'il  a  condiiit  au  travers  des  sphères  célestes  , 
dans  le  célèbre  voyage  nocturne.  Puissent  la  misé- 
ricorde et  la  faveur  de  Dieu  reposer  à  jamais  sur  cet 
envoyé,  sur  ses  compagnons  et  sur  sa  race  ! 

Rempli  des  pensées  que  je  viens  d'exprimer, 
j'ai  jeté  sur  l'univers  le  regard  de  Ja  plus  sévère 
attention,  et,  éclairé  du  flambeau  du  discernement 
et  du  secours  divin  ,  j'ai  vu  que  tous  les  êtres  pu- 
blient l'existence  du  Créateur,  et  que  ceux  qui 
ne  peuvent  exprimer  leurs  sentimens  par  l'organe 
de  la  parole ,  prennent  un  langage  muet  pour 
leur  servir  d'  interprète.  J'ai  donc  examiné  scrupu- 
leusement les  allusions  que  présentent  les  objets 
de  la  nature ,  j'ai  approfondi  les  allégories  qu'ils 
nous  offrent ,  et  je  me  suis  convaincu  que  tout 
est  réellement  doué  de  la  faculté  de  se  faire  en- 
tendre ,  ou  d'une  manière  sensible  ,  ou  d'une 
manière  intellectuelle:  bien  plus,  j'ai  reconnu  que 
le  langage  muet  est  plus  éloquent  que  la  parole, 
et  plus  essentiellement  vrai  que  quelque  discours 
que  ce  puisse  être. 'En  effet,  quand  quelqu'un  a 


(  i  ) 

parle,  on  peut  convenir  de  la  justesse  de  ses  obser- 
vations, ou  démentir  ce  qu'il  a  dit;  au  lieu  que 
le  langage  emblématique  repose  sur  la  vérité  et 
sur  la  certitude.  Mais  aussi  Tètre  qui  s'ex})rime  de 
cette  manière  figurée,  ne  s'adresse-t-il  qu'îi  ceux 
qui  ont  des  affections  toutes  surnaturelles ,  tandis 
que  celui  qui  communique  sa  pensée  à  l'aide  de 
la  parole,  s'adresse  à  ceux  qui  sont  dans  l'état 
ordinaire  et  commun. 

J'ai  composé  mon  ouvrage  pour  expliquer  les 
différentes  allégories  que  les  animaux,  les  végé- 
taux ,  et  même  les  corps  inorganiques  ,  ont  offertes 
à  mes  méditations  :  je  redirai  aussi  ce  que  le 
merle  solitaire  m'a  raconté,  au  sujet  de  son  repos 
et  de  ses  courses  dans  les  champs.  Puissent ,  dans 
cet  écrit,  les  gens  sensés  et  dociles  trouver  d'utiles 
leçons:  les  gens  profonds  et  réfîéchis,  le  souvenir 
de  leurs  devoirs;  tous  enfin,  des  instructions 
salutaires  !  Celui  qui  entrera  dans  l'esprit  de 
mes  sentences  et  qui  comprendra  mes  paraboles, 
lira  mon  livre  avec  plaisir  ;  mais  celui  qui  les 
trouvera  étranges,  ne  saurait  le  goûter. 

Je  ne  sais  quelle  pensée  m'engagea  un  jour  à 
aller  contempler  ce  que  les  mains  de  l'Eternel 
ont  produit,  et  ce  que  la  Sagesse  divine,  qui 
atteint  toujours  le  but  qu'elle  se  propose,  a  créé 
dans  une  vue  d'utilité.  Je  me  rendis,  à  cet  effet, 

A  3 


(6) 
dans  un  jardin  spacieux:  un  tendre  gazon,   que 
courbait  l'haieine  frémissante  du  zéphyr ,   en  for- 
mait le  tapis  ;  des  odeurs  balsamiques  s'exhalaient 
du  calice  des  fleurs  ;  les  cimes  touffues  des  arbres 
s'agitaient  en  murmurant  ;  les  rameaux  se   balan- 
çaient au  souffle  du  vent  printanier  ;  le  rossignol 
gazouillait  tendrement,  soupirait  des  airs,  balbutiait 
ses  amours.  Ici   un  ruisseau  sillonnait  la  prairie, 
là  une  cascade  se  précipitait  irrégulièrement  ;  plus 
loin,   des  fleurs  fraîches  et  brillantes  émaillaient 
la   pelouse    veloutée  ;  de   toutes  parts   enfin  ,  la 
vue  se  reposait  sur  des  sites  pittoresques  et  variés. 
Je  me  dis  à  cet  aspect  :  Peut-il  y  avoir  un  séjour 
f)îus  délicieux  et  une  solitude  plus  agréable!  Ah! 
que  n'ai-je  un  compagnon  sincère  et  affectionné  , 
avec  qui  je  puisse  m'entretenir familièrement!  Mais 
tout-à-coup  je  crus  distinguer  ces  paroles  dans  le 
langage  muet  et  énigmatique  de  la  nature:  Peux-tu 
trouver  un  ami  meilleur  que  moi ,  et  espères-tu 
entendre   des  réponses   plus  éloquentes    que  les 
miennes!  II  n'y  a  rien  de  ce  qui  est  en  ta  présence 
qui   ne  s'exprime   dans  un  langage  figuré ,  rien 
dont  la  situation  et  la  manière  d'être  n'annoncent 
la  fin  prochaine.  Applique-toi  donc  à  comprendre 
cette  voix  allégorique,  si  tu  es  capable  de  l'en- 
tendre. 


(7  ) 


VERS. 


Vois  le  zéphyr  du  matin ,  dont  le  souffle  exhale 
des  émanations  balsamiques  qui  s'élèvent  dans  l'at- 
mosphère. Tantôt,  comme  l'amant  qui  a  perdu  l'ob- 
jet de  sa  passion ,  il  fait  entendre  des  sons  tristes 
et  plaintifs;  tantôt,  comme  celui  qui  retrouve  une 
maîtresse  adorée ,  il  se  charge  de  parfums  exquis. 
Les  nuées  qui  répandent  leurs  ondées  rafraîchis- 
santes ;  le  roucoulement  monotone  de  la  colombe; 
le  frémissement  de  la  branche  qui  la  soutient  ;  le 
crépuscule  de  l'aube  matinale;  la  camomille  ,  lors- 
que le  nuage,  chargé  de  l'éclair  et  de  la  foudre, 
vient  agiter  sa  corolle;  le  printemps,  qui,  accom- 
pagné de  la  rose  son  interprète ,  amène  de  si  doux 
changemens  dans  la  nature  ;  tout  ce  qui  existe  et 
qui  est  destiné  à  ton  utilité ,  ô  homme  insensible 
aux  grâces  du  Créateur I  tout,  oui  tout  célèbre 
les  bienfaits  de  Dieu ,  confesse  son  existence ,  le 
remercie,  le  bénit;  oui,  de  chaque  chose,  on 
peut  tirer  une  preuve  de  son  unité. 


A4 


LES    OISEAUX 


ET 


LES   FLEURS. 


k -«,«/%/%'%/%/«» -«/%/^'«/«/«>  %/%/^'%f%/^'%f^r^'^^^/\.  %/«^^'«/«/^'«/%/^'%/%'%.'%/«/%'«/%^  %<^'V«.'«/ 


ALLÉGORIE    L 


LE    ZEPHYR. 


RE 


iVloN  attention  fut  d'abord  réveillée  par  le  gé- 
missement du  zéphyr,  qui,  voulant  célébrer  la  lan- 
gueur et  la  volupté  de  son  souffle  ,  semblait  par 
ses  soupirs  emblématiques  moduler  ces  paroles: 
Fidèle  messager  des  amans ,  je  porte  sur  mes 
ailes  les  soupirs  brûfans  de  celui  qu'agite  la  ma- 
ladie de  l'amour ,  à  l'objet  qui  peut  seul  remédier 
à  ses  maux.  Je  transmets  avec  exactitude  les  se- 
crets que  l'on  me  confie  ,  et  je  redis  les  nou- 
velles telles  que  je  les  ai  entendues.  Si  je  ren- 
contre un  voyageur  ,  mon  haleine  devient  plus 
douce  ;  ce  ne  sont  que  cajoleries,  que  badinages , 
que  jeux  familiers.  Je  règle  cependant  ma  con- 
duite sur  la  sienne:  s'il  est  bon,  je  Je  caresse 
d'un  souffle  voluptueux  ;  est  -  if  méchant  ,  au 
contraire,  je  le  moieste  de  mon  vent  importun. 


(  -o) 

Mon  haleine  légère  et  odorante  donne  la  santé 
à  l'infirme  ,  et  rend  paisible  et  agréable  le  sommeil 
du  midi.  Si  mon  frémissement  agite  le  feuillage , 
celui  qui  aime  ne  peut  retenir  ses  soupirs  ;  et  il 
dit  sa  peine  à  l'oreille  de  sa  maîtresse,  si  mon  mur- 
mure se  fait  entendre.  La  douceur  et  la  mollesse 
composent  mon  essence  :  celui  qui  jouit  des  fa- 
veurs de  Dieu,  est  le  seul  qui  sache  m'apprécier. 
N'est-ce  pas  a  mon  souffle  vivifiant  que  l'atmo- 
sphère doit  la  pureté  dont  elle  jouit  î  Et  ne  t'imagine 
point  que  la  mobilité  que  tu  remarques  dans  ma 
nature  soit  l'effet  d'un  vain  caprice;  c'est  pour 
ton  utilité  et  ton  avantage ,  que  mon  haleine  suit 
les  saisons  dans  leurs  variations  diverses.  Au  prin- 
temps, je  souffle  du  côté  du  nord,  je  fertilise  ies 
arbres  ,  et  je  rends  la  nuit  égale  au  jour.  Dans  l'été  > 
mon  souffle  ,  parti  de  l'orient ,  favorise  le  dévelop- 
pement des  fruits  et  donne  aux  arbres  le  degré  le 
plus  parfait  de  leur  beauté.  Dans  l'automne,  je 
souffle  du  côté  du  midi  ;  alors  tous  les  fruits 
acquièrent  leur  perfection ,  et  parviennent  au  der- 
nier terme  de  leur  maturité.  Dans  l'hiver  enfin, 
je  souffle  des  régions  de  Toccident  ;  et  c'est  ainsi 
que  je  soulage  les  arbres  du  poids  de  leurs  fruits, 
et  que  je  fais  sécher  les  feuilles  sans  altérer  les 
branches.  C'est  moi  qui  mûris  les  fruits  ,  qui  donne 
aux  fleurs  leur  coloris  brillant,  aux  ruisseaux  leurs 


(  "  ) 

chaînes  argentées  ;  c'est  moi  qui  fais  parvenir  aux 
arbres  le  pollen  qui  les  féconde  ;  h  la  inaîtresse 
les  soupirs  du  cœur  qu'elle  a  enflammé;  et  c'est 
encore  mon  haleine  parfumée  qui  annonce  au 
pèlerin  de  l'amour  qu'il  approche  de  la  tente  de 
sa  bien-aimée. 

VERS. 

Ohl  combien  est   doux  ce  que   le    zéphyr   est 
venu  raj)porter  à  mon  oreille  de  la  beauté  de  ce 
site  élevé  !   Il  s'est  plu  à  répandre  l'odeur  balsa- 
mique dont  il  s'était  chargé,  et  à  m'enivrer  de  ce 
parfum  délicieux.  Lorsque  les  premiers  soupirs  de 
cet  amour  qui  me  consume  s'échappèrent  de  mon 
sein  ,   le   zéphyr    semblait   les    seconder    de   son 
haleine  mourante.  La  brise  fraîche  et  embaumée 
du  matin  aurait  dû  étancher  la  soif  de  ma  passion; 
mais  ayant  passé,  durant  la  nuit,  auprès  de  ces 
pavillons  printaniers  et  de  ces  tertres   élevés ,  et 
s'étant  imprégnée  des  émanations  musquées  qui 
se  répandent  de  la  tente  de  ma  maîtresse,  elle  a 
rendu  bien  plus  violent  le  feu  de  mon  amour  et 
de  ma  souffrance.  Ivre  de  plaisir ,  je  n'ai  pu  reve- 
nir à  moi,  ni  rappeler  mes  esprits.   Attentifs  la 
voix  du  zéphyr,   j'ai  compris  le  secret  que  mes 
rivaux  n'ont  pu  deviner,  et  j'ai  entendu  ce  qu'ils 
n'ont  pas  entendu.  J'ai  su  que,  dans  un  lieu  où  le 


(  '2  ) 

viii  excitait  à  la  volupté  la  plus  pure,  mon  amie 
adorée  a  laissé  voir  l'éclat  de  sa  beauté,  sans  qu'au- 
cun voile  vînt  dérober  ses  appas,  et  a  montré  à  ses 
amans  fidèles  ce  visage  ravissant  ,  inaccessible 
pour  l'ordinaire  aux  regards  les  plus  avides. 


ALLEGORIE  IL 

LA    ROSE. 

Après  que  j'eus  compris  les  paroles  que  sem- 
blait proférer  le  zéphyr ,  tandis  que  je  cherchais 
à  interpréter  le  sifflement  du  merle  ,  et  que  je 
réfléchissais  sur  les  couleurs  variées  des  fleurs ,  la 
rose  en  exhalant  son  parfum  m'annonça  sa  douce 
venue,  et  s'exprima  ainsi  dans  son  langage  muet: 
Je  suis  l'hôte  qui  vient  entre  l'hiver  et  l'été,  et 
ma  visite  est  aussi  courte  que  l'apparition  du 
fantôme  nocturne  :  hâtez -vous  de  jouir  du  court 
espace  de  ma  fleuraison ,  et  souvenez-vous  que 
le  temps  est  un  glaive  tranchant.  J'ai  à-la-fois 
et  la  couleur  de  la  maîtresse,  et  l'habit  de  l'amant  : 
j'embaume  celui  qui  respire  mon  haleine;  je  cause 
à  l'innocente  beauté  qui  me  reçoit  de  la  main  de 
son  ami  une  émotion  inconnue.  Le  temps  de  ma 


(lurce  est  comme  une  visite  que  je  fais  auxliomiiies  : 
et  celui  qui  espère  me  posséder  long -temps  est 
dans  Terreur. 

Pourquoi  faut-il  qu'en  butte  à  la  fortune  con- 
traire qui  m'abreuve  d'amertume,  par-tout  où  mon 
bouton  s'épanouit  ,  un  cercle  d'épines  m'entoure 
et  me  presse  de  toutes  parts  î  Les  aiguillons  acérés 
et  les  flèches  aiguës  de  mes  épines  me  blessent , 
et  ,  répandant  mon  sang  sur  mes  pétales  ,  les 
teignent  d'une  couleur  vermeille.  Voil^  ce  que 
j'endure;  et  je  suis  cependant  le  plus  noble  des 
hùtes  ,  le  plus  élégant  des  voyageurs.  Mais,  hélas  I 
personne  n'est  k  l'abri  des  tourmens  et  des  peines; 
et  du  moins  celui  qui  saura  les  supporter,  attein- 
dra l'objet  de   ses  vœux. 

Brillante  de  fraîcheur,  je  suis  parée  du  vête- 
ment de  la  beauté,  lorsque,  tout  à-coup,  la  main 
des  hommes  me  cueille  et  me  fait  bientôt  passer 
du  milieu  des  fleurs  dans  la  prison  de  l'alambic: 
alors  mon  corps  est  liquéfié  et  mon  cœur  est 
brûlé;  ma  peau  est  déchirée  et  ma  force  se  perd; 
mes  larmes  coulent,  et  personne  ne  les  arrête, 
personne  n'a  pitié  de  moi.  Mon  corps  est  en 
proie  h  l'ardeur  du  feu ,  mes  larmes  à  la  submer- 
sion, et  mon  cœur  à  l'agitation.  La  sueur  que 
je  répands  est  un  indice  irrécusable  des  tourmens 
que  le  feu  me  fait   endurer.  Ceux  que  consume 


(  '4  ) 

une  chaleur  brûlante  ,  reçoivent  de  mon  essence 
du  soulagement  à  leurs  maux,  et  ceux  que  les 
désirs  agitent ,  respirent  avec  plaisir  mon  odeur 
musquée.  Lorsque  mes  agrémens  extérieurs  quit- 
tent les  hommes,  mes  qualités  intérieures  restent 
toujours  au  milieu  d'eux.  Les  contemplatifs  ,  qui 
savent  tirer  de  ma  beauté  passagère  une  allégorie 
si  instructive  ,  désirent  le  temps  où  ma  fîeur 
orne  les  jardins,  et  les  amans  voudraient  que 
ce  temps  durât  toujours. 

VERS. 

Si  je  t'ai  quittée  corporeîlement,  mon  esprit  n'est- 
il  pas  toujours  auprès  de  loi  î  Fais-y  réflexion ,  et 
tu  ne  mettras  aucune  différence  entre  ma  présence 
et  mon  éloignement.  Il  a  bien  raison  ,  celui  qui 
me  dit:  On  peut  te  comparer  à  la  rose,  qui  dis- 
paraît, mais  qui  faisse  son  essence. 


(  «5) 

ALLÉGORIE  111. 

LE    MYRTE. 

A  PEINE  le  myrte  eut-il  compris  le  langage 
muet  de  la  rose,  qu'il  lui  adressa  ces  mots  dans 
le  même  langage  :  Déjà  les  nuées  semblent  jouer 
au  trictrac  et  disséminent  des  perles  éclatantes  ;  le 
zéphyr  dit  son  secret  ;  le  béhar  répand  ses  trésors 
parfumés  ;  le  printemps  est  fier  des  guirlandes  qui 
rembellissent;  les  fleurs,  ne  cherchant  qu'à  plaire, 
et  non  contentes  d'orner  les  jardins  les  plus  beaux, 
veulent  briller  dans  d'autres  lieux  ;  le  rossignol 
chante  ses  amours;  le  bosquet,  rendez -vous  de 
Tamant ,  reprend  son  éclat  printanier.  Viens ,  6 
ma  compagne ,  divertissons-nous ,  et,  fiers  de  notre 
beauté,  saisissons  les  momens  fugitifs  de  la  joie, 
sans  en  laisser  échapper  la  plus  petite  partie. 

La  rose,  surprise  des  leçons  du  myrte,  reprit 
aussitôt  la  parole  en  ces  termes  :  Peux-tu  tenir 
lin  pareil  langage,  toi  le  prince  des  végétaux 
odorans  î  non,  dusse- je  te  fâcher,  ce  n'est  pas 
ainsi  que  tu  devrais  t'exprimer;  et  ton  conseil  per- 
nicieux te  rend  indigne  du  rang  distingué  que  tu 
occupes  parmi  les  fleurs.  Qui  pourra  atteindre  le 
but,  si  tu  erres  ;  qui  dirigera,  si  tu  t'égares  l  Tu  en- 


(  '6) 
gages  tes  sujets  à  venir  jouer  auprès  de  toi ,  et  tu 
les  excites  à  se  divertir.  Quoi  !  celui  qui  est  à  la  tête 
des  autres  doit -il  avoir  des  idées  si  peu  saines  î 
Mais  que  ta  beauté  ne  t'enivre  point,  parce  que 
tes  rameaux  se  balancent  mollement ,  que  tes 
feuilles  sont  d'un  vert  harmonieux,  et  que  ton  ori- 
gine est  noble.  Tu  es  l'image  des  jours  heureux 
de  la  jeunesse,  qui  fuient  et  disparaissent  avec 
tant  de  rapidité.  Tels  sont  les  instans  toujours 
si  courts  que  l'on  passe  auprès  d'une  amante 
adorée;  tels  sont  encore  ces  prestiges  fantastiques 
qui ,  durant  ia  nuit ,  viennent  assiéger  l'imagi- 
nation ,  que  rien  n'interrompt  et  qui  cependant 
ne  peuvent  jamais  se  terminer. 

Déjà  ,  à  l'aspect  du  printemps ,  les  champs  se 
couvrent  d'un  vêtement  de  verdure  qu'ornent  mille 
fleurs ,  dont  les  variétés  sont  aussi  multipliées  que 
celles  des  animaux  qui  peuplent  la  terre.  De  ces 
fleurs,  les  unes  font  le  charme  de  l'odorat  et  se 
fanent  ensuite  ;  on  tire  des  autres  d'heureuses 
allusions,  et  on  rapporte  leur  langage  allégorique: 
celles-ci  sont  le  jouet  des  rigueurs  du  sort  ;  celles-là, 
privées  de  vie ,  sont  étalées  sur  les  tertres  de  la 
campagne.  Parmi  les  végétaux ,  il  y  en  a  dont  on 
mange  les  fruits  et  qui  font  la  base  de  ia  nourri- 
ture des  hommes  ;  mais  bien  peu  échappent  aux 
flammes  dévorantes  :  et  cependant,  si  ce  n'était  la 


(   '7  ) 

prédestination  et  la  préniotion  ,  ils  seraient  tous  à 
l'abri  de  cette  fin  cruelle.  Mon  frère,  ne  te  laisse 
point  séduire  par  les  plaisirs  apparens  que  t'offre 
ie  caravanserai  de  ce  monde;  les  lions  du  trépas 
ont  la  gueule  béante  pour  te  recevoir.  ^^oiIà  l'avis 
que  je  crois  devoir  te  donner.  Adieu. 


ALLEGORIE  IV. 

LE    NARCISSE. 

Le  narcisse,  regardant  alors  le  myrte  son  com- 
pagnon ,  lui  expliqua  ainsi  sa  pensée  :  Toujours 
auprès  des  fleurs ,  je  me  plais  h  les  considérer  ;  je 
m'entretiens  avec  elles  au  clair  de  la  lune,  et  je 
suis  constamment  leur  camarade:  ma  beauté  me 
donne  le  premier  rang  parmi  mes  compagnes ,  et 
je  suis  néanmoins  leur  serviteur  ;  aussi  appren- 
drai-je  à  quiconque  le  désirera  ,  quelles  sont  les 
obligations  du  service. 

Je  me  ceins  les  reins  de  la  ceinture  de  l'obéis- 
sance, et,  toujours  prêt  à  exécuter  les  ordres,  je  me 
tiens  humblement  debout  comme  l'esclave.  Je  ne 
m'assieds  point  avec  les  autres  fleurs,  et  je  ne 
lève  pas  la  tète  vers  mon  commensal  ;  je  ne  suis 
jamais  avare  de  mon  parfum  pour  celui  qui  désire 
le  respirer;  je  n'oublie  jamais  ce  que  je  dois  h  celui 

B 


(  '8  ) 
qui  fait  usage  de  moi ,  et  je  ne  suis  jamais  rebelle 
h.  ia  main  qui  me  cueille.  Je  me  désaltère  à 
chaque  instant  dans  mon  calice,  qui  est  pour  moi 
comme  un  vêtement  distingué  par  sa  pureté;  une 
tige  d'émeraude  me  sert  de  base ,  et  l'or  et  l'argent 
forment  ma  robe.  Lorsque  je  réfléchis  sur  mes 
imperfections  ,  je  ne  puis  m'empêcher  de  baisser 
avec  confusion  les  yeux  vers  la  terre;  et  lorsque  je 
médite  sur  ce  que  je  dois  devenir  un  jour,  je  pense 
au  moment  fixé  par  le  destin  pour  le  terme  de 
mon  existence.  On  sera  peut-être  étonné  que  je  me 
livre  ainsi  à  de  sombres  idées ,  dans  le  lieu  le  plus 
agréable  :  j'avoue  que  l'odorat  peut  bien  avoir  une 
juste  idée  de  mon  parfum  ;  mais  l'oreille  ne  pourra 
point  entendre  mes  paroles  allégoriques,  ni  l'esprit 
en  saisir  le  sens.  Je  veux,  par  l'humilité  de  mes 
regards ,  confesser  mes  défauts  ;  et  si  je  baisse  la 
tête,  c'est  pour  considérer  le  moment  cruel  de  ma 
fin. 

VERS. 

Lorsque  le  terme  de  ma  vie  arrivera,  pénible 
instant  qui  me  couvrira  de  confusion  et  de  honte , 
je  me  loverai,  les  yeux  humblement  fixés  sur  la 
terre  ,  k  cause  de  mes  fautes.  Quand  même  j'aurais 
fait  tous  mes  efforts  et  que  j'aurais  chassé  de  mes 
paupière.s  le   sommeil  de    la  tiédeur  ,  j'avouerais 


(  '9  ) 
afors  mon  impuissance,  et  je  craindrais  d'être  déçu 
dans  mon  espoir:  à  bien  plus  forte  raison,  après 
avoir  précédeminent  commis  des  fautes  graves, 
lorsque,  au  moment  de  mourir,  je  serai  au  nom- 
bre des  repentans ,  quel  fruit  retirerai -je  de  ma 
science  et  de  mes  actions ,  puisque  ma  prunelle 
n'espérera  plus  revoir  Ja  lumière  du  jour  !  Eh  bien  1 
que  dès  ce  moment  une  crainte  salutaire  dirige  mes 
pas  1  hâtons -nous,  la  précipitation  est  inhérente 
à  Thomme. 


ALLEGORIE  V. 

LE    NÉNUFAR. 

Le  nénufar,  si  remarquable  par  sa  couleur 
triste  et  par  son  air  languissant  ,  tint  alors  ce 
langage  :  Toi  qui  te  repais  de  chagrins  ,  jette  le 
regard  de  l'attention  sur  la  pâleur  de  ma  corolle, 
et  vois  si  je  puis  échapper  aux  décrets  immuables 
du  destin.  Je  me  soumets  à  mon  malheur;  mais 
je  ne  renonce  pas  à  l'amour.  Si  tu  es  amoureux, 
toi  qui  écoutes  avec  avidité  mes  leçons ,  use  de 
ménagemens ,  comporte-toi  avec  prudence.  Les 
jardins  sont  mon  habitation ,  et  les  lieux  aqua- 
tiques le  lit  de  mon  repos  ;  j'aime  l'eau  limpide  et 
courante  ,  et  ne    m'en  sépare   ni  le  matin ,  ni  le 

B    2 


(    20) 

soir,  ni  l'hiver,  ni  l'été.  Ce  qui  est  bien  plus 
extraordinaire,  c'est  que,  tourmenté  d'amour  pour 
cette  eau,  je  ne  cesse  de  soupirer  après  elle  ,  et 
qu'en  proie  à  la  soif  brûlante  du  désir  qu'elle 
m'inspire ,  je  l'accompagne  par-tout  :  mais  as-tu 
jamais  vu  rien  de  pareil  î  être  dans  l'eau ,  et  se 
sentir  dévoré  par  la  soif  la  plus  ardente. 

Lorsque  le  jour  paraît ,  je  déploie  mon  calice 
doré ,  et  mille  mains  jalouses  viennent  fondre  sur 
moi  :  au  contraire ,  lorsque  la  nuit  enveloppe  la 
terre  de  ses  ombres  ,  l'onde  m'attire  vers  elle  ;  ma 
corolle  quitte  sa  position  et  s'incline  ;  je  m'enfonce 
dans  l'eau,  qui  me  recouvre  ;  je  me  retire  dans  mon 
nid  de  verdure,  et  je  reviens  à  mes  pensées  soli- 
taires. Mon  calice,  comme  un  œil  vigilant,  est  sub- 
mergé dans  l'eau  ,  pour  contempler  ce  qui  fait  son 
bonheur ,  et  les  hommes  irréfléchis  ne  savent  plus 
où  je  suis.  Le  censeur  importun  ne  réussira  pas 
à.  m'éloigner  de  l'objet  de  ma  flamme.  Bailleurs, 
quelque  part  que  mes  désirs  me  portent ,  je  vois 
que  l'eau  est  toujours  a  mes  côtés  :  si  je  viens  la 
prier  de  soulager  l'ardeur  qui  m'enflamme,  elle 
m'abreuve  de  sa  douce  liqueur;  si  je  lui  demande 
un  asile,  elle  me  reçoit  avec  complaisance.  Mon 
existence  est  liée  à  la  sienne ,  et  la  durée  de  ma 
fleur  dépend  du  séjour  qu'elle  fait  auprès  de  moi. 
Enûn  ,  c'est  par  l'eau  seule  que  je  puis  acquérir  le 


(    2>     ) 

dernier  degré  de  la  perfection  ;  c'est  à  ses  seules 
qualités  que  je  dois  les  propriétés  dont  je  suis 
pourvue.  On  ne  me  verra  jamais  sans  cet  objet 
adoré ,  car  sans  lui  je  ne  pourrais  exister  en  aucune 
manière. 

VERS. 

L'amour  a  couvert  mon  corps  du  vêtement 
décoloré  de  la  langueur  ;  troublé  par  la  passion 
qui  l'agite,  mon  esprit  s'abandonne  au  plus  noir 
chagrin.  Lorsque  l'amour  décoche  son  trait,  il 
semble  que  c'est  moi  qu'il  veuille  frapper  de  préfé- 
rence à  tout  autre.  La  beauté  cruelle  que  j'adore 
feint  de  venir  auprès  de  moi,  et  elle  excite  dans 
mon  sein  un  amour  qui  l'agite  et  le  brise.  Je  ne 
vis  que  pour  elle ,  et  je  veux  mourir  pour  elle  ;  oui , 
l'amour  lui-même  me  préparera  cette  mort  glo- 
rieuse. Il  me  dit:  Ne  rêve  qu'amour,  si  tu  veux  jouir 
du  bonheur  que  je  promets.  Je  défends,  par  la 
pointe  des  lances,  l'approche  de  ce  divin  objet  :  ce 
n'est  qu'auprès  de  mes  piques  rembrunies  que  tu 
trouveras  les  douceurs  que  j'accorde.  Ne  t'afflige 
donc  point  de  la  blessure  cuisante  des  flèches ,  ni  de 
l'amertume  de  la  peine;  le  bonheur  en  est  le  résul- 
tat. Imite  ces  amans  fidèles  qui  sont  morts  d'amour 
pour  leur  divine  maîtresse,  mais  qui  ont  obtenu 
l'objet  de  leurs  désirs.  Quand ,  après  avoir  traversé 

B  3 


(    22    ) 

la.  mer  Rouge  ,  les  enfans  d'Israël ,  épuisés  de 
fatigue ,  entendirent  sur  le  mont  Sinaï  ces  douces 
paroles  ,  «  Je  suis  celui  qui  suis ,  5>  ils  ne  re- 
grettèrent point  leurs  peines  et  leurs  travaux. 


ALLÉGORIE  VI. 

LE    SAULE    DEGYPTE. 

Lorsque  les  arbres  eurent  vu  que  le  saule 
était  le  seul  d'entre  eux  dont  les  rameaux  flexibles 
se  balançassent  sans  cesse ,  ils  critiquèrent  la 
mollesse  de  ses  mouvemens  ,  et  censurèrent  sa 
fierté  et  sa  complaisance  pour  lui-même.  Alors 
le  saule  agita  de  nouveau  ses  rameaux  légers  , 
et  s'exprima  ainsi  dans  son  langage  muet:  A-t-on 
quelque  chose  à  me  reprocher  !  pourrait-on  blâ- 
mer le  tremblement  de  mon  feuillage  et  l'agita- 
tion de  mes  branches  !  C'est  pour  moi  que  la 
terre  déroule  ses  tapis  nuancés,  que  les  prés  dé- 
ploient toute  leur  parure  ,  et  que  l'haleine  du 
zéphyr  matinal  répand  ses  douces  émanations. 
Lorsque  je  m'aperçois  que  les  végétaux  sont  sur 
le  point  de  ressusciter ,  que  la  terre  s'agite  et  se 
ranime,  que  la  trompette  de  la  promesse  que  Dieu 
m'a  faite  sonne  ,  que  l'accomplissement  de  cette 
promesse  abroge  la  menace  dont  j'avais  été  l'objet, 


(  '.3  ) 
et  que  mes    fleurs  vont  s'épanouir  ;  quand  ,  d'un 
autre  coté  ,  je  vois  que   déjà  la  rose  a  paru ,  que 
les  frimas  se  sont  retirés  ,  que  les   fleurs  brillent 
des  plus  vives  couleurs,  que  le  grain  commence 
à   se   former ,    que    déjà  le    rameau  dépouillé  se 
couvre  de    feuilles  ,    que  les    différens   végétaux 
destinés   aux   mets  et  aux  boissons  de    l'homme 
s'unissent  pour   lui   fournir   la    substance  qui   le 
fait  vivre,  je  m'élève  alors  à  la  connaissance  du 
créateur  et  du  maître  de  toutes  ces  choses,  et  je 
reconnais  qu'il  est  unique,  éternel,  tout-puissant; 
qu'il  n'a  besoin  de  personne  ,  et  que  personne  ne 
peut  se  passer  de  lui,  bien  loin  de  partager  son 
empire  ;   qu'il  n'a  point  engendré  et  n'a   pas  été 
engendré,  et  qu'aucun  être  enfin  n'est  semblable 
à  lui.  C'est  par  ces  considérations   que  ma  cime 
élevée  s'agite  pour  se  réjouir  de  la  vision  intui- 
tive qui  fait  mes  délices ,  et  que  les  rossignols  de 
mon  bonheur  gazouillent  sur  mes  rameaux  trem- 
blans.  Ensuite,  par  un  effet  de  la  grâce  de  Dieu, 
objet  de  mon  culte,  je  pense  au  néant  de    mon 
être;  et ,  de  crainte  de  manquer  mon   but,  je  me 
tourne  vers   la  rose  ,  je  lui  annonce  ma  venue , 
et,  tandis  que  mes  fleurs  lui  forment  en  tombant 
comme  une  robe   élégante,  je  lui  demande  quel 
est  l'objet  de  mon  existence.  Nous  nous  ressem- 
blons parfaitement  en  tout ,  me  répond-elle  :  si  tes 

B  4 


(    24) 

rameaux  paraissent  s'incliner  pour  prier  le  Très- 
haut,  on  dirait  que  les  miens  se  prosternent  pour 
l'adorer;  si  ta  beauté  consiste  dans  ie  vert  de  ton 
feuillage  ,  la  mienne  consiste  dans  l'incarnat  de  mes 
joues.  Mon  frère,  n'attendons  pas  le  feu  éternel 
qui  doit  nous  consumer;  jetons-nous  nous-mêmes 
dans  les  flammes,  pour  nous  offrir  en  holocauste. 

Si  tel  est  ton  désir,  lui  répliqué -je,  et  si  tu 
consens  à  périr,  je  ne  m'y  oppose  point  et  je  veux 
bien  ne  pas  me  séparer  de  toi.  On  nous  arrache 
donc  ensemble  du  milieu  des  fleurs  nos  com- 
pagnes ;  on  nous  livre  à  un  feu  ardent  qui  fait  mon- 
ter nos  esprits,  et  qui,  sans  pitié,  fait  couler  nos 
larmes.  Nos  corps  périssent,  mais  nos  âmes  restent; 
notre  beauté  extérieure  s'évanouit ,  mais  nos  qua- 
lités intérieures  demeurent  :  il  est  vrai  cependant 
qu'il  y  a  une  grande  différence  entre  ce  que  nous 
étions  et  ce  que  nous  devenons. 

V£RS. 

Déjà  la  rose  était  venue  ;  elle  annonçait  les 
propriétés  agréables  qu'elle  possède,  lorsque  le 
saule  à  la  taille  légère  se  tourna  vers  elle  pour 
se  plaindre  de  la  violence  de  l'amour  dont  il  était 
épris,  et  s'inclina  avec  grâce  pour  respirer  le 
parfum  délicieux  qu'elle  exhalait.  La  rose ,   parta- 


(  ■^'->  ) 

géant  sa  douleur  ,  Jui  dit  :  Amis  intimes  ,  en 
proie  h  la  même  ardeur,  nous  ne  faisons  qu'un 
et  nos  qualités  sont  les  mêmes.  Combien  de  fois 
n*avons-nous  pas  éprouvé  les  tourmens  les  j)Ius 
violens  des  flammes  !  Mais  jamais  mon  compa- 
gnon n'a  perdu  de  vue  l'objet  de  sa  passion , 
et  jamais  je  n'ai  oublié  l'objet  de  la  mienne.  Com- 
bien de  fois  aussi  des  mains  avides  ne  nous 
ont  -  elles  point  privés  de  nos  rameaux  encore 
verts  1  On  ne  saurait  comprendre  à  quel  point  la 
flamme  cruelle  tourmente  nos  entrailles,  et  dans 
quel  brasier  nos  cœurs  sont  consumés.  Le  feu 
sépare  nos  esprits  de  nos  corps,  comme  il  a  com- 
mencé par  nous  priver  de  nos  forces.  Nous  nous 
plaignons  tous  deux  des  mêmes  douleurs,  quoique 
chacun  nous  ayons  l'objet  particulier  de  notre 
amour.  Je  le  jure  par  celui  qui  de  toute  éternité 
repose  sur  son  trône,  et  mon  serment  est  véritable, 
il  y  a  dans  l'exposition  de  ma  peine  un  sujet  de 
réflexion  pour  les  gens  sensibles,  dont  le  cœur 
est  éloigné  du  mal  :  j'étais  hier  comme  la  pleine 
lune  qui  se  lève,  et  je  suis  aujourd'hui  comme  une 
étoile  qui  disparaît. 


(  26) 
ALLÉGORIE  VIL 

LA    VIOLETTE. 

Alors  la  violette  soupira  d'une  manière  plain- 
tive ,  comme  celui  que  les  peines  de  l'absence 
affligent  ;  et ,  dans  son  langage  emblématique , 
elle  m'adressa  ces  réflexions  :  Qu'il  est  digne 
d'envie ,  celui  qui  a  vécu  de  la  vie  des  heureux  et 
qui  est  mort  martyr  1  Pourquoi  faut-il  que  je  me 
fane  ,  consumée  de  chagrin ,  et  que  je  paraisse 
sous  le  vêtement  de  la  maigreur  et  de  la  tristesse  ! 
Les  décrets  immuables  du  destin  m'ont  changée  et 
ne  m'ont  laissé  ni  peau  ni  force;  les  vicissitudes  du 
temps  ne  m'ont  point  permis  de  prolonger  mon  exis- 
tence et  m'ont  fait  périr  impitoyablement.  Qu'ils 
ont  été  courts  les  instans  où  j'ai  joui  d'une  vie 
agréable ,  tandis  qu'au  contraire  je  suis  restée  si 
iong-temps  sèche  et  dépouillée  de  mes  feuilles  ! 

Aussitôt  que  ma  corolle  s'ouvre  ,  on  vient 
me  cueillir  et  m'enlever  de  mes  racines,  sans  me 
laisser  le  temps  de  parvenir  au  terme  de  ma  crois- 
sance; et  il  ne  manque  pas  de  gens  qui,  abusant 
de  ma  faiblesse ,  me  traitent  avec  violence ,  sans 
que  mes  agrémens ,  ma  beauté  et  ma  fraîcheur 
puissent  les    arrêter.    Je  cause   du  plaisir  à  ceux 


(  '-7  ) 
qui  sont  auprès  de  moi,  et  je  plais  à  ceux  qui 
m'aperçoivent:  mais  à  peine  se  passe-t-il  un  jour, 
ou  même  une  partie  d'un  jour,  que  déj^  l'on  ne 
m'estime  plus,  qu'on  me  vend  au  plus  bas  prix, 
après  avoir  fait  le  plus  grand  cas  de  moi,  et  qu'on 
finit  par  me  trouver  des  défauts  ,  après  m'avoir 
comblée  d'éloges.  Le  soir  ,  par  l'influence  de  la 
fortune  ennemie  ,  mes  pétales  se  roulent  et  se 
fanent;  et  le  matin  ,  je  suis  sèche  et  sans  beauté. 
C'est  alors  que  les  gens  studieux  et  livrés  aux 
sciences  naturelles  me  recueillent  :  avec  mon  se- 
cours ,  ils  dissipent  les  tumeurs  répandues  sur  le 
corps  ;  ils  apaisent  les  douleurs  rebelles  ;  ils  adou- 
cissent les  tempéramens  secs,  et  ils  éloignent  enfin 
bien  des  maux  qui  attaquent  l'humanité.  Fraîche  , 
je  fais  jouir  les  hommes  de  la  douceur  de  mon 
parfum  et  du  charme  de  ma  fleur;  sèche,  je  leur 
rends  la  santé.  Mais  ces  mêmes  hommes  ignorent 
mes  qualités  les  plus  précieuses ,  et  négligent  de 
scruter  les  vues  de  sagesse  que  Dieu  a  déposées 
en  moi.  J'offre  cependant  un  sujet  de  réflexion  bien 
utile  à  celui  qui ,  en  m'étudiant,  cherche  à  méditer 
et  à  s'instruire  ;  car  les  leçons  que  l'on  peut  tirer  de 
ma  manière  d'être  ,  suffisent  pour  retenir  celui  qui 
n'est  pas  sourd  h  la  voix  de  la  raison.  Mais,  hélas I 
tout  avertissement  est  inutile. 


(  28) 

VERS, 

J'ai  considéré  avec  admiration  la  violette ,  et 
j'ai  vu  que  ses  fleurs,  sur  leurs  pédoncules,  res- 
semblent à  une  armée  dont  les  voltigeurs,  d'éme- 
raude ,  auraient  orné  de  saphirs  leurs  lances ,  et 
auraient  adroitement  enlevé  avec  ces  lances  les 
têtes  de  leurs  ennemis. 


ALLEGORIE  VIIL 


LA    GIROFLEE. 


Alors  la  giroflée,  fière  de  son  coloris,  répandit 
son  doux  parfum ,  et  sembla  dire  ces  paroles  :  Pour- 
quoi se  laisser  séduire  par  les  charmes  d'une  vie  qui 
nous  est  arrachée  au  moment  que  nous  nous  y  atten- 
dons le  moins  l  Pourquoi  se  réjouir  follement  d'une 
existence  que  mille  accidens  ne  cessent  de  troubler! 
Si  tu  veux  prendre  une  leçon  instructive ,  considère 
ma  tige  inclinée  ,  ma  couleur  qui  se  passe,  ma  vie 
qui  finit  sitôt ,  et  le  petit  nombre  d'instans  que 
dure  ma  fraîcheur.  Les  révolutions  du  temps  ont 
changé  ma  couleur  première ,  et  en  ont  formé  trois 
différentes  nuances  qui  constituent  autant  de  va- 
riétés. 


(    29) 

La  première  se  présente  sous  le  vêtement  jaune 
du  mal  de  l'amour  ;  la  seconde  s'offre  à  tes  re- 
gards, vêtue  de  la  robe  blanche  de  l'inquiétude 
produite  par  les  tourmens  de  la  séparation  ;  la 
troisième  enfin  paraît  sous  un  voile  bleu,  en  signe 
du  chagrin  qui  la  consume.  Quant  à  la  variété 
blanche  de  ma  fleur  ,  elle  n'a  ni  éclat ,  ni  parfum  ; 
aussi  l'odorat  dédaigne-t-il  sa  corolle,  et  l'on  ne 
vient  point  enlever  le  voile  qui  couvre  ses  appas. 
La  raison ,  c'est  qu'elle  cache  soigneusement  son 
secret,  qu'elle  renferme  en  elle-même  son  parfum, 
et  qu'elle  dérobe  ses  trésors  avec  tant  de  soin,  que 
ni  les  désirs  ni  les  vents  ne  peuvent  en  jouir.  La 
variété  "jaune ,  au  contraire ,  se  promettant  de  sé- 
duire ,  prend ,  dans  ce  dessein ,  un  air  de  volupté 
et  de  langueur  ;  répand  le  matin  et  le  soir  son 
odeur  musquée  ;  et  à  l'aurore  ainsi  qu'au  coucher 
du  soleil,  laisse  échapper  son  haleine  odorante. 

VERS. 

Jamais  le  doux  zéphyr  ,  chargé  de  vapeurs 
parfumées  ,  ne  s'élève  de  la  plaine  où  est  placée 
ta  tente  adorée,  sans  que  des  larmes  causées  par 
la  douleur  ne  coulent  de  mes  paupières.  Hélas  I 
si  ce  n'était  toi  qui  habites  cet  asile  sacré  , 
jamais  une  flèche  meurtrière  n'aurait  percé  mon 
sein.  Tu  as  fait  mon  coeur  esclave;  je  te  l'aban- 


(  3o) 
donne,  je  rends  les  armes  :  ah!  ne  me  tourmente 
point  par  de  cruels  chagrins. 


Si,  pressé  par  les  désirs  de  mon  amour,  je 
confie  ma  peine  au  zéphyr,  peux-tu  m'en  faire 
un  reproche! 

VERS. 

Ne  me  blâme  point,  ô  mon  frère!  quand  je 
découvre  la  passion  qui  m'expose  à  l'ignominie. 
Va  ,  l'amant  qui  trahit  son  secret  n'est  pas  cou- 
pable ;  il  est  vaincu  par  la  violence  de  son 
ardeur. 


Pour  ce  qui  est  de  ma  variété  bleue,  elle  com- 
prime sa  passion ,  elle  supporte  sa  peine  avec  pa- 
tience ,  et  jamais  elle  n'exhale  son  odeur  durant 
le  jour.  Tant  que  le  soleil  répand  sa  lumière, 
dit-elle,  je  ne  manifeste  point  mon  secret  à  ceux 
qui  m'aiment,  et  je  ne  prodigue  pas  mon  arôme  k 
ceux  qui  viennent  le  respirer  ;  mais  dès  que  la  nuit 
m'a  couverte  de  ses  ombres ,  je  décèle  mes  tré- 
sors a  mes  amis,  et  je  me  plains  d.e  mes  maux  à 
ceux  qui  souffrent  les  mêmes  peines  que  moi. 
Lorsque  les  coupes  font  la  ronde ,  je  bois  à  mon 
tour  ;  et  lorsque    l'instant    me  paraît   favorable  , 


{3i  ) 
j'exhale  mes  émanations  nocturnes  ,  et  répands 
un  parfum  aussi  doux  ,  pour  ceux  qui  sont  au- 
près de  moi  ,  que  la  société  d'un  ami  qui  console. 
Toutes  les  fois  que  l'on  recherche  ma  présence,  je 
cède  avec  empressement  à  l'invitation  ,  et  je  me 
contente  de  me  plaindre  à  Dieu  de  ce  que  des 
cœurs  durs  me  font  souffrir.  Sais -tu  pourquoi 
je  retiens  mon  parfum  durant  le  jour,  et  que 
je  n'ôte  mon  voile  que  durant  la  nuit  î  C'est 
parce  que  ce  sont  les  ténèbres  que  les  amans  choi- 
sissent pour  leur  tête-h-tête,  et  que  la  maîtresse 
attend  ce  moment  pour  se  montrer  à  son  bien- 
aimé.  Dans  cet  instant  heureux,  le  rival  importun 
est  absent  et  tout  facilite  l'accès  de  la  divine  amie: 
aussi ,  à  peine  s'est-elle  informée  des  besoins  de 
ses  amans  ,  que  j'élève  vers  elle  mes  soupirs 
comme  des  épîtres  amoureuses  ,  et  lui  présente 
mon  humilité  comme  intercesseur. 

VERS. 

Je  dirige  vers  ma  maîtresse  les  soupirs  enflam- 
més de  mon  amour,  et  je  lui  présente  le  parfum 
de  mon  hommage.  Pour  obtenir  le  doux  instant 
de  bonheur  que  j'ambitionne,  je  n'ai  d'autre  inter- 
cesseur que  la  pureté  de  mes  vues  et  mon  humilité. 
Que  cette  amie  agrée  mon  hommage,  ou  qu'elle 


(    32    ) 

le  rejette  (cruelle  alternative  qu'il  est  impossible 
d'éviter  )  ,  mon  amour  n'en  est  pas  moins  le 
même. 


ALLEGORIE  IX. 


LE    JASMIN. 


Alors  le  jasmin  proclama  cette  sentence ,  avec 
l'éloquence  expressive  de  son  langage  muet  :  Le  dé- 
sespoir estune  erreur.  Mon  odeur  pénétrante  l'emporte 
sur  le  parfum  des  autres  fleurs;  aussi  les  amans  me 
choisissent-ils  pour  m'offrir  à  leurs  maîtresses.  On 
me  tire  des  trésors  invisibles  de  la  divinité ,  et  je 
ne  me  repose  que  dans  les  sortes  de  pièges  que 
forment  sur  le  sein  les  plis  de  îa  robe.  L'homme 
dont  le  cœur  est  sensible  aux  charmes  de  la  vie 
contemplative,  distingue  facilement  l'odeur  balsa- 
mique que  j'exhale  sans  cesse  ;  et  celui  qui  est  en 
proie  à  un  amour  violent,  ne  méconnaît  pas  mon 
mérite.  Mon  parfum  est  préférable,  je  le  répète, 
à  celui  des  autres  fleurs  ,  et  l'haleine  embaumée 
qui  s'échappe  de  mon  sein,  est  bien  au-dessus  de 
celle  de  mes  compagnes.  En  effet,  l'homme  dont 
les  qualités  sont  pures  est  vraiment  bon  et  reli- 
gieux; et  celui  dont  les  prétentions  sont  fondées, 


(  ,53  ) 
mérite  d'acquérir  du  lustre  et  de  i'dclat.  O  toi  qui 
desires  parvenir  aux  degrés  les  plus  élevés  du  spi- 
ritualisine,  cherciie  h  acquérir  des  mérites  et  des 
vertus,  afin  de  pouvoir  franchir  Téchelie  de  la  vie 
intérieure  ;  mais  si  tu  n'oses  approcher  de  la  carrière 
mystique,  n'espère  pas  jouir  de  la  protection  spé- 
ciale que  Dieu  accorde  à  ceux  qui  s'y  engagent. 

Mon  nom  offre  une  énigme  dont  fe  sens  propre 
ne  peut  que  plaire  aux  novices  dans  la  vie  s})iri- 
tuelle  :  il  est  composé  de  deux  mots  différens  , 
dcsespoïr  et  erreur  ;  or  fe  désespoir  est  une  erreur, 
et  l'erreur,  une  honte.  Quand  donc  les  mots 
désespoir  et  erreur  sont  réunis,  ils  indiquent  la 
cessation  du  malheur  ,  et  pronostiquent  la  fcli- 
cité  et  la  joie. 

VERS. 

Je  vois  l'auorure  venir  m'annoncer  le  bonheur 
en  me  donnant  le  jasmin.  Cesse  de  te  chagriner, 
le  chagrin  a  quelque  chose  de  honteux  ;  et  ne  dé- 
sespère point,  car  le  désespoir  est  une  erreur. 


(34) 


ALLEGORIE  X. 

LE    BASILIC. 

Voici  le  moment  où  ma  fleur  orne  ton  jardin, 
dit  alors  le  basilic  ;  donne-moi  donc  tes  ordres ,  et 
prends-moi  pour  ton  commensal.  Mes  feuilles 
fraîches  et  délicates  t'annoncent  mes  rares  qualités  : 
de  même  que  la  danse  ne  saurait  être  agréable  sans 
le  son  des  instrumens,  ainsi  l'esprit  ne  saurait 
être  réjoui  sans  moi  qui  sers  à  le  fortifier.  Je  suis 
promis  aux  élus  dans  le  paradis;  ma  couleur  est 
la  plus  harmonieuse  de  toutes  les  couleurs  ;  dans 
ina forme,  je  n'ai  point  d'égal;  et  mon  sein  ren- 
ferme un  parfum  précieux,  qui  pénètre  jusqu'au 
fond  des  cœurs ,  et  que  connaît  celui  qui  vient 
me  cueillir  dans  mon  parterre.  Je  suis  l'ami 
des  ruisseaux,  et  le  compagnon  des  fleurs;  je 
partage  les  secrets  de  ceux  qui  s'entretiennent  au 
clair  de  la  lune,  et  j'en  suis  le  dépositaire  le  plus 
fidèle.  Cependant  tu  auras  peut-être  entendu  dire 
qu'il  existe  un  délateur  (la  menthe  )  parmi  les 
êtres  de  mon  espèce;  mais,  je  t'en  prie,  ne  lui  fais 
pas  de  reproches  :  il  ne  répand  que  sa  propre 
odeur;  il  ne  divulgue  qu'un  secret  qui  le  regarde; 
il  ne  dévoile  enfin  que  ce  qu'il  peut  découvrir.  S'il 


(  ^5  ) 

manifeste  ses  trésors,  il  est  Lien  le  maître  de  les 
produire  au  jour;  s'il  exhale  son  odeur,  lui  est-il 
défendu  de  se  faire  connaître  !  Et  voila  cependant 
Tunique  cause  qui  lui  a  fait  donner  le  nom  inju- 
rieux de  délateur.  Mais  celui  qui  est  indiscret  pour 
lui-même,  ne  peut  être  assimilé  h  celui  qui  révèle 
des  secrets  qu'on  lui  a  confiés;  de  même  que  celui 
qui  prodigue  le  bien  qu'il  possède,  ne  peut  être 
mis  en  comparaison  avec  celui  que  son  naturel 
pervers  porte  h.  faire  du  mal.  Quoi  qu'il  en  soit, 
il  est  certain  que  tous  les  hommes  conviennent, 
d'une  manière  irrévocable,  que  rien  n'est  plus  blâ- 
mable que  la  délation.  Mon  frère,  refléchis  la-des- 
sus. Adieu. 

VERS. 

O  toi  qui  veux  pénétrer  le  secret  de  mon  amour, 
cesse  tes  instances,  je  t'en  conjure,  et  laisse -moi 
avec  ma  passion.  J'ai  reçu  en  dépôt  le  doux  secret 
que  m'a  confié  mon  amie;  pourquoi  veux-tu  que 
je  le  divulgue!  je  ne  suis  point  un  indiscret. 


(  36) 


ALLEGORIE  XL 


LA    CAMOMILLE. 


La  camomille,  ravie  de  sa  propre  beauté,  exalta 
ainsi  son  mérite  :  Voici  le  temps  de  ma  venue  ; 
voici  l'époque  où  j'embellis  les  champs,  où  ma 
végétation  est  dans  toute  sa  vigueur,  où  ma  beauté 
est  plus  douce  et  plus  agréable.  Comment  les 
jours,  où  ma  fleur  s'épanouit,  ne  seraient-ils  pas 
délicieux!  ces  ruisseaux  mentionnés  si  souvent 
dans  le  Coran  ne  viennent-ils  pas  baigner  mes 
tiges  î  Et  comment  ne  paierais-je  pas  avec  recon- 
naissance ma  dîme  annuelle,  puisque,  sans  avoir 
employé  la  force  ni  la  violence,  les  bienfaits,  au 
contraire,  de  tout  ce  qui  m'entoure,  me  font  un 
devoir  de  la  payer!  Mes  pétales  blancs  servent  à 
me  faire  connaître  de  loin ,  et  mon  disque  jaune 
imprime  une  douce  langueur  sur  m^a  corolle  :  on 
peut  comparer  la  différence  de  ces  deux  couleurs, 
à  celle  qui  existe  dans  les  versets  du  Coran,  dont 
les  uns  sont  clairs  et  les  autres  obscurs. 

Si  tu  es  en  état  de  comprendre  les  emblèmes, 
lève-toi  et  viens  profiter  de  ceux  qui  te  sont  offerts; 
sinon,  dors,  puisque  tu  ne  sais  pas  interpréter  la 


(  ''7  ) 
nature  qui  te  déploie  ici  tous  ses  cliarines  :  mais  ,  il 
faut  l'avouer,  ton  ignorance  est  bien  coupable. 

VERS. 

Ne  me  blâme  point  si  tu  ne  saisis  pas  le  sens 
caché  de  ce  que  je  te  dis,  et  si  tu  ne  comprends 
j)as  les  mystères  de  mes  allégories  :  c'est  par  pure 
compassion  pour  toi  que  je  te  parle  dans  le  lan- 
gage expressif  des  emblèmes  ;  mais  c'est  en  vain; 
ton  oreille  est  sourde  h  mes  leçons.  Eh  quoi  1  tu  ne 
sais  pas  tirer  une  utile  instruction  de  ma  mort 
a])parente,  qui  a  lieu  chaque  année,  et  des  tour- 
mens  cruels  que  les  destins  me  font  souffrir  !  Tu 
es  souvent  venu  m'admirer,  lorsque  ma  fleur  épa- 
nouie brillait  du  plus  doux  éclat;  tu  es  venu  de  nou- 
veau peu  après,  et  tu  ne  m'as  plus  trouvée.  Lorsque 
je  conte  ma  peine  aux  colombes  du  bosquet  toufîu , 
elles  calment  mes  ennuis,  et  semblent  répondre 
à  mes  gémissemens  ;  car  elles  n'ignorent  pas 
que  je  suis  exposée  à  mille  genres  de  morts.  Tu 
})rends  ces  plaintes  douloureuses  pour  le  chant 
du  plaisir  et  de  la  volupté ,  et  joyeux  tu  te  divertis 
sur  le  gazon  émaillé  de  mes  Heurs  :  hélas  I  il 
est  ficheux  que  tu  ne  saches  pas  distinguer  ma 
gaieté  d'avec  ma  tristesse. 


C  ^^ 


(  38  ) 


ALLEGORIE  XIL 

LA    LAVANDE. 

Lorsque    la    lavande    eut    vu   les    peines    et 
les    tourmens    que    souffrent    les    fleurs  ,    tantôt 
entassées    en  gerbes ,    tantôt   étalées ,  puis  aban- 
données au  mépris  :  Oh  I  que   je  suis  heureuse, 
dit-elle,    de  ne  pas   être  au  nombre  des    fleurs 
qui   ornent   les   parterres  !    je  ne   risque   pas  de 
tomber  entre  des   mains  viles,   et  je  suis  à  l'abri 
des  discours  du  censeur.   Contre  la  coutume  de 
la  plupart  des  plantes,  la  nature  me  fait  croître 
loin    des    ruisseaux    et    des    terrains    inclinés  et 
humides.    De   même  que  les   bêtes  sauvages  ,   je 
me  tiens  éloignée    de  la  société,  et  mon  séjour 
est  constamment  dans  les  déserts  et  dans  les  soli- 
tudes :  j'aime  les  lieux  isolés;  et  je  ne  me  mêle  ja- 
mais dans  la  foule.  Comme  personne  ne  me  sème 
ni  ne  me  cultive,  personne  n'a  à  me  reprocher  les 
soins  qu'il  m'aurait  donnés.  Les  mains  d'un  esclave 
ne  me  cueillent  pas,  et  l'on  ne  me  porte  jamais  ni 
au  joueur,  ni  à  l'homme  vain  et  frivole.  Si  tu  viens 
à  Najd,  tu  m'y  trouveras  :  là,  loin  des  demeures 
des  hommes,  une  plaine  spacieuse  i^ait  tout  mon 
bonheur,  et  la  société  de  l'absinthe  et  des  gazelles 


(  ^9) 

est  mon  unique  plaisir.  Le  vent  se  charge  de  mes 
émanations  balsamiques,  et  les  porte  h.  ces  fervens 
anachorètes  qui,  retirés  du  monde  comme  moi,  ne 
s'occupent  qu'îi  des  exercices  de  piété  :  aussi  puis- 
je  dire  que  celui-là  seul  respire  mon  odeur,  qui, 
passionné  pour  la  vie  contemplative  et  animé  d'un 
amour  ardent  et  véritable,  a  la  piété  du  Messie 
et  la  patience  d'Ismaël.  Le  matin  et  le  soir,  je 
suis  la  compagne  du  pèlerin  qui  traverse  le  désert; 
je  jouis  des  avantages  de  la  société  des  bons , 
et  je  suis  à  l'abri  de  celle  des  méchans  :  on 
ne  m'oblige  point  à  paraître  dans  des  réunions 
illicites,  et  je  ne  suis  jamais  auprès  de  celui  qui 
boit  et  qui  s'enivre.  Je  suis  semblable  à  l'homme 
libre  que  l'on  n'acheta  jamais,  et  ne  suis  point 
exposée  en  vente  dans  les  marchés,  comme  l'hypo- 
crite qui  a  contrefait  sa  religion.  Les  libertins  ne 
me  recherchent  point;  mais  celui-là  seul  m'estime, 
qui,  formant  un  dessein  inébranlable,  se  découvre 
la  jambe,  s'élance  sur  le  coursier  rapide  de  la  réso- 
lution,  et  le  pousse  dans  l'arène  du  spiritualisme. 
Je  voudrais  que  tu  fusses  dans  le  désert ,  lorsque 
la  brise  du  matin  erre  auprès  de  moi  dans  les  val- 
lées. Mon  odeur  fraîche  et  aromatique  parfume  le 
Bédouin  solitaire;  mon  exhalaison  humide  réjouit 
l'odorat  de  ceux  qui  se  reposent  auprès  de  moi  : 
aussi ,  lorsque  le  chamelier  vient  à  décrire  mes  rares 

C  4 


(4o) 

qualités  aux  gens  de  la  caravane ,  ne  peuvent- 
ils  s'empêcher  de  reconnaître  avec  attendrisse- 
ment mon  mérite. 

VERS. 

Le  zéphyr  vient  me  dire  de  douces  choses  de  la 
part  de  la  lavande,  et  m'apporter  le  salut  de  l'ab- 
sinthe. iMon  amour  est  couronné  du  succès  ;  je 
Je  comprends  à  ce  langage  figuré.  Heureux  état! 
puisse-t-il  durer  toujours  !  La  brise  s'avance  dans 
le  mystère  de  la  nuit ,  et ,  tandis  que  mes  compa- 
gnons sont  plongés  dans  un  profond  sommeil , 
elle  me  réveille  doucement  :  son  souffle  rafi^aî- 
chissant  et  balsamique  excite  en  moi  une  émo- 
tion qui  me  rend  semblable  à  celui  que  trouble 
l'ivresse.  Le  zéphyr,  toujours  chargé  d'émanations 
odorantes,  et  que  la  bonté  divine  a  doué  des  qua- 
lités les  plus  précieuses,  m'environne  de  sa  fré- 
missante haleine,  comparable  aux  soupirs  de  mon 
amour,  et  ma  passion  prend  de  nouvelles  forces. 
J'erre  à  la  poursuite  de  ce  vent  parfumé ,  plongé 
dans  la  joie  et  dans  l'amour  le  plus  pur,  et  l'éclair 
semble  sourire  en  voyant  mes  transports.  Le 
zéphyr  passe  sur  les  campagnes  de  Najd ,  et 
les  rameaux  flexibles  s'inclinent  devant  lui ,  comme 
par  respect.  Les  colombes  du  Ijocage  voisin  me 
rappellent,  par  leur   roucoulement  plaintif  y    ces 


(  41  ) 
lentes  et  ces  pavillons  chéris,  où  tant  d'amans 
empressés  accourent  en  foule,  pour  recevoir  fe 
prix  de  leur  amour  et  de  leur  constance  :  c'est 
laque  l'idole  qu'appellent  mes  soupirs,  laisse  voir 
ces  traits  radieux  dont  la  splendeur  dissipe  les 
ténèbres  de  la  nuit  ! 


ALLEGORIE  XIIL 

l'anémone. 

L'anémone,  que  l'on  distinguait  de  loin  au 
milieu  de  ses  compagnes,  par  la  teinte  de  sang 
qui  colore  ses  pétales ,  soupira  alors  ,  et ,  soule- 
vant sa  tige  inclinée,  seinbla  dire  ces  paroles  : 
Pourquoi  ai -je  si  peu  de  part  aux  hommages 
que  l'on  rend  aux  autres  fleurs,  quoique  ma  beauté 
soit  éclatante  et  ma  couleur  agréable!  Quoi!  per- 
sonne ne  fait  l'eloge  de  mes  agrémens,  personne 
ne  désire  me  cueillir  !  Quelle  est  donc  la  cause 
de  cette  indifférence  marquée!  Je  m'enorgueillis 
des  riches  nuances  de  mon  tètement ,  et  cepen- 
dant celui  qui  m'aperçoit  me  dédaigne  :  on  ne  me 
place  point  dans  les  vases  qui  décorent  les  salons; 
que  dis-je  !  je  semble  rebuter  également  et  la 
vue  et  l'odorat;  on  ne  me  donne  que  le  dernier 
rang  parmi  les  fleurs  qui  ornent  les  parterres  ;  on 


(  42  ) 

va  même  jusqu'à  me  chasser  du  milieu  d'elfes,  et 
à  m'éloigner  de  leur  douce  compagnie.  Tout  cela 
n'a  lieu,  à  ce  que  je  m'imagine ,  que  parce  que  mon 
cœur  est  noir;  mais  que  puis-je  contre  les  décrets 
de  la  providence!  Aussi,  en  considérant  que  mon 
intérieur  est  plein  de  défauts ,  et  que  mon  cœur 
est  souillé  de  vices ,  et  sachant  que  le  très-haut 
ne  fait  pas  attention  aux  formes  extérieures,  mais 
seulement  aux  qualités  du  cœur  ,  je  vois  que  ma 
complaisance  pour  ma  beauté  apparente  est  pré- 
cisément ce  qui  m'a  privée  de  la  faveur  divine. 
Je  suis  semblable  a  l'hypocrite,  dont  la  conduite 
est  irréprochable  en  apparence  ,  mais  dont  l'ame 
renferme  la  turpitude  :  au  dehors,  son  mérite  ne 
saurait  être  trop  prisé  ;  mais  au  fond  il  est  bien 
petit.  Si  mon  intérieur  était  conforme  à  mon  ex- 
térieur ,  je  ne  serais  pas  obligée  de  me  plaindre, 
et  si  Dieu  l'eût  voulu,  j'aurais  pu  être  estimée  et 
offrir  à  l'odorat  une  émanation  suave  ;  mais  le  bien 
ne  provient  que  de  celui  qui  est  réellement  bon. 
C'est  ainsi  que  les  signes  de  la  faveur  ne  paraissent 
que  sur  ceux  dont  la  divine  maîtresse  a  agréé  les 
hommages.  Qu'il  gémisse  douloureusement  et  qu'il 
verse  des  larmes  abondantes  ,  celui  que  les  dédains 
de  sa  céleste  amie  plongent  dans  le  chagrin,  et  qui 
est  privé  de  connaître  l'essence  véritable  de  cette 
éternelle  beauté  I 


(43) 

VERS. 

Ne  me  bhune  point  si  j'ai  déchiré  mes  vêtemens; 
ton   rej^roche  aggraverait  le  mal  que  rameur  m'a 
causé.  Mes  fautes  ont  noirci  mon  ame  ,  et  le  destin 
contraire  a  fixé  l'arrêt  de  mon  malheur.  Ceux  qui 
me  voient,  m'admirent;  mais,  hélas!  celui  qui  m'a 
formé  sait  que   je    renferme  un  cœur  hypocrite  : 
mon    extérieur    est    la   heauté    même  ;    mais     les 
vices    sont    renfermés   dans   mon    sein    coupable. 
Quelle    honte ,   lorsqu'au    dernier   jour    je    serai 
interrogé  1   hélas  î    je  n'aurai  point  d'excuse  à  ap- 
porter. Ah  !  si  tu   écartais  le  voile  qui  cache  mon 
ignominie,    tu    verrais   la    joie  sur  le   visage   de 
ceux  qui  me  haïssent. 


ALLÉGORIE  XIV. 

LA    NUE. 

Lorsque  la  nue  crut  que  le  moment  était  favo- 
rable pour  faire  entendre  son  langage  embléma- 
tique, elfe  répandit  des  pleurs,  s'étendit  et  s'agita 
dans  le  vague  des  airs,  et  sembla  prononcer  ces 
mots:  Végétaux,  pouvez -vous  méconnaître  les 
bienfaits  dont  je  vous  comble  ,  moi  qui  favorise 


(44  ) 

votre  croissance  de  mon  ombre  et  de  ma  pluie! 
N'êtes-vous  pas  les  enfans  de  ma  libéralité  !  pour- 
riez-vous  même  exister  sans  moi  î  Grâce  à  ma 
bienfaisance  ,  les  champs  ne  se  couvrent  -  ils  pas 
d'épis  dorés ,  la  mer  ne  s'enrichit-elle  pas  de 
perles  étincelantes  î  Je  nourris  les  germes  des 
plantes  dans  le  sein  de  leur  mère,  et  je  les  dé- 
barrasse peu -à~  peu  de  ce  qui  gênait  leur  crois- 
sance. Quand  ensuite  les  graines  ,  comme  la 
femme  féconde  ,  ont  mis  au  monde  leurs  em- 
bryons, et  que  j'ai  fait  paraître  les  jeunes  plantes 
hors  du  creux  de  sable  où  elles  étaient ,  je  me  charge 
d'en  avoir  soin  et  de  les  élever,  et  la  mamelle  de 
mes  bienfaits,  comme  celle  d'une  femelle  de  cha- 
meau au  lait  abondant,  ne  cesse  de  leur  fournir 
l'eau  nécessaire  à  leur  développement  progressif. 
Mais  lorsque  le  temps  de  l'allaitement  est  fini,  et 
que  le  moment  du  sevrage  arrive ,  alors  je  cesse  de 
leur  tendre  mes  mamelles;  aussi  se  dessèchent-elles 
bientôt,  et  ce  ne  sont  que  mes  larmes  abondantes 
qui  les  rendent  à  la  vie,  et  que  les  gouttes  de 
mes  pleurs  généreux,  qui  leur  redonnent  la  fraî- 
cheur. Tous  les  êtres  qui  existent  sont  vraiment 
mes  enfans  ;  n'a-t-on  pas  en  effet  entendu  dans 
toutes  les  tribus  ce  passage, du  Coran  :  Nous  avons 
domié  la  vie  a  chaque  être  par  le  moyen  de  l'eau! 


(  4i  ) 

vi:rs. 

Lorsque  je  vois  ce  pavillon  prinianier ,  jadis  sé- 
jour de  ma  maîtresse,  aujourd'hui  vide  et  inhal)ité, 
je  ne  puis  m'empècher  de  verser  des  pleurs  seni- 
pjlahles  à  ceux  que  tu  répands  dans  une  ondée 
légère.  L'amant  laisse  éciiapper  des  larmes  de  joie, 
tandis  que  l'éclair  semble  sourire,  et  que  le  zéj)hyr 
de  l'espérance  apporte  à  son  oreille  de  douces  nou- 
velles ;  il  soupire  alors  amoureusement,  en  se  tour- 
nant vers  les  vestiges,  k  demi  effacés  ,  de  l'habita- 
tion de  son  amie. 

Ne  lui  fais  pas  de  reproches  sur  son  amour ,  ne 
blâme  point  sa  passion  ;  tu  n'apporterais  aucun  re- 
mède à  ses  maux.  Pour  toi,  laisse  ces  violens 
désirs;  une  ardeur  brûlante,  un  chagrin  dévorant, 
voilà  ce  que  tu  en  retirerais. 


ALLEGORIE  XV. 

LE    ROSSIGNOL. 


Tandis  qu'assis  sur  le  bord  du  ruisseau  qui 
sillonnait  ce  jardin ,  je  prêtais  mon  attention  au 
langage  muet  des  fleurs  qui  l'embellissaient,  lout- 
h-coup  des  voix  éloquentes  s'élevèrent  des    nids 


(46  ) 
suspendus  aux  cimes  des  arbres  qui  me  cou- 
vraient de  leur  ombre.  J'entendis  d'abord  la  voix 
mélodieuse  du  rossignol ,  qui ,  se  promettant  de  sé- 
duire par  la  beauté  de  son  chant,  laissa  échapper 
les  secrets  qu'il  cachait  avec  soin  ,  et  sembla ,  dans 
son  gazouillement  emblématique  ,  bégayer  ces 
paroles  :  Je  suis  un  amant  passionné,  ivre  d'amour, 
dévoré  par  la  mélancolie  et  brûlé  par  la  soif  du 
désir.  Lorsque  tu  verras  le  printemps  arriver,  et 
la  nature  entière  reprendre  alors  un  aspect 
riant,  tu  me  trouveras  tout  joyeux  dans  les  jar- 
dins ,  ou  tu  m'apercevras  çà  et  là  dans  les  bos- 
quets ,  soupirant  mes  amours ,  chantant  et  sau- 
tillant sans  cesse  sur  les  branches.  Si  l'on  me  pré- 
sente la  coupe,  je  m'y  désaltère,  et,  satisfait  du 
son  harmonieux  de  ma  voix  ,  ivre  de  l'odeur  em- 
baumée que  je  respire,  lorsque  les  feuilles  mobiles 
frémissent  au  souffle  caressant  du  zéphyr  ,  je  me 
balance  sur  les  rameaux  agités  :  les  fleurs ,  et  le  ruis- 
seau qui  traverse  la  prairie,  occupent  tous  mes 
momens ,  et  sont  pour  moi  comme  une  fête  perpé- 
tuelle. Tu  t'imagines  pour  cela  que  je  suis  un  amant 
folâtre  :  tu  te  trompes;  j'en  fais  le  serment  et  je  ne 
suis  point  parjure.  Mon  chant  est  le  chant  de  la  dou- 
leur ,  et  non  celui  de  la  joie  ;  les  sons  que  je  fais  en- 
tendre sont  les  accens  de  la  tristesse,  et  non  ceux 
du  plaisir.  Toutes  les  fois  que  je  voltige  dans  un 


(  47  ) 

jardin  ,  je  balbutie  l'affliction  qui  va  J^ientot  rem- 
placer la  gaieté  qui  y  règne  ;  si  je  suis  dans  un 
lieu  agréable,  je  gémis  sur  sa  ruine  ]>rochaine  ;  si 
j'aperçois  une  société  brillante  ,  je  pleure  sur  sa 
séparation.  En  effet,  je  n'ai  jamais  vu  de  félicité  du- 
rable; la  paix  la  plus  douce  est  bientôt  troublée,  la 
vie  la  plus  délicieuse  devient  bientôt  amère.  J'ai  lu 
d'ailleurs  dans  les  écrits  allégoriques  des  sages, 
ces  mots  du  Coran  :  Tout  passe  dans  le  inonde  présent. 
Comment  donc  ne  point  gémir  sur  une  situation 
si  peu  assurée,  sur  un  temps  exposé  aux  vicissi- 
tudes de  la  fortune  ,  sur  une  vie  qui  s'évanouit, 
sur  un  instant  de  volupté  qui  va  finir!  Voilà  l'ex- 
plication de  ma  conduite  ;  je  pense  que  cela  te  suffit. 

VERS. 

Ce  qui  seul  soutient  mon  existence ,  c'est  de 
m'entretenir  de  ce  lieu  sacré ,  séjour  inaccessible 
de  celle  que  j'adore.  Ne  me  blâme  point,  si  tant 
de  fois  je  répète  les  chants  démon  amour:  quel 
mortel  ne  serait  pas  ivre  de  volupté,  en  pensant  à. 
un  jardin  où  des  plantes  odorantes  embaument  l'air 
de  leur  parfum,  où  des  vins  délicieux  excitent  au 
plaisir,  où  des  fleurs  dont  rien  n'égale  le  charme  et 
la  beauté,  ornent  la  terre  d'un  tapis  nuancé,  ici  d'un 
blanc  pur  ou  d'un  rouge  éclatant,  là  d'un  vert 
tendre,  plus  loin  d'un  jaune  foncé!  Le  ruisseau, 


(48) 
les  fîeurs,  les  rameaux,  semblent  s'agiter  dans 
Tarène  de  mon  amour,  au  son  des  cordes  de  ma 
lyre.  Les  obstacles  cessent,  et  je  vois  arriver  enfin 
l'heureux  moment  du  bonheur Douces  pen- 
sées ,  vous  êtes   ma  vie;  sans  vous  elle  finirait. 


ALLEGORIE  XVL 

LE    FAUCON. 

Le  faucon  ,  du  milieu  de  l'enceinte  de  fa 
chasse,  prenant  aussitôt  la  parole  :  Quoique  tu 
sois  bien  petit  ,  dit  -  il  au  rossignol  5  tes  torts 
sont  bien  grands  :  ton  chant  continuel  fatigue 
les  oiseaux ,  et  c'est  l'intempérance  de  ta  langue 
qui  attire  sur  toi  le  malheur,  sans  pouvoir  te 
procurer  aucun  avantage.  Ne  sais-tu  donc  pas 
que  les  fautes  dont  la  langue  se  rend  coupable  , 
sont  précisément  ce  qui  perd  l'homme  !  En  effet, 
sans  la  mobilité  de  ta  langue  indiscrète  ,  on  ne 
t'enlèverait  point  du  milieu  de  tes  compagnons  ; 
on  ne  te  retiendrait  point  captif  dans  le  séjour 
étroit  d'une  cage ,  et  la  porte  de  la  délivrance  ne  se- 
rait pas  irrévocablement  fermée  pour  toi.  Réponds, 
n'est-ce  pas  a  ta  langue  que  tu  dois  ces  malheurs 
qui  couvrent  de  honte  ton  éloquence  î  Au  con- 
traire ,   si ,  me   prenant  ])our  modèle ,   tu   imitais 


(4o  ) 

ma  tacitiirnité,  tu  serais  alors  exempt  de  reproche, 
et  tu  verrais  que  cette  qualité  précieuse  est  com- 
pagne   de   la  sûreté.    Jette    un   regard    sur    moi; 
vois  comme  je  suis  fidèle  aux  règles  du  silence. 
Que  dis  -  je  !  la   discrétion  même  de  ma  langue 
fait  mon  mérite,  et  l'observation  de  mes  devoirs, 
ma  perfection.    Enlevé  du   désert   par    force ,   et 
emmené  malgré  moi  dans  un  pays  lointain,  jamais 
je  ne  découvre  le  fond  de  ma  pensée;  jamais  tu  ne 
me  verras  pleurer  sur  des  vestiges  qui  me  rappel- 
leraient un  objet  chéri.  L'instruction  ,  voilà  ce  que 
je    recherche  dans   mon  voyage  :   aussi  mérité-je 
d'être  récompensé  toutes  les  fois  qu'on  me  met  à 
l'épreuve;  car  on  connaît  le  proverbe  :  C'est  V  épreuve 
qui  décide  si  l'on  doit  honorer  ou  mépriser  quelqu'un. 
Lorsque  mon  maître  voit  la  perfidie  du  temi)s  ,  il 
craint  que  je  ne  sois  en  butte  à  la  haine  ,   et  il 
couvre  alors  ma  vue  avec  le  chaperon  qu'indiquent 
ces  mots  du  Coran ,  N'étends  point  la  vue  ;  il  en- 
lace ma  langue  avec   le  lien  qu'ont   en  vue   ces 
paroles  du  même  livre,  Ne  remue  point  la  l an  crue  ;  il 
me  serre  enfin   avec    les    entraves  désignées   par 
cette  sentence  du  même  ouvrage  ,  Ne  marche  pas 
sur  la  terre  avec  pétulance.  Je  souffre  d'être  ainsi  lié, 
et  cependant  je  ne  me  plains  point  des  maux  que 
j'endure.  Après  que  le  chaperon  a  long-temps  cou- 
vert mes  yeux,  que  j'ai  reçu  les  instructions  néces- 

D 


(  5o) 
saires  ,  que  l'on  m*a  assez  essayé  et  que  j'ai  acquis 
un  certain  degré  d'habileté  ,  mon  maître  veut 
m'employer  a  la  chasse  ,  et ,  me  délivrant  de  mes 
iiens  ,  il  me  jette,  et  m'envoie  avec  le  signal  indi- 
qué par  ces  mots  du  Coran ,  où  Dieu  ,  s'adressant 
à  Mahomet ,  lui  dit  :  Nous  t'avons  envoyé ,  &c. 
On  n'ote  ie  chaperon  de  dessus  mes  yeux  que 
lorsque  je  suis  en  état  d'exécuter  parfaitement 
ce  qu'on  m'a  appris  ;  et  c'est  alors  que  ies  rois 
deviennent  mes  serviteurs  ,  et  que  leur  poignet 
est  sous  mes  pieds  orgueilleux. 

V  ERS. 

J'interdis  à  ma  langue  l'excès  de  la  parole,  et 
à  mes  yeux  le  spectacle  du  monde  :  la  mort  mena- 
çante, qui ,  chaque  jour  ,  s'avance  avec  plus  de  ra- 
pidité ,  me  fait  oublier  les  voluptés  les  plus  déli- 
cieuses. Je  ne  m'occupe  qu'à  prendre  les  manières 
des  princes  ,  et  à  me  former  aux  belles  actions  : 
la  main  du  roi  est  le  point  de  départ  de  mon  vol  ; 
je  me  dirige  vers  ma  proie ,  bientôt  je  la  saisis 
de  mes  serres  victorieuses  ,  et  je  reviens  ,  au 
moindre  signal,  vers  celui  qui  m'a  envoyé. 

Par  ma  vie,  voilà  quelle  doit  être  la  règle  de 
ceux  qui  s'assujettissent  aux  lois  sacrées  de  la  sou- 
mission à  la  foi. 


(  ^i  ) 


ALLEGORIE  XVIT. 

LA    COLOMBE. 

J'ÉTAIS  encore  tout  occupé  des  paroles  agréables 
du  faucon ,  et  je  méditais  sur  les  leçons  de  sagesse 
et  de  prudence  qu'il  m'avait  données  ,  lorsque  je 
vis  devant  lui  une  colombe  ornée  du  collier  de  l'o- 
béissance. Parle-moi  de  ton  discernement,  et  de 
ce  que  tu  aimes,  lui  dis-je  alors;  et  révèîe-moi  les 
motifs  qu'a  eus  la  Providence  en  te  parant  de  ce 
beau  collier.  Je  suis  chargée,  me  répondit-elle,  de 
porter  les  doux  messages  qui  gagnent  les  cœurs, 
et  ce  collier  est  le  signe  de  ma  fidélité  à  remplir 
les  commissions  qu'on  me  confie  ;  mais,  pour  parler 
avec  franchise ,  car  la  religion  ordonne  la  sincé- 
rité, tous  les  oiseaux  ne  méritent  pas  qu'on  se  fie  h 
eux ,  de  même  que  ceux  qui  prêtent  serment ,  ne  sont 
pas  tous  véridiques  ,  et  que  ceux  qui  s'engagent 
dans  la  vie  spirituelle ,  ne  sont  pas  tous  du  nombre 
des  élus.  Les  individus  seuls  de  mon  espèce  ren- 
dent exactement  ce  dont  on  les  charge  ;  et  ce  qui 
prouve  mon  intégrité ,  c'est  cette  sentence  :  ce  Les 
3>  oiseaux  bigarrés  de  noir  et  de  blanc,  et  ceux  qui 
3>  sont  verts,  remettent  fidèlement  ce  qu  on  leur  con- 
»  fie ,  parce  que  de  même  qu'ils  sont  préférables  à 

D    7. 


(    52    ) 

3->  l'extérieur,  ils  le  sont  aussi  en  réalité.  :»  Lorsque 
l'oiseau  est  noir,  il  n'est  pas  propre  à  l'objet  dont  if 
s'agit  ;  s'il  est  blanc,  cette  couleur  est  le  signe  d'une 
imperfection  naturelle  ,  et  indique  un  manque 
d'énergie  qui  le  rend  incapable  de  faire  ce  qu'on 
désire.  (  Les  vues  et  les  desseins  élevés  ne  se  trou- 
vent que  dans  l'ame  pure,  noble  et  droite.  )  Mais 
lorsque  la  couleur  de  l'oiseau  est  dans  un  juste 
milieu  ,  il  est  excellent  pour  les  messages,  et  on  doit 
l'élever  pour  cet  emploi.  On  l'achète  alors  dans  les 
bazars  ,  aux  cris  des  courtiers  qui  annoncent  les 
marchandises  ,  et  on  le  dresse  peu-à-peu  à  recon- 
naître son  chemin.  Aussi ,  dès  que  je  m'offre  pour 
quelque  message  ,  n'hésite-t-on  pas  à  me  confier 
des  lettres  pleines  de  secrets,  et  à  me  charger  de 
nouvelles  agréables.  Je  pars;  mais  bientôt  la  crainte 
vient  troubler  mon  esprit  ;  je  veux  éviter  l'oiseau 
de  proie  sanguinaire ,  le  voyageur  aux  pas  rapides, 
et  le  chasseur  impitoyable  :  j'accélère  donc  mon 
vol,  supportant  une  soif  ardente  dans  les  déserts  du 
midi,  et  une  faim  cruelle  dans  les  lieux  pierreux. 
Si  je  voyais  un  grain  de  froment  ,  je  m'en  éloi- 
gnerais même  ,  malgré  le  besoin  qui  me  presse , 
me  rappelant  le  malheur  affreux  que  le  blé  fit 
tomber  sur  Adam  ;  et,  dans  la  crainte  d'être  exposée 
à  ne  pouvoir  porter  la  lettre  à  sa  destination ,  et  à 
conclure  ainsi  le  marché  de  la  dupe,  j'évite   avec 


(  5,5  ) 
grand  soin  de  tomber  dans  un  filet  caché  sous  la 
poussière,  ou  d'être  prise  dans  des  lacs  perfides. 
Dès  que,  parvenue  au  but  de  mon  voyage,  je  me 
vois  dans  un  lieu  de  sûreté  ,  je  remets  alors  ce 
dont  on  m'a  chargée ,  et  je  me  comporte  de  la  ma- 
nière que  l'on  m'a  apprise.  Tu  vois  actuellement 
pourquoi  je  suis  ornée  d'un  collier:  j'ai  été  créée 
pour  transmettre  de  bonnes  nouvelles,  et  je  re- 
mercie Dieu  de  m'avoir  choisie  pour  cet  emploi. 

VERS. 

Chère  amie,  puis-je  espérer  d'obtenir  de  toi  la 
moindre  faveur,  ou  me  délaisses-tu  î  L'esclave  de 
ta  beauté  ne  cessera  point ,  dans  l'un  ou  dans 
i'autre  cas  ,  de  t'être  fidèle  :  il  n'est  pas  ébranlé 
parles  paroles  du  censeur;  rien  ne  saurait  le  faire 
renoncer  à  sa  noble  passion.  Pour  ton  amour,  je 
n'ai  pas  craint  d'accepter  ce  que  les  monts  les  plus 
élevés  ont  refusé.  Oui  ,  je  serai  fidèle  à  la  foi  que 
je  t'ai  jurée  :  la  fidélité  aux  engagemens  que  l'on 
a  contractés ,  est  le  plus  bel  ornement  qui  puisse 
décorer  Thomme  bien  né. 

Laisse-le  se  livrer  h.  l'amour  de  la  beauté  qui  le 
captive;  car  ton  sort  est  le  même  que  le  sien  ,  ô  toi 
qui  lui  fais  de  cruels  reproches. 


D  3 


{H) 


ALLEGORIE  X\  III. 


L  HIRONDELLE. 


Tandis  que  je  m'entretenais,  avec  la  colombe, 
des  qualités  qui  constituent  la  perfection ,  et  de  ce 
qui  constitue  la  perfection  de  ces  qualités  ,  voilà  que 
j'aperçus  une  hirondelle  qui  voltigeait  autour  d'une 
chaumière  :  Je  suis  étonné,  lui  dis-je  aussitôt,  de  te 
voir  toujours,  auprès  des  maisons,  aspirer  à  l'amitié 
de  l'homme;  ne  serait -il  pas  plus  sage  de  ne 
point  quitter  tes  semblables  ,  et  de  préférer  la 
douce  liberté  des  champs  à  ton  emprisonnement 
dans  nos  demeures  î  Pourquoi  ne  te  fixes-tu  donc 
jam.ais  que  dans  les  endroits  cultivés  et  dans  les 
lieux  qu'habite  l'espèce   humaine  î 

Puisque  ton  esprit  est  si  peu  délié  et  que  ton 
oreille  est  si  dure,  me  répondit-elle,  sache  donc 
quel  est  le  motif  de  ma  conduite ,  et  pourquoi  je  me 
sépare  ainsi  des  autres  oiseaux  :  si  j'ai  abandonné 
mes  pareils  ;  si  j'ai  fréquenté  des  êtres  d'une  autre 
nature  que  la  mienne;  si  j'ai  pris  pour  mon  habi- 
tation les  toits  plutôt  que  les  rameaux  et  le  creux 
des  arbres ,  c'est  qu'à  mes  yeux  il  n'y  a  rien  de  pré- 
férable à  la  condition  d'étranger ,  et  que  je  veux 


(  w  ) 

me  faire  aux  manières  élégantes  de  la  société.  Je  me 
mêle  donc  parmi  des  êtres  qui  ne  sont  j)as  de  mon 
espèce,  précisément  pour  être  étrangère  au  milieu 
d'eux;  et  je  recherche  le  voisinage  de  celui  qui  est 
meilleur  que  moi,  pour  recevoir  l'influence  de  son 
mérite:  je  vis  toujours  en  voyageuse,  et  je  jouis 
ainsi  de  la  compagnie  des  gens  instruits.  On 
traite  d'ailleurs  avec  bonté  celui  qui  est  loin  de 
sa  patrie ,  et  on  l'accueille  d'une  manière  obli- 
geante. Lorsque  je  viens  m'établir  dans  les  mai- 
sons ,  je  ne  me  permets  pas  de  faire  le  moindre 
tort  à  ceux  qui  y  demeurent  ;  je  me  contente  d'y 
bâtir  ma  cellule,  que  je  forme  de  matériaux  pris 
au  bord  des  ruisseaux  ,  et  je  vais  chercher  ma  nour- 
riture dans  des  lieux  déserts.  Jamais  d'injustice  , 
jamais  de  perfidie  envers  celui  auprès  de  qui  je  ré- 
side ;  j'use  au  contraire  avec  Jui  des  règles  les  plus 
exactes  de  la  complaisance  qu'un  voisin  doit  avoir 
pour  son  voisin,  et  cependant  il  ne  pourvoit  point 
à  ma  subsistance  de  chaque  jour.  Comme  j'habite 
dans  les  maisons,  j'augmente  le  nombre  des  gens 
du  logis ,  mais  je  ne  demande  ])oint  à  partager 
leurs  provisions;  aussi  le  soin  que  je  mets  h  m'abs- 
tenir  de  ce  qu'ils  possèdent,  me  concilie  leur  atta- 
chement ;  car  ,  si  je  voulais  prendre  part  à  leur 
nourriture  ,  ils  ne  m'admettraient  point  dans  leurs 
demeures.    Je    suis  auprès    d'eux  lorsqu'ils    sont 

D  4 


{  56  ) 

assemblés  ;  mais  je  m'éloigne  lorsqu'ils  prennent 
leurs  repas  :  je  me  joins  à  eux  dans  les  mo- 
mens  de  leurs  prières ,  jamais  lorsqu'ils  se  ren- 
dent à  la  salle  des  festins  ;  c'est  à  leurs  bonnes 
qualités  que  je  désire  participer,  et  non  à  leurs 
banquets  ;  c'est  leur  état  heureux  que  j'ambi- 
tionne, et  non  leurs  richesses  ;  je  recherche  leur 
mérite ,  et  non  leur  froment  ;  je  souhaite  leur 
amitié,  et  non  leur  grain;  me  conformant,  dans 
ma  conduite,  à  ce  qu'a  dit  celui  à  qui  le  Très- 
Haut  a  daigné  révéler  ses  volontés  (  que  Dieu  lui 
soit  propice  et  lui  accorde  le  salut  I  )  :  «Si  tu  sais 
35  te  priver  des  plaisirs  de  ce  monde,  tu  jouiras  de 
33  l'amitié  de  Dieu  ;  et  si  tu  t'abstiens  scrupuleuse- 
33  ment  de  ce  que  possèdent  les  hommes,  tu  auras 
33  leur  affection.  3i 

VERS. 

Oui  ,  abstiens-toi  scrupuleusement  de  ce  que 
possèdent  les  autres  ,  et  tout  le  monde  t'aimera. 
Ne  vois-tu  pas  l'hirondelle!  elle  ne  touche  jamais 
à  nos  provisions  ;  aussi  la  recevons-nous  dans  nos 
foyers  comme  un  pupille  que  l'on  presse  sur 
son  sein. 


{  V  ) 

J'Aï  entendu  avec  plaisir  ton  éloquent  discours, 
dis-je  alors  à  l'hirondelle  :  que  tu  es  heureuse  I  ta 
conduite  sensée  est  digne  de  louange;  tes  paroles 
sont  sages,  j'en  profiterai.  Adieu. 


ALLÉGORIE  XIX. 


LE    HIBOU. 


Le  hibou  ,  tristement  retiré  dans  une  masure  so- 
litaire, m'adressa,  bientôt  après,  la  parole  en  ces 
termes  :  Vrai  et  sincère  ami ,  ne  te  ûe  pas  au  dis- 
cours de  l'hirondelle  et  n'imite  pas  sa  conduite  ; 
car,  quoiqu'on  ne  la  soupçonne  point  de  se  nourrir 
des  mets  de  votre  table  ,  il  n'en  est  pas  moins 
vrai  qu'elle  participe  à  vos  plaisirs ,  à  vos  joies , 
à  vos  fêtes  ,  et  qu'enfin  elle  habite  au  milieu  de 
vous  :  or,  tu  sais  que  celui  qui  se  ûxe  auprès  d'une 
classe  quelconque  de  gens  ,  en  fait  partie  par  cela 
même,  et  que ,  n'y  fût-il  resté  qu'un  instant,  il  est 
dans  le  cas  d'être  interrogé  sur  ces  personnes.  Tu 
sais  encore  que,  de  même  qu'une  seule  goutte  est 
la  source  éloignée  d'un  torrent  impétueux ,  de 
même  la  société  est  la  source  des  crimes  ;  aussi  ne 
doit-on  pas  y  placer  sa  félicité.  La  paix  et  le  bonheur 
ne  se  trouvent  que  dans  la  retraite  :  ah  I  celui  qui 


(58) 

s'y  réfugie ,  n'a  pas  à  craindre  que  l'envie  l'éloigne 
de  son  emploi.  Suis  donc  mon  exemple  et  imite  mon 
isolement  :  laisse  les  palais  somptueux  et  celui  qui 
y  fait  sa  résidence  ;  les  mets  délicats  et  celui  qui 
s'en  nourrit.  Fais  attention  à  ma  conduite  :  je  ne 
réside  point  dans  vos  demeures  ,  et  je  ne  suis  jamais 
dans  vos  assemblées  ;  mais  un  creux  dans  un  vieux 
mur  est  mon  habitation  solitaire  ,  et  je  préfère ,  pour 
mon  séjour,  des  ruines  à  des  lieux  soignés  par  la 
main  de  l'homme  :  là  ,  loin  de  mes  compagnons , 
de  mes  amis  et  de  mes  proches  ,  je  suis  à  l'abri  des 
tourmens  et  des  peines ,  et  je  n'ai  pas  à  craindre  les 
envieux.  Comment,  en  effet,  celui  dont  l'ha- 
bitation doit  être  un  jour  la  poussière,  peut- il 
demeurer  avec  les  autres  hommes!  Chaque  jour  et 
chaque  nuit  viennent  empiéter  sur  sa  vie  et  la 
détruire  sourdement;  et  il  ne  se  contenterait  pas 
d'une  masure  !  Celui  qui  a  le  bonheur  de  com- 
prendre que  la  vie  ,  qui  paraît  longue ,  est  réelle- 
ment si  courte  ,  et  que  tout  s'avance  vers  la  des- 
truction, celui-là,  au  lieu  de  passer  la  nuit  sur  un 
lit  voluptueux  ,  prendra  pour  sa  couche  une  natte 
dure  et  inégale,  se  contentera  d'un  pain  d'orge 
pour  toute  nourriture,  et  ne  goûtera  que  le  moins 
possible  des  voluptés  du  monde,  en  se  rappelant 
qu'une  partie  des  créatures  sera  placée  dans  le 
paradis,  et  que  l'autre  sera  précipitée  dans  l'enfer. 


(  ^'0  ) 
Pour  moi,  j'ai  jeté  un  regard  sur  la  vie  pré- 
sente ,  et  je  l'ai  vue  en  proie  k  la  dévastation;  j'ai 
tourné  alors  mes  yeux  vers  la  vie  future ,  et  j'ai  vu 
qu'elle  s'approche  rapidement.  Me  rap|)elant  en- 
suite le  compte  terrible  que  Dieu  fera  rendre  au 
jour  de  la  résurrection,  j'ai  médité  sur  l'ame  ,  et 
j'ai  pensé  au  bien  qu'elle  peut  faire  el  au  mal  dont 
elfe  peut  se  rendre  coupable  :  c'est  alors  que ,  réflé- 
chissant sur  ma  situation  et  faisant  une  attention 
sérieuse  à  moi-même,  j'ai  conçu  de  l'éloignement 
pour  un  monde  qui  n'offre  qu'un  grand  vide;  j'ai 
oublié  ce  que  mes  semblaljles  ont  droit  d'attendre 
de  moi,  et  ce  que  j'ai  droit  d'attendre  d'eux;  j'ai 
abandonné  ma  famille  et  mes  biens  ,  et  j'ai  mé- 
prisé les  châteaux  élevés.  Bientôt  la  foi  écartant  de 
la  vue  de  mon  intelligence  le  bandeau  du  doute, 
j'ai  reconnu  que  ni  joie  ni  plaisir  ne  demeure  ; 
que  tout  périt  ,  si  ce  n'est  l'Etre  par  qui  tout 
existe.  Je  me  suis  élevé  à  la  connaissance  de  cet 
Etre  ,  sans  pouvoir  pénétrer  ce  qu'il  est  :  son 
image  adorée  est  tout  ce  qu'aperçoivent  mes 
yeux  ,  et  son  nom  béni  ,  ce  que  prononce  ma 
bouche. 

V  i:  R  s. 

Pour  cette  divine  amie  j'ai  quitté  les  hommes; 
ce  n'est  qu'elle  que  je  désire  ,  qu'elle  seule  h  qui 


(6o) 

je  veux  plaire.  Pour  elle ,  je  m'isole  de  toute  société , 
et,  guidé  par  l'intention  la  plus  droite,  je  m'aban- 
donne à  l'amour  le  plus  pur.  Je  la  verrai ,  je  l'es- 
père ;  mon  amour  ne  sera  point  frustré.  Mes  amis 
ont  réprouvé  la  noble  passion  de  mon  cœur  ,  sans 
connaître  le  sentiment  qui  l'agite.  Si  l'objet  sacré 
de  ma  flamme  otait  le  voile  qui  cache  ses  appas,  la 
pleine  lune  elle-même  en  emprunterait  son  éclat 
argentin.  Je  n'ose  par  respect  nommer  cette  beauté 
divine  que  toutes  les  créatures  étonnées  admirent; 
mais,  lorsque  mon  amour  violent  ne  peut  se 
contenir ,  mes  soupirs  font  entendre  un  de  ses 
attributs. 


JE  saisis  avec  la  plus  grande  avidité  les  avis 
du  hibou ,  et  je  jetai  loin  de  moi  les  vêtemens  de 
l'amour-propre  ;  mais  les  passions  semblaient  me 
dire  :  Reste,  reste  avec  nous. 


^%/\/%,f%/%/\/\/^f\, 


(6,  ) 


ALLliGORlK  XX. 

LE    PAON. 

Je  me  tournai  d'un  autre  coté  ,  et  je  vis  un 
paon ,  oiseau  qui ,  après  avoir  vidé  la  coupe  de  fa 
vanité,  et  s'être  couvert  du  vêtement  de  la  dissimu- 
lation  ,  fut  associé  aux  mallieurs  d'Eblis.  Des  cou- 
leurs variées  embellissent  ses  plumes  ;  mais  sa  vie 
est  en  proie  h  mille  genres  de  douleurs  ,  et  il  ne 
reverra  jamais  le  paradis  (  Dieu  en  sait  la  raison). 
Oiseau  malheureux,  lui  dis-je,  combien  le  sort 
que  le  destin  t'a  réparti  est  différent  de  celiy 
du  hibou  1  le  hibou  porte  son  attention  sur  les 
qualités  intérieures  et  réelles,  et  tu  ne  t'attaches 
qu'à  ce  qui  est  extérieur  ;  tu  te  laisses  tromper  par 
une  folle  sécurité  ,  et  tu  ne  places  ta  joie  que 
dans  ce  qui  est  périssable. 

Faible  mortel  qui  viens  m'insulter,  me  répondit- 
il,  laisse  tes  reproches,  et  ne  rappelle  pas  h  celui 
que  le  chagrin  accable,  ce  qui  lui  a  été  ravi;  car 
il  est  dit  dans  la  tradition  :  Aye:^  pitié  de  l'homme 
illustre  qui  a  perdu  son  rang,  et  de  l'homme  riche  qui 
est  devenu  pauvre.  Je  voudrais  que  tu  m'eusses  vu 
lorsque  je  me  promenais  dans  Eden  auprès  des  ruis- 
seaux limpides  et  des  grappes  vermeilles  qui  J'cm- 


(  62  ) 

bellissent,  et  que  ,  le  parcourant  dans  tous  les 
sens ,  j'entrais  dans  ses  palais  superbes  et  jouissais 
de  la  compagnie  de  ses  échansons  ravissans  et  de 
ses  houris  voiupteuses.  Louer  Dieu  était  mon  breu- 
vage ;  célébrer  sa  sainteté,  mon  aliment:  je  tins 
toujours  fa  même  conduite  ,  jusqu'à  ce  que  le  fatal 
destin  poussa  vers  moi  Eblis,  qui  me  couvrit  du 
vêtement  de  l'hypocrisie  ,  et  changea  en  défauts 
mes  plus  belles  qualités.  J'eus  d'abord  horreur  de 
ce  qu'il  me  proposa  ;  mais  ,  hélas  !  le  destin  plonge, 
lorsqu'il  le  veut ,  dans  le  malheur  et  dans  l'infor- 
tune ,  et  fait  fuir  les  oiseaux  de  leurs  nids  pour 
les  livrer  au  chasseur. 

Quant  à  Eblis  ,  il  marchait  fièrement,  revêtu  des 
habits  célestes  de  la  faveur  de  Dieu  ;  mais  son 
mauvais  destin  finit  par  le  porter  à  refuser  avec 
orgueil  de  se  prosterner  devant  Adam.  C'est  pré- 
cisément dans  l'événement  qui  suivit  ce  refus  , 
que  j'eus  ,  par  malheur,  quelques  relations  avec 
cet  ange  rebelle.  Il  m'entraîna  dans  le  crime  ,  me 
déguisant  ce  qu'il  y  avait  de  pervers  dans  son  des- 
sein; et,  pour  tout  dire,  je  lui  servis  d'introduc- 
teur  dansEden  ,  tandis  que,  de  son  côté,  le  serpent 
machinait  pour  l'y  faire  entrer.  Après  l'événement, 
Dieu  me  précipita  du  séjour  de  la  gloire  dans 
la  demeure  de  l'ignominie  ,  avec  Adam  ,  Eve  ,  Eblis 
et  le  serpent,  en  me  disant  :  Voilà  la  récompense 


(63  ) 
de  celui  qui  sert  de  guide  pour  une  mauvaise 
action  ,  et  le  salaire  que  l'on  mérite  j^our  avoir 
fréquenté  les  médians.  Dieu  me  laissa  mon  plu- 
mage nuancé  de  mille  couleurs,  pour  que  cet  orne- 
ment, me  rappelant  les  douceurs  de  la  vie  que  je 
menais  dans  Kden  ,  augmentât  mes  regrets  ,  mes 
désirs ,  et  mes  gémissemens  ;  mais  il  plaça  les  signes 
de  sa  colère  sur  mes  pattes ,  afin  qu'en  y  jetant  sans 
cesse  des  regards  involontaires,  je  me  ressouvinsse 
de  la  violation  de  mes  engagemens.  Que  j'aime  ces 
vallées  ,  où  tous  les  charmes  de  la  nature  sem- 
blent être  réunis  pour  donner  une  idée  de  ce  lieu 
d'où  j'ai  été  chassé,  et  d'où  mon  destin  malheureux 
m'a  éloigné  pour  toujours  1  Les  jardins  agréables 
me  font  souvenir  des  prairies  printanières  de  mon 
ancienne  habitation  ,  sujet  des  larmes  abondantes 
qui  coulent  de  mes  yeux  ;  et  c'est  alors  sur-tout 
que  je  me  reproche  ma  faute  ,  et  que  je  m'écrie 
en  pensant  à  mon  malheur  : 

VERS. 

Séjour  délicieux,  puis -je  espérer  de  te  revoir 
jamais  !  goûterai-je  encore  dans  ton  sein  un  instant 
de  sommeil  paisible  I  Habitans  de  ces  lieuxfortunés  , 
lorsqu'au  moment  cruel  de  la  séparation,  je  vous 
dis  un  dernier  adieu,  je  fus  sur  le  point  de  inourir 


(64) 
de  douleur  et  de  tristesse  ;  n'aurez-vous  donc  jamais 
compassion  de  mon  malheureux  éiatî  Vous  avez 
éloigné  le  sommeil  de  mes  paupières,  et  vous  m'avez 
uni  de  la  manière  la  plus  étroite  à  l'affliction  :  mon 
corps  est  loin  de  vous,  mais  mon  esprit  est  au 
milieu  de  vos  tentes  ;  pourquoi  ne  pas  permettre  à 
mon  corps  de  s'y  réunir  à  mon  esprit!  Lorsque  je 
me  rappelle  les  nuits  délicieuses  que  j'ai  passées 
avec  ces  objets  ravissans ,  sous  des  pavillons  pro- 
tecteurs ,  si  l'abondance  de  mes  larmes  ne  soula- 
geait ma  peine  ,  je  mourrais  consumé  de  désir.  J'ai 
cru  ,  dans  mes  rêveries  ,  que  vous  me  promettiez  de 
venir  voir  votre  ami  fidèle;  hélas  1  mon  ardeur  en 
a  été  accrue,  et  mon  désir  augmenté.  Si  je  dois 
cet  éloignement  pénible  à  une  faute  dont  j'ai  pu 
me  rendre  coupable,  que  ma  situation  malheureuse 
soit  aujourd'hui  mon  meilleur  intercesseur I  Mais, 
hélas  1  ces  doux  momens  sont  passés  pour  tou- 
jours, et  mon  partage  doit  être  la  soumission  et  la 
modestie. 


Pour  moi,  affligé  des  malheurs  du  paon,  je 
répandis  des  larmes  sur  ses  peines.  Je  sens,  en 
effet,  que  rien  n'est  plus  douloureux  que  l'absence, 
quand  on  a  joui  des  avantages  de  la  réunion  la 
plus  douce  ;   et  que  rien  n'est  plus  triste  que  le 


(  <>^  ) 

voife  qui  cache  des  appas  adorés,  après  qu'on  a  eu 
le  bonheur  de  les  contempler  à  découvert. 


ALLKGORÏK  XXï. 


LA    PERRUCHE. 


Tandis  que  Je  paon,  tantôt  soupirait  en  pro- 
menant la  vue  sur  ses  phimes,  qui  lui  rappe- 
laient son  bonheur,  tantôt,  en  jetant  des  regards 
involontaires  sur  ses  pattes,  poussait  des  cris  plain- 
tifs et  douloureux;  voilà  que  je  vis  à  coté  de  lui 
une  perruche,  dont  la  robe  verte  figurait  celle  d'un 
chérif.  Elle  s'adressa  au  paon  ,  et  lui  dit  ces  paroles 
éloquentes  :  Jusques  à  quand  garderas-tu  cet  air 
sombre  !  Ton  plumage  superbe  ressemble  h  la  pa- 
rure d'une  jeune  mariée  ;  mais,  en  réalité,  tu  es  com- 
})arable  à  l'obscurité  du  sépulcre.  Ton  jugement 
faux  t'a  amené  au  point  d'être  chassé  du  lieu  de  dé- 
lices où  tu  étais  ;  et  tu  ne  t'es  vu  traité  de  la  sorte 
que  pour  avoir  usé  de  perfidie  envers  l'homme, 
qui  habitait  cette  demeure  sacrée,  et  pour  avoir 
troublé  un  bonheur  qui  devait  être  inaltérable.  Si 
tu  pensais  h,  ton  bannissement  ,  et  à  l'homme  , 
qui  en  a  été  la  cause ,  je  ne  doute  pas  que  tu 
ne  t'occupasses  alors  à  réparer  ta  faute,  et  non  h 

E 


(  66  ) 
te  divertir  dans  un  jardin.  Puisque  tu  t'es  rendu 
coupable  envers  Adam,  dans  Eden ,  il  faut  donc 
actuellement  que  tu  travailles  à  t'excuser  ;  que  tu 
te  joignes  à  lui,  lorsque,  dans  la  retraite,  il  adresse 
h.  Dieu  de  ferventes  prières  pour  implorer  sa  clé- 
mence, et  que,  dans  l'espérance  de  visiter  un  jour 
les  demeures  célestes  avec  le  père  des  hommes, 
tu  avoues  ta  faute ,  que  tu  as  d'abord  refusé  de 
reconnaître  :  car  il  retournera  immanquablement 
à  son  premier  état,  et  les  jours  de  bonheur  lui 
seront  rendus.  Voici,  en  effet,  ce  que  l'on  dit  à 
Adam,  lorsque,  chassé  d'Eden,  il  fut  placé  dans  le 
champ  du  monde  :  Sème  aujourd'hui  ce  qui  doit 
être  récolté  demain;  peut-être  encore  n'en  re- 
cueiileras-tu  pas  le  fruit  :  alors  ,  quand  tu  auras 
achevé  de  semer,  et  que  tes  plantes  auront  pris  de 
l'accroissement ,  tu  retourneras  dans  ton  heureux 
séjour ,  en  dépit  de  l'ennemi  et  de  l'envieux.  Celui 
qui  t'imitera  dans  ta  pénitence  ,  sera  fortuné  ;  et 
celui  qui  se  comportera  comme  toi ,  recevra  pour 
sa  récompense  la  demeure  de  l'éternité. 

Ne  vois-tu  pas  combien  je  suis  estimée  lorsque 
mes  idées  s'élèvent  et  s'étendent  î  Méprisant  ce 
qui  occupe  les  autres  oiseaux  ,  j'ai  considéré  le 
monde  et  ses  créatures,  et  j'ai  vu  que  l'homme 
est  le  seul  modèle  que  je  doive  me  proposer. 
En  effet ,  Dieu  a  créé  tous  les  êtres  pour  les  hommes, 


(  f>7  ) 
et  c'est  pour  lui  qu'il  a  créé  les  hommes;  il  se  les 
est  attachés  ]\ir  des  liens  iiulissoluhlcs  ,  et  les  a 
combles  des  faveurs  les  plus  si^nalccs.  Aussi, 
cpioique  ma  nature  soit  bien  clirtérente,  ciiercliû-je 
h  me  rapprocher  de  leurs  habitudes,  sur-tout  en 
imitant  leur  laniiacre  ,  et  en  me  iKHUTissant  des 
mêmes  alimens.  Mon  Pjonheur  est  de  leur  adresser 
la  parole;  je  ne  recherche  qu'eux;  et  ce  sont  les 
efforts  que  je  fais  pour  me  rendre  semblable  a  eux, 
qui  me  concilient  l'estime  qu'ils  ont  pour  moi;  car 
ils  me  considèrent  comme  un  commensal,  et  nous 
sommes  unis  d'une  amitié  réciproque.  Conformant 
mes  actions  aux  leurs,  je  prie  comme  ils  ]:)rient,  je 
rends  grâce  comme  ils  rendent  grâce  ;  et  j'ai  droit 
d'espérer  qu'au  jour  où  ils  paraîtront  devant  Dieu  , 
ils  se  souviendront  de  moi  ,  me  donneront  des 
éloo^es  ,  et  qu'en  conséquence,  après  avoir  été  du 
nombre  de  leurs  serviteurs  dans  le  monde  présent, 
je  serai  aussi  leur  esclave  dans  l'autre. 

VERS. 

Cherche  h  ine  connaître,  et  tu  verras  que  je  suis 
du  nombre  de  ceux  qui  sont  réellement  tels  qu'ils 
paraissent  être.  L'objet  de  ma  passion  est  une 
beauté  qui  possède  des  perfections  éclatantes  et 
sublimes,  que  la  pureté  et  fa  sainteté  décorent,  et 

E    2 


(68) 
dont  le  rang  suprême  est  respecté  et  béni.  Oui, 
je  l'espère,  mes  vœux  seront  exaucés;  Mahomet, 
la  plus  excellente  des  créatures ,  et  dont  les  paroles 
ne  sauraient  être  trompeuses  ,  assure  que  l'amant 
sera  uni  à  sa  maîtresse. 


Lorsque  la  perruche,  en  exaltant  ses  propres 
qualités,  se  fut  ainsi  placée  dans  le  cercle  des 
êtres  les  plus  éminens ,  je  me  dis  à  moi-même  :  Je 
n'avais  jamais  étudié  l'état  emblématique  des  ani- 
maux ;  mais,  que  vois-je  aujourd'hui  l  ils  veillent, 
tandis  que  je  suis  dans  le  sommeil  le  plus  profond 
de  la  tiédeur  et  de  l'indifférence.  Pourquoi  ne 
point  m'approcher  de  la  porte  du  miséricordieux! 
peut-être  qu'on  me  permettrait  l'accès  auprès  de 
ce  Dieu  clément ,  et  qu'il  dirait  ces  consolantes  pa- 
roles :  «  Que  celui  qui  arrive  soit  le  bien-venu  ; 
»  je  pardonne  sa  faute  à  celui  qui  se   repent.  :>:> 


'^.'%/%,  X'%^'^  -%/%/^/ 


(  ^>9  ) 


ALLKGOHIF.  XXII. 

LA    CHAUVE-SOURIS. 

La  chauve  -  souris  ,  engourdie  et  tremblante, 
m'adressa  bientôt  après  ces  mots  :  Ne  te  mêle  point 
dans  la  foule,  si  tu  veux  participer  aux  faveurs  de 
la  beauté  divine  que  tu  chéris.  Jadis  Cliam  erra 
long  -  temps  autour  de  Fasyle  sacré  ;  mais  Dieu 
n'en  j)erniit  l'entrée  qu'à   Sem. 

VERS. 

Ce  ne  sont  point  les  lances  noires  qui  nous 
rendent  maîtres  de  l'objet  de  notre  désir;  ce  n'est 
point  le  tranchant  du  glaive  qui  nous  fait  atteindre 
aux  choses  élevées. 


Il  faut  consacrer  des  instans  à  la  retraite  ,  et 
passer  les  nuits  obscures  en  ferventes  j)rières.  Fais 
attention  h  ma  conduite:  dès  que  le  soleil  se  lève, 
je  me  retire  dans  mon  trou  solitaire;  et  là,  mon 
esprit  libre  de  tout  soin  se  livre  à  de  douces  pen- 
sées. Tant  que  dure  le  jour,  isolée,  loin  des  regards, 
au  fond  de  nia  cellule  ,  je  ne  vais  voir  personne, 
personne  ne  vient  me  voir  ;  cependant  les  gens 

E  3 


(  70  ) 
éclairés  m'aiment  et  me  considèrent.  Mais  lors- 
que la  nuit  a  répandu  ses  ombres  sur  la  terre,  je 
sors  de  ma  retraite ,  et  je  choisis  ce  temps  pour 
veiller  et  pour  agir.  C'est  au  sein  des  ténèbres 
que  la  porte  sacrée  s'ouvre  ,  que  le  voile  importun 
est  écarté,  et  qu'à  l'insu  des  rivaux  jaloux,  la 
bien-aimée  reçoit  ses  favoris  en  tête-k-tête.  A  i'ins- 
tant  où  les  amans  de  cette  céleste  amie  ,  et  les 
malheureux  relégués  sur  cette  terre  d'exil,  baignent 
de  larmes  leurs  paupières  brûlantes  ,  elle  entr'ouvre 
îe  rideau  et  se  montre  sur  ce  seuil  béni.  Elle  appelle 
elle-même  ses  adorateurs,  et  leur  accorde  des  en- 
tretiens secrets.  C'est  alors  qu'ils  lui  adressent  de 
ferventes  prières  qu'interrompent  leurs  sanglots, 
et  qu'ils  ont  le  bonheur  d'entendre  ces  douces 
paroles  :  Messager  céleste,  endors  celui-ci,  réveille 
celui-là.  Annonce  à  l'amant  qui  a  celé  l'ardeur  dont 
il  brûlait  pour  moi,  qu'il  peut  maintenant  la  dé- 
couvrir avec  confiance  ;  dis  à  cet  amant  altéré  que 
la  coupe  est  remplie  ;  apprends  à  celui  que  son 
amour  a  jeté  dans  l'agitation  la  plus  vive,  que  le 
moment  délicieux  de  l'union  avec  l'objet  de  ses 
désirs  est  arrivé. 

VERS. 

O  toi  I  dont  la  noble  passion  n'a  que  moi  pour 
objet,  que  des  reproches  ne  t'éloignent  pas  du  seuil 


(  7-  ) 
de  ma  porte  ;  les  engagcinens  doivent  être  stables, 
et  l'amour  doit  être  constant.  La  renommée  de  ma 
puissance ,  de  ma  beauté  et  des  faveurs  que  j'ac- 
corde ,  s'est  répandue  par  tout  l'univers ,  et  les  pèle- 
rins ont  commencé  leur  voyage.  Si  tu  te  soumets  à. 
ma  dignité  suprême,  les  souverains  et  les  monarques 
se  soumettront  avec  respect  à  la  tienne.  O  amans  î 
hâtez-vous  ;  voilà  le  coursier  et  l'hippodrome. 


Petit  et  faible  oiseau ,  dis-je  alors  à  la  chauve- 
souris,  explique-moi  pourquoi,  lorsque  le  soleil 
paraît  sur  l'horizon  ,  tu  cesses  de  voir,  et  ne  re- 
couvres la  vue  qu'au  moment  de  son  coucher;  cet 
astre ,  de  qui  les  autres  êtres  reçoivent  la  lumière , 
te  rendrait-il  aveugle  î 

Pauvre  mortel  ,  me  répondit  -  elle  ,  c'est  que , 
jusqu'à  présent ,  je  ne  me  suis  occupée  qu'à  con- 
naître la  voie  droite,  et  que  je  n'ai  pas  encore  acquis 
les  vertus  qui  en  méritent  l'entrée:  celui  qui  est 
dans  cet  état  d'investigation  et  de  crainte  ,  est 
ébloui  par  la  lueur  des  astres  du  spiritualisme; 
mais  celui  cjui  possède  les  vertus  de  la  vie  inté- 
rieure ,  soutient  l'aspect  des  mystères  que  Dieu 
veut  bien  lui  communiquer.  Mon  état  de  faiblesse , 
d'hésitation  et  de  doute ,  tient  à  ce  que  je  ne  remplis 
qu'imparfaitement  mes  devoirs;  voilà  pourquoi  je 

E  4 


(  72  ) 
cache  mes  imperfections  durant  le  jour  ,  en  me  dé- 
robant aux  regards.  Mais  lorsque  la  nuit  enveloppe 
Ja  terre  de  ses  ombres ,  je  parle  en  secret  et  avec 
humilité  à  mon  amie,  qui,  touchée  de  ma  misère, 
daigne  me  retirer  généreusement  de  l'état  d'abjec- 
tion où  je  suis  plongée.  La  première  marque  de 
bonté  que  cette  céleste  maîtresse  m'a  donnée  et  la 
prejnière  faveur  qu'elle  a  accordée  à  mes  humbles 
j)rières ,  c'est  de  m'avoir  assigné  la  nuit  pour  le 
temps  du  plus  doux  tête-à-tête  ,  en  me  permet- 
tant de  me  réunir  alors  à  ses  amans  ,  et  d'élever 
mes  regards  vers  elle.  Aussi,  lorsque  ces  précieux 
înstans  sont  passés  ,  fermé-je  les  yeux  pour  ne 
point  voir  mes  rivaux.  Il  est  d'ailleurs  bien  juste  que 
celui  qui  a  veillé  durant  la  nuit,  dorme  pendant  le 
jour  ;  et  ce  serait  un  crime  pour  un  œil  qui  a  joui  de 
ïa  vision  divine,  de  se  tourner  vers  un  autre  objet. 

VERS. 

Un  cœur  qui  se  consume  d'amour  pour  sa 
céleste  amie  ,  ne  doic  palpiter  pour  aucune  autre 
maîtresse.  Pourrais-tu  aimer  cette  beauté  divine, 
et  adresser  ensuite  des  vœux  à  une  autre  qu'elle! 
ne  sais-tu  donc  pas  que  seule  dans  le  monde  elle 
est  digne  d'être  aiméeî  Mon  frère,  puisque  celle 
que  tu  aimes  est  incomparable,  et  si  tu  l'aimes  vé- 
rîlablement ,  sois  sans  égal  dans  ton  amour. 


(  7^  ) 


ALLEGORIE  XXIll. 


LE    COQ. 


Ceux  qui  jouissent  des  faveurs  particulières  de 
Dieu  ,  me  dis-je  alors  à  moi-même  ,  sont  les  vrais 
heureux  ;  ceux  dont  l'occupation  est  la  prière  , 
jnéritent  d'être  distingués  des  autres  ,  et  il  est  im- 
possible que  les  indiffèrens  s'approchent  jamais  de 
cette  divine  maîtresse.  J'étais  dans  ces  réflexions  , 
lorsque  le  coq  m'adressa  ces  paroles  :  Combien  de 
fois  ne  t'appelé-je  point  ii  remplir  les  devoirs  reli- 
gieux, tandis  que  tu  es  dans  l'aveuglement  des 
passions  et  dans  l'illusion  des  sens  1  Je  me  suis 
engagé  à  faire  l'annonce  de  la  prière,  réveillant 
ainsi  ceux  qui  sont  plongés  dans  un  sommeil  si  pro- 
fond qu'ils  paraissent  comme  morts,  et  réjouissant 
ceux  qui  invoquent  leur  Dieu  avec  humilité  et  avec 
crainte.  Tu  peux  observer  dans  mes  actions  des 
aïléorories  charmantes  :  le  battement  de  mes  ailes 
indique  qu'il  fiut  se  lever  pour  faire  la  prière ,  et 
l'éclat  de  ma  voix  sert  à  réveiller  ceux  qui  sont 
endormis;  j'agite  mes  aifes  pour  annoncer  Je  bon- 
heur, et  fais  entendre  mon  chant  pour  appeler  au 
temple  du  salut.  Sï  fa  chauve-souris  s'est  chargée 


(  74  ) 
de  l'emploi  de  la  nuit ,  elle  dort  tout  le  jour  du  som- 
meil le  plus  profond  ,  en  se  dérobant  par  crainte 
aux  regards  des  hommes;  quant  à  moi,  je  ne 
cesse,  ni  le  jour  ni  la  nuit,  d'exercer  les  fonctions 
de  mon  ministère,  et  je  ne  m'en  dispense  ni  publi- 
quement ni  en  secret.  Je  partage  les  devoirs  du 
service  de  Dieu  entre  les  différentes  heures  de  la 
journée ,  et  il  ne  s'en  passe  aucune  que  je  n'aie 
une  obligation  religieuse  à  remplir  :  c'est  moi  qui 
te  fais  connaître  les  heures  fixées  pour  la  prière  ; 
aussi  ,  puis-je  dire  qu'on  ne  m'achèterait  pas  ce 
que  je  vaux ,  quand  même  on  donnerait  de  moi 
mon  poids  en  rubis.  En  outre,  plein  de  tendresse 
pour  mes  petits ,  je  suis  toujours  auprès  d'eux  ; 
et  au  milieu  des  poules  ,  l'amour  est  le  seul  objet 
qui  m'occupe.  Me  conformant  aux  règles  d'une 
affection  véritable ,  je  ne  prends  jamais  sans  mes 
compagnes  le  moindre  aliment  ni  la  moindre  bois- 
son :  si  je  vois  un  grain  ,  loin  de  m'en  emparer , 
je  le  leur  fais  apercevoir  et  les  engage  à  en  faire 
leur  nourriture  ;  comme  aussi  je  les  invite  à  man- 
ger ,  lorsque  je  sens  l'odeur  de  ce  qu'on  a  préparé 
pour  nous.  Du  reste,  obéissant  aux  gens  de  la  mai- 
son, je  supporte  avec  patience  ce  qu'ils  me  font 
souffrir:  je  suis  leur  tendre  ami,  et  ils  ont  la  cruauté 
d'immoler  mes  petits  ;  j'agis  pour  leur  utilité  ,  et 
ils  m'enlèvent  mes  fidèles  suivantes.  Tels  sommes 


(75) 

qualités  et  mon  bon  naturel.  D'ailleurs,  Dieu  me 
suffit. 

V  ERS. 

Invoque  Dieu  ,  et  tu  seras  à  l'abri  de  toute 
crainte;  espère  en  lui,  et  tu  trouveras  le  bonheur. 
Mais,  hélas!  quel  est  celui  qui  prête  une  oreille 
attentive  à  ce  que  je  dis  ,  qui  sait  en  saisir  le 
véritable  sens  et  le  graver  dans  sa  mémoire  î 


ALLEGORIE  XXIV. 

LE    CANARD. 

Le  canard  ,  en  se  jouant  dans  Peau  ,  adressa 
bientôt  après  la  parole  au  coq  :  O  toi  dont  les 
pensées  sont  viles  et  rampantes,  lui  dit-il,  tu  ne 
saurais  t'élever  dans  l'air  comme  le  reste  des  oi- 
seaux, ni  te  conserver  en  évitant  le  malheur;  tu  es 
comme  un  mort  qui  ne  peut  parcourir  la  terre,  et 
ton  séjour  constant  dans  un  même  lieu  est  la  seule 
cause  de  tes  maux.  La  bassesse  de  tes  inclinations 
te  fait  rechercher  les  ordures  ;  et,  satisfait  de  recueil- 
lir la  rosée,  tu  laisses  la  pluie  abondante.  Ignores-tu 
donc  que  celui  qui  ne  voyage  pas ,  ne  saurait  obte- 
nir des  bénéfices  dans  son  négoce,  et  que  celui  qui 


(76  ) 
reste  sur  la  grève,  ne  recueillera  jamais  des  perles  î 
Si  ton  mérite  spirituel  était  plus  réel,  si  ta  foi  était 
plus  vive,  tu  volerais  dans  l'atmosphère  et  tu 
te  soutiendrais  sur  l'onde.  Vois  comment  ,  maître 
de  mes  désirs,  et  disposant  de  l'air  et  de  l'eau  ,  je 
marche  sur  la  terre  ,  je  nage  sur  les  flots  roulans, 
et  je  vole  librement  dans  les  régions  éthérées. 
C'est  sur-tout  La  mer  qui  est  le  siège  de  ma  puis- 
sance et  la  mine  de  mon  trésor  :  je  m'élance  dans 
son  onde  limpide  et  transparente  ;  je  découvre  les 
perles  précieuses  qu'elle  recèle ,  et  je  pénètre  les 
mystères  et  les  merveilles  de  Dieu.  Celui-là  seui 
connaît  ces  choses,  qui  s'y  applique  sérieusement; 
mais  l'indifférent  qui  demeure  sur  le  riva2;e  ,  ne 
peut  prétendre  qu'à  l'écume  amère.  Celui  qui,  en 
se  plongeant  dans  cet  océan,  ne  réfléchira  pas  h 
sa  profondeur  incalculable ,  sera  submergé  dans 
ses  gouffres  ,  par  Je  choc  impétueux  des  flots. 
L'homme  prédestiné  au  bonheur  monte  l'esquif 
de  la  bienveillance  de  sa  divine  amie ,  déploie  les 
voiles  de  ses  supplications,  les  orientant  de  ma- 
nière à  recevoir  le  souffle  du  zéphyr  protecteur; 
et  après  avoir  franchi  les  ténèbres  épaisses  qui 
cachent  les  mystères,  il  fixe  enfin  le  câble  de  l'es- 
pérance ,  par  le  moyen  des  attractions  de  la  divi- 
nité ,  au  confluent  des  deux  mers  de  l'essence  et 
des  attributs  ,  et  parvient  ainsi  à  la  source  même 


{  77  ) 
de  l'existence,  où  il  s'abreuve  d'une  eau  plus  douce 
que  le  miel  le  plus  pur. 

viens. 

O  toi  qui  veux  parvenir  aux  plus  hauts  degrés 
du  spiritualisme ,  tu  acquerras  difficilement  cette 
perfection  à  laquelle  tu  aspires.  Si  tu  avances  ,  tu 
seras  bientôt  obligé  de  te  soumettre  à  l'anéantis- 
sement le  plus  complet,  ^  cet  anéantissement  qui 
ne  peut  devenir  doux  que  pour  ceux  à  qui  Dieu  a 
donné  une  idée  de  ce  qu'il  réserve  à  ses  favoris.  La 
pointe  des  piques  défend  l'approche  de  cette  cé- 
leste maîtresse  :  telles  sont  ces  citadelles  élevées, 
autour  desquelles  les  lances  rembrunies  forment 
un  rempart  redoutable.  Avant  de  goûter  la  dou- 
ceur du  miel,  il  faut  endurer  une  piqûre  aussi 
cuisante  que  la  blessure  des  flèches.  Que  de 
gens  d'une  naissance  illustre  errent  autour  de 
cet  asyle  sacré  !  Ils  supportent  avec  patience  les 
peines  amères  attachées  à  leur  noble  passion  ;  ils 
jeûnent,  ils  passent  les  nuits  obscures  en  humbles 
prières;  la  violence  du  désir  anéantit  leur  esprit, 
une  ardeur  brûlante  consume  leur  corps:  mais, 
hélas  !  le  divin  amour  n'aperçoit  encore  dans  leur 
cœur  qu'un  vide  affreux.  Renonce  donc  aux  de- 
meures  des    braves   qui   ont  vaincu    généreuse- 


(78) 
ment  leurs   passions ,  si  tu   ne  peux  vaincre  les 
tiennes. 


ALLÉGORIE  XXV. 


L  ABEILLE. 


Quelle  prétention!  s'écria  aussitôt  l'abeille. 
Ce  que  le  canard  a  dit  de  ses  courses  n'est  point 
vrai,  et  cet  oiseau  en  a  imposé.  L'homme  vraiment 
religieux  est  bien  différent;  son  mérite  paraît  d'une 
manière  évidente,  sans  qu'il  affecte  aucune  jac- 
tance, et  la  pureté  de  son  intérieur  se  manifeste 
par  ses  actions  les  plus  secrètes  :  d'ailleurs  ,  celui 
qui  ne  s'enorgueillit  point,  quelque  droit  qu'ii  en 
ait ,  ajoute  le  plus  grand  prix  à  son  mérite.  Ne 
dis  donc  jamais  une  parole  que  ton  action  dé- 
mente ,  et  n'élève  pas  un  fils  que  ta  race  renie- 
rait. Sache  connaître  le  prix  des  mets  sains  et 
légers  et  des  boissons  pures  et  naturelles  :  vois, 
en  effet ,  comme  ma  dignité  augmente  et  s'ac- 
croît ,  et  comme  mon  mérite  se  perfectionne, 
lorsque  je  suis  à  portée  de  prendre  une  nourriture 
excellente  et  de  me  désaltérer  dans  une  eau  lim- 
pide. Dieu  aurait-il  daigné  m'inspirer,  comme  le 
Prophète  l'assure  dans  le  Coran,  si  je  ne  me  fusse 


(  79  ) 
nourrie  de  mets  permis  ;  si  je  ne  me  fusse  attachée 
aux  qualités  les  plus  nobles  ,  ])()ur  marcher  en- 
suite avec  humilité,  ainsi  que  les  amis  de  Dieu,  dans 
la  voie  du  Seigneur ,  et  le  remercier  de  ses  bienfaits  î 
Je  construis  ma  ruche  dans  les  collines;  je  me 
nourris  de  ce  qu'on  peut  prendre  sans  endomma- 
ger les  arbres,  et  de  ce  qu'on  peut  manger  sans  le 
moindre  scrupule.  Aucun  architecte  ne  pourrait 
imiter  la  construction  de  ma  cellule  ;  Euclide 
lui  -  même  admirerait  la  forme  régulière  de  mes 
alvéoles  hexagones.  Je  me  pose  sur  les  fleurs 
et  sur  les  fruits  ;  et  sans  jamais  manger  aucun 
fruit  ni  gâter  aucune  fleur,  j'en  retire  seulement 
une  substance  aussi  légère  que  la  rosée;  con- 
tente de  ce  faible  butin  ,  je  reviens  ensuite  à. 
ma  ruche.  Là,  faisant  trêve  à  mon  travail,  je  me 
livre  alors  à  mes  réflexions,  et,  dans  mes  prières, 
j'offre  constamment  à  Dieu  le  tribut  de  ma  recon- 
naissance. Instruite  par  l'inspiration  divine ,  je 
m'abandonne,  dans  mes  travaux,  à  la  grâce  qui 
m'a  été  prédestinée;  ma  cire  et  mon  miel  sont  le 
produit  de  ma  science  et  de  mon  travail  réunis. 
La  cire  est  le  résultat  des  peines  que  je  me  donne; 
le  miel  est  le  fruit  de  ce  qu'on  m'a  enseigné  :  la 
cire  éclaire;  le  miel  guérit:  les  uns  recherchent 
la  lumière  que  ma  cire  procure  ,  les  autres  le 
remède  salutaire  que  leur  offre  Ja  douceur  de  mon 


(8o) 

miel  ;  mais  je  n'accorde  aux  premiers  l'utilité 
qu'ils  désirent  ,  qu'après  leur  avoir  fait  sentir 
l'amertume  de  mon  aiguillon,  et  je  ne  donne 
mon  miel  aux  seconds  ,  qu'après  leur  avoir 
opposé  une  résistance  vigoureuse.  Si  l'on  veut 
m'arracher  de  force  mes  trésors ,  je  les  défends 
avec  ardeur  contre  ies  attaques,  au  péril  même 
de  ma  vie,  en  me  disant:  Courage,  6  mon  amel 
J'adresse  ensuite  ces  mots  à  celui  qui  veut  me  faire 
sortir  du  jardin  que  j'habite  :  Suppôt  d'enfer ,  pour- 
quoi viens-tu  me  tourmenter  ! 

"Si  tu  recherches  les  allégories  ,  ma  situation 
t'en  offre  une  bien  instructive  :  réfléchis  que  tu  ne 
peux  jouir  de  mes  faveurs  ,  qu'en  souffrant  avec 
patience  la  blessure  de  mon  aiguillon. 

VERS. 

Supporte  l'amertume  de  mes  dédains,  toi  qui 
desires  t'unir  a  moi;  ne  pense  qu'à  mon  amour, 
et  laisse  celui  qui  follement  voudrait  l'éloigner 
de  moi  et  oserait  insulter  à  ta  peine.  Si  tu  veux 
vivre  de  cette  vie  spirituelle  que  tu  ambitionnes, 
sache  mourir  en  devançant  l'heure  fixée  par  le 
destin.  Qu'elle  est  difficile  ,  la  voie  étroite  de 
l'amour  1  pour  s'y  engager,  il  faut  briser  tous  les 
liens  qui  nous  retiennent  au  monde.  Mais  ces 
peines  qui  paraissent  si  amères  ,   sont  cependant 


(  î^l  ) 

douces,  et  l'amour  rend  léger  ce  qu'il  y  a  de  plus 
pesant. 

Si  tu  tends  au  même  but  que  nous,  sache  saisir 
les  allégories  qui  te  sont  offertes  :  si  tu  les  com- 
prends, avance;  sinon  ,  reste  où  tu  es. 


ALLÉGORIE  XXVI. 

LA    BOUGIE. 

La  i)Ougie,  en  proie  h.  la  douleur  que  lui  faisait 
ressentir  un  feu  dévorant,  répandait  des  larmes 
en  abondance  et  faisait  entendre  des  plaintes  dou- 
loureuses. A  ces  gémissemens  ,  l'abeille ,  touchée 
de  compassion,  prêta  une  oreille  attentive,  et  la 
bougie  lui  adressa  ces  paroles  :  Pourquoi  faut -il 
que  la  fortune  contraire  m'éloigne  à  jamais  de  toi 
qui  es  ma  mère,  puisque  je  te  dois  l'existence,  et 
qui  es  ma  cause,  puisque  je  suis  ton  effet.  Hélas  ! 
on  employa  le  feu  pour  nous  arracher  de  ta  de- 
meure ,  moi  et  le  miel  mon  frère  £t  mon  compa- 
gnon. J'étais  avec  lui  dans  un  même  asyïe  ;  la 
flamme  vint  nous  en  chasser,  et,  détruisant  l'al- 
liance qui  nous  unissait,  mettre  entre  nous  un  im- 
mense intervalle.  Mais  ce  n'était  pas  encore  assez 
de  cette  cruelle  séparation  I  on  me  livre  de  nouveau 

F 


(    82    ) 

à  la  violence  du  feu  ;  et ,  quoique  je  ne  sois  pas 
criminelle,  mon  cœur  est  brûlé,  et  mon  corps 
est  dans  l'esclavage.  A  la  lueur  que  je  produis  en 
avançant  vers  ma  destruction  ,  les  amans  se  fami- 
liarisent ,  et  les  sofis  se  livrent  à  leurs  méditations. 
Répandre  ma  lumière,  brûler,  verser  des  larmes, 
voilà  mon  sort.  Toujours  disposée  à  servir,  et 
supportant  avec  patience  le  mal  et  la  peine,  je  me 
consume  pour  éclairer  les  autres,  et  je  me  tour- 
mente moi-même  pour  les  faire  jouir  des  avantages 
que  je  possède.  Comment  pourrait-on  donc  me 
reprocher  avec  raison  ma  pâleur  et  mes  larmes  ! 
Ce  n'est  pas  tout  :  des  nuées  de  papillons  veu- 
lent éteindre  ma  flamme  et  faire  disparaître  ma 
clarté.  Irritée,  je  les  brûle  pour  les  punir  de  leur 
audace  ;  car  on  sait  que  le  mal  retombe  sur  son 
auteur.  Du  reste,  quand  les  papillons  rempliraient 
la  terre,  je  ne  les  redouterais  pas  ;  de  même  que 
les  gens  sans  principes,  le  monde  en  fourmillât-il, 
ne  parviendraient  pas  à  obscurcir  le  flambeau  de 
la  foi.  Leurs  bouches  sacrilèges  essaient  d'étouffer 
cette  lumière  ^crée  ,  mais  le  miséricordieux  par 
excellence  ne  le  permettra  jamais.  Voilà  une 
énigme  qui  se  changera  en  démonstration  pour 
celui  qui  saura  la  pénétrer. 


(  H^  ) 


VERS 


Lumière  de  ma  vie  ,  quelle  clarté  n'ai-je  pas 
reçue  de  toi  1  Que  je  sois  dans  le  vrai  chemin  , 
ou  que  je  m'égare,  tout  vient  de  ta  main  bénie 
et  adorée.  Le  censeur  ne  pourra  jamais  me  taxer 
de  fausseté  à  ton  égard  ;  aucun  vent  n'éteindra  la 
lumière  divine  dont  tu  m'éclaires. 


ALLÉGORIE  XXVII. 


LE    PAPILLON. 


Alors  le  papillon  ,  à  demi  consumé  par  fa 
flamme  ,  se  débattant  et  se  retournant  en  tout 
sens  sur  le  tapis  ,  se  plaignit  amèrement  à  la 
bougie  ,  en  ces  termes  :  Se  peut-il  qu'au  moment 
où,  livrant  mon  cœur  à  ton  amour,  je  ne  dirige 
mes  vœux  que  vers  toi,  tu  me  traites  comme  un 
ennemi!  Qui  t'a  donné  le  droit  de  m'oter  la  vieî 
qui  t'a  excitée  à  me  faire  périr,  moi  ton  amant  sin- 
cère, moi  ton  ami  le  |)lus  tendre  !  Je  supporte  avec 
patience  l'ardeur  de  taHamme,  et  seul,  entre  tous 
tes  amans,  j'ose  braver  la  mort  :  mais,  dis-moi, 
as-tu  jamais  vu  une  amie  qui  se  plaise  à    tour- 

F  2 


(  84) 

]iîenter  son  ami ,  un  médecin  qui  cherche  à  aggraver 
les  souffrances  de  son  malade  !  Quoi  !  je  t'aime  , 
et  tu  me  fais  du  mal  !  je  m'approche  de  toi ,  et  tu 
me  perces  de  tes  rayons  embrasés  :  cependant , 
bien  foin  de  diminuer  mon  amour,  tes  mauvais  trai- 
temens  ne  font  que  l'augmenter,  et  je  me  précipite 
vers  toi ,  tout  abject  que  je  suis ,  emporté  par  le 
désir  de  voir  notre  union  consommée;  mais  tu  me 
repousses  avec  cruauté  ,  tu  déchires  le  tissu  de  gaze 
de  mes  ailes.  Non ,  jamais  un  amant  n'a  rien  éprouvé 
de  pareil  ;  jamais  il  n'a  enduré  ce  que  j'endure  :  et 
malgré  tant  de  rigueurs  ,  c'est  toi  seule  que  j'aime, 
toi  seule  que  j'adore.  N'ai-je  donc  pas  assez  des 
maux  que  je  souffre ,  sans  que  tu  me  fasses  encore 
des  reproches  que  je  ne  mérite  point. 

VERS. 

Je  venais  me  plaindre  des  tourmens  de  mon 
cœur  à  ma  maîtresse  ,  et,  au  lieu  de  les  soulager, 
elle  me  repousse  loin  d'elle  avec  les  verges  du  châ- 
timent. Ainsi  le  papillon  demande  à  s'unir  à  son 
amie  ,  et  elle  ne  lui  répond  qu'en  l'enveloppant 
de  flammes  dévorantes  :  il  tombe  auprès  de  la  cruelle , 
succombant  aux  atteintes  du  feu  et  plongé  dans 
fabyme  de  la  tristesse.  Je  me  promettais  de  jouir 
d'un  instant  de  volupté  ,  mais  je  ne  pensais  pas 
aux  peines  amères  de  l'amour.  Se   consumer  de 


(  «5  ) 

désir  et  cFardeur,  telle  est  la  loi  que  cIcMvent  subir 
les  amans. 


Lorsque  le  papilFon  eut  exprime  le  sujet  de  sa 
douleur,  et  qu'il  se  fut  plaint  de  ses  afiiiciions  et 
de  ses  peines,  fa  hougie  ,  touchée  de  compassion, 
lui  adressa  ces  paroles:  Véritable  amant,  ne  te 
hâte  pas  de  me  condamner  ;  car  j'endure  les 
mêmes  tourmens  que  toi,  les  mêmes  peines,  les 
mêmes  rigueurs.  Ecoute  l'histoire  la  plus  extraor- 
dinaire, et  prends  j)itié  de  la  douleur  la  plus  vio- 
lente. Qu'un  amant  se  consume,  rien  d'étonnant; 
mais  qu'une  maîtresse  éprouve  le  même  sort,  voilc\ 
ce  qui  doit  surprendre.  Le  feu  m'aime ,  et  ses  soupirs 
enflammés  me  brûlent  et  me  liquéfient;  il  veut  se 
rapj)rocher  de  moi,  et  il  me  dévore  :  il  j)rétend  à 
mon  amour,  il  veut  s'unir  h.  moi;  mais,  dès  que 
ses  désirs  sont  accomplis  ,  il  ne  peut  exister  qu'en 
me  détruisant.  II  est  étrange  sans  doute  qu'une  mai- 
tresse  périsse  ,  et  que  son  amant  lui  survive  ;  qu'un 
ainant  soit  en  possession  du  bonheur,  et  que  sa 
maîtresse  soit  malheureuse. 

O  toi,  lui  répondit  le  feu  ,  qui,  toute  interdite  au 
milieu  des  rayons  de  ma  clarté  ,  es  tourmentée 
par  ma  flamme,  pourquoi  te  plaindre,  puisque  tu 
jouis  du  doux  instant  de  l'union  î  Heureux  celui 

I-  3 


(  86  ) 
qui  boit,  tandis  que  je  suis  son  échanson  !  heureuse 
la  vie  de  celui  qui ,  consumé  par  ma  flamme  immor- 
telle ,  meurt  à  lui-même,  pour  obéir  aux  lois  de 
l'amour, 

VERS. 

Je  dis  à  une  bougie  qui  m'éclairait  ,  tandis 
que  la  nuit  étendait  son  voile  lugubre  sur  la  terre  : 
Mon  cœur  s'attendrit  facilement  sur  le  sort  de  mes 
amis  ,  et  lorsque  je  vois  répandre  des  larmes ,  je 
ne  puis  m'empêcher  de  pleurer.  Avant  de  blâmer 
ma  tristesse,  écoute,  me  dit-elle,  l'exposition  dé- 
taillée de  mon  histoire.  Si  l'aveugle  fortune  t'a  déjà 
fait  éprouver  le  chagrin,  sache  qu'elle  m'a  privée 
de  mon  frère,  d'un  frère  doué  de  propriétés  salu- 
taires et  d'une  saveur  douce  et  pure.  Tes  yeux  se 
mouillent  de  larmes ,  en  pensant  à  cette  beauté  dont 
les  lèvres  sont  aussi  douces  et  dont  la  bouche  dis- 
tille une  liqueur  semblable  ;  je  m'aperçois  de  ton 
chagrin.  Pourquoi  ne  veux- tu  pas  que  je  sois 
affligée  d'avoir  perdu  mon  frère  !  ne  serais-je  pas 
blâmable,  au  contraire,  si  j'épargnais  mes  larmes! 
C'est  le  feu  qui  m'a  séparée  de  ce  frère  chéri  , 
et  c'est  par  le  feu  que  j'ai  juré  de  terminer  mon 
existence. 


(  8;  ) 


ALLEGORIE  XXVIII. 

LE    CORBEAU. 

J'ÉCOUTAIS  encore  le  discours  de  la  bougie 
me  livrant  en  même  temps  aux  idées  voluptueuses 
qu'elle  m'avait  rappelées  ,  lorsque  j'entendis  le 
croassement  lugubre  d'un  corbeai^  qui  ,  entouré 
de  ses  amis  ,  annonçait  la  fatale  séparation.  Cou- 
vert d'un  habit  de  deuil,  et  seul,  au  milieu  (.]es 
hommes,  vêtu  de  noir,  il  gémissait  comme  celui  qui 
est  dans  le  malheur,  et  déplorait  sa  douleur  cruelle. 
O  toi ,  qui  ne  fais  que  te  lamenter  ,  lui  dis  -  je  alors  , 
ton  cri  importun  vient  troubler  ce  qu'il  y  a  de  plus 
pur  et  rendre  amer  ce  qu'il  y  a  de  plus  doux:  pour- 
quoi ne  cesses-tu  ,  dès  le  matin ,  d'exciter  h  la  sépa- 
ration, en  t'adressant  aux  campemens  printaniers  î 
Si  tu  vois  un  bonheur  parfait,  tu  proclames  sa  fin 
prochaine  ;  si  tu  aperçois  un  château  magni- 
fique, tu  annonces  que  des  ruines  vont  bientôt  lui 
succéder  :  tu  es  de  plus  mauvais  augure  que  Cacher, 
pour  celui  qui  se  livre  aux  douceurs  de  la  société, 
et  plus  sinistre  que  Jader,  pour  l'homme  prudent 
et  réfléchi. 

Le  corbeau,  prenant  alors,  pour  se  défendre,  le 
langage  éloquent  et  expressif  de  sa  situation  :  Mal- 

i-  4 


(  88  ) 
heureux  ,  me  dit-il ,  tu  ne  distingues  pas  ie  bien 
d'avec  le  mal  ;  ton  ennemi  et  ton  ami  sincère  sont 
égaux  h  tes  yeux  ;  tu  ne  comprends  ni  l'allégorie ,  ni 
la  réalité  ;  les  avis  que  l'on  te  donne  sont  pour  toi 
comme  le  vent  qui  souffle  aux  oreilles ,  et  les  pa- 
roles du  sage  sont  à  l'ouïe  de  tes  passions  comme 
l'aboiement  du  chien.  Eh  quoi,  tu  ne  réfléchis  donc 
pas  à  ton  départ  prochain  de  la  vaste  surface  de  la 
terre  pour  les  ténèbres  du  tombeau  et  pour  le  réduit 
étroit  du  sépulcre  î  tu  ne  penses  pas  à  l'accident 
qui  causa  au  père  des  hommes  des  regrets  si  cui- 
sans  ;  aux  prédications  de  Noé  sur  ce  séjour  où 
personne  ne  jouit  d'un  instant  de  repos;  à  l'état 
d'Abraham,  l'ami  de  Dieu,  au  milieu  des  flammes 
où  l'avait  fait  jeter  Nemrod  !  Tu  ne  sais  point  te 
régler  sur  les  exemples  instructifs  que  t'offrent  la 
patience  d'Ismaël ,  sur  le  point  d'être  immolé  par  son 
père  ;  la  pénitence  de  David ,  qui  pleura  son  crime 
si  amèrement;  la  piété  exemplaire  et  l'abnégation 
du  Messie  l  Ignores-tu  que  le  bonheur  le  plus 
parfait  a  un  terme,  et  que  la  volupté  la  plus  pure 
s'évanouit;  que  la  paix  s'altère,  et  que  la  douceur 
devient  amertume  !  Quel  est  l'espoir  que  la  mort 
ne  détruise ,  la  prudence  que  le  destin  ne  rende 
vaine!  Le  messager  du  bonheur  n'est -il  pas  suivi 
de  près  par  celui  du  malheur!  ce  qui  est  facile 
ne  devient -il  pas  difficile  î  Où  trouve-t-on  une 


(80  ) 
situation  iinnuiable!  quel  est  riionime  qui  ne  passe 
point!  quelle  est  la  fortune  qui  reste  dans  les  mains 
de  celui  qui  la  possède!  Que  sont  devenus  ce  vieil- 
lard dont  la  longue  vie  étonnait,  cet  heureux  mor- 
tel  qui  nageait  dans  l'opulence ,  cette  Leauté  au 
leint  de  roses  et  de  lis!  La  mort  ne  vient-elle  pas 
retrancher  les  hommes  ,  les  uns  après  les  autres ,  du 
nombre  des  vivans!  ne  met-elle  pas  au  même  ni- 
veau, dans  la  poussière,  le  vil  esclave  et  le  maître 
superbe!  L'inspiration  divine  n'a-t-elle  pas  fait  en- 
tendre au  voluptueux,  plongé  dans  le  sein  du  plai- 
sir, ces  mots  du  Coran,  où  Dieu  dit  a  Mahomet. 
Annonce  que  la  jouissance  de  ce  monde  est  peu  de  chose î 
Pourquoi  donc  censurer  mon  gémissement  et 
prendre  h  mauvais  augure  mon  croassement  plain- 
tif, soit  au  lever  de  l'aurore ,  soit  aux  approches  de  la 
nuit  !  Si  tu  connaissais  ton  bonheur  véritable  comme 
je  connais  le  mien,  ô  toi  qui  blâmes  ma  conduite  , 
tu  n'hésiterais  pas  à  te  couvrir  comme  moi  d'un 
vêtement  noir,  et  tu  me  répondrais  en  tout  temps 
par  des  lamentations  :  mais  les  plaisirs  occupent 
tous  tesmomens;  ta  vanité  et  ton  amour-propre 
te  retiennent.  Pour  moi,  j'avertis  le  voyageur  que 
les  lieux  où  il  s'arrête  seront  bientôt  ravagés  ;  je 
prémunis  celui  qui  mange ,  contre  les  mets  nui- 
sibles du  monde  ,  et  j'annonce  au  pèlerin  qu'il 
approche  du  terme.  Ton  ami  sincère  est  celui  qui 


(90) 
te  parle  avec  franchise,  et  non  celui  qui  te  croit 
sur  parole  ;  c'est  celui  qui  te  réprimande  ,  et 
non  celui  qui  t'excuse;  c'est  celui  qui  t'enseigne 
la  vérité ,  et  non  celui  qui  venge  tes  injures  :  car 
quiconque  t'adresse  des  remontrances ,  réveille  en 
toi  la  vertu  lorsqu'elle  s'est  endormie  ;  et  en  t'ins- 
pirant  des  craintes  salutaires ,  il  te  fait  tenir  sur  tes 
gardes.  Quant  à  moi,  par  fa  couleur  obscure  de 
mes  ailes  et  par  mes  gémissemens  prophétiques,  j'ai 
voulu  produire  sur  ton  esprit  les  mêmes  impres- 
sions ;  je  t'ai  fait  même  entendre  mon  cri  dans  les 
cercles  de  la  société.  Mais  on  peut  m'appliquer  ce 
proverbe  :   Tu  par /es  à  un  mort, 

VERS, 

Je  pleure  sur  la  vie  fugitive  qui  m'échappe,  et 
j'ai  sujet  de  faire  entendre  des  plaintes  :  je  ne  puis 
m'empêcher  de  gémir  toutes  les  fois  que  j'aperçois 
une  caravane  dont  le  conducteur  accélère  la  marche. 
Les  gens  peu  réfléchis  me  censurent  sur  mes  habits 
de  deuil  ;  mais  je  leur  dis  :  C'est  précisément  par  ce 
langage  emblématique  que  je  m'efforce  de  vous  ins- 
truire ;  je  suis  semblable  au  khathib  ,  et  ce  n'est  pas 
une  chose  nouvelle  que  ies  khathibs  soient  vêtus  de 
noir.Tu  me  verras,  à  l'aspect  d'un  campement  prin- 
tanier,  annoncer  dans  chaque  vallée  qu'il  changera 
bientôt  de  place  ,  et  gémir  ensuite  sur  les  vestiges 


(g-  ) 

h  demi  efîacés,  me  plaignant  de  la  cruelle  absence. 
Miiis  ce  ne  sont  que  des  objets  muets  et  inanimés 
qui  répondent  h  ma  voix.  O  toi  qui  as  ToreiKe  dure, 
réveilIe-toi  enfin  ,  et  comprends  ce  qu'indique  fa 
nuée  matinale:  il  n'y  a  personne  sur  la  terre  qui  ne 
doive  s'efiorcer  d'entrevoir  quelque  chose  du 
monde  invisible.  Souviens-toi  que  tous  les  hommes 
sont  appelés  plus  tôt  ou  plus  tard.  Je  me  serais  fait 
entendre,  si  j'eusse  adressé  la  parole  h.  un  être  vi- 
vant ;  mais  ,  hélas  !  celui  à  qui  je  parle,  est  un  mort. 


ALLÉGORIE  XXIX. 


LA    HUPPE. 


Après  que  le  corbeau  fut  venu  troubler  les 
heureux  momens  que  je  passais  dans  ce  jardin , 
et  qu'il  m'eut  engagé  h  me  tenir  en  garde  contre  la 
haine  que  je  pourrais  m'attirer,  je  cessai  de  fiire 
attention  aux  rians  objets  qui  m'environnaient,  et 
je  retournai  à  la  solitude  de  mes  pensées  :  alors  une 
douce  rêverie  s'étant  emparée  de  moi,  je  me  sentis 
comme  inspiré,  et  je  crus  entendre  distinctement 
ces  paroles  :  O  toi  qui  écoutes  le  langage  énigma- 
tique  des  oiseaux ,  et  qui  te  j)Iains  que  le  bonheur 
semble  te  fuir,  sache  que,  si  le  cœur  était  attentif 


(92    ) 

à  s'instruire,  l'intelligence  pénétrerait  îe  sens  des 
allégories  ;  ie  pèlerin  de  ce  monde  demeurerait  dans 
la  voie,  et  celui  que  les  plaisirs  éblouissent,  ne  s'éga- 
rerait pas.  Si  l'esprit  était  bon,  il  pourrait  apercevoir 
les  signes  de  la  vérité  ;  si  la  conscience  savait  com- 
prendre ,  elle  apprendrait  sans  peine  les  bonnes  nou- 
velles ;  si  l'ame  s'ouvrait  aux  influences  mystiques, 
elle  recevrait  des  lumières  surnaturelles  ;  si  l'on 
savait  écarter  le  voile,  l'objet  caché  se  montrerait; 
si  l'intérieur  était  pur,  les  mystères  des  choses  invi- 
sibles paraîtraient  à  découvert,  et  la  divine  maî- 
tresse se  laisserait  voir.  Si  tu  t'éloignais  des  choses 
du  monde  ,  la  porte  du  spiritualisme  s'ouvrirait 
pour  toi  ;  si  tu  te  dépouillais  du  vêtement  de 
l'amour-propre,  il  n'existerait  pour  toi  aucun  obs- 
tacle ;  si  tu  fuyais  le  monde  de  l'erreur,  tu  verrais 
le  monde  spirituel;  si  tu  coupais  les  liens  qui 
t'attachent  aux  plaisirs  des  sens,  les  vérités  dogma- 
tiques se  montreraient  à  toi  sans  nuages  ;  et  si  tu 
réformais  tes  mœurs  ,  tu  ne  serais  point  privé 
de  l'aliment  divin.  Si  tu  renonçais  à  tes  désirs  , 
tu  parviendrais  au  plus  haut  degré  de  la  vie  con- 
templative ;  si  tu  subjuguais  tes  passions,  Dieu 
te  rapprocherait  de  lui  ;  il  te  réunirait  à  lui ,  si , 
pour  lui  plaire,  tu  te  séparais  de  ton  père;  enfin 
si  tu  renonçais  à  toi-même  ,  tu  trouverais  auprès 
de  la  divinité  la  plus  douce  des  demeures.  Mais, 


(  9Î  ) 
bien  loin  de  Ih,  captif  dans  fc  cachot  de  tes  inclina- 
tions, enchaîné  par  tes  habitudes,  esclave  des  vo- 
luptés, soumis  aux  illusions  des  sens,  tu  es  retenu 
par  la  froideur  de  ta  détermination,  tandis  que  le 
feu  de  hi  cupidité  te  consume,  et  que  l'excès  d'une 
joie  insensée  t'accable.  Une  langueur  funeste 
t'aveugle  ;  les  impulsions  d'un  amour  déréglé  t'en- 
flamment le  sang;  ta  faible  volonté  ne  forme  que 
des  résolutions  tièdes ,  et  ne  se  livre  qu'à  des  j)ensées 
enlacées;  ton  esprit  corrompu  te  jette  dans  un  état 
d'iiesitation  pénible  ,  et  ton  jugement  vicieux  te  fait 
paraître  mauvais  ce  qui  est  bon ,  et  bon  ce  qui  est 
mauvais. 

Tu  devrais  entrer  dans  l'hôpital  de  la  piété,  et, 
présentant  le  vase  de  l'affliction,  exposer  le  récit 
de  tes  souffrances  à  ce  médecin  qui  connaît  ce 
qu'on  tient  secret  et  ce  qu'on  lui  découvre.  Tu 
devrais  tendre  vers  lui  le  poignet  de  ta  soif  brû- 
lante ,  pour  qu'il  tâtât  le  pouls  de  ta  maladie , 
qu'il  examinât  la  nature  de  ta  fièvre ,  et  qu'après 
avoir  connu  exactement  ta  situation  malheureuse, 
il  te  livrât  à  celui  qui  est  chargé  d'infliger  les 
peines  de  la  loi ,  lequel  te  lierait  avec  les  liens  de 
la  crainte  ,  te  frapperait  avec  les  verges  de  l'indé- 
cision et  de  la  tuturition,  en  te  rafraîchissant  en 
même  temps  avec  l'éventail  de  l'espérance;  te  gar- 
derait ensuite  dans  le  sanctuaire  de  la  j^rotection, 


(94) 
et  écrirait  sur  le  cahier  de  ton  traitement  le  réta- 
blissement de  ta  santé.  II  préparerait  pour  toi  le 
myrobalan  du  refuge ,  la  violette  de  l'espoir,  la 
scammonée  de  la  confiance  ,  le  tamarin  de  la  di- 
rection, la  jujube  de  la  sollicitude,  la  sébeste  de  la 
correction ,  la  prune  de  la  sincérité  et  la  casse  du 
libre  arbitre  ;  il  concasserait  le  tout  sur  la  terre  de 
l'acceptation ,  le  pilerait  dans  le  mortier  de  la  pa- 
tience, le  tamiserait  dans  le  tamis  de  l'humilité, 
le  dépurerait  par  le  sucre  de  l'action  de  grâces, 
et  t'administrerait  ensuite  ce  médicament ,  après 
la  veille  nocturne  ,  dans  la  solitude  du  matin  , 
en  présence  du  médecin  spirituel  ,  en  tête- 
à-tête  avec  la  divine  amie  ,  à  l'insu  du  rival  ja- 
loux ,  pour  voir  si  ton  agitation  s'apaiserait , 
si  la  chaleur  de  tes  passions  se  refroidirait ,  si 
ton  cœur  ,  que  les  voluptés  t'avaient  arraché, 
pourrait  reprendre  sa  place  ,  si  ton  tempérament 
acquerrait  ce  degré  d'équilibre  qui  constitue  la 
santé  spirituelle  ;  si  ton  oreille  pourrait  s'ou- 
vrir au  langage  mystique  ,  et  entendre  ces  douces 
paroles  ,  Quelqu'un  demande-t-il  quelque  chose  î 
je  suis  prêt  k  l'exaucer;  pour  voir  enfin  si  ta  vue 
intérieure  ferait  des  efforts  afin  d'être  éclairée,  et 
si  tu  serais  capable  de  contempler  les  choses  extraor- 
dinaires et  merveilleuses  du  spiritualisme. 

Considère  la  huppe  :  lorsque   sa  conduite    est 


(  <)^>  ) 

régulière  et  que  son  cœur  est  pur  ,  s.i  vue  per- 
çante pénètre  dans  les  entrailles  de  la  terre,  et  y 
découvre  ce  qui  est  cache  aux  yeux  des  autres  êtres  ; 
elle  aperçoit  Teau  qui  y  coule  ,  comme  tu  pour- 
rais la  voir  au  travers  d'un  cristal;  et,  guidée  par 
l'excellence  de  son  goût  et  par  sa  véracité  ,  Voici , 
dit-elle,  de  l'eau  douce,  et  en  voilh  qui  est  amère. 
Elle  ajoute  ensuite  :  Je  puis  me  vanter  de  pos- 
séder ,  dans  le  petit  volume  de  mon  corps ,  ce  que 
Salomon  n'a  jamais  possédé  ,  lui  à  qui  Dieu  avait 
accordé  un  royaume  comme  personne  n'en  a  jamais 
eu  ;  je  veux  parler  de  la  science  que  Dieu  m'a 
départie,  science  dont  jamais  ni  Salomon,  ni  au- 
cun des  siens ,  n'ont  été  doués.  Je  suivais  par-tout 
ce  grand  monarque,  soit  qu'il  marchât  lentement , 
soit  qu'il  hâtât  le  pas ,  et  je  lui  indiquais  les  lieux 
où  il  y  avait  de  l'eau  sous  terre.  Mais  un  jour 
je  disparus  tout  h.  coup,  et ,  durant  mon  absence, 
il  perdit  son  pouvoir  :  alors  s'adressant  à  ses  cour- 
tisans et  aux  gens  de  sa  suite ,  Je  ne  vois  pas  la 
huppe,  leur  dit-il;  s'est-elle  éloignée  de  moi!  S'il 
en  est  ainsi ,  je  lui  ferai  souffrir  un  tourment  vio- 
lent, et  peut-être  l'immolerai- je  à  ma  vengeance, 
h  moins  qu'elle  ne  me  donne  une  excuse  légitime. 
(  Ce  qu'il  y  a  de  remarquable  ,  c'est  qu'il  ne  s'in- 
forma de  moi  que  lorsqu'il  eut  besoin  de  mon  se- 
cours. )  Puis  voulant  faire  sentir  l'étendue  de  son 


(96) 
autorité ,  il  répéta  les  mêmes  mots  :  Je  la  punirai  ; 
que  dis-je !  je  l'immolerai.  Mais  le  Destin  disait:  Je 
la  dirigerai  vers  toi  ,  je  la  conduirai  moi-même. 
Lorsque  je  vins  ensuite  de  Saba  ,  chargée  d'une 
commission  pour  ce  roi  puissant,  et  que  je  lui  dis, 
Je  sais  ce  que  tu  ne  sais  pas  ,  cela  augmenta  sa 
colère  contre  moi,  et  il  s'écria  :  Toi  qui,  dans  la 
petitesse  de  ton  corps ,  renfermes  tant  de  malice , 
non  contente  de  m'avoir  mis  en  colère  ,  en  t'éloi- 
gnant  ainsi  de  ma  présence ,  tu  prétends  encore 
être  plus  savante  que  moi  1  Grâce  ,  lui  dis-je  ,  ô  Salo- 
mon  !  je  reconnais  que  tu  as  demandé  un  empire 
tel  qu'aucun  souverain  nen  aura  jamais  de  sem- 
blable ;  mais  tu  dois  avouer  aussi  que  tu  n'as  pas  de 
même  demandé  une  science  à  laquelle  personne  ne 
pût  atteindre  :  je  t'ai  apporté  de  Saba  une  nouvelle 
que  tous  les  savans  ignorent.  O  huppe  ,  dit-il  alors , 
on  peut  confier  les  secrets  des  rois  à  celui  qui  sait 
se  conduire  avec  prudence  ;  porte  donc  ma  lettre. 
Je  m'empressai  de  le  faire ,  et  je  me  hâtai  d'en  rap- 
porter la  réponse.  II  me  combla  alors  de  ses  faveurs  ; 
il  me  mit  au  nombre  de  ses  amis ,  et  je  pris  rang 
parmi  les  gardiens  du  rideau  qui  couvrait  sa  porte, 
tandis  qu'auparavant  je  n'osais  en  approcher  :  pour 
m'honorer,  il  me  plaça  ensuite  une  couronne  sur  la 
tête  ,  et  cet  ornement  ne  sert  pas  peu  à  in'embellir. 
D'après  cela,  la  mention  de  mon  immolation  a  été 


(  97  ) 
abrogée,  et  Jes  versets  où  il  est  question  de  ma 
louange  ont  été  fus. 

Pour  toi,  si  tu  es  capable  d'apprécier  mes  avis  , 
rectifie  ta  conduite,  purifie  ta  C(Miscience,  redresse 
ton  naturel,  crains  celui  qui  t'a  tiré  du  néant,  pro- 
fite des  leçons  instructives  qu'il  te  donne,  quand 
même  il  se  servirait,  pour  le  faire,  du  ministère  des 
animaux;  et  crois  que  celui  qui  ne  sait  pas  tirer 
un  sens  allégorique  du  cri  aigre  de  la  porte,  du 
bourdonnement  de  la  mouche ,  de  l'aboiement  du 
chien,  du  mouvement  des  insectes  qui  s'agitent 
dans  la  poussière  ;  que  celui  qui  ne  sait  pas  com- 
prendre ce  qu'indiquent  la  marche  de  la  nue,  la 
lueur  du  mirage,  la  teinte  du  brouillard,  n'est  pas 
du  nombre  des  gens  intelligens. 

VERS. 

Tu  es  plus  douce  à  mes  yeux  que  le  souffle  du 
zéphyr  qui  erre  la  nuit  dans  les  jardins  :  la  moindre 
idée  me  trouble  et  m'agite  ;  chaque  objet  agréable 
me  seinble  être  une  coupe  où  j'aperçois  tes  traits 
adorés  ,  et  dans  chaque  son  je  crois  entendre  ta 
voix  chérie. 


(  9«) 


ALLEGORIE  XXX. 

LE    CHIEN. 

Tandis  que  j'étais  plongé  dans  le  charme  de  la 
conversation  des  oiseaux,  et  que  j'attendais  la  ré- 
ponse qu'ils   feraient  à  la  huppe,  un  chien,  qui 
était  près  de  la  porte,  m'adressa  ces  mots,  tout  en 
recueillant  des  miettes  de  pain  parmi  les  ordures  : 
O  toi  qui  n'a  pas  encore  soulevé  le  voile  du  mys- 
tère ;  toi  qui,  tout  entier  aux  choses  du  monde, 
ne  peux  t'élever  à  la  cause  première  ;  toi  qui  traînes 
avec  pompe  la  robe  de  l'aniour-propre  ,  imite  mes 
nobles  actions ,  prends   mes   qualités  recomman- 
dâmes ,    et ,    sans  t'arrêter  à   l'infériorité  de  mon 
rang,  écoute  ce  que  je  vais  te  dire  de  la  sagesse  de 
ma  conduite.  A  ne  me  considérer  qu'à  l'extérieur, 
je  serai  à  tes  yeux  un  objet  de  mépris  ;  mais  pour 
peu  que  tu  m'examines ,  tu  verras  que  je  suis  un  vrai 
faquir.  Toujours    à  la  porte  de   mes  maîtres  ,  je 
ne  recherche  pas  une  place  plus  distinguée  ;  sans 
cesse   avec  les  hommes,    je  ne  change  point   de 
manière  d'agir  :  on  me  chasse  ,  et  je  reviens  ;  on 
me  frappe,   et   je   ne  garde   jamais  de  rancune  ; 
mon  amitié   est  toujours  la  même,  et  ma  fidélité 
est  a  toute  épreuve.»  Je  veilfe  ,  lorsque  les  hommes 


(  ^M  ) 
sont  plongés  dans  le  somnieil ,  et  je  fais  une 
garde  exacte  quand  la  table  est  servie.  On  ne 
m'assigne  cependant  ni  salaire,  ni  nourriture, 
ni  même  un  logement  ,  encore  moins  une  |)face 
distinguée.  Je  témoigne  de  la  reconnaissance 
lorsqu'on  me  donne  ;  je  suis  patient  lorsqu'on  me 
repousse  ;  et  l'on  ne  me  voit  nulle  part  me  plain- 
dre ,  ni  pleurer  sur  les  mauvais  traitemens  que 
j'éprouve.  Si  je  suis  malade  ,  personne  ne  vient 
me  visiter  ;  si  je  meurs  ,  on  ne  me  porte  point 
dans  un  cercueil  ;  si  je  quitte  un  lieu  pour  me 
rendre  dans  un  autre,  on  ne  me  munit  d'aucune 
provision  ;  et  je  n'ai  ni  argent  dont  on  puisse 
hériter  ,  ni  champ  qu  on  puisse  labourer.  vSi  je 
m'absente  ,  on  ne  désire  pas  mon  retour  ;  les 
enfans  eux-mêmes  ne  me  regrettent  point;  per- 
sonne ne  verse  une  larme;  et  si  l'on  me  retrouve, 
on  ne  me  regarde  pas.  Cependant  je  fais  sans  cesse 
la  garde  autour  de  la  demeure  des  hommes,  et 
je  leur  suis  constamment  fidèle.  Obligé  de 
rester  sur  les  ordures  qui  sont  auprès  de  leurs 
portes,  je  me  contente  du  peu  que  je  reçois,  à 
défaut  des  bienfaits  dont  je  devrais  être  comblé. 
Si  mes  mœurs  te  plaisent,  suis  mon  exemple,  et 
conforme-loi  a  ma  conduite;  et  si  tu  veux  m'imiter, 
règle  ta  vie  sur  la  mienne. 


G     2 


(    ïoo  ) 
VERS. 

Apprends  de  moi  comment  ii  faut  remplir  les  de- 
voirs de  l'amitié,  et ,  à  mon  exemple,  sache  t'élever 
aux  vertus  les  plus  nobles.  Je  ne  suis  qu'un  animal 
vil  et  méprisé;  mais  mon  cœur  est  exempt  de  vices. 
J'ai  coutume  de  garder  les  habitans  du  quartier  où 
je  me  trouve  ,  sur-tout  durant  la  nuit.  Toujours  pa- 
tient, et  reconnaissant  même,  de  quelque  manière 
que  l'on  me  traite  ,  je  ne  me  plains  jamais  des 
injustices  des  hommes  à  mon  égard,  et  je  me  con- 
tente de  mettre  toute  ma  confiance  en  Dieu  seul. 
Malgré  ces  habitudes  précieuses ,  personne  ne  fait 
attention  à  moi ,  soit  qu'une  faim  cruelle  me  fasse 
expirer ,  ou  que  l'infortune  m'abreuve  de  la  coupe 
amère  de  la  peine  et  de  la  douleur.  Du  reste,  j'aime 
mieux  supporter  les  mauvais  traitemens  que 
j'éprouve  ,  que  de  perdre  ma  propre  estime  et  de 
m'avilir  k  demander.  Oui,  je  ne  crains  pas  de  le 
dire  ,  mes  qualités  ,  malgré  le  peu  de  considéra- 
tion dont  je  jouis  ,  l'emportent  sïir  celles  des  autres 
animaux. 


'»■■%.'%''»-■%/%.  -^-^rv 


(    101     ) 


ALLKGOIUE  XXXI 


LE    CHAMEAU. 


Toi  qui  desires  marcher  dans  le  chemin  qui 
conduit  au  palais  des  rois,  dit  alors  le  chameau, 
si  lu  as  pris  du  chien  des  leçons  d'abstinence  et  de 
pauvreté  volontaire,  je  veux  t'en  donner,  actuelle- 
ment, de  fermeté  et  de  patience.  Celui,  en  effet, 
qui  se  décide  à  embrasser  la  pauvreté  volontaire, 
doit  s'appliquer  aussi  à  acquérir  la  patience  ;  car  le 
pauvre  doué  de  cette  vertu  a  droit  d'être  compté 
au  nombre  des  riches. 

Chargé  de  pesans  fardeaux,  j'achève  les  traites 
les  plus  longues,  j'affronte  les  dangers  du  désert  et 
je  souffre  avec  patience  les  traitemens  les  plus  durs , 
sans  que  rien  me  décourage  jamais.  Je  ne  me  pré- 
cipite point  dans  ma  marche  comme  un  insensé, 
mais  je  me  laisse  conduire  même  pnr  un  jeune 
enfant,  tandis  que,  si  je  le  voulais,  je  pourrais  ré- 
sister à  l'homme  le  plus  robuste.  Doux  et  obéissant 
par  caractère  ,  je  porte  les  fardeaux  et  1-es  bagages 
divisés  en  deux  parties  égales.  Je  ne  suis  ni  perfide 
ni  facile  îi  me  rebuter:  ayant  réussi  à  vaincre  tout 
obstacle ,  je  n'en  suis  pas  plus  présomptueux  ;  et  les 

G  3 


(  I«'^  ) 

difiicultés  ne  nie  font  point  rebrousser  chemin.  Je 
m'enfonce  hardiment  dans  les  routes  fangeuses  et 
glissantes,  où  les  voyageurs  les  plus  intrépides  eux- 
mêmes  craindraient  de  s'engager.  Je  souffre  avec 
constance  la  soif  ardente  du  midi,  et  je  ne  m'écarte 
jamais  delà  ligne  qui  m'est  tracée.  Après  avoir  rem- 
pli mon  devoir  envers  mon  maître ,  et  être  arrivé 
au  terme  de  ma  course,  je  rejette  mon  licou  sur 
mon  dos,  et  je  vais  dans  les  champs,  prenant  pour 
ma  nourriture  ce  qui  appartient  au  premier  venu  et 
dont  on  peut  s'emparer  sans  le  moindre  scrupule  : 
mais  si  tout* à-coup  j'entends  la  voix  du  chamelier, 
je  lui  livre  de  nouveau  ma  bride ,  en  m'interdisant 
la  jouissance  du  sommeil,  et  portant  le  cou  en 
avant ,  comme  pour  parvenir  plutôt  à  mon  but. 
Si  je  m'égare ,  mon  conducteur  me  dirige;  si  je 
fais  un  faux  pas,  il  vient  à  mon  secours;  si  j'ai 
soif,  le  nom  de  mon  amie  est  mon  eau  et  ma  nour- 
riture.  Destiné  au  service  de  l'homme,  d'après  ce 
passage  du  Coran  où  Dieu  dit ,  Il  porte  vos  fardeaux, 
je  ne  cesse  pas  d'être  en  voyage  ou  sur  pied , 
jusqu'à  ce  que  je  parvienne  au  point  où  finit  le 
pèlerinage  de  la  vie. 

VERS. 

O  Saad  !  si  tu  viens  dans  ces  lieux ,  interroge 
un  cœur  qui  a  pénétré  dans  l'asyle  inviolable    où 


(   '"5  ) 
clenieure  cet  objet  ravisbant;  et  si  les  yeux  aper- 
çoivent au    loin    ce  tertre  sablonneux,  souviens- 
toi  de   cet   amant  passionné  que  trouble  et  agite 
l'amour  le  plus  tendre. 

Chameaux  ,  quand  nous  verrons  Médine  , 
arrêtez-vous.  .  .  .  Ne  quittons  plus  cette  enceinte 
sacrée.  Mais  quoi  !  lorsque  la  vallée  d'AIakik  pa- 
raît devant  eux,  ils  s'éloignent  en  imitant  la  marche 
balancée  de  l'autruche. 

Mon  frère,  verse  avec  moi  des  pleurs  de  désir 
})our  cette  beauté  dont  le  visage  ravissant  couvre 
de  confusion  la  pleine  lune;  et  ne  manque  pas  de 
dire,  quand  tu  seras  dans  ce  jardin  béni:  Habi- 
tant de  la  tribu  ,  je  te  salue. 


ALLEGORIE  XXXIL 


LE     CHEVAL. 


O  TOI  qui  es  devenu  faquir  par  les  leçons  que 
t'a  données  le  chien,  et  patient  par  celles  que  t'a 
données  le  chameau,  dit  ensuite  le  cheval,  si  tu 
desires  connaître  le  sentier  qui  mène  aux  actions 
glorieuses  ,  je  t'apprendrai  ,  à  mon  tour  ,  en  quoi 
consistent  les  choses  distinguées,  et  ce  qui  constitue 


(  'o4  ) 

le  véritable  emploi  des  efforts  pour  obtenir  le  suc- 
cès. Vois  comment ,  le  dos  chargé  de  celui  qui  m'ac- 
cable d'injures,  je  m'élance,  dans  ma  course ,  avec 
autant  de  rapidité  que  l'oiseau  dans  son  vol,  que 
la  nuit  lorsqu'elle  étend  son  voile  lugubre  sur  la 
terre ,  que  le  torrent  fugitif.  Si  mon  cavalier  est  celui 
qui  poursuit,  il  atteindra  facilement  par  mon  se- 
cours l'objet  qu'il  désire  ;  s'il  est  poursuivi,  au  con- 
traire, j'empêche  alors  qu'on  ne  le  joigne ,  et  mon 
galop  précipité  le  soustrait  à.  son  adversaire,  qui, 
atteignant  à  peine  la  poussière  que  mes  pieds  lui 
rejettent,  me  perd  bientôt  de  vue,  et  ne  peut  plus 
s'en  tenir  qu'à  ce  qu'il  entend  dire  de  moi.  Si  la  pa- 
tience du  chameau  est  éprouvée,  ma  reconnais- 
sance pour  les  bontés  qu'on  m'accorde  est  connue: 
le  chameau  parvient  à  la  vérité  au  but  qu'il  se  pro- 
pose; pour  moi  je  suis  toujours  au  premier  rang 
dans  la  guerre  contre  les  infidèles.  Au  jour  de  la 
bataille ,  lorsque  l'heure  de  l'attaque  est  arrivée  , 
je  me  précipite  avec  audace  comme  le  brave  que 
rien  ne  saurait  effrayer,  et  je  précède  les  coups 
de  ses  flèches  meurtrières;  mais  le  chameau  reste 
en  arrière,  pour  qu'on  le  charge  de  pesans  fardeaux , 
ou  pour  que  l'on  cherche  dans  ses  bagages.  Les 
obligations  qui  me  sont  imposées,  ne  sont  remplies 
que  par  celui  qui  sait  tenir  ses  engagemens  ;  et 
celui-là  seul  qui  est  léger  et  rapide  dans  sa  marche, 


(  io5  ) 
peut  faire  le  chemin  que  je  dois  parcourir  :  aussi 
m  etudié-je  à  acquérir  de  l'agilitc  ,  me  préparant 
ainsi  au  jour  de  la  course.  Si  je  vois  quelqu'un  qui 
soit  plongé  par  sa  folfe  étourderie  dans  une  ivresse 
dont  il  ne  peut  revenir,  et  que  les  agrémens  de 
la  vie  jettent  dans  l'illusion  la  plus  com])lète  , 
«  Tout  ce  que  vous  possédez,  lui  dis-je,  est  péris- 
5>  sable  ;  les  biens  seuls  de  Dieu  sont  éternels.  :» 
O  toi  qui  es  repoussé  foin  de  cet  objet  que  tu 
desires  avec  tant  d'ardeur  ,  et  qui  es  écarté  de  ce 
combat  mystérieux,  jette  sur  la  nature  un  regard 
attentif,  comprends  quel  est  le  but  du  Créateur, 
et  ne  tarde  pas  k  t'imposer  h  toi-même  des  lois  sé- 
vères, k  donner  à  tes  sens  des  liens  étroits.  Rap- 
pelle-toi que  le  destin  a  ûxé  l'instant  de  ta  mort, 
qu'il  a  calculé  le  nombre  de  tes  respirations;  et 
crains  le  jour   terrible  du  jugement  à  venir. 

Quant k  moi,  lorsque  le  palefrenier  m'a  couvert 
de  mes  harnais,  celui  qui  me  monte  n'a  rien  k  re- 
douter de  mafouorue.  Combien  de  fois  ne  mancre-t- 
il  pas  les  produits  de  la  chasse  que  j'ai  rendue  fruc- 
tueuse par  ma  vitesse.  Toujours  je  laisse  derrière 
moi  celui  qui  cherche  k  me  devancer,  et  je  devance 
toujours  celui  que  je  poursuis.  On  me  lie  avec 
des  entraves,  afin  que  je  n'attaque  pas  les  autres 
chevaux;  on  me  guide  avec  des  rênes,  pour  que  je 
ne  m'écarte  pas  de  la  route  que  je  dois  tenir;  on 


(   '"6  ) 
nie  met  un  frein,  pour  que  mon  encolure  élégante 
ne  s'altère  pas  ;  on  me  serre  la  bride  ,  de  crainte 
que  j'oublie  de  me  tenir  droit;  et  l'on  me  ferre  les 
pieds  ,   pour   que  je  ne   me  fatigue    pas  lorsque 
je  m'élance  dans  la  carrière.  Le  bonheur  m'est  pro- 
mis ;  un  rang  distingué  m'est  donné  :  on  me  traite 
avec  égards ,  et  ce  n'est  que  pour  ma  propre  con- 
servation  qu'on  m'impose  des  liens.  L'Etre  bienfai- 
sant par  excellence  a  répandu  ses  bienfaits  sur  moi, 
et,  dans  sa  bonté  éternelle,  a  dicté  en  ma  faveur 
ses  jugemens  en  ces  termes  :  «  Jusqu'au  jour  de  la 
35  résurrection  ,  le  bonheur  est  lié  à  la  touffe  de 
33  crins  qui  orne  le  front  des  chevaux.  wFils  du  vent, 
j'ai  reçu  l'inspiration  de  bénir  et  de  louer  Dieu  : 
mon  dos  procure  une  sorte  de  gloire  à  celui  qui  le 
monte  ;  mon  fîanc  est  un  trésor  pour  ceux  qui  me 
possèdent  ;  et  ma  société  ,  un  amulette.  Combien 
de  fois  ne  m'a-t-on  pas  poussé  dans  l'arène ,  sans 
que  j'aie  jamais  laissé  voir  de  la  faiblesse  !   com- 
bien de  fois,  ayant  remporté  la  palme  de  la  vitesse 
dans  la  course,  n'ai -je  pas  été  couvert  de  la  soie, 
ornement  des    infidèles  î    combien  de  fois    aussi 
n'ai-je  point  triomphé  des  hypocrites  ,  et  ne  les 
ai-je  point  fait  disparaître  de  la  surface  de  la  terre  1 
Est-il  encore  question  d'eux,  et  les  entends-tu  en 
aucune  manière! 


{    107  ) 

VERS. 

Avance  d'un  pas  rapide  et  léger;  tu  obtiendras 
un  bonheur  d'autant  plus  précieux,  qu'il  est  plus 
difficile  de  s'unir  à  cet  objet  chéri.  Amans  géné- 
reux, marchez  avec  courage  à  la  suite  du  Pro])hète 
que  la  sainteté  la  plus  parfaite  décore.    Ceux  qui  ^ 

sont  parvenus  ,  dans  la  carrière  mystique,  aux  plus 
hauts  degrés  du  spiritualisme,  ont  joui  de  la  vue 
de  ce  visage  ravissant,  qui  brille  du  plus  vif  éclat. 
Peut-être  atteindras-tu  ces  hommes  heureux  qui , 
dès  l'aurore  de  leur  vie,  ont  goûté  ces  doux  instans 
de  plaisir  extatique. 


Oui  ,  dis-je  alors  au  cheval,  on  trouve  en  toi 
les  plus  belles  qualités,  et  tes  actions  sont  les  plus 
recommandables. 


ALLEGORIE  XXXIII. 

LE    LOUP-CERVIER. 


J'ÉTAIS  plongé  dans  la  réflexion,  lorsque  le 
loup-cervier  m'adressa  ces  paroles  :  Sage  admi- 
rateur de  la  nature ,  apprends  de  moi  la  fierté 
et  les  manières  superbes.  Dirigé  par  l'élévation  de 


(  io8  ) 

mes  vues  et  par  la  hardiesse  de  mes  desseins ,  je  suis 
attentif  à  tout  ce  qui  peut  me  rapprocher  de  l'objet 
de  mon  amour  ,  et  je  finis  par  m'asseoir  à  ses 
côtés.  Lorsque  je  poursuis  ma  proie,  je  ne  suis 
pas  aussi  prompt  que  le  cheval  ;  et  lorsque  je  l'ai 
atteinte,  je  ne  la  terrasse  pas  à  la  manière  du  lion  : 
mais  je  cherche  à  tromper  par  mes  ruses  et  par 
mon  astuce,  l'animal  que  je  veux  immoler,  et  si, 
dès  l'abord  ,  je  ne  puis  y  réussir  ,  ma  colère  s'al- 
lume avec  violence.  Ma  famille  cherche  alors  à 
m'apaiser  ;  mais  je  ne  veux  rien  entendre  ,  et  je 
suis  insensible  aux  bonnes  manières  et  à  la  dou- 
ceur. La  seule  cause  de  mon  émotion  provient 
de  ma  faiblesse  et  de  mon  impuissance.  Oui , 
il  faut  que  celui  qui  veut  devenir  parfait,  et  qui 
n'en  a  pas  la  force  ,  qui  veut  embrasser  la  vertu  , 
et  dont  l'ame  s'y  refuse  ;  il  faut,  dis -je,  qu'il 
fasse  éclater  contre  lui-même  la  colère  de  l'amour- 
propre ,  qu'il  prenne  ensuite  de  nouvelles  résolu- 
tions,  qu'il  redouble  d'efforts,  et  que,  pour  réussir, 
il  ne  se  contente  point  d'une  volonté  faible  et 
de  projets  mal  concertés. 

On  trouve  encore  dans  ma  manière  d'être  une 
leçon  instructive,  intelligible  seulement  pour  celui 
qui  a  l'esprit  propre  à  saisir  les  allégories  ;  c'est 
que  ma  gloutonnerie ,  accroissant  la  masse  naturelle 
de  mon  sang  et  de  ma  chair ,  me  procure  un  excessif 


(  ï09  ) 
embonpoint.  Appesanti  par  cette  graisse  surabon- 
dante, je  crains  d'être  atteint,  si  l'on  me  poursuivait, 
et  de  rester  vaincu  dans  l'arène,  si  l'on  m'attaquait. 
Tu  me  verras  alors  fuir  les  animaux  de  mon  espèce  , 
et  me  cacher  au  fond  de  mon  repaire,  pour  mettre 
ordre  à  ma  conscience.  Je  me  traite  moi-même  , 
en  quittant  mes  habitudes  et  en  comprimant  mon 
naturel;  je  mortifie  mon  cœur  par  l'abstinence, 
qui  est  la  base  de  la  dévotion  ;  et  lorsque  mes 
pensées  s'élèvent,  que  mon  ardeur  est  vraie,  que 
inon  corps  est  purifié  de  la  corruption  et  mon 
ame  guérie  de  la  langueur,  je  sors  de  ma  retraite 
solitaire:  mes  infirmités  sont  passées  ;  je  ne  suis 
plus  gêné  sur  le  lieu  de  mon  habitation  ,  et  je 
m'établis  où  je  me  plais.  Si  tu  te  sens  capable 
de  m'imiter,  parcours  la  même  carrière  que  moi; 
h  mon  exemple ,  abandonne  pour  toujours  tes  an- 
ciennes habitudes. 

VERS. 

J'ai  vu  le  loup-cervier  s'emporter  avec  violence, 
lorsque,  attaquant  sa  proie,  il  ne  peut  la  terrasser  : 
ainsi  doit  faire  l'homme  sage  et  généreux  qui 
marche  dans  la  voie  du  spiritualisme,  s'il  désire 
acquérir  cette  douce  gaieté  d'esprit  à  laquelle  on 
parvient  si  difficilement. 


(    l'û  ) 


ALLEGORIE  XXXIV, 

LE    VER-X-SOIE. 

Les  qualités  viriles  ne  consistent  ni  dans  les 
formes  athlétiques ,  ni  dans  la  privation  des  bois- 
sons et  des  mets,  dit  alors  le  ver-à-soie  ;  et  ce  n'est 
point  un  mérite  de  prodiguer  des  choses  faites  pour 
êtreprodis^uées.  La  véritable  générosité  est  celle  qui 
apprend  à  donner  libéralement  son  nécessaire  et  sa 
propre  existence.  Aussi,  en  faisant  lenumération 
des  bonnes  qualités ,  trouve- t-on  les  plus  précieuses 
chez  de  simples  vers.  Je  fais  partie  de  cette  classe 
innombrable  ,  et  je  suis  susceptible  d'attache- 
ment envers  ceux  qui  ont  de  l'amitié  pour  moi. 
Graine  dans  le  principe ,  je  suis  recueilli  comme 
la  semence  que  l'on  veut  confier  à  la  terre  ;  ensuite, 
tantôt  les  femmes  ,  tantôt  les  hommes,  m'échauffent 
dans  leur  sein.  Quand  la  durée  de  ces  soins  vivi- 
fians  est  parvenue  à  son  terme  ,  et  que  la  puissance 
divine  me  permet  de  naître  ,  je  sors  alors  de  cette 
graine ,  et  je  me  montre  à  la  lumière.  Je  jette  ensuite 
un  regard  sur  moi-même,  le  jour  de  ma  naissance , 
et  je  vois  que  je  ne  suis  qu'un  pauvre  orphelin , 
mais   que    l'homme    me  prodigue   ses   attentions, 


(     M,     ) 

qu'il  éloigne  de  moi  les  mets  nuisibles,  et  qu'il 
ne  me  donne  jamais  que  la  même  nourriture. 
Mon  éducation  étant  terminée  ,  et  dès  que  je 
commence  à  acquérir  de  la  force  et  de  la  vi- 
gueur, je  me  hâte  de  remplir  envers  mon  hien- 
fîiiteur ,  les  devoirs  qu'exige  la  reconnaissance  , 
et  de  rendre  ce  que  je  dois  h.  celui  qui  m'a  bien 
traité.  Je  me  mets  donc  à  travailler  d'une  manière 
utile  à  l'homme,  me  conformant  k  cette  sentence: 
La  récompense  d'un  bienfait  peut-elle  être  autre  que 
le  bienfait'.  Sans  la  moindre  prétention,  \\\  sans 
me  plaindre  du  travail  pénible  que  je  m'impose, 
je  fais  avec  ma  liqueur  soyeuse ,  par  l'inspiration 
du  destin ,  un  fil  que  les  gens  doués  du  plus  grand 
discernement  ne  sauraient  produire  ,  et  qui ,  après 
ma  mort,  excite  envers  moi  la  reconnaissance.  Ce 
fil  sert  h.  faire  des  tissus  qui  ornent  celui  qui  les 
porte ,  et  qui  flattent  les  gens  les  plus  sérieux.  Les 
rois  eux-mêmes  se  parent  avec  orgueil  des  étoffes 
que  l'on  forme  de  mon  cocon ,  et  les  emj^ereurs 
recherchent  les  vêtemens  où  brille  ma  soie  :  c'est 
elle  qui  décore  les  salles  de  jeu,  qui  donne  un 
nouvel  attrait  aux  jeunes  beautés  dont  le  sein  com- 
mence à  s'arrondir  ,  qui  est  enfin  la  jxnrure  la  plus 
voluptueuse    et  la    plus  élégante. 

Après  avoir  fait  pour  mon   bient'aiieur   ce    que 
la  reconnaissance   exige  de  moi,  et  satisfait   ainsi 


{  "2  ) 

aux  lois  de  la  réciprocité ,  je  fais  mon  tombeau 
de  la  maison  que  j'ai  tissue ,  et  dans  cette  enve- 
loppe doit  s'opérer  ma  résurrection  ;  je  travaille 
à  rendre  ma  prison  plus  étroite ,  et  ,  me  faisant 
mourir  moi-même,  je  m'y  ensevelis  comme  la 
veille.  Pensant  uniquement  à  l'avantage  d'autrui, 
je  donne  généreusement  tout  ce  que  je  possède, 
et  je  ne  garde  pour  moi  que  la  peine  et  les  tour- 
mens.  De  plus,  exposé  aux  peines  de  ce  monde, 
dont  les  fondemens  sont  le  malheur  et  l'infortune, 
je  suis  obligé  de  supporter  ce  que  me  fait  souffrir 
un  feu  violent,  et  la  jalousie  de  l'araignée  ma  voisine, 
qui  est  injuste  et  méchante  envers  moi.  Cette  arai- 
gnée ,  dont  l'emploi  est  de  faire  la  plus  frêle  des 
demeures  ,  non  contente  de  me  chagriner  par  son 
voisinage  importun  ,  ose  encore  rivaliser  avec 
moi,  et  me  dire  :  Mon  tissu  est  comme  le  tien, 
notre  travail  a  les  mêmes  défauts,  et  nous  éprou- 
vons également  l'ardeur  du  feu  :  c'est  donc  en 
vain  que  tu  prétendrais  avoir  la  supériorité  sur 
moi.  Fi  donc  1  lui  dis-je  de  mon  côté ,  ta  toile 
est  un  filet  à  prendre  des  mouches  et  k  rassembler  la 
poussière  ,  tandis  que  mon  tissu  sert  d'ornement 
aux  princes  les  plus  distingués.  N'es-tu  pas  d'ail- 
leurs celle  dont  le  Coran  a  publié  de  toute  éternité 
la  faiblesse,  et  ta  faiblesse  n'est-elle  point,  par  suite, 
passée  en  proverbe.  Oui,  je  puis  le  dire,  il  y  a  entre 


(  "M 

toi  et  moi  la  même  différence  que  celle  cjui  existe 
entre  le  noir  arlificiel  que  donne  l'aniiinoine,  et  fa 
noirceur  naturelle  de  l'œil  ;  entre  la  pleine  lune 
et  une  étoile  h  son  couchant. 

VERS. 

C'est  de  celui  qui  dirige  dans  le  sentier  de  la 
vertu  et  qui  dispense  les  bienfaits  ,  que  je  tiens 
le  secret  de  filer  ma  liqueur  soyeuse.  O  toi  qui 
veux  imiter  mon  travail  ,  crois-tu  que  l'on  jouisse 
jamais  tirer  de  ta  toile  grossière  les  parures  magni- 
fiques que  l'on  forme  avec  mon  fil  précieux  !  Peur- 
on  donc  sans  mentir  s'arroger  un  mérite  quel- 
conque ,  lorsqu'on    n'est  pas  utile  a  autrui  ! 


ALLÉGORIE  XXXV. 

l'araignée. 

Quoique  tu  prétendes  que  ma  demeure  est 
la  plus  frêle  des  habitations,  et  qu'on  doit  ni'a- 
bandonner  au  mépris,  répliqua  l'araignée,  ma  su- 
périorité sur  toi  est  néanmoins  tracée  dans  le  livre 
de  mémoire.  Personne  ne  peut  me  reprocher  de 
m'avoir   donné  des  soins  ;   je  n'ai  pas  même  été 

u 


{  "4) 

Tobjet  de  la  tendresse  de  ma  mère  ,  ni  des  bontés 
de  mon  père.  Dès  le  moment  de  ma  naissance,  je 
m'établis  dans  un  coin  de  la  maison  et  je  com- 
mence à  y  filer.  Une  masure  est  ce  que  je  préfère , 
et  j'ai  une  propension  naturelle  pour  les  angles , 
parce  qu'on  peut  s'y  cacher  et  qu'ils  offrent  une 
foule  de  choses  mystérieuses.  Aussitôt  que  j'ai  trouvé 
un  lieu  où  je  puisse  commodément  tendre  ma  toile, 
je  jette  alternativement  de  l'une  à  l'autre  paroi  ma 
liqueur  glutineuse ,  en  évitant  avec  soin  de  mêler 
les  fils  de  mon  tissu  ;  puis  je  fais  sortir  par  les 
pores  de  ma  filière  ,  une  soie  mince  qui  descend 
au  travers  de  l'air,  et  m'y  tenant  à  la  renverse,  ac- 
crochée par  les  pattes ,  je  laisse  pendre  celles  qui  me 
servent  de  mains  ;  aussi  ,  trompé  par  cette  posi- 
tion,  croit-on  que  je  suis  réellement  morte.  C'est 
alors  que  si  la  mouche  passe  ,  je  la  prends  dans 
les  filets  tendus  par  ma  ruse  ,  et  je  l'emprisonne 
dans  les  rets  de  ma  chasse.  Je  sais  que  tu  es  en 
possession  d'un  honneur  dont  je  suis  privée  ,  en 
ce  que  je  ne  tisse  point  comme  toi  des  étoffes  pré- 
cieuses  pour  cette  maison  de  passage  :  mais  où  étais- 
tu,  la  nuit  de  la  caverne,  lorsque  de  ma  toile  pro- 
tectrice je  voilai  le  Prophète  choisi  de  Dieu,  que 
j'éloignai  de  lui  les  regards ,  et  le  délivrai  ainsi  des 
légions  infidèles ,  faisant  pour  lui  ce  que  ni  les  fugi- 
tifs de  la  Mecque,  ni  les  Médinois,  n'auraient  ja- 


(  "^  ) 

mais  pu  faire!  Je  protégeai  de  inéine  le  respectable 
vieillard  Aboubecre,  qui  accompagna  Mahomet 
à  Médine  et  dans  la  caverne  ,  et  qui  le  suivit  dans 
Je  chemin  de  Thonneuret  de  ha  gloire.  Pour  toi,  tu 
n'emploies  tes  vaines  parures  qu'à  tromper  et  h  sé- 
duire; aussi  tes  étoffes,  destinées  à  l'ornement  des 
femmes  dont  l'esprit  est  si^  peu  solide  et  à  l'amu- 
sement des  enfans  qui  n'ont  pas  de  raison ,  sont 
interdites  aux  hommes  ,  parce  que  l'éclat  n'en  sau- 
rait durer,  que  leur  usage  n'est  d'aucun  profit  réel , 
et  qu'on  nen  peut  tirer  aucun  avantage  pour  la 
vie  spirituelle.  Hélas  1  combien  est  malheureux  celui 
que  sa  maîtresse  délaisse,  en  lui  ôtant  l'espoir  de 
se  donner  jamais  à  lui;  qu'elle  prive  de  ses  faveurs, 
en  lui  interdisant  même  la  douceur  de  la  demande  ; 
qu'elle  éloigne  impitoyablement  de  sa  présence  , 
en  lui  défendant  d'approcher  î 

VERS. 

O  toi  qui  te  complais  dans  des  salons  somp- 
tueux et  magnifiques,  tu  as  donc  oublié  que  ce 
monde  n'est  autre  chose  qu'un  temple  pour  prier 
et  pour  adorer  Dieu.  Après  avoir  dormi  sur  ces 
lits  voluptueux,  tu  descendras  demain  dans  l'étroit 
et  sombre  caveau  du  sépulcre  ;  tu  seras  au  milieu 
d'êtres  silencieux,  mais  dont  le  silence  énergique 
équivaut  k  des  paroles  :  ah  !    qu'un  simple  habit 

H    2 


(  "6) 
soit  tout  ton  vêtement,  et  que  quelques  bouchées 
forment  ta  nourriture;  comine  l'araignée,  prends 
une  habitation  modeste,  en  te  disant  a  toi-même  : 
Demeurons  ici  en  attendant  la  mort. 


ALLEGORIE  XXXVL 

LA    FOURMI. 

« 

Si  la  fortune  ennemie  te  décoche  ses  traits  , 
dit  alors  la  fourmi,  oppose-lui  un  calme  inalté- 
rable ;  et  lorsque  tu  verras  quelqu'un  qui  se  prépare 
à  parcourir  la  carrière  du  spiritualisme ,  pars  avant 
lui,  et  ne  néglige  point  follement  de  régler  tes 
actions  dans  cette  vie.  Prends  leçon  de  moi ,  et 
sens  combien  il  importe  de  faire  des  préparatifs  et 
de  se  munir  d'un  viatique  pour  la  vie  future.  Vois  le 
but  élevé  que  j'ai  constainmenl  devant  les  yeux,  et 
considère  de  quelle  manière  la  niain  de  la  Provi- 
dence a  ceint  mes  reins  comme  ceux  de  l'esclave , 
afin  de  me  dispenser  de  serrer  et  de  délier  tour- 
â-tour  m^a  ceinture.  Des  qu'au  sortir  du  néant 
j'ouvre  les  yeux  a  la  lumière  ,  on  me  voit  empressée 
a  me  ranger  parmi  les  serviteurs  de  la  céleste 
amie;  je  m'occupe  ensuite,  dirigée  par  l'assistance 
divine,    a  recueillir  les  provisions  nécessaires,  et 


(  "7  ) 
j'ni  pour  cela  un  avantage  que  l'homme  fe  plus  in- 
telligeni  ne  possède  point ,  c'est  que  mon  odorat 
s'étend  à  la  distance  de  plusieurs  parasanges.  Je 
mets  en  ordre,  dans  ma  cellule,  les  grains  que  j'ai 
ainsi  rassemblés  pour  ma  nourriture; et  celui  qui  fait 
ouvrir  l'amande  et  le  noyau  ,  m'inspire  de  couper 
chaque  grain  en  deux  parties  égales  :  mais  si  c'est 
de  la  semence  de  coriandre  ,  je  la  divise  en  quatre , 
guidée  par  le  même  instinct  ;  et  cette  précaution 
est  nécessaire  ])our  détruire  en  elle  la  faculté 
germinative  ;  car,  partagée  en  deux,  elle  ne  lais- 
serait pas  de  se  reproduire.  Lorsque,  dans  l'hiver, 
je  crains  que  l'humidité  du  sol  n'altère  mes  grains  , 
je  les  expose  à  l'air  un  jour  où  le  soleil  luit ,  afin 
que  sa  chaleur  les  sèche.  Tel  est  constamment 
mon  usage  :  et  tu  prétends  que  ces  mesures  sont 
mal  prises ,  qu'elles  doivent  m'ètre  funestes  ,  et 
que  c'est  ,  d'ailleurs  ,  marquer  trop  d'attachement 
pour  les  biens  de  ce  monde  1  Tu  te  trompes , 
je  le  l'assure  ;  si  tu  connaissais  ce  qui  me  porte 
b.  agir  de  la  sorte,  tu  m'excuserais  toi-même, 
et  tu  ferais  de  moi  plus  de  cas  que  tu  nen  fais. 
Sache  que  Dieu  (  qu'il  soit  béni  et  loué  1  )  a  des 
armées  que  lui  seul  connaît  ,  comme  l'attestent 
ces  mots  du  Coran  :  Personne  ne  connaît  les  armées 
de  ton  Seig;neur ,  si  ce  n'est  lui  seul.  Or  il  y  a  sous 
terre    l'armée  des   fourmis  ,    dont    le   nombre   est 

H  3 


(  '>8  ) 
incalculable.  Nous  observons  les  règles  du  service 
de  Dieu,  nous  ne  nous  attachons  qu'à  lui,  nous  ne 
nous  confions  qu'en  lui ,  et  nous  n'avons  que  lui 
en  vue  ;  aussi  suscite-t-il,  du  milieu  de  nous,  celles 
qu'il  veut  élever  sur  nous,  et  il  demande  que  nous 
soyons  soumises,  afin  que  nos  chefs  nous  promettent 
des  bienfaits.  Après  avoir  entendu  cette  promesse, 
nous  sortons  sans  contrainte ,  nous  résignant  à 
mourir;  et,  au  moment  de  notre  départ,  notre  si- 
tuation semble  exprimer  ces  mots  : 

VERS. 

Reçois,  ô  ma  bien-aimée,  fes  adieux  que  je 
t'adresse,  les  yeux  mouillés  des  larmes  de  la  dou- 
leur, en  pensant  que  je  vais  être  séparé  de  toi. 
Nous  vivrons  ,  je  l'espère  ,  et  Dieu  couronnera 
notre  amour  ;  mais  si  la  mort  vient  nous  frapper, 
nous  nous  retrouverons  ensemble  dans  une  vie 
plus  heureuse. 


Nous  employons  tous  nos  efforts,  amassant  sans 
cesse  pour  être  utiles  à  d'autres  qu'à  nous.  Mais 
exposées  à  mille  genres  de  mort  ,  parmi  nous 
les  unes  périssent  de  faim  ou  de  soif,  les  autres 
tombent  dans  un  précipice,  d'où  elles  ne  peu- 
vent sortir  :  ici  c'est  une   mouche  qui  les  saisit  ; 


(    ""O   ) 
là  un  quadrupède  ou  un  animal  quelconque  qui  fes 
foule  aux  pieds  ;  plus  loin  ,  c'est  un  oiseau  qui  en 
fait  sa  nourriture.    Parmi  nous,  les  unes  meurent 
saintement,  tandis  que  d'autres  ne  sauraient  obte- 
nir le  salut;  enfin,  d'après  ces  mots  du  Coran  ,  // 
y  a  des  croyans  qui  ont  observé  sincèrement  ce  qu  "ils  ont 
promis  a  Dieu,  nous  mettons  devant  nous  ce  que 
nous  avons  ,  et  nous  le  partageons  également  entre 
nous  sans  aucune  partialité  et  sans  aucune  injustice. 
Si  tu  es  du  nombre  des  élus,  tu  te  convertiras 
par  l'autorité  du  Coran;  mais  si  l'aile  de  ta  volonté 
ne  peut  atteindre  aux  choses  élevées ,  le  destin  t'est 
contraire. 


ALLÉGORIE  XXXVII  ET  DERNIÈRE. 

LE    GRIFFON. 

O  vous  qui  savez  comprendre  les  allégories, 
en  voici  une  qui  ne  peut  manquer  de  vous  être 
agréable  :  si  vous  croyez  pouvoir  saisir  le  sens  caché 
de  la  parabole  que  je  vous  présente,  écoutez  atten- 
tivement ces  allusions  énigmatiques  qui  renferment 
mon  secret. 

On  rapporte  qu'un  jour  les  oiseaux  s'assem- 
blèrent, et  qu'ils  se  dirent  les  uns  aux  autres  :  Nous 

H  4 


(  ^^-^  ) 

ne  pouvons  nous  passer  d'un  roi  que  nous  recon- 
naissions, et  par  qui  nous  soyons  reconnus  :  allons 
donc  en  chercher  un,  attachons -nous  à  lui,  et, 
soumis  à  ses  lois,  nous  vivrons  a  l'abri  de  tout  mal, 
sous  sa  protection  semblable  à  l'ombre  d'un  arbre 
au  feuillage  épais.  On  nous  a  dit  qu'il  y  a,  dans 
une  des  îles  de  la  mer,  un  oiseau  nommé  Anca- 
moffreb ,  dont  l'autorité  s'étend  de  l'orient  à  l'occi- 
dent  :  pleins  de  confiance  en  cet  être,  volons  donc 
vers  lui.  Mais  la  mer  est  profonde  ,  leur  dit-on  ; 
la  route  est  difficile  et  d'une  longueur  incalculable: 
vous   avez  à  franchir    des   montagnes  élevées  ,    à 
traverser  un  océan  orageux  et   àes  flammes  dé- 
vorantes. Croyez -le  ,  vous  ne  sauriez  parvenir  à 
cette  île  mystérieuse  ;    et  quand  même   vous   sur- 
monteriez tous  les  obstacles  ,  la  pointe  acérée  des 
lances  empêche  d'approcher  de  l'objet  sacré  :  res- 
tez donc  dans  vos  nids ,  car  votre  partage  est  la 
faiblesse,  et  ce  puissant  monarque  n'a  pas  besoin 
de  vos  hommages,    comme   l'expose  ce   texte   du 
Coran  :  Dieu  n'a  pas  besoin  des  créatures.  Le  Des- 
tin vous   avertit  d'ailleurs  de  vous  défier  de  votre 
ardeur,  et  Dieu  lui-même    vous   y   engage.   Cela 
est    vrai  ,   répondirent  -  ils  ;    mais   les    désirs    de 
l'amour    ne   cessent   de    nous   faire  entendre  ces 
mots   du  Coran  :  Alle-^  vers  Dieu.  Ils   s'élancèrent 
donc  dans  l'air,  avec  les  ailes  auxquelles  fait  allu- 


(  •'•'  ) 

sion  ce  passage  du  inôme  livru  ,  Us  pensent  à  lu 
création  du  ciel  et  de  la  terre ,  supportant  avec  pa- 
tience la  soif  brûlante  du  midi  ,  d'aj)rès  ces  pa- 
roles ,  Celui  qui  sort  de  sa  maison  pour  fuir  C7"c.  lis 
marchèrent  sans  se  détourner  jamais  de  leur  roule  : 
car,  prenaient-ils  à  droite,  le  désespoir  venait  les 
glacer;  prenaient-ils  à  gauche,  l'ardeur  de  la  crainte 
venait  les  consumer.  Tantôt  ils  s'efforçaient  de  se 
devancer  mutuellement;  tantôt  ils  se  suivaient  sim- 
plement l'un  l'autre.  Les  ténèbres  d'une  nuit  obs- 
cure, l'anéantissement,  les  flammes,  ladéfiillance  , 
les  Mots  irrités,  l'éloignement  ,  la  séparation,  les 
tourmentaient  tour-à-tour.  Ils  arrivèrent  tous  enfin 
à  cette  île  pour  laquelle  ils  avaient  abandonné 
leur  patrie,  mais  l'un  après  l'autre,  sans  plumes, 
maigres  et  abattus,  tandis  qu'ils  étaient  partis  sur- 
chargés d'embonpoint. 

Lorsqu'ils  furent  entrés  dans  l'île  de  ce  roi,  ils  y 
trouvèrent  tout  ce  que  l'ame  peut  désirer ,  et  tout  ce 
que  les  yeux  peuvent  espérer  de  voir.  On  dit  alors 
à  ceux  qui  aimaient  les  délices  de  la  table,  ces  mots 
du  Coran  ,  Prene^  des  ali/nens  sains  et  légers ,  en 
récompense  du  bien  que  vous  ave^fait  dans  l'autre  vie  ;  h 
ceux  qui  avaient  du  goût  pour  la  parure  et  pour  la 
toilette  ,  ces  mots  du  même  livre  ,  Ils  seront  revêtus 
de  draps  précieux  et  d'habits  moirés ,  et  seront  placés 
en  face  les   uns  des  autres  ;   h  ceux   j:)our  qui    les 


(     "22    ) 

plaisirs  de  l'amour  avaient  Je  plus  d'altraits,  Nous 
les  avons  unis  aux  hour'is  célestes.  Mais  lorsque  les 
contemplatifs  s'aperçurent  de  ce  partage  :  Quoi  I 
dirent-ils  ,  ici  comme  sur  la  terre  notre  occupa- 
tion sera  de  boire  et  de  manger  !  Quand  donc 
l'amant  pourra -t- il  se  consacrer  entièrement  à 
l'objet  de  son  culte  î  quand  obtiendra-t-il  l'hon- 
neur qu'appellent  ses  vœux  brûlans  î  Non  ,  il  ne 
mérite  pas  la  moindre  considération  ,  celui  qui 
accepte  le  marché  de  la  dupe.  Quant  à  nous  , 
nous  ne  voulons  que  ce  roi  pour  qui  nous  avons 
traversé  des  lieux  pierreux,  franchi  tant  d'obstacles 
divers  ,  et  supporté  avec  patience  la  soif  ardente 
du  midi ,  en  nous  rappelant  ce  passage  du  Coran  : 
Celui  qui  sort  de  sa  maison  pour  fuir ,  &c.  Nous  fai- 
sons d'ailleurs  peu  de  cas  des  parures  et  des  autres 
agrémens.  Non,  encore  une  fois,  par  celui  qui 
seul  est  Dieu,  ce  n'est  que  lui  que  nous  desirons, 
que  lui  seul  que  nous  voulons  pour  nous.  Pour- 
quoi donc  êtes -vous  venus,  leur  dit  alors  le 
roi,  et  qu'avez -vous  apporté!  L'humilité  qui  con- 
vient à  tes  serviteurs,  répondirent- ils  ;  et  certes', 
nous  osons  le  dire,  tu  sais  mieux  que  nous-mêmes 
ce  que  nous  desirons.  Retournez-vous-en,  leur 
dit-il.  Oui,  je  suis  le  roi,  que  cela  vous  plaise  ou 
non  ;  et  Dieu  n'a  pas  besoin  de  vous.  Seigneur,  ré- 
pliquèrent-ils ,  nous  savons  que  tu  n'as  pas  besoin 


(  >^^  ) 

de  nous;  mais  personne  parmi  nous  ne  peut  se  passer 
de  toi. Tu  es  l'être  excellent,  et  nous  sommes  dans 
Fabjection;  tu  es  le  fort,  et  nous  sommes  la  fai- 
blesse même.  Comment  pourrions-nous  rcimirner 
aux  lieux  d'où  nous  venonsî  nos  forces  sont  épuisées, 
nos  cohortes  sont  dans  un  état  de  maigreur  inex- 
primable, et  les  traverses  auxquelles  nous  avons 
été  en  proie  ont  anéanti  notre  existence  corporelle. 
Par  ma  gloire  et  par  ma  dignité,  dit  alors  le  roi, 
puisque  votre  pauvreté  volontaire  est  vraie,  et  que 
votre  humilité  est  certaine,  il  est  de  mon  devoir 
de  vous  retirer  de  votre  position  malheureuse. 
Guérissez  celui  qui  est  malade;  et  venez  tous  dans 
ce  jardin  frais  et  ombragé,  goûter  le  repos  le  plus 
voluptueux.  Que  celui  dont  l'espoir  s'est  attiédi , 
prenne  un  breuvage  où  l'on  aura  mêlé  du  gin- 
gembre; que  celui,  au  contraire,  qui  s'est  laissé 
emporter  par  la  chaleur  brûlante  du  désir ,  se  désal- 
tère dans  une  coupe  où  l'on  aura  mêlé  du  camphre. 
Dites  à  cet  amant  fidèle  qui  a  marché  dans  la  voie 
du  spiritualisme.  Bois  à  la  fontaine  nommée  Sa/- 
sabil.  Amenez  à  son  médecin  le  malade ,  puisque 
sa  fièvre  amoureuse  est  véritable;  approchez  de  sa 
maîtresse  l'amant  ,  puisque  sa  mort  mystique  est 
complète.  Alors  leur  seigneur  les  combla  de  bon- 
heur et  de  joie;  il  les  abreuva  d'une  liqueur  qui 
les  purifia  ;    et  aussitôt  qu'ils   en  eurent  bu  ,  ils 


(  '  ••'•4  ) 

furent  plongés  dans  la  plus  douce  ivresse.  Ifs  dan- 
sèrent ensuite  au  son  d'airs  mélodieux:  ils  dési- 
rèrent de  nouveaux  plaisirs  ,  et  ils  les  obtinrent  ; 
ils  firent  diverses  demandes,  et  ils  furent  toujours 
exaucés.  Ifs  prirent  feur  vof  avec  fes  aifes  de  fa 
familiarité ,  en  présence  de  Gabriel  ;  et ,  pour  saisir 
le  grain  sans  tache  du  chaste  amour  ,  ils  descen- 
dirent dans  le  lieu  le  plus  agréable,  où  était  le 
roi  fe  plus  puissant.  Aussitôt  qu'ils  y  furent  arri- 
vés, ifs  entrèrent  en  possession  du  bonheur,  et, 
jetant  avidement  îeurs  regards  dans  ce  fieu  sacré, 
ils  virent  que  rien  ne  cachait  pfus  fe  visage  de 
feur  maîtresse  adorée  ;  que  fes  coupes  étaient 
disposées  ;  que  les  amans  étaient  avec  leur  divine 

amie Ifs  virent  enfin  ce  que  î'œif  n'a  jamais 

vu ,  et  ils  entendirent  ce  que  l'oreille  n'a  jamais 
entendu. 

VERS. 

O  mon  ame,  réjouis-toi  à  l'heureuse  nouvefîe 
que  je  vais  t'apprendre  :  ta  maîtresse  chérie  re- 
çoit de  nouveau  tes  vœux  et  tes  hommages  ;  sa 
tente,  asyfe  du  mystère,  est  ouverte  à  ses  amans 
fidèîes.  Respire  avec  vofupté  fes  parfums  enivrans 
qui  s'exhalent  de  cette  tribu  sacrée.  Vois  f'écfair, 
avant- coureur  de  l'union  la  plus  tendre,  briller 
au  foin  dans  la  nue.  Tu  vas  vivre  dans  la  situation 


(  ■•^'  ) 

la  plus  douce;  toujours  auprès  de  ta  hien-aiiiiée, 
toujours  avec  l'idole  de  ton  cœur,  sans  que  rien 
puisse  jamais  t'en  séparer.  Les  larmes  de  l'absence 
ne  mouilleront  plus  tes  paupières  ;  une  barrière 
funeste  ne  t'éloignera  plus  de  ce  seuil  héni  ;  un 
voile  im]:)ortun  ne  te  cachera  plus  ces  traits  radieux: 
tes  yeux,  ivres  d'amour,  contempleront,  h.  tout 
jamais,  la  beauté  ravissante  de  cet  objet  dont  une 
foule  d'amans  désirent  si  ardemment  la  vue,  et 
pour  qui  tant  de  cœurs  sont  consumés  d'amour. 


(   "7  ) 


NOTES. 


HQ-l'O'i-^Qy 


PRÉFACE    d'aZZ-EDDIN    ELMOCADESSI. 


AGE  //',  ligne  S.  Les  mots  ^^j  CAs^  ^  manquent  dans  fcs 
manuscrits  A  et  B. 

r.  tJ',  1.  12.  Le  ms.  D  seul  omet  le  mot  W^-^>J,  que  j'aurais 
peut-être  retranché  également,  si  j'avais  eu  ce  manuscrit  dès  le 
commencement  de  l'impression  de  ces  allégories. 

P.  iJ',  l.  I).  J'ai  suivi  la  leçon  du  ms.  A  ;  les  mss.  B  et  C  portent 

^^^  O^  ajLoI  Lo  ^à^  ,  et  le  ms.  D  porte  ^^^j  «Ojî^  ^^\ô^ 

P.  2,  l.  6.  Les  mots  ^-JM  v^  jusqu'à  CAaj  sont  du  Coran,  XXXV, 
2,  édit.  de  Hinckeimann.  Il  y  a  ici  une  difficulté  :  c'est  de  savoir 
pourquoi  on  lit  1^  la  première  fois,  et  «*-'  la  seconde,  Beïdawi, 
Comm.du  Coran  (J^j'^l  J/^J  (J'^-i^' j'j^' )»  s'exprime  ainsi 
sur  ce  passage  :  j.*Ju  JjVf  Jj^jlî  qV  ^'^jJ^\  <_9>^Li!wL 
qL  jLuil  cdl^  Jj  t->w.iji]fj  IgljUxj  ^jJii^o  jjLJîj  '-?'>îl-^ 
«^A-àx.  c>JiA^  <^j  <.<■  La  différence  que  l'on  observe  dans  les 
»  deux  pronoms,  provient  de  ce  que  le  premier  conjonctif  (^JM  L»j 

>»  s'explique  par  la  miséricorde,  tandis  que  le  second  est  absolu  et 
»  comprend  la  miséricorde  et  la  colère;  et  c'est  pour  faire  connaître 
»  que  la  miséricorde  de  Dieu  a  précédé  sa  colère.  » 

P.  2,  l.  12.  Cette  phrase  est  mystique.  L'auteur  veut  indiquer 
par  les  mots  ^'tV^  et  tV-Ji^  la  privation  de  l'union  avec  la  Di- 
vinité. La  leçon  que  j'ai  suivie  est  celle  des  mss.  A  ,  c  et  D;  le  ms. 
B  porte  cvJii  qÎj^j  ^  e.^^  '-«j  cv^j  ^  e^r.  U 


(   '28  ) 
p.  2,  î.  /j".  Les  ms?.  A  et  B  portent  (^aS  «a_jJ|  4^1   «Au-j'  U 
eiLoj  «_>=?•  j  <J^  cj^-:^'  '-^J  '-fi-*«'  |Cu>Aj 

P.  2,1.  ib.  Les  Arabes,  en  pariant  de  l'éclair,  se  servent  sou- 
vent  du  terme  de  iuxj"  sourire,  et,  en  pariant  du  tonnerre,  de 

celui  de  LgJLa^  ^'^^^^  ^  ^^^^-  Ceux  qui  ont  lu  des  poètes  arabes 
sont  habitués  à  cts  expressions. 

P.  2,  l.  2;.  Les  mss.  B  et  C  portent  (j^  ^^  au  lieu  de  (^o    L». 
Je  suis  fâché  de  n'avoir  pas  suivi  cette  leçon  ,  qui  est  certainement 

préférable,  à  cause  de  rallittération  qu'il  y  a  entre  (J*'^  et  la  der- 
nière syllabe  de  (ji^^l  ,  et  du  parallélisme  qui  existe  entre  les 
mots  de  cette  phrase  et  ceux  de  la  phrase  précédente. 

P.  j ,  l.  /.  Le  j^-^^*^  est  le  Puiiica  Granatum  de  Linnée. 

P.  j,  l.  6.  Je  pense  que  j'aurais  pu  traduire  aussi  y^  J^  par 

■fleurs  de  feu ,  J-?»  signifiant  en  arabe,  comme  J^en  persan  et  en 

turc,  une  fleur  quelconque  :  la  leçon  du  ms.  B,  qui  porte  jU-A^^, 
confirmerait  même  cette  interprétation.  D'ailleurs  on  trouve  sou- 
vent chez  les  poètes  orientaux  les  fleurs  du  grenadier  comparées  à 
du  feu.  Ainsi  on  lit  dans  le  Guiistan  : 

«  Bien  des  branches  de  grenadier  portaient  des  fleurs  que  l'on 
»  aurait  prises  pour  du  feu  suspendu  à  des  rameaux  verdoyans.  " 

Mais  comme  le  sens  ici  est  mystique ,  je  crois  ma  traduction 
plus  conforme  au  style  figuré  et  allégorique  de  l'auteur. 

P.  J ,  l.  p-  Je  ne  mets  pas  de  point  après  ^^j^  ,  et  je  lis  ^jj 
qui  est  la  leçon  du  ms.  D.  A  la  lettre  :  «  Le  rossignol  chante  sur 
«  son  rameau  flexible  et  sur  son  laurier.  »  Forskal,  Flora  ^g}f- 
tiaco-arah.,  traduit  tVj  par  Artemisia  pontica. 

P.  j,  l.  J2.  A  la  lettre  :  «  Il  révèle  ce  qu'il  tenait  caché  de  son 
5>  amour  pour  sa  Zénab  et  pour  sa  Hend.  »  Les  mots  f-^i^.j  et  t>-*^ 
sont  des  noms  de  femme  assez  communs  chez  les  Arabes  ;  mais  on 
voit  bien  que,  sous  ces  noms,  l'auteur  veut  désigner  la  Divinité. 


(  »->^)  ) 

P-  J .  //y.  ^  p:\raii  ctrc  ici  dans  le  sens  de  stniir.  signilicaiioii 
c|uc  les  Persans  donnent  cjuclqucfois  au  vcrhc  (jtW-ii  ;  c'est  ainsi 
cju'on  lit  dans  le  Gulistiin ,  III ,  jy  ; 

«  Les  pauvres  sentaient  seulement  l'odeur  de  ses  mets.  •» 

On  pourrait  aussi,  peut-être,  traduire  CV_^  »->t^  ^  •^•^^  ^ 

par  :  "  à  cause  de  ce  qu'il  croit  entendre  dans  le  langage  allégo- 
'•  ri(jue  de  l'odeur  embaumée  venant  de  Najd.  "   Quant  au  mot 

c\^  ,  il  signifie  terra  emineritior  ;  mais  on  a  donné  ce  nom  à  une 
petite  province  de  l'Arabie,  dans  laquelle  la  ville  de  iVlédine  est 
située  ,  parce  que  son  terrain  est  un  peu  plus  élevé  que  celui 
de  la  province  de  Tahamali ,  où  la  ville  de  la  Mecque  est  bâtie. 
Voyez  d'Herbclot,    BiHioth.   orient,  au   mot  Nagi4ni. 

P.  y.  /.  /y.  Par  rapport  au  sens  qu'a  ici  le  mot  lJj^  ,  voyez 
les  notes  sur  la  rose. 

P.  j ,  /.  -?j.  C'est  à-dire,  «  qui  ne  se  contente  pas  des  pratiques 
i>  extérieures  du  culte  ,  mais  qui  veut  une  religion  toute  intérieure 
>•  et  toute  spirituelle.  >• 

P.  4 '  l-  '•  Les  mots  pV^,  -c  „i,.u._)  Vf  *^"  ^  qL  sont  tirés 
du  Coran,  XVII ,  46. 

P.  4 ,  l-  4-  (y^y^  signifie  l'action  par  laquelle  Dieu  rend  con- 
forme à  ce  qui  lui  plait,  ce  que  tait  son  serviteur  (  l'homme)  : 

oLr^»  à.^  U  UiLo  eUx^  Jvjti  Awf  JL«-^    Kitid  Tarifât.   (*), 

P.  4 ,  '■  ~-  Cette  phrase  est  le  commencement  de  la  XVII.*  su- 
rate du  Coran,  dans  laquelle  il  est  question  du  voyage  nocturne 

de  M.ahomet  au  ciel  :  c'est  de  ce  voyage,  nommé  ^ '_>*-•,  que 
parle  ici  l'auteur. 

P.  4  •  l-  ^S-  Le  '""^  J  ^^  trouve  assez  souvent  employé  comme 
nom;  on  le  rencontre,  entre  autres,  dans  la  Vie  de  Tamerlan ,  tom. 
If.  p.  pço,  édit.   de   Manger. 

(')  Voyez,  sur  cet  ouvrage,  U  savante  notice  de  M.  <\c  Sac/,  Netiets  et  rxiTuiii 
dts  AIss.  tom.  X,  pd(.  1 — p^ 

I 


(    -30  ) 

P.  j ,  l.  6.  Le  mot  Jij=*'  ,  pi.  de  J^,  est  pris  ici  dans  un 

sens  spirituel.  L'auteur  du  cJ*«^r>r*-*  C-s*-"'^,  Livre  des définîtions , 
le  rend  par  *->*>|^ 

P.  ;,  1. 14-  Turdus  Mcrula  de  Linnée.  Le  mot  Jj>^  ,  pi.  ^J^  » 
manque  dans  nos  dictionnaires  ;   mais  on  le  trouve  dans  Russel , 

Natural  Histor}'of  Akppo ,  t.  II, p.  20 f,  et  ailleurs.  On  ne  lit  v *j 

^XAJsLb».,  et  ce  qui  suit  jusqu'à  *o»^_>-^'  ,  que  dans  les  mss.  A  et  D. 

P.  j ,  l.  Tj.  Dans  ma  traduction,  j'ai  omis  à  dessein  les  mots 
jLfcjVL  jyJaJl  f^^^  O^  jL^*^'  (^ <» ^  «UL^'j,  qui  signifient 
à  la  lettre  :  «  Je  lai  nommé  la  manifestation  des  secrets,  d'après 
'»  les  vues  de  sagesse  que  Dieu  a  déposées  dans  les  oiseaux  et  dans 
»  les  fleurs.  »  Le  mot  (J>  *'>^~»  signifie  ici  :  'Ijj  ^^  (^  c-vXbVi 

\^c  ^ù.^    \^i^^    iL^â_^^jLii  jyo^U   ^^f>-S-t^i  vi'^'-*-^'    O^   CJ^^I 
\'oyez  les  Notices  des  Alanuscrits ,  t.  X ,  p.  26. 

P.  ; ,  l.  ip.  Les  mots  jUa^Vl  J,Ji  L>  L^.-yxL5  sont  du  Coran  , 
LIX  ,  2  édit.  de  Hinckelmann,  et  signifient  à  la  lettre  :  «  Profitez 
5>  des  instructions ,  vous  qui  avez  de  l'intelligence.  » 

P.  ^ ,  I.  22.  Quoique  cette  phrase  ne  soit  pas  traduite  très-litté- 
ralement, je  crois  cependant  que  j'ai  rendu  le  sens  que  l'auteur  a 
voulu  exprimer;  car  les  mots  (JvjU!  ^  (j)\ô^  signifient  à  la 
lettre  ,  «  Celui-là  est  de  mes  semblables ,  »  c'est-à-dire,  «  ii  pense 
>»  comme  moi  ;  il  goûtera  par  conséquent  mon  livre  ;  »  et  les  mots 
^LCil  Q^  (_/Yr^  veulent  dire  ,  «  Il  n'est  point  de  ceux  qui  me 
»  conviennent  (  pour  lecteurs  ).  »  On  voit  que  dans  ces  deux 
phrases  l'auteur  joue  sur  la  double  signification  de  J  ^^  '  et  de  JLCi  I 

P'  J ,  l-  2^.  Il  semble  que  ce  que  l'auteur  dit  ici,  à  partir  de 
t>iJj  jusqu'à  la  fin  de  la  préface  ,  a  précédé  les  réflexions  qu'il 
vient  d'exprimer ,  et  les  a  peut-être  occasionnées. 

P.  J ,  L  2).  On  voit  que  l'auteur  a  voulu  faire  une  antithèse  , 
en  opposant  pô^  k  Oi^^k 

P.  S  ,1.  2j.  On  lit  dans  le  ms.A  :  «O'j^jlj  o_^U î  ^Sl^  c5<>-!  ^ 

p.  6,  I.  ^.  L'auteur  joue  sur  jjj   et  jjjij 


(   "3.  ) 

P.  6 ,  l.  S.  Dans  le  texte  ar. ,  les  trois  membres  de  phr.«e  sur  le 
rossignol  sont  séparés  et  contiennent  chacun  un  nom  d'uiscau  dit- 
fcrent.  J'ai  réuni,  dans  ma  traduction  ,  ces  trois  noms  sous  celui  de 
rossignol ,  et  j'ai  joint  ensemble  les  trois  membres.  Voyez ,  au  sujet 
du  rossignol  ,  les  notes  sur  l'allégorie  qui  porte  rc  titre. 

F.  6.  I.  /,-.   jLil  />  est  ici  sur-tout  à  cause  de  l'homonymie. 

P.  y,  l.  I.  Ces  vers  ont  été  cités  par  William  Joncs,  dans  ic% 
Vdcseos  asiatica.  Commentarii ,  chayitre  XVl .  p.ige  ^j^  ,  édition 
originale ,  et  par  M.  de  Sacy ,  dans  la  préface  persane  qu'il  a 
mise  à  la  tête  du  Pcnd-nnmck  d'Attar  ,  Ebn-Arabschah  en  cite 
les  deux  derniers  dans  son  ouvrage  intitulé  *UtL>-  *sgi=.L3 

A  7,  /.  //.  L'auteur  joue  sur  la  double  acception  du  mot 
j  «J  ,  qui  signifie  litmière  et  calice  d'une  fcur. 

P.  7,  /,  16.  William  Jones  et  M.  de  Sacy  ont  imprimé  Ja-SU^— ^  ; 
mais  tous  mes  manuscrits  portent  i2>-À-J<.-^^.  \'oici  comment  on  lit 
ce  vers  dans  le  ms.  C  : 

ALLÉG.    I."^    —    LE    ZÉPHYR. 

P.  g,  L  //.J'ai  un  peu  paraphrasé  les  mot";  (Jj— ^-—  o  '^-^J 
«Ly-Oï  (J,\  Jl^JjJi  ,  pour  développer  le  sens  que  ces  paroles  me 
paraissent  renfermer.  Ce  passage  est  cite  dans  les  Potseos  asinticcr 
CommentiiTii ,  p.  ^64  de  l'édition  originale;  mais,  comme  l'a  déjà 
fort  bien  remarqué  M.  Humbcrt  dans  son  Anthologie  araèc ,  p.  2^j, 
le  célèbre  orientaliste  anglais  ,  trompé  par  une  laute  de  son  ma- 
nuscrit,  a  lu  iuyS^  au  lieu  de  4jood?,  qu'indiquent  le  sens  et  la 
rime  ,  et  qui  est  la  seule  leçon  de  mes  quatre  manuscrits. 

P.  p,  /.  ij.  Au  lieu  de  cette  phrase  ,  on  lit  dans  le  ms.  A  ,  cJtV^  ' 

fj»^^  t^^'j^  ij'^]  ïiLLL)  o 

p.  10^  l.  F.  Tou<;  les  mss.  portent  ^^LUVÎ  (j:j3  ;  mais  c'est 
uniquement  par  inattention  que  j'ai  laissé  cette  défectuosité  du 
langage  vulgaire-,  car  il  faut  ici  le  nominatif. 

P.  n  .  /.  /.  J'ai  voulu  rendre  à  la  lettre  le  verbe  ,J-uX— ),  Le 
niot  i-LX-  signifie  catenn\  de  là  Jv.*X^' ,  deuxième  forme  ({ua- 

I   -x 


(    '32    ) 
driiitcrc  :  Fluxit  aqua ,  peculiariter  catefice  forma;  uti  fit  leniter  im- 
pellcnte  vento. 

F.  Il ,  l.  2.  Les  Arabes  reconnaissent  la  distinction  des  ^tJiti 
dans  le  palmier,  et  probablement  dans  d'autres  végétaux.  On  peut 
voir  l'intéressant  article  sur  le  dattier ,  qui  se  trouve  dans  l'extrait 
de  Kazwini,  donné  par  M.  de  Chézy  dans  la  Chrcstomathie  arabe  de 
M.  de  Sacy,  t.  III ,  /'.  jjS. 

P.  Il,  I.  lo.  Les  mots  c?^j^'  (J^-' '  indiquent  assez  que  ces  vers 
sont  mystiques.  Je  dois  laire  observer  que,  dans  (J^jy  ,  (^yà^^ , 
^^L-JjVI,  c.?xuo',  ^^_y^  et  ij^^JS^  ^  le  ij,  n'est  autre  chose  que 
la  saturation  [  P^-il  ]  du  kesra.  Voyez  la  Grammaire  axahe ,  t.  II ^ 

T-374' 

P.  II ,  L  i^.  Au  lieu  de  la  leçon  que  j'ai  suivie ,  on  lit  dans  le 

ms.  B,  f>^i^   ItN-^î 

P.  II ,  h  i6.  L'auteur  a  fait  ^'^^  du  féminin;  mais  on  sait  que 
ies  poètes  font  masculin  un  nom  féminin,  et  féminin  un  nom 
masculin.  Gramm.  ar.  t.  II ,  p.  pz. 

P.  II ,  l.  ly.  Le  verbe  ^j-S*  signifie  se  couvrir  du  ^J^,  qui 
est  le  voile  que  les  femmes  mettent  en  Egypte  lorsqu'elles  sortent. 
C'est  une  pièce  de  mousseline  blanche,  avec  deux  trous  pour 
ies  yeux ,  afin  que  la  personne  ainsi  voilée  puisse  secondaire.  On 
peut  voir  la  figure  et  la  description  du  ^^  dans  Niebuhr, 
Voyage  en  Arabie,  t.  I ,  p.  /j»^,  et  pi.  XX 111. 

P.  12  ,  l.  I.  Le  mot  (j^  signifie,  comme  «oLi.  ^,  en  persan  , 
lieu  où  l'on  vend  du  vin ,  cabaret,  ire.  On  ne  trouve  pas  ce  mot 
dans  ies  dictionnaires ,  mais  on  trouve  «-jUw  traduit  par  anopolium; 
ce  qui  suffit  pour  déterminer  le  sens  de  o*»-=*:  M.  de  Sacy  a 
d'ailleurs  donné  à  ce  mot  la  même  signification  que  je  lui  donne 
ici.  Voyez  ia  Chrest.  ar.  t.  II,  p.  zy^,  2j4- 

Ces  vers ,  comme  je  l'ai  annoncé  plus  haut ,  sont  mystiques.  Dans 
ies  deux  derniers ,  le  cabaret  est  le  couvent  ;  le  vin  est  l'amour  de 
Dieu  ;  la  beauté  qui  laisse  voir  ses  charmes ,  est  la  divinité  elle-même , 
qui  accorde  un  instant  de  jouissance  extatique  à  ses  amans  fidèles. 
Le  mot  c^-iv  ,  qui  est  un  nom  de  femme,  équivaut  ici  au  «V^.  ^ 
des  Persans. 


(  '3i  ) 

Quoicjiie  le  ma'un  du  diLiret  ci  l'échamon  ne  paraissent  pas  dans 
ces  vers,  je  crois  devoir  faire  remarquer  que,  dans  les  poésies  mys- 
tiques, on  veut  designer  par  le  premier,  le  supérieur  du  couvent , 
et  par  le  second,  le  prédicateur  qui  excite  ii  l'amour  de  Dieu. Té- 
moin ces  vers  de  Hafk  : 

'«  Souille  de  vin  le  tapis  où  tu  fais  ta  prière,  si  le  cabarcticr  te 
«  l'ordonne  ;  >>  c'est-à-dire ,  «■  Renonce  aux  pratiques  extérieures 
"  de  la  religion,  si  telle  est  la  volonté  de  ton  supérieur  spirituel.  -> 

•<  Echanson ,  porte  la  coupe  à  la  ronde,  et  donne-la  moi;  »  c'est- 
à-dire  ,  ««  Prédicateur  ,  parle  de  l'amour  de  Dieu ,  et  viens  m'y 
•«  exciter.  » 

ALLÉG.     II.    LA     ROSE. 

P.  12 ,  I.  j.  Rosii  ccntifollii  de  Linnée. 

P.  12,  l.  II.  Cette  première  phrase  f;iit  partie  de  l'allégorie  pré- 
cédente dans  le  ms.  A. 

P.  12  ,  /.  iS.  Au  lieu  de  ij^-^  ,  le  ms.  B  porte  ij»^  ;  mais  j'ai 
cru  devoir  préférer  la  leçon  des  autres  mss.  On  retrouve  ailleurs 
cette  expression  proverbiale ,  entre  autres  dans  des  vers  du  Bous- 
tan  cités  par  M.  de  Sacy  ,  Pcnd-namch ,  p.  22/. 

P.  12 ,  l.  ip.  On  trouve  l'inverse  de  cette  pensée  dans  la  troisième 
séance  de  Hariri  : 

A  cette  occasion  ,  je  dois  rappeler  que  les  Orientaux  comparent 
toujours  les  êtres  inanimés  aux  êtres  vivans,  ce  qui  est  le  contraire 
de  ce  que  nous  faisons  pour  l'ordinaire.  Ainsi,  de  même  que  nous 
comparons  le  teint  d'une  beauté  au  coloris  de  la  rose ,  ils  com- 
parent la  rose  au  teint  d'une  beauté,  &c.  Voici  une  comparaison 
de  ce  genre ,  tirée  de  VAnvari  Soheili,  p.  ,/6  recto 


(  '34  ) 

•■•  La  brise  embaumée  du  matin  répandait  sur  ce  parterre  une 
>»  odeur  suave  ;  k  jasmin  qui  i'ornait  avait  les  charmes  des  joues 
*  de  ma  maîtresse  ;  le  bouton  de  la  rose,  entr'ouvert  par  le  zéphyr 
»  matinal,  était  semblable  à  la  jeune  beauté  qui  ouvre  à  demi  lA 
>'  bouche  pour  sourire  à  son  ami.  »  H^ 

Je  renvoie  à  la  fable  de  l'Ours  et  du  Paysan  (  Anvari  Soh.  p.  6j 
et  suiv.y,  ceux  qui  voudront,  en  ce  genre,  lire  des  exagérations 
qu  il  serait  impossible  de  faire  passer  en  français. 

M.  de  Fontanes  a  imité  cette  manière  de  comparer  des  Orien- 
taux, dans  son  poëme  intitulé  les  Fleurs: 

* 

La  rose  embaumant  ce  sentier 

Brille  comme  le  front  d'une  vierge  ingénue 
Que  fait  rougir  l'Amour  d'une  flamme  inconnue. 

Cimoens  a  dit  également  : 

Pintando  estava  alli  Zephyro  e  Flora 
As  violas,  da  cor  dos  amadores , 
O  lirio  roxo,  a  fresca  rasa  btlla, 
{^uaî  reluze  nas  faces  da  donzclla. 

Lusiade,  IX ,  6i. 

Par  jU^Wl  CJj^  ,  l'hahitde  l'amant ,  l'auteur  entend  l'hahit  vert, 
et  il  veut  parler  du  bouton  de  rose,  qui  semble  habillé  d'un  vête- 
ment vert,  Saadi  se  sert  à-peu-près  de  la  même  expression  dans 
la  préface  du  Gulistan ,  en  parlant  des  feuilles  des  arbres  : 

^VJvi^Xo  (V^    «^Lsfc  Mj^        (^y^ — ^J-' J^ _yy^  0^->^^ 
"Un  vêtement  vert,  semblable  à  ÎTiabit  de  fête  des  heureux,  or- 
»  nait  les  branches  des  arbres.  » 

Au  lieu  de  cette  phrase,  on  lit  dans  les  mss.  B  et  D  c>-;>^2_£,| 


(  I  V-,  ) 

H.  iz,l.  jj.  Celte  icitc  me  raj»[»cllc  une  jolie  cpigraininc  <\< 
Martial,  XJ.  <po. 

An    POLLAM. 

Inuictiis  quixre  mittis  rnihi,  Po/Ia  ,  coronas  ! 
A  u  vexatas  malo  tcncre  rosas. 

P.  ij,  L  y.  On  lit  dans  le  ms.  A  Cilib  qLj  ^Uj  j   ^J?  ^^.> 

P.  t^,  /.y.  Dans  les  poètes  orientaux  on  trouve  souvent  le  mot 
sang  employé  en  parlant  de  la  rose  ou  de  ses  pétales.  Je  me  con- 
tenterai de  citer  cet  hémistiche  de  \ Anvari Sohcili ,]y.  -yz  verso: 

«•  Du  sang  (  c.-à-d.  des  pétales  teints  de  sang  )  n'orne  plus  Ici 
»»  rameaux  du  rosier:  est-ce  l'effet  du  zéphyr  printanierî  >» 

P.  ij,  l.  iS.  A  la  lettre,  ««  les  mains  des  chrétiens;  »»  en  effet,  ce 
sont  eux  particulièrement  qui  distillent  les  roses  dans  le  Levant.  Au 

lieu  de  SjLo-iJl  ,  qui  est  probablement  pour  (J^La-Jf  à  cause  de 

la  rime,  j'aïu-ais  peut-être  mieux  fait  d'imprimer  ë  .LkjJl,  qui  est 
ia  leçon  de  deux  manuscrits. 

P./j,  L  21.  On  voit  que  l'auteur  joue  sur  oJ^^peau,  ett>-l^, 
force. 

P,  /;,  /.  jy.  Les  mots  ij>^^.  à^y.  ^j  iS^y^  p^.  ^  signi- 
fient à  la  lettre,  «  on  ne  redresse  pas  ma  courbure  et  l'on  ne  prend 
"  pas  mon  licou.  »  Le  mot  3  |  est  le  nom  d'action  du  verbe  ^If  ,in- 
curvavit ,  &c.  On  trouve  la  même  expression  dans  la  \  i.<^  séance 
de  Hariri  :  ij^y  f^'^^  Cy^  ij^*-^^'  c>-*^  ,  &c. 

P.  jj  ,  1.2;.  Tout  ceci  est  bien  oriental;  mais  j'ai  conservé  les 
figurcî  de  i'original,  de  crainte  de  dénaturer  les  idées. 

P.  14,  /•  à'  *-5^>-«-^  signifie  ici  la  vie  spirituelle  et  avttemplative ; 
mais  ce  mot  est  proprement  le  nom  du  troisième  degré  du  spiritua- 
lisme. Voyez  le  Pcnd-namèh  de  M.  de  Sacy,^.  i6j,  et  la  Bihlioth. 
orient. ,  aux  mots  Are^  et  Arefoun. 

P.  14,  l.  tj.  '^à^i  ^  est  la  leçon  du  ms.  A  ;  les  trois  autres  mss, 

1  4 


(  '36  ) 

portent  ^^1  jj-*.  Il  n'est  peut-être  pas  inutile  de  iaiie  observer 
que  Ui:i.l  Le  est  une  formule  admirative,  et  que  vXjliî  est  à 
l'accusatif,  comme  chjet  de  l'admiration  (  «»-*-«  t_>o*Ai[  ).  Voy.  la 
Grammaire  arak,  t.  II ,  p.  iy6  etsuiv, 

ALLÉG.    III.    LE   MYRTE. 

P.  jj ,  l.  I.  Cette  allégorie  ne  se  lit  que  dans  le  ms.  A,  où  elle 
remplace  celle  du  narcisse,  qui  ne  s'y  trouve  point.  Comme  ce 
manuscrit  est  très-correct ,  et  que  c'est  celui  dont  j'ai  toujours  suivi 
îes  leçons  préférablement,  j'ai  cru  devoir  la  conserver.  Les  vers 
qu'on  lit  dans  ce  manuscrit  à  la  fin  de  cette  allégorie,  sont  les 
mêmes  que  ceux  qui,  dans  les  autres  manuscrits,  se  trouvent  à  la 
fin  de  l'allégorie  du  narcisse,  et  que  j'ai  placés  en  cet  endroit. 

P.  ij  ,  I.  2.  {J^f^j^  est  le  nom  usuel  de  l'arbrisseau  nommé  ,  en 

arabe  plus  littéral,  ^J\    A'Jynus  communis  de  Linnée  (  Forsk.  Flor- 

yEg.-araL  p.  LXVl;  VOuv.  sur  l'Eg)p.  Hist.  naî.  t.  II,  p.  6^ ,  &c. } 

P.  ij,  l.  6.  J'ai  traduit  ^j-»  par  trictrac,  sur  l'autorité  de  Hyde ,  qui, 
dans  son  Historia  nerdiludii  (  Syntagma  dissertationum,  t.  II,  ;;  2iy  et 
suiv.  ) ,  a  traité  de  ce  jeu  ex  professa  et  fort  au  long.  Ce  qu'il  y  a  de 
plus  intéressant  dans  cette  dissertation,  est  le  S-  VI  (p.  2fo},  Depri- 
maria  Nerdiludii  scopo  seu  intentione ,  et  quid  eo  designctur  et  représente- 
tur;  et  le  S-  vu,  De  Nerdiludii  antiquitatc  et  primo  auctore  seu  inventore. 

On  voit  souvent,  et  dans  toutes  les  zones,  par  un  temps  très- 
serein,  de  petits  nuages  floconneux  rangés  par  lignes  parallèles  et 
très-régulièrement  espacés  :  c'est  peut-être  à  cette  disposition  parti- 
culière de  la  vapeur  vésiculaire  que  l'auteur  a  voulu  faire  allusion, 
en  comparant  le  ciel  au  tablier  d'un  trictrac  couvert  de  dames  et  de 
dés.  Les  petits  nuages  que  le  peuple  désigne  sous  le  nom  de  moutons, 
ont  beaucoup  occupé  les  physiciens  modernes.  Ils  se  trouvent  à 
d'immenses  hauteurs,  peut-être  à  plus  de  cinq  mille  toises  au-dessus 
du  niveau  de  l'Océan.  Le  célèbre  voyageur  M.  de  Humboldt  les  a 
vus  lorsqu'il  était  sur  le  sommet  des  Andes;  les  stries  parallèles  pa- 
raissent convergentes,  apparence  qui  estl'efl^et  de  la  perspective  de 
leur  projection  sur  h  voûte  céleste.  L'espacement  àes  petits  groupes 


(   >57  ) 

de  vapeurs  est   ii    icgulier,  qu'on  pourrait  croire  qu'il   cit  dû   ù 
(juciqiic   force  répulsive ,   ou  a  i'ciectricitc. 

P.  I ),  I.  7.  Le  texte  imprime  porte  ^^^^^  ,  et  c'est  ainsi  qu'on 
lit  dans  le  ms.  A  ,  qui  ,  comrac  je  l'ai  dit,  est  le  seul  où  se  trouve 
cette  allégorie  ;  mais  ce  passage  me  paraissant  altéré,  j'ai  consulté 

Al.  le  Baron  de  Sacy,  qui  conjecture  qu'il  faut  lire   j^^'  ;  et  if 
est  probable  que  c'est  la  vraie  leçon. 

La  signification  du  mot  j^r"  ne  me  parait  pas  bien  précise  ; 
ce  mot  se  trouve  dans  la  dixième  séance  de  Hariri,  mais  le  com- 
mentateur se  contente  de  dire  que  c'est  une  fleur  jaune.  On  lit 

dans  Golius  :  "j^  U.  quodyj^  i-; y-i-y  1  {J^  ,  Buphthalmum,  herha 

»  (odoraui,  Q\.)  vcrnalis ,  luteo  flore  ;  >•  et  au  mot  j[_>c  ^  «  Buphthal- 

•»  mum  sUi'cstrc,  hni  Oiioris  herha  quadam.  » 

Le  mot  Xoi  signifie  aussi  en  turc  et  en  arabe  vulgaire  des  épi- 


ceries. 


P.  //,  /.  1^.  On  trouve  presque  les  mêmes  paroles  dans  le  Can- 
tique des  cantiques  : 

ry  pN3  iN"i2  zD*2ï:n  :  iS  "|Sn  c]Sn  Di^^n  "iny  mon  r\ir-\  -  o 

n'3D  nain  n^Nnn  :  ij^^^xn  yQK^3  *^inn  bipi  y^jn  i^Din 

:  "]S  -  ':h'\  ^'^s'  *n'y-i  oS  'oip  n^"^  i3n:  "iidd  zD'is:m 

«•  L'hiver  est  passé,  la  pluie  a  cessé  d'inonder  nos  campagnes.  Déjà 
»  les  fleurs  s'épanouissent  dans  nos  prés  ,  des  gazouillemens  se  font 
»  entendre,  le  roucoulement  du  ramier  frappe  nos  oreilles;  déjà 
»  on  aperçoit  la  figue  verte  sur  son  rameau  ;  fa  vigne  en  fleurs 
5>  répand  son  doux  partum  :  lève-toi  donc,  6  ma  bien-aîmée  î 
»•  viens,  ô  beauté  que  j'adore!  »  Ch.  II,  v.  11  etsuiv. 

P.  16  ,  /.  2.  ojj  est  le  pluriel  de  *^JJ  . 

P.  ij,  l.  I.  J'ai  mis  à  dessein  les  mots  prédestination   et  prémo- 
tion, qui  sont  la  traduction  littérale  des  mots  arabes  v.<s-a 'I  et 

P.  1/  ,  /.  4'  Voici  encore  une  irrégularité  du  langage  moderne , 
que  j'ai,  mal  à  propos,  négligé  de  corriger  j  car  il  faut  j'tV'  ^^  . 


(   >.^8  ) 

ALLÉG.    IV.    —    LE    NARCISSE. 

P.  ly,  i.  S.  Le  ^j»^^jj  ou  ,jVrTt>*  >  en  persan  ^j*.^j^  ,  est  le 
Nardssus  Tiizena  de  Linnée,  selon  Forskal  (Flor.  yEg.-ar.y.  LXV  )y 
€£  selon  M.  Dclile  (Ouvrage  sur  l'Egypte  ,  Hist.  nat.  t.  II ,  p.  jpj, 
et  le  Narcissus  orientalis,  selon  Sprengel  (  Rci  herh.  Hist.  t.  I,p.  2)jJ. 

Il  paraît  plus  probable  que  le  ly^j^  est  le  Narcissus  orientalis , 
qui  croit  dans  les  campagnes  de  l'Orient,  i^Mt\& Narcissus  Tazetta, 
<JUT  se  trouve  sauvage  en  France ,  en  Espagne  et  en  Portugal.  Les 
deux  espèces  se  ressemblent  d'ailleurs  beaucoup  ,  et  l'on  peut  faci- 
lement les  confondre  :  leurs  fleurs  sont  également  blanches',  à 
centre  jaune  ,  et  très -odoriférantes. 

P.  ly,  l.  p.  J'aurais  pu  mettre  également,  au  lieu  du  viyrte ,  la 
rose  ou  toute  autre  fleur. 

P.  ij ,  l.  ij.  C'est  probablement  à  cause  de  la  hampe  du  narcisse, 
laquelle  donne  à  cette  fleur  l'air  d'être  debout ,  que  l'auteur  nomme 
le  narcisse  a^L^  ,  serviteur.  Cet  ouvrage  n'est  pas  le  seul  où  l'on 
peigne  le  narcisse  sous  ces  traits.  On  trouve  par  exemple  dans  Ebn- 
Tamin  ( Poés.  as.  Comm.   p.  i4î  >   édit.  or.y*: 

Aottne  vides  rosam  sedentcm  ,  ad  cujus  scrvitium  surgit  narcissus  '. 

P.  ly  y  l.  ly.  Il  est  peut-être  ici  question  du  f^o-^  dont  parle 
M.  de  Sacy  dans  le  Pend-nameh ,  p.  jç6 ,  c'est-à-dire  ,  du  service 
des  hommes  consacrés  à  Dieu  d'une  manière  particulière,  ou  du 
service  de  Dieu  que  l'on  appelle  plus  communément  *-cua 

P.  ly^  l.  2.O.  Deux  manuscrits  portent  '-^^^-^  ,  qui  est  l'ortho  - 
graphe  et  la  prononciation  vulgaire;  car,  comme  on  le  sait,  les 
lettres O,  ^  et  ■*'  n'existent  point  dans  le  langage  commun  :  on 
substitue  ,  soit  dans  l'écriture,  soit  dans  la  prononciation,  à  la  pre- 
mière un  c:> ,  à  la  deuxième  un  i  ,  et  à  la  troisième  un  -^  \  mais 
il  faut  observer  que  toutes  les  fois  que  les  lettres  O ,  -^  et  -i^  sont 
écrites,  on  est  obligé  de  les  prononcer  suivant  leur  véritable  pro- 
nonciation ,  c'est-à-dire ,  O  M^  (  th  anglais  dur  ) ,  ^  tha  (  th  an- 
glais doux  ) ,  Cl  i»  za  (z)  ;  et  viu  versa,  lorsqu'on  les  a  remplacées  par 
<^  %  ^  ^"^  (j'  ;  il  ïie  faut  point  admettre  l'autre  prononciation.  ._ 


(   ..5c)  ) 

/'.  //,  /.  -'/.  Je  voulais  d'abord  donner  au  verhc  jj**^  le  sens 
ligure  que  les  Persans  donnent  souvent  au  verbe  ^;;^w«.-o  ,  comme , 
par  exemple  ,  dans  ces  jolis  vers  de  la  préface  du  CylistuH  : 

iS — « — *  ^  j^.y^  lS^  y  '^■^ 

*Ji- — ^  J — :^ — f^*-»    J^  (J-*   L>JlCj 
rv ^ — .^  ^D    L    J.cV»  (^;>^!yj 

««  J'étais  un  jour  au  bain  ,  lorsqu'une  main  chérie  me  jeta  une 
»  boulette  d'argile  parfumée.  Els-tu  musc  ou  ambre,  lui  dis-je  !  je 
M  suis  enivre  par  ton  odeur  délicieuse.  Je  n'étais ,  me  répondit-elle, 
»  qu'une  misérable  argile  ;  mais  j'ai  demeuré  avec  la  rose  (  je  me  suis 
»  assise  avec  la  rose  ,  c'est-à-dire,  on  m'a  mise  avec  la  rose  ) ,  et  sa 
>'  précieuse  société  (  la  perfection  de  la  personne  assise  avec  moi  ) 
»  a  produit  l'effet  que  tu  admires  ;  sans  cela  ,  je  serais  toujours  ce 
»  que  j'étais  d'abord.  >" 

Mais  il  est  plus  naturel  de  traduire  ici  (j*^^  dans  le  sens 
propre  ,  et  le  vers  d'Ebn-Tamim  que  j'ai  cité  plus  haut,  m'y  a 
entièrement  décidé. 

P.  iS ,  l.  ^.  Je  lis  avec  fc  ms.  D,  (jwo   <^j^  ^^ 
F.  tS ,  1.  4-  Of^  vo'^  ^^^  l'auteur  joue  ici  sur  les  mots  (_^o  ,  ma 
coupe ,  et  (j^^,  pour  ^k^,  nom  d\igeftt,  de  (j-^^^ 

P.  jS,  /.  /.  Ahmed  1  eifaschi ,  Fior  di pcmitri  suIU  picirc preziosc , 
i>.  ly,  dit  qu'il  faut  ponctuer  le  jl-^  de  ^j^j  ;  je  n'ai  cependant  ja- 
mais vu  ce  mot  écrit  de  cette  manière.  Je  suis  forcé  de  relever  ici 
une  méprise  assez  forte  de  l'éditeur  italien  ,  qui,  ne  s'ctant  pas  sou- 
venu de  la  signification  du  mol  «-«►s*-* ,  qui  est  le  terme  technique 


(  '4o  ) 

pour  désigner  une  lettre  affectée  de  points  diacritiques,  a  traduit 

les  mots  *-6jA/8  J'i^o  par  /'/  dzal  dcgli  Ag'iamini ,  et  qui  de  plus  -x 

ajouté  en  note  /;.  S2,  Agiamini,  plurale  di  Agiami  (vocaholo  che  signi- 

jicn  harharo ,  estraneo ,  stnvticro  ) ,  son  chiamati  dagli  Arahi  tutti  coloro 

<he  non  apyartengono  alla  loro  nazione ,  ma  piii  spccialmente  i  Persiani 

P.  jS ,  l.  S.  Saadi  a  dit  également,  Gui.  II,  S  : 

jji;,A_j  o^Ui  oJ^  _>-*"  P^v  ^-'"'i'^J 
««  Ma  personne  est  un  objet  agréable  aux  yeux  des  hommes;  mais 
»  je  baisse   la  tête  de  la  confusion  à  cause  des  vices  de  mon  in- 
»  térieur,   » 

On  retrouvera  encore  la  même  pensée  dans  l'allégorie  de  l'ané- 
mone. 

P.  jp,  l.  j.  he  ij ,  dans  cij^l,  est  la  saturation  du  kesra  :  on 
l'a  mis  pour  conserver  l'uniformité  de  la  rime  ;   car  il  faut  lire 

J jl,  plur.  de  (J,ji 

P.  /p  ,  l.  4-  Le  mot  lt>^  demain  ,  se  prend  souvent  en  arabe,  de 
même  que  i3^5  en  persan,  pour  la  fin  de  la  vie ,  comme  dans  cet 
hémistiche  du  Boustan  de  Saadi  (  Pend-nameh ,  p.  2^0  )  : 

^•JOÎ   jUo      lijj     d.i=>      (J^IOÔ 

«  Cet  avare  ne  donnait  point,  négligeant  ainsi  d'amasser  des  mé- 
"  rites  qui  pussent  lui  servir  à  l'heure  de  la  mort  [  demain  J,  » 

(jyft^UJl    est   la  leçon  du   ms.   A  ;    les   trois  autres     manuscrits 
portent  ^jv^^UJl 

P.  jp,  l.  6.  A  la  lettre  :  «  ma  prunelle,  que  dis-je  î  le  petit 
»  homme  ou  la  petite  figure  que  Ton  y  voit.  »  Les  Orientaux  se 
servent  souvent  de  cette  expression. 

P.  ip  ,  l.  7.  Au  lieu  de  (J^i  (j  ,  le  ms.  D  porte  (J^J  O^  '■  cette 
ieçon  serait  peut-être  préférable,  mais  le  sens  alors  différerait. 
P.  ip ,  l.  jo.  Allusion  à   ces   mots  du  Coran,    XVII,    12,   (joj 

^y^   (J^-^^y  II  est  probable  que  l'auteur  veut  aussi  jouer  sur 
la  signification  de  limon ,  hue,  &c.  qu'a  également  le  mot  J-=^  . 


(  '4"  ) 

ALLÉC.    V.    —    I.F.    SÊNUFAK. 

P.  iç,  1. 12.  Le  ms.  A  porte  j^y-^.  Les  mots  j^j^  ,  J^y^  et 
^y  .sont  les  manières  plus  vulgaires  d'écrire  et  de  prononcer  le  mot 
->^J^  ,  qui  est  \cNj'mphita  Lotus,  de  Linnée,  Forsk.  (  De  script,  anim. 
A1dt.mcd.jK  i/jSj  dit  qu'on  nomme  aussi  cette  plante  OS>^-  Dans 
YOuvrnge sttr  l' Egypte ,  Hist.  mit.  t.  II ,  p.  ô/f.  M.  Dclilc  lui  donne 
encore  le  nom  de  o  Lo-  /jy-ij  f  ^^  celui  de  ^^J^  OV^  au  nc- 
nufar  bleu.  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  le  nom  que  l'on 
donne  communément  en  Egypte  au  Njmphaa  ,  est  (JS^^  ,  et  ce- 
lui que  l'on  donne  à  ses  fleurs  J^l  ij^^J^»  \  oyez  les  ou- 
vrages susdits,  et  Savary,  Lettres  sur  l'Egypte  ,  t.  I  ,  p.  p^. 

P.  20,  l.  I.  Ceci,  et  une  grande  partie  de  ce  qui  suit,  est  certai- 
nement mystique.  H  n'est  pas  difficile  de  s'apercevoir  que  le  né- 
nufar  est  l'amc  ,  et  que  l'eau  est  la  Divinité. 

P.  20 ,  l.  7.  C'est  absolument  la  fable  de  Tantale  :  Qjiœrit  aquas 
in  ei(juis. 

P.  20,  /.  //.  J'ai  tâché  de  rendre,  aussi  exactement  que  je  l'ai  pu, 
le  jeu  de  mots  de  l'auteur  sur  le  mot  (JS^  ;  mais  il  est  impossible 
de  traduire  ù  la  lettre  ^V>c-  'Ôj3  ,  qui  signifie  proprement  «  la 
'>  fraîcheur  de  mon  œil  »  ;  car  ,  la  fraîcheur  de  l'œil  signifie  ,  en 
arabe,  «  le  bonheur,  le  plaisir,  la  joic,&c.  »  C'est  par  une  idée 
analogue  ,  que  ,  pour  «  Bonne  nuit  »  ,  les  Arabes  disent  c^^bjLJ 
LiA-)  "  Que  votre  nuit  soit  blanche  ». 

P.  20,  l.  21.  On  a  imprimé  ij}c^^  ,  qui  est  la  leçon  des  quatre 
manuscrits;  mais  M.  de  Sacy  conjecture  qu'il  faia  ci''>^.  "  ^''^- 
»  à-vis  de  moi.  »» 

P.  2t ,  l.   I.  Au  lieu  de  (ûW-' ,  le  ms.  D  porte  j»^-^ 

P.  21 ,  I.  j.  ^j*>-£- V»  j-j\  V  c>>^  ^  pourrait  se  traduire  par 
l'expression  familière  :  «  Je  n'existerais,  ni  en  peinture,  ni  en 
n  figure.  » 

P.  2/  .  l.  6.  Il  est  indispensable  d'avertir  que  ces  vers  sont 
complètement  mystiques ,  afin  qu'on  puisse  les  entendre. 

P.  21,  1. 10.  Les  Orientaux  comparent  souvent  les  sourcils  des 


(     '42    ) 
beautés  à  un    arc  ,  et  leurs  œillades  à  des  flèches.  Rien  n'est  si 
fréquent  chez  les  poètes  persans  :  je  me  contenterai  d'en  citer  un 
exemple  tiré  de  V Anvûri  Soluiili ,  p.  S4 ,  r. 

•«  Elle  avait  fait  de  ses  sourcils  un  arc  ,  et  de  ses  œillades  des 
"  flèches  :  au  moyen  de  cet  arc  et  de  ces  flèches ,  elle  avait  rendu 
>»  cent  cœurs  esclaves.  » 

Il  est  probable  qu'il  faut  entendre  ainsi  «W^  ^j  31  iSj^i  (jo 

P.  21 ,  l.  i^,  H  y  a  ici  un  jeu  de  mots  entre  o''^  et  j>-^l.  Cet 
hémistiche  signifie  à  la  lettre  :  «Elle  a  fait  semblant  de  s'appro- 
>•  cher  de  moi ,  et  elle  a  approché  de  mes  cotés  un  amour,  &;c.  « 

P.  21,  l.  i4-  On  voit  qu'il  y  a  encore  ici  un  jeu  de  mots  entre 

*J3  CV5  ,  «  il  s'est  approché  ,  »  et  LjlS3  ,  «  il  nous  amis  en  pièces.»» 
C'est  une  suite  du  premier  jeu  de  mots. 

P.  22 ,  L  2.  Au  lieu  de  ^■^  ,  on  lit  dans  le  ms.  B  ,  3j^  ^  dans  ie 
ms.  C  ,  (j^O^  ,  et  dans  le  ms.  D ,  <->^ 

Le  mont  Sinaï  est  en  grande  vénération  parmi  les  musulmans , 
à  cause  que  c'est  là  que  la  loi  fut  donnée  aux  Israélites.  On  lit  dans 
ie  Gu  lis  tan  ,  J ,  J  ■ 

«  Le  mont  Sinaï  est  la  plus  petite  des  montagnes  ;  mais  elle  est 
»  en  très-grande  considération  auprès  de  Dieu ,  par  sa  dignité  et 
»  par  le  rang  qu'elle  tient  par-dessus  les  autres  montagnes.  »  Voyez 
d'Herbelot ,  Bièi.  or.  au  mot  Thoiir. 

J'ai  paraphrasé  le  dernier  vers ,  pour   amener  un  peu  mieux 
a  mention  du  mont  Sinaï. 

ALLÉG.    VI.    LE    SAULE  d' EGYPTE. 

P.  22,  l.  6.  Le  mot  arabe  (jv  se  donne  à  deux  végétaux  très-dif- 
férens.  Le  premier  est  le  Guilandina  AJoringa  de  L\nn.  f  A'foringa 
oleifern  ,  Lam.  ;  Aîoringa  zcjlajiica  ,  Persoon.  ;  Hyperanthcrn  Afo- 
r/«^rt,  Vahl.  et  Willd.  ; 


(  ■  (.5  ) 

Cci  arbre  croit  au  Malabar,  à.  Ccy  lan  et  dans  d'autres  régions  des 
Indes  orientales.  Ses  Heurs  sont  odoriférantes.  Nos  disiiilateurs  se 
*crvent  de  préférence  de  l'huile  de  ben  pour  fixer  le  parfum<îes 
rieurs:  on  mouille  du  coton  d'huile  de  ben  (  Oleum  t-alankum  ,  tiré 
du  fruit  ou  A'//.r  hen  ),  et  on  place  les  feuilles  de  rose  ou  de  toute 
autre  fleur  entre  ce  coton  mouillé;  en  chargeant  d'un  poids  la 
masse  entière  ,  l'huile  essentielle  et  aromatique  s'unit  à  l'huile  fixe 
du  Cuilandina.  (  Aldin.  Hon.  famés,  p.  ij^  ). 

(^laus  Celsius,  dans  son  HieroboraHuon  sive iU  Plantis  sacra  scriptura, 
t.  Il, p.  I,  dit  que  lcl"^3  hébreu  a  été  traduit  en  arabe  par  (^^'^dans 
plusieurs  endroits  de  l'Écriiure,  Dt:  quoban,  ajoute-t-il,  intcr  hcrbarios 
non  niinima  est  controvcrsia.  Plane  iiutcm  ca  cstqiuz  Grads  (icLKcuoç  fxu- 
pl'^AKYi,  et  Laiinis  Clans  unguentaria,  diàtur ;  génère ,  Bonduk  Plumicrio, 
Cuilandina  Linnœo.  Fructus  est  /jIaJ  I  «._>-^  ''"^'  ^^'*'""  exprimitur,  ire. 

Ce  que  dit  d'Herbelot ,  Bitlioth.  orient. ,  soit  à  l'article  Ban  ,  soit 
à  l'article  AJaharah ,  a  trait  a.u  Cuilandina  AJoringa.  Voyez  aussi 
Alurray ,  Appar.  mcd.  tom.   Il,  p-  )2^. 

Le  second  végétal  auquel  le  nom  de  (j»^  s'applique ,  et  que 
les  Arabes  nomment  aussi  t_>ÛA — i^  ^  est  le  Salix  agyptiaca  de 
Linnéc,  qui  est  originaire  d'Egypte,  de  Syrie,  de  Perse  et  des 
environs  d'Astracan.  C'est  un  grand  arbre  à  rameaux  alongés  et 
un  peu  cassans:  il  diffère  par  ce  caractère  seul  du  Salix  hahylo- 
nica ,  que  tous  les  botanistes  regardent  comme  une  espèce  distincte 
qui  croît  dans  le  Levant  et  en  Egypte  ,  et  que  les  Arabes  appellent 
<_>>è  Carf.  (  0*3^y  )  Voyez  Rauwolf,  Dcscript.  It. 

Pour  ne  rien  laisser  à  désirer  sur  ce  second  qv  ,  je  vais  citer 
ce  que  Prosper  Alpin  (de  Plantis  A^gypti,  p.  6i  ,  62  J  dit  de  cet 
arbre.  «  Arbusculum  fruiicosum  in  ytgypto  reperitur,  quod  mcâ 
>»  quidem  sententia  salicis  gcnus  existit,  nascirurque  in  locis  hu- 
y  midis ,  foliis  aliquatcnùs  salici  proximis ,  sed  multô  majoribus  ; 
»'  quippc  longioribus  ac  lalioribus.  Florçsque  ejus  sunt  quidam 
»  globuli  oblongi ,  aibi ,  lanuginosi ,  caudici ,  penè  foliorum  radiées 
»  nascentes,  quotquc  in  arbore  folia  existunt,  tôt  flores  emittit  : 
"  crescit  arbusculum  hoc  p.d  viticis  magnitudinem  ,  ramis  multis, 
»»  sive  stolonibus  rectis  :  ex  floribus,  ut  audio ,  distillant   aqiiani 


(  '44  ) 

^>  macaiai  vocatam,  quam  inslgnçs  vires  ad  exsiccandam  putredi- 
»  nem,atque  ad  vcnena  et  ad  cor  recreandum  habcre  illi  prae- 
»  dicant:  in  febribus  pestilentibus ,  ipsa  pro  secreto  auxilio  apud 
>»  îHos  habetur.  Aquam  etiam,  in  quâ  multi  flores  infusi  aliquan- 
»  diù  manserint,  vel  in  quâ  ebuiiierint,  exhibent  ad  dolores  ca- 
j>  pitis ,  atque  ad  virium  recreationem  ,  quam  et  ipsam  valide  pu- 
'>  tredini  ac  venenis  obsistere  experti  sunt.  Estque  ipsorum  decoc- 
>»  tum,  ac  infusio  in  aqua  paratâ ,  ad  quoscumque  febricitantes , 
>•  apud  ilios  in  maximo  usu,  "  Voyez  aussi  ce  que  dit  de  cet  arbre 
Vesiingius ,  dans  ses  observations  sur  Alpin ,  p.  21. 

Sprengel  f  Rei  herb.  Hist.  t.  I,p.  2jo  )  dit  égaieraent  que  l'on  dis- 
tille des  boutons  des  fleurs  de  cet  arbre  une  eau  très-parfumée. 
Cette  eau  est  sans  doute  la  même  dont  parle  Chardin,  sous  le 
nom  persan  de  tVo  ^^    (  tom.  III ,  p.  1^6 ,  édit.   de  M.  Lan- 

glèsy^,  de  laquelle  les  Persans  tirent  un  esprit  excellent  qui  sert 
aux  parfums  et  à  se  frotter  le  corps.  (  Tom.  IV ,  p.  66.  ) 
Kaempfer ,  dans  ses  Amœnitnies  exoticœ ,  parle  aussi  d'une  eau  que 
l'on  distille  d'un  saule  de  Perse,   qui  est  probablement  le  même. 

La  cause  de  la  dénomination  de  ,X >  ,  donnée  à  deux  végé- 
taux si  difi^érens  l'un  de  l'autre,  vient  peut-être  de  l'usage  qu'on 
a  de  fixer  les  parfums  sur  l'huile  de  hen ,  ce  qui  aura  fait  donner 
au  parfum  le  nom  de  i'huiie  sur  laquelle  il  est  fixé,  ou  vice  versa; 
d'où  l'on  aura  ensuite  confondu  les  deux  végétaux  qui  produisent, 
l'un,  l'huile  de  l>en,  et  l'autre,  l'eau  de  khalaf  ou  ben ;  végétaux 
bien  diflerens  sous  le  rapport  même  des  essences  qu'on  en  tire , 
puisque  l'huile  de  (^^«  est  le  produit  de  la  graine  du  Ginlandina , 
tandis  que  l'eau  de   khalaf  csl  celui  des  fleurs  du  saule. 

Il  reste  actuellement  à  savoir  si  le  ban ,  auquel  les  Arabes  com- 
parent sans  cesse  la  taille  légère  et  les  mouvemens  pleins  de 
grâces  de  leurs  maîtresses,  est  le  saule  ou  le  Morlnga;  mais  nous 
avons  vu  que  le  Guilandina  Aloringa  n'est  proprement  indigène 
que  dans  les  Indes  orientales  ;  or  les  Arabes  ne  parleraient  pas  si 
fréquemment  d'un  arbre  qu'on  ne  cultive  q;ie  dans  quelques  jardins. 
Nous  voyons,  au  contraire,  que  le  Salix  ctgypùaca  croît  dans  tout 


(  il'.  ) 

i'Oricnt;  et  le  genre  auquel  il  appartient  nous  indique  assez  qu'il 
a  de  la  grâce  dans  son  port,  et  que  ses  rameaux  se  balancent  faci- 
lement. S'il  faut  une  preuve  plus  convaincante,  j'invoquerai  l'au- 
torité de  Soyouti ,  qui,  dans  son  ouvrage  intitulé  yi/m/m^/r  (  man. 
ar.  de  la  Bibl.  du  Roi,  n.°  i  590),  place  ceci  dans  un  art.  sur  le  ,..Lj  : 

oLLiJî  ^jj  ^1  ^:^  |.i     ^^M  ^jJf  .Lot  U^U- 

««  Nous  nous  sommes  disputés  pour  savoir  laquelle  a  le  parfum  le 
"  plus  fin,  de  l'eau  du  khalaf,  ou  de  celle  des  feuilles  de  l'arroclic  : 
»  après  nous  être  bien  querellés,  la  paix  a  été  faite,  et  d'un  commun 
»  accord  nous  nous  sommes  décidés  en  faveur  du  khalaf.  » 

D'où  ilest  évident  que  Soyouti  considère  le  .Aj  [  qui  est  néces- 
sairement celui  des  pottes  arabes  )  comme  synonyme  de  ovXi^: 
or  ce  mot  est  un  autre  nom  du  Salix  ceg^'ptiaca  (*),  comme  on 
Ta  vu  plus  haut.  Il  résulte  donc  de  ces  différentes  preuves  que  le 
^t»  des  poètes  arabes  est  le  Salix  ag)'ptiacd ,  et  non  le  GuiLindina 
Aloringa ,  ou  Clans  ungtieniaria. 

Lorsqu'on  réfléchit  sur  l'habitude  de  mettre  en  contact  l'huile 
de  hen  et  les  fleurs  dont  on  veut  fixer  les  parties  aromatiques , 
on  pourrait  être  tenté  de  trouver  dans  cette  allégorie  des  preuves 
que  le  çAj  dont  il  est  ici  question,  est  celui  qui  donne  l'huile 
de  len  :  mais  tout  ce  que  l'auteur  dit  du  port  de  cet  arbre  s'op- 
pose à  cette  idée.  La  rose  et  les  fleurs  du  saule  donnent  enraiement 
des  essences  ;  elles  subissent  le  même  sort  ,  on  les  livre  à  un  feu 
ardent  pour  faire  monter  leurs  esprits  :  il  n'est  donc  pas  surprenant 
que  le  poète  fasse  allusion  à  cette  fraternité  et  à  cette  analogie 
dans   l'usage  de  deux   productions  naturelles. 

Jusqu'à  ce  jour,  les  orientalistes  ont  cru  que  le  lan,  dont  parlent 
si  souvent  les  Arabes,  est  le  Aloringa,  et  ils  l'ont  traduit  par  my- 
rohalan.  Je  viens  d'exposer  les  raisons  qui  me  font  penser  que  le 
<jL»  qui  joue  un  si  grand  rôle  dans  les  poésies  arabes,  est  le  saule 

(*)  Il  ne  faut   P4S  cenfondrc  ce  Khalaf  avec  \c  Chi\c{  [ El(vngnus  ] ,  en  :ir.  C^^-S»! 

K 

\ 


(   '46  ) 

d'Egypte  :  actuellement,  en  supposant  que  ce  fût  bien  le  Aloringa , 
peut-on  le  traduire  par  Aîyrobalan  ! 

VWnt  [Nat.  Hist.  l  XII ,  46  )  parle  d'un  Myrohalan  que  le  P. 
Hardouin  donne  comme  synonyme  du  ÇaKayoç juuupi.-^x.Y[  (Clans 
unguentaria )  de  Dioscoride, /K   160. 

Bodacus  à  Stapel  fTheophrasd  Hist.  Plant,  l.  II,  c.  S ,  p.  py  ) , 
dit:  «'  Idem  sunt  /uv^pCdhca/oÇy  et  flâhccvoç  juvpiyjÀX.Yi.  Clans  un- 
"  gucntaria,  quod  unguentis  pretiosis  adderetur.  >> 

Aëtius  (lih.  X ,  cap.  n )  parie  en  ces  termes  :  A'm'  y\  %v  /Lwpt- 

Plempius ,  Canon  d'Avkenne,  lié.  II  ,tr.  2,  c.  2 ,  p.  6y,  au  mot 
Ban  (  Clans  unguentariaj ,  dit  en  note  :  '<■  Craci  Balanum  myrepsicam 
3)  vacant  et  Alyrobalanum.'» 

Tout  ce  qu'on  vient  de  lire  a  donc  autorisé  les  orientalistes  à 
traduire  le  Clans  ungucntaria  par  Afyrolalan  ;  mais  comme  ce  der- 
nier nom  s'applique  aussi  à  des  végétaux  très-différens,  on  a  donné 
au  Clans  ungucntaria  le  nom  de  Myrobalan  des  Latins,  et  au  J^^JU 
celui  de  Myrobalan  des  Arabes. 

Le  texte  suivant  de  Saumaise  (  Plinianœ  exercitationes  in  Solinum . 
p.  ^^^ )  jettera  de  la  clarté  sur  cette  distinction  :  «  Vetercs  Myro- 
:»  balanum  de  Clande  unguentarià  îantîim  dixere ,  quant  et  ficihoivov 
i) /MjpiyjÀKy\y.  Cui  simile  nihil  habent,  quœ  Myrobalana  hodiè  vocatttiir, 

»  prunorum  in  génère  [  J^cr^  ] Nec  leviùs  errant  qui  Myroba- 

•yy  lanum /«  eodem  Plinio,  non  de  Clande  unguentarià  capiunt,  sed  de 
■>^  flavâ  Alyrohalano  offîcinarum  ,  quce.  Palmulcz  similis  est ,  ire.  » 

Je  crois  cependant  que ,  pour  éviter  la  confusion  ,  il  vaut  mieux 

réserver  le  nom  de  Myrobalan  au  rÀ-^  [  Myrobalan  des  Arabes]. 

Relativement  à  ce  dernier  végétal,  voyez  les  notes  sur  la  huppe. 

Richardson  fPers.  ar.andengl.  Dict.  by  Wilkins,  v.  I,  p.  ijS ) 
dit  que  le  qv  est  un  myrobalan  qui  donne  le  benjoin',  qui 
croit  dans  l'Arabie   heureuse    et  qui  ressemble   au  tamaris  Les 


(  '4;  ) 

quatre  assertions  de  ccne  phrase  sont  également  crronccs  et  contra- 
dictoires :  le  èan  n'est  pas  le  myrobalan;  celui-ci  ne  croit  pas  en 
Arabie;  le  benjoin  vient  d'un  styrax,  et  ni  le  styrax  ni  le  my- 
robalan /  Tcrminalid  j  ne  ressemblent  au  tamaris  ;  c'est  plutôt  le 
saule  qui,  vu  de  loin,  a,  par  son  port,  une  faible  resicniblancc 
avec  le  tamaris. 

P.  22,  I.  21.  Les  mots  c>jj3  c^J^I   sont  du  Coran,  XLI ,  ^p. 
P.  22,  l.  22.  Allusion  à  la  résurrection  générale.  Les  mots  ^ 

jY^  ^j  se  trouvent  sans   cesse   dans  le  Coran.  Je  me  contenterai 

d'indiquer   le  verset  99  de  la  surate  XVill. 

P.  22,  l.  z4-  Allusion  aux  versets  abrogcajos  et  alvogés.  \'oyez 
Marracci,  Rcf.  Ak.  p.  4o. 

P.  2s,  L  ib.  Les  mots  j^wl  Lii=>  J  ^JCL  L  cOLj  f  j  0^  f 
sont  du  Coran ,  CXII.  )  -^      I  1 

P.  2^ ,  L  rp.  C'cst-à-dirc  ,  «  nnon  bonheur  comme  un  rossignol.  » 
Cette  manière  de  s'exprimer  se  voit  très-fréquemment  chez  les 
écrivains  orientaux.  J'en  citerai  un  seul  exemple,  tiré  de  la  Vie 
de  Tamcrian,    par   Ahmed    ben-Arabschah  ^  édit.  de  Manger, 

tom.  II,  p.  i64):  ooJo'  »jjJiJl   ^Lw  J.0LL)  ^^.J\  c-jUiC^j 

OÀJjf^     ^5jiwj  Lôiwi-    L.\ya  qa  C3t3^l   jj  j^j>' f  {J'*J^^ 

Ces  mots  signifient  à  la  lettre  ;  «  Les  pages  des  jardins  se  coloraient 
»  par  le  moyen  des  doigts  du  teinturier  de  la  puissance  divine,  et 
»  l'épouse  des  parterres  se  parait  d'ornemens  précieux  ,  fournis  par 
"  l'orfévrc  de  la  sagesse  divine.  »  Ce  qui  veut  dire  :  <•  La  puissance 
>•  divine  ,  que  l'on  pourrait  comparer  aux  doigts  d'un  habile  tein- 
»•  turicr ,  colorait  les  jardins ,  dont  la  surface  aplanie  ressemble 
»  aux  pages  d'un  livre;  et  ta  sa«rcssc  divine  ,  comme  un  orfèvre 
"  intelligent ,  donnait  aux  pré« ,  semblables  a  une  nouvelle  mariée , 
>'  leur  beauté  et  ieiir  verdure.  •• 

P.  2/1 ,  L  2).  Les  mots  j^\  /  »  ne  «ont  pas  très-dairs  ;  Hs  sem- 
blent signifier  faisant  l'odeur .  et  c'est  le  sens  que  j'ai  suivi  en  adou- 
cissant l'expression.  Peut-être  pourrait-on  traduire  aussi,  brisant  son 

K  2 


(  '48  ) 

hurgeon  ;   car  S^  signifie  cncoxt  frcg'it ,  quassit  y  et  J^  prima 
planta  gcrminatio. 

P.  2jy  l.  S.  Les  mots  c$y^l  iS^}  signifient  à  ia  lettre  ,  les  mains 
de  la  distance;  mais  ci  tNJ  \  comme  tXJ  ,  est  souvent  explétif ,  et  peut- 
être  i'est-il  également  ici  :  c'est  ainsi  qu'on  lit  dans  ia  Vll.c  séance 

de  Hariri,  j^_j    c^Ous.y   l^tX3t;v«;[  U    (  cUjJl)  1^'3l)^   ù^ 

cUjJl  <jt).:=».|  oJU   c\5    pLwJI 
P.  2),  l.  lo.   ^.3  est  la  leçon  du  ms.  D.  Le  ms.  A  porte  (Çj3, 
et  les  mss.  B  et  c  portent  ^.3  .  Du  reste,  ce  vers  ne  me  paraît 
pas  très-clair. 

P.2J,  l.  ib\  Les  mots  ijy-^^  (JLW'  (J^  sont  du  Coran,  XX,  4- 
P.  2j,  l,2j.  Allusion  au  premier  verset  de  la  surate  LUI  du  Coran. 

ALLÉG.    VII.    LA     VIOLETTE. 

P.  26 ,  l.  2.  Viola  odorata,  Linnée.  (M.  Delile,  Ouv.  sur  l'Egypte, 
Hist.  nat. ,  t.  II ,  p.  j6.  )  Je  dois  faire  observer  qu'en  arabe  vulgaire 
on  dit  également  ^mjX^:  comme  l'on  dit     j«JooJL)  et     juJ.jJLo 

persil  (  Apium  Petroselinum  de   Linnée.  Forskal  ,   FI.  j^g.-ar.  p. 
LX IV  ) y  Aj^^X.  Ajji  propriété  y   &c. 

P.  26,  l.  12.  On  voit  que    l'auteur  joue  sur  les  mots   ^v  i    '«w 

et  oJ^  j  ^^^  s'écrivent  de  même  ,  mais  dont  les  voyelles  sont 

différentes.  On  a  déjà  vu  ce  jeu  de  mots  dans  l'allégorie  de  la  rose. 

P.  26,  l.  22.  On  lit  dans  le  ms.  A.  ^^^..^L    ka^  J^c   (_$  JijL 

p.  2y ,  l.  II.  Les  mots  iU.*  et  ,*XL  [  qualités  cachées  ,  vertus 
intérieures,  (Sic.  ]  sont  ici  par  opposition  ^.'oX^  [beauté  exté- 
rieure]. L'auteur  veut  dire  que  les  gens  qui  ne  font  attention  qu'à 
ia  beauté  extérieure,  méprisent  la  violette  lorsqu'elle  se  fane; 
mais  qu'alors  ceux  qui  considèrent  les  qualités  intérieures ,  les 
vertus  des  simples,  &c,  la  prennent. 

P^  2y ,  l.  21,  C'est-à-dire  :  «  Ils  n'ont  en  vue  que  mes  propriétés 


(   '49  ) 

>•  physiques,  et  ne  liejineru  point  compte  de  mes  qualités  morales , 
»  ni  des  leçons  qu'ils  pourraient  tirer  de  moi.   .• 

P.  28,1.  /.  L'iacout  cJ>j^^  a  six  variétés.  C'est,  à  n'en  pas 
douter,  le  saphir  de  Wcrner  et  de  Brochant ,  la  lélésic  (Corin- 
don relaie)  de  Haùy  ,  qui  renferme  l'iacout  rouge  ou  rubis 
d'Orient,  l'iacout  jaune  ou  topaze  d'Orient,  et  l'iacout  bleu  ou 
saphir  oriental. 

On  confond  facilement  avec  le  ^^^L  ,    le    jiùJLo   ,  !<-'  0  il^ 

et   le    2.!:)^,  q»^'    sont    des   variétés    d'almandinc  ou    de  grenat 

d'Orient. 

Comme  Ats  orientalistes  peu  versés  dans  la  connaissance  des  mi- 
néraux de  l'Asie ,  n'en  traduisent  pas  toujours  avec  assez  de  pré- 
cbion  les  noms  arabes ,  j'ajouterai  ici  les  observations  suivantes  : 

Le  3j-*;  des  Arabes  est  notre  émeraude  ;  le  j^^k.  vj\  c*^^  '*» 
chrysolithe  ,  le  Lj  le  spinclle  [  spincllc  rubis  et  rubis  balais], 
le  *,<JLc  1^  cornaline;  le  cj:^  onyx,  se  divise  chez  les  Oricn-. 
taux  d'après  le  nombre  de  ses  couches  ;  le  3.<okV  est  Iclazulite; 
!c  ^_vi.j  'c  jaspe  ,  le  ^^_y,.^  l'améthyste  ,  le  oj^j^  ''^  turquoise  , 
et  le    Ji,  le  ulc   (*). 

Voyez  Jos.  von  Hammer ,  Auszug  aus  dcm  Wcrke  4^Lj   liblo^ 

jfon  Aiohammcd  ben  AJanssur  (  Mines  de  l'Or.,  tom.  Il,  p.  met 
suiv.  ) ,  et  Ahmed  Texfaschi  (  S.  F.  Ravii  Spec.  Arab.  &c.  p.  yp  et 
suiv.,  et  Fior  di pensieri  ire.  par  Raineri,  p.  yp  et  suiv.). 

ALLÉG.    VIII.    —    LA    GIROFLEE. 

P.  28,  l.p.  Les  trois  variétés  de  Cheiranthus  dont  parle  l'auteur 
dans  cette  allégorie,  ne  peuvent  pas  être  des  variétés  d'une  même 
espèce  y  mais  ce  sont  probablement  autant  d'espèces  différentes.  La 

(*)  On  voit  que  les  moti  turquoise  et  ulc  sont  formes  de  o  j  •  _a3  et  de    "iXl?  > 

c'est  ainsi  que  ckaux  [cnixj  vient  de   .  j»JS  ;   imtraudt  [ smara^duj  J  At    ^^j  '• 
hyacinthe  de  4^J>Lj  i  &.c. 

K  J 


(   i5o  ) 

variété  jaune  odoriférante  est  peut-être  notre  Cheiranthus  Cheiri:  \-\ 
bleue  odorante  pendant  la  nuit,  le  Cheiranthus  incanus  ou  grœcus 
des  jardiniers ,  ou  le  Cheiranthus  odoratissimus  de  Pallas  ,  dont 
il  est  dit:  ««  Crescit  in  Taurica  et  Persià,  flores  colore  et  magni- 
>•  tudine  Hesperis  tristis ,  vespertino  tempore  odoratissimi  ;  »  la 
blanche  inodore ,  une  variété  à  fleurs  simples  du  Cheiranthus  in- 
canus. ht  Cheiranthus  chius  a  de  petites  fleurs  violettes  et  inodores. 

P.  2S,/.  Jo.Je  n'ai  pas  traduit  le  mot  j_j^^l  ;  je  ne  saisis  pas 
bien  la  signification  qu'il   peut  avoir  ici.  Au   lieu  de    ce  mot, 

on  lit  dans  le  ms.  B  jj^y>'  ;  et  à  la  place  dejy^\  j^^ ,  le  ms. 
A    porte  jyçd\j^[j 

F.  2p,  i.  2.  A  la  lettre  :  «  Elle  est  revêtue,  en  fait  de  maladie, 
d'une  robe  jaune,  et  elle  est  comme  les  amans,  par  ce  qu'on 
en  voit ,  et  par  ce  qui  est  réel.  » 

tii;^  est  précisément  le  contraire  de  y^  :  le   premier  mot 

signifie  l'extérieur,  ce  que  l'on  voit,  Slc.  ;  le  second,  la  réalité,  les 
qualités  intérieures,  &c.  On  oppose  encore  plus  souvent  à  y^ 
le  mot  o^  ,  qui  signifie ,  «  ce  que  l'on  apprend  ,  ce  que  l'on  en- 
»  tend  dire.  »  On  trouve  ces  deux  mots  employés  tort  souvent  dans 
cette  signification  précise.  Voici  ce  qu'on  lit  dans  le  comment,  de 
Hariri  publié  par  M.  de  Sacy,  sur  ces  mots  de  la  première  séance  : 


••Par  <^j^  l'auteur  veut  dire  tes  actions,  ce  que  tu  fais ,  efp^ir 
■»  (J^j^  ,  ton  intérieur,  ce  que  l'expérience  apprend  de  toi.  Le  mot  .>S^ 
»  est  le  contraire  de  jjàJ^  ,  « 

Quant  à  la  comparaison  que  l'auteur  fait  de  la  couleur  de  la  gi- 
roflée jaune  à  celle  du  teint  des  amans,  elle  ne  doit  point  éton- 
ner: la  pâleur  est  la  couleur  dts  amans;  et  sous  le  soleil  de  l'Asie, 
la  perte  du  coloris  doit  nécessairement  laisser  jaune  un  visage 
balé  ;     aussi    les   poètes    orientaux    parlent-ils   souvent    du  teint 


(  '5'  ) 

jdiunc  des  amans  {*  ).  li  csi  aussi  souvent  parle  de  la  pâleur  des 
amans  dans  nos  pocies  européens.  On  lit,  par  exemple  ,  dans  Us 
Saisons  de  Thompson  : 

The  grey  morn 

Lift  htr  pale  lustre  on  the  fhiler  wretch 
Exanimate  ky  love. 

Ovide  leur  en  a  fait  même  un  précepte  : 

Palleat  omnis  amans  :  hic  est  color  aptus  amanti. 

De  Arte  amandi ,  1 ,  7 3  I , 

P.  2p.  l.  6.  Au  lieu  de  ^r^'  '^^'*-^  3k^(j<>J^  ,  le  ms.  B  porte 

r.2ij ,  l.  /j?.  On  ne  lit  ces  trois  vers  que  dans  le  ms.  A. 

P.  ^o  ,  L  22.  Ceci  est  mystique.  J'ai  déjà  dit  que  le  vin  est  l'amour 
de  Dieu  :  cc%  coupes  sont  donc  des  coupes  du  vin  de  l'amour  de 
Dieu. 

P.  jf ,  /.  /.  (j"^j  (s^  signifie  à  la  lettre  j//r  ma  tête:  c'est  l'ex- 
pression dont  on  se  sert  pour  répondre  aux  ordres  ou  aux  demandes 
de  quelqu'un. 

P.jr,  /.y.   CiUJ>  signifie  proprement  déchirer. 

P.  ^i ,  l.  II.  Le  mot  oj^  signifie,  dans  le  langage  mystique, 
«  s'entretenir  en  secret  avec  Dieu,  sans  aucun  témoin,  pas  mcmc 
»  en  présenced'un  ange:  »  jc^^f  V  ^^^^  ^lil  *^JLJf  aJ'^L^ 
tAU  Vj    Kitah  Tarifât. 

Tout  ceci  et  les  vers  qui  suivent,  sont  mystiques;  et  il  est  bon 
de  se  le  rappeler  pour  mieux  en  saisir  le  sens. 

ALLÉc;.    IX.    Li:    JASMIS. 

P.  J2,  l.  j.  Jiisminum  offieinaL:  de  Linnéc,  suivant  Forskal,  Flora 


(*)  Je  croU  qu'il  esc  inuùlc  que  j'en  donne  des  exemples  ;  je  me  contenterai  de 
rc.ivoycr  au  vers  de  Hariri  que  j'ai  cité  dans  mes  notes  sur  la  rose,  où  cet  auteur 
Compare  une  piccc  d'or  au  teint  d'un  amant. 

K4 


(   i32  ) 

yf^flyptiaco-nrahica ,  p.  LIX  ;  Jasviinum  grandlforum  ,  suivant  M. 
Deiile,  Ouv.sur  l'Eg)fte,  hîst.  nat.  t.  II ,  p.  4^;  et  Jasminum  fru- 
ricans ,  suivant  Sprengel,  Rci  hcrk  Hist.  t.  I,  p.  242. 

Le  Jasminum  officinale  est  originaire  de  ia  côte  de  Malabar  et 
de  quelques  autres  parties  de  i'Inde.  Le  Jasminum  grandiforum , 
très-voisin  du  précédent,  croit  avec  lui  et  dans  l'île  de  Tabago  ;  ii 
est  plus  odorant.  Serait-ce  plutôt  le  Jasminum  Samhac  de  Linnée 
(Alogorium  Samhac,  Lamb.  ;  Jasmin,  sive  Samhac  arahicum,  J.  Bauhin, 
Htst.Jl  Ce  dernier  croit  également  dans  l'Inde  et  sur  les  côtes  de 
jMalabar,  où  les  femmes  en  enfilent  les  fleurs,  qui  sont  blanches 
et  très-odorantes,  pour  les  entrelacer  dans  leurs  cheveux. 

Le  Jasminum f ru ticans  est  presque  inodore,  et  n'est  point,  par 

conséquent,   notre   {J^^ — J,  qui  doit  exhaler  une  odeur  très- 
forte. 

P.J2,  l.  y.  L'auteur  joue  sur  le  mot  (jS^v  ,  qui  se  compose 
de  (j-S?  ,  désespoir,  et  de  cJS*  j  inensonge ,   erreur,  &c.  Les  mots 

O^^  (J'W  f  CJ'  signifient  par  conséquent  :  "  Le  désespoir  est  une 
■»  erreur,  on  ne  doit  pas  s'y  livrer.  » 

Je  n'ai  pas  traduit  le  mot  ^ — ^.^ ,  qui  vient  immédiatement 
après ,  parce  qu'il  est  difficile  de  le  rendre  ici  d'une  manière 
satisfaisante.  Les  lexicographes  et  les  glossateurs  arabes  disent 
que  ce  mot  est  *— ^j  *-,iO  ;  on  pourrait  donc  le  traduire  par 
•<  pauvre  malheureux!  »  Desdichado  de  til  que  les  Espagnols  disent 
dans  le  même  sens,  est  la  traduction  littérale  de  ce  mot. 

P.  ^2 ,  L  14.  Le  mot  ^Jjj  ^  est  emprunté  au  langage  mystique  ; 
l'auteur  du  cj^^y-aj"  C-^U^  |e  définit  ainsi:  *V*-*  <J  O^'^^ 

<«  Le  mot  ^J^^  ,  comme  terme  mystique,  signifie  une  lumière  spi- 
»  rituelle  que  Dieu  met,  par  manière  de  révélation,  dans  Je  cœuv 


(  >>n 

>•  des  hommes  qui  lui  sont  agréables;  lumicrc  par  laquelle  ces 
»  hommes  s;iveni  distinguer  la  vcritc  du  mensonge  ,  sans  tirer 
r>  cette  connaissance  d'un  livre  ni  d'aucune  autre  chose.  •• 

P.  jj,  l.  II.  \'oycz ,  sur  ce  jeu  de  mots ,  la  note  qui  précède. 

P.  yy,  /.  /./.  J'ai  traduit  {J^  par  malheur,  parce  que  j'ai  consi- 
déré ce  mot  comme  l'opposé  de  %2^  dans  le  sens  de  ton/uur. 

Cette  allégorie  n'est  pas  un  modèle  de  clarté,  et  ces  derniers 
roots  sur-tout  ne  me  paraissent  pas  très  intelligibles. 

ALLÉG.    X.    LE    BASILIC. 

P.j4'  J'  ~-  Ocymum  Basilkum  de  Linnée. 

P.  S4>  ^'  S'  Au  lieu  de  ^jj  f  r""*^  c3^^  .  le  m$.  A  porte 
^.>3j  t->-yiJ  KJ^'yr=*  '■  quant  au  mot  ^^  ,  qui  suit,  il  signifie 
chant,  concert,  &c.  ;  mais  on  l'emploie  plus  ordinairement  pour 
exprimer  la  sorte  de  danse,  accompagnée  de  chants  ou  de  sons 
d'instrumens,  qu'exécutent  les  derviches. 

Pour  ce  qui  est  du  mot  ^^j^  ,  pluriel  {y->-  ,  il  signifie  propre- 
ment ton;  de  là  la  musique  se  nomme  q^j'   |^  ,  la  connaissance 

des  tons.  Voyez,  sur  la  musique  des  Orientaux,  le  Traité  de 
M.  Villoieau,  Ouu.  surl'Eg.,  Et.  mod.  t.  I,jk6o6  et  suiv.:  l'extrait 
d'Ibn  Khaledoun  ,  publié  par  iM.  de  Hammer,  Mines  de  l'Orient , 
t.  VI ,  p.  jof  et  suiv.  ;  enfin  la  note  de  M.  Langlès  sur  la  musique, 
Voyages  de  Chardin,  tom.  Il",  p.  ipç  et  suiv,  ,  où  l'on  trouvera 
la  notice  des  ouvrages  qui  traitent  de  cette  matière. 

Dans  les  livres  de  liturgie,  les  chrétiens  arabes  se  servent  du 
même  mot  y^  pour  exprimer  les  tons  de  leur  chant  d'église,  tons 
qui  sont  au  nombre  de  huit,  comme  les  nôtres. 

P.j4'  l'  9'  L'auteur  joue  sur  la  double  signification  de  {y^j  , 
Ocymum  et  sustentatio  vita  ;  j'ai  tâché  de  rendre  ces  deux  idées. 

P.j4'l'  'O'  Voici  ce  qu'on  lit  dans  le  Coran,  LVI,  Sy ,  S8 : 
promis  aux  élus  dans  le  paradis  n'est  point  le  basilic ,  l'orthographe 


(  >54) 

en  est  même  différente  :  l'auteur  joue  donc  sur  l'homonynmie  des 
consonnes   de  ces  deux  mots. 

Le  commentateur  Beïdawi  explique  le  mL^j  du  Coran  par 
o^  OJ'J  »  ^^  Marracci  le  traduit  par  alimentum  optimum. 

P.  ^4'  ^-  ^S'  L'auteur  joue  sur  la  répétition  de  j>^-*^  \^  dans 
un  sens  différent.  Ce  jeu  de  mots  est  très-sensible  en  vulgaire ,  car 
on  prononce  toujours  mcn ,  que  ce  mot  soit  conjonctif  ou  qu'il  soit 
préposition.  On  dit  donc  ici  mcn  jénani,  men  jénani,  ou  men  ghé' 
nani,  men  ghénani,  suivant  la  prononciation  d'Egypte. 

Il  y  a  de  nouveau ,  à  la  fin  de  la  phrase,  le  mot  3^^  encore 
dans  un  autre  sens. 

P.  ^4  >  ^'  ~o-  f^  y  ^^  Forskal  nomme  A'Ientha  Lmam  vel  Nmam 

(FI.  /Eg.-ar.,  -p.  LXVUl),  signifie  aussi ,  avec  l'addition  d'un  tesch- 

did  (  aC^  ),  délateur,  sycophante,  &.c.  :  voilà  la  clef  du  jeu  de  mots. 

Il  y  a  une  autre  observation  à  faire  :  il  faut  frotter  les  feuilles  du 
basilic  pour  en  sentir  l'odeur,  au  lieu  que  Ifi  menthe  répand  son 
parfum  d'elle-même,  et  c'est  à  quoi  l'auteur  fait  allusion. 

P.  jj  ,  l.  ^.  L'auteur  a  voulu  jouer  sur  les  mots  j>s^  î  ,  plur.  de 

JLc  signum,  vexillum,  et  «v^î  ,  nom   d'action  de  la   quatrième 

forme  ,  faire  connaître.  Cette  phrase  signifie  donc  à  la  lettre  :  «  {[ 
»  a  divulgué  son  secret  comme  des  signaux  ,  et  a  répandu  son 
»  odeur  pour  se  faire  connaître.  » 

P.  j»/,  /.  12.   Les  mots  -ftjlsJl   os  °'>  se  trouvent  plusieurs 

fois  dans  les  livres  des  Druses,  toujours  dans  le  sens  de  «  il  n'y 
»  a  plus  moyen  d'y  revenir,  c'est  une  affaire  finie,  &c.  »  A  la 
lettre,  «^  il  n'y  a  plus  d'encre  à  la  plume  (  il  est  impossible  de 
»  continuer  d'écrire  ou  d'effacer  ce  qui  est  écrit  ).  « 

P.JJ,  L  20.  Il  y  a  encore  ici  un  jeu  de  mots  que  l'on  ne  peut  faire 
passer  en  français.  Ces  vers  s'appliquent  à  l'auteur,  et  le  mot  p^ 

(la  mesure,  qui  est  du_>^  nommé  ij>c^^  ,  indique  qu'il  faut 
un  teschdid  )  doit  se  traduire  par  délateur  ;  mais  on  voit  que 
l'auteur  a  eu  en  vue  de  dire  aussi,  en  faisant  parler  le  basilic  : 


(   1-,;.  ) 

••  Pourquoi  veux  tu  que  je  rcp:mck'  mon  oHcur  plus  que  je  ne  !c 
"  fais,  puisque  je  ne  suis  pas  \^  menthe  î  » 

ALLÉG.    XI.    LA     CAMOMILLE. 

P.  j6,  l.  j.  Il  est  probable  que  la  AJiitricnrii  Chtimomillit ,  si 
commune  en  Ruropc,  se  trouve  tgalcmcnt  sauvage  en  Syrie  cl 
en  Egypte.  Trois  espèces  de  Alatricarja  (  la  AJatriairia  argentca  , 
Linn.;  la  Aliitricaria  jmnctiUa  et  la  ALitr/'caria  tanacetifolia  ),  origi- 
naires du  Levant ,  ont  beaucoup  de  ressemblance  avec  notre  ca- 
momille, et  exhalent  comme  clic   une  odeur  aromatique. 

Le  pluriel  de  o'j^'  est  ^'Jl  ,  que  l'on  a  déjà  vu  dans  la  pré- 
face d'Azz-eddin. 

P. ^6 ,  /.  10.  Ceci  fait  allusion  à  c^ttc  phrase  qui  se  trouve  ré- 
pétée dans  toutes  les  pages  du  Coran  :  ^^-^-^  ,j-*  (Jy^  <— J*^^  ^ 
jLaj  jf  .,  Ceux  qui  auront  bien  vécu,  se  reposeront  dans  des 
»  jardins  baignés  par  des  ruisseaux.  » 

P.  j6 ,  /.  12.  Le  mot  que  je  traduis  par  Jînic ,  est  éo^ ,  qui  est  le 
nom  que  les  musulmans  donnent  à  la  partie  de  leurs  biens  qu'ils 
doivent  distribuer  aux  pauvres.  Voyez  d'Herbelot,  Bitliôih.  or.  au 
mot  Zaca^  ;  Mouradgea  d'Ohsson  ,  Tahl.  de  l'Emp.  ou.  t.  II ,  p.  4oj 
et  su! v.  (cdi t. ///-<$'.<'),  et  Chardin,  édit.  de  M.  Langlès,  tom.  Vif, 
pages  i//f  tt  suiv. 

Pour  que  l'on  comprenne  parfaitement  ce  que  l'auteur  dit  ici  , 
je  ferai  observer  que  ce  devoir  n'oblige  que  ceux  qui  possèdent 
une  certaine  quantité  de  biens  déterminée  par  la  loi. 

P.  j6»  I.  2o.  Allusion  (-(jJ-J")  à  ces  mots  du  Cor.  III,  ;  :  l5^^' j^ 

^^LAJuis^»  «  C'est  Dieu  qui  t'a  envoyé  ce  livre  où  il  y  a  des 
»  versets  clairs,  qui  sont  l'essentiel  de  l'ouvrage,  et  des  versets 
»  obscurs  ( c'csi-à-dirc ,  qui  ont  diHerciis  sens).  »     ^^ 

P.jj,  l.  2.  L'auteur  joue  sur  l'homonymie  de  >J  Li ,  «  qui 
£st  ici ,  et  ^\jt,fiiute,   &c. 

P-S? >  l'  '4-  J^'  ^^j-^  parlé,  dans  les  notes  sur  le  jasmin,  du  sens 


(  i56) 

du  mot  ^  opposé  à  (J^ ;  le  voici,  dans  le  même  sens,  opposé 
P.  j^,  l.  iS.  Au  lieu  de  j,Lij  Jlc  ^    (Xc   ^  Jo  ,  le  man.  A 

P.  jy ,  l.  ip.  ,^J3    est  pour  /\i     à  cause  de  la  rime. 
P.  jy,  l.  24.  Le  ms.  D  ajoute  ce  vers  : 

sj;^^ — « — ti   Aj  ^  c->>W?  f  j       s^->^  clûJl j-i^  ;j^j 

«  Que  Thomme  insensible  qui  assiste  à  un  concert  sans  éprouver 
i»  aucune  sensation  de  plaisir,  ne  critiffue  pas,  du  moins,  le  chan- 
•"  teur.  » 

ALLÉG.    XII.    LA    LAVANDE. 

P.  ^S ,  l.  2.  Forskal  rend  ï^lj:^  ,  qui  est  le  nom  d'unité  de 
^  î>^  ,  par  Lavandula  Spica. ,  de  Linnée  fDescript.  an.  AJat.  med. 

fcLg.  147),  et  A  [j^  ,  par    Chôme  omithopodioîdes  (  FI.  /^.g.-nr.  p. 

CXVl  )  ;  mais  notre  ^'J^  est  certainement  une  espèce  de  Ixtvan- 
dula,  peut-être  la  Lavandula  Spica  ^  ou  la  Lavandula  carnosa  de 
Linnée  fils  ,  laquelle  croit  dans  l'Inde  ,  sur  des  rochers ,  et  non  le 
Chôme  omithopodioides,  qui  est  une  plante  puante  et  sans  apparence. 
Pour  saisir  le  sens  de  tout  ce  que  l'auteur  dit  dans  cette  allé- 
gorie ,  il  faut  savoir  que  la  lavande  n'est  pas  cultivée  dans  l'Orient, 
qu'elle  ne  se  trouve  que  dans  les  lieux  incultes  et  déserts ,  et  qu'on 
ne  l'estime  pas  assez  pour  en  porter  dans  les  marchés;  tandis  que  les 
autres  plantes  odoriférantes,  comme  le  basilic,  la  menthe,  &c. ,  sont 
recherchées ,  et  ornent  \ts  chambres  et  les  salles  a  manger  des 
Levantins.  Avec  ces  données,  on  comprendra  aisément  ce  qui  sans 
cela  paraîtrait  énigmatique. 

P.  ^8,  l.  6.  »\2^jJ\^  J,  L»  signifie  à  la  lettre  :  «  qu'ai-je  a  faire 

»  avec  la  troupe  (  des  fleurs  ).  » 

P'  3^ »  ^-  '3'  J^  <-J»  est  proprement  la  berge  rongée  par  la 
rivière. 


(  '5;  ) 

P.jS,  l.  21.  La  sensualité  des  Orientaux,  par  rapport  aux  odeurs 
ec  aux  pari ums ,  est  poussée  à  un  point  indicible.  Ils  emploient 
sur-tout  le  musc  et  l'odeur  composée  qu'exhalent  les  pastilles  du 
sérail:  ils  ornent  en  outre  leurs  salons  de  plantes  céphaliqucs , 
comme  le  basilic  ,  la  menthe ,  &c.  et  de  toutes   sortes  de  plantes 

odoriférantes  :  ils  brûlent  dans  des  cassolettes  (   *_^^  ) ,   du  bois 

d'alocs  (  3^  ) ,  du  benjoin  (  (Jy^  JJ"^  )  '   ^^  d'autres  aromates  ; 

et  ils  répandent  sur  eux-mêmes  et  sur  les  personnes  qui  viennent 

les  visiter,  de  l'eau   de  rose  (  3jj  *Lt  ]  ,  en    la   faisant   dégoût- 

ter  d'une  sorte  de  flacon   (   #*^-^   ou  L:^ja  )  ,  dont   le  bouchon 

d'argent  ou  d'autre  matière  est  percé  en  sorte  que  l'eau  peut  passer 
au  travers.  Mais  les  der^•iches  et  les  gens  d'une  morale  sévère  ne  se 
laissent  pas  aller  ■Jicti  excès  de  sensualité:  aussi  voit-on  que  l'auteur 

traite  de  v_>x:  JUI  ^  Jj*^'  ,  et  plus  bas  de  jjLlÀJl  ,  ceux  qui  s'y 
livrent. 

P.  ^S,  I.  rj.Voyez  ,  à  cause  du  mot  cV^ ,  les  notes  sur  la  préface. 

P.^S.l.  24'  Artemisiti  judaica  de  Linnéc  ,  suivant  M.  Delilc 
fOuv.  sur  l'E^gj'ptc  ,  Hist.  nat.  t.  Jf ,  p.  j^).  Golios  dit  qu'on  se  sert 
de  la  graine  du  Ji^  pour  détruire  les  vers. 

L'espèce  nommée  «y^,  qui  est ,  à  ce  qu'il  parait,  la  plus  com- 
mune en  Egypte,  est  ÏArtcmisia  artoresccns. 

P.  jS ,  L  24.  Le  JIjc  des  Arabes  est  V  Antilope  Dorcas  de  Linn. 

Au  lieu  de  JfjjJf  ,  le  ms.  A  porte  c.f>c  Jf  et  le  ms.  D   Xcj»}]- 

P.  jp ,  /  j.   ^^-"^  signifie  proprement  •«  déclarer  Dieu  exempt 

«  de  toute  imperfection  ,  le  louer;  >»  mais,  dans  l'acception  ordi- 
naire ,  ce  mot  signifie  lAii/v/^;,  parce  qu'en  efll't  les  iMusulmans, 
dans  leur  chapelet ,  louent  Dieu  de  toutes  ses  perfections ,  ou 
invoquent  ses  noms  exccllcns.  Ces  noms  ou  attributs  de  Dieu 
sont  au  nombre  de  quatre-vingt-dix-neuf ,  lesquels,  avec  le  nom 
À' Allah  .  font  cent.  C'est  pourquoi  leurs  chapelets  sont  ordinaire- 
ment de  cent  grains.  \  oyez  d'Hcrbclot ,  Biél.  or.,  au  mot  Esnu. 

*=  Les  lajqucs  tiennent  le  chapelet  a  la  main  ou  dans  la  poche. 


(  i58) 

'»  par  pure  dévotion  ;  ii  est  encore  d'usage,  chez  les  femmes  de  qua- 
»>  lité,  de  tenir  dans  leurs  mains  un  long  chapelet,  dont  les  grains 
"  sont  pour  l'ordinaire  de  jaspe,  ou  d'agate,  ou  d'ambre  blanc  ,  ou 
>»  de  corail,  très-artistement  ciselés  ;  quelques-uns  même  sont  entre- 
»  mêlés  de  perles  fines  ,  et  ornés  de  glands  à  fil  d'or.  Les  femmes 
»  comme  les  hommes  s'en  servent  par  manière  d'amusement  et 
5>  de  contenance.  Les  derviches  portent  le  chapelet  à  la  ceinture , 
'>  par  état.  »  Mouradgea  d'Ohsson ,  Tahl.  de  l'Emp.  ott.  t.  IV,  p.  i4y 
€t  6p ,  et  voyez  Chardin  ,  éd.  de  M.  Langlès  ,  t.  VII ,  p.  24  et  suiv. 

Je  renvoie  ceux  qui  désireraient  connaître  les  quatre-vingt-dix- 
neuf  attributs  de  Dieu ,  dont  se  compose  le  chapelet  des  musul- 
mans ,  à  la  dissertation  de  M.  de  Hammer  ,  intitulée  Ukr  dit 
Talismane  der  Aloslimen  ,  qui  est  insérée  dans  les  Alines  de  V Orient ^ 
t.  IV,  p.  ijj  et  suiv. 

Le  mot  ^j^^tNAJ  s'unit  presque  toujours  à  J^-wj  ,  et  signifie, 

encore  plus  particulièrement  que  .^^  ,  «  déclarer  Dieu  exempt 
"  de  toute  imperfection  ,  et  de  tout  ce  qui  ne  sied  pas  à  sa  majesté; 
»  célébrer  sa  sainteté  ,  &c.  » 

P-  jp  >  l-  S.  Le  mot  ^tVl,  qui  signifie  l'immolé,  est  le  nom 

que  les  Orientaux  donnent  à  Ismaël.  Ils  disent  qu'Abraham  ayant 
voulu  le  sacrifier,  Gabriel  l'en  empêcha,  par  ordre  de  Dieu,  et 
substitua  en  sa  place  un  bélier ,  que  le  père  et  le  fils  sacrifièrent  au 
même  lieu  où  ils  bâtirent  depuis  le  temple  de  la  Mecque.  D'Her- 
belot ,  Bihl.  or. ,  au  mot  Ismdil  hen-Ibrahim.  On  voit  que  c'est  abso- 
lument ce  que  Moïse  raconte  d'Isaac. 

P.  ^p ,  l.  16.  (y^^  OJ^  signifie  à  la  lettre,  «  le  marché  où  les 
»  marchandises  se  vendent  bien.  » 

I  M  !  • 

p.  j-j?,  /,  ly.  jjLIs  est  le  pluriel  de  J^^ 

P.  ^p,  l.  20.  j^çQ  signifie  laciniam  amiculi  seu  operimenti  sustuîit  ; 

de  là  qL«  j>fc  youi  signifie  «  se  découvrir  la  jambe.  »  On  sait  que 
les  Orientaux  ne  portent  point  de  bas,  et  que  leurs  habits,  qui  sont 
très-longs,  leur  couvrent  entièrement  les  jambes;  il  est  donc  na- 
turel qu'ils  les  relèvent,  et  qu'ils  découvrent  ainsi  leurs  jambes. 


{  ''9) 

toutes  les  fois  qu'ils  veulent  monter  à  cheval.  On  emploie  le  même 
vcrbc^^:  pour  signifier:  se  retrousser,  afin  de  marcher  plus  libre- 
ment  (*).  On  lit  dans  Hariri ,   séance   XV.<^  j^  iW^^s  (^^^\ 

(J^yJl  j.iVj  (J^ iVl  "  Voici  la  nuit ,  pense  à  rejoindre  ta  famille, 
»  retrousse  ta  robe  et  n'attends  pas  la  pluie.  » 

On  trouve  la  même  idée  dans  Horace,  Sat.  l.  //^  s.  y. 

Hoc  iter  ignavi  divisimus ,  altiùs  ac  nos 
Pracinctis  unum. 

A  la  lettre:  «  \  oyageurs  indolens ,  nous  avons  fait  en  deux 
»  traites  un  trajet  que  des  gens  retroussés  plus  haut  [plus  ingambes] 
»>  que  nous  eussent  fait  en  une.  » 

P'  J9,  l.  2y.Ox\  traduit  ordinairement  le  mot  ^L^  par  chamelier, 
mais  ce  mot  désigne  proprement  celui  qui  précède  les  cha- 
meaux en  chantant.  <«  Une  chose  fort  à  remarquer  sur  les  cha- 
•»  meaux,  c'est  qu'on  leur  apprend  à  marcher  et  qu'on  les  mène 
»»  à  fa  voix  avec  une  manière  de  chant.  Ces  animaux  règlent  leur 
»>  pas  à  cette  cadence,  et  vont  lentement  ou  vite  ,  suivant  le  ton  de 
»  voix  ;  et  tout  de  même,  quand  on  veut  leur  faire  faire  une  traite 
»  extraordinaire,  leurs  maîtres  savent  le  ton  qu'ils  aiment  mieux 
'>  entendre.  »  [Chardin ,  t.  III, p.  J7p-J  «  Les  chameliers,  pour  se 
soulager,  chantent  tour-à-tour»  (Tavernicr,  t.  I,  p.  162,  éd.  de 
1724^  :  c'est-à-dire  qu'ils  font  tour-à-tour  les  fonctions  de  ^L:^ , 

P.  40,  L  II.  UloJJl  ou  ^itvJf  est  le  plur.de  (j^<>J,  compotor, 
sodalis ,  ifc.  j  on  a  déjà  vu  ce  mot  dans  l'épigraphe. 

P.4o,l.  -2-2.  Au  lieu  des  mots  3,J^   O^  .  on  ''t  dans  le  ms.  B 

ALLÉG.    XIII.    l'anémone. 

P.  ^/,  /.  f.  ^y^  ,  pi.  jkjLû-i  ,  et  plus  souvent  ^L^l  ^y\sJ:i 

•  I  "*  .-. 

(*)    "^^    (j^  .>— ^  signifie  cn&uiu  simplement  itudiotus,  jpromplus <t  txpt- 
ditus  fuit,  fesfinav'it  in  ncgolio. 


(  '60) 

est  généralement  traduit  par  anémone  f  Anémone  coronaria,  Linn.^; 
mais  M.  de  Nerciat  assure  que  c'est ,  en  Perse ,  le  nom  du  coque- 
licot (  Papavcr  Rhœas ,  Linnée^.  D'un  autre  côté,  la  description 
du  j^^A-i-i  ^  qu'on  lit  dans   cet  ouvrage  ,  soit  ici ,  soit  dans  la 

préface  (  e,Viw  oj^^  (^  ^b  &c.  ) ,  convient  parfaitement  au  co- 
quelicot ;  bien  plus ,  toutes  les  descriptions  du  »yj^  que  l'on 
rencontre  dans  différens  poètes  orientaux,  conviennent  également 
à  cette  papavéracce ,  et  il  me  serait  facile  de  le  prouver  par  des 
citations.  On  lit,  par  exemple,  dans  VAnvari,  p.  Sy ,  rect.  et  vers. 

ï^L  j»U».  ^_yj  T^  J^  jT^       «^LwjÎ   L   ^jo  ji   (^J"^ 

<€  Le  coquelicot  sur  sa  tige ,  ressemble  à  une  coupe  de  vin  sur 
»  un  rameau  d'émeraude,  » 

Je  crois  donc  qu'il  est  difficile  de  douter  que  le  iW^  né  soit 
réellement  le  coquelicot. 

P.  4i  >  !■  ^'  Au  lieu  de  ^p-û-«,  le  ms.  B  porte  ^-j-o-*. 

P.  4t ,  l-  ^7-  Quoique  tous  les  manuscrits  portent  de  même 
^L*  ^1  >bLj  Va  ,  j'ai  peine  à  croire  qu'il  n'y  ait  pas  de  faute. 
M.  de  Sacy  conjecture  qu'il  faut  lire  (j^Vui 

P.  4-2- y  l.2/.]\  faudrait  L^^a.^  et  UJlw,  mais  j'ai  laissé  ces 
mots  comme  ils  sont  dans  les  mss. ,  à  cause  de  la  rime.  Je  remar- 
querai aussi  que,  quoiqu'on  ait  imprimé  oU«-o  ^J^  je  lis  oUa-«  ^^  , 
qui  est  la  leçon  du  ms.  B. 

P^4s>  ^-2'  S'  P^*"  ci'-^J  oix*i ,  l'auteur  veut  parler  de  la 
peluche  de  l'anémone  ,  qui  ressemble  à  un  vêtement  déchiré , 
c'est  alors  l'anémone  qui  parle  dans  ces  vers  ;  mais  on  pourrait 
les  mettre  aussi  dans  la  bouche  de  l'auteur ,  ce  qui  me  paraît 
même  plus  naturel. 

P.4j,i.io.  Dans  t^L2*"'j  et  i^'vXsblj  ,  le  y  est  la   particule 

de  complainte  iùtN/Jl  lJj^  .  Voyez  la  Gram.  ar.  de  M.  de  Sacy, 
tom.  II ,  pag.  8o. 

P.  4S'  l-  ^4-  Le  (J  dans  (_$l<>£vA)    est  la  saturation   {  ^^^i  ) 

du  hsra  ,  toujours  permise  en  poésie.  Cram.  ar,  tom.  II,rûg.  jy4f 


(.'G.   ) 

ALLÉG.    XIV.   —    [..4    NUE. 

P.  44»  /./.On  Voit  que  l'auteur  joue  sur  la   triple  significa- 
tion  du  mot^ ,,  selon  qu'il  c>t  affecte  (\\\n  fit/iii ,  <\\m  tl/uim- 


ma  ou  d'un  ktsrd.  Quant  au  mot  j_j  ,  je  ne  sais  s'il  est  syno- 
nyme (ks  mots  LoXa  et  ^  Triiiium  Spclta  de  Linnée,  ou  s'il 
exprimerait  une  espèce  diHércntc. 

P.  44»  l'  ^'  Voici  encore  un  jeu  de  mots  entre  ^3  et  ji.Ccci 
fait  allusion  à  l'idée  qu'ont  les  Orientaux  que  c'est  l'eau  de  la 
pluie  qui  forme  les  perles  de  la  mer.  Il  y  a  une  très-jolie  fable 
à  ce  sujet  dans  le  Boustan  de  Saadi.  Voyez  William  Jones, 
Poës.  as'uK.  Comm.-p.  //o,  cdit.  originale,  et  Toderini  ,  Lcitcrnttini 
turchcscii,  t.  I ,  ch.  XV.  Pignotli  en  a  donné  une  imitation  en 
vers   italiens,  fiih.  XXIII. 

P.  44'  /•  7'  On  voit  par  les  termes  dont  se  sert  l'auteur,  qu'il 
fait  une  allusion  continuelle  à  la  génération.  a\  mcrc  peut  être 
pris  ici  métaphoriquement  pour  ^rrr,  d'autant  plus  que  le  ms.  c 
porte  ij'j'   au  lieu  de    pi 

P.  44'  /•  "■  A  la  lettre,  «  les  filles  des  plantes.  »  On  trouve  la 

même  pensée  dans  la  préface  du  Gulistan ,  ^y^j^  ij  iJj^ji^  "M  ' -^ 

^Jjy^  {J>^j  tM^  J-^   ij  oyj  CJ^  ^  &c.  «  Dieu  a  ordonne  à 

»  la  nuée  printanière  ,  comparable  ii  une  nourrice ,  d'allaiter  les 
"  filles  des  plantes  dans  le  berceau  de  la  terre  ècc.  » 

P.  44'  /•  ^j?»  ï'  laudrait  [  AU^  ;  mais  c'est  à  cause  de  la  rime 
que  l'on  a  retranché  Wi/cf,  signe  de  l'accusatif, 

P.  44>f'  ^4'^^    "''^'     P*^^  traduit  les    mots    Jf-s^   i?^->^'  ^J 
(J,  \j>-û\  Jl  ^  [y^^  4^1  n<^  ïnc  paraissent   nullement  clairs. 

L'auteur  a  voulu  jouer  sur  les  mots  (JSslc\  et  ci  ^^^ ,  mais  il 
aurait  dû  le  faire  d'une  manière  moins  obscure.  On  trouve  dans 
la  septième  séance  de  Hariri  le  même  jeu  de  mots,  dans  un  scus 
différent: 

L 


(   '62  ) 

«  Ah  !  plût  au  ciel  que  la  fortune  cruelle ,  qui  m'a  choisi  pour 
3'  le  but  de  ses  traits,  m'eût  enlevé  mesenfans!  »  Traduction 
de  M.   de  Sacy,  Chrest.  Ar.  tom.  III ,  y.  ij6. 

P.  44,  1. 26.  Les  mots  ^Ui  ^^  ^^^^^^^j,  &c.  sont  du  Coran,  XXI, 
ji.  Voyez  ia  Bii'l.  or.  au  mot  Bal>.  L'auteur ,  dans  la  phrase  qui  pré- 
cède ce  passage  ,  a  voulu  jouer  sur  la  double  signification  du  mot 
(^  ,  qui  se  trouve  aussi  dans  le  verset  du  Coran. 

P.  4),  l.  j.  Comme  les  Arabes  du  désert  sont  divisés  par  tri- 
bus, et  que  ces  tribus  n'ont  pas  de  demeures  fixes,  ils  sont  sou- 
vent dans  le  cas  de  pleurer  le  départ  de  la  tribu  de  leurs  maî- 
tresses ,  et  d'aller  gémir  sur  les  traces  qu'ont  laissées  les  pieux  Sic, 
des  tentes  de  la  tribu  de  leurs  amies  ;  aussi  trouve-t-on  sans  cesse , 
dans  les  poésies  erotiques  des  Arabes ,  des  idées  semblables  à  celles 
qui  sont  exprimées  dans  ces  vers.  Les  orientalistes  connaissent 
la  belle  moailata  de  Lébid  qui  commence  par  cet  hémistiche  : 

«  Ils  se  sont  évanouis  des  lieux  où  elles  avaient  établi  leur  campe- 
»  ment,  les  vestiges  de  leur  demeure  passagère.  «  Trad.  de  M.  de 
Sacy ,  Cailla  et  Dimna ,  y.  1^0. 

P.  45  >  l-  ij-  J'ai  été  forcé  de  couper  en  deux  le  mot  '^'  ,  à 
cause  de  la  mesure ,  qui  est  duj--^  nomnié  J^LCJ  f .  Voyez,  sur 

la  prosodie  ,  le  Clerc  ,  Prosodia  arabica  ,  et  Gladwin  ,  Dissertations 
on  the  rhetorick  ,  prosody  and  rhymc  of  thc  Pcrsians. 

P.  ^/,  /,  16.  tiy-V    est  pour  JLL 

Après  ces  vers ,  on  lit  ce  qui  suit ,  dans  le  ms.  D  : 

iLoiîû  vJI   ièjLciil 

r  N^JIj  j^j  1  C^i3  ritA^c-*  f^y^  <'*t>ê^  i3jM>jt)  i-^^j  ^3^  0>î>*^ 

«-jj^Jl   ^  «-_sa^    J-^   Oj€^  ij>^ 


(   i('.5  ) 

LE  JAIWIN ,   ALLllGORIE. 

«Je  passai  dans  un  jardin  on  ne  peut  mieux  exposé,  aus-ii 
i>  frais  et  riant  que  beau  et  agréable  :  des  Heurs  brillantes , 
»»  des  ruisseaux  limpides,  des  fruits,  des  oiseaux,  en  augmen- 
»  taient  le  charme;  la  joie  la  plus  vive  y  régnait;  ni  des 
»  chaleurs  excessives ,  ni  un  troid  trop  vif,  n'en  altéraient  la  tem- 
>»  pérature. 

«  H  est  facile  à  Dieu  de  rendre  aisées  les  affaires  les  plus 
»>  difficiles.  » 

ALLÉG.    XV.    LE    ROSSIGNOL. 

P.  4)  ,  A  i^-  Je  ne  sais  si  les  mots  t-vJ^SÀXi  ,  j[^  et  J^>Jj  p(. 
^ûli  sont  synonymes,  ou  s'ils  expriment  des  variétés  ou  des 
espèces  du  rossignol  proprement  dit.  j'J*  c>t  probablement  l'abré- 
gé de  {y'^^^^  y ji>  mille  histoires  ,  ou  de  j[^lj[>^  mille  voix  (*}. 
£n  arabe  vulgaire,  on  nomme  le  rossignol  yji>  JLAjjjctl 
trouve  dans  Méninski  (ju-^^  jl^  J-Jj  :  i|  paraîtrait  donc  q 
j[j*  ne  serait  qu'une  épithctc ,  et  que  (J->-V  et  «-mJjJ^  seule- 
ment pourraient  être  synonymes. 

Linnéc  n'a  connu  qu'une  seule  espèce  de  rossignol,  AîotacilU 
luscinia  ;  mais  Bechstein  en  distingue  avec  raison  deux  espèces 
très-différentes  par  la  taille.  La  plus  grande,  qu'il  nomme  Alota- 
cilla  philomcla  ne  vient  pas  en  France,  mais  parait  propre  aux 
contrées  méridionales  de  l'Allemagne  et  à  l'Italie;  peut-être  la 
trouve-ton  dans  l'Orient.  La  seconde,  plus  petite,  nommée  Alota- 
cilld  luscinia,  commune  dans  toute  l'Europe,  se  trouve  aussi  en 
Egypte  ;  car  on  l'a  rap|K)rtée  de  l'expédition  d'Egypte.  If  pourrait 
donc  se  faire  que  si  les  deux  noms  (J-yV  et  <_vJ  jJ^  appar- 
tiennent à  des  êtres  semblables  par  les  couleurs,  mais  différens 

(*)   Le  mot  numérique  jl  i^  rappelle  le    nom  mexicain  cJu  Turdus   Orpheus ,  ou 
CtnunUiitoUi ,  qui  signifie   <«  quarante   langues  u  . 

L  a 


on 
ue 


(   'G4) 

par  la  taille  ,  on  retrouvât  ainsi  les  deux  espèces.  Voyez  les  Orien- 
tal, collcct.  îom.  1 ,  y.  ij  et  siiiu.  et  p.  zoy. 

P.  4)>  J-  JP'  Plusieurs  ojLif  de  cet  ouvrage  commencent  par 

^y- — 5  .  Ce  mot  se  rapporte  toujours  à  l'auteur;  et  il  n'est  pas 
inutile  de  le  remarquer,  car  il  serait  facile  de  croire  cju'il  faudrait  le 
traduire  par»  il  dit  »\^dixit:  âç  (pavo*  ]  ,  et  cette  manière  de 
rendre  Jl._3  pourrait,  dans  certains  cas,  paraître  meilleure  et 
plus  poétique.  C'est  ainsi  q\ie  ,  dans  la  septième  séance  de  Hariri, 
celui  qui  raconte,  après  avoir  cité  les  paroles  d'Abou-zeid  ,  ajoute 
_^|  LfiO  t>-<2_gÀ9  Jb  &c.,  qu'il  semblerait  tout  naturel  de  tra- 
duire, <'  Il  dit,  et  je  me  levai  promptement  pour  aller  chercher 
3>  ce  qu'il  demandait;  «  mais  ici ,  comme  par-tout  ailleurs  ,  J^^ — 9 
se  rapporte    à  l'historien.    Je  n'ai   pas  cru    devoir  traduire    ces 

P.  46  ,  î.  /j".  Au  lieu  de  -^-^j'  le  ms.  D  porte  jj-^f ,  ce  qui 
vaut  beaucoup  mieux. 

P.  4é,  l.  21.  A  la  lettre,  «  comme  deux  fêtes.»  Le  premier  o'tVjXi 
est  le  pi,  de  3^  hanche,  ou  le  collectif  de  'ij\iyj£.  pocerajml- 
ma,  et  le  2.^  est  le  duel  de  ù^p-  feic. 

P.  4.J,  l.    p.  Les  mots  qU  IgJlfr  ^  ^}^  sonlà\i  Coran,  LV,  26. 

P.4S ,  l.  j-   o'*^^  ^st  ici  le  plur.   de  3yi  Ijre. 

P.  4S ,  l.  /.  Cette  allégorie  rappelle  la  jolie  fable  de  Saadi ,  dont 
l'aimable  et  sensible  traducteur  de  Djami  a  donné  le  texte  et  la 
traduction  la  plus  élégante  et  la  plus  fleurie,  dans  la  Chrcst.  Ar. 
îom.  III ,  }y.  4S2  et  suiv.  ,  et  celle  de  Kaschefi  {  Anvari  Sohéili , 
p.  y 2  ,  édit,  de  Calcutta  y,  que  William  Jones  a  donnée  avec 
une  traduction  anglaise  dans  sa  Grammaire  persane,  p.  loj  et  suiif. 
et  M  Wilken  avec  une  traduction  latine  dans  la  sienne,  p.  182  et 
suivantes. 

ALLÉG.    XVI.    LE    FAUCON. 

P.  48,  l.  7  Falco  palumharius  de  Linnée.  De  j^—^  vient  proba- 
blement notre  mot  Buse.  Je  pense  que  l'on  me  dispensera  d'entrer 


(  '«  ) 

dans  des  détails  sur  la  fauconnerie  ;  chacun  eu  sait  assci  pour 
comprendre  cette  allégorie.  On  peut  voir  d'ailleurs,  sur  la  fau- 
connerie des  Orientaux  ,  Chardin  ,  édit.  de  M.  Langlès ,  tom.  HI , 

r'393'  4- 

P:  4^>  f-  "•  On  voit  que  l'auteur  joue  sur  la  douMe  signitica- 
tion  du  mot  p>^  prononcé  avec  des  voyelles  différentes. 

y.  ^y ,/.//.  Ce  proverbe  se  trouve  dans  d'autres  écrivains 
arabes  ,  et  entre  autres  dans  Hariri  ,  11.'=  séance. 

P.  4^  >  /.  ^/.  Je  crois  devoir  faire  observer  que  les  passages  du 

Coran  cités  ici  forment  avec  les  mots  a__Lj  >  iiViLc  •  o-^  ^^  is \Li| 

des  rapports  d'annexion  (  *3Lol  J.   Ces  mots  sont  donc  les  antécc- 

dens  ,  et  ces  fragmens  de  versets  sont  les  conséquens  {<^Ji  c^^-*:^) 

Les  mots  C^vy^   O^^  X^  ^*^"^  ^^  Coran,  XV,  SS ;  les  mots 

cAjLJ  «vj  (J^'  V  LXXV,  i6,  et  les  mots  Uj^  j^j^^  (j  (J^'  "^j 

XV II,  J^. 

p.  )0,  l.  6.  Les  mots  (>)LJL«jî  Lil  se  retrouvent  sans'  cesse  dans 
le  Coran.  Je  me  contenterai  d'indiquer  le  verset  113  de  la  II.<= 
surate. 

P.  jo,  L  14.  (J^«*^'  signifie  à  la  lettre  ,  «  le  petit  homme  ,  c'est- 
«  ù-dire  ,  la  petite  figure  qu'on  aperçoit  dans  la  prunelle.  » 

P.  jo,  l.  2).  Le  mot  CjUr'  est  synonyme  de  jft>3L«l  .  Ces  deux 
mots  signifient,  «  croire  de  cœur  et  confesser  de  bouche  »  O^' 

RisaUhi    Barkoui   (  Exposé  en  turc    des  dogmes    de    la  religion 
musulmane  ) ,  />,  -:./.  édit.  de  Scutari. 

AI.LÉG.    XV ir.    LA     COLOMBE. 

P.  )i.  l.  J.  Forskai  traduit  pW*"  simplement  par  Columhi  ;  mais 
on  doit  supposer  qu'il  a  voulu  nommer  la  Columha  livia  ,  qui  est 
ia  source  de  toutes  nos  variétés  de  pigeons  domestiques. 

L   ^ 


{  i66  )    . 

P.  ;/,  /.  7,  Les  mots  ^^  Lgi^  j  aj^jaJÎ  ^y?  Ja::».  oj* 
stgniiîeni  à  la  lettre ,  «  sur  ie  cou  de  laquelle  le  colîier  de 
»  l'obéissance  avait  placé  son  signe.  » 

r.ji.  1.  S.  Les  mots  ^j^  etjjjj-^ont  probablement  ici,  comme 
dans  plusieurs  endroits  de  cet  ouvrage  ,  un  sens  mystique  ;  mais 
j'ai  préféré  les  traduire  à  la  lettre ,  pour  imiter  le  vague  qu'il  y  a 
dans  l'arabe, 

P.ft,  Lp.  f-à-^-^  <^  pourrait  signifier,  «quelles  sont  les  vues 
»  de  sagesse  que  Dieu  a  placées  dans  ton  beau  collier ,  »  c'est- 
à-dire  ,  «  quelles  sont  les  leçons  allégoriques  qu'on  peut  en 
«  tirer.  » 

P.  fj ,  /.  //.  Je  ne  dis  rien  de  cet  usage  ;  je  me  contenterai 
de  renvoyer  à  Touvrage  «le  Michel  Sabbagh  ,  intitulé  la  Colomhe 
messagère  »  où  Ton  trouvera  des  détails  intéressans  sur  cette  ma- 
tière. On  connaît  d'ailleurs  ces  vers  du  Tiisse  : 

Una  Colomba  per  l' aerec  strade 
Vista  c  passar  sevra  h  stuol  francese  ; 
Che  ne  dimena  i  presti  vanni,  c  rade 
Quelle  liqjùde  vie  con  Vali  tese  : 
E  già  la  messaggiera  pcregrîna 
Dali'  alte  nubi  alla  Citta  s'  inchina. 


Essa  nel  gremh  al  pio  BugUon  ricovra. 
La  raccoglie  Goffredo  ,  e  la  difende  : 
Poi  scorge ,  in  lei  guardando  (  estrania  cosa  ) 
Che  dal  collo  ad  un  jilo  avvinta  pende 
Rinchiusa  carta,  e  sotto  un   ala  ascosa. 

. . .  Tai  wessi  in  quel  tempo  usa  il  Levante, 
Libéra    il  Prence  la  colomba;  e  quclla , 
Che  de'  secret  i  fu  rivelatrice , 
Corne  esser  creda  al  suo  signor  rubella. 
Non  ardi  pià  tornar  nunzia  infelice. 

Jér.  dél.  XVIIl  ;   4r>   et  suiv, 


(  '<'"  ) 

Les  Grecs,  comme  \cs  Arabes,  confiaient  sur-tout  à  ces  messa- 
gères la  correspondance  de  leurs  amours.  On  connaît  l'ode  d'Ana- 
créon  ,  ''^pcLa/M\',  ^îhaa. ,  &c.  où  la  colombe  de  ce  poctc  dit  : 

Lyù  Jl*  AveixptorTt 

K(U    VUV  ,    Of>aCÇ  y    iKUVOV 
^LtTIÇOKcLÇ    X£/U4^CjCI. 

P.j'i,  I.iS.  cyjLw ,  cjul  signilîc  à  l.i  lettre  •<  un  homme  qui 
»'  marche  »,  se  prend  ,  dans  les  livres  mystiques ,  pour»  un  homme 
»>  qui  se  livre  à  la  vie  spirituelle  et  contemplative.  »  On  en  trouve 
plusieurs  exemples;  comme  dans  Saadi ,  Gulistiin  ,  l.  11/ ,  hist.  zS , 

tXJl   <^S=>   ^_>JL.)^   ^jIXJL»,    a-xoU^  .<  (ommc  ont  dit  les  gens 
"  engagés  dans  la  vie  spirituelle.  » 

P.  )2,  I.  I.     Ceci  est  probablement  unvlsJcX^  /  tradition]. 

P.  J2,  l.  4-  Ce  que  l'auteur  dit  ici  ne  me  parait  pas  très-conforme 
avec  ce  qu'on  lit  dans  lu  Colomh  messdgcre ,  p.  26  et  suiv.  «  Suivant 
»  les  habitans  de  l'Irak  »  ,  dit  Michel  Sabbagh  ,  traduit  par  M.  de 
Sacy,  ««  le  pigeon  blanc  à  collier  est  celui  qui  s'apprivoise  le  plus 
»   aisément  :  il  doit  être  préléré  pour  l'objet  dont  il  s'agit.  » 

P.  J2,  L  6.  Je  n'ai  traduit  les  deux  phrases  arabes  que  par  une 
seule. 

P.  J2,  1.  II.  M.  de  Sacy  pense  que  yj-^  veut  dire  ,  «c  en  criant 

^[>^  ,  '^'Lp^  ,  >•  qui  est  un  mot  dont  se  servent  Ic^  jy3  [    sorte 

de  courtiers],  en  criant  dans  les  bazars  l'annonce  des  marchan- 
dises. 

P.j2,  L  iS.  L'auteur  joue  sur  la  double  signification  du  mot 

P.j2,i  22.  .à^  est  le  synonyme  de  *-<2-iL^ ,  Triticum  Spdta  de 
Linnée.  Forskal  ,  Flor.  A^.g^pt.-drah.  p.  LXl. 

P. /-2, /.  j/.  Suivant  quelques  rabbins  et  quelques  musulmans, 

L  4 


(  '68  ) 

Je  klé  eit  le  fruit  défendu   qu'Adam  mangea.    Voici  ce  que  dit 
!e  commentateur  Beïdawi ,  sur  ces  mots  du  Coran,  II,  j-j». 

O^  3j-ûiLlî  jsî>   Lo  ei^j^  pi>a]  ïLjVÎ  (j 

■«  Cet  arbre  est  ou  le  blé,  ou  ia  vigne ,  ou  le  figuier,  ou  un  arbre 

«  qui  rajeunissait  ceux  qui  en  mangeaient;  mais   il  vaut  mieux 

«  ne  point  s'arrêter  à  déterminer  quel  il  était ,  attendu  que   le 

«  Coran  nous  laisse  dans  l'incertitude  sur  ce  point.  » 

P.j2,I.  2y.  Cette  expression  se  rencontre  très-souvent  chez  les 
écrivains  arabes.  On  la  trouve  entre  autres  dans  la  IV.®  s.  de  Hariri  : 

P'  S3'  ^-S'  Quoiqu'on  ait  imprimé  c::>^'>^l  ,  je  lis  o^,  qui 
est  la  leçon  du  ms.  B. 

P.  /j»,  /.  10.  Ces  vers  sont  au  pluriel  en  arabe;  mais  comme  je 
crois  que  le  pluriel  est  ici  pour  le  singulier,  je  me  suis  permis  de 
les  traduire  par  ce  dernier  nombre. 

P.  )^ ,  l.  i6.  A  la  lettre  :  «  Celui  qui  le  reprend  avec  dureté  ne 
-»  peut  lui  faire  tourner  bride.  » 

P.  SS>  l-  iS.  L'aureur  fait  allusion  au  verset  72  de  la  sur.  XXXIIl 

du  Coran  :  ^J^[^  J^jJ^J^^'j  o^yuJt  J^  wLoVl  L^_^  CjI 

que  Marracci  traduit  ainsi  :  «t  Nos  sanè  proposuimus  fidem  cœlis, 
5>  et  terrae ,  et  montibus  ;  sed  renuerunt  portare  eam  ,  et  formidâ- 
»  runt  ab  eâ  >  et  portavit  eam  homo  ,  atque  ipse  fuit  iniquus , 
»  stultus.  » 

ALLÉG.    XVIII.    l'hirondelle. 

P.  j4>  ^' -•     Selon  Bochart,    Hierozoicon ,   tom.   II,  page  60, 

l'hirondelle  se  nomme,  en  arabe  ,  tJ^-*^,  à  cause  de  la  rapidité 
de  son  vol. 


(  I'")  ) 

VHirundo  rusina  a  été  rapportée  d'Egypte,  et  est  figurée  danj  \c 
grand  Ouvrage  sur  l'Egypte  ,  Hist.  iiat.pl.  IV.  Il  est  probable  que 
VHirundo  urfiùi ,  qui  vit  en  société  avec  la  première  ,  et  qui  , 
comme  elle,  fait  son  nid  près  des  habitations,  existe  aussi  en  F.gypte. 
Il  faut  remarquer  que  la  première  niche  dans  les  cheminées,  et  la 
seconde  sous  les  corniches ,  les  portes  des  granges,  entre  les  solives 
qui  sont  ordinairement  à  découvert. 

P.  f4'  l-  )'  On  ^'<J'ï  ^^c,  dans  cette  première  phrase,  l'auteur 
joue  sur  les  mots. 

P.  //,  /.  14.  «  L'hirondelle  bâtit  son  nid  de  chaume,  de  foin  et  de 
5»  paille  ,  en  prenant  toujours  une  becquée  de  boue  avec  chaque 
«brin  de  chaume,  afm  de  mieux  mastiquer  le  tout  ensemble: 
»  elle  lie  son  ouvrage  comme  un  ma^on  &c.  »  (  V^ilmont  de 
Bomare,  Dia.  d'hist.  nat.  ).  Il  est  donc  naturel  qu'elle  aille  faire 
%ts  provisions  auprès  des  ruisseaux,  où  elle  trouve  tous  ces  ma- 
tériaux réunis. 

P.  //,  /,  ij.  Jeu  de  mots  entre  .Uv  voisin,  tl  'X^  ctrc  injuste  fc. 

11  y  a  littéralement  :  «  Je  ne  suis  point  pour  mon  voisin  comme  celui 
»  qui  est  injuste,  ni  pour  les  gens  de  la  maison  ,  comme  le  perfide.  » 

P.  j6,  l.  j?.  Jeu  de  mots  sur  l'homonymie  des  consonnes  dcj j 

et    >_j,ct  de  (_>s:>w  et    c_s=^ 

P.  )6,  /.  16.  Les  mots  ô^y  jusqu'à  (j*»*-*^'  ,  sont  un  cl>^(>^  . 
P.  ;6,  l.  ip.  ^j^^  est  pour  ^   qu'exigeraient  les  règles  de  la 

syntaxe;  mais  la  mesure,  qui  est  du  j-^  nomme  J-«<^l  ,  a 
obligé  notre  poète  à  saturer  le  /^csra ,  licence  toujours  permise 
en  poésie. 

P.  //,  /.  4-  A  la  lettre  :  «  Je  ne  demande  pas  de  prolongation 
»  à  ton  discours.  >» 

ALLEG.    XIX.    —    Lr    IIIEOU. 

P.  j/,  l.  6.  Strix  Scops  de  Linnéc ,  suivant  M.  Savigny, 
Ouvrage  sur  l'Egypte,  Hist,  nat.  1. 1 ,  p.  loS. 


(  17°) 

P.  ^8,  l.  6.  J'ai  traduit  trois  phrases  paf  une  seule  ,  pour  éviter 
des  répétitions  qui,  je  crois,  ne  sont  supportables  qu'en  arabe.  • 

P.  )S ,  l.  2^.  Hordcum  vitJgare  de  Linnée  ,  suivant  M.  Deiile 
fOuv.  sur  l'Egypte ,  Hist.  jmt.  tom.  II ,  f.  5;  } ,  et  Hordeum  hcxa- 
stichon  ,%\x\\dXi\.  Forskai  ( Flor.  yEg.-ar.  ji.LXl  ).  Quant   à  ^j^, 

ce  mot  signifie  proprement,  «  un  petit  pain  rond,  très-mince  et 
■>•>  croquant.  »  Son  synonyme  est  ^y^—> .  Voyez  sur  ce  mot  la 
note  savante  et  curieuse  de  M,  de  Sacy  ,  dans  la  Relation  de 
l'Egypte  par  Abd-aliatif ,  p.  ^28. 

P.  Jp ,  l.  6.  Au  lieu  de   it^yJJf  Je  ms.  A  porte  'ôjiVl. 

P.  jp  ,  l.  iç.  Les  mots  ^^^^  0  I  C^U.  p  ^  Js  sont  du  Coran , 

XXV m,  88. 

P.  jp,  L  2j.  j — 4»  Hou ,  qui  est  le  cri  du  hibou,  est  l'un  des 
quatre-vingt-dix-neuf  noms  ou  attributs  de  Dieu.  Voyez  les  notes 
sur  l'allégorie  de  la  lavande. 

P.  60 ,  L  7.  (^^  est  un  terme  du  langage  mystique.  On  lit 
sur  ce  mot,  dans  le  Seïd  Jorjani,  Kitab  Tarifât,  un  article  inté- 
ressant, que  son  étendue  m'empêche  de  donner  ici. 


ALLEG.    XX.    LE    PAON. 


P.  61 ,   l.  2.   Pavo   cristatus  de   Linnée. 

P.  61 ,  L  6.  (T^V'  Ehlis ,  corruption  du  mot  grec  ^idCoXoç , 
est  le  nom  que  les  Arabes  donnent  au  prince  et  au  chef  des 
anges  prévaricateurs. 

P.  61,  L  p.  0*^4^  (j  L«  icî  AWij  signifie  à  la  lettre,  «<  Dieu 
5'  connaît  le  fond  du  cœur.  »  On  voit  qu'il  y  a  un  jeu  de  mots 
entre  qU-::i>.  et  qU^  ;  cette  phrase  n'est  guère  qu'un  remplis- 
sage qui  n'est  là  que  pour  la  rime.  Les  personnes  qui  ont  lu 
le  Coran  sont  habituées  à  ces  phrases  détachées  qui  coupent  le 
sens  de  la  période.  Les  Arabes  nomment  ces  expressions  inci- 
dentes j^  [>^£- 1  ou  y^^>^ .  Voyez  à  ce  sujet  les  Notices  des  mss. , 
tom.  X ,  p.  68  et  6p. 


(  i7>  ) 

P.  61 ,  /.  12.  Au  lieu  de  P^ — i  le  ms.  A  porte  fi^ — ^  . 

P.  62,  l.  4-  Le  mot  (j'tVj  signifie  ici  les  beaux  udolcsccns 
qui  feront  dans  le  paradis  les  fonctions  d'échansons  ;  quant  au  mot 
jy^>   il  signifie,  «  les  jeunes  beautés  destinées  aux  habiians  du 

»  paradis,  beautés  qui  auront  de  grands  et  beaux  yeux  noirs  (  ce 

»  que  signifie  ^J^  j^^  ,  qui  est  le  nom  qui  leur  est  donné  dans 
>»  le   Coran) ,  qui  seront  pures ,  toujours  vierges,  et  n'auront  point 

>»  d'enfans.  »  On  sera  pcut-ctrc  étonné  de  trouver  ces  mots  en 
parlant  du  paradis  terrestre,  mais  on  sait  que  les  musulmans  le 
confondent  avec  le  paradis  proprement  dit.  Voyez  d'Herbelot , 
au    mot   Gentuih, 

P.  62,  l.  //.  Dieu  ayant  commandé  aux  anges  de  se  prosterner 
devant  Adam,  en  marque  d'honneur  et  de  respect,  ils  y  satis- 
firent tous,  excepté  Eblis,  qui  refusa  d'obéir.  V'oyez  le  Cor.  sur. 
Vil ,  et  la  Bi^lioth.  or.  aux  mots  AJiim  et  Ltlis. 

P.  62  ,  /.  2y.  J'ai  paraphrasé  le  mot  ^*^  ,  qui  signifie  à  la  lettre 

««  avec  eux.  » 

Il  est  essentiel  de  savoir,  pour  comprendre  parfaitement  l'histo- 
rique de  cette  allégorie,  que  Dieu  ayant  défendu  à  Adam  de 
manger  du  fruit  d'un  certain  arbre  ,  ce  fut  alors  qu'Eblis  le 
maudit  ,  s'associant  avec  le  paon  et  avec  le  serpent,  s'accosta 
d'Adam  et  d'Eve,  et  fit  tant,  qu'après  un  long  entretien  qu'il  eut 
avec  eux,  ils  mangèrent  du  fruit  défendu.  Mais  à  peine  eurent-ils 
pris  cette  fatale  nourriture,  que  les  habits  dont  Dieu  les  avait  re- 
vêtus (  car  ,  selon  les  musulmans  ,  Dieu  avait  habillé  Adam  et 
Eve  d'habits  merveilleux,  tels  qu'ils  convenaient  à  leur  dignité  ) 
les  quittèrent  aussitôt  et  tombèrent  à  leurs  pieds  ;  ce  qui  leur  fit 
connaître  le  péché  qu'ils  avaient  commis,  en  les  couvrant  de 
honte  et  de  confusion  à  la  vue  de  leur  nudité.  Us  coururent  in- 
continent vers  un  figuier  pour  se  couvrir  de  ses  feuilles,  et  ne 
Jurent  pas  long-temps  sans  entendre  la  voix  foudroyante  du  Sei- 
gneur ,  qui  prononça  ces  paroles  :  Dcscenikz  et  sortez  de  ce  lieu  ; 
foui  deviendrez  ennemis  les  uns  des  autres ,  et  vous  aurez  sur  la  terre 


(  J7'^  ) 

votre  hiihitntbn  et  votre  suhistance pour  un  temps,  f  Coran,  sur.  VU, 
XX,  &.cj. 

La  tradition  la  plus  commune  est  ({u'Adam  tomba  sur  la  mon- 
tagne de  Serandib  (c'est  l'ilc  de  Ceyian,  où  il  y  a  encore  au- 
jourd'hui une  montagne  nommée  par  ies  Portugais  Pico  de  AcLim). 
Eve  tomba  à  Gidda,  port  de  ia  Mer  rouge,  assez  près  de  la 
Mecque;  Ebiis  tomba  à  Missan,  près  de  Bassora  ;  le  paon  dans 
l'Indostan,  et  le  serpent  à  Nisibe  ou  à  Ispahan,  c'est-à-dire  dans 
les  lieux  où  ces  villes  ont  été  depuis  bâties.  Y>'WQx\)t\oi,  Bihlioth. 
orient,  au  mot  Adam. 

P.  6j,  l.  2j.  Si  ces  vers  sont  dans  la  bouche  du  paon,  le  mot  OL*» 

signifiera  ici  «  les  anges  »  ,  ou  mieux  encore ,  <«  les  houris  et  les 
■>■>  échansons  du  paradis  »  ;  s'ils  sont  dans  la  bouche  du  poëtc,  ce  qui 

est  plus  naturel  ,  alors  le  mot  ë,^^  signifiera  «  les  habitans  de 
»  la  tribu  de  la  maîtresse  de  l'auteur  »,  ou  mieux,  «  les  chefs  de 
«la  tribu  qui,  ayant  fiiit  décamper  cette  tribu,  ont  ainsi  privé 
»  notre  amant  de  la  vue  de  son  amie,  dont  la  tribu  avoisinait  la 
»  sienne.  »  On  peut  aussi  donner  à  ces  vers  un  sens  mystique  ;  et 
malgré  le  vague  des  vers  arabes ,  il  est  probable  que  c'est  le 
sens  qu'a  en  vue  l'auteur. 

^  P.  64,  L  I.  Voyez,  pour  la  particule  I j ,  les  notes  sur  l'ané- 
mone. 

P,  64,  î.  2.  Les  mots  ^^y^  ,   lj.€^j,  et  plus  bas,  \yS^\ y 

sont  pour  è^^  ,  ^^^^  et  ^S-^  I  .  On  ne  les  a  orthographiés  ainsi 

que  par  licence  poétique;  licence  exigée  par  la  mesure,  qui  est 

du^H^  nommé  J^lxJ)  .  Voyez  la  Cramm.  arabe ,  t.  Il,  p.  ^y4^ 
n.°^  6pi  et  6p2. 

P.  64,  l.  j.  Le  mot  (j-^,  qui  est  traduit,  dans  les  dictionnaires , 
par  cil,  ne  signifie  cependant  que  paupière.  Outre  la  preuve  qu'en 
fournit  son  autre  acception  de  pagina  gladii ,  en  vulgaire  ,  on  ne 
l'emploie  jamais  que  dans  le  sens  de  paupière ,  et  je  pourrais  citer 
plusieurs  passages  de  Hariri  où  il  est  impossible  de  le  rendre  par 
ai  :  le  nom  le  plus  usité  pour  cil  est  c->OJfe 


p.  ^4  >  f'  7'  ft-i    est  un  mot  tout  difltrciu  de   ^  :   relui -d 

est  une  conjonction,  et  l'autre  est  un  adverbe  de  lieu  (  Ol^  des 
Hébreux  ). 

P.  64 ,  /.  S.  Vv^  est  jHJur  (JLi  par  la  même  licence  dont 
nous  avons  parlé  plus  haut. 

ALLÉG.    XXI.    LA    PERRUCHE. 

P.  6)  ,  I.  4'  °J-^  est  le  nom  arabe  de  la  perruche  à  collier 
couleur  de  rose,  Psittacus  Alexandri  de  Linnéc,  suivant  Sonnini, 
Vii)'age  en  Egypte,  t.  IIf,p.pj. 

P.  6j,  l.  t^.  On  lit  dans  Saadi ,  //,  S  : 

«  On  ne  peut  se  lasser  de  louer  le  paon  ù  cause  de  la  richesse  et 
»  de  l'élégance  de  son  plumage  ;  mais  lui-mcme  il  a  honte  de  la 
»  laideur  de  ses  pattes.  » 

P.  ôj,  l.  II.  J'ai  traduit  Js^-^é-^w  par  chcrif,  et  je  crois  que  c'est 
le  sens  que  Tautcur  a  voulu  donner  ici  à  ce  mot;  car  on  sait  que 
les  chérifs  ,  c'est-a-dire  ,  les  descendans  de  Mahomet  par  Ali  son 
gendre  et  par  Fathimeh  sa  fille,  portent  le  turban  vert,  tandis  que 
les  autres  Musulmans  le  portent  blanc.  Bbl.  or.   au  mot  Schcrif. 

P.  6j,  I.  t).  Le  mot  (Tj  j"^  signifie  tpmhau  ,  cercueil ,  sarco- 
phage, &c.  M.  de  Sacy  a  traduit  ce  mot  par  sarcophage,  p.  ly'j  de 
la  Relation  Je  l'Egypte,  par  Abd-allatif;  et  dans  sa   note,  p.  219, 

il  observe  que  Pococke  a  rendu  iy*J^  p^ir  sepulchrum ,  et  que  ce 
mot  a  constamment  ce  sens  chez  les  écrivains  arabes.  Méninski  le 

traduit  par  (j'-^—j»-^  j-^-*-^^  Cameterium  Alagorum. 

P.  66,  l.  /.  Au  lieu  de  j^ Sz]  ,    le  ms.  A    porte    jLCJVl  • 

P.  66 ,  l.  /;.  Les  mots  ^y^y^  *^jj^  signifient  à  la  lettre  ,  ««  le 
»  champ  de  l'existence  »;  ce  qui  veut  dire  le  monde ,   In  terre  :  la 

preuve  ,  c'est  que  les  mss,  B  et  D  portent  Ujcv  I  *-^jj^.  On  trouve 


('74) 

cTaii leurs  cette  périphrase,  ou  du  moins  des  périphrases  semblables , 
dans  les  écrivains  orientaux,  avec  le  sens  que  je  donne  ici  à  cette 
expression;  comme,  par  exemple  ,  PlcN^I  oliLili*.,  dans  ÏAnvari 
So/ici/i ,  fol.  6j  verso. 

P.  66,  l.  iS,  Les  mots  ^j^  a^^  se  trouvent  dans  le  Coran , 
XVII,  Si, 

P.  66 ,  l.  21.  La  demeure  de  l'éternité  signifie  la  demeure  éternelle. 
Les  Arabes,  ainsi  que  les  Hébreux,  les  Persans  ,  &c.  déterminent 
souvent  un  nom  par  un  autre  nom ,  au  lieu  de  le  modifier  par  un 
adjectif;  ainsi,  au  lieu  de  dire  montagne  sainte,  mons  sanctus ,  ils 
disent  montagne  de  la  sainteté,  mons  sanctitatis  (  *1M3  piy*"*Q 
•]î!:^'7p , ps.  XV,  I  ).  On  a  déjà  vu,  dans  cet  ouvrage,  plusieurs 
exemples  de  cette  construction. 

P.  6y,  L  12.  Les  mots  (gvJ.su I  itf:AiJl  ^^-âa-u  vj^a-j  (3^|o  signi- 
fient à  la  lettre ,  «  celui  qui  entend  et  qui  sait  (  Dieu  ) ,  a  fait  naître 
»  entre  les  hommes  et  moi  une  amitié  réciproque.  »  Les  mots  ^f^c^-^l 
et  A-^l ,  sont  deux  des  quatre-ving-dix-neuf  noms  ou  attributs  de 
Dieu. 

P.  6y,  L  jp.  ^icN5  I  c>-^  signifie  mot  à  mot,  «  (  je  serai  )  sous 
»  leurs  pieds.  » 

P.  68 ,  l.  I.  Ces  vers  sont  au  pluriel  en  arabe ,  et  semblent  placés 
dans  la  bouche  de  la  perruche  ;  je  crois  cependant  plus  naturel  de 
les  entendre  comme  je  les  ai  rendus ,  vu  le  style  de  l'auteur  et 
l'ensemble  de  l'ouvrage.  Voici  comment  on  pourrait  traduire  les 
quatre  derniers  ,  en  les  supposant  prononcés  par  la  perruche: 

«t  J'aime  des  êtres  qui  sont  excellens,  soit  en  réalité  ,  soit  à  l'exté- 
»  rieur;  qui  sont  grands  en  dignité  et  en  réputation,  et  dont  les 
»  vertus  sont  pures.  Dans  l'autre  vie,  je  l'espère,  j'aurai  encore 
»  le  bonheur  d'être  avec  eux;  car  Mahomet,  la  plus  excellente 
»>  des  créatures,  a  dit  et  annoncé  (  et  c'est  une  vérité):  Celui 
»  qui  aime  une  -personne  ressuseitera  avec  elle.  » 

On  voit  que  je  rends  différemment  le  C^^.ô^^  qui  termine  ces 


(  "75) 

vers;  mais  c'est  à  cause  des  derniers  mots  de  la  prose  ,  (j\ii  semblent 
nécessiter  ce  sens ,  si  on  place  les  vers  dans  la  bouche  de  la  per- 
ruche. 

P.  6S,  I.  12.  Les  derniers  mots  de  cette  allégorie  me  rappellent 
ces  quatre  jolis  vers  du  Gulistnn ,  liv.  II ,  26. 

^^j>»  <>^^   UVS^    cii>*   '-^'^v 

n  Sur  le  matin  de  la  nuit  dernière  ,  le  gazouillement  plaintifd'un 
»  oiseau  vint  frapper  mon  oreille.  Une  émotion  involontaire  s'em- 
>»  para  tout-à-coup  de  moi  et  troubla  mes  esprits.  Le  hasard  fit 
»  qu'un  de  mes  amis  les  plus  intimes  entendit  les  soupirs  que  je 
"  poussais.  Je  ne  puis  comprendre ,  me  dit-il ,  que  le  chant  d'un 
»  oiseau  ait  pu  produire  en  toi  une  sensation  pareille.  Ah  !  lui  ré- 
»  pondis-je ,  est-il  conforme  aux  lois  de  la  nature  que  les  oiseaux 
>»  chantent  les  louanges  de  Dieu  ,  et  que  je  garde  le  silence.  » 

P.  ôS,  l.  i4'  fj^J^  signifie  proprement,  <«  celui  à  qui  il  a  été 
i>  fait  miséricorde  "  ;  et ,  par  suite ,  on  emploie  ce  mot  pour  dési- 
gner un  dcfunt ,  un  mort ,  un  trépassé.  Je  crois  qu'il  faut  ici  rapporter 
f^j^  au  poète,  et  prendre  ce  mot  dans  sa  signification  propre. 

ALLÉG.    .XXIl.    —    LA    CHAUVE-SOVRI S . 

P.  6p,  1.  2.  Selon  Bochart ,  Hicrozoicpn  ,  t.  II ,  p-  jjO  ,  la  chauve- 
souris  est  nommée  en  arabe  (j-*-^  (  de  la  racine  /jiÂsh,  cktilis, 
imkcillis  fuit  ) ,  à  cause  de  la  faiblesse  de  ses  yeux. 


(  176) 

Je  n'ai  pas  besoin  d'avertir  que  cette  allégorie  est  toute  mystique 
d'un  bout  à  l'autre  ;  mais  il  est  nécessaire  de  se  ie  rappeler  en  la 
lisant ,  pour  en  saisir  le  sens  parfaitement. 

P.  6p  ,  l.  S.  Ce  qu'on  lit  ici  est  une  allusion  à  une  tradition 
(  c!>JcN^  )  ;  car  il  n'y  a  rien  absolument  dans  le  Coran  qui  ait  trait 
à  cela  :  Cham  peut  être  aussi  le  symbole  des  gens  mondains ,  Sem 
celui  des  hommes  de  Dieu  ,  et  (JS^  le  lieu  qu'habite  la  divinité.  Je 

n'ai  pas  besoin  de  faire  observer  qu'il  y  a  un  jeu  de  mots  entre  jol^^*- 

ohivit,  et  1»''^  Cham.  Toutefois  le  ms.  A  seul  porte  ce  passage  tel 

que  je  l'ai  imprimé.  Voici  ce  qu'on  lit  dans  les  autres  mss.  :   tN^^S 

^UJI   ^^1    l^    r  jdU.j/1  ^P  G-^J^J  '  ^^^  C^  Jj^  f*^ 

C  JsLuJ    ô  I 

p.  6p,  l.  ip.  Quoiqu'on  ait  imprimé  o^^  c>^\c.  1 3ij ,  &c.  leçon 
du  ms.  A  ,  je  lis  oÂ^j  ^j^'ÂJi  o-li.^1 ,  &c.  qui  est  la  leçon  des 
autres  mss. 

P.  yo ,  l.j.  (J-rt^  ^-^J/^  signifie  à  la  lettre  :  «  je  traîne  après 
»  moi  la  queue  de  ma  robe. 

P.  /o ,  l.  /<^.  Il  y  a  dans  le  texte  ,  Gahriel.  Or  on  sait  que 
cet  archange  joue  un  très-grand  rôle  dans  le  Coran ,  et  par  suite 
dans  les  livres  orientaux.  C'est  lui  qui  apportait  à  Mahomet  les  ré- 
vélations célestes ,  et  ce  fut  lui  qui  le  conduisit ,  lorsque  ,  monté 

sur  le  Borac,  il  fit  au  ciel  le  voyage  nocturne  nommé  ^L>*^  >  c'est- 
à-dire,  -wc^-w^/o//,  Gabriel  est  aussi  de  cet  ordre  d'esprits  célestes  que 
îes  musulmans  appellent  qo  iL«  , c'est-à-dire,  «  qui  approchent  de 
«  plus  près  le  trône  de  Dieu.  »  Voyez  d'Herbelot,au  mot  Céhràil. 

P.yo  ,  L  20,  J'ai  déjà  remarqué  que,  dans  les  écrits  mystiques, 
le  vin  signifie  l'amour  de  Dieu.  Les  mots  l  j^  (jUis  jî^  ,^  (J^j 

(^^À/>  ^liUl  équivalent  donc  à  ceux-ci:  «■  Dis  à  l'amant  pas- 
»  sionné  que  son  amour  va  être  couronné.  » 

P.  yo,  L  24.  Ces  vers  sont  placés  dans  la  bouche  de  Dieu, 


{   Ï77  ) 

c'est-à-dire  du  «->^^^  ;  mais  on  se  souvient  que  ce  mot,  que  je 
traduis  par  maîtresse,  ifc. ,  indique  toujours,  dans  cet  ouvrage,  la 
Divinité. 

P.  yi,  l.  y.  J'ai  été  forcé  de  diviser  CiljjÊ  ,  à  cause  de  la  me- 
sure, qui  est  du  ^>-^  nommé  (J^vXJl  Ce  vers  est  différent  dans 
les  quatre  mss.  Le  sens  est  :  «  Si  tu  m'aimes  et  que  tu  pra- 
>•  tiques  mes  lois,  ta  vertu  te  fera  honorer  de  tout  le  monde  et 
»  t'éievera  au-dessus  des  monarques.  » 

P.  yi,  l.  8.  J'ai  coupé  ie  mot  (^^*^ ,  toujours  à  cause  de  la 
mesure. 

P.  yi ,  l.  14.  C'est  a  dessein  que  j'ai  omis  dans  ma  traduction 

^vJiJl   o>JUw  I  tSjfcj  «  ce   serait  ie  contraire  de  la  règle  com- 
mune. » 

P.  yi ,  l.  //.  Tout  ceci,  depuis  ie  mot  o^  jusqu'à  j'J^^va^  ^ 
est  si  mystique  et  tellement  obscur ,  que  chacun  des  mots  exi- 
gerait une  ample  explication.  J'ai  tâché  de  rendre  ce  passage 
aussi  exactement  que  je  l'ai  pu,  et  je  me  contenterai  d'expliquer 
ici  les  mots  qui  présentent  le  plus  de  difficultés.  D'abord  le  mot 

\^.y^  est  ainsi  expliqué  dans  le  c:j'^^>aj'  cjU^=>  Livre  des 
Définitions  :  iColi_j;^V|  ^j^J^  ^  çjû-a&llj  t_>-U2if  |bLJL«^^ 
et  voici ,  selon  le  même  ouvrage,  ce  qu'on  entend,  dans  la  langue 
mystique,  par  le  mot  iCoUu-wl  :  iO»j>X«j  K^)6    3^^1j    ^y'^s^ 

Le  mot  c)S^<f^  >  qui  vient  dans  la  ligne  suivante  ,  est,  toujours 

d'après  îe  Tarifât:    io»LsLj^ Y  f   (^    *lji — ^^^'j  T'j^J^'    /»^ 

Quant  aux  mots  cij*-^  et  ïJj»^  ,  pi.  Oj*-»-* ,  on  les  a  déjà  vus 
employés  dans  un  sens  mystique.  Voyez  les  notes  sur  la  rose.  Enfin , 

voici  la  signification  mystique  de  (jyij    (  ^^-^^^    Jj*"'    t>-^  ) 

l*)  Cette  dcfinitioii  du  moj  ft-»Vfl.X.w|  se  trouve  dans  les  NotUes  dts  mss.  {om.  X, 
P-  -fvf  tt  ^;. 

M 


{  '78  ) 

toujours  suivant  le   oIâj-aj":qI — (tVi  cS — j  (^^sJi   f-?.jj 

p.  yr ,  l.  2/,  Peut-être  faudrait-il  traduire  /j^*^  ôj^  "3^ 
(^j^,  "  parce  que  je  suis  dans  un  état  d'imperfection.  » 

P.  y2,  l.  i4'  On  pourrait  peut-être  traduire  jV^c^l  par  «  ies 
autres  (  que  Dieu  )  »  ,  c'est-à-dire  ,  <■<■  tout  autre  objet.  >» 

ALLÉG.    XXIII.    —    LE    COQ. 

P,  yj ,  /.  ij.  Le  mot  que  je  traduis  par  anjwnce  de  la  prière ,  est  fe 

mot  (J'-^f  izan  ,  qui  est  l'appel  à  la  prière,  que  \qs  muezzins 
(  c'est-à-dire  ceux  qui  font  l'izan  )  font  à  haute  voix  du  haut  du 
minaret  des  mosquées ,  pour  avertir  le  peuple  que  c'est  l'heure  dé- 
signée par  la  loi  pour  louer  et  prier  Dieu.  Cet  appel  a  lieu  cinq  fois 
par  jour.  Dans  le  mois  de  Ramadhan  ,  qui  est  consacré  au  jeûne, 
il  y  a  deux  appels,  et  par  conséquent  deux  prières  de  plus;  mais 
ces  prières  sont  surérogatoires  et  de  pure  dévotion. 

I    ^ 
P.  y^,   l.  ly.  Les  mots   'Lsi^^   \&j,^  sont dn  Cor.,  VII,  2o4' 

P.  yj ,  L  22.  Allusion  aux  mots  que  prononcent  les  muezzins 

en  faisant  l'annonce    de   la  prière:  «^1    û   qI   tX^I  _»^=i  awI 

Cette  annonce  est  la  même  pour  les  cinq  heures  canoniques , 
excepté  celle  du  matin,  où  le  muezzin  ajoute  ces  paroles  :  ëJL^i 
jijJl  t^  J^  «  la  prière  vaut  mieux  que  le  sommeil.  »  Voyez 
Mouradgea  d'Ohsson,  Tahleau  de  l'Empire  ottoman ,  t.  IV,  p.  loS 
et  suiv.  édit.  in-iz. 

P.  j4,  L  p.  fsXjo  est  ici  dans  le  sens  de  devoir  religieux  :  ce 
mot  a  souvent  cette  signification  chez  les  auteurs  mystiques. 

P.  y4 ,  L  10.  Or^i^  est  le  pluriel  irrégulier  de  la  trentième 
forme,  qui  est  une  de  celles  que  les  Arabes  nomment  cî^»  ou 
ÇyJ^    c/^^^^  :  son  singulier  est  CiJ^-î^ 


(   '79  ) 

P.  j4'  ^-  'S-  *^^^'j^  "ï  *^"  pluriel  de  C->j3lj  .  Voyez ,  par  rap- 
port à  cette  pierre  précieuse,  les  notes  sur  la  violette. 

P.  7/,  /.  j*.  Ces  deux  vers  ne  se  lisent  que  dans  les  mss,  A  et  F). 
Le  ms.  B  en  porte  trois  diffcrens ,  et  le  ms.  c  en  porte  également 
trois  autres  ditférens  aussi.  Le  ms,  D  contient  en  outre  près  d'une 
page  de  prose  de  plus  que  les  autres  manuscrits.  Je  n'ai  pas  cru 
devoir  m'éloigner  du  ms.  A  ;  et  je  ne  crois  pas  mcmc  devoir  sur- 
charger mes  notes  des  vers  des  mss.  B  et  C  ,  qui  ne  présentent  rien 
d'intéressant,  et  encore  moins  de  la  prose  du  ms,  D,  qui  ne  con- 
tient que  des  pensées  triviales  et  des  lieux  communs  de  morale. 

ALLÉG,    XXIV.    —    LE    CANARD, 

P.  7/,  /.  /^,  La  signification  du  mot  ^  n'est  pas  exposée  trcs- 
claircmcnt  dans  nos  dictionnaires.  Voici  la  définition  exacte  de  ce 

mot,  d'après  le  Kimh  Tarifât  :  o  1^    ^-rV-^-?Ç  '^^--^j  t_>^'    '*^'^ 

o^^^jfjUidil  J,^^:J^  c-mU^  Jl  iL'^j^f  «  La  "direction  du 

»  cœur  et  l'emploi  de  toutes  les  forces  spirituelles ,  vers  un  but  quel- 
»  conque,  pour  parvenir  à  la  perfection,  ou  pour  autre  chose.  » 

P.  7/  ,  /.  20.  J^  est  toujours  oppose  à  J^j.  (J-o  signifie  pro- 
prement rosée,  et  de  Jà  il  s'emploie  pour  exprimer  le  peu ,  V exi- 
guïté,  ire.  (Jjo,  au  contraire  ,  signifie  pluie  ,  et  de  là  ,  l'ahn- 
dance ,  ire.  Le  sens  est  donc  ici  :  «  Tu  te  contentes  des  ordures, 
»  et  tu  ne  portes  pas  ton  ambition  plus  haut.  » 

P.  j6,  l.  /.  Les  Arabes  disent  en  proverbe  :  tj>-U?  ^^J\  ^jiji 

(\,^\  "■  Celui  qui  veut  des  perles  doit   plonger  dans    la   mer.» 

P.  yô ,  l.  2.  Ceci  et  une  grande  partie  de  ce  qui  suit  aurait 
besoin  d'un  commentaire  ;  mais  comme  je  l'ai  traduit  littéralement , 
je  me  contenterai  de  renvoyer  aux  notes  sur  la  chauve-souris,  pour 

les  mots  0^:^  ^^  cTr^  .  Quant  aux  mots  ^iCk  et  ^Ia/o  ,  on  les 

a  déjà  vus  plusieurs  fois  dans  cet  ouvrage,  dans  le  sens  qu'ils  ont  ici. 
V'oyez,  dans  d'Herbclot,  au  mot  Ftidhail ,  un   fragment  du  Kaschf 

Mz 


(  «80) 

Asrar,  qui  jette  diu  jour  sur  les  métaphores  cjui  terminent  la  prose 
de  cette  allégorie. 

P.  76 ,  l  10.  \\^  (  *  )  est  le  nom  d'action  de  H^  [fulsit , 
mlcuit] ,  deuxième   forme  du  verbe   quadrilitère     0  V 

P.y6,  1.24.  (j'-ynese  trouve  dans  les  dictionnaires  que  dans 
le  sens  de  poitrine  :  mais  je  l'ai  souvent  entendu  employer  en 
vulgaire ,  pour  exprimer  îe  cable  à  l'aide  duquel  on  haie  les  ba- 
teaux. De  ce  mot  (j'-y  ,  vient  probablement  le  mot  lièan ,  dont  les 
pêcheurs  se  servent  pour  désigner  la  corde  qui  est  au  bas  du  filet. 

P.  y6,  L  2).  *^ô<^ ,  plur.  c:>VtX^,  signifie  proprement  attrait , 
entraînement ,  attraction ,  fc.  Toutefois  ,  dans  le  langage  mystique,  ce 
mot  est  l'abstrait  de  CJ>jc>^,  qui  signifie  un  homme  qui ,  attiré  par 
la  grâce  de  Dieu,  quitte  le  monde  et  les  choses  du  monde ,  pour 
se  livrer  à  la  contemplation.  M.  de  Sacy  l'a  traduit  par  illuminé. 
Voyez  le  Pend-namèh ,  p.  LV  et  suiv.  où  ce  célèbre  orientaliste  cite 
M.  J.  W.  Graham  ,  a  Treatise  on  sujiism,  or  Alahomedan  myzticism , 
dans  le  recueil  intitulé  Transactions  of  the  lit.  society  of  Bombay,  p.  pS 
et  suiv. 

P.  y6 ,  l.  26.  Les  mots  q-|1^i   *^  sont  également  dans  le 

Coran ,  XV 111,  /^  ;  mais  ils  sont  pris  ici  métaphoriquement,  et  signi- 
fient ce  degré  où  l'on  n'est  plus  qu'à  la  distance  de  deux  arcs  {**) 

de  l'union  mystique  avec  la  divinité  :    {J^. — «^     S^       ë^)-ê — ^ 
êUn^W  Kitah  Tarifât. 

P.  -jô,  l.  2y.  Je  crois  qu'il  est  inutile  que  je  m'étende  ici  sur  la 
source  ou  la  fontaine  de  vie  ,  que  les  Arabes  nomment  g  Lit  ^^^  , 
les   Persans   qU^  cjI    ou    c:>Vr2*  t-Ji  ,  et  nos  trouvères  Fon- 


(*)  H  y  a  duJsAJ'  dans  le  texte,  parce  que  ce  mot  étant  au  génitif,  ic  dernier  | 
est  affecté  d'un  kara  et  se  trouve  de  plus  placé  au  milieu  du  mot,  ce  qui  nécessite  son 
changement  cnya.  Gramm.  ar.   t.  I.",p.  jp ,  «.'  /^,  et  p.  p^,  «.*  2J^. 

(**)  Cette  expression  se  retrouve  dans  le  Co^^an,  un ,  g. 


(  .8.   ) 

tiiirte  (k  Jouvence  [  fons  jiivcntutis ].  Je  pense  d'ailleurs  que  l'auteur 
veut  parler  ici  métaphoriquement  de  la  divinité. 

P.  yj,  l.  j».  Conformément  à  mes  manuscrits,  j'ai  termine  tous 
ces  vers  par  un  (j  ,  par  licence  poétique ,  et  à  cause  de  la  rime. 

P.  yy,  L  y.  L'auteur  veut  sans  doute  parler  ici  de  la  mort  spi- 
rituelle *^  ,  qui  est  le  septième  degré  de  la  vie  contemplative 
AMI  i3j»jt.  On  nomme  aussi  ce  degré  jJi^  ,  pauvreté.  Voyez  le 
Pcnd-namch ,  jnig.  iSi  et  suiv. 

Il  y  a,  à  la  lettre  :  «  Avance,  et  le  premier  argent  comptant 
'>  (  que  tu  recevras  )  sera  la  plus  prompte  des  fins.  » 

P.  yy ,  L  8.  Voici  la  définition  du  mot  CJj^  ,  dans  le  sens  mys- 
tique,  suivant  le  cjLajy-*^'    cJ>'''^^='  : 

P.  yy ,  l.  ly.  Les  manuscrits  portent  (Jj-^,  qui  est  l'orthographe 
vulgaire;  car  on  sait  qu'en  arabe  moderne  ,  les  duels  et  les  pluriels 
n'ont  qu'un  cas  ^  lequel  est  le  cas  oblique  du  littéral.  Ainsi  l'on  dit 

toujours   {jJ^j  ,  deux  hommes  ,  Q.J  ù^.j  ,   plusieurs  zéïds ,  et 

jamais  (J^^^J  ^*  Oj'^j-  Le  ms.  A  porte  Oj-^ 

P.  yS ,  l.  2.    JU2J  est  pour  VLkj  ,  par  licence  poétique. 

ALLÉG.    XXV.    l'abeille. 

P.  y  S,  I.  4  ■  Apis  violacca,  de  Lin  née  ,  selon  Forskal ,  Descrlpt. 
an.  p.  XXIII ,  et  Apis  mcllifiai,  suivant  Russel.  Nut.  Hist.  of  Aleppo , 
t.  Il,  p.  212.  Voyez ,  sur  l'abeille  ,  le  joli  morceau  de  Cazwini , 
que  M.  de  Chézy  a  donné  dans  la  Chrcswmathie  arabe ,  toni.  T , 
p.  jy^  et  suiv. ,  et  tom.  III ,  p.  4^o  et  suiv. 

P.  yS ,  /. /.  On  voit  que  l'auteur  joue  sur  *Xk: ,  nom  d'unité 
de  J^^  ,  ahellle ,  et  iX^,  prétention. 

P.  yS ,  L    6.  Dans  ^^}^j ,  l'affixe  ^  paraît  se  rapporter  à 

M3 


(   '82  ) 

^  ,  fcminin  ,  par  une  licence  poétique.  Pour  ce  qui  est  de  «*A:^j  ^ 
ou  le  »  est  ici  un  affixe ,  et  il  se  rapporterait  encore  au  canard  , 

ce  qui  serait  bien  irrcguiier;  ou  il  fiiut  lire  i-o».j  ,  les  points  du  » 
étant  retranches  à  cause  de  la  rime  ,  et  c'est  ainsi  que  j'ai  lu  ce  mot. 

P.  jS ,  l.  I).  Les  manuscrits  portent  o^  >  rnais  comme  les 
règles  de  la  grammaire  exigent  ici  le  mode  conditionnel  (  pj^  ) , 
j'ai  reformé  cette  irrégularité  du  langage  vulgaire.  Ces  mots  v_j>J' o 
C^LLsf  «uiJLo  U.J.9  signifient ,  à  là  lettre ,  «  Ne  nourris  pas  une 
»  branche  que  ta  racine  détruira.  » 

P,  yS,  L  2^'. Voici  ce  qu'on  lit  sur  l'abeille  dans  le  Coran,  sur.  XVI, 
intitulée  J^f  «•jj-»*' [sur,  de  l'abeille],!/,  yoctji:  ci'  ^j  cl'j'j 

Qj-^jJO  \£  o  j-:£Lj\  ^j^j  ^^  U^.  '  L>'*  L^tX^'  (J'  J"^' 
L>^     ^J^.    ^^'^    ^J  J-^    JiLJé     c^îjiJI  (j^    ^    ^Jé  / 

(Jj^.xJuj    jsJJ    iSi  Comme  les  deux  traductions  françaises  du 

Coran  de  du  Ryer  et  de  Savary ,  les  seules  que  nous  ayons,  sont 
peu  littérales,  j'essaierai  de  traduire  ainsi  ce  passage  presque  à 
la  lettre  :  «  Ton  Seigneur  inspire  à  l'abeille  ce  qu'elle  doit  faire; 
»  il  lui  dit  :  Place  ta  ruche  dans  \cs  montagnes  ,  dans  A^i 
î>  creux  d'arbres  ou  sous  des  voûtes.  Fais  ta  nourriture  des  fruits, 
î>  et  suis  avec  humilité  les  voies  de  ton  Dieu.  Les  abeilles  four- 
»  nissent  une  matière  de  diverses  couleurs  et  qui  est  un  remède 
5>  utile  aux  hommes.  Certes  il  y  a  dans  cela  une  preuve  de  la  toute- 
»  puissance  de  Dieu,  pour  celui  qui  réfléchit.  » 

Plusieurs  phrases  de  notre  allégorie  font  allusion  à  ce  morceau 
du  Coran. 

P.  7^,  /.  4-  Les  mots  ow^jVj'â.3,  que  je  n'ai  pas  traduits, 
signifient  à  la  lettre  :  en  détail  et  en  somme. 

P.  7^  ,  /.  j?.  Les  Principes  ou  Elémens  de  la  géométrie  et  de  l'arith- 
métique d'Eue (ide  ont  eu  chez  les  Arabes  plusieurs  traducteurs 
et  un  grand  nombre  de  commentateurs.  On  a  imprimé  à  Rome, 


(   "85  ) 

en  1594,  une  traduction  arabe  de  ces  EIcmcns  avec  un  com- 
mentaire de  Nas5ir-eddin.  \'oycz  d'Herbclot,  ànxmots  AAlit/ei  cl 
Ocluiis,  et  la  Bio^TAphic  de  M.  Michaud. 

P.  So ,  /.  S.  L'auteur  joue  sur  ^jj  ,  esprit,  et  (_^jj  ,  fcminin 
de  i'impcraiit  du  verbe  ^'j.  Ce  dernier  mot  est  pcut-ctrc  aussi 
une  simple  répétition  du  premier  :  ô  ame  de  mon  nme. 

P.  So ,  l.  (f.  J'ai  suivi  la  le<,on  du   ms.  D;  les  autres  portent 

p.  So ,  l.  10.  Ou  les  deux  o'^  doivent  ctre  pris  dans  le  même 
sens  ,  ce  qui  serait  fort  mauvais,  ou  le  premier  est  de  la  racine 

jv::!^  ,  et  signifie  ik  la   race  des  démons. 

P.  So,  l.  tj.  Cette  dernière  phrase  est  certainement  mystique, 
et  signifie  qu'on  ne  peut  parvenir  à  la  vision  intuitive  sani  avoir 
passe  par  les  degrés,  si  ditîicifes  à  parcourir,  du  spiritualisme. 

Les  vers  qui  suivent  sont  également  mystiques.  L'auteur  les  a 
placés  dans  la  bouche  de  la  Divinité.  Je  pense  que  le  lecteur  , 
déjà  accoutumé  au  style  de  l'ouvrage  ,  les  comprendra  sans  expli- 
cation. 

P.  Si  ,  /.  j".  l-^*^'  est  une  deuxième  forme  quadrilitcre,  formée 
de  <sv*/»  ,  qui  signifie  saisir  le  \^^aa  ^  comprendre  le  sens  caché  et 
allégorique  des  choses,  &c.  ]  Ce  verbe  pourrait  signifier  aussi  devenir 
vj.\A>o  f  cesser  d'être  une  substance  corporelle  et  devenir  une  idée ,  une 
chose  purement  spirituelle];  mais  dans  les  passages  de  cet  ouvrage  où 
ce  mot  se  trouve  employé,  il  parait  plus  naturel  de  lui  donner  le 
premier  sens.  Il  y  a  plusieurs  exemples  de  verbes  formés  de  cette 

manière  :  de  i^ySL^/»  on  a  formé  ^j^^^>*^'  ;  de  *-^jO^  t   ^J^^  '>  ^*^ 

cH<>^  ,   J  J-vtf^"  &c. 

ALLÉG.     XXVI.    LA    BOUGIE. 

P.  Si  ,  l.tp.  De  même  que  les  Orientaux  comparent  aux  larmes 
les  gouttes  de  cire    qui  découlent  de   la  bougie,  ils  comparent 

M  4 


(  '84) 

Souvent  aussi  les  larmes  aux  gouttes  de  cire.  Voyez-en  un  exempfe 
dans  le  Pend-nameh ,  ji,  ^oy  et  joS. 

P.  Si  ,  /.  //,  Il  y  a  dans  le  texte  mon  -père ,  parce  (|ue  J-^  est 
du  masculin;  mais  j'y  ai  substitué  ma  mère,  pour  me  conformer 
au  genre  de  l'abeille  en  français. 

P.  Si,  l.  22.  j\_y>\     signifie    proprement   vis'itatîo  ,    visitatîonis 

hcus ,  ifc.  Le  mot-à-mot  est  donc  :  la  visite  entre  nous  a  été  éloignée. 

P.  S2,  l.  j>.  On  voit  que  l'auteur  joue  sur  les  mots  (^y^  et 
(^j  O^  ,  qui  se  prononcent  absolument  de  la  même  manière ,  à 
cause  de  la  pause  [  t_^j  ]. 

P.  Sz,  h  7.  Les  mots  ^Lv  ^J^  LojJ^  (j  ^^  signifient  à  k 
lettre:  delout,  sur  jned ,  pour  servir. 

P.  S2,  /.  ^2.  Les  mots  ^I^U  Awt  j^  [^^^^^-^  Oj<^-H 
sont  du  Coran,  LXI ,  S,  édition  de  Hinckelmann.  On  trouve  une 
allusion  à  ce  passage  du  Coran  dans  les  beaux  vers  qu'Ahmed 
ben-Arabschah  place  dans  son  Histoire  de  Timur,  au  sujet  de  la 
mort  de  ce  prince ,  /.  //,  p.  4^8  de  l'édit.  de  Manger. 

ALLÉG.    XXVII.    LE   PAPILLON. 

P.  8^,1.  ç.  Le  mot  (j^'L^  répond  au  mot  persan  '*^lj/^  •  On 
peut  voir  dans  l'extrait  de  Cazvi^ini ,  donné  par  M.  de  Chézy  , 
Chrestomat.  arah.  t.  I,  jj2  et  jjj ,  et  t.  III ,  p.  4^0 ,  comment 
les  naturalistes  arabes  expliquent  la  sorte  de  manie  que  le  pa- 
pillon  a  de  traverser  la  flamme  de  la  bouc/ie. 

P,  8j,  /.  16.  L'auteur ,  par  les  mots  Ci^Us  1  fj^>^  q*  ,  fait  allusion 
au  (Jj^  ou  sentence  juridique  ou  légale  du  cadhi.  Cette  phrase 
signifie  donc  à  la  lettre  :  Qui  t'a  donné  une  décision  juridique  pour 
t' autoriser  à  me  tuer  / 

P'  84 ,  l.  26.  Au  lieu    de  o»» ,  un    manuscrit  porte  >^'  . 
Cette  leçon  est  peut-être  préférable.  Alors  il  faut  traduire:  mais 
je  ne  croyais  pas  que  la   cruelle  absence   dût   venir   interrompre  mon 
bonheur. 


(  i85) 

P.  8)  y  l.  ^.  Dans  le  ms.  A,  cette  seconde  partie  forme  une 
nouvelle  allégorie,  sous  le  titre  de /ji[>^  ^  '  Hj   •  • 
P.  8j,  l.  iS.  Jeu  de  mots  entre  ^Lj  et    ,U3 
P.  S; ,    l.  24.  Je  n'ai  pas  traduit  les  mots  o^-^   O^  O' 
Jllj  eUl  ^^1  j   Jjli   Ll^    Jl,   ^I   Jl>^l,  faute  d'en 

comprendre  le  sens.  L'auteur,  d'après  son  malheureux  usage,  a 
sacrifié  la  clarté  à  une  allitération  et  à  une  équivoque. 

Au  lieu  de  ^^^\  j  ,  le  ms.  A  porte >:S?-ÎÎ  j  .  Je  ferai  obser- 
ver que ,  dans  cette  phrase,  0*^0'  >  ^u'  »  ^^  premier  abord ,  paraît 
être  simplement  dans  le  sens  de  si,  comme  en  arabe  vulgaire, 
ne  doit  pas  être  analysé  de  cette  manière.  Le  verbe  (jo  et  le  par- 
ticipe (jlj  forment  ici  l'attribut  ou  le  prédicat,  et   (J^^ ^^ 

(jlj-'^l  est  l'inchoatif. 

Quant  au  mot  ^l§5  ,  H  est  pour  Ul  Igi  .  On  sait  que  les  mots 

l — st>  et  V — j  peuvent  se  joindre  avec  les  mots  qui  commencent 
par  un  alef,  et  perdre  alors  leur  alef.  Voyez  la  Gramm.  arah. ,  t.  I , 
p.  ^87. 

P.  86,  l  4-  Ces  deux  dernières  phrases  sont  certainement  mys- 
tiques. On  pourrait  traduire  ainsi  la  première  :  «  Heureux  celui  qui 
»  se  désaltère  dans  la  coupe  du  vin  de  l'amour  de  Dieu ,  tandis 
»  que  les  désirs  les  plus  brulans  lui  servent  d'échanson.  » 

P.  86,  L  //.  ^ — t  est  le  nom  d'action  de  ^ — * ,  rem  totam  comedit. 
W>J|  jJ^a^  équivaut  donc  à  cM=*  ^  I  jAsw 

Entre  ce  vers  et  le  suivant,  le  ms.  D  en  place  un  fort  insignifiant. 

Les  mss.  B  et  D  contiennent  ici  une  allégorie  intitulée   a ^\ 

«uuU  L  JaJUl  ,  c.-à-d.  Allégorie  des  mouchettes  et  de  la  èougie.  La  ré- 
daction de  cette  allégorie  est  toute  différente  dans  les  deux  mss. 
Dans  le  ms.  B  elle  est  beaucoup  plus  correcte  et  contient  des 
vers  qu'on  ne  lit  point  dans  le  ms.  D.  Comme  ces  additions  me 
paraissent  d'un  très-mauvais  goût ,  et  qu'elles  n'ont  été  faites  très- 


(  i86  ) 

certainement  que  par  des  copistes ,  je  ne  crois  pas  devoir  en  sur- 
charger mes  notes. 

P.  Sb ,  l.  24.  \jj^^  -^1  signifie  proprement,  je  ine  rehruleraî. 
Voilà  le  verbe  ^Le  ^  3^aj  dans  le  sens  vulgaire  de  réitération 
que  nous  exprimons  en  français  par  re  devant  le  verbe  simple  , 
refaire ,  recommencer,  fc.  M.  de  Sacy  a  déjà  fait  cette  observation 
dans  les  notes  de  la  Colombe  messagère, -p.  ^2. 

ALLÉG.    XXVIII.    LE    CORBEAU. 

P.  Sy,  L  2.  Corvus  corax,  Sonnini,  Voyage  en  Egypte,  t.  Il,  p.  2y4' 

P.  Sy,  L  8.  Le  mot  y^ù^^  signifie  des  habits  de  deuil,  c,-à-d. 
noirs.  D'après  le  principe  de  la  résignation  musulmane,  qui  in- 
terdit toute  marque  extérieure  de  douleur ,  personne  ne  porte 
actuellement  le  deuil.  Anciennement  les  Arabes  le  prenaient  et 
le  portaient  en  noir.  Le  deuil  fut  aboli  à  la  cour  ottomane  ,  sous 
le  règne  d'Ibrahim  L'^''  (  Mouradgea  d'Ohsson ,  Tabl.  de  l'Emp.  ott. 
t.  II,p.jj^  ^t 334-  >  ^t  t-  I^'^>  P'  ^H  ).  Niebuhr  ( Descript.  de  l'Arab. 
p.  j)  )  assure  qu'il  n'a  vu  chez  aucun  des  peuples  mahomé- 
tans  la  coutume  de  porter  le  deuil.  Voilà  pourquoi  notre  auteur 

dit  que  le  corbeau  porte  un  vêtement  de  deuil  ^Uail  (jo    ^ 
Quant   au  mot    ^Uc  ^  piur.  de  tN-j^    (*),   il  signifie  propre- 
ment j^'nwww;  et  avec  l'ellipse  de  <^l,  serviteurs  de  Dieu,  c'est- 
à-dire  ,  les  hommes. 

P.  8y ,  L  i4'  Le  corbeau  est  en  effet  le  plus  matineux  àts<  oi- 
seaux ,  et  sa  diligence  a   passé  en  proverbe  chez    les  Arabes. 

C'est  ainsi  qu'on  lit  dans  la  iv.'^  séance  de  Hariri  (JaS  ojt^c. 
(^\jiJ\  ^ft>Jx.|  Yj  <— iojJ'  J^Âa-wÎ  .  «  Devançant  le  corbeau, 
5>  je   me  levai  avant  que    les    chameaux  fussent  chargés  j  »  et 


(*)  Il  faut  remarquer  que  tNA£.  a  deux  pluriels,  dont  le  premier,  ^\j^  ,  s'entend 
toujours  des  serviteurs  de  Dieu  ;  et  le  second,  qui  est  ^Vo^C.  ,  signifie  «  les  c&- 
5j  clavcs  des  hommes.  »    BibUoth.  or.  au  mot  Ebad. 


(   i87   ) 

dans  la  glose,  qu'on  demanda  àBuzurjmehr  {j^^jj^  ) ,  visir  de 
CosroèsNuschirvan,  de  quelle  manière  il  était  parvenu  au  rang  qu'il 
occupait ,  et  qu'il  répondit:  «  En  me  levant  aussi  matin  que  le  cor- 
•»  beau,  étant  aussi  avide  que  le  porc,  et  aussi  caressant  que  le  chien.» 

oJdf  (^J^^LrVj  jj^jJi-  ^jà,  ^J^j  (^^j^^  j^^j^^ 

P.  Sy ,  l.  ly.  On  pourrait  traduire  aussi ,  «■  Si  tu  vois  une  société , 
5>  tu  prédis  sa  dispersion  prochaine;  »  mais  je  crois  ma  traduction 
meilleure.  On  a  déjà  vu  dans  cet  ouvrage  plusieuVs  passages  où  les 
mots  fj^  et  T^  sont  employés  dans  le  sens  que  je  leur  donne  ici. 

P.  Sy,  L  .y.  j^\B  ^  joLif  est  une  expression  proverbiale 
à  laquelle  on  donne  deux  origines  différentes.  Selon  les  uns , 
Cacher  serait  le  nom  d'un  étalon  que  des  gens  qui  avaient  des 
femelles  de  chameau  qui  ne  mettaient  bas  que  àts  petits  mâles , 
empruntèrent  dans  l'espoir  d'en  avoir  des  femelles  ;  mais  bien 
loin  de  là ,  leurs  femelles  et  les  petits  moururent.  Selon  les 
autres ,  Cacher  serait  le  nom  d'un  homme  qui  mena  ses  che- 
vaux boire  une  eau  infecte,  et  qui  les  fit  ainsi  périr.  Voici 
le  texte  de  Meïdani    (  Ji^V I  *6j^  c-jVXirs   ),  d'où  je  tire  ces 


explications:  (j-?  tX*^  [^  ^-^î^  '<^^  x}^  J^  _^V5  ^  jùUif 
qÎ   s>\^j  ^syjh^i^ij  jijo*  Jj(  joyl)  qIs^  £^'  Qi  oi^  0^3 

\S^  j^  (J,^  (Jfp-  S^-^-  (Jtvî  j^j  LoWÎ    s>\3jj  jà.1    oj»  Q^ 

P.  Sy,  L  21.  j'y^  (j.'O  joVl  signifie  à  la  lettre,  plus  vilain  que 

Jader.  Ce  proverbe  se  joint  ordinairement  à  celui-ci:  \j/>  fi^\ 

^Jr^y  pl^t^  vilain  que  Dhoèara.  Meïdani  dit  qu'Ebn-Bahar,  dans 

son  ouvrage  intitulé  îles  A'Iets  des  Araks,  raconte  qu'un  roi  des 
Arabes  désira  savoir  quel  était  le  plus  vilain  de  la  nation,  pour 
que  le  nom  de  cette  personne  passât  en  proverbe.  On  lui  indiqua 
Jader  et  Dhobara,  et  Jader  lui  fut  amené.  Le  roi  lui  fit  couper 
le  nez.  Dhobara,  qui  craignait  le  même  traitement ,  prit  la  fuite  , 


(  <88) 

et  de  la  vint  le  proverbe ,  Dhohara  a  fui  lorsque  Jader  a  eu  le  nez 
coupé.  Voici  le  texte  de  iMeïdani:  ojU^  ^a  jbVIj  ijô^  q^  ^ 
O'  C-JjaJi  ij^  c->^-^s — ^^  (l?'*J^^   «»jU^  j  j^^  (jjj  ^j 

p.  SS ,  l.  6.  Le  mot  -^'j  [vaez]  signifie  prédicateur  :  je  n'ai  pas 
cru  devoir  employer  un  mot  dont  nous  ne  nous  servons  que  pour 
désigner  les  ecclésiastiques  qui  prêchent  dans  nos  chaires. 

P.  88,  l.  II.  L'auteur  parle  apparemment  du  regret  qu^eut  Adam 
d'avoir  mangé  du  fruit  défendu. 

P.  88, 1. 12.  Je  pensais  que  l'auteur  a  voulu  parler  des  discours  de 
Noé  avant  de  construire  l'arche,  et  dont  le  Coran  (  XI ,  ly  et  s.)  fait 
mention  ;  mais  il  est  probable  qu'il  fait  simplement  allusion  aux 
larmes  et  aux  gémissemens  de  ce  patriarche ,  sur  les  iniquités  et  la 
corruption  générale  des  hommes.  J'aurais  donc  mieux  fait  de  traduire 

littéralement  le  mot  -,  J  •  Les  Orientaux  disent  que  Noé  futd'a- 
bord  appelé  Sikenn ,  pour  indiquer  qu'en  sa  personne  se  concen- 
traient la  génération  passée  et  la  génération  future;  mais  qu'il  eut 

ensuite  le  nom  de  ^^  (  de  la  racine  ^U  gémir)  à  cause  de  ses 
lamentations.  Voyez  Mouradgea  d'Ohsson ,  Tahî.  de  l'Emp.  ott. , 
t.  I ,  p.  yy  et  suiv. 

P.  88 ,  l.  //.  Les  Orientaux  racontent  que  Nemrod  fil  jeter 
Abraham  dans  une  fournaise  ,  à  cause  de  grands  démêlés  qu'il 
eut  avec  les  principaux  officiers  de  sa  cour  ,  touchant  l'unité 
de  Dieu  qu'il  voulait  leur  prêcher;  mais  qu'il  sortit  néanmoins 
sain  et  sauf  de  cette  fournaise.  Voyez  la  Bihl,  or.  au  mot  Ahraham^ 

P.  88 ,  l.  ly.  Voyez,  au  sujet  d'Ismacl,  les  notes  sur  la  lavande.;:; ,  /  (i 


p.  SS ,  l.  2j.  .>^y-^  est  au  lieu  de   I  vy-x.  ,  à  cause  de  la  rime. 
P.  S^,  l.  10.  (3-^  si^ific   proprement  nppcicr  à  hiiute  voix  sans 

se  faire  voir  [  <»-û^  ,J,^,    ij  o^    *û^  q^  l^^^]  ;  et  dans  le 
langage  mystique  ,  inspirer .  &€. 

P.  S^,  l.  ij.  Les  mots  J^  ^ytVÎ  pl^  J^  sont  du  Coran  , 
JV .  79' 

P.Sp,  I.  ij.  Le  ms.  A  est  le  seul  qui  porte  cette  phrase,  et 
on  y  lit  j*.wJwJ'  qui  est  la  manière  vulgaire  de  prononcer 
Xv.4;i;X..w-)  que  j'ai  rétabli. 

Les  Arabes  disent  en  proverbe  cj'j«Ji  ^^  A^\  ,  ylus  sinistre 
que  le  corhau.  Mcïdani  donne  ,  au  sujet  de  ce  proverbe  ,  des  dé- 
tails curieux  que  leur  longueur  m  empéciie  de  placer  ici. 

Les  anciens  tiraient  des  présages  du  corbeau  ,  comme  le  prouvent 
ces  vers  de  Phèdre  { 111  ^  fSJ.où  Junon  fait  cette  réponse  au 
paon  ,  qui  vient  se  plaindre  de  sa  voix  ; 

Fntorum  nrbitrio  partes  sunt  votis  data:  : 
Tihi  forma  ,  vires  aquiliz  ,  luscinio  melos , 
Augurium  conv ,   lava  cornici  omina. 

Et  peut-être  même    considéraient -ils ,  ainsi  que  les  Arabes,    (c 
croassement  du  corbeau  comme  un  signe  de  mauvais  augure  : 

Tristia  nam  crocitans  scmper  vomit   omina  corvus. 

P.  S^,  /.  20.  (jJj^\  >jL.  jv»  signifie  à  la  lettre:  (ù  tous  les 
côtes  ou  des  autres  cotés. 

P.  Sp ,  l.  26.  Voici  quelques  vers  de  Kaschefi,  Anvari  Soheili, 
p.  yj ,  recto  et  verso ,  qui  roulent  sur  l'idée  qui  est  exprimée  ici: 


(   190  ) 

/à>—^ — > 

«  Mon  ami ,  n'étends  pas  la  main  du  désir  sur  Ja  table  de  ce 
5>  monde  :  les  mets  délicieux  qui  la  couvrent  sont  empoisonnés. 

»  N'espère  point  que  ce  monde  te  donne  jamais  un  sorbet  de 
•>y  miel  :  le  miel  qu'il  offre  est  mêlé  avec  du  poison.  Séduit  par  les 
»  apparences ,  tu  crois  que  c'est  véritablement  du  miel  ;  mais  non , 
»  c'est  la  coupe  de  la  mort.  » 

P.  oo ,  L  j?.  On  lit  également  dans  la  XLVIlI.e  séance  de  Hariri  : 
Cib'tV"^  ^  C^UjO^j  c  (JjÔ-s-  (JoJÎ    û  C^OwC  (Jtvî  C^Uwf  qÎj 

P.  po,  l.  JJ.  M.  de  Sacy  conjecture  que  ^i  ï^y^  i  O^J 
^J  ^\Xi  est  un  proverbe. 

P.  00,  l.   22.  Le  mot  khathih  (    i-vJais».  )  signifie  proprement, 
«  celui  qui  fait  la  khoMa  (  ï-j^xl^  ) ,  ou  le  prône.  »  Ce  mot  s'em- 
ploie aussi  pour  désigner  celui  qui  tient,  dans  les  mosquées,  la  place 
que  les  curés  tiennent  dans  nos  paroisses.  Voyez  d'Herbelot ,  au  * 
mot  Khathih. 

P.  po,  l.  24.  Comme  les  khathibs  représentent  le  prince ,  ils  doi- 
vent porter  nécessairement  la  couleur  de  la  maison  régnante  :  or, 
on  sait  que  la  couleur  des  Abbassides  était  le  noir.  Voilà  pourquoi 
l'auteur  dit  qu'il  n'y  a  rien  d'étonnant  que  des  khathibs  soient 
vêtus  de  noir. 

P.  pi ,  L  7.  On  ne  lit  le  vers  J^Li  ^  l^  ,  &c.  que  dans  le  ma- 
nuscrit A.  Le  ms.B  ne  donne  que  deux  vers.  Le  ms.  c,  qui  n'en 
donne  que  neuf ,  remplace  celui-ci  par  un  autre.  Enfin  ,  le  ms.  D 


(  '«)'  ) 

en  porte  douze  ,  comme  le  ms.  A  ;  mais  il  remplace  ce  vcrf;  par 
celui  cju'on  lit  dans  le  ms.  c  ,  et  que  voici  : 

^    J  ci    i^"  exil  o^Jj       L^f^^\  ^  ^^^^'^  J  J^3 
"  Si  tu  soufflais  sur  du  feu ,  il  jetterait  des  Hammcs  ;  mais  tu  souffles 
»  sur  de  la  cendre.  » 

P pi  ,  /,  S.  Les  mots  ^^j  ^-^  f-'j  o^  (*^^  signifient,  à 
la  lettre,  «  combien  d'allans  et  de  venans  sur  fa  terre,  au  matin 
>»  et  au  soir,  qui   &c.  » 

ALLÉG.    XXIX.    LA    HUPPE. 

P.  pr ,  1.12.  Uptipa  fyj^y;^  de  Linnée.  Voyez  Sonnini,  l'pyagc  eu 
Egyfte,  t.  J ,  p.  j4-  et  suiv.  et ,  voyez  la  figure  du  û^ù^  dans 
Ouscley,  Oricntiil  Collcciions ,  t.  II ,  y.  ipy.  La  Iiuppe  joue  un  très- 
grand  rôle  dans  les  poésies  mystiques. 

P.  p2  ,  l.  /.  ^Lo|  ne  se  trouve  pas  dans  les  dictionnaires;  mais 

on  trouve  dans  Meninski    l'j^i ,  qui  est  son  singulier,  rendu  par 

signum  [  ioo>jlc  ]. 

P.  p^  ,  I.  14.  Le  mot  (jU^jL^N-j  est ,  selon  l'ouvrage  sur 
l'Egypte,  Etat  moderne,  t.  I ,  p.  221 ,  un  hôpital  pour  les  fous,  les 
vieillards  et  les  malades  indigens.  Le  iSj^^  C^Uib^  |e  rend  par 
«ùU.  jUu  ,  cl  par  liuJf  jÎ3  ;  (  jÎ3  e.U-)jt  àj=,  i^\j^  jU-J 
yj2>,^  La-ijf  ).Ce  mot  est  persan;  il  est  forme  de  jm\j,  malade  ^ 
et  de  (j»-^^  ,  terminaison  qui  désigne  un  lieu  avec  idée  de  multi- 
tude de  lax-hose.On  dit  dans  le  même  %ci\Sy  «OUa.  jU\J' ,  en  turc. 

P- p^,  l.  //.  Le  mot  '^j^J^  signifie  proprement  huteille.  De  là, 
on  l'emploie  pour  exprimer  le  vase  de  verre  dans  lequel  on  met 
l'urine  du  malade ,  pour  la  montrer  au  médecin  ;  car  les  méde- 
cins arabes  font  toujours  l'inspection  des  urines,  où  ils  cherchent 
des  signes  diagnostiques. 

Le  mot  '^Jjj*^  se  trouve  plusieurs  fois,  en  ce  sens,  dans  le 
Schahnamch  (  poème  qui  contient  l'histoire  des  rois  de  Perse  ,  en 


(  192  ) 

soixante  mille  vers  )  de  Ferdousi.  Je  dois  cette  dernière  remarque 
à  M.  Auguste  Schroner ,  Prussien  ,  dont  les  muses  orientales  pleu- 
rent la  perte  récente.  Ce  jeune  orientaliste ,  après  avoir  lu  en  entier 
le  Schahnnmèh ,  la  plume  à  la  main  ,  en  avait  fait  un  extrait,  ac- 
compagné d'une  traduction  latine  et  de  notes  philologiques ,  qui 
devait  servir  de  spccimcn  du  grand  travail  qu'il  préparait  sur  cet 
ouvrage.  Il  est  à  désirer  que  ce  spccimcn ,  auquel  l'auteur  avait  mis 
la  dernière  main ,  soit  livré  à  l'impression. 

Ce  savant  et  vertueux  jeune  homme  passait  les  jours  et  les  nuits 
sur  l'arabe,  le  persan,  le  turc,  l'arménien  et  le  sanscrit,  sans 
qu'aucun  plaisir  vînt  un  seul  instant  faire  diversion  à  ^t^  travaux. 
Cette  assiduité  constante  et  les  dispositions  extraordinaires  qu'il  avait 
reçues  de  la  nature ,  laissent  concevoir  facilement  ce  qu'il  aurait 
été  un  jour.  C'est  sur-tout  dans  le  sanscrit,  cette  langue  si  difficile  et 
pour  laquelle  on  a  si  peu  de  secours  (*) ,  qu'il  avait  fait  des  progrès 
surprenans.Son  professeur,  M.  deChézy,  qui  enseigne  cette  belle 
langue  avec  tant  de  succès ,  m'en  témoigna  plusieurs  fois  son  éton- 
nement.  Mais,  hélas!  à  peine  y  avait-il  trois  mois  que  M.  Schroner 
était  à  Paris ,  qu'une  fièvre  nerveuse,  produite  par  une  application 
excessive,  l'enleva  aux  lettres  et  à  ^t^  amis. 

Affecté  douloureusement  de  la  perte  d'un  condisciple  dont  une 
conformité  de  goûts  m'avait  fait  un  ami ,  j'ai  cru  pouvoir  saisir 
cette  occasion  pour  jeter  quelques  fleurs  sur  sa  tombe. 

P.pj >  l.  ip.  On  a  imprimé  .l?^j  ,  qui  est  la  leçon  du  ms.  A,  que 
j'ai  ordinairement  suivi  ;  mais  je  pense  qu'il  faut  lire  avec  les  mss. 
B  et  D ,    1^-^  ,  pulsus  artcriœ. 

P.ç^,  l.  2/,  AjJ  et  <Jfy^  sont  deux  adverbes,  dont  le  premier 
signifie  proprement, /^^tt^-^/r^,  pourvoir  si ,  et  dont  le  second  in- 
dique une  chose  future.  Hariri  a  dit  aussi  :  (J^j  (J«^  (J'^'j' 
à  la  lettre ,  «  Je  me  traitais  avec  les  mots,  il  peut  se  faire  que,  et 
■>■>  peut-être.  »  (Séance  U.^ ) 


(*)  Le  Dictionnaire  Sanscrit-anglais  de  Wilson  n'a  paru  qu'après  la  mort  de  M. 
Schroner. 


(   '93  ) 

P.  p4,    I.  y.    On    croit  que  l'arbre    nomme  pnr    les   Arabes 

J>-^  est  le  Phyllnnthus  EmHiùi  de  Linnce  { Aljroi-alanus  Emblicn 

Rumpli.  EmUkii  offîdna/is,  Gaert.  Nux  EmHicap^cinnr.).  Cet  arbre 
a  un  fruit  de  la  grosseur  d'une  cerise ,  qui  est  charnu  :  c'est  une 
capsule  à  trois  coques,  comme  celle  de  la  plupart  des  cuphorbia- 
cées.  Le  Ph^lLinthtis  Einhltca  croît  dans  l'Inde ,  particulièrement 
au  Malabar.  On  apporte  communément  les  scgmens  de  la  pulpe 
desséchée  ,  que  l'on  employait  autrefois  comme  l'on  emploie  au- 
jourd'hui le  séné  et  le  tamarin. 

Il  y  a  trois  espèces  de  myrobalan  dont  les  fruits  se  trouvent 
dans  le  commerce  :  le  AJjrol'dlanus  ChchuLi  de  Gaertn.  Lam. 
{Termirhilid  Chchi/n  fV/ïWd.J  ;  le  A[}r.  Bcl/irica,  Go-cnn.  Brcyn 
(  Tani  Rhccd.  Malab.),  et  le  Aljr.  citrinn ,  Gaertn.  Tous  les  trois 
sont  originïiires  des  Indes  orientales. 

\'oici  ce  qu'on  lit  dansSprcngel  (  Reihcrb.  H'ist.  t.  I ,  p.  262  ) ^ 
sur  l'arbre  qui  nous  occupe:  «  Terminalia  Chchula  -i^fyV  Avic.  i44* 
n  AJterum  nomen  r^^y^  ,  non  huic  soli  speciei,  sed  et  Phyllantho 
^>  Emèlica  et  ipsi  Alcliœ  Azcdarach  [  o^j-^  "^'j  J  convenit  :  hinc 
i.  vagiim  est.  Sed  distinxerunt  cum  Avicennà  Arabes  ferc  omnes 
»  citrinum  fructum  à  kebalensi  ,  subnigro  hoc  et  subrubro.  Esse 
>'  autem  utrumquc  cjusdem  arboris;  primam  enim  messim  iilum, 
M  secundam  hune  largiri.  Consucrunt  medio  aevo  quinque  species 
•>  numerare  ,  ad  versum  illum  : 

»  AJyrohalanorum  species  sunt  (juinquc  honorum  : 
^'Citrbius,  Chehlus,   Delliricus ,  Ejnhlkus  ^  Indus. 

(  Ahis.  Brasav.  exiim.  simpl.p.  222.  ) 

»  \'ox  hhalcusis,  quac  à  Latino-barbaris  in  Belliricos  kehli  mu- 
t.  tata  luit,  originem  habet  ab  urbe  Kabol  in  Zablestan,  non 
..  quùd  ibi  proveni.mt,  sed  quùd  mercatores  eu  déférant  (  Ahlfcd. 
r>  Biisc/iings  A fdg.  j,  ^j 2  J.  Ab  c'ddcm  arbore  varios  hos  fructus 
>'  venire,  Adiinsonius  etiam  nuperis  tcmporibus  testatus  est  (  Eeim. 
•  des  plantes ,  2,  44/ J-  Qui  myrobalanorum  species  illustrarunt, 

N 


(  194) 

»  Garcias  et  Costa,  in  solo  ferè  Phyllantho  substiterunt.  Termina- 
î'  liiim  nostram  nemo  ante  Kœnigium  (  Retz,  oherv,  S ,  p  )  cog- 
î>  novit.  In  Caiicut  et  Cananor  praecipuè  invenit  myrobalanos 
"  tebalenses  Odoard.  Barkssa  ( Ramiisio ,  i ,  ^j'p.  a  ).  Gaertnerus 
'>  ( deFruct.  etScm.  2  ,  go,  ^i )  optimè  kebulos  et  citrinos  myro- 
5j  balanos  ad  eamdem  speciem  pertinere,  beliiricos  autem  specie 
'>  differre.  Cf.  Antiquit.   ht.  100.  » 

II  est  (juestion  du  ^Ay^  dans  le  Catéchisme  des  Druses.  Voici 

ce  (ju'on  y  lit  (  Adier ,  Aluseum  cujicum  Borgianum,  p.  i2y  )  :  >  t>— ^ 

_j_à.lj  ^!iKLÎi  £0' — Jj  c_>i — lai^  C'y  ^  dijAJ   (jl  (•)  '^^^^sa^r 

qI — w— ^Vf  «vJ  Jj     .<  Vj  Llo   (JjXj  sXs    I jJÛb  o^.  L    (jlj 

«  Cognoscimus  eos  (  fratres  nostros  fidèles  peregrinos  )  ex  con- 
5>  suetudine ,  ex  exordio  sermonis ,  et  ex  fine  salutationis,  Nobis 
"  enim  interrogantibus  ,  Seminant-ne ,  amice,  in  urbe  tua  (***) ,  semen 

■»  Halalig  (pi.  tS  sfJ^fï^  J-  si  respondet ,  Scminatum  est  in  corde  jide- 

î> //«m,  noster  est,  nec  peregrinus  habendus,  sed  honore  perci- 
5>  piendus.  Quod  si  aliter  respondet,  alienus  est  à  nobis,  nec  ho- 
5>  nore  dignus.  » 

Serait-ce  le  Hedj'sarum  Alhagi  de  Linnée  (  Rauwolff,  Descr.  It.  ) 
dont  il  est  parlé  dans  ce  catéchisme,  qui ,  comme   l'esparceîte 


(*)  Pour  XjjSZ^  ,  quatrième  forme, 

(**)  On  a  imprimé,  par  erreur  typographique,   avjLmVi   ;  j'ai  rétabli  la  vraie 
leçon.  I 

(***)  Il  fallait  traduire ,  h  regione  tuâ ,   ^>Ju  ,  plur.  de  jju  ville  ,  signifiant 
K  une  réunion  de  \iilcs  »,  et,  par  suite,  un  pays. 


(  >9''  ) 

f  î^edysitrum  Onohrychh  ],  donne  un  excellent  pâturage,  et  qui  est 
originaire  de  ia  Tartarie,  de  la  Syrie,  de  la  Perse  et  de  la  Mé- 
sopotamie î 

Il  est  en  effet  difficile  de  croire  que  s'il  avait  été  ici  question  d'un 
arbre,  on  se  fût  servi  de  l'expression  -liJ^X^i   e>2w  (j^j^ 

P.  pi,  1.4-  Lî*  plante  nommée  »3^^^  est  le  Convoluulus  Saim- 
moniadc  Linnée.  La  scammonée  est  un  suc  concret,  résineux  , 
gommeux  et  très-purgatif.  On  en  trouve  de  deux  sortes  dans  le 
commerce,  celle  d'Alep  et  celle  de  Smyrne  ;  mais  la  meilleure 
vient  de  Marasch,  ville  à  quatre  journées  d'Alep,  près  des  fron- 
tières de  l'Arménie.  On  l'apporte,  dans  de  petits  sacs  de  peau,  à 
Alep,  d'où  les  marchands  l'envoient  à  Londres  et  à  Marseille. 
On  la  tirait  autrefois  du  mont  Carmel  par  la  voie  d'Acre;  rqais 
il  n'en  vient  plus  aujourd'hui.  N'oyez  Hasselquist  ,  Voyages  cLins 
le  Lci'iint ,   t.  Il,  p.  pp. 

P.  p4 '  ^'  /♦   Le^^Ucx.  est  le  Rhamnus  7.izyphus  de  Linnée. 

P.p4,l.).  On  donne,  dans  le  commerce,  le  nom  de  sékstcs 
aux  fruits  du  Cardia  Afyxa  de  Linnée. 

Le  Conù'a  Afjxa  croît  dans  les  Indes .  au  Malabar  et  en  Egypte. 
Ses  fruits,  macérés  dans  le  sel  et  le  vinaigre,  se  mangent  dans 
rinde.  Les  Egyptiens  se  servent  du  mucilage  tiré  de  la  pulpe 
pour  toutes  les  humeurs  squirreuses ,  et  avec  du  sucre  candi  et 
de  ia  poudre  de  réglisse  pour  se  guérir  de  la  toux.  Voyez  /a 
Relation  de  l'Eg.  d'Abd  Allatif ,  trad.  par  M.  de  Sacy,  p.  yi ,  yi, 
et  y  66, 

P.  p4'  ^'  ^'  Ee  _y:^^^  jY^  ,  ou^>^  que  l'on  écrit  aussi  ^K-^ 
est  la  Cassia  Fistula  de  Linnée,  suivant  Sprengcl ,  Rei herfaria  His. 
toria ,  t.  I ,  p.  260.  L'arbre  qui  porte  la  csasse  ou  cassier,  a  quelque 
ressemblance  cvec  le  noyer.  Il  croît  en  Afrique,  en  Eg)pte, 
dans  le  Levant  et  dans  tous  les  pays  chauds  des  Indes  orientales. 
Voyez  Hasselquist,   Voyages  dans  le  Levant,  t.  II ,  p.  p^. 

Il  est  bon  d'observer  que  l'auteur  ne  fait  pas  ici  allusion,  comme 

N  2 


(  <9G) 

on  pourrait  ie  croire,  à  cette  sorte  de  langue  de  convention 
des  Turcs ,  où  l'on  emploie  des  fleurs  pour  exprimer  ses  pen- 
sées. Au  reste ,  je  renvoie  ceux  qui  désireront  connaître  ce  lan- 
gage mystérieux,  au  Secrétaire  turc  de  du  Vigneau,  à  ia  XL.*^ 
Jettre  de  miiady  Montagu,  et  à  une  dissertation  de  M.  de  Ham- 
mer,  insérée  dans  les  Alines  de  l' Orient ,  t.  I,  p.  ^2   et  suiv. 

P.  p4 >  ^-  p-  Quoiqu'on  traduise  souvent  Jhj^  et  (J-jî^^  par 
les  mêmes  mots ,  il  n'y  a  pas  moins  une  grande  différence  entre 
ces  deux  termes  :  le  premier  signifie  crihle  et  le  second  tamis.  De 
^L  1^  \ienl crihum ,  et  de  ce  mot,  crièle. 

P.p4>  i-  ij-  On  a  déjà  vu  une  expression  à-peu-près  semblable 
dans  l'allégorie  de  la  chauve-souris ,  et  j'ai  traduit,  comme  ici  : 
«<  à  l'însu  du  rival  jaloux.  »  Je  crois  cependant  qu'on  pourrait  tra- 
duire aussi  bien  et  peut-être  mieux  par  :  «  sans  témoins.  » 

P.p4>  ^-  ^7'  Tout  ce  qui  précède  fait  partie  de  l'allégorie  du 
corbeau,  dans  le  ms.  D  ,  et  la  rédaction  en  est  beaucoup  plus 
longue  que  dans  les  autres  mss.  A  la  fin  de  la  prose ,  on  lit  ces 
vers  ; 


C_)>k-A_A- 


(   >07  ) 


f^lj   3,L=.    L^\'^\    l^f 

"  Entre  les  tertres  de  Jaza  et  h  vallcc  de  Kathib  ,  j'ai  vu  les 
»  traits  adorés  de  ma  bien-aimée.  Les  coupes  ont  fait  la  ronde  , 
»  et,  heureux  dans  mon  amour,  j'ar  goûte  le  plus  doux  plaisir 
»  et  la  volupté  la  plus  pure.  O  toi  ,  qui  me  fais  de  cruels  re- 
»  proches  ,  si  tu  eusses  ressenti  les  délices  que  j'ai  éprouvées ,  tu 
»  aurais  joui ,  je  te  l'assure ,  du  bonheur  le  plus  parfait.  J'ai  vu 
»  la  face  de  la  divinité  qui  m'est  apparue  ,  et  mon  amour  s'est 
>»  comme  plongé  dans  sa  beauté  extraordinaire.  Tons  ceux  qui 
»  tont  de  cette  maîtresse  ,  dont  la  beauté  est  incomparable,  l'objet 
»  de  leurs  vœux  ,  ne  sont  point  frustrés  dans  leur  espoir.  L'excès 
»  de  mon  amour  pour  elle  jette  mon  esprit  égaré  dans  la  mélan- 
»  colie  ia  plus  profonde  ;  mais  vient-elle  me  visiter  ,  voici ,  me 
»  dis-je  ,  un  secours  de  la  part  de  Dieu  ,  et  une  victoire  est 
>»  proche.   »  (  Ces  derniers  mots  sont  du  Coran,  LXIy  ij.) 

P.  pj,  /.  7,  Les  mots  ^*^'  J^^  '«^^j  i^^j^  c-> t-^  '«>^  son 
du  Coran  ^  XXXV ,  ij,   édit.  de   Hinck. 

P'PS ,  i  24.  Les  mots  ijy    û  ^   U  ,  jusqu'à  {J:^  ,  sont  du  Cor, 

XXVII  y  20.  Les   mots  qui  sont  plus  bas  «^  \i-j^  t   l — tf;  oii::».! 

et  ItX*  ^LX-XJ  t_>^3i  sont  pris  de  la  même  surate,  v.  12  et  28, 
Il  y  a  plusieurs  autres  phrases  dans  cette  allégorie  qui  contiennent 
des   allusions  à  des  passages  du   Coran.  On  peut    lire  des  détails 

curieux  sur  l'histoire  de  la  huppe  de  Salomon  dans  Beidhawi  j'jJI 

^LjUf  ^[>*-îj  ,]^.y^\  ATs.  ar.  de  la  Bitlioth.  du  Roi ,  »."   2;2. 

P.pô ,  l.  4-  Selon  les  Musulmans ,  qui  ont  emprunté  cette  fable 
aux  Juifs,  comme  beaucoup  d'autres,  la  huppe  était  la  messa- 
gère dont  se  servaient,  pour  s'écrire  mutuellement,  Salomon  et 

la  reine  de    Saba  Dalkis    ^jm-oJj    Comme  il  est    asicz   curieux 

N3 


(  198  ) 

de  chercher  l'origine  de  ce  nom,  je  pense  que  le  lecteur  me 
saura  gré  de  lui  communiquer  la  note  suivante  de  M.  le  Baron 
de  Sacy,  qui  m'a  permis  d'en  enrichir  mon  ouvrage. 

Joshiphe  f  Ânt.  jud.  I.  S,  ch.  VI,  t.  I,p.  43^-)  prétend  que 
cette  reine,  qui  régnait  en  même  temps  sur  l'Egypte  et  l'Ethio- 
pie ,  se  nommait  Nicaule  ou  plutôt  Nicaulis ,  si  on  lit  dans  son 
texte  N/XûifX/v  avec  plusieurs  mss.  ,  au  lieu  de  NixafAnK  ;  et  il 
attribue  à  cette  reine  ce  qu'Hérodote  dit  de  Nitocris.  Dans  le 
Youchasin  (f.°  ijé.  Caimet,  ///  ,  Rois,  ch.  X ,  v.  i )  elle  est  nom- 
mée Nicaula  ;  d'autres  l'appellent  Nicanta  (  Ludolf.  Comm.  in 
hist.  y€.tk.  -p.  2^1  ).  L'auteur  du  Modjmel  altewarikh ,  parlant  des 
fables  persanes  sur  l'origine  des  hommes  ,  dit  que  Hamza  Isfahani 
les  compare  aux  fables  arabes  de  Lokman  fils  à'Ad,  et  aux  fables 

juives  concernant  Og  et  Beloukaya.  De  D^'^lpJ  (^j»-Jyij  ),  qu'on 

aura  confondu  avec  D''7lp3  ,  les  Arabes  ont  fait  ^J*'*^?^^.  Ce  nom 
n'est  point  dans  le  Coran.  Il  est  même  vraisemblable  que  les  Juifs 

en  avaient  fait  D\"5"I73  ou  Î*<"'pib3 . 

P.  p6,  l.  iS.  o^j'  est  le  passif  de  la  huitième  forme  de  ^>*f, 

P.pô,  l,  -2/.    fr*— "  fait  allusion  à  la  huppe  que  le  ;;jbjj&  porte 
sur  la  tête  ,  et  qu'il  élève  et  abaisse  à  volonté. 

P.  py,  L  2.  Allusion  aux  versets  abrogeans  et  abrogés  du  Coran. 

P.  py,  î.  i4'  Le  mot  mirage  a  été  adopté  par   les  voyageurs 

pour  désigner  ce  que  les  Arabes  et  les  Persans  nomment  C-Jtj-^. 

On  entend  par-là  l'effet  que  produit  une  réfraction  extraordi- 
naire que  subissent  des  rayons  du  soleil ,  lorsque  des  couches 
d'air  de  densités  différentes  se  trouvent  superposées  les  unes  aux 
autres;  ce  qui  a  l'apparence  d'un  étang.  Voyez,  sur  ce  phéno- 
mène d'optique,  un  savant  mémoire  de  Monge,  dans  l'ouvrage 
sur  l'Egypte,  t.  I ,  p.  64  à  y  p. 

Le  synonyme  de  of^-^  est  %■ — <^J  ,  dont  on  trouve  le  pluriel 

^>X*  dans  la  xx.^  séance  de  Hariri. 

P.  py,  l.  j4*  Je  crois  qu'il  est  plus  naturel  de  firec^U^  pi.  de 


(  «99  ) 

iL-Ajlb  «r/«/i:,  que  (_jXa^  plur.  de  c-x^  licntii  ;  mais  comme 
ces  deux  le(;^ons  sont  également  admissibles,  je  saisirai  cette  occa- 
sion pour  donner  quelques  détails  sur  le  reptile  nommé  c_x^. 

Le  CrocpJilus  terrestris  des  auteurs  est  un  Sauvegarda  ou  Alonttory 
tantôt  le  AîcnitorAw.  Nil  (  Lacerta  Nilotka  ,  Linn.  )  ou  Jjj  Ouaral 
des  Arabes,  que  le  peuple  croit  être  un  jeune  crocodile  éclos  en  ter- 
rarn  sec;  tantôt,  et  plus  souvent,  le  A'ionitor  terrestris  d'Eg.  (Cuvicr, 

Règne  animal ,  t.  I,  p.  2j)  ou  J^j^'  Oj^  Ouaral-d-ard  des  Arabes. 

Ce  dernier  est  l'animal  employé  à  faire  àç.s  tours  au  Caire  ;  c'est 
aussi  l'animal  que  les  anciens  appelaient  Scincus ,  et  à  qui  ils  attri- 
buaient des  vertus  aphrodisiaques.  Comme  ,  dans  le  moyen  âge 
(  Cuvier,  Règne  animal,  t.  //,/;.//),  on  a  substitué  au  Sauve- 
garde ou  Crocodilus  terrestris  un  autre  lézard  plus  petit ,  le  Lacerta 

Scincus  de  Linnée  (*Ui«Jl  El-adda  des  Arabes),  il  est  arrivé  que 
îe  nom  de  Scincus  a  passé  à  un  genre  de  lézards  à  pieds  très- 
courts,   voisins  des  Seps, 

Le  mot  arabe  <_>^  est  très-remarquable.  Seps ,  chez  les  Grecs , 
signifie  ««  un  lézard  à  trois  doigts  de  la  Grèce  f  Lacerta  Chalcides , 
Linn.^  »  Les  zoologistes  ont  conservé  ce  genre  Seps  et  le  placent 
près  du  Scincus.  On  fait  venir  communément  îe  mot  Sqn  de 
GVt-miv,  corrompre.  Le  scholîaste  de  Nicandre  en  donne  cette  étymo- 
Jogie  (  'T^f^  To  ayîmiY  ']«$"  7r^YiyiVTa.ç  )  :  mais  les  Grecs  ,  comme 
bien  d'autres  peuples  ,  aimaient  à  chercher  dans  leur  propre 
langue  l'étymologie  des  mots  dont  ils  se  servaient  ,  toutes  les 
fois  qu'ils  pouvaient  être  ramenés  à  une  racine.  Les  espèces  de 
Seps  étant  communes  dans  TOrient,  il  est  bien  plus  probable 
que    les  Grecs    auront  pris   ce  nom    d'une    langue  sémitique. 

Il  dérive  ,  en  elTet  ,  de  la  racine  arabe  ,^j^  ,  hœsit  in  terra , 
ei  appactus  fuit. 

Richardson  dit  que  le  4_v-b  est  bon  à  manger  et  est  recherché 
pour  le  goût  de  sa  chair.  En  Amérique  ,  on  recherche  la  chair  du 
Lacerta  Iguana,  Le  savaut  voyageur  M.    de  Humboldt  s'en  est 

N4 


(    200    ) 

5ouvent  nourri.  li  est  certam  que  ,  dans  l'Eg)'pte,  on  a,  de  toirt 
temps ,  mangé  comme  stimulant  (  mais  seulement  en  petites 
doses)  le  Ouaral  et  le  Scincus ,  qui  est  voisin  des  Seps  des  zoolo- 
gistes modernes.  Il  serait  donc  probable  que  le  ;_).^des  Arabes  se 
trouvât  ou  dans  les  Scincdides  de  M.  Cuvier ,  ou  dans  les  Sau- 
vegardes (Crocodilus  terrcstris  ou  Scincus  des  anciens^. 

P.  py,  1. 16.  Le  ms.  B  omet  ces  vers ,  et  contient  à  la  place 
une  sorte  d'introduction  aux  allégories  des  quadrupèdes  ;  le  ms.  C 
donne  trois  vers  différens  ;  enfin  le  ms.  D  en  donne  aussi  trois 
autres ,  mais  tout  diiférens ,  que  voici  : 

jj — ^ — s^_J  ij^\  o_>5j 


«  On  a  choqué  les  coupes  et  on  a  savouré  la  boisson  la  plus 
•»  délicieuse.  Les  convives  ont  passé  les  momens  les  plus  agréables 
w  et  les  plus  voluptueux.  Plus  de  tristesse  causée  par  de  cruels  dé- 
»  dains;  mais  au  contraire  la  faveur  et  la  félicité.  Mon  œil  a  été 
»  enivré  du  bonheur  de  voir  ma  maîtresse  :  rien  ne  me  sépare 
»  plus  d'elle  ;  plus  de  rideau  ,  plus  de  voile.  » 

P.  py ,  /.  20.  J'ai  développé  dans  ma  traduction  la  pensée  que 

l'auteur  a,  selon  moi,  voulu  exprimer  par  les  mots  vi^-*'»  Jo  j^ 

UfcjJ'  cJ-^^  t_^;y^  On  trouve  souvent  chez  les  poètes  mystiques 

la  figure  que  je   crois  renfermée  dans   cette  phrase.  C'est  ainsi 

tjue  Hafiz  a  dit  : 


]j  j.Lv — ^ 

«  y  M  vu  dans  ma  coupe  le  reflet  des  joues  de  mon  amie 
»  (  Dieu  ).  Comment  pouvez-vous  comprendre  le  pLiisir  que  j'ai 
»  goûte ,  vous  qui  ne  connaissez  pas  ce  que  c'est  que  lu  boisson 
»  délicieuse  du  vin  (  de  l'amour  de  Dieu  )  !    » 

ALLLG.    XXX.    —    LE    CHIEN. 

P.  pS,  l.  2.  «    Les  cliiens  sont  pour  les  musulmans  des  bctes 
»  immondes  qu'ils  ne   souffrent  point  dans  leurs   maisons,  qu'ils 
»  évitent  avec  soin  et  qu'ils  n'osent  toucher  sous  peine  de  devenir 
»»  impurs.  Ils  sont  constamment  réunis  dans  les  rues,  leur  seule 
»  habitation.  Ils  n'ont  d'autre  nourriture  que  celle  qu'ils  peuvent 
»  ramasser  aux  portes  des  maisons  ou  découvrir  en  fouillant  dans 
»»  les  immondices.  Les  femelles  déposent  leurs  petits  dans  quelque 
»  coin  d'une  ruelle  écartée  ou  peu  habitée  ;  car  un  sectateur  de 
»  Mahomet  ne  les  supporterait  pas  chez  lui.  Continuellement  en 
»  butte  aux  coups  des  passans  ;    quelquefois  massacrés  sans    pitié 
"  par  une  canaille  armée;  exposés  aux  intempéries  de  l'air;   ne 
»  trouvant  qu'avec   peine   de  quoi  soutenir  une   vie   souffrante  ; 
»  maigres  ,  décharnés,  souvent  rongés  par  une  gale  qui  dégénère 
"  quelquefois  en    une  espèce   de   lèpre;  hideux   même  par   leur 
»  état  de  délabrement ,  ces  malheureux  animaux  inspirent  autant 
»  de  compassion  que  l'on  ressent  de  mépris  et  d'indignation  pour 
"les  barbares  au  milieu   desquels  ils  habitent.  Il    est  sans  doute 
»  étonnant  que  plusieurs  de  ces   chiens  ne  soient  pas  fréqucm- 
»  ment  attaqués  de  l'hydrophobie  ;  mais  cette  maladie,  rare  dans 
■»  le  nord  de  la  Turquie  ,  l'est  encore  plus  dans   la  partie  méri- 
»  dionale  de   cet  empire.    »  Sonnini ,     Voyage  en    Egypte,  t.  I , 
pag.  p2  et  suiv.  ;  et  voyez  Mouradgca  d'Ohsson  ,  7".///.  de  l'cmy. 
on.  t.  IV,  Ijf  part.  p.  joS  {  édit.  in  S.'  ),   et  Chardin,  édit.  de 
M.  Langlès,  /.    \\  V.  ^OS. 

Je  crois  devoir  citer  un  vers  de  Saadi  (Gui.  Il ,  )  )  à  l'appui 
de  ce  qu'on  vient  de  lire  . 


(    20:î    ) 

«  Si  l'on  remplissait  d'eau  de  rose  un  bassin  ,  et  qu'un  chien 
>»  vînt  à  y  tomber  ,  ii   ia  rendrait  immonde.» 

P.pS,  l.  II.  Après  les  mots  (_)l^VI  c->Lo  s^tw^  L  r  on  iît , 
dans  le  ms.  D,  le  morceau  suivant  : 

<- CjU^    ^j    CiUIft    Oj-y^    cK-1^    O'"'^   ^    J^t    ro'^îj 

4ls.j     J^    J A Uî    J     ^Uj 

è^j-J — à.  j  «Ulj  ^y  3^  L* 


<_,\LJ*L 


c^v 


CJ' 


(  'oJ  ) 


CJ 


!>^  d^jj^  z^  ^j  ur^ 


««  Ne  sais-tu  donc  pas  que  le  monde  est  une  habitation  qui 
>»  s'évanouit  et  qui  disparaît,  et  que  la  mort  doit  venir  couper 
»  pour  toujours  les  liens  de  la  parenté  et  ceux  que  forma  l'amour  î 
»  Ne  sais-tu  pas  que  bientôt  tu  seras  dans  la  poussière  ,  et  qu'au 
»  jour  où  tu  dois  rendre  compte  de  tes  actions,  tu  paraîtras  avec 
»  ton  adversaire  devant  le  souverain  juge  f  Ne  crains-tu  pas  de  re- 
»  cevoir  alors  des  reproches  et  des  réprimandes!  Tu  le  sais,  tu 
»  peux  actuellement  faire  ce  que  tu  veux:  mais  le  livre  de  tes 
«•œuvres  en  reçoit  le  détail  circonstancié.  Si  tu  es  dirigé  vers  la 
'>  vraie  religion  ,  tu  seras  dans  le  bon  chemin  ;  mais  si  Dieu  t'égarc 
»  de  la  voie  droite,  sache  qu'il  égare  qui  il  veut,  et  dirige  celui 
«  qui  se  repcnt.  Plaçons  donc  toute  notre  confiance  en  Dieu  : 
»  c'est  vers  lui  que  nous  retournerons,  et  auprès  de  lui  que 
»  notre  demeure  sera  fixée. 

VEHS. 

»  Heureux  celui  qui  cherche  un  asyle  auprès  de  cette  majesté 
»  sacrée;  qui  passe  la  nuit  à  lui  exprimer  son  amour  et  à  gémir 
»  amoureusement  ;  qui  veille  constamment  durant  les  ténèbres, 
»  dans  l'espérance  d'avoir  le  bonheur  de  soulever  le  voile  qui  lui 
M  cache  cet  objet  radieux.  Heureux  celui  que  cette  divine  amie 
>»  a  pris  en  tcte-a-téte  î  elle  lui  a  fait  des  reproches ,  mais  ces  rc- 
'>  proches  mêmes  sont  de  douces  faveurs.  Esclave  de  l'Eternel , 
»  ne  mcttros-tu  pas  fin  à  tes  injustices  î  Vois  ta  vie  qui  s'avance 


(    204   ) 

»  avec  précipitation  vers  le  terme ,  et  hâte-toi  de  demander 
»  pardon  à  ton  Seigneur,  dans  l'espérance  quMI  effacera  ce  qui 
»  est  écrit  dans  le  livre  de  tes  œuvres.  Crains  Dieu  ,  soumets- 
»  toi  à  sa  volonté  ;  car  c'est  l'équité  même.  Aie  recours  au 
'^pouvoir  de  son  Prophète  élu,  Mahomet,  qui  nous  a  dirigés 
"  dans  la  voie  droite.  Que  Dieu  lui  soit  propice,  tant  qu'un  soleii 
'>  se  lèvera  à  i'Orient ,  et  que ,  durant  le  sombre  hiver  ,  une 
>»  gelée  blanche  couvrira  les  prés!  » 


»  Si  tu  es  du  nombre  de  ceux  qui  craignent  Dieu ,  reconnais 
"  donc  la  vérité ,  suis  le  chemin  que  suivent  les  gens  du  spiri- 
»  tualisme  &c.  »  ç 

P.  ^S,  L  iS.VouY  concevoir  l'allusion  que  fait  ici  fauteur,  il 
faut  savoir  que  le  mot  ^J-^  ,  qui  signifie  pauvre  malheureux ^  ifc. 
s'emploie  plus  ordinairement  pour  désigner  celui  qui  est  pauvre 
dans  le  sens  mystique  (Maxa^/o/  0/  ^0^%-^)  r47TviviuuL*n.Mat.V,  ^.) 
c.-à-d.  «  celui  qui  est  dans  le  degré  du  spiritualisme  nommé  jA3  » 
De  là  on  appelle  les  moines  _jc^  en  arabe,  et  ^J^.jj^  en 
persan,  parce  qu'ils  renoncent  volontairement  au  monde  et  qu'ils 
embrassent  cette  sorte  de  pauvreté  volontaire  et  spirituelle.  Qu'on 
ne  soit  pas  étonné  que  j'emploie  le  mot  moine;  car  ,  quoique  Ma- 
homet ait  dit,  |D>jU«j!  ^J  'L^\j^j  j  «  H  n'y  a  pas  de  vie  mo- 
»  nastique  dans  l'islamisme  » ,  je  ferai  observer  que  le  prophète 
parle  ici  de  la  vie  monastique  chez  les  chrétiens  ,  et  non  de 
l'état  religieux  chez  les  musulmans,  où  les  moines  ne  font  point 
vœu  de  chasteté ,  mais  sont  mariés  ,  ou  peuvent  du  moins  se 
marier  lorsqu'ils  le  veulent. 

Le  mendiant  se  nomme  JLjLwen  arabe,  et  !<>-=»  en  persan. 

P.  pS ,  l.  ip.  Voyez ,  par  rapport  aux  mots  ^j^  f^^j  ies 
notes  sur  l'allégorie  de  la  perruche. 

P.  p^i  l.  2.  Je  pense  que  le  mot  o'j^  répond  au  oji-w  ^t^ 
Arabes,  qui  est  une  sorte  de  grande  bourse  de  cuir,  ronde,  et 
bordée  de  franges.  Elle  sert  à-la-fois  et  de  bissac  et  de  nappe , 


(    20-)    ) 
ou  ,  pour  mieux  dire  ,  de  table  ,  car  la  taMc  des  Orientaux  n'est 
autre  chose  cju'un  (jU^  ou  un  is^^i—'  étendu  par  terre. 

P. pç,  l.  n.  Le  mot  -^'j^l  ,  pi.  de  3j£  ,  désigne  ici  lu  bière; 
mais  il  ne  signifie  proprement  que  les  montans  et  les  traverses  :  le 
véritable  nom  de  la  bière  est  (J*-*^ 

P.  pp,  l.  2^.  Voyez,  sur  les  mots  JJ?  et  Jj'j  ou  J^j  ,  les  notes 
sur  l'allégorie  du  canard. 

P.  pp,  l.  2/.  A  la  lettre  :  «  Prends  le  pan  de  ma  robe,  et 
»  attache-toi  à  mes  cordes.  » 

P.  loo,  l.p.  La  forme  «»-' V I  se  rencontre  assez  souvent  en  poésie; 
on  la  retrouvera  encore  dans  l'allégorie  du  ver-à-soie. 
Je  me  contenterai  de  citer  Hariri,   séance  XXI: 

ALLÉG.    XXXI.    —    LE    CHAMEAU. 

P.  loi ,  /.  2.  Camelus  dromcdariiis  de  Linnée.  Voyez  dans  Son- 
nini  ,  Voyage  en  Egypte,  t.  II ,  -p.  uS,  la  distinction  du  Camelus 
Bactrianusy  à  deux  bosses  o^  ,  de  celui-ci ,  à  une  seule. 

P.  loi,  l.  S.  A  la  lettre ,  «  qui  se  décide  à  mettre  sous  son  che- 
:»  vet  &c.  »  Une  chose  à  remarquer,  c'est  que  ,  dans  le  second 

membre  de  la  phrase,  l'auteur  a  employé  le  mot  i^^<A^  embrasser , 
dans  le  même  sens  figuré  que  nous  employons  notre  mot  em- 
brasser,  et  que  les  Latins  emploient  amplecti. 

P.  loi ,  L  II.  Cette  sentence,  qui  se  trouve  dans  bien  des  au- 
teurs ,  sous  des  formes  différentes ,  se  lit  entre  autres  dans  Hariri, 

XVII.^séance:  JUVI  _>wJi->'  j   JL^Vl  lJj^j 

P.  loi,  l  i6.  Au  lieu  de  J'-^jo',  leçon  du  ms,  B ,  le  ms,  A 
porte  J  ûi  0  I ,  et  les  mss.  c  et  D  J Vis  I 

P.  loi ,  l.  21.  Les  mss.  portent  ôyj  .  On  trouve  dans  les  dic- 
tionnaires ,    à  la  racine  \j^j ,  cucinrit  inclinans  ad  uniiis  hiteris 


(    206    ) 

omis ,  et  litus  altentm  attoUens  :  îtt  jiimentum  càm  tnaquaViter  onustinn. 
Comme  cette  signification  n'est  pas  satisfaisante,  par  rapport  au 

contexte,  M.  de  Sacy  conjecture  qu'il  faut  lire  0^^  in  incursu 
vacillans  in  umimque  la  tus  came!  a. 

P.  Jo2f  l.  iS.  Nous  avons  déjà  vu  une  expression  à-peu-près 
semblable  dans  l'allégorie  du  paon  ^j«kJt\JUJI^U-bj  ^^wJl  ^Ij-i 

Ceci  fait  sans  doute  allusion  au  jeûne  rigoureux  des  derviches , 
à  qui  la  prière  sert  pour  ainsi  dire  de  nourriture  et  de  boisson. 

P.  102,  l.  20.  Les  mots  -».^Uui  J-«^j  sont  du   Cor.  XVI,  y. 

P.  10^,  l.  ).  c->j^  Jathrcb  est  l'ancien  et  véritable  nom  de 
Médine  ,  qu'on  appelle  aujourd'hui  f^.O^i  la  vilk  par  excellence  ^ 
parce  que  Mahomet  y  établit  le  siège  de  l'empire  des  musul- 
mans. On  dit  aussi  *t>jW  itÀjcvil  ou  isi^^l  ^tV»  ville  du  Pro- 
phète, à  cause  que  cette  ville  renferme  le  tombeau  de  Mahomet, 
que  les  pèlerins  visitent  ordinairement  au  retour  de  la  Mecque. 
Voyez  Rommel,  Ahulfcdœ  Arabiœ  Descripiio  ire.  p.  y 2  et  y^ ,  et  la 
Billioth.  or.   au  mot  AJedinah. 

Plusieurs  villes  d'Espagne  ont  conservé  la  dénomination  arabe 
de  Aledina:  telles  sont,  Aledina-del-Campo ,  Aledina-Sidonia,  ire.  Les 
Maltais  appellent  aussi  Aledina  l'ancienne  capitale  de  leur  île ,  la 
Civita-  Vecchia, 

P,  10 j,  l.  y.  Voici  ce  qu'on  trouve  sur  ce  jj^^^^'  (J-^'j  flans 

Rommel ,  Alulf.  Ar.  Descr.  p.  yj  :  «  Ex  vallibus ,  quae  (^c^^  '  vocan- 

î>tur,  est  Al-Akik   superior  propè  Madinah  seu  urlem  Apostoli , 

»  quâ  parte  spectat  Al-Harrah  bjSf  usque  ad  viciniam  Al-Bctki 

5)  »^^i-y  I  ,  quae  est  cœmiterium  Al-xMadinah.  Porro 

»  Al-Akik  inferior,  quae  valiis  est  infrà  priorem.  »  Et  voici  le  texte 
d'Abulf.  [Geogr.  vet.  scrijn.  Oxford,  1 7 1 2  ,  t.IJI,p.  y)  que  j'ai  corrigé 

d'après  les  observations  de  M- Rommel  :  JJjj — g — *i-^'   ^|_5^'  \J^j 
I^àJ?   *r^^jî   «vXjJ  SL,\  «^  J_y-4ilf  JI5'  j^AajJî  i^j»j\  jL>cM 


(  ^'«7  ) 

p.  foj ,  l.  ç.  Le   >'^  est  le  Struihio  camclus  de  Linn^c. 
P.  10 j,  I.  lo.   (Jj^>  est  pour   ik.[  par  licence  poétique. 

P.  10^ ,  L  i4-  Le  ms.  B  porte  dix  vers  tout  ditfcrcns;  le  ms.  <: 
en  porte  trois,  tout  ditîcrcns  aussi  ;  enfin,  le  ms.  D  porte  les  mêmes, 
mais  avec  ces  variantes  :  ie  premier  iiémistiche  du  second  ver^  est 

ainsi  :   *>^   cj   j»^-^ ^  '  (JjJ   (j'j  ;    ce  qui  paraîtrait  prouver 

qu'il   faut  lire    [JJI   pour  *tj](  qui   a  le  même  sens  que  Ji é. 

mais  le  ms.  porte  (J_j^l.  Quant  à  *c^,  c'est,  comme  CJ>>V  ,  un 

des  anciens  noms  de  Médine.  Au  troisième  vers  ,  il  y  a  <^î^^  ,  au 

lieu  de  U^Jt  ;  puis  il  y  a  un  vers  intercalé.  Dans  le  suivant ,  il  y 

ac_)tVscl  au  lieu  de  c>>»^'.  Dans  le  dernier ,  au  lieu  de   ^ — J 

^Jii'  ^i=>Lv  j  on  lit  u^y^  f^^  V  "ô  cachet  des  prophètes 
»  (  Mahomet  )  î  »  puis  viennent  les  vers  suivans  : 

jbU^I   t3^  jJ  ««^y^Â^  jL;  ^        ^"^    ^'^  Ô^  C>JcM  ^ 

«  Un  songe  agréable  n'est  pas  même  venu  récréer  les  paupières 
»  de  ton  amant  malheureux  ,  qui  désire  si  ardemment  de  parvenir 
"  à  ta  tente  adorée.  Ce  sont  mes  infidélités  qui  m'ont  éloigné  du 
"  seuil  de  ta  porte;  c'est  mon  indifférence  qui  m'a  privé  de  la 
»  vue  de  ta  sainte  caaba.  » 

ÂLLÉC.    XXXII.    LE    CIlEyAL. 

P.  loj,  /.  i6.  Equus  cafdllus  de  Linnce. 

P.  lo.i.l.  />•  Hariri ,  s.  XIII.',  se  sert  d'une  expression  à-peu- 
prcs  semblable,  mais  dans  un  sens  figuré.  .U«j  X^j»  a]  JUj  V 
«<  Leurs  rivaux  n'atteignaient  pas  même  la  poussière  de  leurs  pieds.» 


(    ^'08    ) 

p.  10)  ,  l.  S.  Les  mots  j^L»  awÎ  jJx  U^  cNÀ^?  j*^^.࣠ L^ 
sont  du  Coran  ,  XVI,  pS. 

P.  lO)  ,  L  ij.  Le  jour  du  jugement  est  souvent  indiqué,  dans  le 

Coran ,  par  les  mots  ^^yM    («j-iy '•  On  les  trouve  entre  autres , 

dans  ce  sens,  tout  au  commencement  de  la  ZATXXK/ j//r.  .pUuJIj 

J^j_il   <«»_^'j  Tô-^    cjl"^  «  J'en  jure  par  le  ciel  qu'ornent  les 

»  signes  du  zodiaque ,  par  le  jour  du  jugement,  &c.  » 

P.  10 j ,  L  iS.  Cette  phrase  et  une  partie  des  phrases  qui  suivent, 
sont  remplies  d'allitérations  et  de  jeux  de  mots ,  que  les  orienta- 
listes apercevront  facilement  dans  le  texte.  Ces  sortes  de  beautés 
(  si  toutefois  ce  sont  des  beautés  ) ,  disparaissent  dans  les  traduc- 
tions. 

P.  Jo6,  L  ij.  Il  est  probable  que  les  mots  ^yi*^  0^ >  ^^'  ^^"^ 
une  tradition. 

P.  io6,  l.  /j».  Je  ne  sais  si  les  mots  -^^-y^  jj^  csi^-^  ont  rapport 
à  une  tradition;  mais  il  est  certain  que  les  anciens  croyaient  que  les 
cavales  pouvaient  concevoir  par  l'effet  du  vent. 

Homère  dit  des  chevaux  d'Achille  : 

BocncojjUivy)  Kei/unùvi  ttv^  pôov  cokhclvoio. 

m  ad.  XVI,  ijo-p. 

et  en  parlant  d'Erichthonius  : 

TûLCùV    X.CLI    BopiYlÇ   M^COttTO     [hoOKO/UJcVOLCùV  , 
'l^'TTCp    e/J,'   eiOTtJUiVQÇ   "^mpthi^CLTt  xjucLvo^nyï  ' 

Ai  </C   vTnKJu osajbUivoLi  hdcûv  SboKctfcfïKs^  ttcùAovç.  . 

Ilind.  XX,  221- 2J. 
et  Virgile  dit  des  jumens  : 

Orc  omncs  vcrsœ  in  Zephj'rnm  siant  rupilius  altis. 


(  2Û9  ) 

Exceptnntque  levés  aurais  ;  et  sapé ,  sine  ullis 
Conjugiis  ,  vento  griividœ  f  minéile  Sctu  )  , 
Saxa  per  et  scopttlos  a  ilepresstts  convallcs 
Diffuginnt :  non,  Eure,  tuos  neque  solis  ad ortus : 
In  Boream  Caurum(]ue ,  aut  umlc  nigcrrimus  Austcr 
Nascitur,  et  pluvb  contristat  frigorc  cœlum. 

Gcorg.  III,  273-79. 

«  Rcs  vulgata  ,  dit  Hcyne,  vctcrcs  credidissc ,  'i'^a.nfxoZa^i  , 
»  vento  gravidas  rcddi  posse  equas,  Procter  Crctam  (  v.  Aristotcl. 
>'  Hist.  anim.  VI,  iS) ,  in  Lusitanià,  circa  Olyssiponem  (cf.  Varro, 
»  R.  R.  II,  I,  i(^),  Favonio  seu  Zcphyro  fiante,  id  potissimùm  con- 
>•  tingere,  existimatum  est  (loca  v.  ap.  Cerdum),  quoniam  acstuantes 
»  amorc  cquas  ,  versus  Oceanum  currentcs,  Zephyrum  hiantc  ore 
»>  excipere  videbant.  Vide  imprimis  Colum.  VI ,  2j,  j,  sipj.,  ubi 
"  totus  hic  locus  adscribitur.  » 

P.  106,  I.  i4-  Voyez,  par  rapport  aux  mots  ^juatsiLJi  et 
^yvwjf  ,  les  notes  sur  la  lavande. 

P.  106 ,  l.  77.  «  Les  Arabes  ont  beaucoup  de  confiance  aux  amu- 
"  letles  ou  talismans.  Ils  les  composent  de  passages  de  l'Alcoran 
»  et  des  hadis  (  qui  sont  les  dits  des  premiers  successeurs  de 
î>  Mahomet  )  ,  de  prières  de  leurs  saints,  mêlées  de  termes  caba- 
»  listiques  :  le  tout  écrit  avec  de  grandes  circonspections  à  l'égard 
>»  du  papier  ,  sur- tout  à  l'égard  du  temps  et  du  lieu.  Ils  les  portent 
"  au  cou,  à  la  ceinture  ,  mais  plus  communément  au  bras ,  en  de 
>•  petits  sacs  de  soie  ou  de  brocard,  6vc.  »  Voyez  Chardin,  édit. 
de  M.  Langlès,  /.  //,  p.  zj)  et  suiv. 

P,  to6,  l.  21.  Voyez,  par  rapport  à  ce  que  l'auteur  dit  de  la  soie, 
les  notes  sur  l'allégorie  de  l'araignée. 

P.  106 ,  L  2j.  Au  lieu  de  i>^  (J)^^'  u^^  <-0>^  .  on  'Jt  dans 
le  ms.  D  :  IJ^  (3^'  J^'  iS3J  3  ^j^ 

P.  106 .  I.  26.  Les  mots  ^i  »^-Cuo  ^1  (V^^i  ^  ^J^  lT^  J^ 
Li-^j  sont  du  Coran ,  XIX ,  ^S.  xMarracci  traduit  ainsi  ce  verset  : 

o 


(    210    ) 

.<  An  invenies  ex  eis  (  hominibus  litigiosis  ) ,  vd  unum  ,  aut  audies 
M  de  cis  mussitationcm  î  >» 

P.  loy,  l.  //'  On  ne  lit  point  de  vers  dans  le  ms.  B  ;  le  ms.  C 
en  porte  trois  différens,  et  le  ms.  D  dix-sept ,  tout  différens  aussi, 
qui  contiennent  une  foule  d'allégories  et  de  jeux  de  mots:  on  y 
trouve  plusieurs  phrases  que  l'on  a  déjà  lues  dans  l'allégorie  de  la 
huppe ,  et ,  dans  les  derniers  vers,  des  conseils  qui  ne  me  paraissent 
présenter  rien  de  saillant,  et  qui  ne  sont  guère  qu'une  répétition 
de  ce  qu'on  a  lu  dans  l'allégorie  du  corbeau  :  je  ne  crois  donc 
pas  devoir  surcharger  mes  notes  de  cette  tirade, 

ALLÉG.    XXXIII.    LE    LOUP  -  CERVI ER. 

P.  joy,  /.  ly.  Voyez,  sur  cet  animal ,  le  Dictionnaire  d'histoire  »a- 
/i^rr/Zf  impr.  chez  Déterville,  au  mot  Lynx,  et  l'extrait  de  Démiri 
qui  se  trouve  à  la  suite  du  poëme  de  la  Chasse  d'Oppien,  traduit 
en  français  par  M,  Belin  de  Balu. 

P.  loS,  L  20.  Le  mot  i^js  signifie  non-seulement  «  revenir  à 

»  Dieu  en  renonçant  à  la  mauvaise  conduite  que  l'on  menait ,  » 
mais  encore  «  se  mettre  ensuite  à  pratiquer  les  devoirs  que  nous 

»  prescrit  la  religion.»  ëXic  J. :s:  wol   <JI  o^^^iî^  *^j^î 

i^y\  i^y^   Jso  *Uii[  /  OvUll  (j^  j!>^ûl   Kitah  Tarifât. 

P.  loS ,  L  2j.  On  peut  lire,  la  seconde  fois,  L$^-a-»,  esprit ,  &c., 
ou  ^-'A^  ,  avec  nous.  J'ai  conservé  l'orthographe  par  [  à  cause  de 
cette  espèce  de  jeu  de  mots. 

P.  lop,  L  p.  Les  mots  OU»Jl  ±  ji>  çJ(X-j\  signifient  à  îa 
lettre  ,  «  qui  est  la  moelle  de  la  dévotion.  » 

On  trouve  dans  Hariri,  séance  XV,  y^J^  ^  (JcX — Ji  Pj — >• 
j>LJjV!  ityJ.^j  ^Lwo  j  f  ce  La  faim  est  le  vêtement  des  prophètes  et 
»  l'ornement  des  amis  de  Dieu.  » 

P.  lop ,  L  If.  Le  texte  porte  à  la  lettre  :  «  Je  dresse  mon  trône 
>•  par-tout  où  je  veux,  et  j'étends  mon  tapis  par-tout  où  je  m'amuse.  >» 

P.  lop  ,  l.  ip.  Le  ms.  c  ne  contient  point  de  vers  ;  le  ms.  B  en 
contient  un  seul  ;  enfin  le  ms.  D,  dont  la  rédaction  est  toujours 


(  2"  ) 

i>caucoup  plus  longue,  dans  ces  dernières  allégories  sur-tout,  en 
cuntieut  quatre  que  voici  ; 

cpbj  ^M-^b  O'^^^J  J^^ 
juif  ^_i,  j  ^J^Vf  ^y 

««  Puisque  tu  desires  t'unir  a  cet  objet  sacré ,  ne  tarde  pas  un  instant 
»»  ù  faire  tous  tes  efforts  pour  mériter  ce  bonheur;  dans  l'obscu- 
»»  rite  des  nuits,  associe-toi  à  ses  fidèles  adorateurs  ,  pour  t'élcver 
»  aux  degrés  sublimes  du  spiritualisme.  Poursuis  vivement  l'objet 
«  de  tes  feux ,  suis  ta  passion  sans  te  mettre  en  peine  de  rien  :  tu 
»  obtiendras  ce  que  tu  desires,  et  les  faveurs  de  la  beauté  que  tu 
«  adores  seront  le  prix  de  ta  constance.  » 

ALLÉG.    XXXIV.    LE    VER-À-SOIE. 

P.  110,  l.  2.  Le  j^\  3j3  est  \e  Bomfjx  Alori  de  Linnée  ; 
Russe!,  Natural  Hîstory  of  Alqipo ,  t.  II, p.  222;  et  Hasselquist, 
V'o)'ûgcs  dans  k  Levant,   t.  II  ,  p.   62. 

P.  110,  l.p.  Les  Arabes  disent  en  proverbe:  ^U.  ^j«âJIj  }>ysl 

^^si  n  Donner  sa  propre  vie ,  c'est  le  comble  de  la  libéralité.  >» 

P.  no,  L  If.  Dans  cette  partie  de  ma  traduction  je  n'ai  pas  rendu 
les  mots  0  -^j^  Xj  ^  J  -^^  L^        y"^  «  je  v  iens  au  monde 

«•sans  père  ni  mère,  »  attendu  qu'ils  sont  répétés   plus  bas. 

Il  faut  observer  que  ^^j^y*  est  ici  pour  ^  '-^^  mère;  à  la 
lettre  ,  «  celle  à  qui  est  né  (  un  enfant  ).  » 

P.  /lo ,  /.  //.  '«  En  Syrie,  on  fait  éclorc  les  œufs  des  vers-à-soic 

O  y. 


(    212    ) 

V  dans  un  endroit  chaud,  ou  bien  les  femmes  les  tiennent  dans  leur 
»  sein  ou  sous  leurs  oreillers.  »  Hasselquist,  Voyages  dans  le  Levant, 
t.  II,  y.  ài. 

P.  no,  l.  ip.   (J^  r^  signifie  littéralement  «  la  réunion  de  ma 

"  dispersion  ;  »  mais  cette  expression  indique  souvent,  comme  je 
l'ai  déjà  fait  remarquer ,  le  passage  d'un  état  malheureux  à  un  état 
heureux  ;  c'est  donc  ici,  «  le  passage  de  la  non-existence  à  l'exis- 
5>  tence.  » 

P.  110,  l.  20.  On  voit  que  l'auteur  joue  sur  la  signification  op- 
posée des  mots  J-<a-5  et  J-^j 

P.  iio,  î.  2j.  A  la  lettre  :  «  Je  vois  que  je  n'ai  ni  père,  ni  mère, 
»  ni  oncle  maternel  ni  paternel.  » 

P.  III ,  l.  /.  Jeu  de  mots  sur  la  double  signification  de  J^ 

P.  m ,  L  21.  Cette  sentence  se  trouve  dans  le  Coran,  LV,  6o ; 
on  la  rencontre  aussi  dans  divers  auteurs  orientaux,  et,  entre 
autres,  dans  une  fable  de  \ Anvari  Sohéili  (fol.  /2  verso) ,  que  j'ai 
déjà  citée, 

P.  112,  /,  j".  Les  mss.  A  et  C  portent  «-y^  \^^  :  On  peut  conjec- 
turer que  l'auteur  avait  écrit  {Sj^  *-^-^J  "  ie  lieu  où  j'espère 
5>  ressusciter.  » 

P.  112,  l.  I/.  Les  mss.  portent  (^>-j  ,  qui  est  la  manière  vulgaire 
d'écrire  ciU  ;  car  toutes  les  fois  qu'il  est  nécessaire  de  pro- 
noncer le  P.esra ,  on  y  substitue  ,  en  arabe  moderne  ,  un  (_5 
pour  fixer  la  prononciation.  C'est  par  une  suite  de  ce  système 
que,  lorsque  les  Arabes  qui  ne   connaissent  pas  les  règles  de  ia 

grammaire  [^-^'  ]  veulent  prononcer  la  nunnation  du  hesra,\\s 

écrivent  souvent  la  nunnation  }*  ,  la  seule  qu'ils  emploient  ordi- 
nairement. Ainsi  il  n'est  pas  rare  de  lire  à  la  suite  des  adresses  àes 

lettres  :  t  vjiç  *jLo|  ,  et,  au  commencement  :  (yy*'^  <>*J  \j — ^ 

î^^^  (J^  ^Jx.    ^«ioO^Li-o  ^1    ,  ou  d'autres  phrases  semblables. 

P.  112,  L  iS,  Les  mots  fj^  ^J^^j  (Jj^'j  font  allusion  au  ;.<^ 


(  ?'3  ) 

versel  de  la  L.^  sur.  du  Cor. ,  qui  porte  :  ^J*  J^'  3  ^  Cette  ex- 
pression n'est  pas  très-facile  à  rendre  ici;  Beidhawi  l'explique  ainsi: 

^^0  «Ol  ojLj  ^L,  4JI  JJjUj^Li  «vjf  Le  A'^/«i7tti(  éd.  de  Cal- 
cutta, f.  2)6)  la  rend  par  Ja-Ui^  perpkxum  et  confusiim  ncgotium. 

P.  112 ,1.  iij.  Les  mots  "^y^  Va  signifient  à  la  lettre,  <'   ni   sur 

»  aucun  autre.  »  Au  lieu  de  cette  phrase,  le  ms.  D  pxjrte  :  q ^j 

(_>j^  H^  ^^  (Jj  jÊ.)ij   c  cJy^  (J   (Jy^ 

P.  112 ,  i.  26.  L'auteur  fait  ici  allusion  à  ce  qu'on  lit  dans  le  Cor. 
XXlX,4o:   J— A_<-^  'Wj^  *wt  Qj.i  ^  'j^^  [J^.^^  J^ 

««  On  peut  comparer  ceux  qui  prennent  des  protecteurs  autres  que 
»  Dieu  ,  a  l'araignée,  qui  se  construit  un  asyle  qui  est  la  plus  frtlc 
»  des  demeures.  » 

Hariri,  séance  XV,  dit,  en  décrivant  une  maison  :  jj~-«  f>-^' 

O^aX^I  t>^  (j^  L>*JJ  <^^^'  "  plus  étroite  que  la  bière, 
i>  et  plus  frêle  que  la  demeure  de  l'araignée.  " 

P.  11^ ,  l.  ^.  Jeu  de  mots  entre  A  <^  ,  collyre ,  et  J^-X  ^toir- 
ceur  de  l'ail.  Pour  comprendre  l'allusion  de  l'auteur,  il  fauts;ivoir 
que,  selon  les  Orientaux,  les  plus  beaux  yeux  sont  les  yeux  noirs, 
et  qu'en  conséquence,  les  Levantines,  pour  suppléer  à  cette  beauté 

ou  pour  l'augmenter,  font  usage  du    jLi    ,  qui  est  une  poudre 

extrêmement  fine,  composée  en  grande  partie  d'oxide  de  zinc, 
qu'elles  posent  sur  le  bord  de  leurs  paupières  avec  une  sorte  d'ai- 
guille nommée  j-y^  .  \'oyez  la  Bil'l.  or.  au  mot  Surmeh  [*^_>*-  ], 
qui  est  le  nom  que  les  Persans  et  les  Turcs  donnent  au  J>^ 

P.  ir^,  /. /.  Le  ms.  B  porte  quatre  vers  tout  ditférens ,  qui  ne 
sont  que  la  répétition  de  ce  qu'on  a  lu  dans  la  prose  sur  les  soins 
que  l'on  donne  au  ver-à-soie. 

O  3 


(    2'4    ) 

Le  ms.  D  contient  sept  autres  vers,  tout  diffcrens  aussi  ;  je  me 
contenterai  de  donner  les  quatre  derniers  : 

^ — ^"U^  Jj^  ^j^^  o'J-»"  f ^ 

< dX Jtj     j[jj   V^L  \J^Jt^ 

IsiAb  --uJo  jiJI  3jtN^=>  ôî^* 

*fl_JL-\-)     «^-VAAJ     (^Ô^^    U>J.a£û 

«  Pendant  toute  sa  vie,  l'homme  se  livre  à  des  affaires  qui  occupent 
>'  tous  sts  momens  :  te!  est  ie  ver-à-soie,  qui  file  continuellement 
»  et  qui  périt  de  chagrin  au  milieu  de  son  travail. 

5>  Après  avoir  employé  tant  d'instans  à  amasser  des  richesses, 
>»  l'homme  avide  meurt,  et  ce  qu'il  laisse  devient  la  proie  des  acci- 
î>  dens  et  de  ses  héritiers  :  tel  est  encore  le  ver-à-soie  ;  la  demeure 
'>  qu'il  se  construit  cause  sa  mort ,  et  un  autre  fait  son  profit  de 
»  la  cellule  qu'il  s'était  formée.  » 

ALLÉG.    XXXV.    —   l'araignée. 

P.  iij ,  l.  ij.  Le  OjAXiXi  est  ÏAranea  domestka  de  Linnée  ; 
Kussel,  Nat.  Hist.  of  Aleppo ,  t.  Il,  p.  2j4' 

P.  iij  ,  L  18.  CL>j>^  est  pour  \^y^. 

P.  J14.  l  10.  Le  mot  o»aJ  salive ,  signifie  aussi  toute  sorte 
de  matière  visqueuse  et  gluante:  de  là,  il  se  prend  pour  la  ma- 
tière glutineuse  avec  laquelle  les  insectes  fîleurs  tissent  leurs 
toiles  ou  leurs  cocons,  pour  le  miel,  &c. 


(  î>^  ) 

p.  1/4,  /.  fJ-  H  y  a  ici  un  jeu  de  mots.  L'auteur  ,  par  icj  mots 

^jfjfa  ilAÉp-  ,  veut  indiquer  ic  malheur  de  mcicr  les  fils  de  ia 
toile,  et  lait,  en  même  temps,  allusion  à  la  société  et  aux  maux 
qui  en  proviennent. 

P.  1/4 ,  i  12.  c^v3Lt?  est  le  plur.  de  ^y^^  ou  de  *^'-^  qui  signifie 

proprement y?»tYr<r.  Le  mot  '-SU?  me  rappelle  quelque  chose  de 
fort  singulier  que  je  crois  devoir  mettre  ici.  Il  circule  dans  le  Levant 
des  pièces  de  Hongrie  en  argent  qui  portent  un  écusson,  des  dollars 
de  Hollande  qui  portent  la  figure  d'un  lion  ,  tnfm  des  piastres 
d'Espagne  qui  ont  les  deux  colonnes  d'Hercule,  avec  lu  fameuse 
inscription:  Non  plus  ultra.   Les  Arabes,    prenant  l'écusson   des 

pièces  de  Hongrie  pour  une  fenêtre,  nomment  ces  ccus  *^l-b^l 
U  père  Je  la  fcnctre  (d'où  vient  le  mot  yvrA?/^//^  );  croyant  que  le 
lion  des  dollars  de  Hollande  est  un  chien  ,  ils  nomment  ces  ccus 

4->*-^  ^1  le  pcre  du  chien  ;  enfin,  s'imaginant  que  les  colonnes 
des  piastres  d'Espagne  sont  des  canons ,  ils  nomment  ces  piastres 
>3tM^I  le  père  du  canon. 

P.  1/4  .  /.  O'-  ^"  ^^^^  ^'^  ^^J  "'j^^  (j  t*-^'»,  le  ms.  n 
porte  ^-^mi  Lc.j^j-4  c  (Jj^i  (J  l_>x-a.-*  ce  qui  vaut  peut-être 
mieux. 

P.  //4,  l.  ::^.  Les  mss.  portent  [J,k/J=) -^  j'ai  rétabli  la  vraie 
orthographe. 

F.  //4,  /.  26.  Lorsque  Mahomet  voulut  se  retirer  de  la  Mecque 
à  Médine,  avec  ses  nouveaux  prosélytes,  pour  éviter  la  persé- 
cution des  Coraischitcs,  qui  ne  pouvaient  souffrir  qu'il  abolit  l'ido- 
lâtrie pour  y  établir  sa  nouvelle  religion  ,  il  sortit  un  soir  de  la 
maison  d'Abou-bccre ,  son  beau-père,  accompagné  de  lui  seul, 
pour  passer  la  nuit  dans  une  grotte  de  la  montagne  nommée 
Thour .  à  une  heure  de  chemin  de  la  Mecque. 

«<  Aussitôt  que  l'on  eut  appris  dans  la  Mecque  sa  retraite,  les 
»  Coraischitcs  se  mirent  en  campagne  pour  se  saisir  de  sa  per- 
»  sonne  ,  cl  arrivèrent  jusqu'à  l'entrée  de  la  caverne  où  il  s'était 

O  4 


{    2l6    ) 

»  caché  ,  dès  le  grand  matin  du  jour  suivant.  Le  premier  miracle 
5>  qui  se  fit ,  fut  que  cette  même  nuit ,  en  vertu  de  la  toute- 
»  puissance  de  Dieu ,  un  arbre  d'acacia  ou  de  gagie  était  cru  à 
»  l'entrée  de  la  grotte ,  et  une  paire  de  pigeons  ramiers  y 
j>  avaient  déjà  fait  leur  nid  ;  ce  qui  restait  d'ouverture  à  la  ca- 
»verne,  se  trouva  de  plus  fermé  d'une  toile  d'araignée. 

»  Toutes  ces  choses,  étant  des  marques  certaines  qu'il  n'y  avait 
»  personne  dans  ce  trou ,  ôtcrent  la  pensée  aux  Coraïschites  d'y 
»  fouiller.  Abou-becre  fut  saisi  d'une  fort  grande  peur ,  lorsqu'il 
»  vit  approcher  leurs  ennemis  si  près  du  lieu  où  ils  étaient;  mais 
î>  Mahomet  lui  dit:  Vous  croyez  que  nous  ne  sommes  ici  que  deux; 
»  mais  il  y  en  a  un  troisième  ,  et  c'est  Dieu ,  qui  est  au  milieu  de  nous 
»  et  qui  nous  protégera.  »  Bihlioth,  or.  au  mot  Hegrah. 

P.  II j,  l.  8.  On  trouve  également  le  mot  Jy^^-*  avec  la  significa- 
tion de  bon  sens  dans  la  préface  des  séances  de  Hariri.  Voici  ce  qu'en 
dit  la  glose:  is.>>^_ai — ^  jy*^^^  ijis^I^  t^^^  />^\  J^*^t 

p.  iij,  l.  p.  Les  étoffes  de  soie  ,  quoique  permises  aux 
femmes,  sont  interdites  aux  hommes.  Ceci  est  fondé  sur  ces 
paroles  du  Prophète  :  «  Ne  portez  point  d'habit  de  soie ,  car 
î>  celui  qui  s'en   revêt  dans  ce    monde,  ne  s'en  revêtira  jamais 

«  dans  l'éternité.  »    l    ^ oJ^    à    ^^  ^^^    j^.^    ^j^  V 

*jib.Vi  (j  «*— y^  .  Mais,  si  l'on  en  excepte  les  oulémas  et 
quelques  dévots  parmi  les  laïques ,  toutes  les  familles  opulentes  font 
usage  des  habits  de  soie  et  des  plus  riches  étoffes.  Voyez  les  détails 
dans  Mouradgea  d'Ohsson,  Tahl.  de  l'Emp.  ott.  t.  IV, p.  loi  et  ij2. 

P.  11; ,  L  2^.  Voyez,  par  rapport  au  mot  \ù ê  ,  les  notes  sur 

le  narcisse. 


(  ?'7   ) 

ALLÉG.    XXXVI.    LA    FOURMI. 

P.  11 6,  l.  S.  On  voit  que  l'auteur  joue  sur  les  mots  '^Xr  pour  i^X^ct 

p.  ii6,  1.  1^.  Allusion  à  la  forme  de  la  fourmi,  qui  a  le  pé- 
dicule du  ventre  étranglé  ,  et  à  l'usage  des  domestiques ,  dans 
le  Levant,  qui  ,  lorsqu'ils  servent,  serrent  leurs  larges  habits  avec 
une  ceinture  pour  agir  avec  moins  de  gêne. 

P.  iiy,  I.  j.  La  parasange  est  une  mesure  itinéraire  de  Perse. 
Voyez  Chardin,   édit.   de  M.   Langlès,  t.  IK p.  r/7  et  suif. 

P.  iiy,  l.  6.  L'expression,  ««  celui  qui  fend  l'amande  et  le  noyau,» 
se  trouve  dans  le  Coran  ,  VI ,  pj ,  et  signifie  Dieu ,  le  Créateur. 

P.  tiy,  I.  S.  «LhJ-^  ou  v^,^^—>  (  leçon  du  ms.  A  )  est  le 
Coriandrum  satiuum  de  Linnce  (M.  Dclilc,  Ouv.  sur  l' F.gjptc , 
Hist.  nat.  t.  Il ,  p.  )S  ).  Le  fruit  de  la  coriandre  se  divise  ,  à 
l'époque  de  sa  maturité,  en  deux  moitiés  ou  graines  :  il  est  clair 
que  quand  on  divise  le  fruit  en  quatre,  on  coupe  chaque  graine 
en  deux  et  on  l'empêche  de  germer. 

P.  iiy,   l.   26.   Ces   mots  sont  de  la  surate  LXXIV,  v.   34. 

P.  iiS,  L  I.  Depuis  le  mot  nous  ohscri'ons,  jusqu'à  la  fin  de 
l'allégorie  ,  la  fourmi  parle  d'elle  et  de  ses  compagnes  à  la  troi- 
sième personne  du  pluriel  ;  mais  j'ai  mis  dans  ma  traduction  la 
première  personne,  pour  donner  plus  d'ensemble  et  plus  de 
clarté. 

P.  iiS,  l.  II.  Ces  vers  sont  au  pluriel  en  arabe,  et  peut-être 
aurais-je  dû  les  rendre  également  au  pluriel  et  leur  donner  un 
autre  sens.  Je  crois  cependant  ma  traduction  fidèle  ;  car  il  me 
semble  qu'on  ne  peut  les  placer  que  dans  la  bouche  du  poète  , 
et,  dans  ce  cas,  il  me  parait  difficile  de  leur  donner  une  autre 
signification. 

Ces  vers  ne  se  lisent  que  dans  les  mss.  A  et  D.  Le  ms.  B  en 
contient  cinq  tout  différens,  et  finit  ici  l'allégorie.  On  en  lit  un 
seul  dans  le  ms.  C. 


(  s'8  ) 

P.  iiS .  l.  21.  C'est  à  dessein  que  je  n'ai  pas  traduit  les  mots 

c^fj^Vf  joLû-x».  ;  je  me  suis  contenté  d'exprimer  le  sens  d'une 

manière  vague. 

P.  np,  L  4.  Voyez  sur  le  mot  j^^jU^I  les  Notices  des  AIss. 
t.  X,  p.  ^2. 

P.  ji^,  L  7.  Ces  mots  sont  tirés  de  la  xxxiii.^  surate ,  v.  23. 
ALLEG.    XXXVII   ET   DERNIERE.    —    LE    GRIFFOrf. 

P.iip,  I.  ij.  Je  traduis  ^"^^.^  t^:\x  griffon;  on  pourrait  peut-être 
\t  traduire  aussi  bien  par  phénix.  Cet  animal  peut  se  comparer 
à  l'hippogriffe  de    l'Arioste  :  les  Persans  le  nomment  ^r^^  si- 

morg.  Voyez  M,  Freyherr  von  Daiberg,  Simorg  der  pcrsische  Phônix. 
(Mines  de  l'Or.  t.  I ,  p.  ipp.) 

Voici  ce  que  dit,  sur  cet  oiseau  fabuleux,  Motarrézi ,  dans  son 
commentaire  sur  la  L.^  séance  de  Hariri,  Je  citerai  ce  passage  en 
entier,  quoique  fort  long,  attendu  qu'il  est  inédit,  et  qu'il  peut 
ne  pas  être  indifférent  aux  orientalistes. 

\  J^  ô^  f^-^  Jj^  fwVI  (j>j^  f^  Ji^  ^^^\ 

O^J  l^AÀC    JjL]    J^^    ^^\^J:>Li    l^iXCr    j     (jl^<0V  Uàc 

(Ai^  ^J^   (jji=aj  ool^-i  xA-ûj<;Jw>»  «iLj'  ojlX_3  ^jJ  J&  ^j-» 


(    2»9    ) 

^jLcLo  Lib-oLob  *.3\  L^aJU  j2_jL_— .j  l^i*-j  ^^U  Ujuk  ^t 

0_^Ll3      A.M-Jf     «y^U     ^_^_J^    ;J^j     (j     ,3^^    (J,^    ^'     (jf    J^    <>^ 

<=i.^  [jl^^    e-SjLsw    (_!— .^     ,j>«  *^-iS-2*.l    *-*Jjf   Lu   liÀAjf  l^Xul 

\j — ^3  l^  (3~5  ^ — ^^-***^  O"**^  cS^  à^  \y  '^^-^ij  (jL-jVÎ 

^j^— »-A;_^    jjJ-jL-b   c>iLli^   J,l    ^>X*Jl    <kÀ£,    <»-J|    (j-y^    ^^^^ 
(_îL*-Jlj   ^c\ill    L_VH   ^jy^   <^^\  ^^J\    ^    ^^jj  o-^Jt^j 

lx.cX3    «UJÎ    l>>j^4^9    jBsÎ^LjI   W^aJx.    cX^g  (J^'^   U^-^J   c5^*^' 
(jLjù'Î    o^   ^V^^^  c_>oLf   Jj^    qI^«»jÎ  AXiU  cV-«.<i>Okiî   qCj 

^^^  UjJ^'  j:>^j^  j-^  L>^^   c5>  ^'Ji  ^    ^^j  ^Vl 


(    220   ) 
ç^yXj  Ut\2».j  ^J>  yU  ÂiU=  ^^A*^    ^iS^   Uxaif  rwfj  J(i 

«  Uanca  est  un  grand  oiseau  que  l'on  ne  connaît  que  de  nom. 
5>  Khalil  s'exprime  de  la  même  manière. 

î>  On  dit  qu'on  l'a  nommé  anca ,  parce  qu'il  a  au  cou  un  tour 
«  blanc  qui  ressemble  à  un  collier.  D'autres  disent  qu'orv l'a  ainsi 
»  nommé  à  cause  de  la  longueur  de  son  cou  ;  mais  Ebn-Elkelbî 
3>  dit  :  Les  habitans  de  la  ville  de  Res  avaient  un  prophète  que 
»  l'on  nommait  Hantala,  et  il  y  avait  dans  leur  pays  une  mon- 
«  tagne  nommée  Damaj,  qui  avait  un  mille  de  hauteur.  Il  y 
«  venait  un  oiseau  très-grand,  qui  avait  un  cou  très-long,  très- 
5>  beau  et  de  diverses  couleurs.  Cet  oiseau  se  précipitait  en  se 
"  posant  tout  debout,  et  il  tombait  sur  les  oiseaux  qui  étaient  sur 
5'  cette  montagne  et  les  mangeait.  Un  jour  il  eut  faim,  et  les 
»  oiseaux  lui  manquant,  il  se  jeta  sur  un  enfant  et  il  l'emporta.  (On 
«  le  nomma  arica  mogreh ,  parce  qu'il  emporte  bien  loin  toutes 
5>  les  proies  qu'il  saisit.)  Il  se  jeta  ensuite  sur  une  jeune  fille,  la 
»  mit  entre  deux  petites  ailes  qu'il  a,  et  l'emporta.  Les  gens  de 
"  la  ville  se  plaignirent  alors  à  leur  prophète,  et  il  dit  :  Mon 
5'  Dieu  !  délivre-nous  de  cet  oiseau  ;  empêche-le  de  se  repro- 
5>duire,et  abandonne-le  au  malheur.  Bientôt  après,  l'anca  fut 
3>  frappé  de  la  foudre. 

3' Dans  l'ouvrage  intitulé /?(2^/  alnhrar,  on  rapporte ,  sur  l'auto- 
«  rite  d'Ebn-Abbas,  que  Mahomet  a  dit  que,  du  temps  de  Moïse, 
5>  Dieu  créa  un  oiseau  femelle  nommé  anca.  11  avait  quatre  ailes  de 
'>  chaque  côté  et  portait  la  figure  d'un  homme.  Dieu  lui  donna 
■>■>  une  portion  de  chaque  chose,  et  lui  créa  ensuite  un  mâle  de  la 
»  même  espèce.  Alors  Dieu  fit  cette  révélation  à  Moïse  (  sur  qui 
3>  soit  la  paix  '.  )  :  J'ai  créé  deux  oiseaux  extraordinaires ,  et  je  leur 
M  ai  assigné  pour  nourriture  les  bêtes  féroces  qui  sont  autour  de 
«Jérusalem.  Je  t'ai  rendu  familier  avec  eux,  et  je  les  ai  donnés 
5>  par  surcroît  à  ce  que  j'ai  accordé  aux  enfans  d'Israël. 


(  5'^»  ) 

»  Mais  leur  espèce  s'augmcni;i  par  la  prog(?niturc;  et  lorsque 
»  Moïse  fut  mort,  ils  allèrent  dans  la  terre  de  Najd  et  de  Héja/., 
»  et  ne  cessèrent  de  manger  des  bctcs  féroces  et  d'enlever  des  en- 
»>  fans,  jusqu'au  temps  où  Khaled  lils  de  Scnan  Abasi  fut  fait  pro- 
»  phète  entre  le  temps  de  Jésus-Christ  et  de  Mahomet.  Alors  on 
»  se  plaignit  de  ces  oiseaux;  Khaled  invoqua  Dieu,  et  Dieu  ne 
»  leur  permit  plus  de  se  multiplier  ,  et  leur  race  même  fut 
»  éteinte. 

»  Jahez  dit  :  Tous  les  peuples  citent  l'anca  en  proverbe,  pour 
»  exprimer  une  chose  dont  on  entend  parler  sans  la  voir.  C'est  ainsi 
'>  qu'Abou  -  Navas  a  dit  :  <«  Son  pain  (  d'un  avare  apparemment) 
»  est  comme  l'anca  mogrcb,  que  l'on  peint  sur  les  tapis  des  rois, 
»  et  au  sujet  duquel  les  hommes  ont  fait  des  proverbes  sans  qu'on 
»  l'ait  jamais  vu:  c'est  une  figure  qui  ne  passe  ni  ne  reste.  » 

"On  rapporte  que  Alotadcd  -  biilah  disait:  Il  y  a  trois  choses 
>»  admirables  dans  le  monde;  deux  ne  se  voient  pas,  et  une  se 
»  voit.  Celles  qu'on  ne  voit  pas  sont  l'anca  mogreb  et  le  soufre 
»  rouge  (  la  poudre  de  projection  )  ;  et  celle  qui  se  voit,  c'est  Ebn- 
»  EJjassas  le  joaillier,  Caroun  des  musulmans. 

»  L'anca  se  nomme  simorg  en  persan  ,  ce  qui  signifie  trente 
»  oiseaux  (*). 

5>  Lorsque  les  Arabes  veulent  exprimer  qu'une  chose  a  péri  et 
>'  s'est  anéantie  ,  ils  disent  :  Anca  mogreb  l'a  emporté  dans  l'air.  » 

Je  dois  ajouter  à  ce  long  récit ,  que  les  auteurs  mystiques  parlent 
souvent  de  la  Divinité  sous  le  nom  de  Vanca  ou  du  simorg,  \  oyez- 
en  un  exemple  dans  le  Pcnd-namch ,  p.  iji. 

P.  np ,  l.  ij.  Comme  je  n'ai  jamais  traduit  le  Jv — 3  qui  com- 
mence une  grande  partie  des  allégories ,  je  ne  le  traduirai   pas 

non  plus  ici ,  quoiqu'il  soit  suivi  des  mots  oj^^  ^^^^J         if^ 


(*)  En  effet,  le  mot  persan   -a»  signifie  trente ,  et   6>>o  signifie  oiseau. 


(    122    ) 

ajoutés  par  les  copistes,  dont  le  sens  est  :  «<  Que  Dieu  sanctifie  son 
>•  ame  et  son  tombeau  !  » 

P.  iip,  l.  21.  J'ai  omis  à  dessein  ,  dans  ma  traduction,  les  mots 

ëjL^  L  c^^^  cl^JJ^  Si  ,jC^^  i::^.^]  qI  j,UIL.«  Les  sens 

»>  caches   sont  pour  ceux  que  j'ai  eus  en   vue  ;  mais  ma  voisine 
"  l'histoire  est  pour  vous  :   écoutez-la  donc.  » 

P.  iip,  l.  22.  Cette  allégorie  est  toute  mystiqne.  Les  oiseaux 
sont  les  hommes;  le  grifîbn  ou  anca  est  Dieu;  l'île  où  les  oiseaux 
se  renaent  est  le  ciel  ;  la  route  si  difficile  qui  y  conduit,  ce  sont 
ïes  vertus  et  les  différens  degrés  du  spiritualisme.  Je  pense  qu'avec 
ces  données  on  comprendra  facilement  tout  le  reste. 

P.  120,  1.    4-  On  trouve  également  dans  le   Coran,  lll ,  py, 

AWi  (J-S^  l^.<w2Js£.  Ij  et  voici  comment  Beïdhawi  explique  ces  mots  : 

LTÎ^  (jl_^l   joJïLJL   iSs^LaJl  «ulc  cJyU  cuU5oj  ^sX*./Vf  jjJJuJ 

iS^J-^^  O*"    "    Attachez-vous  à   la    religion   musulmane   et  au 

»  Coran,  d'après  ce  qu'a  dit  Mahomet  :  le  Coran  est  la  corde 

»  ferme  et  solide  de  Dieu  (  J-p»-  ).  Le  prophète  a  employé  ici 
y*  le  mot  corde  par  métaphore  ,  parce  qu'en  effet ,  ceux  qui 
"  viennent  à  tomber  dans  un  puits  se  sauvent  par  le  moyen  d'une 
»  corde. » 

P.  120,  l.  21.  Ces  mots  sont  tirés  de  la  XXIX.'  surate,   v.    5, 

P.  120,  l.  2j.  Les   mots   «wù  awi  j^^=ijo^j  sont  du  Coran ^ 

III,  2j ,  et  ils  signifient  à  la  lettre  :  »  Dieu  vous  engage  à  le 
)»  craindre.  » 

P.  120,   L  2j.  Les  mots  <_>i-ûJ  I    (j3Uw«  signifient  à  la  lettre, 
•<  le  harangueur  de  la  recherche  »  :  toutefois,  il  faut  observer  que 

c-M^aJi  est  ici  le  premier  degré  de  la  vie  religieuse  et  spirituelle 

(jk^jUlj  <_>JJL  "^.iL  o-*-J^  )  •  Voyez  le  Pend-nameh,  -p.  168  et 

suiv.  Quant  aux  mots  am|  j!  Ly^  >  4^^'  suivent,  ils  sont  pris  de 
la  z://  surate,  v.  jo. 


(  "■5  ) 

P.  !2i ,  l.  2.  Les  mot^  jj»j  J  ij  c->ljXuJi    ijjjjfc  (j  Qj^iLiujj 
sont  du  Coran ,  III ,  iSi^\ 

P.  izi,  l.  4-  Les  mots  |j^L->o  «Uaj  ^  '^'J-^.  ir*5  -^on^  ^^  ^^- 

ran ,  IV,  joi.  J'ai  mis,  dans  ma  traduction,  ire.  après  le  mot 

fitir ,  parce  que  le  sens  n'est  pas  complet.  Voici  ce  qu'on  lit  dans 

le  Coran,    à    la  suite  de   ces    mots,  «v — ^cSJ   /  «Uj-u<jj  axjI  ^| 

AMI  ^Jx.  »^i  ♦^j  (>i3  c_)^i  :  «  Celui  qui  quittera  sa  maison 
»»  pour  suivre  la  cause  de  Dieu  et  de  son  prophète ,  et  que  la  mort 
«atteindra  ensuite,  certes  Dieu  se  charge  de  le  récompenser.  » 

P.  121,  L  11.  Les  mots    jiJilj'  et     jCUj'  sont  deux  noms  d'action 

de  la  sixième  forme  des  verbes  (jf^  et  (jf^  .  Le  (_5  est  ici  retranché 
en  vertu  d'une  des  règles  de  permutation.  Gr.  ar.  t.  I,  p.  Sa. 

P.  121,  1. 20.  Les  mots  ^jv-cVI  jJjj  ^jJljVi  <*^vgX-iJ'  L*  sont  du 
Coran,   XLIII,  ji. 

Tout  ceci  et  ce  qui  suit ,  jusqu'aux  vers ,  est  la  description 
du  paradis.  H  n'est  pas  difficile,  en  lisant  ces  lignes,  de  se  con- 
vaincre de  la  fausseté  de  l'opinion  de  ceux  qui  croient  que  Ma- 
homet n'admet  dans  le  ciel  que  des  plaisirs  sensuels.  D'abord, 
comme  l'observe  Reland  Z'  de  Rel.  Alohamm.  f.  XVU  ) ,  d'après 
Hyde ,  plusieurs  musulmans,  et  même  les  plus  raisonnables, 
pensent  que  ces  plaisirs  sont  purement  allégoriques  ;  mais,  dans 
la  supposition  mcme  que  Mahomet  admette  réellement  dans 
l'autre  vie  ces  plaisirs  corporels ,  ils  sont  purement  accessoires, 
et  la  vision  béatifique  et  l'union  avec  Dieu  sont  toujours  la 
première  et  la  principale  jouissance  des  bienheureux.  Mahomet, 
d'ailleurs,  dit  en  propres  termes  dans  le  Coran  ( IX ,  yj J,  après 
avoir  fait  la  description  du  paradis  :  «  Mais  par-dessus  tout ,  la 
"  complaisance  et  la  faveur  de  Dieu  ,  bonheur  au-dessus  de  toute 

»  expression.  »  P^-^^  jy^^  ^'^  J^^^  *^'  O^  Oj^JJ 

J'avoue  cependant  que,  dans  le  Pràis  de  la    Foi  musulmane, 
intitulé  ^^i=>jj  «JL«j  ,  qui  n'est  autre  chose  qu'un  catéchisme, 


(   224  ) 
il  n'est  point  parlé  de  la  vue  ck  Dieu  ni  d'aucune   autre  jouis- 
sance spirituelle.  Voici  ce  qu'on  y  lit  simplement  ,p.  21  (  édit.  de 

Scutari):   tty *î  I<>-JI    ojXo   q çV ^-> 3;;^i=:>  Aj<J^    ^ib|  oN^ 

Le  latin,  dans  les  mots,  brave  l'honnêteté; 
Mais  le  lecteur  français  veut  être  respecté, 

a  ditBoileau:  ainsi,  comme  il  me  serait  impossible,  sans  blesser 
la  délicatesse  française  ,  de  traduire  littéralement  dans  notre 
langue  le  texte  turc  que  je  viens  de  citer,  je  vais  y  suppléer 
par  une  traduction  latine: 

«Electi,  in  paradisum  introducti ,  sempiternam  ibi  sedem  ha- 
w  bebunt ,  ex  eo  nunquam  exituri.  Ibi,  neque  senectus,  neque 
«  mors  ;  nulla  alteratio.  Vestes  iliorum  haud  deterentur.  Ibi,  nec 
»  ventrem  laxare,  nec  somnum  capere  opus  erit.  Virgines  pa- 
5>radisi,  et  mulieres  in  eo  admissac  ,  menstruis  non  laborabunt , 
»  non  parturient ,  neque  aliis  omnibus  incommodis  erunt  ob- 
«  noxiae.  Quidquid  de  cibo  aut  potu  desiderabunt,  aderit;  nec 
»  de  arte  coquinariâ  ,  nec  de  cœnatico  apparatu  curandum.  Para- 
»  disi  terra  erit  moschea,  et  iliius  structurae  lateres,  alii  ex  auro  , 
«  alii  ex  argento.  » 

On  voit  par  ce  passage  même  qu'il  n'y  a  également  rien  de  plus 
faux  que  l'assertion  de  ceux  qui  disent  que  Mahomet  a  exclu  les 
femmes  du  Paradis,  et ,  pour  le  prouver  encore  ,  je  pourrais  citer 
une  foule  de  passages  du  Coran  ;  mais ,  comme  cela  m'obligerait 
à  faire  une  longue  digression ,  je  me  contenterai  de  faire  men- 


(  o,..5  ) 

tion  de  CCS  mots  tires  de  l.i  surate  XL  ,   v.  .^  j  :  l^Lo    Jl^    ^ 

C-)^^— *^h^  l^^  .<  Celui  qui  fera  le  bien,  qu'il  soit  hornmc  ou 
"femme,  pourvu  qu'il  croie  en  Dieu,  entrera  dans  le  paradis , 
»  où  Dieu  le  comblera  da  faveurs  les  plus  abondantes.  >» 

P.  121,  l.  2^.  Ces  mots  sont  tires  de  fa  s.  Lxix,  v.  24.  On 

traduirait  littéralement  Sy^  en  stylo  d'Amyot ,  par  hn  prou 
vous  fasse. 

P.  121,  l.  2j.  Les  mots  jjjaX*«Ij^OJ^  q-o  qj-u.aàj  sont  du 

Coran ,  XV III ,  ^o ,  et  le  mot  (JVV^-^^  ,  LV l ,  16.  Voici  comment 
le  commentateur  Beïdhawi  explique  dans  ses  gloses  les  mots  lyô-'^^ 
et  jjj^>>-v-l  :  ^J<£.yJ\  ij^J  ^  *^  Jilcj  ^U_)tVl",j.>»  ^JJ  U^ 

P.  122,  l.  2.  Les  mots^j\^j^  j^Low»  \j  sont  du  Coran, 
jjl ,  ip.  Voyez,  sur  les  mots  {J^  j^  ,  les  notes  sur  le  paon. 

P.  122 ,  L  10.  Voyez,  sur  les  mots  (jj'^*^'  *-^^'-^,  les  notes  sur 
la  colombe. 

P.  122,  l.  jj.  On  a  mis  ^'^  pour  ij^*^,  à  cause  de  la 
rime. 

P.  122 ,  L  2b.  Il  semble  qu'au  lieu  de  c5tV^^  ,  il  devrait  y  avoir 
'JcV^*-;  cependant  tous  les  mss.  portent  la  même  leçon.  Les 
Arabes  tont  peut-être  comme  nous,  qui,  dans  ce  cas,  disons 
monsieur,  et   non  notre  sieur  (excepté    en  style  de  commerce). 

P.  12^,  l.  I.  Ceci  fait  allusion  au  verset  \6  de  fa  xxxv.<^  sur. 
du  Coran. 

P.  12^,  l.  /;.  Ce  qui  suit,  jusqu'à  la  fin,  ne  se  fit  point  dans 
le  ms.  A  ;  mais  fes  trois  autres  ms>.  fc  donnent  rédigé  à-peu-prcs 
de  la  même  manière.  En  général,  j'ai  suivi  de  préférence  le  ma- 
nuscrit B. 

Voici  comment  le  ms.  A  termine  cette  allégorie  et  tout  l'ouvrage: 

P 


(    226    ) 

c  |Bs!^LJIj  <c  Ensuite  ils  allèrent  dans  un    lieu    où  la  félicité  et 

«  le  bonheur  étaient  sans  bornes.  On  y  voit  des  châteaux  élevés, 
•i^  àtî,  rameaux  inclinés,  et  on  y  jouit  d'une  volupté  étemelle. 
5)  Ceux  qui  y  entrent  sont  fortifiés  par  la  grâce  \  ils  ne  goûtent 
»  pas  ia  mort  (*)  ,  et  leur  bonheur  ne  cesse  point.  Ils  ont  des 
M  biens  excellens  (**) ,  des  houris,  de  jeunes  échansons ,  et ,  par- 
«  dessus  tout ,  quelque  chose  qui  ne  peut  se  décrire ,  comme 
5)  Dieu  l'assure  dans  son  livre  précieux.  Cette  demeure  enfin  est 
^.  la  demeure  de  la  paix,  et  le  lieu  de  la  félicité  et  de  l'honneur. 
3)  Nous  finirons  ici  ce  que  nous  avons  voulu  dire  dans  cet  ou- 
•>■>  vrase.  Adieu.  » 

p.  12^,  l.  i4'  Le  mot  (J-r^  signifie,   «^   dormir  dans  le  temps 

nommé  idjU  c.-à-d.  à  midi  [  j»^l  c>-cJ  ].  liamous ,  p.  jj^4. 
Il  est  également  dit  dans  le  Coran:  XXV,  26.  * — ^  cjUel 
C^^A  ^^^*^U  [>îU«L/o  j^  C^^y.  •  Beïdhawi  explique  le  mot 
J^fji^  de  plusieurs  manières.  J'ai  suivi  sa  première  explication. 

P.  12^,  l.  ly.  Cette  phrase  se  trouve  dans  le  Coran ,  LXXVI, 
ij.  Quant  au  jj^ï-î-^j  ,  c'est  VAmomum  Zingihcr  de  Linnée.  Voici 
la  glose  de    Beïdhawi  sur  ce  mot:  /«AiaJf  ^j  J^yv^jJf  «u^   U 

«^)  ^  «3^'  LJ^j^ ''   OjtN'^''».**^  M>*^'  *^-^\}  "P^^  Zengébil,  ii 

'>  faut  entendre  ici  ce  qui  a  de  l'analogie  avec  cette  graine,  quant 


(*)   Coran  ,  xuv,  ^6. 
(**)  Coran,  LV,  70. 


(  "-7  ) 

'•au  goût;  rar  les  Arabes  aimaient  beaucoup  les   boissons   faites 
»  avec  du  gingembre.  « 

Selon  le  A  ,imous.  p.  1464  >  "  le  Zârtgé^il  est  une  racine  qui  s'étend 
»  dans  la  terre;  la  plante  qu'elle  porte  ressembla  au  roseau  et  au 
>»  papyrus:  elle  a  une  vertu  cchaufîântc,  clic  aide  à  la  digestion  ; 
»  elle  est  un  peu  adoucissante,  belle,  répandant  une  odeur  dé- 
»  licate  :  mêlée  avec  la  partie  humide  du  foie  de  bouc ,  séchéc 
»  et  réduite  en  poudre  très- fine,  on  s'en  sert  comme  d'un  col- 
»  lyre   pour   faire  cesser  l'obscurcissement  de    la  vue.   «<  ^jj~^ 

_j*^\  0^x^=3   Lit^jj  lajJ^  lifj  f-^S^  *^v  '_>ry*^  tJoXa  fS^\ji 

p.  T2J,  /.  /j?.  Cette  phrase  est  du  Coran,  IJCXVI,  /.  \'oici 
ce  que  dit  Beïdhawi  sur  le  mot  J^^^  '■  S^-r^j    *^J^J  ^--L><^ 

«  Le  camphre  est  cité  ici  à  cause  de  sa  vertu  rafraîchissante  ,  de 
»  sa  douceur  et  de  sa  bonne  odeur.  On  dit  aussi  que ,  dans  ce 
»»  passage  ,  il  s'agit  du  nom  d'une  chose  qui  se  trouve  dans  le 
»  paradis,  et  qui  ressemble  au  camphre  par  son  odeur  et  par  sa 
»  blancheur.  » 

P.  12^ ,  l.  2J.  Voici  la  glose  de  Beïdhawi  sur  le  mot  J— :^ — -wi— 

(Cor.  LXXVI,  iS)  :  L^L^  i^jJn^j  ^   j    U^Lv^'ï   ^Xj 

O^Ij^^    r*-^-^     Cil-JjJn     Ax.-y.Xwa     J  L«Xu,j   jJk..«Xw    (_j'^y^    cJ  *^ 

4^.,i>JiJo   LtLa-dj.    J^-^^^^[    0(3J  Lgix     kÀJ   iji  «o  .ii^io  LJl 

.  il ^'f  Js^L  X^  UJf  jL  ^^  VI 

«  Cette  eau  se  nomme  sababil ,  à  cause  de  la  facilité  avec  laquelle 
»  elle  descend  dans  le  gosier.  On  emploie  dans  le  même  sens  les 

"  mots  J^-^^  '  jLwL*  et  (JrvS**^  ;    c'est  pourquoi  l'on  dit  que 

P  z 


(    2->8    ) 

<  le  c->  est  ajoute  à  Ja  racine.  Par  ce  mot  on  veut  nier  que  cette 
)  eau  ait  le  piquant  du  gingembre,  et  lui  attribuer  la  qualité  con- 

'  traire  ;  d'autres  disent  que  l'origine  de  ce  mot  est  ^.-v^*-  J^ 

>  [  demande  un  chemin  ] ,  et  qu'on  a  ainsi  nommé  cette  source 

>  de  ce  nom  composé  (comme  on  a  nommé  un  poëte  l^^  JajLj"  ] , 
parce  que  celui-là  seul  boit  de  cette  eau,  qui  demande  le  chemin 
pour  y  aller,  en  se  comportant  bien.  »  Voyez  aussi,  sur  ce  mot, 

Chardin,  édit.  de  M.  Langlès,  t.  VI, p.  4^ ,  note. 

P.  I2J,  l.  2^.  Le  mot  *^^  que  j'avais  d'abord  cru  syno- 
nyme de  V— ÀwS  ne  se  trouve  pas  dans  les  dictionnaires;  d'ailleurs 
l*idée  de  mort,  même  dans  le  sens  mystique,  ne  paraît  pas  conve- 
nable ici.  On  peut  conjecturer  que  l'auteur  avait  écrit  ^cr^  cura, 
soUicitudo ,  studium  fc.  Le  sens  serait  donc  alors:  «  approchez  de 
5>  sa  maitresse  l'amant,  puisque  sa  passion  est  à  son  comble.  ■» 

P.  12^,  l  26.  Les  mots  \Jjy^j  oj^  i^^J  ^^^^  ^^  Coran, 
LXXVI ,  II. 

P.  i2j,  l.  2y.  Les  mots  \ju^  Llj-i  È^j  (^^^J  ^°^^  ^^  ^°^' 
LXXVI,  21.  Voici  comment  Beidhawi  explique  ces  mots  :  ù Jj'ï? 

«  Dieu  veut  indiquer  par  ces  mots  un  autre  genre  de  boisson 
«  qui  surpasse  les  deux  espèces  précédentes ,  et  c'est  pourquoi 
"  Dieu  est  le  sujet  du  verbe  ;  quant  à  la  qualité  de  purifiant  qui 
»  est  donnée  à  ce  breuvage  ,  c'est  parce  qu'il  purifie  celui  qui  le 
«prend,  de  toute  inclination  aux  plaisirs  sensuels,  et  de  toute 
î»  confiance  en  ce  qui  n'est  pas  Dieu ,  en  sorte  qu'il  ne  pense 
«plus  qu'a  contempler  la  beauté  ineffable  de  Dieu,  et  à  jouir 
»  de  l'union   naystique  avec  la    divinité  ,   n'existant    plus    qu'en 


(  ^'^9  ) 

»»  elle  ,  ce  qui  est  le  dernier  degré  où  puissent  pancnir  les  justes  ; 
»  et  c'est  pourquoi  Dieu  finit  par  ces  mots:  la  description  de 
»  la  récompense  des  élus.  >• 

P.  124 ,  l.  /.  On  lit  de  mcme,  dans  la  Vlll."^  séance  de  Hariri  : 

^\j  (>j;^-A-«l  o»^j  «Toutes  les  fois  qu'on  demande  (  du  collyre 
'>  à  l'aiguille  )  ,  elle  en  donne.  » 

P,  124,  L  p.  Les  mots  jtSxiLo  c^La — Lo  (>J^  (^^^-^  cvaji»  ^j 

sont  du  Coran,  LfV,  //.  Bcïdhawi  explique  les  mots   .àjc-w.    jatiL» 

par    l^jj»  ^^[SCo  j 

Après  ces  mots  le  ms.  D  intercale  six  vers,  qui  ne  me  paraissent 
pas  assez  intéressans  pour  que  j'en  surcharge  mes  notes. 

P.  124,1-  ly.  On  lit  les  mêmes  mots  dans  Isaïe  (  LXIV ,  4 ) - 

Hît'y'  "]rSiT  D'nSx  nrNn  -  nS   py  i^'TNn  nS  lyas:/  -  nS  zuSiyQi 

Et  dans  saint  Paul  ( l  Cor.  Il ,  p  ) ,  qui  ne  fait  que  citer  Isaïe  : 

Qioç  TDtç  cLyccTnocnv  oLwnv. 
P.  124,  i  24.  Au  lieu  du  mot  o«Ai»  ^  les  mss.  c  et  D  portent 


P   î 


(  23o  ) 


ADDITIONS 

AUX    NOTES. 


Jlage  j>j',  ligne  6.  Je  devais  traduire  simplement:   «  N'espère 

î)  pas  jouir  de  l'objet  de  tes  désirs.  •>•>  o^'  est  le  pi.  de  *^y^i 
res  optata. 

P.  j'j',  /.  14.  Les  mss.  portent  j-^  ,  comme  je  l'ai  imprimé  ; 

mais  il  faut  \_y^  au  duel.  Il  est  possible  que  l'on  rencontre  quel- 
ques irrégijlarités  semblables  du  langage  vulgaire  :  cependant  je 
ne  crois  pas  qu'on  en  trouve  beaucoup,  car  je  me  suis  fait  une  loi 
de  rétablir  toujours  le  texte  d'après  les  règles  de  la  grammaire. 

P.  142,  l.  8.  Je  pense  qu'on  ne  sera  pas  fâché  de  trouver  ici  des 
vers  de  Malherbe,  /,  ^  (Larmes  de  S.  Pierre),  qui  expriment  abso- 
lument la  même  idée  que  le  vers  persan  que  j'ai  cité  dans  ma  note  : 

Les  arcs  qui  de  plus  près  sa  poitrine  (  de  S.  Pierre  )  joignirent, 

Les  traits  qui  plus  avant  dans  le  sein  l'atteignirent, 

Ce  fut  quand  du  Sauveur  il  se  vit  regardé. 

Les  yeux  furent  les  arcs;  les  oeillades,  les  flèches 

Qui  percèrent  son  ame  et  remplirent  de  brèches 

Le  rempart  qu'il  avait  si  lâchement  gardé. 

P.  i4s  y  !•  ^^-  J<^  n'avais  pas  besoin  de  chercher  une  preuve  de 
mon  assertion  dans  Soyouti  ;  mon  allégorie  contient  de  même  la 
preuve  que  le  Ban  des  poètes  arabes  n'est  autre  chose  que  le  Khalaf 
[Salix  agjptiacaj .  Voici  ce  qu'y  dit  le  Ban  [  (j  V  ]  ,  p.  22,  L  /y  du 
texte  ar.  ;  (^jsl^Lk  {^^^  iT^  "  ^^  Khalaf  \  le  Ban  ]  ne  s'y  op- 
pose pas.  » 


(  23i   ) 

La  conclusion  que  je  tire  dans  mu  note  acquiert  donc  un  nou- 
veau degré  de  certitude ,  et  je  suis  toujours  plus  convaincu  de  la 
vérité  de  mon  observation.  1  outelois  le  Kamous  ne  parie  que  du 
(jl J   CLitis  unguentaruî.  Voici  ce  qu'on  y  lit ,   p.    \jz6  :  j p^ 

1\  0J9  ^>iî»3    oj^'  Jj^j  .  "   C'est  un  arbre  dont   le  fruit   a 

»>  une  graine  qui  donne  une  huile  excellente  &c.  »  Mais  à  l'article 

O»^^  /'.  i/fS,  je  trouve  une  preuve  de  plus  que  le  oûli^  est 
un  saule:  «  ]^c  khalaf,  y  est-il  dit,  est  du  même  genre  que  le 
i^  sûfsiif  (  synonyme  de  oj^  Salix  t'ahylonica ,  voyez  jy.  i4s)  > 
"  mais  non  pas  de  la  même  espèce.  On  le  nomme  C-jOiJ^  [  con- 
»  traire  ],  parce  que,  transporté  par  le  courant,  il  croit  en  sens  in- 

"  verse.  »  J-wif  ^V  l3>Mi^  ^^^  «^)  ^r^^  o  ^^-û-^'--ûJ  f  q/«  (.>i.-<s 

P.  /./7,  /,  20.  Les  mots^jL  V^j^j  i^ô^\  sont  du  C".  A',  2j. 

P.104,  l.  ip.  Comme  mes  mss.  ne  portent  pas  de  voyelles, 
on  peut  donner  plusieurs  sens  aux  mots  (J,  _>AàJ1j^^I  W'»'-^-^ 
(jljovc  Celui  que  je  leur  ai  donné  dans  ma  traduction  est  peut- 
ctre  le  plus  vrai;  toutefois  je  traduirais  actuellement  ainsi  ;  «  Je 
>»  sautille  sur  les  rameaux,  tandis  que  les  fleurs  et  le  ruisseau  sont 
»  comme  deux  lyres  qui  accompagnent  mes  acccns.  » 

P.  iSj ,  l.  II.  Je  crois  qu'il  est  bien  plus  simple  de  considérer 

le  premier  3^  comme  le  nom  d'agent  de  ^^  carpsit ,  legit,  &c. 
3^  est  pour  qL^  à  cause  de  la  rime. 


P4 


(  ?,3.  ) 


TABLE  ALPHABETIQUE 

DES  MOTS  ARABES  ET  PERSANS 


EXPLIQUES 


DANS  LES  NOTES. 


'4-.''et'0-/<rQ^i>- 


Nota.  Les  mots  arabes  sont  rangés  suivant  l'ordre  des  racines. 


I      p/^ge    2  12. 

^    "         ^  ^ 

*3(>o^|   ^    215. 
^slLjjf,   21J. 
tj>i-^^l  ,215. 

JVI,   205. 

cjLof  _j-iLoi ,  191. 

•b^  '   '35- 

^^L,  149. 
jl — ^ ,  ,64. 


'44.  145»  i4<>,  i47'  230  > 
23 1. 

o^,  20;. 

'-ij-^  ,  157. 

j J,     161. 

(3>y^L  22J. 
t^^  -  ^>y>  132. 
«^îj^,  184. 

CUiAJ",     128. 

3  j — ^  <jy^  /  1 4 1  • 

■JùJf^    20(;. 


(  ^3^  ) 

(j^'  .  '70. 
(j-^U» ,  197,  198. 


^»-a/^  ,  i4î>. 


cr^.  149. 

J^ — ft— ^.   M?- 
<»-^*-~^.  '49- 

cr>oJiJ',  ,58. 

Jùjj',    210. 

o  ,  138. 
j< — ''   '73- 

> — j»   •73- 

^^UJI  cjy  ,  J34. 

180. 
^iU  ,   ^^j,   188. 

^j^,    149- 


VJ 


ô^ 


J-,  .18. 

(j-'^ .  '3';- 
^UU  ,  .28. 

<j^''         '70- 

cx-^  ,   149- 

^,   'H'  '5^'   '^7.  ^'2. 

j^3^î  ^,    '80. 

^|j._:a..    186. 


17'. 


^l :^,    '59- 

j-*-.:^  ,    170. 
«L>^^   ,    175- 

o^j^  ,    195. 
iiia-L^  ,    161,   I  (>"]. 

J^-  OV^  J,?^'    '7 
JU_  Jl^l  ,    .30. 
qUw  -^U.,    ,32. 
^^_^^  ,    i;o 
L»ù^  ,    I  38. 

'      I  .       ..  t  . 

1_>-U2J^   —   <^^"^  ,      I  90. 
(^Lc2_i^  ,    i(^>8,    169. 

O^.  -43»   '44'   '45'  230, 
M'- 


fj^,  .5.. 

o!^,  204, 205. 

J-t-^jr?^  — >y^— >y^,  195. 

zji,  173. 

J^\  ^j^,   2... 
^    ,  .38. 
^oJ\ ,   158. 

Jy>3  ,  Z06. 

OJ-^'  '52,   i;3,  jd6. 

p^^,  '75- 

M 


{  '-34  ) 

^^J^  ,215. 
15jJLw  ^    204,    2  0). 

Jw/wwL*/,  227. 

j — -cw,    129. 

^l eu.,   ,53. 

ç>xuJl,   174. 

^tVww,     223. 


■^J,  128. 


oUj,  '53'   '5;- 
^^->t;>  '49- 

■^.>^j»   '39»   '49- 
o^j  ,   '28. 

i}-<1^j,    2  2(5. 
jl>,     '84. 

(J — )L«,  204. 

;si-^— »■,   157,    ,;8. 
O^*^  >   '9'. 
V-^'  '98. 


C-Jj^  ,    «92. 
^jjliJf  ^^^,  ,58. 

c$0-^--,  225. 

^y^ ,  218,  221. 

^         .'.  I    .'. 

^L_,^l    I  J9,      \(iQ. 

yxi—  j^L«  (j^j^*»  '58»  'S9- 
(J — cw' ,  1^6,  187,21a. 

^3j^,   i66. 
*y^  >   157* 

^,  132. 

t_>..^>g   —  (^UA^   .      199,     200- 


isjL^,    ,87,    188. 

J — t ,  179. 

*  ^ 

^y^ ,  149. 
^^,  '38.  '7^. 

*>-U3    ,     207. 

^,  .î8. 

cy^  — -^y>^  —  lW^  ,  186. 

*-<o*>«>  ,    r^.;,    140. 

^Lh*-^  ,   1^9,   \y6. 

tJ J  Le    _   fjjSLyO    _     AW  I      *3_^A» 

129,  135,  177,  181. 
^^  dJ^'  '44- 

*LJajJl   j    i(^r^. 
(j^  ,    '49- 

Jy^  ,2,^. 

(£y^'^ .  '74. 

<_j  LIii ,  19;. 

^^  ,   io;. 
^^i^,   218. 


(  '^35  ) 

.8j. 
3U,   .86. 

jy^,  iî7.  3Îy^l  ,  20J. 
^>^^  eX^  ,  '37- 

oLsi-    ^jN^  ,    180. 
IlMÏ  ,    140. 
c_j>,   143. 

Jl^^  ,    196. 

Jii^  ,  ';7- 

^LcVf  ,  .78. 

ciy-5.  «84. 
f3>,  ,40. 
^f>9,  .84. 

J^  —J^  ,    '81,    204. 
V. À 9  j    181. 

^jjJ'i^,    '49- 
J-^'.   '57- 

''JJJ^'    '9'- 

CT^  '  '70- 
^^l^',  .87. 

U^',  157. 
1^,  >;7- 


(  236  ) 


«r,^  ,   \6i,   \6y. 
Jv — 5,   129,  164. 

^j^   jûuLo,   174. 

0^ ,  226, 

J£,  215. 

'<>^y         204. 

ï^j^=D  _  Ojg^,»*^    ,217. 

(^^•'^—»     ,  130. 

<.:5Ui=3,      170. 

jiy L^ ,  227. 
J^,  128. 

^JIJ^û,     149. 

oW,   180. 

> — ;^ — ' ,  148. 

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(  238  ) 


TABLE 
DES   MATIÈRES 

CONTENUES 

DANS  CET  OUVRAGE. 


A, 


-VANT-PROPOS Page  vij 

Préface  d'Azz-eddin  Efmocaddessi i 

AllÉG.  I.^'^       Le  zéphyr 9 

II.        La  rose .-  .  12 

m.       Le  myrte 15 

IV.  Le  narcisse ij. 

V.  Le  nénufar 19 

VI.  Le  saule  d'Egypte 22 

VII.  La  violette z6 

VIII.  La  giroflée 28 

]X.       Le  jasmin 32 

X.  Le  basilic 34 

XI.  La  camomille ^6 

XII.  La  lavande 38 

XIII.  L'anémone 4' 

XIV.  La  nue 43 

XV.  Le  rossignol. . , 4) 

XVI.  Le  faucon 48 

XVII.  La  colombe 51 

XViii.  L'hirondelle S 4 

XIX.    Le  hibou 57 


{  •■'.39  ) 

AjXÉG.  X\.           Le  paon Page  6 1 . 

XXI.  La  perruche 65. 

XXII.  La  chauve-souris 69. 

XXIII.  Le  coq 7j. 

XXIV.  Le  canard 75. 

XXV.  L'abeille 78. 

XXVI.  La  bougie 81. 

xx\'ii.     Le  papillon 83. 

XX VIII.  Le  corbeau 87. 

XXIX.  La  huppe 91. 

XXX.  Le  chien 98. 

XXXI.  Le  chameau ici. 

XXXII.  Le  cheval 103. 

XXXIII.  Le  loup-cervier 107. 

XXXIV.  Le  ver-à-soie i  i  o. 

XXXV.  L'araignée 113. 

XXXVI.  La  fourmi 116. 

xxxvu.  Le  griffon 119. 

NOTES. 


Préface  d'Azz-eddin  Elmocaddessi 
AllÉg.I.^*=  Le  zéphyr 

II.  La  rose 

III.  Le  myrte 

IV.  Le  narcisse , 

V.  Le  nénufar 

VI.  Le  saule  d'Egypte 

VII.  La  violette 

AMI.         La  giroflée 

IX.  Le  jasmin 

X.  Le  basilic 

XI.  La  camomille  .  .  . 

XII.  La  lavande 

XIII.  L'anémone 


27. 

3'- 

33- 
3^. 

38. 

41. 

42. 

48. 

49- 
5'- 
53- 
5S' 
>^. 

;9- 


AlLÉG.  XIV. 
XV. 
XVI. 
XVII. 
XVIII. 
XIX. 
XX. 
XXI. 
XXII. 
XXIII. 
XXIV. 
XXV. 
XXVI. 
XXVII. 


(  240  ) 

La  nue Pimc 

Le  rossignol 

Le  faucon 

La  colombe 

L'hirondelle 

Le  hibou 

Le  paon 

La  perruche 

La  chauve-souris 

Le  coq 

Le  canard  

L'abeille 

La  bougie 

Le  papillon 


XXVIII.  Le  corbeau, 

XXIX.  La  huppe .  . 


XXX.  Le  chien 

XXXI.  Le  chameau 

XXXII.  Le  cheval 

XXXIII.  Le  îoup-cervier 

XXXIV.  Le  ver-à-soie 

XXXV.  L'araianée 

XXXVI.  La  fourmi 

XXXVII.  Le  griffon 

Additions  aux  notes 

Table  alphabétique  des  mots  arabes  et  persans  expliqués  dans 

les  notes 


6i. 
63. 
64. 
65. 

68. 
69. 

70. 

73- 

78. 
179. 

81. 

83. 

84. 
M. 

91. 
201. 
205. 
207. 
210. 

2  I  T. 
214. 
217. 
218. 


232. 


FIN. 


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